Vous êtes sur la page 1sur 2

Séquence La satire du souverain et des nobles, du Moyen Age au XVIIIè siècle

Texte n°1 : Rutebeuf, « Renart le Bestourné1 » (1261)

Mécontent des décisions prises par le roi Louis XI sous l’influence des ordres mendiants
(ordres religieux qui prônent l’austérité mais qui, paradoxalement, s’enrichissent), Rutebeuf
reprend les personnages du Roman de Renart* pour dénoncer la crédulité des rois, séduits par
de mauvais conseillers. Renart est un moine à la cour du roi Noble le lion.

* Pour en savoir plus sur le Roman de Renart, consultez la page suivante de la BNF :
http://classes.bnf.fr/renart/arret/02_1.htm

Renart est mort, Renart est vivant2,


Renart est abject, Renart est vil3,
Et Renart règne !
Renart règne depuis longtemps sur le royaume ;
Il y chevauche à loisir les rênes lâchés,
Au grand galop.
Le bruit court qu’on l’aurait pendu
C’est du moins ce que j’avais entendu,
Mais, à dire vrai, il n’en est rien :
Vous le comprendrez bien vite.
Il est le maître de tous les biens
De Monseigneur Noble,
Et des champs et des vignes.
À Constantinople4,
Renart a tout bien manigancé,
Dans les maisons comme dans les caves. Dans la Bible, des pêcheurs quittent tout
Il n’a même pas laissé deux navets pour devenir les premiers compagnons de
À l’empereur : Jésus.
Il en a fait au contraire un pauvre pécheur ;
Encore un peu plus, et il en faisait un pêcheur Il ne faut pas confondre le pêcheur avec le
De pleine mer5. pécheur, celui qui commet des fautes.
Il n’y a rien à aimer6 en Renart Dans la vision chrétienne, tout le monde
Car Renart n’est rien d’autre qu’amer6, est pécheur dès la naissance, et tout
C’est sa façon d’être. […] chrétien doit ensuite chercher le salut,
Renart est propre à déclencher une guerre c’est-à-dire être sauvé par Dieu.
Dont le pays
Ne pourrait pas se relever.
Monseigneur Noble le lion
Est persuadé que son salut
Dépend de Renart.
En fait, pas du tout ; qu’il s’adresse plutôt à Dieu !
J’ai bien peur qu’il ne récolte au contraire
Préjudice et honte.

1. Qui a mal tourné.


2. Parodie des paroles prononcées lors de la messe : « Christ est mort, Christ est ressuscité /
vivant ! »
3. Mauvais, infâme.
4. Capitale du royaume de Noble.
5. La condition de pêcheur en pleine mer était particulièrement dangereuse et pénible au Moyen
Âge.
6. En ancien français, « aimer » et « amer » s’écrivaient « amer ».
Texte écho : Clément Marot, Epigrammes, « D’un curé » (1538)

Au curé, ainsi comme il dit,


Plaisent toutes belles femelles,
Et ont envers lui grand crédit,
Tant Bourgeoises que Damoiselles ;
Si lui plaisent les femmes belles
Autant qu’il dit, je n’en sais rien ;
Mais une chose je sais bien,
Qu’il ne plaît pas à une d’elles1.

1. Pas à une seule d’entre elles.

Maître du Lat, Renart en habit franciscain devant Noble le lion, 1290 - 1300, enluminure du
manuscrit Renart le Nouvel, 7,5 × 7,5 cm, BnF, Paris.

Questions sur le texte


1- Le poème se présente en différentes étapes. Complétez le schéma suivant :
v.1 à 3 :
v.4 à 6 :
v.7 à 10 :
v.11 à 21 :
v.22 à 24 :
v.25 à 30 :
v.31 à 33 :
2- Pour quelle raison Rutebeuf a-t-il procédé ainsi ? (Il s’agit de montrer l’intérêt des différentes
étapes)
3- Quelle image est donnée du Renart ? du lion ? (Pour répondre, utilisez des procédés
d’analyse, comme les champs lexicaux, les figures de style…)
4- Que représente « Monseigneur Noble le lion » ? « Renart » ? (Justifiez votre réponse en
citant le texte)
5- Qui est visé dans ce texte ? Que lui reproche l’auteur ?
6- Après avoir cherché la définition d’une satire, vous montrerez que ce texte en est une.
7- Lisez le texte écho de Marot (situé en haut de cette page). Quels liens pouvez-vous établir
avec le poème de Rutebeuf ?

Vous aimerez peut-être aussi