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Quand les araignées pleurent

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Category: Gen
Fandoms: The Avengers (Marvel) - All Media Types, Marvel Cinematic Universe,
The Avengers (Marvel Movies), Spider-Man - All Media Types
Relationship: Peter Parker & Tony Stark
Characters: Peter Parker, Tony Stark, Stephen Strange
Additional Tags: Peter Parker Needs a Hug, Hurt Peter Parker, Tony Stark Acting as Peter
Parker's Parental Figure, Protective Avengers, Alternate Universe,
Alternate Universe - Time Travel, Time Loop, Angst with a Happy
Ending
Language: Français
Stats: Published: 2021-12-15 Completed: 2023-11-10 Words: 52,142 Chapters:
13/13
Quand les araignées pleurent
by TianaLanster7

Summary

Le temps paraît illusoire à l’intérieur d’un labyrinthe. Peter en savait quelque chose… Car le
labyrinthe dans lequel il fut accidentellement enfermé était une boucle temporelle.
Labyrinthe

Quinze mars 2016. Une journée comme une autre dans la ville de New York : le ciel azur
était dénué de nuages, et les rayons du soleil illuminèrent les fenêtres des buildings
titanesques. Manhattan demeurait le quartier le plus bruyant et actif de la mégalopole, avec
son ballet incessant de voitures et la marée humaine de salariés qui occupaient l’intégralité
des espaces piétons, tandis que les autres arrondissements furent quant à eux plus calmes et
paisibles. Le Queens était particulièrement tranquille en ce jour de semaine ; étant donné que
tout le monde partit travailler au quatre coins de la région, presque personne ne circulait dans
les rues, si bien que l’on entendait davantage le chant des oiseaux que les transports.

Au nord-ouest du district, proche d’une zone industrielle peu fréquentée par le public,
reposait un cimetière d’autobus. La majorité des carcasses qui s’amoncelaient les unes sur les
autres jusqu’à en former des montagnes étaient des véhicules anciens devenus hors d’usage
ou victimes d’accidents de la route, dont les couleurs délavées et la poussière qui les
recouvraient attestent de leur vétusté. Certaines d’entre elles manquaient de leurs roues,
d’autres de leurs portières ou de leurs fenêtres, ne laissant derrière elles que leur coque
originelle. Il arrivait parfois que des restes de voitures lourdement endommagées et calcinées
s’y échouent, vestiges des batailles qui opposaient les Avengers à une menace humaine ou
surnaturelle. Il régnait au cœur de ce cimetière une aura immuable, presque ineffable… Les
amas de décombres avaient une taille infiniment plus petite que les gigantesques immeubles
de plusieurs étages qui composaient la Grosse Pomme, mais elles demeurèrent imposantes
pour tout humain qui passe à côté de la décharge.

Peter aime cet endroit. Cela faisait un bon moment qu’il a appris l’existence de ce site grâce à
ses patrouilles, et bien que ce lieu soit supposé être interdit d’accès aux civils, une brèche au
pied d’un des murs en grillage permettait de s’aventurer librement ici sans attirer l’attention.
Ainsi, le jeune homme pouvait aller et venir au cimetière des autobus comme bon lui
semblait à n’importe quel moment de la journée, que ce soit sous sa vraie identité ou celui de
son alter-ego superhéroïque. Il se sentait tranquille au milieu de ces totems métalliques,
immobiles et silencieux… Personne ne le dérangeait, et il n’importunait personne. Il n’y avait
que lui, assis sur le toit d’un bus en contemplant le vide d’un regard fatigué et dépourvu
d’émotion, et la solitude de ce petit monde détaché de toute notion de réalité.

Cependant, contrairement à ces soupapes pour lesquelles le temps fut figé dans la rouille,
celui de Peter fut emprisonné à l’intérieur d’un sablier.

Les teintes grises et ocre qui l’entouraient lui rappelèrent les innombrables débris flottants de
la planète morte qu’était Titan ; son atmosphère cendrée et irrespirable, la lueur du coucher
de soleil révélant la grandeur des ruines de ce qui fut autrefois une civilisation prospère… Et
la nuit noire qui surplomba l’immense champ de bataille lors de l’affrontement entre les plus
grands héros du cosmos et Thanos, le Titan Fou. Le jeune homme se souvenait parfaitement
de ce combat, ainsi que de tous les événements qui se sont produits avant ce jour, dans les
moindres détails… Car ce fut le dénouement de ce conflit qui dérégla les rouages de son
destin et le plongèrent dans ce cauchemar éveillé.
Avant ce chaos, il était simplement Spider-Man, la petite araignée sympa du quartier du
Queens. Un adolescent geek de quinze ans, orphelin de famille excepté de sa tante May,
parmi les étudiants les plus brillants de Midtown High, s’étant retrouvé par hasard détenteur
de pouvoirs surhumains suite à une morsure d’araignée génétiquement modifiée lors d’une
sortie scolaire à Oscorp. Au début perdu lorsqu’il a pris conscience pour la première fois de
son métabolisme altéré, ce fut après la mort de son oncle Ben qu’il n’a malheureusement pas
pu empêcher que Peter décida de prendre la voie du superhéroïsme et de protéger les citoyens
de New York. En plus d’arrêter le crime partout en ville, il aide toute personne dans le besoin
sans porter d’importance au problème, notamment ceux qui vivent dans une situation précaire
comme lui. La popularité de Spider-Man auprès du public demeurait assez faible en
comparaison des Défenseurs de la Terre, mais Peter ne s’en préoccupa pas. Il n’aspirait pas à
plus que ce que ses pouvoirs lui permettent d’accomplir.

Puis un jour, lors d’un après-midi d’avril où il rentra des cours, il aperçut quelqu’un discuter
calmement avec May… Quelqu’un qui se révéla être Tony Stark, son héros d’enfance qui lui
a sauvé la vie lorsqu’il était enfant lors de la Stark Expo. Dire que Peter ne s’attendait pas à
voir son idole chez lui serait un euphémisme… Jamais il n’aurait imaginé que sa route
croiserait celle d’un homme aussi important et exceptionnel que lui. D’autant plus que, fidèle
à sa réputation de génie, le milliardaire a découvert l’identité de Spider-Man en regardant
simplement quelques vidéos YouTube montrant les actions héroïques du jeune homme et
effectué après coup des recherches remontant jusqu’à Peter Parker. Face à sa confusion par
rapport à sa venue, Tony lui a alors affirmé qu’il avait besoin de son aide pour immobiliser
Captain America et une partie des membres des Avengers à Berlin à cause d’une situation qui
aurait mal tourné, sans préciser davantage les détails de ladite situation… À l’époque, le
garçon araignée ignorait tout de la complexité des Accords de Sokovie, ni même que ce
projet gouvernemental existait, et il a donc accepté de répondre à la demande de son héros en
toute innocence de cause. Comme il s’en doutait, il fit pâle figure à côté de ces adultes
expérimentés et bien plus forts que lui ; il aura tenu quelques minutes tout au plus face à
l’équipe adverse, et la fin de leur Guerre Civile résultera quelques semaines plus tard à la
séparation des Avengers.

Suite à ce combat, Peter et Tony continuèrent à se revoir occasionnellement à la Tour grâce


au contrat de stage qu’ils ont inventé auprès de May afin que le jeune homme soit supervisé
et entraîné pour devenir un meilleur superhéros. Si leurs interactions se limitaient au départ à
quelques heures à certains jours de la semaine dans un cadre strictement professionnel, un
lien se forma petit à petit entre les deux hommes au fil des mois : le génie s’attacha à la
gentillesse et la vivacité d’esprit de l’adolescent, et un sourire apparut à chaque fois sur son
visage quand Peter parlait de ses passions ou lui racontait ses comptes-rendus de patrouille.
En voyant combien il le portait en haute estime, Tony fit en sortes d’être un mentor digne de
son admiration en s’assurant du bien-être de son interne en toutes circonstances et en l’aidant
à ne pas commettre les mêmes erreurs que lui. Peter, quant à lui, se sentit fier et ravi qu’Iron
Man lui accorde sa confiance et garde un œil protecteur sur lui, que ce soit en tant
qu’individu ou en tant que Spider-Man. Le milliardaire prenait toujours le temps de
complimenter son intelligence lors de leurs sessions de laboratoire ou leurs entraînements, le
recadrait lorsqu’il agissait avec imprudence et le réconfortait lorsqu’il passait une mauvaise
journée. L’attention particulière de l’adulte à son égard alla progressivement au-delà de celle
d’un professeur envers un étudiant, et le jeune homme retrouva une forme de bonheur qu’il
pensait avoir perdu à jamais après la mort de son oncle. Un souffle nouveau apparut dans son
quotidien, et telle une mouette auparavant blessée, il parvint à lentement guérir et à reprendre
son envol.

… Mais ce n’était que pour mieux s’écraser au sol.

À l’aube de 2018, alors qu’une paix fragile revint sur la planète bleue après les Accords de
Sokovie et la Guerre Civile des plus grand héros de la Terre, une nouvelle menace venue de
l’espace mit un terme brutal à cette période de tranquillité. Peter était à ce moment-là dans un
autobus, partant vers un lieu de visite en dehors du Queens pour une sortie scolaire. En se
rapprochant du centre de New York, le sens de l’araignée de l’adolescent se réveilla pour le
prévenir d’un danger imminent, plus grand encore que tous les criminels qu’il a affrontés
jusqu’à présent. Un simple coup d’œil à travers la fenêtre du véhicule lui fit comprendre la
gravité de la situation… Un immense vaisseau spatial circulaire surplombait la mégalopole,
dont la taille fut si démesurée que les buildings de la ville ressemblaient à des brindilles
d’herbes à côté de lui. Peter fut sous le choc en voyant le cercle de métal transperçant le
ciel… Tony lui avait longuement parlé du combat qu’ont mené les Avengers contre Loki et
son armée de Chitauris, ainsi que des dangers liés aux armes extraterrestres, et il lui a
fermement déconseillé de se confronter à des monstres de ce calibre car il demeurait encore
un superhéros inexpérimenté dans ce domaine. Le jeune homme était conscient qu’il ne
devait pas se mêler à une affaire qui le dépasse… Seulement, il ne pouvait pas rester inactif
alors que des innocents avaient besoin d’aide. Peter n’hésita pas une seconde à enfiler son
costume de Spider-Man et parvint à rejoindre à temps son mentor durant son affrontement
avec Cull Obsidian, l’un des quatre généraux de Thanos.

Le combat devint rapidement hors de contrôle, et avant qu’il ne puisse s’en rendre compte, il
se retrouva en tant que passager clandestin avec Iron Man et un sorcier du nom de Docteur
Strange à l’intérieur du vaisseau spatial, voyageant à travers l’espace jusqu’à la planète Titan.
Bien qu’il ne comprenne à ce moment-là que la moitié de ce que les deux adultes se
racontaient, Peter fut certain d’une chose : l’adversaire qu’ils s’apprêtaient à combattre
appartenait à une ligue différente du dieu de la malice ou de tous les ennemis que les
Défenseurs de la Terre ont arrêtés durant plusieurs années. Ce n’était pas simplement le sort
de l’humanité qui reposait sur leurs épaules, mais celui de l’univers tout entier. S’ils voulaient
empêcher des trillions de vies de s’éteindre en un claquement de doigts, ils n’avaient pas
d’autres choix que de retirer au Titan Fou les Pierres d’Infinités qu’il détenait et le tuer.

À leur arrivée sur Titan, les trois superhéros trouvèrent des alliés improbables sous la forme
des Gardiens de la Galaxie, avec les membres respectifs Star Lord (de son vrai nom Peter
Quill), Mantis et Drax, un groupe de mercenaires interstellaires dont les actes héroïques
furent pour la plupart plus accidentels qu’intentionnels. Si leur première interaction fut plutôt
mouvementée et peu propice à la discussion du fait de l’apparente impulsivité de deux des
aventuriers de l’espace, leurs désirs de sauver le cosmos concordèrent ensemble et ils
décidèrent finalement de s’unir pour défaire le colosse. Malgré sa résistance physique
terriblement élevée, les connaissances galactiques des hors-la-loi et les capacités versatiles
des Défenseurs de la Terre leur permirent de tenir tête à Thanos pendant de longues minutes,
usant de ruse et de feintes pour l’affaiblir avant de l’immobiliser avec les pouvoirs
psychiques de Mantis afin de lui enlever le Gant de l’Infini. Leur plan marcha, et le groupe de
héros furent sur le point de soutirer l’arme dorée hors de la main gauche du tyran… Jusqu’à
ce qu’il révèle en un murmure le nom de sa fille adoptive Gamora ainsi que son sacrifice pour
obtenir la Pierre de l’Âme. Quill, en apprenant la mort de celle qu’il aime au nom d’un idéal
sanglant, perdit alors toute raison et frappa violemment Thanos au visage dans un accès de
rage pure, réveillant d’un seul coup le Titan Fou. À cet instant, l’espoir d’une possible
victoire s’évapora pour les Avengers, tombant par la suite les uns après les autres face aux
puissantes attaques du colosse. Dès lors qu’il mit la main sur les six Pierres d’Infinité après
cette guerre d’une seule journée, le glas sonna pour la moitié de la population de l’univers,
qui disparut en un nuage de poussières grises.

Peter serra une des manches de sa veste en repensant à cette issue funeste… Son sens de
l’araignée lui hurlant que quelque chose n’allait pas, la sensation que son corps agonise de
l’intérieur, ses moindres atomes s’abandonnant à devenir de la cendre, ses pouvoirs luttant
désespérément pour arrêter le processus de désintégration mais qui ne firent que vainement
ralentir l’inévitable, accentuant la douleur de sa mort… Sa chair et son esprit se
remémoraient de cet horrible sentiment avec une extrême clarté. Il ne pouvait rien faire
contre ce sort, si ce n’est attendre que la faucheuse arrive pour abréger ses souffrances.
Quand il sentit que son métabolisme cessa toute rébellion, le jeune homme comprit que
c’était la fin. Il eut tout juste assez de forces pour s’excuser auprès de celui qu’il considérait
comme une nouvelle figure paternelle de lui causer autant de peine, de ne pas être aussi fort
qu’il le pensait, avant de fermer les yeux et de sombrer dans les ténèbres.

Au cœur de cet océan de vide, tout sens physique ou spirituelle s’estompa. L’adolescent
ignorait s’il tombait en chute libre ou s’il sombrait dans les profondeurs d’une mer d’encre
noire. Il ne savait même pas s’il disposait toujours d’une enveloppe corporelle ou s’il n’était
qu’un fragment d’âme à la dérive ayant gardé des traces de ses souvenirs humains. Le temps
y fut suspendu, abstrait, inexistant… Et puis une main attrapa la sienne, dissipant alors
l’obscurité qui l’entourait et retrouvant le sens de la réalité. Docteur Strange apparut devant
lui, et lui indiqua qu’ils doivent revenir sur Titan pour aider les Avengers à vaincre Thanos
une bonne fois pour toute. Bien que sa mémoire demeure encore un peu confuse après sa
mort, Peter n’avait pas oublié la dangerosité du tyran à la peau violette… Il a expérimenté de
lui-même les conséquences de la consécration du plan du Titan Fou ; le jeune superhéros ne
comptait pas le laisser gagner une seconde fois. Lui, le sorcier, ainsi que des milliers d’alliés
ayant péris de la Décimation, revinrent à la vie à travers de gigantesques portails dorés,
s’unissant ensemble pour mettre un terme à la plus grande menace que l’univers ait connu.

L’adrénaline du combat et le chaos ambiant du champ de bataille eut tôt fait d’aider Peter à
reprendre possession de son corps et de ses sens. Très vite, il remarqua qu’un soldat de
Thanos s’en prit à Iron Man ; il ne perdit pas une minute pour l’attraper avec ses toiles, le
tirer vers l’arrière, puis laisser Ant-Man, sous sa forme de géant, l’achever de tout son poids
tel un insecte. Leur retrouvaille fut quelque peu hasardeuse, entre les effets de la résurrection
sur le jeune homme et les cinq années qui se sont écoulés avant ce combat, mais elle n’en
était pas moins puissante pour le milliardaire, si bien que Tony abandonna toute réserve et
prit le garçon araignée dans ses bras dans un élan d’émotions intenses, geste que Peter rendit
presque immédiatement. Malgré le danger environnant, l’espace de quelques secondes,
l’adolescent se sentit pleinement vivant et en sécurité auprès de son héros. Une brève
accalmie qui n’aura pas duré longtemps…

Après plusieurs ennemis enficelés et mis hors d’état de nuire, Peter aperçut subitement le
Titan Fou dans son champ de vision. Le Gant de l’Infini et les six Pierres d’Infinités reposait
toujours sur sa main gauche et il venait de donner du fil à retordre à Thor, Captain America et
Scarlet Witch. Le garçon araignée s’interposa alors entre lui et le symbole de l’Amérique en
difficulté, arrêtant le poing droit du colosse de toutes ses forces. Thanos, contrarié par cette
interférence, balança sans effort l’adolescent à l’autre bout du terrain du poing gauche avec
l’aide de la Pierre du Pouvoir. Cependant, la gemme violette ne fut pas la seule singularité
cosmique qui entra en contact avec Spider-Man… Une lueur verte brilla brièvement sur
l’arme dorée du Titan, puis elle s’éteignit sans même qu’il ne le remarque.

Le monte-en-l’air fut sonné par l’attaque… Même s’il ne s’agissait que d’un revers de la
main visant à l’éloigner de son chemin, le superhéros crut que le coup allait lui faire cracher
le contenu de son estomac tout juste reformé. Sa guérison avancée réduisit la douleur de
l’uppercut, mais elle eut beaucoup plus de mal à réagir aussi rapidement qu’à l’accoutumée.
Il resta dans un état de semi-inconscience pendant un moment qui parut durer une éternité,
bataillant intérieurement pour se reprendre et recommencer à bouger… Lorsqu’il rouvrit les
yeux et parvint à se relever, des amas de poussières volèrent partout sur le champ de bataille.
L’armée du Titan Fou s’effondra au sol et disparut en fumée, allant des soldats les plus
filandreux aux plus imposants, et une fois que les remparts du colosse devinrent immatériels,
ce fut au tour de Thanos de les rejoindre, confrontant silencieusement sa mort avec
impassibilité et une forme de sérénité. Ce simple constat permit à Peter de comprendre que
l’univers a été sauvé… Seulement, un regard vers l’attroupement des superhéros à une
certaine zone lui fit réaliser le prix qu’il a fallu payer pour obtenir cette conclusion.

Le sacrifice de Tony.

En l’espace d’une seconde, le soulagement que ressentit l’adolescent se transforma en


effroi… Son corps se gela, au point d’en oublier toute blessure qui le recouvrait, et son visage
laissa transparaître son désespoir. Quelques minutes auparavant, son mentor l’enlaçait dans
une étreinte chaleureuse, le rassurant que tout ira bien et qu’il ne lui arriverait plus rien de
mal… Et en un temps aussi infiniment long que tragiquement court, son souffle s’est arrêté,
gisant au sol avec la partie droite de sa tête et de son torse brûlée. À en juger ses traits
immobiles et vides d’expression, Tony ne parut pas avoir souffert du contrecoup
incommensurable des Pierres d’Infinité. Ce fut une mort rapide et indolore.

Le jeune homme voulut hurler, accourir auprès de son héros sous une impulsion désespérée…
Mais son être ne répondit pas à sa volonté. Il ne put que contempler avec des yeux embrumés
de larmes la perte d’une personne qui lui était chère, dont le sort ressemblait cruellement à un
miroir du décès de son oncle.

Plusieurs semaines s’écoulèrent après la fin de cette guerre. L’annonce des funérailles du
milliardaire et des tombés au combat réveillèrent en Peter le souvenir de l’enterrement de ses
parents et de Ben, rouvrant par la même occasion des blessures profondes enfouis en son
âme. Bien vite, les fantômes des adultes qu’il a perdus au cours de sa vie hantèrent ses rêves
et lui répétèrent inlassablement leurs dernières paroles d’une voix flottante, telle une lente
litanie. Rongé par le chagrin et les regrets, ses heures de sommeil se changèrent alors
progressivement en minutes, nuit après nuit, sous le regard indifférent de la lune qui
traversait la fenêtre de sa chambre… Lorsque le jour du dernier hommage à Tony Stark et
aux soldats tombés arriva, l’adolescent ressemblait à une poupée de porcelaine : des cernes
noirs se distinguèrent sous ses yeux, ses iris étaient dépourvus de toute lumières, et son teint
parut aussi pâle que la chemise blanche qu’il portait sous son costume noir de jais. Si May
n’avait pas été là pour le soutenir durant la cérémonie, il n’aurait pas trouvé la force d’y
assister sans s’effondrer, ou même de sortir de son antre. À travers ses brèves discussions
avec les survivants de la Guerre de l’Infini, Peter se rendit compte du temps qui s’était écoulé
depuis sa mort, ainsi que tous les changements engendrés par celui-ci… La victoire des
Défenseurs du cosmos lui apparut horriblement amère en rétrospective. Certes, ils ont réussi
à vaincre Thanos et à détruire les Pierres d’Infinité, mais les Avengers n’existaient quasiment
plus. La moitié d’entre eux étaient morts, laissant leurs familles construites pendant ces cinq
ans et leurs amis derrière eux, tandis que les membres les plus anciens de l’équipe prirent la
décision de partir à la retraite. Les superhéros encore actifs se comptaient désormais sur les
doigts d’une main. L’ère des plus grands héros de la Terre semblait révolue.

Les jours passèrent et se ressemblèrent. Malgré la douleur qui serrait son cœur et son mental
au plus bas, Peter ne put se résigner à abandonner New York au crime. Il mit ses activités
superhéroïques en pause pendant une courte période pour atténuer sa peine, puis il renfila son
costume rouge et bleu afin d’à nouveau protéger sa ville. Il arrêta bon nombre de criminels
sans grande difficulté, sauvant ainsi beaucoup d’innocents de drames terribles. Sa vie reprit
lentement son cours, et retrouva une forme de routine qui lui apporta une forme de
contentement qui lui permit de continuer à avancer.

Petit à petit, une brume de chaleur s’installa à la mégalopole, et juillet 2023 arriva. Alors que
Peter rentra d’une patrouille où il ficela un petit groupe de cambrioleurs de bas étages, son
sens de l’araignée le prévint subitement d’un danger aux abords d’une ruelle, quelques rues
plus loin de son appartement. Suspectant une nouvelle attaque de bandits, l’adolescent se
précipita vers l’interstice sombre entre deux immeubles afin de stopper la menace
environnante. Il observa les lieux à droite et à gauche, le regard attentif au moindre signe de
malveillance… Soudain, avant même que le monte-en-l’air n’ait le temps d’esquisser un seul
mouvement, un objet semblant apparaître du néant transperça sa poitrine. Etait-ce un coup de
feu ? Une attaque furtive au couteau venant de l’arrière ? Il n’en savait rien, bien que la
dernière hypothèse paraissait la plus probable. Cependant, ce fut un coup horriblement précis
et instantané, exécuté sans l’ombre d’une hésitation. Le jeune homme ne sentit quasiment
rien lorsque l’arme s’extirpa de son corps, qui se laissa ensuite lourdement tomber sur le
bitume froid de la ruelle. Son costume se teinta d’un rouge sombre, tandis que sa vision se
dissipa à mesure que les aiguilles de l’horloge tournaient. Le visage de May, son meilleur ami
Ned et MJ, ainsi que toutes les personnes qu’il a aimé, se dessinèrent dans son esprit, comme
un dernier signe de réconfort, avant que l’obscurité ne l’engloutisse tout entier.

Il eut l’impression d’être en apesanteur, flottant au cœur de l’immensité de l’espace. La


dimension qui l’entourait semblait s’étendre à l’infini, à la fois à portée de main et
inatteignable. Rien ne bougea pendant un long moment, dans un silence surnaturel… Jusqu’à
ce que la gravité l’attire vers le bas. Des bruits sourds retentirent par la suite à ses oreilles, le
contact de tissu propre sur sa peau revint à lui, et une douce odeur de linge frais attira son
odorat. Le jeune homme trouva cela étrange… Les sens d’un macchabée n’étaient pas
supposés rester actifs. Le doute s’empara alors de lui, et il se risqua à essayer d’ouvrir les
yeux… Les ténèbres s’effacèrent pour céder sa place à la lumière. Sa vue fut au départ un peu
floue, puis elle redevint plus nette au bout d’une poignée de secondes. Une fois qu’il comprit
où il se trouvait, l’adolescent se redressa instantanément de stupeur ; il était dans sa chambre,
chez lui au Queens, allongé sur son lit, vêtu de son pyjama, et le cœur battant.

Peter fut secoué par cette tournure inattendue… Comment se faisait-il qu’il soit toujours
vivant ? Il se souvenait pourtant de la violence de l’arme ayant ciblé son torse, la marée
d’hémoglobine dans laquelle il baignait, la froideur de la rue… Sans parler qu’il était
inexplicablement revenu chez lui, en vêtements normaux, sans aucune trace de cicatrices
quelconques. Les questions s’accumulèrent les unes après les autres dans sa tête, sans qu’il ne
parvienne à trouver de réponses logiques à cette survie inespérée. Le jeune homme observa
alors par réflexe le réveil électrique au néon bleu qui reposait sur sa table de chevet… La date
affichée en petit à gauche de l’écran coupa son souffle.

Dix mars 2016.

Cette information eut l’effet d’un courant électrique pour le garçon araignée. Son état actuel
qui ne concordait pas avec son assassinat, Les réminiscences de tous les évènements qu’il a
vécus avant sa mort encore présentes dans sa mémoire, une date qui précédait la venue de son
héros d’enfance… Tous ces détails furent trop vifs pour n’être qu’un rêve. Même s’il ignorait
encore comment l’expliquer, Peter comprit vite qu’il était revenu dans le passé, sept ans en
arrière. Si ses suspicions apparurent correctes au bout de quelques jours lorsqu’il réentendit
ses anciennes discussions avec Ned et en remarquant que MJ gardait ses distances avec le
duo à l’école - issue qui se résoudra vers le milieu de cette année -, elles se confirmèrent
définitivement lorsque Tony vint à sa rencontre en avril, exactement de la même manière, des
mots jusqu’aux gestes. À ce moment-là, le jeune superhéros eut beaucoup de mal à retenir ses
larmes de couler devant Iron Man… Ce serait mentir de dire qu’il ne fut pas heureux de
revoir son mentor. Cependant, à mesure que les minutes s’écoulaient, son cœur s’emplit de
peur ; certes, le milliardaire et les Défenseurs de la Terre ne furent plus six pieds sous terre,
mais il en valait de même pour Thanos, dont la défaite finale n’ait acté qu’en 2023. Peter
savait désormais à quel point le Titan Fou représentait une réelle menace pour l’univers, ainsi
que la tragédie qui attendait un nombre incalculables de vies si le colosse parvient à
concrétiser son ambition… Le garçon araignée ne voulait pas que ce drame se reproduise à
nouveau.

Peter tenta alors de prévenir Tony des dangers que lui et les Avengers rencontreront s’ils
venaient à se séparer en lui révélant une partie de ses connaissances du futur, tout en gardant
bien-sûr le fait qu’il ait remonté le temps secrète afin d’éviter de paraître au mieux pour un
adolescent à l’imagination débordante, au pire pour un menteur. Malheureusement, à cause de
son âge et sans véritables preuves tangibles de ses propos, le milliardaire brossa ses
avertissements sous le tapis et ne démordit pas de son intention de le recruter temporairement
pour la Guerre Civile. Après cela, les événements se répétèrent comme la première fois qu’il
les a vécus : le combat des Avengers en Allemagne, leur dissolution, sa confrontation avec
Adrian Toomes quelques temps après, son amitié avec Tony, l’arrivée des généraux de
l’Ordre Noir sur Terre, l’infiltration dans le vaisseau spatial volant vers Titan, la bataille des
héros de la Terre et des Gardiens de la Galaxie contre Thanos sur la planète désertique qui
aurait pu se conclure par une victoire de la team New York… Une possibilité balayée au vent
au moment où Star Lord apprend que Gamora fut sacrifiée pour obtenir la Pierre de l’Âme,
amenant à sa furie qui réveillera le tyran et scellera la disparition de la moitié de l’univers.
Peter ressentit de nouveau son métabolisme lutter vainement contre son sort inévitable, et il
fut incapable de trouver la force de marcher jusqu’à Tony… Au-delà de la douleur physique,
ce fut la pensée que ce que cette défaite des superhéros va engendrer qui déchira son âme.
L’adolescent préféra alors fermer les yeux et s’effondrer au sol en attendant que les ombres
l’emportent dans les profondeurs de l’océan de vide. Docteur Strange le retrouva une
nouvelle fois après cinq ans de suspension afin qu’ils mettent définitivement un terme à
Thanos. Dans un accès de colère, Peter décida d’agir avec son instinct : à peine sorti du
portail doré qui le ramena à la vie, Spider-Man se précipita vers le Titan Fou pour l’empêcher
de s’en prendre aux Défenseurs de la Terre. S’il parvint à esquiver plusieurs de ses coups, le
jeune homme se fit pourtant rapidement stopper par une seule droite de la part du géant à la
peau violette, sans même avoir besoin du Gant de l’Infini. Quand son mental reprit le
contrôle de son corps au bout de longues minutes, il était déjà trop tard… L’univers fut sauvé
en échange du sacrifice de son mentor. À nouveau, l’adolescent dut observer l’homme qu’il
admirait et aimait comme un père mourir sous ses yeux.

Cet échec ne cessa de le hanter, même après les funérailles des tombés au combat… Il savait
ce qui allait arriver, il savait comment les combats auxquels il a participé se dérouleraient et
quelles en étaient le dénouement, alors pourquoi n’a-t-il pas pu empêcher ces tragédies
d’arriver ? Pourquoi n’a-t-il pas pu sauver les personnes pour lesquelles il vouait un profond
respect, dont certains qu’il considérait comme des proches ? Jamais Peter ne s’était senti
aussi faible et impuissant, quand bien même il a subi la pression de pilonnes métalliques
lourds d’un building effondré sur ses frêles épaules. La douleur fut bien pire que lors de la
perte de Ben, car contrairement au temps où il ne maîtrisait pas encore ses nouveaux pouvoirs
et ne put de ce fait pas arrêter les criminels qui ont tué son oncle, le jeune superhéros
possédait cette fois-ci les moyens de changer le cours des choses, quitte à y payer de son
existence pour que plus personne ne souffre des mêmes tourments que lui. Pourtant, c’était
toujours lui qui survivait, tandis que tout adulte qui entrait dans sa vie disparaissait aussi vite
qu’il n’ait apparu. Peter s’investit par la suite pleinement dans son rôle de Spider-Man, afin
de ne pas se laisser enchaîner par sa tristesse… Cependant, malgré sa prudence accrue,
l’adolescent aux cheveux bruns se fit à nouveau impitoyablement assassiné d’un coup fatal en
juillet 2023, alors qu’il se changea à quelques rues de son appartement pour rentrer chez lui.

Le monde se déroba sous son corps meurtri, son être resta immobile et anesthésié de toute
sensation, le noir aveugla sa vision… Puis les lois de la physique reprirent leurs droits. La
lourdeur de son enveloppe charnelle contrastait avec la légèreté des tissus qu’il ressentit
contre lui. Peter ouvrit d’un seul coup ses yeux et s’assit sur son lit d’un geste vif, des gouttes
de sueurs perlant sur son front. Ses mains tremblantes serrèrent fermement la couverture, son
cœur battit à tout rompre dans sa poitrine et sa respiration fut irrégulière… Ces signes
corporels lui prouvèrent qu’il était vivant, mais ce soulagement bref fut peu à peu remplacé
par de l’incompréhension et de l’effroi. L’adolescent fut certain d’avoir rendu l’arme à
gauche, alors pourquoi la mort l’a-t-elle à nouveau épargné ? Ses pensées se mélangèrent
entre elles durant plusieurs minutes, telles un tourbillon incontrôlable, puis lorsqu’il retrouva
son calme, son esprit devint blanc. Une hypothèse enfouie dans les méandres de son
inconscient remonta petit à petit en lui… Une hypothèse dont il doutait de la véracité, mais
qui prit tellement de place dans son mental qu’il ne pouvait plus l’ignorer. Peter regarda alors
d’un œil méfiant l’horloge à néon à ses côtés… La date présente sur l’écran était le dix mars
2016.
Ce simple constat fit réaliser à Peter l’ampleur de sa situation. Ce qu’il croyait être un miracle
était en réalité un labyrinthe dont il ignorait la création.

L’adolescent ne remontait pas seulement le temps. Il était prisonnier d’une boucle temporelle.

À chaque fois qu’il se faisait tué en 2023, il revenait dans le passé en 2016 pour
recommencer une boucle de deux ans et demi (étant donné que les cinq ans où il fut éradiqué
en poussières par Thanos ne comptent pas), conservant ses souvenirs de chaque timeline
après sa mort. Cela expliquait le fait que malgré la brutalité soudaine de son assassinat, Peter
se réveillait avec le corps intact et en bonne santé. Une fois le choc de cette découverte
passée, le jeune homme se demanda comment il s’est retrouvé détenteur de ces pouvoirs
temporels… À sa connaissance, Docteur Strange possédait la Pierre du Temps, et l’unique
moment où le sorcier utilisa les facultés de la gemme verte fut sur lui-même pour exécuter
des sauts dans le multivers afin de déterminer quelles étaient les probabilités de victoire pour
les superhéros, avant de céder la singularité cosmique à Thanos après leur affrontement
contre lui sur Titan. Il y avait peu de chances que ce soit les manipulations du Maître des Arts
Mystiques qui lui aient octroyés ces capacités de voyageur temporel. Cela ne laissait alors
qu’une seule autre entité capable de contrôler les Pierres d’Infinité selon sa volonté… Le
Titan Fou. Le scénario le plus plausible soit que lorsque le colosse frappa Spider-Man avec le
Gant de l’Infini et la Pierre du Pouvoir durant leur toute première courte confrontation, la
Pierre du Temps s’était elle aussi manifesté et que les puissances combinées des deux
gemmes lui ont conférés le pouvoir de revivre une certaine période d’années s’activant après
sa mort. Pourquoi la relique émeraude s’est-elle allumée à cet instant ? Pourquoi à une date
précise de 2016 et pas plus avant ou plus proche de la Guerre de l’Infini ? Peter n’en eut
aucune idée, et il a cessé de chercher des réponses à ces questions depuis longtemps.

Dès lors que le garçon araignée prit conscience de ses nouvelles habilités, il essayera à
plusieurs reprises de contrer les contingences qui conduiront à la décimation de la moitié de
l’univers puis du sacrifice d’une partie des Avengers afin de renverser ce sort. Personne ne
méritait de souffrir de drames comme celui qu’il a connu avec Ben, que ce soit des inconnus
comme ses êtres chers, ainsi que les Défenseurs de la Terre et les Gardiens de la Galaxie. Il
ne voulait plus que ce genre d’issue sinistre survienne devant lui sans se donner corps et âme
pour les contrecarrer.

Il essaya dans une boucle de convaincre à nouveau Tony lors de leur rencontre que se battre
contre ses propres camarades n’était pas une solution viable sur le long terme, surtout si de
futures menaces du niveau de l’invasion des Chitauris arrivaient… Malheureusement, son
statut d’adolescent jouait en sa défaveur, et le cours des événements demeurait presque
inchangé. Cette boucle se termina encore par la mort de nombreux héros et son assassinat.

Il tenta dans une autre de se confier à un autre Défenseur de la Terre afin d’empêcher certains
dénouements spécifiques de se produire, dont les conséquences pouvaient résulter en des
blessures graves ou leurs propres morts… Peu d’entre eux prirent ses avertissements au
sérieux, et les tragédies se perpétuèrent. Encore une boucle d’échouée.

Sous une impulsion mélangeant instinct et panique, Peter se risqua à arrêter lui-même Star
Lord de frapper Thanos lors de leur combat sur la planète morte… Un échec cuisant, car soit
le leader des Gardiens le repoussaient violemment et itéra tout de même le geste, soit le tyran
se réveillait en dépit de sa retenue de Quill. À nouveau, le voile de la mort recouvrit ces
boucles.

Dans une nouvelle boucle, il voulut parler de la boucle temporelle à Docteur Strange dans le
vaisseau spatial, étant donné qu’une personne touchant à la magie au quotidien serait plus à
même de le croire qu’un scientifique ou un espion… La Guerre de l’Infini ne lui donna
malheureusement aucune occasion de lui muser ses craintes, que ce soit au Sanctuaire II ou
sur Titan. Même quand il parvenait à approcher le sorcier lors d’un nouvel essai, ce dernier
ne lui accordait aucun réel temps de discussion à cause de l’urgence, l’instabilité et la
dangerosité du conflit contre le Titan Fou. Chacune d’entre elles finirent par des combattants
tombés et son sang colorant le ciment.

Ce voyage au-delà des aiguilles de l’horloge se transforma alors petit à petit en cauchemar
pour le jeune homme… Malgré sa mémoire photographique qui lui permettait de se rappeler
et d’apprendre de ses précédentes tentatives, malgré sa volonté sincère de sauver les
personnes auxquelles il tient, malgré son ingéniosité le rendant capable de trouver rapidement
des solutions en cas d’urgence, Peter ne parvenait pas à éviter les tragédies de se jouer. À
mesure que les déconvenues se succédèrent les unes après les autres, le désespoir et les
cicatrices s’accumulèrent dans l’âme de l’adolescent… Les caresses sur la tête et les
tapotements d’épaules que lui offrit Tony devinrent horriblement douloureux après avoir
assisté autant de fois à ses funérailles, l’attention que lui portaient de temps en temps les
superhéros qui le croisait lui fit ressentir un immense désarroi car c’était probablement le seul
moment qu’il les côtoyait avant qu’ils ne trépassent, et toutes ses initiatives de garder un
semblant d’équilibre dans sa vie lui fut systématiquement retirées avec froideur et sans
aucune pitié. Peu importe combien il luttait contre cet invisible courant vert et qu’une berge
apparaissait pour qu’il s’y agrippe, ce dernier l’emportait toujours violemment dans ses
vagues sans possibilité de remonter à la surface.

Au bout d’une dizaine de répétitions à sombrer dans les ténèbres sans que ses efforts ne
semblent payer, la fatigue et la résignation a fini par consumer le cœur de Peter. Il était épuisé
de revoir la date du dix mars 2016 apparaître sur son réveil, car cela lui rappelait avec
amertume toutes les timelines perdues qu’il a traversé ainsi que son meurtre similaire à celui
d’un chien errant sans défense. Tous les sentiments qui brûlèrent en lui d’une lueur
incandescente se sont éteints lorsqu’il comprit que ses désirs et sa volonté ne valaient rien
contre la réalité.

"Tu as choisi d’être un superhéros. Dès lors que tu as fait ton choix, tu ne peux plus revenir
en arrière. Ton devoir passera toujours avant tes souhaits. Tu ne peux plus prétendre à un
bonheur comme celui que tu as eu avec tes parents et ton oncle. Tu ne peux compter que sur
toi-même en tant que Spider-Man". Voilà ce que le destin lui murmurait au travers de cette
boucle temporelle, tandis que ses larmes tombaient sur ses plaies.

Le jeune homme a retenu la leçon.

Il a accepté à contrecœur que le sacrifice de Tony et des Avengers étaient inévitables. De


toute façon, qu’il soit présent ou non lors de la Guerre de l’Infini, il était persuadé que cela ne
changerait rien au dénouement du conflit. Il était le héros protecteur de New York et rien
d’autres. Il n’avait pas le droit d’avoir une nouvelle figure parentale ? Qu’il en soit ainsi. Sa
seule famille était May, et ses seuls amis étaient Ned et MJ. C’est tout.

Son seul objectif était désormais de passer le mois de juillet 2023. Peter ignorait tout de son
meurtrier, que ce soit son identité, sa méthode d’exécution et même son mobile… Dans le
genre des mystères, en tant que détective, il devrait découvrir le "qui a commis le crime",
"comment il a commis le crime" et "pourquoi il a commis le crime". La seule chose qu’il
sentait avant de mourir fut un objet tranchant lancé à grande vitesse droit vers son cœur, trop
imposante pour être un tir de pistolet et plus longue qu’un poignard. À chaque fois, le coup
survenait dans un angle mort que son œil ne pouvait détecter, ce qui laissait supposer qu’il
devait s’agir soit d’un guet-apens soit d’une attaque à longue distance. Ces indices
demeuraient trop vagues pour qu’il puisse confirmer une de ces pistes… Il ne savait même
pas si survivre à l’été 2023 lui garantissait de sortir de la boucle temporelle. Cependant, ce fut
la seule chose qu’il lui restait, en plus de Spider-Man.

Il se laissait encore un peu de temps pour essayer de vivre au-delà de cette année décisive.
S'il ne parvient pas à briser les chaînes qui le retiennent d'avoir un futur…

Dans ce cas, il disparaitra lui-même dans les abysses.


Un jour comme un autre

Les rues du Queens arborèrent les couleurs de l’aube en ce mercredi vingt-trois mars. Pour
les lycéens de Midtown High, c’était une banale matinée de cours ; les esprits demeuraient
encore embrumés par le sommeil, mais la présence de leurs camarades les revigore vite, et il
ne fallut pas longtemps pour que les couloirs de l’école soient envahis par une marée de voix.

Peter et Ned attendaient devant la porte de leur salle d’informatique au premier étage, le dos
collé au mur et leur sac à dos à leurs pieds. Le garçon à la peau ébène somnola un peu, donc
il se frotta régulièrement les yeux afin de rester éveillé. Ils étaient venus plus tôt que
d’habitude pour ranger tranquillement certaines de leurs affaires dans leurs casiers, puis ils
sont directement partis s’éloigner de tout regard. Ce fut leur rituel, un mécanisme perpétué
depuis qu’ils se connaissent. Ils avaient beau obtenir tous les deux d’excellentes notes et
disposés de nombreuses compétences, le simple fait d’être fan de culture populaire fut
suffisant pour que des petits groupes d’élèves les prennent de haut et se moquent de leurs
centres d’intérêts derrière leurs dos. Le superhéros araignée trouva cela bien ironique, étant
donné que les bribes de discussions qu’il entendait de part et d’autres dans les allées furent
bien plus puériles et superficiels que les leurs.

Peter laissa échapper un soupir… Contrairement à ses camarades qui ignoraient ce qu’ils
allaient apprendre dans la journée, le jeune homme connaissait à l’avance les sujets et les
déroulés des cours. Les thèmes étudiés, la durée des leçons sur les semaines, les exercices
proposés, les réponses aux questions des enseignants et auxdits exercices… Ce fut
systématiquement la même rengaine. Sa vie scolaire restait exactement identique dans toutes
les timelines qu’il a vécus. Cela l’a grandement aidé à s’améliorer dans des matières où il
était un peu plus faible que les autres et à ajuster parfaitement son métabolisme amélioré pour
qu’il puisse donner le meilleur de lui-même en sport et en décathlon sans éveiller les
soupçons sur ses pouvoirs. Cependant, comme son quotidien à Midtown High se répétait telle
une vidéo en rembobinage constant, Peter devait réécouter ses professeurs narrer leurs cours
qu’il a déjà entendu plusieurs fois en tant que voyageur temporel, tout en gardant le masque
de l’étudiant prodige attentif et peu bavard afin que personne ne prête attention à lui. Ses
journées lui parurent alors horriblement longues, et l’atmosphère factice et étouffante qui
régnait entre les murs du lycée le fatiguait encore plus qu’une nuit de patrouille. La seule
raison qui le poussait à continuer à y aller malgré sa lassitude fut Ned et MJ ; les
conversations et les blagues foireuses de son meilleur ami parvenaient toujours à dessiner
l’ombre d’un sourire sur ses lèvres, tandis que la jeune fille appréciait sincèrement le duo
malgré son caractère détaché.

Au bout d’un quart d’heure de silence, les portes d’accès à l’étage émirent soudainement un
grincement. Peter tourna la tête en direction de la source du bruit, et il aperçut la silhouette de
Flash à l’autre bout du couloir. Il n’y avait rien d’anormal à sa présence, étant donné qu’il
assistait aux mêmes cours que les deux amis. Toutefois, en l’observant attentivement,
l’adolescent aux cheveux bruns remarqua quelque chose de différent par rapport au nouvel
arrivant : son visage ne montrait aucun signe de vanité ou d’arrogance. Au contraire, il
paraissait morose et renfermé. Ce caractère étrange intrigua le monte-en-l’air… D’ordinaire,
Flash ne manquait jamais une occasion d’afficher son statut d’héritier d’une riche famille à
qui lui accorde une partie de son temps. Beaucoup fermaient les yeux sur ses résultats somme
toute moyens et son comportement égocentrique dû à son appartenance à une classe
privilégiée, car tout le monde savait qu’il possédait les moyens pour se permettre de vivre un
train de vie confortable sans être inquiété par d’éventuelles sanctions. Ici, le jeune homme au
teint basané semblait se faire le plus discret possible, comme s’il cherchait à s’isoler dans un
endroit reculé loin de tout contact humain.

Alors que Peter commençait à s'interroger sur l’attitude inhabituelle de Flash, les deux élèves
se croisèrent subitement du regard à la manière de suricates. Il y eut un moment de
flottement, durant lequel aucun d'entre eux n'esquissa le moindre geste... Puis après quelques
secondes de suspension, l’adolescent aisé tourna la tête vers la gauche, ses traits laissant
transparaître de la panique et de l'appréhension, avant de s'enfuir en direction des toilettes. Le
garçon araignée écarquilla les yeux devant la réaction inattendue de son bourreau... Ce
dernier profitait normalement de la moindre opportunité pour lui étaler sans retenue sa chance
et sa popularité, qu’importe l’heure de la journée ou le prétexte pour recevoir des piques.
Pourtant, cette fois-ci, Flash n’a pas cherché à s’approcher du duo pour les insulter ou même
à rire dédaigneusement d’eux à distance ; il a immédiatement tourné les talons à la vue de sa
principale victime de son complexe d’infériorité. Peter fut tellement surpris par ce qu’il
venait de se passer qu’il resta figé tel du marbre pendant plusieurs minutes, jusqu’à ce qu’il
sente une main se poser sur son épaule. Ce geste familier le fit brièvement sursauter, mais il
se reprit immédiatement en entendant la voix de Ned.

- Ça va, Peter ? Demanda-t-il d’un air soucieux. Quelque chose ne va pas ?

Le jeune homme prit dix secondes pour mettre de l’ordre dans son esprit, puis il répondit à
son ami :

- J’ai vu Flash arrivé à l’étage.

- Ah ouais ? Ned baillait tellement qu’il n’avait pas entendu les portes du couloir s’ouvrir ni
eut le temps d’apercevoir le gredin.

- Oui… On s’est observé de loin pendant un instant… Mais il a tout de suite détourné le
regard et est parti ailleurs.

- Vraiment ? S’exclama Le garçon à la peau brune avec stupeur, les yeux grands ouverts.

Peter hocha la tête en signe d’approbation. Ned resta silencieux, puis sa stupéfaction devint
petit à petit plus posée.

- En y repensant, ce n’est pas la première fois qu’il fait ça.

- Hein ? Le garçon araignée ne s’attendait pas à cette remarque.

- Tu l’as remarqué, non ? Flash ne s’approche plus des autres depuis le début de l’année, pas
même de nous. Son ancien groupe d’amis s’est éloigné de lui, et il reste seul et muet durant la
journée. On ne l’entend même plus parler en cours. Des bruits de couloirs ont circulés
pendant quelques jours sur ce changement de comportement de sa part, mais je n’ai pas plus
de détails sur ces rumeurs car elles ont finalement disparues assez vite.
Le jeune homme observa son partenaire du crime d’un air circonspect… Etant donné qu’il
recommençait une boucle à partir de mars, il ne possédait que de vagues souvenirs des deux
mois précédents, ce qui fait qu’il se remémore ce qu’il s’est passé avant son "réveil" par le
biais de Ned ou MJ. Il arrivait que quelques détails puissent varier entre les essais, comme
des absences de professeurs ou des tests surprises qui rajoutent des notes dans les bulletins
des étudiants, mais rien de bien distinctif. Cependant, c’était la première fois que Peter
constate un tel changement par rapport à une personne qu’il croise régulièrement.

- Heh… Du moment qu’il nous laisse tranquille et qu’on n’a plus à l’entendre parler de son
égo à tout bout de champs, je ne vais pas m’en plaindre. Continua nonchalamment Ned en
appuyant sa tête contre le mur derrière lui.

Peter ne prononça pas un mot suite à cette déclaration et détourna à nouveau le regard vers
l’autre bout du couloir, l’air pensif… Il comprenait le sentiment de son meilleur ami, et une
partie de lui fut également soulagé de ne plus être obligé de raser les murs afin de ne pas être
pris à parti par des brutes d’école à la fin des cours. Cela étant, voir le visage de Flash teinté
de tristesse ne le réjouissait pas… L’adolescent considérait l’héritier fortuné comme
quelqu’un de désagréable, voire d’irascible dans ses pires jours, mais il ne l’a jamais
véritablement détesté. Qu’est-ce qui a provoqué ce revirement de caractère ? Pourquoi Flash
s’est-il soudainement retrouvé tout seul ? Pourquoi était-il aussi maussade et prompt à rejeter
la lumière des projecteurs qu’il souhaitait auparavant s’accaparer ? Tant de questions dont les
réponses lui échappaient.

Les retentissements de la sonnerie coupèrent alors le fil de sa pensée. Le calme de l’étage


disparut, et des meutes d’élèves sortirent les uns après les autres en tintamarres de la porte
d’accès. Peter observa le couloir se remplir de monde d’un air impassible, puis il poussa un
soupir.

Encore une longue matinée qui commence.

Ainsi, les heures passèrent. À nouveau les mêmes cours, à nouveau la même tonalité de voix
des professeurs, à nouveau les mêmes thématiques que le garçon araignée connaissait
désormais sur tous les angles. Peter écrivit machinalement les leçons des enseignants avant
qu’ils ne les prononcent afin de se donner une occupation pour tromper l’ennui, tout en
gardant suffisamment d’attention pour répondre à leurs questions s’il venait à être interrogé
au détour d’une explication. Heureusement, les adultes préférèrent interpeller d’autres de ses
camarades plutôt que lui, ce qui lui permit de consacrer son temps à penser à autre chose que
sa scolarité. Dès lors qu’il finit d’écrire les enseignements du jour, il gribouilla quelques
notes au crayon sur toutes les pensées qui traversait sa tête, puis il les effaça avant d’en
réécrire des nouvelles, laissant les aiguilles de l’horloge tourner avec indifférence.

Arriva finalement la dernière matière de la journée : les mathématiques. Comme Peter s’y
attendait, son professeur interpella la classe qu’ils vont passer un contrôle surprise, puis il
distribua les feuilles aux élèves en leur annonçant que le test durera toute l’heure. Si la
plupart des adolescents apparurent bougons de subir un test juste avant la fin des cours, ils
finirent par être tous absorbé dans leurs copies au bout de quinze minutes. Le silence régna
alors dans la salle, et les seuls bruits sourds perceptibles à l’oreille furent les grattements des
stylos sur le papier. Le garçon araignée fixa la page blanche tachetée de mots d’encre sur son
bureau avec des yeux vides, sa tête reposant sur sa main gauche… Cet examen de maths
n’était pas compliqué en soi ; il s’agissait simplement d’un test de connaissance pour
s’assurer que les lycéens aient bien compris la méthodologie pour résoudre des formules
complexes. Du fait de ses souvenirs du futur, cinq minutes auraient suffi au jeune homme
pour terminer ce contrôle. Cependant, s’il redonnait sa feuille dans un laps de temps aussi
court, tout le monde se poserait des questions sur sa rapidité déconcertante, et il savait très
bien à quel point une rumeur peut très vite perdre toute proportion et se répandre telle une
traînée de poudre au sein d’un milieu friand de ragots comme l’école. Peter trouva alors une
parade : il espaça chacune de ses réponses de deux à trois minutes, histoire de retarder son
départ d’environ une demi-heure, tout en observant régulièrement quel camarade partait.
Lorsqu’il vit trois d’entre eux s’en aller et une fois qu’il fut certain d’avoir correctement
répondu aux questions, Peter rangea ses affaires, se leva et déposa sa copie sur la table de son
professeur. Il fit un petit geste discret de la main à Ned avant de franchir la porte, qui le lui
rendit en retour avec un petit sourire. Une fois sorti de la salle de classe, le monte-en-l’air
poussa un petit soupir de soulagement, puis il se dirigea vers la sortie du lycée d’un pas
décidé.

Bien. Les cours sont enfin terminés. Maintenant, au boulot. Pensa-t-il avec détermination.
Puisque May restait exceptionnellement de garde la nuit à l’hôpital, il pouvait passer le reste
de la journée en Spider-Man.

Peter déambula dans plusieurs rues du Queens, longeant les grandes avenues de
l’arrondissement jusqu’à arriver au cimetière des autobus. Il vérifia d’un œil prudent
qu’aucune présence suspecte ne l’ait suivi avant de se faufiler à l’intérieur à travers la brèche.
Une fine brise circula entre les totems métalliques, venant ainsi caresser sa peau à mesure
qu’il se rapprochait du centre de la décharge… Malgré l’odeur de rouille et les fins rideaux
de poussières qui recouvraient les véhicules vétustes, le jeune homme trouva en ce lieu un
havre de paix qui se rapproche de celui qu’il a connu il y a très longtemps de cela à la Tour
des Avengers. Ce petit terrain délimité par des grillages ressemblait à un sanctuaire sacré
honorant le passage de ces géants de métal brisés, dont la simple action d’y fouler le pied
purgeait son âme de ses tourments et de ses idées noires. Cet endroit était son royaume, sa
forteresse de solitude, son monde miniature à part de la réalité. Tant qu’il était ici, le garçon
araignée se sentait apaisé et libre de toute illusion et faux-semblant.

Au bout de quelques minutes de marche, Peter arriva devant un ancien bus scolaire : sa
couleur grise délavée et sa longueur exceptionnellement grande le distinguait des autres
carcasses de la décharge. La moitié des sièges avant ont été retirés, ne laissant que les
dernières rangées de fond de disponible pour s’asseoir. Bien qu’il ne dispose plus de ses
roues, les fenêtres et la porte sont restés en bon état, capables de s’ouvrir et de se fermer
comme bon lui semblait. Etant donné qu’il se situait aux pieds de quatre montagnes de
véhicules cassés hautes de plusieurs mètres telles des tourelles protectrices, il échappait
facilement au regard des curieux, ce qui en fit un repère idéal pour le jeune homme. Le
monte-en-l’air rentra dans l’autobus, puis il ferma silencieusement la porte derrière lui. Il
s’assit sur l’un des sièges de la banquette arrière, posa son sac à dos sur son côté gauche et
ressortit tout son contenu sur son côté droit ; son costume de Spider-Man était plié à
l’intérieur d’une protection plastique, tandis que son arsenal fut rangé dans une grande boîte.
Au fur et à mesure que les boucles se répétaient, Peter prit le temps de faire une introspection
sur lui-même en tant que superhéros : son métabolisme surhumain et sa guérison améliorée
firent de lui un excellent combattant pouvant tenir tête à des individus comme Captain
America et le Soldat de l'Hiver, mais il se retrouvait impuissant face à des êtres aux pouvoirs
magiques comme Docteur Strange ou Scarlet Witch. Ses capacités physiques ne
fonctionnaient pas contre des capacités spirituelles. Un autre point qui le handicapait durant
les combats était son absence de défense : à part ses lance-toiles, il ne possédait aucun autre
moyen de se défendre que ses poings et ses coups de pieds, ce qui le rendait particulièrement
vulnérable devant des ennemis avec des pistolets et des poignards. Ainsi, comme il disposait
de la faculté de se remémorer de ses précédentes itérations, le jeune homme usa de ce temps
illimité accordé par la boucle temporelle afin de corriger ses défauts ; il s’est créé un tout
nouveau costume ayant la même composition de matériaux que son ancien uniforme
StarkTech (sans les technologies avancées et son intelligence artificielle personnelle Karen
puisqu’il n’avait plus accès au laboratoire de Tony) et il s’est construit divers armes faites
entièrement à la main : en plus de ses lance-toiles, Peter a rajouté un bâton de combat
rétractable, des bombes fumigènes et aveuglantes, ainsi qu’un taser à sa panoplie de
superhéros. S’ensuivirent de longues sessions d’entraînements solitaires au cimetière des
autobus, à frapper les déchets de la décharge et à développer ses réflexes au maximum,
gagnant de l’expérience et apprenant de ses erreurs à chaque patrouille qu’il réalisait.
Aujourd’hui, après plus d’une dizaine de timelines et une durée incalculable d’apprentissage,
l’adolescent était devenu le gardien héroïque incontesté de New York. Son sens de l’araignée
et son instinct sont aussi affinés qu’une lame d’épée, et il pouvait désormais affronter des
groupes entiers de criminels tout seul et sans subir la moindre blessure. L’inexpérience et la
naïveté de ses débuts n’existaient plus… Peter savait maintenant comment arrêter les
menaces qui se présentaient à lui par lui-même.

Après une courte vérification de l’état de son équipement, le jeune homme enleva ses
vêtements pour les troquer contre son costume : s’il ressemblait dans la forme à celui que
Tony lui a offert dans des temps oubliés, les couleurs dominantes qu’étaient le rouge
vermillon et le bleu se sont changées en rouge carmin et noir. Il possédait de longs gants noirs
au bras, et le symbole de l’araignée ornant auparavant son torse s’affichait en grand sur une
veste à la teinte sombre sans manches et à capuche. Une fois avoir recouvert son visage de
son masque et attaché ses armes autour de sa ceinture, Peter dissimula son sac à dos sous les
sièges du bus, recouvrit entièrement les banquettes d’une couverture usée récupérée durant
une mission, puis il sortit finalement de son repère en fermant précautionneusement la porte
avant de partir vagabonder dans sa ville au bout de ses toiles.

Quelques secondes de vol suffirent pour qu’il repère trois hommes cagoulés caché dans une
ruelle se préparant à commettre un braquage dans un magasin de bijoux. Le superhéros se
posa instantanément à l’autre bout de l’allée, enleva la goupille d’une de ses bombes
fumigènes et la balança en direction des bandits. Cette dernière explosa à trois mètres d’eux,
dégageant à son impact une énorme quantité de fumée blanche. À la seconde où les brigands
furent aveuglés et désorientés par le voile aveuglant, Spider-Man s’élança vers leur direction
à pleine vitesse et les assomma un à un avec son bâton de combat, le tout dans un silence
absolu. Aucun mot, aucune plaisanterie, aucune raillerie… Rien. La discrétion et la furtivité
étaient ses meilleures armes pour vaincre ses adversaires. Il attacha par la suite les criminels
avec ses toiles et les déposèrent à l’entrée de la ruelle pour que la police se charge de les
arrêter, puis il repartit de nouveau se balancer d’un gratte-ciel à un autre à travers les
arrondissements, prêt à intervenir à n’importe quel moment.

Le soleil disparut graduellement derrière les nuages, et en un claquement de doigts, la voûte


astrale céda sa place au ciel nocturne. Peter se reposait paisiblement à l’intérieur de son
repère, de nouveau habillé en civil, recroquevillé sur un siège à côté d’une fenêtre et
observant les étoiles ; en un après-midi, il a empêché trois accidents de la route, une tentative
d’agression et deux cambriolages. Il a également aidé quelques personnes à retrouver leurs
animaux de compagnie égarés et a ramené un enfant perdu auprès de sa mère. Autant dire que
la journée fut plutôt chargée pour le superhéros araignée. Cependant, cela n’importunait
aucunement l’adolescent… Même si son optimisme et son innocence sont morts et enterrés
six pieds sous terre, il n’a jamais abandonné son empathie envers autrui. Tant que quelqu’un
avait besoin d’aide, il n’hésitait pas à lui tendre la main. Chaque vie qu’il sauvait à son
échelle, chaque sourire qui illuminait les visages des innocents, chaque accident qu’il arrêtait
avant qu’il ne se produise redonnait des petites étincelles de chaleur dans son cœur gelé.

Après une demi-heure de silence, Peter contempla son reflet sur la vitre de la fenêtre… Des
petits cernes noirs se dessinaient sur le bord de ses yeux, et ses iris prirent brièvement une
couleur verte émeraude avant de retrouver leurs teintes brunes originelles. À quand remonte
la dernière fois qu’il a dormi plus de quatre heures ? Le jeune homme ne s’en souvenait plus.
Quand son corps s’effondrait de tout son poids sur son lit lorsque la fatigue de sa double-vie
le rattrapait, son esprit était assailli de cauchemars. Il se revoyait aux funérailles des membres
de sa famille, ou bien sur Titan peu après que Tony et d’autres membres des Avengers soient
morts après le combat final contre Thanos, sans qu’il ne puisse rien faire pour contrer ces
tragédies… La simple vue de ces scènes le réveilla immédiatement avec des sueurs froides et
le cœur palpitant, et il ne parvenait plus à s’endormir après cela. Chaque fois qu’il fermait les
yeux, l’ombre de son syndrome du survivant revint le hanter et lui rappela que son existence
était étendue au prix de la vie des personnes qui lui sont chers. Peter préféra alors passer ses
nuits à écouter de la musique et à contempler le plafond de sa chambre jusqu’à ce qu’il
s’abandonne pour un court moment dans les bras de Morphée. Peu de temps après qu’il ait
recommencé des boucles, l’adolescent remarqua que ses iris arborèrent quelquefois une teinte
verte, apparaissant de manière sporadique dépendamment de ses émotions. Il fut assez facile
pour lui de relier cette couleur singulière à la Pierre du Temps, étant donné qu’il a vu
plusieurs fois la gemme cosmique entre les mains de Docteur Strange. Le jeune homme
ignorait exactement comment ce phénomène se manifestait, mais il apprit à garder un certain
contrôle sur ce dernier afin que seul lui puisse l’observer.

Peter se rendit alors compte que le mois de mars touchait bientôt à sa fin. Auparavant, il se
soucierait d’Adrian Toomes et de son identité de super-vilain… Cependant, ce ne fut plus le
cas. Le lendemain de son "réveil", la première chose qu’il a réalisée était de retrouver la
réserve d’armes extraterrestres qui a permis à l’homme de devenir le Vautour bien avant lui.
Puisqu’il savait qui était le chef du trafic de matériaux venant de l’espace et où se trouvait le
lieu de la collecte, le garçon araignée put directement couper le mal à sa source en envoyant
un message crypté à la Tour des Avengers via un des ordinateurs présents sur place afin de
signaler au milliardaire la position du repère des trafiquants pour qu’il puisse les récupérer.
Grâce à ce mouvement préventif, les armes extraterrestres ont été saisies par Iron Man et les
plans terroristes d’Adrian Toomes se sont effondrés. Le Vautour ne vit jamais le jour, des
centaines de personnes furent sauvés et d’énormes dégâts matériels furent évités. Quant à sa
rencontre avec Tony… Le jeune homme n’était plus vraiment inquiet de découvrir son ancien
mentor assis sur le canapé du salon. Il ne postait plus de vidéos démontrant ses actions
superhéroïques, et il a supprimé entièrement sa chaîne YouTube dans la foulée. Même s’il
existait encore des extraits du superhéros araignée quelque part sur internet, beaucoup d’entre
eux étaient de mauvaises qualités ou trop courtes pour que cela attire la curiosité. Personne ne
cherchera à s’intéresser à une silhouette fantomatique sans identité et insaisissable.

Plusieurs minutes s’écoulèrent, durant laquelle Peter fixa avec un regard stoïque les totems
métalliques qui l’entouraient. En levant brièvement la tête vers le haut, il remarqua que le ciel
paraissait plus nuageux que lors de son retour au cimetière des autobus, signe qu’il n’allait
pas tarder à pleuvoir. L’adolescent prit quelques secondes pour collecter ses pensées, puis il
poussa un soupir avant de se lever et de s’étirer. Il ferait mieux de rentrer avant le déluge.
Une fois les muscles détendus, Peter prit son sac à dos, réarrangea la couverture sur les sièges
arrière puis il sortit silencieusement de son repère. Le jeune homme longea ensuite un chemin
entre les soupapes menant jusqu’à la brèche au pied du grillage, se faufila sans peine à
travers, et prit finalement la direction de son appartement.

Je n'attends plus rien du destin. Pensa alors le garçon araignée en milieu de parcours. Je ne
m'accrocherai plus à de faux espoirs ou à de fausses promesses. Je ne peux dépendre de
personne et je n'ai pas le droit d'être heureux en tant que "Peter Parker"... Mais j'ai fini par
l'accepter. Je n'ai peut-être pas de raison d'exister, mais Spider-Man en a une.
Fragments

Les couleurs de l’aube recouvraient la ville de New York. Les teintes bleues et roses se
dégageant au-delà des nuages donnaient aux gratte-ciels une aura presque céleste. Parmi les
innombrables géants d’acier de Manhattan, celui qui resplendit le plus par les rayons solaires
fut la Tour des Avengers ; le symbole de l’équipe de superhéros brillait de mille feux au-
dessus de la tête des passants qui marchaient devant la forteresse ultramoderne, si bien qu’il
était possible de la remarquer même de loin.

Tony travaillait à son laboratoire comme à son habitude, construisant un tout nouveau modèle
de répulseurs pour sa nouvelle armure. Le sommeil l’avait quitté aux alentours de huit heures
et ses tentatives de se rendormir se sont révélés infructueuses quand ses yeux refusèrent de
rester fermés plus de vingt secondes. Le milliardaire sortit alors de son lit d’un pas lent, le
regard manquant un peu de netteté à cause de l’obscurité partielle de sa chambre, avant de se
diriger vers sa salle de bain pour prendre une douche revigorante, ce qui l’aida à remettre de
l’ordre dans son esprit en pelote. Une fois propre et pleinement réveillé, il prit un petit-
déjeuner assez copieux seul dans ses quartiers, puis il partit en direction de son lieu de travail
pour donner forme à de nouveaux uniformes et équipements pour lui et ses frères d’armes. À
mesure que les heures s’écoulaient, Tony aperçut le soleil se lever à travers les immeubles
depuis les grandes baies vitrées du laboratoire, peignant la mégalopole grisâtre de couleurs
chaleureuses. Devant ce spectacle banal mais non moins apaisant, le génie déposa pendant
quelques minutes ses outils sur la table pour contempler l’aube d’un regard tranquille,
laissant ainsi le poids de ces dernières semaines disparaître de ses épaules.

Tant d’événements se sont produits durant les mois passés… Peu après que Tony se soit
remis de l’incident du Mandarin, la menace d’HYDRA que le SHIELD croyait éteinte après
la Seconde Guerre Mondiale ressurgit brutalement à la surface ; de nombreuses attaques
terroristes et reventes d’armes extraterrestres à travers le monde ont été orchestrés dans
l’ombre pendant des décennies par leur ennemi de longue date, et la réapparition du terrifiant
Soldat de l’Hiver, l’un des opérants les plus dangereux de l’organisation criminelle, ne tarda
pas à remonter jusqu’aux oreilles de la société de contre-espionnage. Dès lors qu’ils apprirent
qu’HYDRA recommençait à semer des tragédies partout où il passait, les Avengers
multiplièrent les missions afin de couper définitivement le souffle du monstre mythologique :
raids organisés sur des bases stratégiques, arrestations d’agents par milliers, dont des taupes
infiltrés au sein même du SHIELD et du gouvernement, récupération de caissons de débris et
de matériaux de l’espace à en perdre le compte… Une guerre à l’échelle mondiale était
menée entre les deux factions.

En voyant leurs repères s’effondrer les uns après les autres ainsi que leurs membres et leurs
ressources s’amoindrir après chaque assaut des Défenseurs de la Terre, les derniers
groupuscules d’HYDRA s’enfuirent en Sokovie pour se réfugier dans le château du seul
supérieur de l’organisation criminelle encore en liberté : le baron Wolfgang von Strucker. Ce
dernier n’était pas dupe… Il savait que ce n’était qu’une question de jours avant que l’équipe
de superhéros finisse par retrouver leur ultime bastion. Il utilisa alors la technologie Chitauri
et le sceptre du Dieu de la Malice Loki à sa disposition afin de concevoir avec ses équipes
d’ingénieurs des arsenaux capables de résister aux Avengers, tout en conservant une carte
secrète sous sa manche si jamais leurs adversaires venaient à briser leurs défenses…
Plusieurs semaines auparavant, Strucker initia un programme de création d’une "ère des
miracles" en exposant de nombreux sujets aux énergies cosmiques émanant de l’arme dorée.
Sur une centaine de personnes, seuls deux d’entre elles survécurent aux expérimentations et
devinrent des êtres altérés aux pouvoirs surhumains : les jumeaux Pietro et Wanda Maximoff.
L’aîné développa un métabolisme et une supervitesse hors-norme tandis que la cadette hérita
de puissantes capacités psychiques, ce qui la rendit plus imprévisible et redoutable que son
frère. Le chef d’HYDRA fut persuadé que ces mutants seront à même de battre les
Défenseurs de la Terre et surpasser le Soldat de l’Hiver, ayant subitement disparu dans la
nature après un combat contre Captain America… Cependant, sans qu’il ne s’y attende, les
jumeaux se rebellèrent contre lui et mirent hors d’état de nuire tous les agents de
l’organisation criminelle présents sur leur route par eux-mêmes, quelques minutes avant
l’arrivée des Avengers à la base.

Une fois le dernier repère d’HYDRA contrôlé ainsi que Strucker et ses sbires arrêtés, les
Maximoff furent retrouvés par l’équipe de superhéros puis emmenés à la Tour des Avengers
par mesure de sécurité. Contrairement à ce qu’ils s’attendaient, Pietro et Wanda n’opposèrent
aucune résistance et se laissèrent guider vers l’Héliporteur des plus grand héros de la Terre
sans grande difficulté. Ils restèrent tout de même silencieux suite à leur escorte et
conservaient leurs distances avec les protecteurs du globe, mais au bout d’une vingtaine de
jours de longues conversations et après avoir constatés de leurs propres yeux tous les efforts
qu’ils ont déployés pour aider à la reconstruction de la Sokovie, ils acceptèrent finalement de
rejoindre leurs rangs. L’ajustement des nouveaux héros Quicksilver et Scarlet Witch au sein
de l’équipe demeura quelque peu houleuse durant les semaines qui ont suivi, mais les frères
et sœurs finirent par y trouver leur place, apprenant progressivement à se libérer de leur
rancune passée et à aller de l’avant avec le cœur plus apaisé. Peu après leur recrutement, deux
autres membres vinrent s’ajouter aux Avengers : Sam Wilson et Scott Lang, respectivement
Falcon et Ant-Man, tous deux à la demande de Steve. Avec l’addition officielle de Rhodey et
la création d’un synthézoïde nommé Vision grâce à une pierre cosmique jaune ayant été
extraite du sceptre de Loki, les Défenseurs de la Terre se comptaient désormais au nombre de
douze.

Suite à l’agrandissement de l’équipe, les Avengers continuèrent à traquer au fil des mois les
réseaux de ventes d’armes partout dans le monde, vainquant sur leur chemin un nombre
conséquents de grands criminels. Le dernier d’entre eux fut Brock Rumlow, un ancien agent
double infiltré au SHIELD s’étant échappé de prison et reconverti en mercenaire connu sous
le nom de Crossbones ; son objectif était de refiler des explosifs biologiques au plus offrant
via le marché noir de Lagos, au Nigeria. Les plus grands héros de la Terre parvinrent à
remonter jusqu’à lui avant que cela ne se produise, mais même s’il était seul, il n’en restait
pas moins lourdement armé et rusé : les superhéros durent jongler entre les explosions
intempestives qu’il lançait et la protection d’innocents pris malgré eux dans le champ de
bataille, ce qui rendit le combat plus long que prévu. Lorsqu’arriva le moment où les
Avengers reprirent l’ascendant sur le conflit et s’apprêtèrent à capturer Rumlow, le
combattant refusa de se rendre et activa les bombes sur son corps avant de charger sur
Captain America pour l’emporter avec lui dans son opération suicide. Cependant, Wanda
pressentit immédiatement son acte et l’immobilisa avec un champ de force réduit au plus
proche de sa peau d’un geste rapide, à quelques mètres de Steve, puis laissa ce dernier
exploser à l’intérieur de la bulle protectrice rouge. La force de la déflagration manqua de
perturber l’emprise de Scarlet Witch sur sa cible, mais elle réussit à tenir jusqu’au bout sans
vaciller. À la fin de l’affrontement, il y eut quelques dommages matériels et une seule victime
à déplorer.

Si la population gardait une opinion majoritairement favorable envers les Défenseurs de la


Terre, les politiques ne partageaient pas le même point de vue… Le Secrétaire d’Etat des
Etats-Unis Thaddeus Ross se montrait farouchement opposé à eux du fait de leurs opérations
aux combats dévastateurs, et a cherché à de nombreuses reprises à acter un contrôle renforcé
des héros, notamment par l’un de ses arrêtés les plus virulents qu’il a baptisé "les Accords de
Sokovie" : un ensemble de documents légaux conçus pour réguler les activités des individus
améliorés, en particulier ceux qui travaillent pour des agences gouvernementales telles que
le SHIELD ou pour des organisations privées comme sont les Avengers. De âpres discussions
survinrent alors entre l’équipe de superhéros et les Nations Unies ; d’un côté, ils
comprenaient les réticences des gouvernements mondiaux à leur égard, d’autant plus que les
batailles qu’ils menaient contre leurs ennemis causaient effectivement beaucoup de dégâts à
leurs passages, mais ils ne pouvaient pas accepter de perdre leur indépendance si un danger
d’une ampleur planétaire venait à se manifester et qu’ils ne puissent pas intervenir sur
l’instant sous prétexte d’attendre une réponse de la NU. Des réunions de négociations eurent
régulièrement lieu afin de trouver un compromis entre les exigences des pays nationaux et la
liberté d’agir des Défenseurs de la Terre. Tony se souvenait très bien des heures interminables
qu’il a passé avec ses compagnons à repasser en revue chaque réglementation des Accords
autour d’une immense table avec des officiels étrangers, certains plus ouverts d’esprit et
attentifs à leurs arguments que d’autres… Ce fut un véritable calvaire. Même Steve et Bruce,
deux des hommes les plus patients qui soient, se sentirent peu à peu exaspérés de ces longues
élucubrations qui ne semblaient mener nulle part. Cela étant, après plusieurs semaines
d’échanges et de réévaluation de l’arrêté, les Avengers finirent par tomber sur une version des
Accords qui convenaient à tous, bien moins restrictive que celle de Ross tout en concédant
certaines conditions demandés par les Nations Unies. Ils pouvaient ainsi continuer à protéger
le monde comme ils l’entendaient.

Au fil des jours, le calme revint à New York : les missions nécessitant le déploiement de toute
l’équipe se firent plus occasionnelles, les vilains à haute dangerosité du niveau d’HYDRA
ont drastiquement baissés et les débris alien tant convoités par des individus malveillants ne
circulaient plus sous le manteau. Une douce tranquillité s’était installée, et le quotidien du
milliardaire et de ses camarades se détendit.

Cependant, même si la Tour des Avengers demeurait paisible, une atmosphère indescriptible
régnait entre les murs.

Depuis un certain temps, Tony aperçut des rêves étranges à la nuit tombée… Dans l’un
d’entre eux, il vit une partie d’une grande ville s’élever dans le ciel lors d’un combat contre
un ennemi à l’identité inconnue. Dans un autre, il vit son meilleur ami Rhodey s’écraser sur
le sol d’un champ de bataille en ruines suite à une attaque, grièvement blessé au niveau des
jambes. Dans un autre rêve, il se vit en train de se battre contre Steve dans un endroit sombre
et enneigé, distinguant au loin la silhouette d’une troisième personne cachée dans
l’obscurité… Le génie ignorait quels circonstances ont conduits à ces événements terribles,
mais l’incompréhension et la peur qu’il ressentait face à ces scènes le fit se réveiller
immédiatement avec des sueurs froides et le cœur battant frénétiquement dans sa poitrine. Si
ces cauchemars se sont évaporés de son esprit à mesure que les semaines s’écoulaient,
l’ingénieur garda malgré tout une vive impression du peu qu’il s’en remémorait… Il eut
l’impression de sentir physiquement le poids lourds de War Machine blessé contre lui, les
coups de bouclier de Captain America contre son armure, le froid mordant sur sa peau dans
ce lieu lointain qui ressemblait à la Sibérie… Tout cela lui parut désagréablement réel. Etait-
ce des chimères nées des traces de ses traumatismes passés en tant que superhéros ? Tony ne
le savait pas.

Cela étant, au-delà de ces cauchemars aux contours flous, une autre pensée occupait la tête du
milliardaire… Lorsqu’il était seul dans son laboratoire, il lui arrivait parfois de regarder par-
dessus son épaule, comme un réflexe inconscient, fixant alors la table de travail derrière lui.
Tony ne comprenait pas vraiment pourquoi il faisait ça… Le meuble n’avait rien de bizarre
en soi : il était grand et rempli de morceaux d’armements sur tout son espace. Rien ne le
démarquait des autres fournitures que l’adulte utilisait quand l’envie lui en prenait. Pourtant,
pour une raison qu’il n’arrivait pas à décrire, Tony ne put se retenir de tourner régulièrement
la tête vers l’arrière. Ce ne fut d’ailleurs pas le seul changement qu’il constata envers lui-
même : il a arrêté de réaliser des nuits blanches jusqu’à l’épuisement, réussissant maintenant
à dormir normalement la nuit, et de boire la moindre goutte d’alcool, même lorsqu’il revenait
d’une réunion particulièrement pénible où il souhaitait oublier toute émotion négative qui le
pesait, le tout de son propre chef. Quelque chose le poussait inconsciemment à arrêter ses
mauvaises habitudes pour retrouver un mode de vie plus sain… Mais quoi ? De quoi pouvait-
il s’agir ? Cette interrogation hantait l’esprit du milliardaire, et son absence de réponse le
troublait.

Tony tenta d’ignorer ce questionnement en s’investissant pleinement dans la finition de ses


répulseurs. Seulement, une fois qu’il eut terminé son invention et essuyé la sueur qui perla
son front, sa concentration lui échappa et il regarda à nouveau instinctivement derrière lui. Il
poussa alors un long soupir avant de poser sa main droite sur son visage.

Ah… Pourquoi je continue à fixer cette satanée table ? C’est ridicule. Pensa le génie d’un air
exaspéré. Il n’y a personne ici à part moi.

Le corps de Tony s’immobilisa soudainement, et ses yeux devinrent grands ouverts. Il eut la
sensation qu’une petite partie de lui venait de s’éveiller d’un long sommeil suite à ces
paroles…

Oui… J’ai toujours travaillé seul dans ce laboratoire. Mais alors… Pourquoi mes souvenirs
et mon ressenti ne concordent pas ?

Un silence assourdissant régna à l’intérieur de la grande pièce. L’homme de fer tourna


lentement la tête vers le meuble, cette fois-ci de son plein gré… Après quelques secondes
d’hésitation, il s’approcha de la table en bazar, inspecta d’un simple regard les morceaux de
combinaisons présents dans son champ de vision, puis il reposa ses bras sur les quelques
centimètres de dégagés. Maintenant qu’il réfléchissait calmement sur ce qui embrumait ses
pensées, Tony réalisa que ce n’était pas le mobilier en lui-même qui l’intriguait… C’était
l’impression qu’une présence mystérieuse se trouvait derrière son dos. Ou plutôt qu’il
s’attendait à la présence de quelqu’un… Son côté rationnel lui murmurait qu’il n’a jamais eu
d’autre compagnie au laboratoire à l’exception des visites de son entourage proche, mais son
cœur pensa l’exact opposé.

Alors que le doute commença à s’emparer du milliardaire, la voix de F.R.I.D.A.Y le sortit


subitement de sa trance.

- Vous cherchez quelque chose, monsieur ? Demanda-t-elle d’un ton calme.

- … Non. Répondit Tony en levant la tête vers le plafond. "Du moins, pas quelque chose de
physique." Rajouta-t-il mentalement.

- Il semblerait que vous ayez achevé la création de nouveaux répulseurs. Voulez-vous les
tester dans la salle d’expérimentation ?

- Peut-être plus tard. J’ai la tête dans le guidon depuis plusieurs heures, donc je vais prendre
une pause pour le moment.

- Très bien.

Après cet échange, Tony laissa écouler quelques minutes avant de se redresser et d’étirer ses
bras. Ses recherches de réponses à ses questions se soldèrent par un échec, donc il décida de
prendre un café afin de se remettre d’aplomb. Il prit alors l’ascenseur et arriva rapidement à
ses quartiers, où il se dirigea vers la cuisine pour préparer sa boisson chaude. Une fois que le
liquide remplit entièrement la tasse, le milliardaire partit s’asseoir sur une des chaises de la
table à manger et but tranquillement son café, isolé de tout bruit extérieur. Il regarda entre
temps l’heure affichée sur son téléphone, et s’aperçut qu’il était onze heures ; il était resté à
son lieu de travail plus longtemps qu’il ne le pensait. Tony rangea donc le récipient vide à
l’intérieur du lave-vaisselle et reprit de nouveau l’ascenseur pour aller à l’étage privé des
Avengers.

Ses camarades étaient tous réunis au salon, chacun d’entre eux assis sur les sièges ou les
canapés : Steve et Natasha lisaient des livres, Clint, Scott et Sam jouaient à des jeux-vidéo,
Bruce, Rhodey et Vision discutaient ensemble, et Wanda et Pietro en firent de même. Seul
Thor manquait à l’appel, car il dut repartir à Asgard pour y régler des problèmes causés par
son frère. Des scènes tout aussi simples et ordinaires que le lever du soleil, mais qui
arboraient une saveur particulière pour Tony… Même si le souvenir des négociations des
Accords de Sokovie lui donnait mal à la tête, elles eurent néanmoins le bénéfice d’avoir
résolu la situation de manière pacifique. Si leurs choix avaient été différents, que ce soit
envers l’arrêté ou bien avant l’écriture de ce dernier, peut-être que l’équipe de superhéros
aurait dû en venir à des méthodes drastiques pour mettre un terme à leurs désaccords,
conduisant inévitablement à une scission profonde au sein du groupe… Cette hypothèse gela
le dos du milliardaire.

Tony tourna brièvement la tête à droite et à gauche afin de se reprendre, puis il s’assit sur l’un
des seuls sièges inoccupés non loin de Cap et Black Widow. Rhodey remarqua son arrivée du
coin de l’œil et lui sourit amicalement.

- Hey, Tones. Tous les regards convergèrent alors vers le nouveau venu.
- Ah ! Notre ingénieur est enfin là ! Répliqua Hawkeye avec un petit rire.

- On dirait bien. Répondit Tony avec un air détaché, dont les lèvres courbés vers le haut
trahissaient son amusement.

- C’est plutôt rare que tu sortes de ton laboratoire avant les repas. Remarqua Wanda.

Tony demeura muet… Il ne se sentait pas vraiment à l’aise de dire à ses compagnons qu’il
s’est éloigné de son lieu de travail à cause de son cerveau perturbé par des interrogations dont
il ignorait les origines.

- Tony ? Est-ce que ça va ? Demanda Natasha en notant le silence inhabituel du milliardaire.

- Hum ? Le génie reprit subitement ses esprits. Oh… Oui. J’étais juste surpris d’avoir perdu
la notion du temps sans faire attention.

- Ce n’est pas grave. Répondit Steve d’un ton bienveillant. Les jours qui se sont écoulés ont
été longs et éprouvants pour nous tous. C’est normal d’être fatigué après tout cela.

- C’est vrai. On en a vu de toutes les couleurs entre les Accords et les chasses aux criminels.
Continua Sam.

- Oh oui… Répliqua Scott en hochant la tête. Le plus ironique, c’est que les combats contre
les brigands étaient plus gérables que la négociation de l’arrêté.

- Heureusement, Ross ne peut plus modifier ces documents maintenant qu’ils ont été signés
par les Nations Unis. Dit Rhodey de manière factuelle, les bras croisés.

- En effet. Répondit Vision.

- Heh… Je me rappelle encore de son visage blême lorsqu’il a appris que son arme pour nous
enchaîner s’est retourné contre lui. Un vrai chef-d’œuvre ! Pietro afficha un grand sourire de
satisfaction. Lui et sa sœur ont clairement ressenti le mépris du secrétaire d’état envers les
individus améliorés comme eux, et ils se retenaient mutuellement de lui faire ravaler son
arrogance pour le bien de l’équipe. Leur patience aura finalement été récompensée par une
victoire légale de leur partie, conservant leur statut de héros et leur liberté.

- Tu l’as dit, gamin. Rétorqua Clint, un sourire se dessinant sur ses lèvres.

- Il a voulu jouer avec le feu, et il a fini par se brûler. Asséna nonchalamment Natasha.

Lorsque le silence revint dans le salon, le son des journaux retentit à travers les haut-parleurs
de la télévision, ce qui attira l’attention des Avengers. Les journalistes narrèrent
essentiellement les derniers actes héroïques du justicier Spider-Man, dont le seul extrait vidéo
du superhéros araignée prise par un reporter le montrait sous la forme d’une minuscule
silhouette de dos en plein vol, se balançant de sommets d’immeubles en sommets
d’immeubles à plusieurs centaines de mètres de haut. Bien que son apparence fût petite à
l’écran, il fut possible de distinguer les contours et les couleurs de son costume.
L’existence du monte-en-l’air intriguait les Défenseurs de la Terre. En plus des médias qui
relayaient ses exploits, ils ont eux-mêmes remarqués que la criminalité au cœur de New York
a chutée depuis son émergence : vols, cambriolages, préventions de meurtres, mais aussi
incidents du quotidien comme des accidents de la route, des incendies… Spider-Man agissait
sur tous les terrains. Si le superhéros rouge et noir intervenait partout dans la ville, son
territoire principal semblait être le Queens car c’était dans cet arrondissement que les
témoignages des personnes qu’il a sauvées furent les plus nombreux, ne tarissant pas de
reconnaissance envers lui. Cela étant, ce fut surtout le justicier en lui-même qui suscitait la
curiosité des adultes… Pour le peu d’informations connus le concernant, il se bat seul,
possède un arsenal artisanal en plus de ses pouvoirs d’arachnide et garde son identité
anonyme. Il était extrêmement mobile, se rendant d’un bout à l’autre de la mégalopole en un
instant, et disparaissait aussitôt qu’il a terminé son acte tel un fantôme. Qui est-il ? Quel est
l’étendue de ses capacités ? Pourquoi est-il aussi insaisissable et invisible ? Un épais voile
mystérieux entourait ce gardien héroïque.

En observant la figure fugace de Spider-Man, une sensation de trouble similaire à celle qu’il
a senti à son laboratoire envahit l’âme de Tony. Un geste de balance précis et calculé, un
corps visuellement frêle dissimulant une carrure musclée et résistante aux coups, un costume
aux couleurs vives et au design modeste…

Tout cela lui parut étrangement familier.


Rythme ralenti

Le soleil du mois de mai brillait d’un blanc éclatant dans le ciel. Un vent printanier souffla
sur la ville, et la nature auparavant grisonnante et morne resplendit d’une couleur jade aussi
lumineuse qu’une pierre précieuse.

Peter contemplait New York depuis le sommet d’un immeuble de son quartier, vêtu de son
costume de Spider-Man, assis sur le rebord du toit et laissant ses pieds se balancer dans le
vide. C’était un samedi banal et ordinaire, un de ces jours qui donnait envie de s’allonger sur
l’herbe de Central Park et de s’endormir sous la brise en se purgeant de toute pensée. Ce
mois-ci était le plus tranquille pour le jeune homme : en plus de l’arrivée des beaux jours qui
lui conférait de plus en plus de temps libre pour se consacrer à son rôle de superhéros, aucun
danger du niveau du Vautour ou des ennemis des Avengers ne menaçait la paix de la
mégalopole. Seuls quelques petits criminels de bas-étages semaient le trouble dans l’ordre
public, mais rien d’insurmontable pour le garçon-araignée. Qu’ils soient seuls ou en groupe,
Peter parvenait toujours à les arrêter par son intelligence et sa ruse.

Cela étant, bien qu’il soit devenu un héros bien plus fort et expérimenté par le biais de la
boucle temporelle, l’adolescent demeura extrêmement prudent… Ses patrouilles avaient beau
se ressembler entre elles, arborant majoritairement les mêmes mobiles et avec des armes dont
il connaissait désormais les paternes d’attaques, il n’était jamais complètement à l’abri de se
prendre une balle perdue dans le cœur ou un coup de poignard dans le ventre à la moindre
erreur d’inattention. Il suffisait qu’un ennemi soit un peu plus malin que les autres pour
qu’une intervention en apparence normale et contrôlée se change en chaos en l’espace de
quelques secondes. Le premier signe de relâchement de sa part pouvait signer sa mort à tout
instant. Ainsi, Peter resta constamment sur ses gardes, que ce soit sous le masque de son
alter-ego superhéroïque ou dans sa vie quotidienne ; qu’importe l’intensité de son sens de
l’araignée, le jeune homme prit l’avertissement systématiquement au sérieux, et il s’assura
que ni ses gestes corporelles ni ses paroles - pratiquement absentes lorsqu’il est Spider-Man -
ne trahissent ses deux identités. Il préférait être excessivement méfiant que de subir un coup
bas aux conséquences catastrophiques à cause d’une confiance mal placée.

Après plusieurs minutes de réflexion silencieuse, le gardien de New York sortit son portable
de la poche de sa veste pour se rendre compte de l’heure : dix heures trente. Il avait encore
toute la journée devant lui pour aider et protéger la population. Sa seule contrainte était de
rentrer avant la tombée de la nuit afin de ne pas inquiéter sa tante. Le garçon-araignée se leva
alors, dégaina son lance-toile vers l’avant, tira une toile vers le sommet d’un immeuble
proche, puis se laissa emporter par la gravité et se balança dans les airs avec vitesse et agilité.

La matinée fut sans grands artifices pour Peter. Hormis des bagarres de rues créées par des
petits délinquants qu’il a déjà croisé de temps à autres lors de ses boucles et quelques vols à
l’étalage, pas de crimes majeurs ne s’est manifesté au Queens. Le jeune homme resta plus
souvent immobile en hauteur à regarder ce qu’il se passait en contrebas qu’à réellement
intervenir. Etant donné sa réputation de fantôme masqué et de puissant justicier auprès des
citoyens, les brigands réfléchissaient maintenant à deux fois avant de commettre des crimes.
Personne n’a été capable de le blesser ni même de le ralentir, car il arrivait toujours à déjouer
les plans les plus élaborés ou les pièges les plus improbables… Il n’était donc pas surprenant
que les individus malveillants fassent désormais profil bas à la mention du nom de Spider-
Man. Le garçon-araignée ne s’en plaignit pas ; la chute de la criminalité signifiait que le
nombre de tragédies tomba avec lui, lui offrant une preuve que ses actions, aussi infimes au
premier abord soient-elles, ne furent pas totalement vaines.

Puisqu’il n’y avait aucun mouvement suspect dans son quartier, Peter décida d’explorer les
autres arrondissements de la mégalopole histoire d’étoffer sa patrouille. Le Bronx demeura
tout aussi paisible que le Queens et même les rues grouillantes de monde de Manhattan ne
montraient pas de signes anormaux, si ce n’est les sempiternels embouteillages intempestifs
sur les routes. Cependant, en voltigeant tout autour de Brooklyn, l’adolescent sentit
soudainement son sens de l’araignée s’activer près d’une zone d’habitation reculée. Il atterrit
alors immédiatement sur le toit d’un immeuble afin d’observer les environs. Le superhéros
remarqua plusieurs mètres plus bas trois hommes vêtus de vêtements sombres, se dirigeant à
l’intérieur d’un bâtiment désaffecté vouée à la démolition. L’un d’entre eux s’arrêta puis
regarda vers l’arrière, comme pour garantir l’entière discrétion de son escouade, avant de
rejoindre ses pairs dans l’obscurité des fondations vétustes. Aux vues de leurs gestuelles et de
son sixième sens en ébullition, il était évident pour Peter que ces individus manigançaient un
projet peu vertueux.

Le jeune homme se balança alors jusqu’au bâtiment abandonné et s’accrocha au mur en face
de lui grâce à ses mains collantes. Il remonta ensuite le long de la paroi en briques avant de
s’arrêter au niveau d’une ouverture béante, lui permettant ainsi de rentrer discrètement dans
les décombres sans passer par l’entrée. Il fit attention à éviter tous les débris et résidus de
plâtres au sol, puis il utilisa de nouveau ses toiles pour atteindre le point le plus haut qu’il ait
repéré. L’adolescent vit depuis son emplacement les trois hommes qu’il a débusqué à
l’extérieur, ainsi que la présence d’une quatrième personne : ce dernier parut plus âgé qu’eux,
en témoigne les traces de cheveux blancs à l’arrière de sa tête et des cernes visibles sur son
visage, arborant de ce fait la stature du chef du groupe. Spider-Man s’approcha au plus
proche du bord de la rambarde afin d’entendre ce que l’inconnu racontait.

- Alors ? Avez-vous trouvé les matériaux explosifs ? Demanda le chef.

- Oui. Répondit l’un des bandits. On a dû piller quelques laboratoires pour les obtenir, mais
nous avons ce qu’il faut pour améliorer nos bombes.

- Bien. L’homme âgé afficha un sourire satisfait. Grâce à cela, nous pourrons enfin nous
débarrasser de ce trouble-fête de Spider-Man. Ce vaurien n’a de cesse de contrecarrer les
plans de tous les criminels qu’il croise, certains d’entre eux étant nos partenaires d’affaires
sur le marché noir… Il faut couper court à ses agissements le plus vite possible.

Des mafieux de parures qui veulent attenter à ma vie ? Quelle originalité. Pensa le jeune
homme d’un air sarcastique.

- Cependant, même avec des bombes sophistiquées, il va être difficile de le prendre par
surprise. Continua l’un des criminels.

- C’est vrai. C’est rageant à admettre, mais ce type en spandex est futé. Voilà pourquoi il faut
faire en sortes de l’attirer dans une de ces bâtisses délabrées que l’on aura au préalable
remplie de mines. Il arrivera en tintamarres pour nous arrêter, mais au moment où nous nous
serons échappés par les ouvertures, les bombes se chargeront de détruire l’immeuble et de
l’emporter avec lui dans sa chute. Il a beau apparaître invincible, il n’en reste pas moins un
humain… Tout comme les Avengers, par ailleurs. Il suffit d’un regrettable accident pour que
leur grandeur s’effondre et que le sang les macule.

Je ne vous laisserai pas mettre votre plan à exécution. Le garçon-araignée serra les poings
suite à ces mots.

Peter détacha une des bombes fumigènes accrochées à sa ceinture, activa le mécanisme et
laissa la bombe descendre jusqu’au niveau du groupe de contrebandiers. Après plusieurs
mètres de chute, l’arme explosa en plein air et rejeta une quantité phénoménale de fumée
rouge, ce qui aveugla instantanément les quatre hommes. Le garçon-araignée sauta par la
suite par-delà la rambarde, dégainant son bâton de combat en plein vol, puis il profita de
l’invisibilité procuré par la fumée pour assommer ses adversaires les uns après les autres avec
son arme.

Alors qu’il venait de réduire le troisième larbin hors d’état de nuire, son sens de l’araignée
l’avertit subitement d’un danger imminent. Peter tourna rapidement la tête en direction de la
source de la menace… Et c’est là qu’il aperçut l’ombre d’une grenade se dessiner à travers le
rideau carmin, dirigé tout droit vers lui. Le chef des criminels a repris ses esprits plus vite
qu’escompté et a gardé un explosif sur lui en cas d’attaque imprévue. L’absence de goupille
lui indiqua qu’elle s’apprêtait à exploser… Le corps de l’adolescent se figea sous l’effet du
choc, sentant son cœur louper un battement et ses iris se réchauffer. Cependant, malgré la
vision de l’arme à quelques centimètres de lui bien visible au niveau de ses yeux, le
superhéros araignée remarqua quelque chose… D’étrange. La bombe semblait avoir été
lancée à pleine force, pourtant elle ne montrait aucun signe d’accélération. Elle paraissait
même se mouvoir avec une extrême lenteur, comme si les lois de la physique n’avaient
aucune emprise sur elle… La fumée environnante connut le même phénomène, se dissolvant
et disparaissant de manière presque imperceptible.

Ces petits détails eurent pour effet de le sortir de son état de gel. La grenade allait
s’enclencher à tout instant. Il n’avait qu’une poignée de secondes pour réagir. Peter dirigea
alors son lance-toile vers la bombe, puis tira une de ses toiles spéciales qui lui permit
d’emprisonner ce type d’armement à l’intérieur d’un cocon afin de réduire le plus possible la
puissance de feu de la déflagration. Au moment où l’arme fut entourée d’une couche épaisse
de fils, le flux du temps s’emballa et un bruit de détonation résonna entre les murs ;
l’explosion perdit en intensité, mais l’énergie dégagée par cette dernière évapora les nuages
colorés d’un simple coup de vent et entraîna le superhéros et le chef des criminels deux
mètres en arrière, ne laissant derrière elle que des morceaux de toiles calcinées. Le garçon
araignée saisit sa chance créée par la confusion pour accourir vers le bandit et lui asséner un
puissant coup de bâton qui le rendit inconscient après sa chute au sol.

Lorsque le silence revint dans le bâtiment abandonné, Peter reprit progressivement son
souffle… Quelques millisecondes s’étaient écoulées entre le début et la fin de son
intervention, pourtant le jeune homme eut l’impression qu’elles ont duré des minutes
entières. Ce groupe de criminels s’était révélé plus coriace que prévu… Heureusement pour
le gardien de New York, aucun des adultes ne paraissait taillé pour le combat rapproché,
rendant dès lors leur arrestation plus rapide. Il devait probablement s’agir d’une simple
réunion d’information stratégique entre brigands, seulement connus des concernés et dont
l’utilisation de pistolets n’apparut pas comme une haute probabilité.

Dès lors que Peter retrouva une respiration régulière, des bruits lointains attirèrent
soudainement son attention… Ces derniers ressemblaient à des pas, dont le son émis sur le
bitume se rapprochait de plus en plus de son emplacement.

Des personnes arrivent… Je dois vite partir d’ici !

Le superhéros remonta alors immédiatement jusqu’au dernier étage de l’immeuble délabré


grâce à ses toiles, ressortit par un trou béant afin d’atteindre le toit et repartit finalement au
Queens en un vol. Il aperçut sur son chemin le cimetière des autobus, et il décida de s’y
arrêter quelques temps pour se reposer. Peter atterrit ainsi juste à côté de son repère d’un
geste assuré, faisant s’envoler quelques grains de poussières à sa réception. Une fois invisible
aux yeux du monde à l’intérieur du bus gris, le jeune homme s’allongea de toute sa longueur
sur la rangée de sièges, son bras droit recouvrant ses yeux…

Ce devait être la première fois que Peter se retrouve dans une situation compliquée en tant
que Spider-Man depuis qu’il a recommencé la boucle. S’il était resté immobile trop
longtemps, l’explosion de la grenade lui aurait causés d’importantes brûlures en plus de
potentiellement révéler son identité par le souffle du feu qui aurait détruit son masque.
Certes, le jeune homme possédait des souvenirs du futur et il savait où, quand et comment tel
grand événement tel que la signature des Accords de Sokovie, la Guerre Civile des Avengers
ou la Guerre de l’Infini allait se produire, mais ses patrouilles de superhéros demeuraient
changeantes d’une itération à une autre : les criminels et les lieux où étaient commis les délits
ne restaient pas systématiquement les mêmes. Peter n’avait par ailleurs jamais croisé ce
groupe d’hommes auparavant malgré tout le temps qui s’est écoulé depuis qu’il est piégé
dans la boucle temporelle… Ce genre d’affaires échappait au peu de contrôle que le garçon
araignée gardait sur son destin.

Cela étant, au-delà de cette attaque surprise, ce fut ce qu’il s’est passé avant la déflagration de
la bombe qui occupa l’esprit de l’adolescent… Comme d’un simple claquement de doigts, le
monde se mit à tourner au ralenti, absout de toute notion de relativité, à la seule exception de
son corps qui continuait à bouger normalement. Au départ, Peter pensa que ses sens ont été
altérés par l’adrénaline et la stupéfaction intense qu’il a ressentie à la vision de l’arme si
proche de lui, lui donnant ainsi simplement l’impression que son environnement se mouvait à
un rythme différent du sien… Cependant, cette sensation d’être plongé dans une dimension
hors de la réalité ne lui était pas étranger. Cela lui rappela l’océan de vide où son âme dérivait
après que Thanos l’ait réduit en poussières, de même que l’état d’anesthésie générale qui
l’envahissait juste avant qu’il se réveille dans une nouvelle timeline. Tout semblait trop figé
pour n’apparaître que comme le fruit d’une suspension de son instinct.

Le superhéros rejoua plusieurs fois la scène dans son esprit afin de chercher une explication à
ce phénomène, mais aucune réponse concrète n’en ressortit. Au bout d’un quart d’heure à
marcher à l’aveugle dans un brouillard épais, Peter finit par soupirer de lassitude… Il
possédait tellement de questions sans réponses liées à la boucle temporelle qu’il ne trouva
plus aucun intérêt d’y accorder la moindre pensée. De toute façon, même s’il réussissait à
dissiper ses doutes sur ces dernières, il savait que cela ne changerait rien aux événements les
plus importants de la timeline. Il a déjà essayé tant de fois de changer leur cours d’une
manière ou d’une autre, répétant un nombre considérable de mois qui parurent avoir duré plus
d’une décennie… Tout ce qu’il obtenait à la fin de la guerre n’était que du sang et la mort de
ceux qu’il aime, encore et encore et encore.

Pourquoi cette boucle serait différente des autres ?


Flammes solaires

Tony fixa le plafond de son laboratoire d’un air hagard, affalé sur un des fauteuils de la
grande pièce. La moitié de la matinée venait de s’écouler, mais les derniers jours passés ont
complètement aspirés son envie de s’immiscer dans un nouveau projet d’invention, si bien
qu’il ne vit même pas les aiguilles de l’horloge tourner. Etant donné que les menaces
planétaires mettant la Terre en péril ont pratiquement disparus, il était devenu rare que tous
les Avengers soient déployés pour une mission, sauf si l’ennemi débusqué représentait un
danger qui nécessite plusieurs membres aux capacités variées afin de le maîtriser, à l’instar
d’HYDRA ou de Crossbones. Une partie de l’équipe continuait à intervenir quelque part dans
le monde lorsqu’il le fallait, tandis que l’autre partie occupait leur temps à leur manière.

Quand le milliardaire ne revêtait pas son armure d’Iron Man, il enchaînait les réunions à
Stark Industries en compagnie de Pepper ou avec d’autres instances telles que le SHIELD.
Depuis les négociations des Accords de Sokovie, Tony ne supportait plus de rester assis
pendant des heures autour d’une table, entouré de personnes en costumes cravates à
l’apparence si générique qu’il les oubliait à la seconde où il sortait de la salle. Les longs
discours soporifiques des gérants lui apparurent comme une torture psychologique, et si sa
fiancée n’était pas à ses côtés pour maintenir le peu d’attention qu’il y portait, n’importe quel
prétexte lui suffisait pour s’enfuir le plus loin possible de cet enfer.

Cela dit, s’il devait choisir entre les briefings de sa compagnie ou se retrouver dans la même
pièce que Ross, le superhéros prendrait la première option sans une once d’hésitation. Le
secrétaire d’état avait accepté à contrecœur qu’il ne pouvait plus s’opposer aux Accords, mais
cela ne l’empêchait pas de continuer à dénigrer les individus surhumains, dont la dernière
cible en date de son venin était Spider-Man. Le vieil homme le traitait continuellement de
"danger public", de "mutant sauvage", de "vulgaire clown en costume moulant" et autres
commentaires cyniques dégoulinants de ressentiment qui révélait avec une certaine subtilité
qu’il a toujours son échec de contrôler les actions des êtres extraordinaires en travers de la
gorge, et semblait attendre le moindre faux pas de ce dernier pour obtenir une raison de
procéder à son arrestation.

Chaque pique de Ross à l’égard du monte-en-l’air énerva profondément Tony… Il ne


connaissait peut-être pas l’identité de Spider-Man et il ne possédait aucunes preuves
concrètes pour appuyer ses dires, mais le milliardaire était certain que le justicier dispose de
bonnes intentions et que son désir de protéger la population était sincère. Il entama alors
plusieurs discussions avec le gouvernement afin que le gardien de New York soit retiré de la
liste des individus améliorés illégaux des Accords et qu’ils laissent son cas entre les mains
des Avengers, requête dont il obtiendra finalement gain de cause au bout d’une semaine. Ce
fut long et fastidieux, mais le visage fulminant de rage de Ross en apprenant la décision
ultime des sénateurs valait tout l’or du monde pour lui.

Pourtant, malgré leur extrême vigilance et leurs nombreuses ressources, les Défenseurs de la
Terre n’ont jamais réussi à croiser la route du mutant. Ils ont eu beau passés tous les
arrondissements de la mégalopole au peigne fin, enquêtés sur tous les lieux où il a arrêté des
criminels, analysés les vidéos où il apparait afin de cerner son profil, le héros araignée
demeurait introuvable. Même lorsque Natasha et Clint parviennent à l’apercevoir se balancer
dans les airs et à le suivre, Spider-Man avait déjà disparu avant qu’ils n’arrivent. Les
Avengers comprenaient désormais mieux pourquoi l’un de ses nombreux surnoms était
"l’insaisissable Spider-Man" ; personne ne sait qui il est, son langage corporel paraissait
calculé au millimètre près et son mutisme mélangé à son costume aux teintes sombres lui
donnait l’apparence d’un spectre, un être inconnu à la frontière de l’humain et de l’illusion.

Au bout d’une demi-heure de réflexion silencieuse, Tony finit par pousser un soupir et posa
un de ses bras devant ses yeux. La fatigue de ces pourparlers gouvernementaux engourdissait
son esprit. Le sommeil commença lentement à l’envahir jusqu’à ce qu’il entende quelqu’un
toquer trois fois sur la porte du laboratoire avant d’entrer dans la salle, personne qui se révéla
être Black Widow.

- Hey, Natasha. Lança le génie d’une voix embrumée, tandis qu’il se redressa sur le fauteuil.

- Hey, Tony. Tu as fait une nuit blanche ? Demanda l’espionne en remarquant son collègue
bailler.

- Non. J’ai réussi à dormir, mais la pression de la semaine n’a pas complètement disparue.
Tony s’étira les bras afin de détendre ses épaules, puis il se releva. Négocier avec des types
en costards cravate m’a vidé de toute énergie. Cela étant, c’était soit ça soit les laisser
continuer à traiter Spider-Man comme un hors-la-loi, et il n’était pas question que je reste
assis sans rien faire par rapport à ça. Il a beau agir comme un loup solitaire, il est loin d’être
aussi dangereux que ce que ces vieux conservateurs pensent.

- C’est vrai. Répondit Natasha. Même si nous ne savons rien de lui, il a prouvé depuis
longtemps sa force en combat et son altruisme envers autrui.

- Oui. Il serait un allié parfait pour l’équipe… Du moins, si on parvenait à ne serait-ce que
l’approcher. C’est la première fois que je suis confronté à quelqu’un d’aussi fugace que lui, et
pourtant j’ai réussi à repérer des agents d’HYDRA supposément indétectables cachés dans
une base sous-marine sous l’Océan Pacifique. C’est quelque peu frustrant. Tony frappa
légèrement du pied en signe d’agacement, les sourcils froncés et les bras croisés.

- On dirait que tu as trouvé un adversaire à ta taille. La jeune femme esquissa un sourire


amusé.

- … Et donc ? Pourquoi es-tu venu me voir ?

L’Avenger marqua une pause.

- Tu te souviens de ces réseaux de reventes illégales sur le marché noir que l’on a arrêté
dernièrement ?

- Les réseaux de ventes de bombes dirigés par des criminels qui connaissaient Crossbones ?
Oui, je m’en souviens.

- Une dizaine d’entre eux sont parvenus à s’échapper avant nos assauts et ont fui dans
plusieurs états du pays. Ce sont eux qui étaient responsables des récents vols de matériaux
explosifs dans des laboratoires militaires. Steve et Sam se sont chargés d’attraper les
contrebandiers, tandis que moi et Clint pourchassons leur chef et trois de ses hommes de
mains. Nous avons fini par retrouver leur trace dans une zone abandonnée de Brooklyn et
nous étions prêts à les intercepter… Avant qu’on se rende compte que quelqu’un nous a
devancés.

- Spider-Man ? Devina le génie.

Natasha hocha la tête en signe d’approbation. Elle sortit ensuite une petite fiole de la poche
de sa veste dans laquelle reposait un amas de fils grisâtres et noirs.

- Est-ce que c’est… Un morceau carbonisé de toiles d’araignées ? Remarqua Tony.

- Oui. Aux vues de l’état des bandits et des marques de déflagration au sol de l’immeuble
délabré, l’hypothèse la plus plausible est que Spider-Man est tombé sur eux par hasard et a
décidé de les arrêter lui-même. Il a réussi à mettre les complices du chef hors d’état de nuire
grâce à sa stratégie de camouflage avec sa bombe fumigène, mais a failli se faire surprendre
par une grenade… Danger qu’il a réduit en fumée en lançant une toile sur l’explosif, ce qui a
en partie brûlé les fils.

- … Bizarrement, je l’imagine très bien en venir à des méthodes aussi risqués. Murmura le
milliardaire.

- Je comptais essayer de décrypter la composition de cet échantillon par moi-même, mais


Fury et Hill ont besoin de moi au SHIELD. Je préfère ainsi te confier cette fiole plutôt que de
risquer d’endommager le contenu délicat qu’elle contient.

- Ça peut se comprendre.

- Tu penses pouvoir tirer des informations de ces fils ?

- Tu me vexes, Nat. Tony prit un air faussement offensé, tout en posant une main sur sa
poitrine. J’ai réussi à analyser des fusils Chitauri, des armes venant de l’espace, entièrement
calcinés et à savoir comment les contrer. Quelques toiles recouvertes de cendres ne me
poseront aucune résistance majeure.

- Je sais. Tu es Tony Stark, après tout. Rétorqua Black Widow avec un petit sourire. Tony
tenta de maintenir sa posture désinvolte par pure théâtralité avant de finalement abandonner
et de sourire à son tour.

Natasha posa ensuite l’éprouvette entre les mains de l’ingénieur, puis elle sortit du laboratoire
en lui faisant un signe de la main. Une fois de nouveau seul sur son lieu de travail, Tony
observa longuement la cartouche transparente… En regardant le petit amas gris de plus près,
la moitié des fils furent fondues à cause des flammes émises par l’explosion de la grenade.
Pourtant, malgré la chaleur intense à laquelle ils ont été confrontés, leurs formes originelles
sont restées pratiquement intactes plusieurs heures après l’intervention du superhéros
araignée. Ils étaient probablement prédisposés à disparaître d’eux-mêmes au bout d’une
certaine durée, mais la déflagration a détruit cette capacité et les a conservés dans un piteux
état.
Après plusieurs secondes où il demeura immobile, le milliardaire leva finalement la tête vers
le plafond.

- F.R.I, combien de temps faut-il pour analyser ces toiles ?

- Aux vues de leurs brûlures, une vingtaine de minutes sont requises avant d’obtenir des
résultats, monsieur. Répondit l’intelligence artificielle d’une voix posée.

- Vingt minutes, hein… Silence, puis un soupir. Je suppose que c’était inévitable. Cela dit,
c’est la seule piste que nous possédons sur Spider-Man… Alors tâchons de les étudier avec
attention. Prépare le scanner, F.R.I.D.A.Y.

- Tout de suite, monsieur.

Tony se dirigea par la suite vers la partie recherche du laboratoire, situé non loin des tables de
créations, puis il alluma une machine métallique rectangulaire en appuyant sur un bouton du
tableau de bord. Il en pressa un autre qui ouvrit un compartiment du scanner, versa le contenu
de la fiole à l’intérieur d’un tube, puis l’intelligence artificielle se chargea de le rabaisser et
refermer le couvercle avant de lancer le programme d’analyse. Une fois le processus
enclenché, le génie retourna à ses quartiers afin de reprendre des forces. Il se prépara un café
bouillant puis il s’assit sur le canapé du salon en feuilletant les pages d’un des journaux qui
traînait sur la table basse d’un rapide coup d’œil. Hormis des nouvelles qu’il savait déjà et
des interviews à dormir debout, l’ingénieur se lassa vite de sa lecture et reposa à nouveau la
pile de papier sur le meuble en face de lui avant de s’affaler nonchalamment sur le sofa.
Puisqu’il n’y avait rien d’intéressant à lire et que son envie de dormir a fini par s’évaporer,
Tony décida alors de passer le temps en écoutant sa playlist d’AC/DC. Les morceaux
s’enchaînèrent ainsi les uns après les autres, le milliardaire battant le rythme avec son pied
droit et quelques mouvements de la tête.

Vingt-cinq minutes plus tard, une fois que le dixième titre se conclut, la voix de F.R.I.D.A.Y
retentit dans le salon.

- Monsieur. L’analyse des toiles est terminée. Annonça-t-elle.

- Oh, je vois. Tony s’assit à nouveau convenablement. Affiche-moi les résultats, s’il-te-plaît.

L’assistante virtuelle s’exécuta, et des hologrammes bleus apparurent devant le milliardaire.


Au fur et à mesure qu’il examinait les écrans détaillant la composition des fils, Tony eut du
mal à cacher sa stupéfaction : en plus de disposer d’une élasticité maximisée et d’une portée
de lancée de plusieurs centaines de mètres, leur structure les rendait plus solides et résistantes
que de l’acier, suffisamment puissantes pour retenir deux parties d’un immeuble découpée en
deux. En plus de cela, leur formule chimique était simple et facile à reproduire, offrant ainsi
une infinité de possibilités d’utilisation en combat rapproché.

Incroyable… Je me doutais que ces toiles aient été créées de toutes pièces de telle sorte que
le justicier puisse se déplacer aussi vite à travers la ville, mais elles se révèlent également
être des armes redoutables. Il a réussi à créer une formule chimique à la fois claire et
sophistiquée avec des ressources limitées, le tout par ses propres moyens et sans aide… Cet
homme est un génie !
Un silence s’installa dans l’appartement. Tony observa plus longuement la composition des
toiles de Spider-Man, quand une sensation de familiarité s’empara soudainement de lui…
Elle ressemblait à celle qu’il avait ressentie lorsqu’il a aperçu la silhouette du héros araignée
à la télévision. En théorie, ce devrait être la première fois qu’il découvre la fabrication d’une
des armes du gardien de New York… Pourtant, il était fermement convaincu de déjà
connaître cette combinaison chimique, voire d’avoir lui-même créé des variantes de toiles
d’araignées à partir de ladite combinaison. Au début, il ne porta pas d’attention particulière à
ces vagues impressions ; son rôle de superhéros et de génie milliardaire le poussait à réfléchir
à beaucoup de choses à la fois, si bien qu’il lui arrivait d’imaginer des souvenirs qu’il croyait
réels alors qu’il s’agissait de mirages fabriqués par ses expériences passées en tant que civil
et défenseur de la Terre. Cela étant, Tony se rappela d’une discussion entre les jumeaux
Maximoff qu’il a débusqués au détour de leur chambre… Wanda raconta à son frère qu’elle a
eu lors de leur emprisonnement en Sokovie des rêves ressemblant à des visions d’un futur
possible durant son sommeil, et qu’ils furent si horriblement réalistes qu’elle pensa les avoir
véritablement vécu, au point d’en ressentir physiquement la douleur des blessures physiques
et mentales rattachés à eux… De la même manière que ses cauchemars il y a plusieurs mois
de cela.

À mesure que le temps s’écoulait, le doute envahit l’esprit du héros… Ces sensations furent
trop fortes pour n’être que le fruit de son imagination. Le milliardaire regarda à nouveau les
hologrammes luminescents, relisant attentivement chaque information qui y sont inscrites,
quand une hypothèse lui apparut en tête. Aux vues de la composition des toiles d’araignées et
de ses armes artisanales, le justicier devait disposer d’une grande intelligence et d’un talent
naturel en chimie et en mécanique. Ce type de connaissances n’était pas à la portée de
n’importe qui… Des génies comme lui ou Bruce se comptent sur les doigts d’une main. Cela
signifiait donc que Spider-Man appartenait à ce groupe restreint d’individus… Cependant,
plusieurs témoignages de citoyens ayant été secouru par le gardien de New York attestent que
s’il dégageait effectivement une aura fantomatique et menaçante lors de ses interventions
héroïques, le superhéros araignée en lui-même n’arborait pas une carrure imposante comme
Captain America ou Quicksilver, et ils le décrivaient essentiellement comme un jeune adulte.
Si ces dires s’avèrent fondés, alors l’homme derrière le masque du protecteur de la
mégalopole ne devait probablement pas dépasser la vingtaine d’années… Peut-être même
moins.

Tony plongea dans une profonde réflexion pendant de longues minutes, où il passa en revue
tout ce que lui et ses compagnons savaient sur Spider-Man qui pourrait l’aider à cerner le
justicier, aussi flou soit-il… Soudain, une idée s’illumina dans son esprit. Puisque le territoire
principal de Spider-Man était le Queens et en prenant en compte la possibilité qu’il soit
encore en période de croissance, il y a de grandes chances qu’il étudie dans une école axée
sur la science et la technologie, lui offrant du même coup un endroit où il pouvait fabriquer
discrètement ses toiles. Après quelques secondes où il reprit son inspiration, le milliardaire
rapprocha l’un des hologrammes près de lui puis il tapa certaines instructions dessus afin de
lister les établissements scolaires correspondant à ces critères. Une dizaine de noms apparut
par la suite sur l’écran… Et l’un d’entre eux attira immédiatement son attention : Midtown
School of Science and Technology. C’est l’une des académies les plus réputées de
l’arrondissement, si bien qu’elle est régulièrement choisie lors de visites groupées
privilégiées à la Tour des Avengers. Vu le programme et le haut niveau requis pour y entrer,
la plupart des adolescents qui y étudient sont des élèves prometteurs. Tony parvint à pirater la
base de données de Midtown High sans difficulté, puis il scruta rapidement les dossiers des
étudiants… Lorsqu’il arrive au milieu du répertoire, le profil d’un jeune homme en particulier
se démarqua des autres.

Peter Parker. Né le dix août 2001. Quinze ans. Vit au Queens avec sa tante May Parker, sa
tutrice légale depuis le décès de ses parents et son oncle Benjamin Parker. Aucune sanction
ou retenue à son actif. Membre du club de décathlon et considéré comme l’élève le plus
brillant du lycée avec des notes excellentes dans tous les domaines.

Tony s’immobilisa à la suite de sa lecture. Il fixa l’hologramme avec un regard mélangeant la


surprise et la confusion… Ces cheveux bruns courts et bouclés, ce visage juvénile, ces yeux
bruns lumineux qui laissait transparaître un intellect exceptionnel pour un si jeune âge, ainsi
que ces informations personnelles… L’impression de déjà-vu revint une nouvelle fois à lui,
plus puissante et plus distinguable que celles qu’il a éprouvé jusqu’à présent.

Ce garçon… Peter Parker… J’ai l’impression de l’avoir déjà vu quelque part.

Silence.

… Non. Ce n’est pas quelque chose d’aussi vague que "je l’ai vu". Je… Je connais ce gamin.
Je suis incapable de l’expliquer de manière rationnelle, mais je sais que je connais ce gamin.
Toutes ces informations sur lui me sont beaucoup trop familières pour que ce soit une illusion
créé par mon cerveau. C’est le même genre de familiarité que je ressens quand je suis avec
Pepper ou Rhodey… L’aurais-je déjà rencontré quelque part ? Pas ici, mais… Ailleurs ?

Le génie serra fermement un de ses poings. En prenant en compte tout ce qu’il venait
d’apprendre en un laps de temps aussi court, il comprenait désormais pourquoi l’atmosphère
de la Tour devint aussi indicible au fil des mois… Si lui et Scarlet Witch ont eu le même type
de rêves à différentes périodes de temps, il était de ce fait possible que d’autres de ses
compagnons Avengers aient également vécus ce phénomène. La question restait de savoir
qui, et quel fut leur contenu…

Tony inspira profondément, puis il poussa une longue expiration. Pourquoi hésitait-il ? Il a
fini par comprendre que ruminer ses pensées et agir avec impulsivité aggravait un problème
au lieu de le résoudre. N’était-ce pas pour cette raison que l’équipe de superhéros a
longuement conversé entre eux et avec les Nations Unis afin de trouver la meilleure issue par
rapport aux Accords de Sokovie au lieu de sortir les armes, tout comme il l’a fait pour
Spider-Man ? Il lui apparut évident qu’il ne trouvera pas de réponses à ses questions tout
seul… Il valait mieux en parler avec les Avengers. Aborder le sujet sera certes un peu
compliqué étant donné la nature de ses doutes, mais cela ne l’empêchera pas d’essayer de
poser des mots dessus. Quant à Peter…

Le milliardaire releva légèrement la tête vers le haut, et ses yeux croisèrent la photo d’identité
de l’adolescent. En s’attardant plus longuement sur elle, il remarqua alors un détail qui lui
avait échappé… Le jeune homme ne souriait pas. Ses yeux manquaient d’éclats tandis que sa
bouche forme une parfaite ligne droite. Tony regarda par curiosité les photos disponibles sur
le site de l’école, et Peter ne montrait guère plus d’émotions aux côtés de ses camarades de
classe, en plus d’éviter consciencieusement la direction de la caméra lorsque l’occasion se
présentait. L’adulte fut troublé d’observer une telle absence d’expression sur un visage aussi
candide… Il crut revoir ses propres photos de ses années scolaires à la MIT, au moment où sa
relation avec son père Howard s’est complètement étiolée comme une fleur fanée. Un
sentiment d’inquiétude et de tristesse emplit le cœur de Tony…

Qu’est-ce qui t’est arrivé pour que tu ne souries plus… Peter ?

Quelque part dans l’infinité du cosmos… Un vaisseau spatial aussi grand qu’un continent
voguait à travers les galaxies. Les dorures qui le recouvrait et sa couleur blanche dominante
lui donnait l’apparence d’une étoile luminescente, chaste comme une pleine lune.

Thor contemplait l’immensité de l’espace depuis une baie vitrée située à l’étage le plus haut
du véhicule volant, son poing droit serrant fermement son marteau Mjolnir et son poing
gauche une grande hache. Près de trois mois se sont écoulés depuis qu’il a quitté la Terre ; le
dieu a statué à ce moment-là à ses camarades superhéros qu’il devait contrer les manigances
de Loki à Asgard… Ce qui fut en partie vrai. Son frère a effectivement usurpé l’identité de
leur père Odin afin de s’accaparer le trône du royaume et y mener un règne de mensonges et
de tromperie, conduisant alors à sa lente décadence. Thor, connaissant le mode opératoire et
la soif de pouvoir du Dieu de la Malice, eut tôt fait de révéler la supercherie et arrêta
instantanément Loki avant même que ce dernier n’envisage de lui échapper.

Cela étant, au-delà de stopper les ambitions du second fils du Père de Toutes Choses, le Dieu
du Tonnerre a en réalité dû partir de la Terre pour une tout autre raison… Une raison qui a
poussé Thor à traverser des planètes hostiles et désolées séparées par des années lumières les
unes des autres, ainsi que confronter des individus aussi anciens que l’univers - dont une
poignée d’entre eux à la dangerosité proportionnelle à leur longévité -.

Quelques temps après son retour, l’Asgardien récupéra discrètement le Tesseract conservé à
l’intérieur de la chambre forte du palais royal à l’insu des gardes, puis il revint dans la prison
où Loki fut enfermé afin de lui révéler qu’Asgard courait un grave danger à cause de l’arrivée
future de la Déesse de la Mort Hela, la fille aînée d’Odin et de surcroît leur grande sœur, et
que le seul moyen de réduire sa menace à néant était de provoquer le Ragnarök en jetant la
couronne du démon Surtur dans la Flamme Eternelle gardé au cœur du royaume, car ce
dernier constituait la source de son pouvoir. Le Dieu de la Malice fut surpris par les paroles
de son aîné… Il connaissait les légendes l’entourant du fait de ses lectures de manuscrits
scellés préservés dans la bibliothèque du palais, mais il n’imaginait pas que son existence
s’avère réelle ni que sa venue surviendrait durant ce millénaire. Loki ne s’attendait également
pas à ce que ce soit Thor lui-même qui lui propose de réaliser la prophétie du Ragnarök, en
sachant parfaitement qu’initier ce rituel provoquerait la destruction totale d’Asgard. Le Dieu
du Tonnerre lui répondit laconiquement qu’il savait tout cela ; il ne prononçait pas ces mots
lourds à la légère et il se sentit clairement mortifié d’anéantir le royaume qui l’a vu naître,
ainsi que tous les souvenirs qui y sont rattachés… Cependant, en tant que roi d’Asgard, il
était de son devoir de protéger son peuple. Si cela devait passer par la chute de sa planète
natale… Alors il assumera ce choix en son âme et conscience.

Comprenant l’ampleur de la puissance de la Déesse de la Mort, les deux frères décidèrent de


ranger leurs réserves mutuelles de côté et s’allièrent pour vaincre Hela. Tandis que Loki partit
à la recherche d’artéfacts magiques capables de résister aux pouvoirs de Surtur, Thor se mit
en quête d’une nouvelle arme pour le combattre. Le Dieu du Tonnerre se rendit ainsi à
Nidavellir, la forge des nains à l'origine de la création de Mjolnir, mais il constata avec effroi
que tous les habitants furent assassinés par Thanos à l’exception d’un survivant, Eitri, dont
les mains ont été découpés de sortes à ce qu’il ne puisse jamais construire d’armes pour le
défaire. Heureusement, grâce à l’aide de Thor et de ses pouvoirs, l’artisan rescapé réussit à
créer Stormbreaker, une hache redoutable qui permet à l'Asgardien de renforcer ses capacités
et même d'invoquer le Bifröst. Doté désormais d’un moyen d’arrêter ses ennemis, le roi
d’Asgard retrouva finalement Loki, accompagné d’une membre de leur peuple revenue de
Sakaar nommée Valkyrie, et tout trois affrontèrent Surtur durant un combat aussi intense que
bref. Une fois lui avoir soutiré sa couronne, le groupe repartit à Asgard et convainquirent les
asgardiens de monter à bord du Statesman - le plus grand vaisseau spatial existant pouvant
accueillir tout une civilisation en cas d’exil -, avant d’enclencher le Ragnarök et de les
rejoindre juste à temps grâce à Heimdall. La mission de sauvetage de Thor se solda ainsi par
une réussite.

Pourtant, bien qu’Hela ait périe et que son peuple soit sain et sauf, l’esprit du Dieu du
Tonnerre demeurait embrumé de pensées…

Loki lui a posé plusieurs fois la question comment il a appris la résurgence d’Hela malgré
l’absence de leur père ou que la destruction d’Asgard permettait de la tuer. Le frère aîné
s’était contenté de lui raconter qu’il a acquis des connaissances de leur lignée du fait de ses
voyages éparses aux quatre coins de l’univers, tout en faisant implicitement comprendre au
Dieu de la Malice qu’il n’avait aucune obligation à tout lui révéler étant donné leur passé
chaotique, bien qu’il n’arbora pas de haine profonde envers son cadet malgré cela. La vérité
fut en réalité différente de cette affirmation.

Si Thor était parvenu à empêcher cet événement de se produire, c’était grâce à ses souvenirs.

Ses souvenirs de sa dernière discussion avec Odin en Norvège juste avant sa mort, menant à
la révélation de la véritable héritière du trône d’Asgard et des conséquences que la disparition
du Père de Toutes choses entraînait.

Ses souvenirs de son arrivée imprévue à Sakaar, de sa rencontre avec Valkyrie sur cette
planète décharge, de ses retrouvailles avec Bruce et de leur fuite.

Ses souvenirs de son combat contre Hela, de la découverte du lien entre sa puissance divine
et leur royaume, culminant à l’accomplissement du Ragnarök et en l’exil du peuple
asgardien.

Et surtout… Ses souvenirs du massacre des siens par Thanos le Titan Fou, dont son frère
Loki, quand ce dernier partit en quête des Pierres d’Infinité, amenant à la Guerre de l’Infini et
à la tragédie qui en découla lorsque le glas sonna pour l’univers.

Des souvenirs qu’il n’était pas supposé avoir. Des souvenirs qui ne sont pas arrivés dans son
présent, mais qui ont bel et bien existés dans un monde différent de sa ligne temporelle.

Un mortel se poserait naturellement des questions par rapport à ce phénomène dont la


probabilité d’existence fut astronomiquement faible. Cela dit, en tant qu’être proche du divin,
Thor comprit vite que cela devait être le résultat d’une manipulation de la Pierre du Temps.
Après plusieurs minutes de silence, le Dieu du Tonnerre posa son regard sur la sacoche
attachée à sa ceinture, dans laquelle reposaient le Tesseract et une orbe métallique à l’alliage
extraterrestre… Les écrins qui renfermaient deux des gemmes que Thanos convoitait : la
Pierre de l’Espace et la Pierre de la Réalité. Avant son combat contre Surtur, l’Asgardien
s’était servi de la pierre bleue afin de se rendre rapidement à Knowhere car le Collectionneur
y conservait l’Ether, la forme d’antimatière qu’il avait déjà affrontée par le passé. Thor se
doutait que le Titan Fou chercherait à s’emparer de cette Pierre d’Infinité en priorité compte
tenu de ses capacités exceptionnelles, et il n’était pas question que le souverain d’Asgard le
laisse concrétiser ses plans sans agir… Ainsi, il réussit à reprendre la Pierre de la Réalité -
conservé dans l’Orbe qui accueillait autrefois la Pierre du Pouvoir - sans accroc, tout en le
remplaçant par une copie afin que le Collectionneur ne se doute de rien.

Thor était conscient que transporter deux singularités cosmiques aussi puissantes à bord du
Statesman le rendait de ce fait le plus à risque de subir une attaque de Thanos et de son Ordre
Noir. Il savait très bien ce que la décision d’en garder ne serait-ce qu’une seule dans le
vaisseau spatial lui a coûté… C’est pour cela qu’il a refusé plusieurs fois la proposition
d’Heimdall d’utiliser le Bifröst pour amener le bateau de survie du peuple asgardien vers la
Voie Lactée : l’énergie dégagée par le couloir interdimensionnel se ressentait à une distance
impossible à calculer dans l’espace. Si le Titan venait par malheur à la détecter avec son
Sanctuaire II, non seulement ses pairs seront impitoyablement tués de ses mains, mais la
Terre se retrouva instantanément en danger dès lors qu’il aura terminé son acte. Thor prit
alors la décision d’opter pour un voyage classique à travers les galaxies en contournant la
vaste trajectoire de vol potentielle de Thanos et son armée. Certes, le Statesman prit de ce fait
plus de temps que prévue à atteindre sa terre d’exil, mais il en allait du sort de son peuple…
Et de l’univers tout entier.

Le Dieu du Tonnerre regarda à nouveau les étoiles briller de mille feux par-delà la baie vitrée
du vaisseau… Il remit Stormbreaker sur la hanse gauche de sa ceinture puis il posa sa main
sur la vitre, ses yeux emplis d’une détermination indestructible et incandescente.

Mes amis… Je suis désolé d’être parti aussi longtemps. Pensa-t-il en revoyant le visage de
ses compagnons Avengers dans son esprit. Est-ce que tout va bien sur Terre ? J’aurais
préféré que ce voyage ne soit pas annonciateur d’une guerre à l’échelle cosmique…
Cependant, je sais que je ne peux pas affronter Thanos seul. Vous êtes les personnes les plus
braves et les plus fortes que je connaisse… Des frères d’armes que je respecte et en qui j’ai
entièrement confiance. Si nous unissons nos forces… Peu importe à quel point l’horizon
semble plongé dans les ténèbres, la lumière finit toujours par en émerger. Ce n’est pas au
destin de décider de notre futur… C’est nous qui le créons de notre propre volonté.

L’ombre imposante de Thanos se dessina brièvement derrière lui par le biais de la fenêtre
pendant une poignée de secondes, avant de s’évaporer telle de la fumée.

Thanos… Il fut un temps où tu m’as tout pris. Le Statesman, mon peuple… Mon frère. J’ai
échoué plusieurs fois à les protéger, et mon ignorance a entraîné la mort de trillions de
vies… Mais je ne referai plus cet erreur. Cette fois-ci… Nous ne laisserons pas cette tragédie
se jouer. Nous sommes capables de créer un miracle… Car nous sommes les Avengers.
Sous la lumière

Un soleil étincelant brillait au-dessus de New York en ce début de grandes vacances. Les
habitants de la ville ont progressivement délaissés leurs vêtements aux teintes sombres et
épais pour revêtir des tenues plus colorées et estivales à mesure que les températures
remontaient avec l’arrivée de l’été.

Spider-Man observait les rues du Queens en contrebas depuis un escalier d’évacuation, assis
sur l’un des grillages les plus hauts de la construction. L’école était enfin terminée pour Peter,
le libérant de toute obligation scolaire et de couvre-feu par May, et disposait ainsi de tout le
temps du monde pour se dédier à son rôle de protecteur de la mégalopole. Cela étant, les
mois de juillet et août furent tout aussi paisibles que celui qui venait de s’écouler donc le
jeune homme occupa la majeure partie de ses journées à regarder les passants aller et venir
depuis les hauteurs, n’intervenant qu’en cas de risque d’accidents graves ou pour éviter des
bagarres sauvages en plein milieu du quartier.

Comme il était de nature casanière en cette période de l’année, Peter évitait de vêtir son
costume rouge et noir tous les jours ; il ne voulait bien entendu pas inquiéter sa tante par
rapport aux blessures qu’il risquait de subir du fait de ses activités superhéroïques, mais il
aurait surtout du mal à justifier ses sorties sans qu’elle ne finisse par se poser des questions à
ce sujet. Le jeune homme ne pouvait pas utiliser à chaque fois la carte de la visite chez Ned
afin de couvrir ses absences car il suffisait qu’elle appelle ses parents pour qu’elle découvre
le pot aux roses, et prétendre vouloir simplement se balader dans les rues aurait fini par
devenir suspect. L’adolescent s’arrangea donc pour patrouiller en milieu de semaine, tandis
qu’il s’accordait le week-end pour se reposer et dormir - avec plus ou moins de succès.

Ce mardi fut une exception. L’hôpital où travaillait May l’a appelé en renfort pour remplacer
une collègue en arrêt maladie et dût donc s’y rendre pour la journée, le laissant dès lors seul à
leur appartement. Peter pensa au départ à faire une longue sieste ou bien programmer un
marathon de films afin de tromper l’ennui, mais en voyant le ciel azur dénué de nuages et la
lumière qui inondait la ville à travers la fenêtre de sa chambre, le jeune homme finit par se
dire que le temps fut trop apaisant pour rester enfermé chez lui. Il envoya alors quelques
messages à Ned et MJ afin d’organiser une sortie ensemble, mais son meilleur ami participa à
une réunion familiale et n’obtint aucune réponse de la jeune fille, signe qu’elle était occupée.
Puisqu’il se retrouvait livré à lui-même et qu’il n’avait rien d’autre à faire, Peter décida de
tuer le temps en enfilant son costume de Spider-Man. Il passa rapidement au cimetière des
autobus afin de dégager le chemin qui menait à son repère à cause d’une carcasse qui s’est
écroulée sur la voie, puis il se balança d’immeubles en immeubles avec ses toiles jusqu’à ce
qu’il s’arrête quelque part dans son quartier pour profiter de la tranquillité des lieux.

Les minutes s’écoulèrent dans un silence confortable, quand Peter entendit soudainement des
bruits retentir juste en dessous de sa position. En prêtant attention à la source des sons, le
superhéros araignée distingua des voix fortes et une plus faible. Il baissa alors le regard et
aperçut deux délinquants dans le milieu de la vingtaine qui barrait la route d’un garçon qui
paraissait avoir son âge, le malheureux se retrouvant coincé contre le mur du fond de la
ruelle. Bien que Peter ne parvienne pas à discerner leurs visages, il comprit assez vite à leurs
tons menaçants que les malfrats comptaient voler les objets précieux de leur victime,
probablement son portefeuille ou son portable. Cependant, ils étaient loin de représenter un
danger pour le gardien de New York ; quelques coups bien placés seront suffisants pour les
arrêter.

Vous êtes tombés au mauvais endroit pour commettre une agression, les mecs. Pensa Spider-
Man en remettant sa capuche sur sa tête.

Peter détacha une de ses bombes fumigènes de sa ceinture, actionna son mécanisme puis la
laissa tomber sur plusieurs mètres avant qu’elle n’explose et rejette de la fumée rouge. Dès
lors que la vue des deux délinquants s’obstrua, Spider-Man se jeta à son tour dans le vide
avant d’atterrir au sol et de s’élancer sur les gredins, son bâton de combat à la main, puis de
leur asséner deux coups aux ventres avec son arme afin de les immobiliser et enfin les
assommer avec son taser avec une petite décharge électrique de faible intensité au niveau du
cou. Une fois le rideau carmin entièrement dissipé, le superhéros rabaissa son sceptre et le
rattacha à sa ceinture, poussant par la suite un petit soupir de soulagement derrière son
masque.

- Est-ce que ça va ? Demanda-t-il par automatisme en se tournant vers l’adolescent.

- O… Oui, je vais bien. Répondit-il avec stupeur et admiration d’avoir été sauvé par le
gardien de New York en personne.

Le jeune homme ne fut heureusement pas blessé lors de l’intervention de Spider-Man. Le


superhéros le rassura alors qu’il n’avait plus rien à craindre des délinquants et qu’il pouvait
rentrer tranquillement chez lui car le quartier était sûr, ce que fit le garçon en prenant tout de
même le temps de le remercier avant de quitter la ruelle et disparaître dans la rue. Peter
remonta ensuite jusqu’au toit de l’immeuble à sa gauche grâce à ses toiles, s’étira les bras par
réflexe, puis il se décida à effectuer une courte patrouille au cas où un incident similaire
viendrait à se produire. Certes, la criminalité devint quasi nulle de par ses arrestations éclairs
mais les agressions de citadins restaient un problème, notamment en été. Le justicier s’envola
ainsi partout au Queens, scrutant depuis les airs la vie qui circulait sous ses pieds… Et rien
d’inhabituel ne se passa. Hormis l’attaque puérile des deux gredins qu’il a découvert par pure
hasard, aucune menace ne perturba la paix de New York.

Après une demi-heure où son sens de l’araignée demeurait en berne, Peter s’arrêta une
nouvelle fois sur le toit d’un gratte-ciel et mit un terme à sa patrouille. Il semblerait que
l’hyper vigilance de Spider-Man ne soit pas nécessaire aujourd’hui, et il ne tenait pas
spécialement à inonder inutilement son uniforme de sueur à cause de la chaleur… Le jeune
homme rentra donc chez lui par la fenêtre de sa chambre, se dévêtit de son costume
superhéroïque en cinq minutes, puis il le rangea dans un sac qu’il cachait soigneusement sous
son faux-plafond avant de remettre des vêtements civils appropriés pour la saison. Il ressortit
ainsi à nouveau de son appartement - cette fois-ci par la porte d’entrée -, puis ses pas
l’emmenèrent en direction de Flushing Meadows Park afin de continuer de profiter de la
lumière du soleil. Une fine brise caressa sa peau tandis qu’il marchait le long des chemins de
pierres blanches, et une douce odeur de végétation humide lui parvint au nez…

Je me demande à quand remonte la dernière fois que j’ai pu vivre un après-midi banal
comme celui-ci. Pensa Peter, les yeux baissés. Un après-midi sans que mon sens de
l’araignée ne s’affole, où je peux penser à autre chose que mes responsabilités de
superhéros, même pendant un court instant… J’ai passé tellement de temps à répéter les
mêmes boucles et les mêmes tragédies que ces moments de tranquillité où ma vie ne se
retrouve pas en danger me paraissent lointain.

Au bout de trois quart d’heure de marche, Peter arriva tout à l’ouest du grand parc, vers une
zone dégagée et peu fréquentée du public du fait de sa longue distance par rapport à la sortie
de l’espace vert. Deux groupes d’amis furent assis sur l’herbe pour dormir ou pour jouer au
football, mais il ne discerna aucune autre présence à part lui et eux. Ce fut du moins ce qu’il
pensait avant que son regard se tourne vers l’un des bancs présents sur la place sur laquelle
était dessinée une silhouette. Il aperçut alors un jeune homme aux cheveux noirs et à la peau
basanée, habillé avec des vêtements de teintes grises et noir, les yeux baissés et dont les traits
du visage lui apparurent familiers.

Flash ?

Les yeux du monte-en-l’air s’écarquillèrent sous l’effet de la surprise. Que faisait Flash
dehors ? Ce n’était pourtant pas dans ses habitudes de sortir tout seul, surtout en été où il
préférait organiser des soirées chez lui plutôt que de vagabonder dans les rues. Cependant,
Peter a constaté de ses propres yeux que la scission entre lui et son ancien groupe d’amis fut
bien réelle, ce qui rendait le scénario du jeune héritier se baladant en solitaire dans le Queens
plus vraisemblable.

Quelques minutes s’écoulèrent durant lesquelles Peter demeurait immobile sous le coup de la
confusion, jusqu’à ce que Flash relève soudainement la tête et croise son regard. L’adolescent
au teint mat se redressa en un sursaut à la vue du jeune homme, tout aussi choqué que lui de
croiser la route d’un de ses camarades dans un parc aussi grand que Flushing Meadows Park.
Un long silence s’installa alors entre les deux garçons… Aucun d’entre eux n’osait esquisser
le moindre mouvement ni même tourner la tête vers une autre direction pour rompre leur
contact visuel, ce qui rendit cette suspension du temps de plus en plus inconfortable.

- … Parker ? Finit par murmurer Flash après cinq minutes qui parurent en durer une
quinzaine, sortant d’un seul coup Peter de son état d’hébétement.

Tiens… Il ne m’a pas appelé "Péteur". Remarqua mentalement le superhéros araignée.

Peter prit une longue inspiration afin de calmer son rythme cardiaque saccadé, puis il
répondit d’une voix polie et posée :

- Salut. Je ne m’attendais pas à te voir ici.

- Oh… Hum… Moi non plus. Avoua son ancien harceleur en détournant le regard.

- Ça fait combien de temps que tu es ici ?

- Deux heures, je crois. Il marqua une pause. Il n’y a personne à la maison… Alors je préfère
rester dehors que d’être cloîtré tout seul chez moi.
Peter garda la bouche fermée. Il semblerait qu’ils eurent tous les deux la même idée pour cet
après-midi ensoleillé. Le jeune homme ne bougea pas durant une poignée de secondes, puis
en sentant ses pieds s’engourdir à cause de sa marche, il se rapprocha du banc où se trouvait
Flash et s’assit à côté de lui. Ce dernier le regarda brièvement avant de baisser de nouveau les
yeux vers le sol, le corps courbé vers l’avant et le visage manquant d’expressivité. Le silence
revint à nouveau les entourer, entrecoupé de temps à autres par le boucan causé par le groupe
d’amis posé sur l’herbe non loin d’eux… L’adolescent à la peau basanée paraissait en proie
au doute, tandis que Peter ignorait s’il valait mieux entamer une discussion avec Flash ou au
contraire rester à l’intérieur de cette bulle de tranquillité sans prononcer un mot. La situation
en elle-même fut inédite pour le jeune héros… C’est la première fois depuis qu’il est dans
cette boucle temporelle qu’il converse seul à seul avec le riche héritier, et leur échange aussi
bref soit-il fut purement cordial, de la même manière qu’il discute avec ses deux meilleurs
amis. Pas de remarques sarcastiques, pas de moquerie ni même de piques superficielles…
Rien. Flash ne l’a même pas chassé du banc lorsqu’il s’est assis à ses côtés, un signe assez
clair qu’il acceptait sa présence.

Peter n’attendait pratiquement rien de la boucle… Pourtant, il lui apparut difficile de taire sa
curiosité par rapport au changement de caractère de son camarade. Tout en lui paraissait
différent du harceleur qu’il a connu au collège, passant d’un sale gosse prétentieux à un jeune
homme quasiment muet… Quelque chose a dû se produire pour conduire à un tel revirement.

L’adolescent se tût quelques secondes, puis il se risqua à reprendre la parole.

- Dit.

- Hm ?

- Ça fait un moment que je le remarque… Mais tu as l’air plus silencieux que d’habitude. Pas
juste maintenant, mais aussi à l’école. Il marqua une pause, puis il tourna la tête vers Flash.
Il s’est passé quelque chose ?

Flash ne répondit pas pendant dix minutes, instant durant laquelle il semblait mettre de
l’ordre dans son esprit, jusqu’à ce qu’il finisse par soupirer.

- … J’ai juste réalisé à quel point je suis un imbécile.

- Hein ? Le jeune homme aux cheveux bruns ne s’attendait pas à ce type de réponse.

Le riche héritier devina assez vite la confusion dans le regard du garçon araignée. Il laissa
planer un silence avant de parler de nouveau.

- En fait… J’ai eu des rêves bizarres pendant un certain temps.

- Des rêves ? Cette information attira l’attention de Peter.

- Ouais. Je ne me souviens pas de tous les détails, mais je me voyais à Midtown High en train
de mener ma vie normale au lycée. Rien ne paraissait inhabituel… Si ce n’est la silhouette au
visage noir que je croisais dans les couloirs.
- Une silhouette noire ? Un peu comme une ombre, tu veux dire ?

- Pas vraiment. Plutôt comme quelqu’un dont l’identité était volontairement cachée, ce qui
fait que je n’arrivais pas à savoir de qui il s’agissait. Il m’arrivait de lui adresser la parole de
temps en temps… Du moins, je crois. Le temps s’écoulait tellement vite que je passais d’un
jour à un autre en un éclair. Et à un moment donné… Cette personne inconnue marcha
rapidement vers moi et m’asséna une énorme gifle.

- Quoi ?

- … Le coup fut si fort que j’en suis tombé par terre. Continua Flash d’une voix plus basse,
tout en passant sa main sur sa joue droite. Je croyais même le sentir physiquement contre ma
peau tellement il fut violent. Après ça… La silhouette s’est mise à me hurler dessus avec
toute la rage et le ressentiment du monde. Je me souviens encore de ses paroles… ‘Qui es-tu
pour juger de la vie des autres ? Je sais que je suis différent des autres, je sais que tout le
monde me voit que comme un misérable gamin sans avenir, je sais que je n’aurai plus jamais
ce qui apparaît pour tout le monde ici comme une évidence. Tu n’as pas besoin de me le
répéter chaque jour car je vis constamment avec ces pensées en tête, du matin jusqu’au soir.
Tu ne sais pas ce que ça fait de se sentir responsable des conséquences d’une terrible erreur,
tu ne sais pas ce que ça fait de perdre ce qui t’est cher encore et encore, tu ne sais pas ce que
ça fait de se sentir horriblement seul même quand tu es au beau milieu d’une foule et que
personne ne t’écoute parce que tu n’es qu’un gosse… Tu ne sais rien de tout ça. Tu ne sais
rien de moi. Tu n’es qu’un égoïste qui ne voit rien des problèmes et des blessures des autres
et qui croit que tout lui est dû’.

Le bruit du vent soufflant à travers le feuillage des arbres se fit entendre non loin de Peter et
Flash. Le superhéros sentit des gouttes de sueur perler sur son front, son dos se geler et son
cœur manqua de louper plusieurs battements, tandis que les traits de son visage affichèrent un
choc pur. Ce que l’adolescent à la peau basanée venait de raconter, la gifle infligée par cette
ombre fantomatique ainsi que ses mots… Ce ne fut pas un simple rêve.

Cet événement s’est réellement produit dans une précédente boucle.

Peter s’en souvient… Le poids de ses échecs de ses itérations commençait à peser lourd sur
son mental, et l’impression de ne pas être pris au sérieux par des adultes du fait de son jeune
âge lui donnait un goût amer à la bouche. D’autant plus qu’il n’arrivait pas à échapper aux
attaques furtives de son assassin malgré ses nouvelles compétences accrues… Les dernières
timelines qu’il a expérimentés furent émotionnellement difficiles à traverser pour
l’adolescent, si bien que dans l’une d’entre elle, sa rage prit le dessus sur sa raison et il s’est
disputé avec une personne de son entourage. Etait-ce Tony ou May ? Ou bien Ned ? Peter ne
s’en rappelait plus. Son cerveau a pris soin d’oublier quels ont été les raisons qui ont mené à
cet échange houleux. Toujours est-il qu’une partie de ses idées noires demeurèrent présentes
le lendemain, qu’il essaya tant bien que mal de maintenir sous contrôle pour ne pas faire de
vagues au lycée… Jusqu’à ce que Flash décide de le rabaisser devant des étudiants en se
moquant de sa condition d’orphelin du fait qu’une sortie parentale était organisé par Midtown
High qui devait avoir lieu dans une semaine… Le jour même de la mort de son oncle Ben.

Cette information, de même que les piques du riche héritier arrivant au pire moment possible,
brisa en éclats le verrou qui enchaînait les émotions brûlantes du garçon araignée, et sa main
frappa la joue de la brute d’école sous le coup de l’impulsion. La gifle fut si forte que le bruit
résonna dans tout le couloir, immobilisant tous les élèves présents à ce moment-là et baignant
le lieu dans un silence assourdissant. Cette suspension du temps s’évapora lorsque Peter se
mit alors à crier sur Flash ; sa tristesse de voir ses êtres chers mourir les uns après les autres,
sa colère refoulée d’être maudit par une malchance qui lui interdit de prétendre à un bonheur
comme celui de ses camarades de classe, sa frustration d’être pris en pitié par les autres ou
moqués derrière son dos pour ne pas rentrer dans les normes… Tout a fini par exploser à cet
instant, avec Flash devenant malgré lui l’exutoire à son désespoir. Le jeune homme ignorait
ce qu’il s’est passé par la suite dans cette boucle, mais il s’en est voulu d’avoir perdu son
sang-froid à ce moment-là et n’a plus jamais recommencé cet acte lors de ses prochains
essais.

Il était jusqu’à présent persuadé d’être le seul à conserver ses souvenirs de la boucle
temporelle… Pourtant, Flash a aperçu en rêve un événement passé qui n’est pas arrivé dans
ce monde ; Tout du moins partiellement, car il ne se rappelle pas que c’était lui qui l’a giflé -
et il fut intérieurement soulagé qu’il ne se doute de rien à ce sujet.

- Je ne sais pas ce qui est arrivé pour que je fasse ce genre de rêve… Mais ces mots sont
restés gravé dans ma tête. Flash serra ses mains. Et… À mesure que les jours passaient…
J’ai commencé à réaliser que ma vie n’était pas aussi heureuse que je le pensais. Les mecs
qui prétendaient être mes amis ne s’intéressaient à moi que pour mon statut social et n’en ont
jamais eu quelque chose à faire de moi en tant que personne. Les gens à l’école aussi… Je
sais que tout le monde se fiche que je sois là ou pas. Si je décidais de quitter le club de
décathlon, personne ne chercherait à me retenir. Quant à mes parents…

Silence. Un sourire triste se dessina par la suite sur les lèvres du riche héritier.

- Je ne suis plus sûr de savoir s’ils m’aiment vraiment.

- Flash… Le superhéros voulait dire quelque chose pour le rassurer, mais ce dernier le
coupa.

- Tu sais, Parker… Je me suis moqué de toi pendant des années en te traitant comme
quelqu’un de pathétique… Mais au fond, c’était moi le plus pathétique de nous deux.
Contrairement à toi, je n’ai pas de vrais amis comme Ned ou cette fille MJ et je n’ai pas le
soutien ou l’amour inconditionnel de mes parents comme tu l’as avec ta tante. Je n’ai pas non
plus la même aisance d’apprentissage ou la même force de volonté que toi. Je me doutais que
mon mode de vie ne me rendait pas vraiment heureux… Pourtant, au lieu d’avoir le courage
d’en parler à quelqu’un, je me suis enfoncé dans mes travers au point que mes privilèges me
sont montés à la tête et m’aliènent de tout. J’ai fini par me croire meilleur que tout le
monde… Alors qu’en réalité, je ne suis qu’un garçon stupide et sans intérêt. J’ai pris
conscience de mes torts trop tard… Et après tout le mal que j’ai causé, directement ou non, je
ne pense pas que quiconque me pardonnera pour mon arrogance passée.

Peter ne put s’empêcher de ressentir un nœud au creux de son estomac au fur et à mesure que
Flash confessait ce qu’il avait sur le cœur. Il comprenait désormais pourquoi l’adolescent à la
peau basanée s’est retrouvé isolé du reste des étudiants de Midtown High… Cependant, il
était loin d’imaginer le poids qui pesait sur ses épaules depuis tout ce temps. Aux vues de sa
voix peu élevée et de son langage corporel replié sur lui-même mais bravant ses incertitudes
pour parler, le superhéros araignée sut que l’ancien harceleur disait la vérité et que ses regrets
étaient sincères.

C’est incroyable… Pensa-t-il. Je croyais qu’à part mes actions en tant que Spider-Man, rien
de ce que je réalisais en tant que Peter Parker ne marcherait… Et pourtant…

- … Pardon. S’excusa soudainement Flash, ce qui attira de nouveau l’attention de Peter. Je


me suis mis à monologuer sans m’en rendre compte.

- Non, ce n’est pas grave. Répondit calmement l’adolescent aux cheveux bruns, à la surprise
de Flash. Tout ça semblait te troubler pendant longtemps… Si ça a pu t’aider à t’apaiser,
alors tant mieux.

- Vraiment ?

- Oui, ne t’inquiète pas.

Les bruits aux alentours du parc se sont arrêtés. Il y eut par la suite un moment de
flottement… Dire que Flash fut immobilisé sur place serait un euphémisme. Il a longuement
hésité à révéler à son ancienne victime les pires aspects de sa personne et les doutes qui le
rongeaient. Rien n’obligeait ce dernier à l’écouter ni même à lui accorder du temps, surtout
après l’avoir utilisé comme défouloir de son complexe d’infériorité pendant des années.
Cependant, son camarade ne l’a pas interrompu ni juger… Il l’a laissé se confesser avec la
même gentillesse et attention qu’il montrait envers n’importe qui, peu importe leur passé
chaotique. Quelques minutes s’écoulèrent dans un silence paisible… Puis après une profonde
inspiration, il réunit suffisamment de force pour révéler à Peter ce qu’il voulait réellement lui
dire.

- … Je suis désolé, Parker. Je suis désolé d’avoir été cruel envers toi. Tu… Tu n’as pas à me
pardonner si tu n’en as pas envie. Tu as le droit de m’en vouloir pour le mal que je t’ai fait, et
je sais que de simples excuses n’effaceront pas des années de harcèlement… Mais je suis
vraiment désolé pour tout.

Peter regarda silencieusement le riche héritier. Après tout ce que son camarade lui a raconté,
il lui apparut impossible d’être rancunier envers Flash. Non seulement il s’est rendu compte
de ses erreurs et de son mauvais comportement, mais il a pris son courage à deux mains pour
lui en parler directement. De plus, même si ses gestes paraissent discrets, le jeune homme a
remarqué que Flash travaillait sur lui-même afin de s’améliorer en tant qu’individu : il le
voyait régulièrement à la bibliothèque de l’école durant les pauses en train d’étudier
sérieusement toutes les matières qui lui faisait défaut, il s’investissait davantage dans les
cours de décathlon - notamment par rapport au travail d’équipe - et des rumeurs courent qu’il
aurait lui-même rapporté le nom de ses anciens "amis" au proviseur pour des agissements de
harcèlement de son propre chef, menant à leur expulsion du fait de leurs récidives. Même si
Peter continuait de se reprocher de l’avoir frappé durant une précédente boucle, cette action
non calculée a conduit à un changement positif dans celle-ci. Mineur, peut-être, mais le
superhéros araignée ne s’en plaignit pas.

Peut-être que mes actes en tant que Peter Parker ne sont pas tous vains, finalement…
L’adolescent aux cheveux bruns posa alors doucement une main sur l’épaule de Flash, qui
tourna ensuite la tête vers sa direction.

- Merci, Flash. C’est gentil de m’avoir parlé de tout ça. Ça fait beaucoup d’informations
apprises en plusieurs minutes et j’ai encore un peu de mal à tout enregistrer, mais je
n’éprouve aucun ressentiment pour toi. Tu as pris conscience de tes faux-pas et tu fais de ton
mieux pour changer… Je n’ai aucune raison d’être en colère contre toi. Il marqua une courte
pause. Tu sais, si jamais tu veux passer du temps avec moi, Ned et MJ à l’école, tu peux.

- Hein ?

- Je sais combien c’est pesant d’être seul… Surtout dans un milieu aussi suffocant qu’un
établissement scolaire. Et puis, détourner le regard de quelqu’un qui veut repartir de zéro et
corrige ses défauts de lui-même simplement parce qu’il s’est mal comporté et a commis des
erreurs par le passé… Je ne pense pas que ce soit juste. C’est pour ça que si tu as envie de
discuter avec quelqu’un ou si tu cherches de l’aide, tu peux venir nous voir.

- … Merci. Cependant, je ne pense pas que Ned et MJ partageront la même idée… Répondit
Flash en baissant le regard.

- Je suppose qu’ils mettront un peu plus de temps à voir et à accepter celui que tu es devenu
aujourd’hui. Mais même si ça finit par ne pas être le cas, je suis prêt à te donner une
deuxième chance.

- V… Vraiment ?

Peter hocha la tête en signe d’approbation. Plusieurs secondes s’écoulèrent, quand une larme
coula alors le long de la joue de Flash… Il s’en aperçut rapidement et l’essuya avec la paume
de sa main. Même s’il parvenait difficilement à cacher ses émotions, le riche héritier se sentit
touché par la déclaration du garçon araignée. Il s’attendait sincèrement à ce que Peter le
déteste et ne souhaite plus lui adresser la parole à cause de ses fautes… Pourtant, son
camarade semblait accepter de lui pardonner.

- Merci… Peter. S’exprima simplement Flash entre deux reniflements.

Le superhéros écarquilla brièvement les yeux en entendant l’adolescent à la peau basanée


l’appeler pour la première fois par son prénom, puis il reprit son calme et lui tapota
délicatement les bras pour le réconforter. En y repensant, Tony avait l’habitude de l’aider à se
détendre de cette manière quand il se sentait triste il y a très longtemps de cela, lorsqu’ils ont
commencé à interagir en tant que mentor et élève… Il faut croire que certains tics de cette
relation qui n’existent plus entre lui et le milliardaire sont restés inconsciemment avec lui,
peu importe combien de fois Peter a recommencé ces deux ans et demi de sa vie.

Une fois la pression retombée, Peter et Flash se mirent ensuite à discuter de tout et de rien.
Leur conversation fut un peu gauche, les mots maladroits, mais les phrases se sont malgré
tout enchaînées et ils se permirent même quelques sourires discrets, si bien qu’ils en
oublièrent le temps qui passe. Le milieu de l’après-midi approcha alors et le riche héritier
décida de rentrer chez lui à ce moment-là avant le retour de son oncle - qui le gardait à la
place de ses parents partis en voyage d’affaire. Il murmura un "au revoir" timide mais sincère
envers Peter, qui le lui rendit en retour, puis il disparut peu à peu du champ de vision du
garçon araignée jusqu’à ce qu’il se retrouve complètement seul sur l’espace vert.

Le vent souffla à nouveau à travers les arbres, amenant sur son passage l’odeur de l’humidité
imprégnant la végétation jusqu’au nez de Peter. Ses épaules auparavant frigorifiées se
détendirent progressivement à mesure qu’il se concentra sur sa respiration. Qui aurait cru que
cette balade qu’il pensait normale et sans histoire se transformerait en discussion à cœur
ouvert avec Flash ? L’adolescent fortuné apparut plus sensible et conscient de lui-même qu'il
ne le montre. Cela étant, cette conversation éveilla en lui plusieurs questions… Comment se
fait-il que quelqu’un d’autre que lui ait pu se remémorer d’un événement de la boucle
temporelle ? Aucune des timelines qu’il a vécus n’ont indiquées qu’un tel phénomène était
possible. Certes, il arrivait que les héros qu’il côtoyait accordaient un peu plus d’attention à
ce qu’il leur racontait durant certaines boucles, mais ce ne fut pas systématique. Rien ne
démontrait jusqu’alors que quiconque à part le superhéros araignée puisse se souvenir de
détails qui ne sont pas arrivés dans cette temporalité… Etait-ce un hasard ou bien un effet
secondaire qui commençait à se manifester, de la même façon que le temps tourna
soudainement au ralenti durant des situations de danger lors de ses patrouilles ?

J'ai toujours pensé que rien ne changerait dans les boucles... J'ai toujours pensé que je
n'aurais jamais le droit d’avoir un futur lumineux, peu importe ce que je ferais. Mais alors
comment… ?

Docteur Strange observait l’extérieur depuis la Fenêtre des Mondes, au sommet du Saint des
Saints de New York. Son visage grave et sa posture droite fit ressortir son statut de gardien
mystique de la Terre, tout en dissimulant le flot de pensées qui traversait son esprit…

Plusieurs mois auparavant, Wong s’est déplacé du Saint des Saints de Hong Kong jusqu’à son
antre pour lui signaler la présence de sorciers blessés réfugiés dans son sanctuaire. Stephen se
rendit alors immédiatement avec son ami de l’autre côté du globe afin de comprendre ce qu’il
se passait. Une fois arrivé sur place, les magiciens révélèrent au superhéros qu’ils ont été pris
pour cible par une personne qui semblait appartenir à leur ordre, de la même manière que
Kaecilius lorsqu’il s’est retourné contre l’Ancien et a renié les fondements des arts
mystiques. Ils essayèrent au départ de se défendre contre cet homme avec leur magie, mais
malgré leur surnombre et leur union, le renégat au visage dissimulé par un foulard parvint à
contrer seul leurs attaques, retira de force les pouvoirs d’une partie d’entre eux et tua de sang-
froid les malheureux qui ne purent s’échapper à travers des portails.

Docteur Strange enquêta alors sur ce mystère, et au fur et à mesure que les semaines
s’écoulaient, il découvrit que plusieurs attaques surnaturelles de ce genre se sont produites
dans différents pays du monde. De nombreux sorciers furent ciblés par un individu à
l’identité inconnue dont le mode opératoire demeurait strictement identique : le coupable
s’approche de sa victime par surprise, se bat frontalement contre lui et finit soit par lui voler
sa magie et l’abandonner agonisant dans son repère soit par l’assassiner afin de le réduire au
silence s’il venait à le reconnaître au cours du combat. Quelques mutants furent eux aussi
malencontreusement pris dans son sillage, bien qu’il apparut très vite aux yeux de Stephen
qu’il s’agissait de victimes collatérales et non des principaux sujets de l’ire du criminel.
En plus des attaques de ce tueur en série mystique, le Sorcier Suprême remarqua que la Pierre
du Temps émit des vagues d’auras de façon sporadique, sa lumière émeraude gagnant en
intensité durant quelques secondes avant de revenir à son état normal en un battement de cil.
En tant que protecteur de la Pierre de l’Infini, seul lui était en mesure de la manipuler et
d’utiliser ses capacités. Cependant, il n’a plus touché à la gemme verte depuis son combat
contre Dormammu, ce qui signifiait qu’elle fut exploitée par un autre individu tout aussi
puissant - si ce n’est plus - que lui. Peut-être pas dans ce monde… Mais possiblement dans
un autre, parmi les innombrables dimensions du multivers, dont les effets latents
influenceraient celui-ci.

Stephen entama ainsi un long voyage hors du temps, remontant le cours de ce fleuve
ineffable afin de découvrir les origines de ces phénomènes étranges… Et il est parvenu à
atteindre la vérité sur leurs mystères.

Qui est le responsable de la création de la boucle temporelle.

Quel est la durée d’une boucle, ainsi que la manière dont elle s’arrêtait pour recommencer.

Qui a hérité de pouvoirs temporels à travers la Pierre du Temps.

Qui est le coupable derrière la chasse des sorciers mystiques, quel est son objectif…

Ainsi que sa prochaine cible.

Docteur Strange serra les poings. La vitre de la Fenêtre des Mondes refléta ses yeux emplis
de détermination et sa volonté d’acier.

Je ne te laisserai pas t’en prendre à Spider-Man… Mordo.


Temps arrêté

- "La lune. Elle ressemble à une petite pièce de monnaie. Elle est froide et chaste."

Peter murmurait cette réplique de Salomé en contemplant l’astre lunaire scintillant au-dessus
de sa tête, perché sur le rebord d’un gratte-ciel sous son identité de Spider-Man. La
température de cette nuit d’été fut douce ; le vent qui circulait entre les immeubles était un
peu tiède, mais l’atmosphère de la ville demeurait respirable, évitant ainsi au jeune homme
d’étouffer de chaleur sous son masque.

May dût dormir exceptionnellement à l’hôpital à cause de nombreuses urgences qui ont
rallongé son service au point qu’il lui était difficile de rentrer à la maison à cause de l’heure
tardive, ce qui plongea leur appartement dans un silence complet. Puisque le sommeil refusait
de venir à lui, Peter tua au départ le temps en écoutant de la musique et en lisant des pièces de
théâtre, la combinaison du son et de la lecture formant autour de lui une bulle confortable où
il oubliait temporairement le monde en attendant de tomber dans les bras de Morphée.
Cependant, contrairement aux précédentes nuits d’insomnies qu’il a pu vivre, son cerveau
n’arrivait pas à se détendre, si bien qu’il perdit petit à petit le fil de sa lecture jusqu’à ce que
sa concentration lui échappe. Même la musique à ses oreilles ne parvenait pas à taire le flux
de pensées qui envahissait son esprit. Le jeune homme, sachant qu’il passera la nuit seul chez
lui, décida alors de vêtir son costume de héros afin de s’aérer dehors quelques temps et
alléger sa tête lourde.

Le lendemain de sa discussion avec Flash quatre jours auparavant, Peter a commencé à se


poser des questions sur la boucle actuelle… Lorsqu’il s’est "réveillé" dans cette nouvelle
itération, il ne se préoccupait pas de s’attarder sur des événements dont il était certain de leur
finalité comme l’attaque d’Ultron en Sokovie, la création des Accords et la Guerre Civile
entre les Avengers par rapport à leurs positions sur ces documents gouvernementaux.
Combien de fois a-t-il assisté aux mêmes causes et effets qui ont amenés à la séparation du
groupe de superhéros, dont les conséquences influenceront la direction que prendrait la
Guerre de l’Infini contre Thanos des années plus tard ? L’adolescent a fini par se lasser de les
compter. Il a essayé lors de ses premières boucles de modifier leurs tournures à sa petite
échelle, mais il savait au fond de lui que les paroles d’un jeune héros dont les pouvoirs
venaient tout juste de s’éveiller ne disposaient d’aucun poids face à des légendes vivantes
comme Iron Man, Captain America ou Black Widow, et il ne put que contempler impuissant
l’implosion interne des symboles de l’héroïsme, qu’il soit présent durant la bataille ou en tant
que témoin extérieur s’il n’y participait pas. De ce fait, Peter abandonna vite l’idée que ces
instances puissent changer et n’y accorda par la suite plus la moindre attention.

Cependant, en écoutant la confession de son camarade d’école, l’âme du jeune homme fut
secouée par le doute… Il prit alors son portable et chercha des informations sur les actualités
les plus récentes concernant les Avengers. La moitié de l’année venait de s’écouler, ce qui
signifiait que les Accords ont déjà été signés et que seuls Tony et Rhodey habitaient la Tour
de l’ancienne équipe de superhéros, dont plus de la moitié des membres disparurent des
radars des autorités mondiales dû à leur statut de "hors-la-loi". Peter a vécu le même scénario
tellement de fois qu’il en connaissait le déroulement par cœur. Il s’attendait dès lors à relire
les mêmes articles de presse sensationnalistes saupoudrées de superlatifs, de théories
farfelues et de jugement à peine dissimulée de la part des médias et de l’opinion publique qui
ont perdu foi envers les Défenseurs de la Terre…

Pourtant, au bout d’une heure de recherches, l’adolescent découvrit avec stupeur que cette
boucle différait grandement de celles qu’il a expérimentées jusqu’à présent. Ultron n’apparaît
nulle part sur internet, que ce soit dans la presse ou sur des forums d’adeptes de théories, par
photographie ni même mention. Une grande bataille a bien eu lieu en Sokovie, mais les
responsables du chaos dans le pays que les Avengers ont arrêtés furent les derniers
groupuscules d’HYDRA et non l’androïde destructeur. Il en était de même pour Lagos ; les
conséquences tragiques du combat opposant les plus grands héros de la Terre à Crossbones
ainsi que les effets latents de leur affrontement contre Ultron marquèrent un point de rupture
pour la population et conduira les Nations Unies à rédiger les Accords, non sans se douter
que ces textes entraîneront la dissolution des Défenseurs de la Terre, privant alors la planète
bleue de son atout le plus précieux pour contrer la future menace galactique que sera
Thanos… Cette fois-ci, en plus de la nouvelle tournure de la bataille de Sokovie, les
Avengers réussirent à arrêter le criminel sans causer de dommages collatéraux à l’exception
d’une seule et unique victime : Crossbones lui-même. Certes, le projet des Accords a
effectivement été mis en chantier puis acté, mais selon les informations disponibles au public,
la version définitive des documents gouvernementaux est beaucoup plus conciliante envers
les êtres extraordinaires que le texte d’origine de Thaddeus Ross du fait de longues
négociations entre l’équipe de superhéros et les officiels des Nations Unies. Ainsi, non
seulement les Avengers ne se sont pas séparés, ils paraissaient même plus unis que jamais en
comptant douze membres parmi leurs rangs, dont Peter apprit que l’un d’entre eux était le
frère jumeau de Scarlet Witch.

Le garçon araignée demeura estomaqué durant le reste de la journée à la suite de ces


découvertes… Connaître la raison qui a amené Flash à apprendre de ses mauvaises actions
passées et à devenir une meilleure personne fut surprenant, mais il pensait que ce changement
était une irrégularité propre à ce monde. Cependant, il était loin d’imaginer que des variations
aussi importantes aient pu se produire dans cette boucle. Ont-ils eux aussi vu des fragments
des précédentes timelines qu’il a traversées en rêve ? Ou est-ce qu’autre chose les ont poussés
à agir différemment dans cette temporalité, déréglant ainsi les rouages des tragédies ? Peter
l’ignorait, et son intellect ne trouva aucune réponse concrète à ces questions.

Il était difficile pour le jeune homme de nier sa curiosité par rapport à cette boucle. Une
partie de lui était soulagée que les Avengers aient réussi à régler le problème des Accords
sans recourir à un affrontement brutal entre frères d’armes. Si les lois écrites dans ce dossier
ont bel et bien changées, alors Spider-Man était désormais libre d’agir en toute indépendance
sans crainte d’être pourchassé par le gouvernement et enfermé au Raft à cause de ses
pouvoirs. Pourtant, malgré ces irrégularités aux résultats positifs, Peter demeura impassible…
Il ne connaissait que trop bien l'illusion douce-amère où une étincelle de lumière paraît à
portée de main, où l'espoir lui semble autorisé, avant qu'il ne se prenne un coup de couteau
dans le dos arrivant au pire moment et de la pire manière qui soit, éteignant ainsi la frêle
lueur et sombrant par la suite dans les abysses. Un sort terrible d'autant plus douloureux
lorsqu'il s'accrochait encore à ses idéaux d'optimisme... Le jeune homme ne se laissera pas
berner par ces mirages. Le monde n'était pas assez tendre pour qu'il prétende avoir le droit de
penser à lui-même ou de montrer ses faiblesses. Le seul souhait qu’il lui reste à présent était
de sortir de la boucle temporelle… Et rien d’autre.

Tandis que ses pieds se balançaient dans le vide, le sens de l’araignée du superhéros s’activa
soudainement à pleine puissance, ce qui attira immédiatement son attention. Ce devait être la
première fois depuis plusieurs mois que son sixième sens l’interpelle de cette manière…
Réaction qui se formait pour le prévenir d’un danger du niveau d’un super vilain comme le
Vautour. Une personne malveillante rôdait en ville, et elle semblait bien plus redoutable que
le trafiquant d'armes.

Peter se redressa du haut de son perchoir, remit sa capuche sur sa tête puis il se jeta dans le
vide et se balança dans toute la ville avec ses toiles, suivant assidûment son sens de l'araignée
afin de débusquer la source du danger. Au bout d'un quart d'heure de voltige, le superhéros
araignée atterrit au sommet d'une grue de construction, juste à côté d'une zone industrielle
déserte tout au nord de Brooklyn. Quelques usines de soudure se trouvaient à côté d'une
grande étendue d'eau dont on pouvait apercevoir des bateaux destinés à acheminer les
produits des entrepôts d'un point de collecte à un autre en voguant sur le fleuve Hudson.
C'était ici que se cachait la menace qu'a détecté Peter.

Le jeune homme observa l'environnement portuaire durant une poignée de secondes, inspira
profondément pour garder son calme, puis il dégaina son bâton de combat avant de sauter de
son point d'arrêt. Une fois que ses pieds touchèrent le sol, Peter avança prudemment à
l'intérieur de l'entrepôt principal à pas de loup, son sixième sens toujours en alerte et son
arme bien à l'avant afin de se défendre en cas de riposte. Le bâtiment fut entièrement plongé
dans le noir, et les machines d'assemblages demeuraient silencieuses comme des tombes.
Seul le bruit de son avancée dans les ténèbres insuffla une flamme de vie au cœur de l'usine
déserte.

Soudain, en arrivant au centre de l'entrepôt, le superhéros discerna les contours d'une ombre
imposante à une dizaine de mètres de lui, dos à lui. Aux vues de sa carrure, il s'agissait d'un
homme aussi grand que Steve Rogers et à la musculature semblable à celle de Sam Wilson.
Lorsque l'inconnu sentit la présence de Peter, il se retourna alors vers sa direction puis avança
de trois pas, permettant à l'adolescent d'apercevoir son apparence : l'homme à la peau
basanée, Karl Mordo, arborait de longs cheveux en dreds attachée en une grande queue de
cheval, ainsi qu'une tunique verte dont le style et la composition générale ressemblait à celle
de Docteur Strange, tandis que les traits de son visage furent fermes et d'une droiture froide.
Il n'en fallut pas plus pour que Peter comprenne qu'il fit face à un sorcier de la même trempe
que le Maître des Arts Mystiques, et sa présence dans la mégalopole ne présageait rien de
bon.

Mordo, bien que désarçonné par l'arrivée du superhéros araignée, garda cependant une
posture inflexible. Il observa silencieusement le jeune homme d'un air curieux avant de lui
dire d'un ton courtois :

- Ce costume... Il marqua une courte pause. Serais-tu le fameux Spider-Man dont parlent les
habitants de New York ?

- ... Entre autre. Se contenta de répondre Peter d'une voix basse, toujours en garde.
- Hm... Je t'imaginais plus grand que cela.

Peter ne répondit pas à cette remarque.

- Un membre des Avengers, je présume... Continua Mordo, toujours poli envers le


superhéros.

Il y a longtemps de ça. Pensa Peter. Et je n'ai jamais vraiment intégré l'équipe malgré avoir
été brièvement promu "Avengers" avant mon premier combat contre Thanos.

Le sorcier poussa par la suite un petit soupir.

- Ce ne sont pas eux qui m'intéressent. Je n'ai donc pas de raisons de t'affronter. En revanche,
celui que je veux voir est le Maître des Arts Mystiques de cette ville. Si tu pars maintenant, je
te laisserai t'en aller. Bien que la voix de Mordo soit restée posée, Peter ressentit une rancœur
enflammée contre Docteur Strange lorsqu'il mentionna son titre de superhéros. Quoi qu'il se
soit passé entre les deux hommes, le jeune homme comprit que si Mordo lui échappait, il
allait tuer Stephen.

- Je doute que votre venue à New York se résume à une simple discussion entre vous et lui.
Pourquoi vous vous serez reclus dans un endroit isolé à moins d'avoir un plan derrière la
tête ?

Le regard de Mordo, jusqu'alors impassible, commençait lentement à s'assombrir, similaire à


un individu ayant été percé à jour.

- … Tu ne comptes pas reculer, n'est-ce pas ?

Le silence du superhéros araignée suffit à résumer le fond de sa pensée. Le sorcier poussa un


petit soupir, puis il fit apparaître son bâton de combat d'un simple claquement de doigts. Dès
lors qu'il a son arme dans les mains, Mordo s'élance vers Peter pour lui asséner un coup mais
le jeune homme le para en un éclair avec son propre bâton, puis il écarta la longue lance de
son adversaire de sa trajectoire avec un coup de pied et l'attaqua de plusieurs frappes rapides.

Les armes de métal et de bois s'entrechoquèrent l'une contre l'autre à un rythme effréné, dont
les bruits des parages résonnèrent dans tout l'entrepôt. Mordo, fort de son expérience de
guerrier, manipulait son bâton de combat avec force et maîtrise, déployé sans l'ombre d'une
hésitation en accord avec son objectif : retirer les pouvoirs et tuer les sorciers qu'il estime
indignes et contre-nature. Cependant, Peter a considérablement augmenté sa défense au cours
de la boucle temporelle, si bien qu'il était capable de rivaliser avec un adulte de grande
carrure comme le renégat. À chaque fois que ce dernier visait une partie de son corps, le
superhéros esquivait instantanément les coups avant d'user de la fonction de rétractation de
son arme afin de surprendre Mordo et de le frapper au niveau de ses épaules ou de son torse,
lui faisant ainsi perdre l'équilibre durant quelques secondes.

L'assaut continua pendant de longues minutes. Mordo cherchait systématiquement à faire


tomber son adversaire à terre, mais le sens de l'araignée de l'adolescent lui permit de contrer
toutes ses parades. Soudain, au cours d'un énième entrechoc, le sorcier surprit le superhéros
en visant ses jambes avec son bâton de combat... Qui fut en réalité un coup bas pour le
distraire avant de lui asséner un coup de poing au visage. Peter arrêta l'attaque de justesse,
mais la puissance de la frappe fut si brutale qu'il recula de trois mètres.

Les deux combattants expirèrent de grandes bouffées d'air suite à ce combat au corps-à-corps,
leurs bâtons toujours dirigés vers l'avant...

- Heh... Tu es plus coriace que je ne le pensais. Déclara Mordo. Tu es même plus perspicace
et robuste que les sorciers mystiques que j'ai affronté, et ce alors que tu n'en es même pas un
toi-même. Je comprends mieux pourquoi la population t'appelle le gardien de New York.

- Je peux faire ça toute la journée. Répliqua Peter entre deux expirations.

- Malheureusement, je ne possède pas ce temps. Je te le redis une nouvelle fois : part de cet
entrepôt.

Silence...

Un immense nuage de fumée rouge apparût alors, enveloppant les deux hommes à l'intérieur
du rideau carmin. Quelques instants plus tôt, au moment où Mordo le prit de cours en
l'attaquant au niveau de ses jambes, Peter réussit à attraper une de ses bombes fumigènes à sa
ceinture et à la dissimuler au creux de sa main gauche durant le combat. Lors de la trêve entre
les deux combattants, le jeune homme activa la bombe à l'insu de son adversaire en appuyant
discrètement sur le bouton et en maintenant le doigt dessus afin de retarder son activation
avant de le relâcher au moment opportun.

Lorsqu'il entendit le sorcier tousser et grogner, Peter profita de cette diversion pour s'enfuir
de l'usine. Il regarda brièvement en l'air, en direction de la grue au-dessus de sa tête, et une
idée germa dans son esprit... Il rejoignit le sommet de l’échafaudage grâce à ses toiles, puis il
attendit que Mordo sorte du bâtiment. Après une dizaine de secondes sans le moindre
mouvement, la silhouette du renégat finit par se dessiner dans la cour de la zone industrielle ;
l'homme semblait furieux d'être tombé dans un piège aussi rudimentaire d'une personne qui
n'était même pas un sorcier. Une fois que Mordo se trouvait à une bonne distance de sa
position, Spider-Man appuya sur un bouton sur le manche de son bâton de combat, balança
son arme de toutes ses forces vers son ennemi, et lorsque l'une des extrémités de la lance
toucha le sol, un compartiment s'ouvrit de la poignée noire et dégagea une nouvelle fois de la
fumée, blanche cette fois-ci.

Le jeune homme se jeta alors dans le vide et étendit son bras droit devant lui afin
d'immobiliser Mordo avec ses toiles... Cependant, avant qu'il ne puisse tirer, son sens de
l'araignée l'avertit d'un danger imminent, et une ligne fluorescente fonça vers lui à vive allure,
se révélant être une chaîne lumineuse verte.

À la vue de cette arme magique, les yeux de Peter s'écarquillèrent sous le choc et son souffle
se coupa... En l'espace d'une seconde qui parût durer une minute infiniment longue, un flash
blanc lui fit revoir le souvenir de sa mort dans une ruelle sombre en 2023, plongé dans une
mare de sang et agonisant d'un tir en plein cœur... Emplacement dont se trouvait la chaîne
lors de sa chute.

Non... Non, pas ça... Pas encore...


Alors que l'écart entre le superhéros et la chaîne verte se réduisit, l'adolescent sentit son cœur
louper un battement et ses yeux se réchauffer, de manière plus concrète que lorsqu'il a
affronté les mafieux dans l'immeuble délabré. Son corps bascula soudainement en arrière,
comme attiré par un trou noir, et tomba jusqu'à atterrir violemment sur le sol en roulant par la
suite sur un mètre.

La tête de Peter tourna pendant une poignée de secondes après l’impact. Au fur et à mesure
que ses sens se stabilisèrent, il commença lentement à se redresser et aperçut alors son reflet
sur une flaque d’eau présente tout près de lui, lui montrant qu’une petite partie du côté droit
de son masque s’est déchiré. Si l’ouverture ne révélait simplement que son œil, le jeune
homme remarqua que son iris avait pris une couleur verte sans qu’il ne s’en rende compte.
Cela étant, outre l’apparition de cette teinte particulière à un moment où il s’y attendait le
moins, quelque chose d’autre attira son attention…

Le silence absolu qui l’entourait.

Pas un seul son ne retentit dans l’immense zone industrielle : aucune vague du fleuve venant
s’échouer sur la péniche, aucune fumée qui se dissipe suite à un vent puissant, aucun
crépitement d’étincelles de flammes… Rien. L’unique bruit qui parvint à ses oreilles était sa
propre respiration. Il se risqua à lever les yeux, relevant progressivement la tête afin d’avoir
une vue d’ensemble de son environnement, et il crut pendant un court instant que son souffle
lui échappa de nouveau.

Là où il eut l’impression que le monde sembla tourner au ralenti lors de son arrestation des
criminels, il était cette fois-ci complètement figé, gelé dans de la glace.

Le temps venait de s’arrêter.

Des gouttes d’eau s’écoulant de tuyaux métalliques restèrent suspendues dans les airs. La
fumée blanche qui s’échappait de son bâton de combat demeurait parfaitement immobile, de
même que l’ombre de Mordo qu’il distingua à travers elle ainsi que l’eau de la flaque en face
de lui. En plus de cela, Peter s’aperçut que les teintes dorées et noires dominantes de la zone
industrielle se sont transformées en couleur grise turquoise, comme si une barrière mystique
s’était formée autour du champ de bataille.

Le jeune homme passa une dizaine de secondes à calmer son rythme cardiaque en trombe en
inspirant et en expirant profondément. Dès lors que son corps se détendit, il leva la tête en
direction de la longue chaîne verte qu’a invoquée Mordo, alignée de manière impeccablement
droite et dirigée vers le ciel à l’endroit où il se situait il y a à peine quelques instants… À la
vue de la gestuelle du sorcier renégat, cette arme magique semblait se mouvoir comme un
serpent, apparut monstrueusement extensible et capable de se tordre dans tous les sens, ce qui
la rendait ainsi très versatile offensivement et défensivement en combat. Elle ressemblait à
une longue épée aiguisée comme un couteau, prête à ôter la vie de quiconque se retrouve être
sa cible.

Subitement, Peter se remémora ses assassinats durant les nombreuses timelines qu’il a
vécus… Bien que leur déroulement se soit passé différemment au fur et à mesure des
itérations, il mourrait à chaque fois à cause d’un coup au cœur, peu importe sa prudence et
l’expérience qu’il gagnait en tant que superhéros. Etant donné la rapidité et la brutalité de son
meurtre, Peter était incapable de discerner le mode opératoire de la personne qui le tuait ; le
seul indice dont il disposait était que l’inconnu se servait potentiellement d’une arme de
longue distance ou d’un piège élaboré afin de se débarrasser de lui à l’abri des regards.

En observant plus longuement la chaîne et en repensant à sa confrontation contre l’homme à


la peau basanée, un éclair de lucidité frappa l’adolescent… Il lui était facile de détecter la
présence d’une arme conventionnelle comme un pistolet ou un fusil de sniper grâce à son
sens de l’araignée et d’esquiver ses tirs en repérant la source de la détonation, même de loin.
Cependant, il arrivait que son sixième sens ne repère pas immédiatement une attaque issue
d’une source de pouvoirs magiques ou psychiques du fait de leur imprévisibilité, encore plus
si celle-ci n’émet aucun son ou bien soit masquée par sa vitesse… Telle que cette chaîne.

À ce moment-là, le brouillard qui recouvrait le mystère de sa mort en 2023 se dissipa et Peter


connaissait enfin l’identité de son assassin : Mordo.

Mordo est celui qui le tuait après la fin de la Guerre de l’Infini. C’est lui qui l’empêchait de
vivre au-delà de cet été, qui le poussait à répéter ces deux dernières années de sa vie et à
revivre les sacrifices de ceux qu’il admirait et aimait.

Alors que cette découverte fit son chemin dans l’esprit du garçon araignée, les couleurs grises
recouvrant le monde se diluèrent progressivement pour reprendre leurs teintes originelles et
la fumée blanche reprit lentement son processus de disparition. L’arrêt du temps finit par se
lever au bout de cinq minutes : la zone industrielle recommença à vivre et la puissance du
sortilège du sorcier se fit de nouveau sentir sur le champ de bataille. Le bâton de combat du
jeune homme revint auprès de lui du fait de la bourrasque provoqué par la contre-attaque de
Mordo, tandis que la chaîne verte jusqu’ici coincée entre ciel et terre bougea de quelques
mètres avant de s’arrêter et revienne aux côtés de son maître. Il fut persuadé d’avoir bien
ciblé son adversaire durant sa chute, donc pourquoi se trouvait-il au sol, sans blessures sur
son corps ?

Un silence s’installa entre Spider-Man et le renégat.

- … Je vois. Il semblerait que je t’ai sous-estimé, Spider-Man. Dit calmement Mordo. J’avais
des soupçons par rapport aux fragments d’énergies cosmiques que je sentais en toi dès que je
t’ai vu, mais plus maintenant.

Face à l’absence de réponse de Peter, le sorcier continua après une courte pause.

- Tu es au courant de l’existence des Pierres d’Infinités, n’est-ce pas ? Je ne serais pas surpris
que Strange t’en ait parlé et t’ait montré la Pierre du Temps, qui pour une raison que j’ignore
t’a octroyé une partie de ses capacités. Cependant, cela importe peu… Je ne laisserai aucun
détenteur de pouvoirs mystiques utiliser leurs habilités allant à l’encontre de l’ordre naturel.
Ces personnes doivent payer pour leurs péchés.

Ah… Peter a déjà entendu ce type de discours. Beaucoup de fois, de trop nombreuses fois
même, au cours de la boucle temporelle. Certains être malveillants se cachent derrière des
paroles faussement soyeuses en prétendant commettre des crimes au nom d’un idéal soi-
disant aux bénéfices de l’humanité, mais leur masque affable ne dissimule en rien leur
égoïsme et leurs désirs belliqueux, et ils pouvaient se révéler bien pires qu’ils ne veulent le
reconnaître. Ceux qui assument leur cruauté et leur plaisir sadique de causer malheur et
destruction autour d’eux ont au moins l’honnêteté de l’admettre sans aucune trace
d’ambiguïté sur leur nature.

Le jeune homme reprit son bâton de combat en main, puis il s’aida de ce dernier afin de se
relever. Le regard perçant qu’il décocha à Mordo dégageait une furie froide ; imperceptible et
silencieuse, mais tout aussi incandescente qu’une explosion de colère.

- Et ces détenteurs doivent payer ce prix de leurs vies sans discrimination, c’est ça ? Tout
simplement parce qu’elles possèdent des capacités extraordinaires dont certains s’en servent
pour devenir de meilleures personnes et protéger ce monde ? Vous ne valez pas mieux
qu’HYDRA et leur idéologie barbare… Vous n’êtes pas le justicier que vous prétendez être…
Vous êtes un monstre.

Les yeux du renégat brillèrent d’une lueur noire. Il invoqua de nouveau sa chaîne verte et la
relança en direction du superhéros araignée, son violent geste du bras ne laissant ainsi plus
aucun doute sur sa ferme intention de taire définitivement le gardien de New York.
Maintenant qu’il connaissait l’arme qui causait sa perte et qu’il pouvait l’observer, Peter
parvint à s’adapter à ses mouvements et esquiva les multiples frappes de la chaîne en sautant
sur elle comme un appui ou en immobilisant ses bases avec ses toiles. Cependant, le
contrecoup de sa chute rendit son corps plus lourd, ce qui impactait dès lors la fluidité de ses
mouvements. Malgré ses sens aux aguets, le sorcier profita d’une brève ouverture pour lui
attraper le pied gauche et le balancer loin dans la cour. Le jeune homme toussa bruyamment à
la suite de cette envolée, tandis qu’il sentit ses muscles brûler par le contact brutal avec le
pavé… Soudain, il aperçut une nouvelle fois une lumière verte se diriger vers lui, affutée tel
un poignard. Ses membres immobilisés par la fatigue et la douleur des combats qu’il a menés
lui empêchaient de rouler sur le côté pour échapper à la chaîne à temps. Peter, comprenant
qu’il n’y a aucune issue, se contenta de fermer les yeux en attendant le coup fatal…

Soudain, alors qu’il s’apprêtait à s’abandonner au désespoir, Spider-Man eut la sensation de


ressentir une bourrasque traversé le champ de bataille. Il entendit l’arme de Mordo
transpercer le sol avec fracas… Cependant, ses battements de cœur continuaient également à
résonner à ses oreilles. Pourquoi ?

Il ouvrit prudemment les yeux… Et il fut stupéfait de voir qu’un homme aux cheveux blancs
et aux vêtements bleus et gris, qui paraissait être dans la trentaine, le portait dans ses bras,
assénant un regard déterminé et défiant envers Mordo. Peter reconnut l’identité de cette
personne… Bien que peu de photos de lui circulent sur internet contrairement à ses
coéquipiers bien plus célèbres et qu’il ne l’a auparavant jamais rencontré durant ses boucles,
son apparence et sa supervitesse étaient suffisamment distincts pour qu’il sache de qui il
s’agissait : Quicksilver.

- Ouf… C’était moins une ! S’exclama le coureur.

- Que… Que fait un Avengers ici ? Se demanda Mordo qui ne s’attendait pas à croiser un
Défenseur de la Terre dans un endroit aussi reculée de New York.

- Ce serait plutôt moi qui devrais poser cette question. Quoique… En voyant ce que vous
comptez faire à ce jeune homme, elle est assez vite répondue.
- … Vous… Vous êtes…

Pietro remarqua que Peter a repris connaissance. Il le regarda en esquissant un sourire afin de
le rassurer.

- Tu es Spider-Man, c’est ça ? Ça fait plaisir de te rencontrer pour de vrai. Désolé pour le


retard, trouver ce lieu n’a pas été simple… Mais ne t’inquiètes pas. On se charge du danger,
désormais.

"On" ? Pensa le superhéros araignée.

Mordo lâcha un râle d’agacement. Ces interventions inopinées commençaient à jouer avec sa
patience. Il décida ainsi d’invoquer plusieurs dagues magiques puis il les lança vers
Quicksilver et l’adolescent… Cependant, les armes explosèrent telles des feux d’artifices
sous la puissance des vagues psychiques rouges de Scarlet Witch et des déflagrations tirées
par Iron Man, situés tous les deux sur le toit de l’entrepôt principal. Captain America et Hulk
surgirent peu de temps après et chargèrent le renégat de toutes leurs forces. Mordo usa de
multiples sorts contre les Avengers pour les tenir à distance, mais Wanda - qui rejoignit ses
coéquipiers sur le terrain - détruisit les nombreuses chaînes et autres couteaux créés par le
sorcier à elle seule et le géant vert déstabilisa la concentration de l’ennemi en lui jetant des
caisses ou des piliers métalliques présents dans la zone industrielle, distractions dont se servit
Steve afin de le confronter au corps-à-corps.

Peter n’en revenait pas… Il crut sincèrement qu’il allait encore une fois mourir sous le regard
indifférent du monde, tué tel un insecte écrasé par un destin qui ne cessait de lui rouler des un
avec des dés. Et pourtant, les héros auquel il n’a pourtant créé aucune attache dans cette
timeline sont bels et bien là et lui ont sauvé la vie sans aucune hésitation.

- Hm… Il vaut mieux ne pas rester ici. Dit Pietro, ce qui attira l’attention du jeune homme.
Allons-nous-en !

Avant même qu’il ne puisse répondre, Quicksilver utilisa sa supervitesse afin de déguerpir du
chaos du champ de bataille. Pris de court, Spider-Man n’insista pas et agrippa fermement les
vêtements du coureur pour ne pas tomber, geste que l’adulte itéra à son tour en le maintenant
contre lui durant sa course. Il ne lui fallut que cinq secondes pour atteindre une ouverture
entre deux entrepôts, sauté sur les murs opposés jusqu’au sommet du bâtiment central de
l’usine et rejoindre Tony au bord de la structure.

- Tony !

- Pietro. Le milliardaire se tourna vers le sokovien. Je me demandais où tu étais. Tu n’es pas


blessé ?

- Non, pas de problèmes. En revanche, ce type n’ait pas allé de main morte avec Spidey.
Répondit Pietro en jetant un regard vers l’adolescent, la voix trahissant son inquiétude
envers lui.

Peter demeura silencieux, les yeux fuyants. Son corps endolori par ses confrontations contre
Mordo le restreint à prononcer un mot ou d’esquisser le moindre mouvement susceptible
d’accentuer ses plaies.

Tony observa le jeune homme pendant plusieurs secondes, immobile, et s’apprêtait alors à
reprendre la parole… Quand soudain, des crépitements semblables à des flammes et des
cliquetis retentirent derrière lui. L’homme à armure rouge se retourna immédiatement et vit
une longue chaîne verte en face de lui, Quicksilver et Spider-Man. Malgré l’affrontement
intense entre Mordo et les Avengers, il réussit malgré tout à en invoquer une indépendante
des autres afin de pourchasser le gardien de New York. Au départ brièvement sous le choc
par cette soudaine apparition, Iron Man se reprit immédiatement en main et tira à multiples
reprises vers l’arme luminescente, tandis que Pietro utilisa la fonction bouclier de ses Stark
Watch pour se protéger lui et l’adolescent.

Bien que sa trajectoire fut déviée par les attaques d’Iron Man, la chaîne s’adapta petit à petit
aux angles de tirs jusqu’à ce qu’elle finisse par frapper les répulseurs de Tony, qui perdit
momentanément l’équilibre suite au coup. La peur et la panique se lisait sur l’œil visible de
Peter…

Non… Non… Non… Pitié, non…

Et alors que la chaîne verte se jeta à pleine vitesse vers le petit groupe de superhéros, une
grande silhouette semblant surgir des ténèbres s’interposa entre elle et les Avengers. Elle
claqua des doigts de sa main droite, puis de nombreuses chaînes de couleur dorées
s’enroulèrent autour du serpent de lumière vert de toutes parts. Une fois sous leur emprise,
elles se resserrèrent contre lui de plus en plus fort jusqu’à son explosion en millions de
fragments luminescents. Peu après cela, l’ombre créa une longue corde avec sa magie et la
lança en direction de Mordo à partir d’un angle mort ; il l’attrapa par surprise avec son arme
pour l’immobiliser, ne lui laissant aucune chance de répliquer, puis il le frappa derrière le cou
pour l’assommer.

Le chaos ambiant qui régna sur la zone industrielle se calma au fur et à mesure que le temps
s’écoulait. Les Défenseurs de la Terre présents sur le toit de l’entrepôt reprirent petit à petit
leurs souffles, et observèrent d’un air intrigué l’individu mystérieux qui a mis hors d’état de
nuire le sorcier renégat en une poignée de secondes… En sentant leurs regards fixés sur lui,
ce dernier se retourna pour les observer à son tour. Dès lors qu’ils distinguèrent son
apparence à travers l’obscurité, les yeux de Peter s’écarquillèrent sous le choc… Une tunique
bleue azur, une longue cape rouge asymétrique, un collier en forme d’œil, des cheveux courts
et noirs parfaitement soignés avec des mèches blanches sur les tempes, une peau blanche
albâtre accompagnée d’une barbe soigneusement taillée et faisant ressortir ses iris bleues, des
traits carrés et fins, et une posture droite et solennelle… Le jeune héros reconnut cet homme.
Tony aussi sut son identité… Leur première rencontre remonte à loin, mais malgré le peu de
temps qu’ils ont passé ensemble à cause de la Guerre de l’Infini, son aide contre Thanos leur
a permis d’échapper à une mort certaine sur Titan lors de leur premier combat contre le Titan
Fou.

- Docteur Strange… Murmura Peter d’une voix basse.

- Doc…
Stephen regarda brièvement Quicksilver et Spider-Man, puis il fixa le milliardaire. Bien que
son visage demeure calme et peu expressif, ses yeux laissèrent transparaître du soulagement.

- Cela fait longtemps, Tony, Spider-Man.


Un nouvel espoir

Moi qui pensais ne jamais revoir l’intérieur de la Tour des Avengers…

C’était ce que musait intérieurement Peter en contemplant le plafond de la chambre dans


laquelle il se reposait, vêtu d’un pyjama, les bras couverts de bandages, le regard vide et le
visage impassible.

Après que Docteur Strange soit intervenu pour mettre Mordo hors d’état de nuire, la douleur
des blessures du superhéros araignée se ravivèrent à mesure que l’adrénaline se dissipa de
son corps. Malgré ses efforts pour rester éveiller, son dos endolori et ses muscles brûlants dû
à son combat contre le sorcier renégat lui firent plus mal qu’il ne l’aurait pensé, et la dernière
chose qu’il entendit avant de perdre connaissance fut des voix semblant l’appeler. Lorsqu’il
ouvrit de nouveau les yeux, le jeune homme se retrouva dans une pièce aux teintes blanches
et bleues, ses bras bandés et avec un écran au-dessus de son lit qui affichait son nom et son
état de santé. Peter reconnut rapidement le lieu… La Tour des Avengers. Ce n’était pas la
première fois que le Dr. Cho l’emmenait dans cette chambre de soin afin de traiter ses plaies
subies lors de ses patrouilles, après tout.

Etant donné l’étendue de ses blessures, Bruce et Helen n’eurent d’autres choix que de retirer
le costume de Spider-Man pour mieux prodiguer les soins nécessaires à sa condition, révélant
alors sa véritable identité auprès des Défenseurs de la Terre. Le groupe de superhéros fut
bien-sûr surpris de découvrir que le gardien de New York, le justicier qui protège une
gigantesque mégalopole à lui seul, soit en réalité un adolescent de quinze ans venant du
Queens. Cependant, à la différence des précédentes boucles où les Avengers apprennent qui
se cache derrière le masque de Spider-Man, ces derniers ne mentionnèrent pas son âge ni son
expérience de héros lors de son court interrogatoire, lui posant davantage de questions par
rapport à lui plutôt que son alter égo superhéroïque. D’un côté, Peter se sentit heureux que
ceux qu’il admire le traite comme une personne consciente des risques de leur métier et non
comme un gamin empreint de bonne volonté mais qui ne possède pas une force de caractère
suffisante pour être entendu. De l’autre côté, le garçon araignée ne put s’empêcher de
ressentir de la déception de s’être fait avoir aussi facilement… Spider-Man, le superhéros qui
a arrêté un nombre incalculable de criminels, dont une partie d’entre eux furent des super
vilains comme le Vautour, celui qui s’est entraîné inlassablement au cimetière des autobus
pour devenir un combattant exceptionnel capable de confronter n’importe quel danger, s’est
retrouvé au tapis parce que son adversaire maîtrisait la magie et des techniques de combat
auquel il n’a pas l’habitude… Un sorcier qu’il a croisé par pure hasard, en plus de cela.

Les interrogations des Avengers durèrent une vingtaine de minutes, les adultes écoutant
calmement et attentivement les paroles du mutant, puis ils sortirent de la chambre afin que le
jeune homme se remette tranquillement de son combat de la nuit dernière. Après cela, les
heures défilèrent les unes après les autres dans un silence complet, où Peter se contenta de
regarder le vide sans prononcer le moindre mot… Soudain, alors que le sommeil commençait
à le gagner à cause de son ennui, il entendit derrière les murs des pas se rapprocher en
direction de la grande pièce. Le garçon araignée tourna alors instinctivement la tête vers la
porte d’entrée qui s’ouvrit doucement, et ses yeux s’ouvrirent un petit peu plus lorsque la
silhouette de Docteur Strange se dessina à travers l’encadrement rectangulaire.

- Docteur Strange… La voix de Peter fut basse, mais son langage corporel laissait
transparaître sa surprise.

Un silence s’installa entre les deux hommes, puis le sorcier déplaça une chaise se trouvant
dans un coin de la pièce jusqu’à lui avec sa magie avant de s’asseoir à côté du mutant. Bien
que Stephen conserve un visage sérieux, Peter remarqua que les traits du docteur paraissaient
moins stoïques et figés que lors de leurs nombreuses rencontres dû à la boucle temporelle ; ils
semblaient plus adoucis, de même que ses iris azur qui apparurent plus chaleureux.
Contrairement aux anciennes itérations où Strange s’adressait à lui avec indifférence et
incrédulité du fait qu’il soit un adolescent aux pouvoirs mutagènes qui fut embarqué malgré
lui dans un conflit qui le dépasse, il montra cette fois-ci une facette plus… Approchable. Il
ressemblait à s’y méprendre à Tony lorsqu’ils devinrent amis. En y repensant, les seuls
moments où le jeune homme a rencontré Docteur Strange en personne furent sur le vaisseau
spatial de Thanos, durant une courte période de répit avant leur combat contre le Titan Fou
sur sa planète natale… Dans ce cas de figure, son chemin a croisé celui de l’adulte avant cette
instance, loin de toute tension et danger imminent, ce qui expliquerait son comportement
moins distant envers lui.

Quelques minutes s’écoulèrent, puis Stephen commença à lui parler.

- Comment tu te sens ?

- Mes bras sont encore un peu tendus, mais je n’ai plus mal. Répondit simplement Peter en
regardant ailleurs.

- … Tony a appelé ta tante pour lui dire où tu es. Il a maquillé ton arrivée à la Tour sous
couvert d’un incident au Queens qui a nécessité l’intervention des Avengers et l’aide aux
civils piégés sur le terrain… Incident qui a réellement eu lieu avant qu’ils ne viennent te
sauver, donc ce fut assez facile de mystifier la vérité. Il l’a rassuré que tu allais bien sans lui
révéler que tu es Spider-Man. Continua le docteur. Le jeune homme avait brièvement
mentionné aux Défenseurs de la Terre le fait que May ne savait rien de sa double vie et tenait
à garder son identité secrète, information à laquelle ils ont visiblement tenu compte.

- Je vois. Merci. Peter poussa un petit soupir de soulagement.

Silence. Peter regarda brièvement l’Œil d’Agamotto qui entourait le cou du Maître des Arts
Mystiques, dont il pouvait discerner les tracées de la lumière de la pièce se dessiner sur la
surface du bijou. Bien qu’elle soit dissimulée derrière une protection dorée, l’adolescent
sentit la présence de la Pierre du Temps à l’intérieur de la relique.

Après une dizaine de secondes où il prit une longue inspiration, Peter décida de lui poser la
question qui le travaillait depuis qu’il s’est réveillé.

- Docteur Strange.

- Oui ?
- Je voulais savoir… Qu’est-ce qui est arrivé au sorcier que j’ai affronté ?

Stephen marqua une courte pause.

- Quand tu t’es évanoui à cause de la douleur de tes blessures, Tony s’est chargé de t’amener
à la Tour pour que tu y soies soigné. Moi et les Avengers présents sur le quai nous sommes
quant à nous approcher de Mordo afin de nous assurer qu’il ait réellement perdu
connaissance… Ce qui fut le cas. Par acquis de conscience, j’ai vérifié l’intérieur du bâtiment
principal de l’usine où il se cachait pour savoir s’il n’aurait pas volé des artefacts dangereux
aux sorciers qu’il a chassé, mais il n’en fut rien.

- Je vois…

- Et après avoir eu la certitude qu’il ne représentait plus une menace pour autrui… J’ai banni
Mordo dans une autre dimension.

- Une autre dimension ?

Docteur Strange hocha la tête.

- Il existe une infinité de mondes au cœur du multivers, à tel point qu’une vie ne suffirait pas
à tous les connaître. Cela étant, en consultant les plus anciennes archives que j’ai pu lire à
Kamar-Taj, j’ai découvert le nom d’une dimension appelé "Unlivion". Les rares notes laissées
par des sorciers l’ayant exploré demeuraient flous sur cette dernière, mais je compris vite que
tout être qui s’y trouvait voguait dans un océan de vide sans fin avant de disparaître dans le
néant…

Stephen reposa ensuite son dos sur le dossier de la chaise, balança légèrement la tête vers
l’arrière et poussa un soupir.

- Ouvrir un portail vers une dimension à la nature ineffable est risqué. Les Maîtres des Arts
Mystiques ont beau posséder des pouvoirs puissants, nous n’en restons pas moins des
humains sans omniscience. Cependant, il était hors de question de laisser un sorcier prêt à
tuer autrui devenir un danger autant pour la Terre que pour le multivers… Alors j’ai choisi de
prendre ce risque. J’ai ouvert un portail vers Unlivion et je l’ai transporté là-bas, en refermant
immédiatement l’anneau après qu’il ait disparu derrière.

- Ça veut dire que…

Le sorcier devina ce qui trottait dans la tête de l’adolescent, donc il se redressa sur sa chaise
puis le regarda droit dans les yeux.

- Mordo a disparu à jamais. Plus personne n’aura à mourir de ses chaînes.

Il y eut un moment de flottement, puis le jeune homme coupa son contact visuel avec
Docteur Strange en tournant la tête vers le mur à sa droite. Il n’avait désormais plus à
craindre d’être assassiné au détour d’une rue sombre, s’éteignant dans une mare de sang avec
les ténèbres comme seule témoin de son trépas. Il était maintenant libre de vivre comme il
l’entendait…
Le visage du mutant s’assombrit devant cet état de fait. Oui, il n’allait plus mourir tel un rat
cruellement tué par un chat de gouttière, mais il devait à nouveau revivre les événements de
la Guerre de l’Infini avant d’acquérir cette liberté. S’il était resté l’insaisissable Spider-Man,
le héros fantôme dont personne ne soupçonnerait qu’il puisse s’agir d’un gamin quelconque
du Queens comme Peter Parker, il aurait supporté à contrecœur de disparaître en cendres d’un
claquement de doigts car il serait de toute façon revenu à la vie cinq ans plus tard au prix de
ceux des plus grands héros de la Terre. Malheureusement, les Avengers l’ont retrouvé… Et
Tony a recroisé son chemin. Le jeune homme savait ce qu’il résulterait de cette occurrence, et
cela le rendit terriblement amer.

Le temps se figea de nouveau dans la chambre de soin. Seul l’écran au-dessus du lit
constituait une faible source de bruit presque imperceptible à l’oreille. Stephen aperçut
l'expression affligée de l'adolescent, et ses traits devinrent alors plus graves… Il n’eut pas
besoin que ce dernier prononce une parole pour comprendre ses pensées, car il savait ce que
le superhéros araignée a traversé au cours de son voyage par-delà le temps ; ses efforts pour
dissuader les Avengers de s’affronter les uns contre les autres à cause des Accords, ses
tentatives de le prévenir du déroulement de leur confrontation avec Thanos sur Titan, son
désespoir devant la mort de Tony et les funérailles des tombés au combat, ainsi que sa mort
sanglante des mains de Mordo… Deux ans et demi de tourments répétés en boucle telle une
longue litanie. Le contraste entre le garçon au caractère impulsif mais profondément gentil
qu’il a rencontré pour la toute première fois dans la timeline originelle et le jeune homme
distant et renfermé devant ses yeux lui apparut aussi clair qu’un ciel d’été.

Cela étant, le docteur ne fut pas surpris par ce changement de comportement. Il a lui aussi vu
son existence emprisonnée dans un sablier, liée à un instant qui recommençait encore et
encore lorsque ses battements de cœurs s’arrêtaient, lors de son affrontement avec
Dormammu… À l’exception que Stephen prit consciemment la décision de se piéger avec
l’être maléfique dans une boucle temporelle afin de sauver la Terre en le vainquant
psychologiquement, en connaissance de causes des risques de cette action éprouvante pour le
corps et l’esprit. Il mentirait s’il prétendait être ressorti de la Dimension Noire sans impact
sur sa psyché, mais les cicatrices ne brûlèrent pas aussi ardemment du fait qu’il fut
l’instigateur de ce phénomène qu’il contrôlait à sa guise grâce à la Pierre du Temps. Dans le
cas de Peter, ce fut la singularité cosmique elle-même qui l’a enfermé à l’intérieur de ce
labyrinthe temporel, sur une période de temps bien plus longue que celle qu’a répété le
sorcier et sans indices pour briser les chaînes qui l’en entravent… Etait-ce un acte non calculé
de la gemme verte ou au contraire un résultat voulu par cette dernière ? Docteur Strange ne
put trouver une réponse concrète à cette question malgré son exploration des différentes
boucles.

Toujours est-il que le sorcier ne connaissait que trop bien le poids suffocant qu’engendrait
une boucle temporelle sur un individu, notamment sur une jeune victime involontaire de ce
phénomène… Et il ne comptait pas laisser ce cauchemar continuer plus longtemps.

- Peter.

Spider-Man regarda une nouvelle fois en direction de Strange. L’adulte marqua une pause,
comme plongé dans une courte réflexion, puis il ferma soudainement les yeux, passa
brièvement sa main devant ses paupières avant de la retirer de son visage et de révéler de
nouveau son regard… Le souffle de l’adolescent se coupa instantanément lorsqu’il vit que les
iris auparavant bleus de Stephen arboraient une couleur verte, exactement de la même teinte
que les siennes quand il observait son reflet sur un miroir ou une fenêtre.

- C… C’est…

- Tu as déjà vu tes yeux prendre cette couleur, n’est-ce pas ? Demanda calmement le sorcier.
Peter, éberlué mais reprenant progressivement le contrôle de sa respiration, hocha
doucement la tête. Il s’agit d’un indicateur de personnes détenant des pouvoirs liés à la Pierre
du Temps, qu’ils en soient le gardien ou en étant entré en contact avec elle… Autrement dit,
des voyageurs temporels.

- Vous voulez dire que…

Docteur Strange approuva d’un geste de la tête, reprenant une expression sérieuse plus
familière auprès du jeune homme.

- Je suis au courant par rapport à la boucle temporelle.

Le jeune homme demeura muet suite à ces mots. L’espace d’un instant, Peter douta même de
son audition tant il peinait à croire ce qu’il venait d’entendre. Docteur Strange, le Maître des
Arts Mystiques, un homme dont il a vu l’immense diversité de ses pouvoirs et sa maîtrise de
la magie de ses propres yeux, ainsi que le protecteur de la Pierre du Temps, sait que le temps
se répétait à l’intérieur d’une horloge défectueuse.

Stephen narra alors à Peter les enquêtes qu’il a menées pour arriver à la vérité sur cette
mascarade : la chasse aux sorciers mystiques, les faibles émanations de vagues d’énergies
provenant de la gemme verte à l’intérieur de l’Œil d’Agamotto alors qu’il ne manipulait plus
la singularité cosmique depuis son retour de la Dimension Noire, ainsi que l’élément qui l’a
aidé à déceler l’existence de la boucle temporelle… Ses souvenirs venus des précédentes
itérations de cette dernière. Lorsque Thanos frappa Spider-Man lors de leur tout premier
affrontement, la Pierre du Temps et la Pierre du Pouvoir sont rentrés en contact avec
l’adolescent. Etant donné que la gemme violette possède une force cosmique capable de
détruire une planète et augmente les pouvoirs de son porteur, son effet latent fit qu’elle a
lentement renforcé les pouvoirs temporels du superhéros araignée. Ainsi, à chaque fois qu’il
recommençait une boucle, des fragments des précédentes timelines le suivirent et se
manifestèrent progressivement en rêves chez les personnes qu’il connaît et côtoie. En prenant
en compte ces informations, Peter compris de fil en aiguille que l’influence grandissante de la
Pierre du Pouvoir a fini par lui octroyé la capacité d’arrêter le temps, ce qui expliquait
comment il a échappé de peu à la mort quand Mordo l’a attaqué par surprise avec sa chaîne.

Une fois que le sorcier termina son récit, un silence s’installa dans la chambre de soin… Le
jeune homme alité fixa Docteur Strange d’un air hagard pendant de longues secondes avant
de soupirer et de poser une de ses mains sur son visage.

- Peter ? Docteur Strange prononça prudemment son nom, commençant à se soucier pour le
garçon araignée.
L’adolescent sentit tout à coup quelque chose imprégner ses doigts, se formant sur le coin de
son œil droit avant de couler le long de sa joue… Peter fut surpris de découvrir qu’il pleurait.
Aucun son ne sortait de sa bouche, mais il pleurait. Sa gorge se serra petit à petit, son poing
agrippant la couverture renforça son accroche sur le tissu et ses épaules se mirent à
trembloter. Tant d'émotions s’entrechoquèrent en lui que sa poitrine lui fit mal. Il était
intérieurement consterné de montrer un spectacle aussi pitoyable au sorcier... Mais il n'avait
plus la force de porter un masque de froideur. Les Avengers ont vu son visage et connaissent
sa véritable identité malgré tous ses efforts dans cette boucle pour rester un super-héros
solitaire, et ses pouvoirs temporels n’ont pas disparus... À quoi bon cacher ce qu'il ressent à
ce stade ?

- ... J’en ai marre.

Le fait que Peter ait soudainement parlé surprit légèrement Stephen.

- Je suis fatigué de tout ça... Pourquoi est-ce que j’ai ces pouvoirs temporels ? Pourquoi est-
ce que je survis au prix de la vie d'autres personnes ? Mes parents, mon oncle, Tony, les
Avengers... Tous ceux que j'aime meurent et je suis le seul à rester derrière. J'en ai tellement
marre... Est-ce que je dois encore revivre tout ça ? Retourner sur Titan, combattre une
abomination cosmique dans une bataille perdue d’avance avant de ressentir ma mort lente et
douloureuse en cendres, puis revenir à la vie après avoir perdu une autre figure parentale ? Je
ne veux pas ! Je ne veux rien de tout cela ! ... Je...

Sa voix s’étiolait à mesure qu’il crachait le poids qui pesait sur ses épaules. Il savait que ce
qu’il disait était égoïste, il savait qu’il n’avait pas le droit de prétendre au bonheur…
Cependant, il ne pouvait pas contrôler ce qu’il ressent en ce moment. Il voulait juste
extérioriser ce qu’il gardait en lui depuis si longtemps… Une fois. Rien qu’une seule fois.

- Je veux juste que cela cesse… Je veux juste me débarrasser de ces pouvoirs que je n’ai
jamais souhaités et sortir de cette boucle temporelle… Peu importe comment tout cela doit se
finir.

Docteur Strange garda tant bien que mal un visage composé, mais voir le jeune mutant
s’effondrer en larmes lui serra le cœur. Il a vu le passé de l'adolescent à travers son voyage
dans le flux du temps : comment ses parents sont morts dans un accident d'avion, comment
son oncle Benjamin Parker a été assassiné par des voleurs alors qu'il le protégeait, et
comment il faisait de son mieux pour ne pas laisser sa condition d'orphelin le tirer vers le
bas... La vie n’a vraiment pas été tendre avec Peter. C'est pourquoi ses paroles sont si
douloureuses à entendre... Cette boucle sans fin a fini par détruire l'estime de soi du pauvre
garçon et a amplifié sa haine envers lui-même, alors que rien de ce qui lui est arrivé n'était de
sa faute. N'importe qui à sa place en aurait eu assez de tous ces malheurs, et Stephen était
sincèrement impressionné que Peter ait réussi à supporter cette boucle temporelle aussi
longtemps.

Le sorcier inspira profondément, puis il se leva, s’assit sur le bord du lit et agrippa
délicatement les bras du jeune homme avec ses mains.

- Peter, regarde-moi.
Peter hésita à bouger pendant quelques instants, de peur de croiser le regard du docteur, avant
de se risquer à le confronter après deux reniflements. Heureusement, le visage tranquille et
rassurant de Stephen l’aida à retrouver son calme.

- Je comprends ce que tu ressens. J’ai moi aussi été prisonnier d’une boucle temporelle il y a
longtemps, bien que les circonstances étaient différentes de celle-ci… J’ai connu le poids de
revivre le même événement et voir ma vie s’éteindre encore et encore au point d’en oublier la
notion du temps elle-même. Personne ne mérite de subir un tel sort, et encore moins un jeune
homme comme toi.

- Docteur Strange…

- … Je dois admettre que je ne m’attendais pas à ce genre d’issue. Gagner des pouvoirs par le
biais d’une Pierre d’Infinité n’est pas inhabituel ; les jumeaux Maximoff sont un parfait
exemple de ce phénomène. Cependant, il est extrêmement rare que les capacités de deux
singularités cosmiques fusionnent entre elles. Les chances qu’une telle instance se produise
sont astronomiquement faibles.

Il y eut un court silence.

- Cela dit, l’émergence de ce pouvoir d’arrêter le temps est peut-être un signe de bon augure.

- Quoi ? Peter fut surpris par ces paroles.

- Tu sais que j’ai vu plus de quatorze millions de futurs sur Titan avant notre combat contre
Thanos et que j’ai dit qu’une seule d’entre elle se terminait par sa défaite, n’est-ce pas ? Eh
bien… Avec ce pouvoir, nous pouvons créer un nouveau futur avec la même conclusion sans
qu’il ne décime la moitié de l’univers.

- Un nouveau futur… ?

- Exactement. Thanos est un adversaire redoutable, dont la résistance physique et la force


herculéenne n’a d’égal que son esprit manipulateur. Les pouvoirs de deux Avengers, un
Maître des Arts Mystiques et quatre Gardiens de la Galaxie ont tout juste suffis à le ralentir
avant qu’il ne parvienne à s’échapper et à accomplir ses ambitions… Cependant, grâce aux
souvenirs venant des précédentes boucles, Thor a réussi à récupérer la Pierre de l’Espace et la
Pierre de la Réalité avant le Titan Fou. Il est venu à mon sanctuaire après que son peuple ait
trouvé refuge sur une planète déserte de notre galaxie afin que je garde les gemmes en
sécurité.

- Vraiment ?

- Oui. Nous avons désormais quatre des six Pierres d’Infinités en notre possession. Thanos
reste certes terriblement puissant même avec seulement deux d’entre elles, mais il ne pourra
pas s’échapper aussi rapidement de Titan cette fois-ci.

Peter demeura silencieux suite à ce discours. Maintenant qu’il avait la tête reposée, il prit le
temps d'assimiler tout ce que le Docteur Strange venait de lui révéler... Après autant de
répétitions des deux mêmes années avec rien d'autre que des mauvaises fins, il en vint à
croire que tout ce qu'il faisait dans les boucles n'avait aucun sens et se contenta de vivre au
jour le jour sans rien attendre de personne ni du monde dans son ensemble afin de ne plus
être blessé. Cependant, étant donné qu'Ultron n'a jamais été créé et que les Avengers ne se
sont jamais affrontés dans cette itération, cela signifie que leurs souvenirs des différentes
timelines - bien qu’incomplets - leur ont fait réaliser leurs erreurs passées, évitant ainsi de les
répéter à nouveau et transformant les tragédies que Peter pensait être des conclusions
inévitables en un meilleur futur.

… À cet instant, le jeune homme ressentit une chaleur dans les profondeurs de son âme qu’il
croyait éteinte à jamais.

Une petite flamme, faible et vacillante, qu’il n’a jamais trouvé la force d’étouffer malgré le
temps qu’il a passé dans cette boucle temporelle.

Une flamme d’espoir.

Les Avengers sont unis. Les Accords ne sont plus une menace pour les superhéros et les
mutants. Sa mort prédestinée en 2023 n’est plus. Il ne reste plus dès lors qu’un seul ennemi à
faire tomber… Thanos, le Titan Fou.

L’instigateur de la Guerre de l’Infini. Le meurtrier qui a tué des trillions d’êtres à travers les
galaxies… Et celui qui l’a jeté dans ce labyrinthe temporel.

S’il devait tout donner dans cette itération… Alors il le fera. Cette boucle sera la dernière de
son long voyage au-delà du temps.

- … Je suis désolé de m’être emporté tout à l’heure. Le mutant essuya les quelques larmes
encore présentes sur ses joues, quelque peu gêné mais sincèrement désolé.

- Ce n’est pas grave. Tu avais besoin d’extérioriser ton ressenti après tout ce que tu as vécu,
et c’est parfaitement compréhensible. Docteur Strange rassura le garçon araignée.

Peter passa ensuite une main dans ses cheveux, l’air pensif, avant de regarder le sorcier.

- Quand vous m’avez dit qu’il est possible de créer un nouveau futur… Est-ce que c’était
vrai ?

- Oui. Assura Docteur Strange avec certitude et détermination. Nous savons ce qui nous
attend face à Thanos et son armée. Nous connaissons leurs manières de se battre, leurs
résistances et leurs points faibles… Nous avons toutes les cartes en main pour les contrer.
Nous mettrons un point final à ce cauchemar. Et lorsque tout sera terminé, je ferai disparaître
le sortilège de la boucle temporelle et tu seras libéré de ces pouvoirs temporels. Je te le
promets.

Il y eut un silence. Et après une profonde inspiration, Peter fixa Stephen droit dans les yeux,
ses iris brunes ayant retrouvé leur éclat et brûlants d’une forte volonté.

- Très bien. Je me battrai moi aussi.


Tu n'es pas seul

Une musique lente et lancinante se jouait à travers les écouteurs de Peter tandis qu’il
regardait le monde extérieur depuis la fenêtre de sa chambre, assis sur son siège de bureau et
la tête reposant sur la vitre. Son appartement était silencieux et les rues de son quartier
baignaient sous la lumière du soleil. La transition entre l’été et l’automne s’observait
facilement avec les citadins ayant abandonné leurs vêtements décontractés et colorés pour
revêtir des tenues plus formelles aux teintes plus monochromes.

Le jeune homme contempla le contrebas pendant une quinzaine de minutes, sans bruit, avant
que ses yeux se tournent vers l’ouverture de son faux-plafond. Son arsenal de superhéros et
son costume de Spider-Man y reposaient à l’intérieur d’une grande boîte… Où il y avait
également une mallette métallique avec le nom "Stark" blasonné sur le côté droit qui
protégeait son uniforme StarkTech.

Lorsqu’il fut complètement rétabli de son combat contre Mordo, Peter rencontra
"officiellement" les Défenseurs de la Terre. En omettant l’absence de Bucky Barnes et sa
première vraie rencontre avec Quicksilver, le jeune homme reconnut tous les héros présents à
la Tour, dont un qu’il n’avait pas aperçu depuis un long moment dans les photos de presse…
Thor.

Le Dieu du Tonnerre avait réussi à guider son peuple vers la galaxie de ses frères d’armes
midgardiens après des semaines de voyage spatial, parvenant à échapper à Thanos et ses
généraux. Il tenait à ce que les siens trouvent refuge sur Terre, planète qu’il aimait et
considérait comme sa nouvelle maison, mais il savait que ce vœu ne pourrait pas se réaliser
tant que l’ombre du Titan Fou assombrira l’univers… Thor les emmena alors vers une planète
déserte de la Voie Lactée, recouverte de forêts denses, de grandes étendues d’eaux et
disposant d’oxygène pour y accueillir de la vie, afin qu’ils s’y cachent jusqu’à la fin de la
guerre. L’abondante végétation et les immenses arbres de plusieurs centaines de mètres de
haut offrirent aux asgardiens une terre d’asile proche d’un jardin d’Eden ainsi qu’un excellent
camouflage pour tromper les yeux du tyran et son armée. Le roi d’Asgard confia dès lors la
protection de ses sujets à Loki, Heimdall et Valkyrie ; en tant que divinité érudit en magie et
guerriers expérimentés, ils n’auront aucun mal à se défendre contre tout ennemi qui croiserait
leur chemin. Cela étant, si jamais le danger venait à se révéler trop grand pour eux, Thor
autorisa le gardien du Bifröst à invoquer le pont dimensionnel en dernier recours pour
transporter tout le monde sur une autre planète. L’Avengers revint par la suite sur Terre avec
la Pierre de l’Espace et de la Réalité.

Ce ne fut qu’après le sauvetage de Spider-Man qu’il put révéler à ses camarades superhéros
ce qui lui ait arrivé durant son départ, des fourberies de son frère jusqu’au Ragnarök, avant de
les avertir de la menace qu’était Thanos ainsi que son ambition de tuer la moitié de l’univers
avec les six Pierres d’Infinités. La mention des singularités cosmiques gela le dos des
Défenseurs de la Terre… Ils ont déjà eu affaire aux manipulations de certaines de ces
gemmes par le passé, notamment la Pierre de l’Espace. La puissance phénoménale de la
pierre bleue a manqué de détruire New York lors de leur premier combat contre une attaque
galactique et l’exposition des jumeaux Maximoff à la seule Pierre de l’Esprit a suffi à leur
octroyer des pouvoirs surhumains, en plus d’insuffler la vie au synthézoïde au corps
robotique et à l’âme humaine qu’est Vision. Il n’en fallut pas plus pour que les Avengers
comprennent l’ampleur du danger qu’ils s’apprêtaient à affronter, et ils furent déterminés à
arrêter les plans du Titan Fou.

Aux vues des risques de leur nouvelle mission, les Défenseurs de la Terre refusaient
catégoriquement d’impliquer Peter dans cette guerre cosmique. Aucun des adultes ne
remettait en question ses compétences superhéroïques, son bon cœur ou sa bravoure ; le jeune
homme était indéniablement un héros plein de ressources et à la peau dure. Il a réussi à tenir
tête à un magicien qui possédait de puissants pouvoirs magiques pendant plusieurs minutes
dans un combat équitable, après tout. Cependant, un fossé séparait la force de Mordo, un
maître des Arts Mystiques, et Thanos, un colosse à la structure imposante et disposant de la
capacité quasi-divine de tenir des reliques aussi anciennes que l’univers lui-même à mains
nues sans en mourir… Il était hors de question pour les Avengers de mettre la vie de
l’adolescent en péril face à un tel monstre. C’est la raison pour laquelle ils ont choisis de
passer une partie des détails de leur mission sous silence auprès du garçon araignée, tenant
davantage à l’entraîner afin qu’il puisse devenir plus fort et se défendre contre des ennemis
aux aptitudes similaires à celui du renégat. Peter, comprenant à travers leurs paroles qu’ils
faisaient référence à Thanos, ne répondit rien et s’était contenté de suivre le scénario que
l’équipe de superhéros lui a raconté.

Commença alors pour Spider-Man des sessions d’entraînements avec les Avengers, ayant
cours deux fois par semaine à la Tour. Les combattants d’élite comme Steve, Natasha, Clint,
Rhodey et Falcon lui apprirent plusieurs techniques d’arts martiaux ainsi que le maniement
de différentes armes comme des bâtons électriques et un arc, tandis que les êtres aux vastes
variétés de pouvoirs comme Wanda, Pietro, Vision, Scott et Thor l’abreuvaient de savoir sur
les adversaires de leur calibre : comment reconnaître le type de capacités qu’ils manipulent,
comment prévoir leurs mouvements, déceler la source de leurs pouvoirs - qu’elle soit innée
ou venant d’un artefact - pour trouver leurs faiblesses et les retourner contre eux… Tous
l’aidaient à connaître pleinement le fonctionnement de leurs habilités.

Docteur Strange le retrouva un jour sur le toit d’un building qui se situait non loin de son
territoire suite à une patrouille, et il lui donna l’emplacement de son sanctuaire en plus de son
numéro de téléphone afin qu’il sache comment le rejoindre ou le contacter en cas de besoin.
Etant donné que Peter a éveillé le pouvoir d’arrêter le temps, le sorcier lui prêta main-forte
pour mieux comprendre cette nouvelle faculté. Leurs séances d’expérimentations furent assez
irrégulières du fait de leurs différentes responsabilités, mais le superhéros araignée parvenait
progressivement à abandonner l’amertume que lui conférait ce don miraculeux qu’il
considérait au départ comme un fardeau, et il gagnait plus de contrôle sur ce dernier grâce à
l’enseignement de Stephen. Au bout d’un certain nombre d’essais, il apparut que le pouvoir
temporel s’activait à travers les fortes émotions de Peter et stoppait complètement le cours du
temps pendant sept minutes, sans limite de champ d’action connue et immobilisant
absolument tout autour de l’adolescent sauf si un objet ou une personne rentrait en contact
physique avec lui - en maintenant par exemple une main sur son épaule. Le docteur prit notes
de ces informations, réfléchit quelque temps et trouva un moyen de contourner ces
faiblesses : il créa plusieurs bracelets à partir d’un métal issue d’une relique antique qui
fonctionnait comme un sort anti-magie, ce qui permettrait à tous les alliés de Spider-Man de
bouger librement même lorsque le jeune homme utilisait son pouvoir, ainsi qu’un collier
consistant d’un fil doré et d’une perle qui canalisait la puissance cosmique qui entourait Peter
pour qu’il puisse les maîtriser sans craintes et de sa propre volonté.

Lorsque le gardien de New York ne frappait pas des sacs de sables ou tirait sur des cibles,
Bruce fit en sortes qu’il garde une bonne condition physique et mentale et passa ensuite le
reste du temps auprès de Tony, où ils confectionnèrent et testèrent plusieurs formules de
toiles à effets divers. Le milliardaire utilisa bien-sûr le prétexte du stage à Stark Industries
auprès de May afin de justifier les allers-retours réguliers de l’adolescent à Manhattan et il
n’eut aucun mal à la convaincre de cette demi-vérité, ce qui surprit quelque peu Peter au
début mais il fut par la suite rassuré quand sa tante ne montra aucune objection à ce qu’il
côtoie la personne qu’il admire.

Une routine s’installa petit à petit au fil des semaines pour le jeune homme, où il alternait
entre sa vie de lycéen au Queens et sa vie de superhéros à la Tour des Avengers. Il prouva
vite aux Défenseurs de la Terre qu’il possédait des bases superhéroïques solides de par sa
capacité à apprendre rapidement et sa très bonne mémoire - en plus de ses innombrables
entraînements par le biais de son mentor, en solitaire et même une petite partie d’entre eux
lors des différentes boucles qu’il a traversé ; ses capacités physiques sont optimales, sa
défense est pratiquement un sans-faute et sa vivacité d’esprit ainsi que sa maîtrise de la
furtivité le rend extrêmement versatile en combat. Les adultes furent impressionnés de voir
ses talents à l’œuvre, parvenant à endurer leurs coups durant de longues minutes, mémoriser
leurs méthodes d’attaques et à trouver des parades pour les déstabiliser s’il se retrouvait en
désavantage en termes de pouvoirs. Peter n’apprit concrètement peu de choses qu’il ne
connaissait pas déjà, mais il suivait toujours les conseils de ses aînés avec sérieux. Il
mentirait s’il prétendait ne pas ressentir une petite pointe de fierté lorsque les Défenseurs de
la Terre le félicitaient pour ses efforts et il ne pouvait s’empêcher d’esquisser de temps en
temps un très léger sourire discret devant leur gentillesse et leur sympathie envers lui, surtout
celles des jumeaux Maximoff qui le considérait au fil des jours comme un petit frère -
probablement dû au fait qu'il soit le plus jeune superhéros à la Tour.

Cela dit, le garçon araignée ne pouvait se résoudre à profiter pleinement de ses visites à la
base des Avengers. Ce n'est pas parce qu'il n'aimait pas les adultes ; il se soucie sincèrement
d'eux en tant que super-héros et en tant qu'individus. Ils se montraient parfois durs et il était
parfaitement conscient qu'ils ont des défauts, tout comme ils n’étaient pas exempts de fautes
qui ont mené aux Accords de Sokovie et la Guerre Civile il y a longtemps de cela, mais ils
n'en restent pas moins les héros de son enfance et une source d'inspiration lorsqu'il se sentait
déprimé en tant que Spider-Man. Il apprécie d'être à la Tour malgré son visage dénué
d'expression, et il est même intérieurement soulagé de voir Wanda sourire et être dans un bien
meilleur état mental que lors de l'affrontement final contre Thanos, où sa furie motivée par le
chagrin la rendait absolument terrifiante.

Non... La vraie raison est que Peter sait ce qui se trame dans l'ombre. Il est au courant de la
guerre qui approche, de la menace que représente le Titan Fou, ainsi que les sinistres
conséquences de sa victoire... Il ne le sait que trop bien. Les augures apparurent certes
favorables pour les superhéros grâce aux changements causés par ses boucles, mais cela
rendit l’assaut de l’Ordre Noir sur Terre plus imprévisible… Ils pouvaient attaquer dans
plusieurs mois comme demain. Il suffisait d’un instant d’inattention pour qu’une journée
ordinaire et paisible ne se transforme en cauchemar infernal. C’est pour cela que le jeune
homme refusait de baisser sa garde, que ce soit lors de ses entraînements ou dans son
quotidien ; cette dernière timeline mettra un point final à ce cycle de tragédies qui n’a que
trop duré. La sortie de ce labyrinthe temporel était proche… Il ne lui restait plus qu’à franchir
les derniers obstacles pour l’atteindre. Peter ne se sentira véritablement libre que lorsque la
Guerre de l’Infini se terminera une bonne fois pour toute.

Les minutes s’écoulaient lentement dans un silence tranquille. L’adolescent continua à


regarder le dehors depuis sa fenêtre, le regard impassible et son esprit vagabondant ailleurs,
quand il entendit soudainement la poignée de la porte de sa chambre bouger. May apparut
alors à travers l’encadré ouvert.

- May.

- Ça va, Peter ?

- Oui. Peter retira ses écouteurs. Je me reposais un peu.

- Oh, je vois. Tu as fini tes devoirs ?

- Oui. Répondit-il en hochant la tête.

- C’est bien. Comme je m’y attendais de la part de mon neveu. May montra un grand sourire.

Le jeune homme afficha un petit sourire imperceptible mais présent.

- Au fait, il y a quelqu’un qui veux discuter avec toi.

- Quelqu’un ?

Une silhouette se dégagea alors derrière May, marchant jusqu’à l’entrée de la porte… Les
yeux de Peter s’agrandirent instantanément lorsqu’il vit qu’il s’agissait de Tony. Il fut
tellement surpris par cette visite inattendue qu’il recula son siège vers le mur d’un geste
brusque. Le milliardaire avait troqué un de ses costumes hors de prix pour des vêtements plus
décontractés aux couleurs sombres, bien qu’il demeure toujours bien habillé comme à son
habitude.

- T… Tony…

- Hey, Peter. Iron Man apparut calme et posé.

- J’ai quelques courriers à consulter, donc je vais devoir vous laisser. Dit May. Je suis dans le
salon si jamais vous avez besoin de quoi que ce soit.

- Merci, Mme. Parker. Répondit poliment l’ingénieur.

- Il n’y a pas de quoi. La jeune femme sourit à Tony, puis à Peter, avant de s’en aller en
fermant la porte de la chambre.

Le silence s’installa par la suite dans la pièce. Aucun bruit extérieur ne traversa les murs, que
ce soit de l’immeuble lui-même ou des rues qui l’entouraient. Le garçon araignée, ignorant
comment réagir devant son mentor, détourna les yeux en direction de la fenêtre… Tony,
quant à lui, l’observa pendant une poignée de secondes sans prononcer un mot puis il
parcourut la chambre du regard, en s’arrêtant brièvement sur les différents objets et posters
qui la composaient. Après cette courte inspection visuelle, le milliardaire s’assit sur le bord
du lit. Le jeune homme sentit de nouveau le regard de l’ingénieur vers lui, et il ne lui fallut
pas longtemps pour comprendre qu’il voulait lui parler côte à côte. Il prit un instant pour
inspirer profondément avant de se lever, reposer son téléphone sur la table de chevet puis de
s’asseoir près de Tony, les yeux vers le bas.

Les minutes passèrent lentement, jusqu’à ce que Peter finisse par briser cette suspension du
temps.

- … Pourquoi êtes-vous venu ici ? Demanda-t-il d’une voix basse, ses yeux fixant ses
chaussures.

Tony laissa passer un moment de flottement avant de répondre.

- Je me demandais comment tu allais.

- En tant que Spider-Man ? Son mentor gardait un œil sur lui lors de ses patrouilles,
notamment lorsqu’il portait son costume StarkTech, donc le jeune homme n’était pas surpris
que le milliardaire puisse poser ce type de question.

- Non.

Peter regarda alors Tony d’un air confus.

- Aucun des Avengers ni moi ne doutions de tes aptitudes de superhéros, et encore moins de
ta volonté d’œuvrer pour le bien. Continua le génie. Cependant… Au-delà des sessions
d’entraînements et de nos séances au laboratoire, je sens que tu ne t’ouvres pas complètement
à nous. Lorsque les entraînements sont terminés, tu pars tout de suite après de la Tour en un
coup de vent et quand nous travaillons ensemble tous les deux, tu restes presque totalement
muet jusqu’à ton départ… C’est comme si tu gardais une partie de toi enfouie, cachée
derrière un visage impassible.

Iron Man tourna ensuite la tête vers son protégé, ses traits laissant transparaître son
inquiétude pour lui.

- Qu’est-ce qui te préoccupe, gamin ?

Silence. Les yeux du garçon araignée s’ouvrirent un petit peu plus pendant quelques
secondes, puis il fixa de nouveau le plancher sous ses pieds d’un air pensif. Comme sa
rencontre avec les Défenseurs de la Terre s'est faite dans des circonstances inhabituelles et
qu'ils connaissent tous ses identités civile et superhéroïque, le jeune homme était
reconnaissant qu'ils ne lui disent rien à propos de ses départs hâtifs puisqu'ils sont au courant
de l'existence de sa famille (ou du moins ce qu'il en reste) et qu'il est un lycéen avec une vie
en dehors de ses devoirs de Spider-Man. Bien sûr, Pietro et Wanda aimaient lui parler un peu
avant qu'il ne quitte le complexe, mais ils sont si gentils avec lui qu'il n'a pas le cœur de les
couper court, et ils faisaient attention à ne pas le retenir plus longtemps que nécessaire. De
plus, Peter était certain que les adultes seraient entièrement concentrés sur leur stratégie
d’attaque contre Thanos et son armée et ne lui accorderaient donc pas d’attention
particulière... Mais il s’est avéré qu’il avait tort.

L’adolescent demeura taiseux durant un instant, puis il finit par pousser un soupir. Mentir à
son mentor ne servirait à rien puisqu'il arrivait toujours à déceler ses mensonges, peu importe
qu’il soit devenu un meilleur acteur et menteur du fait de la boucle temporelle. S'il y a une
personne qu'il ne peut pas tromper, c'est Tony Stark.

- … J’ai du mal à dormir la nuit. Avoua Peter. Ce détail attira immédiatement l’attention du
milliardaire.

- Tu as des crises d’insomnies ?

Le superhéros araignée hocha la tête.

- Cela fait des mois que je n’arrive plus à dormir plus de cinq heures. Les cours au lycée me
paraissent très longs parce que je connais déjà des notions que les professeurs nous
enseignent. Ce n’est que quelques heures dans la journée, mais j’ai l’impression que le temps
y tourne au ralenti. À chaque fois que je pars en patrouille, mes sens sont constamment en
alertes… Je possède des pouvoirs et une grande résistance physique, mais tout ce qui me
protège des tirs d’armes ou de coups de poignards est un costume en spandex. La moindre
erreur d’inattention peut me coûter des blessures, ou même pire…

La gorge de Peter commença à se nouer. Il serra les poings et il eut du mal à conserver une
respiration régulière.

- Peter...

- J'ai sauvé de nombreuses vies dans la ville, et d'une manière ou d'une autre, je suis toujours
rentré à la maison sain et sauf... Cependant, lorsque je m'endors, je ne vois que des
cauchemars. Des cauchemars qui me font revivre des souvenirs douloureux... Des
cauchemars avec des spectres qui me narguent parce que je suis toujours là... Alors que tous
ceux que j'aime ne le sont plus.

Le jeune homme ferma les yeux pour se retenir de pleurer... Mais quelques larmes finirent
tout de même par couler sur ses joues. Tony sentit son cœur se fissurer en entendant les
paroles de son protégé… Lorsqu’il s’est mis en quête de chercher des informations sur
Spider-Man et Peter peu de temps avant l’arrivée de l’été, le milliardaire se demandait
pourquoi le superhéros araignée agissait tel un fantôme et pourquoi l’adolescent ne souriait
plus. Au fur et à mesure qu’il trouva des réponses à ses interrogations, le brouillard qui
recouvrait ses souvenirs se dissipa petit à petit, jusqu’à ce qu’il finisse par assembler toutes
les pièces du puzzle qu’est sa mémoire. En voyant le comportement distant et peu expressif
de Peter lors de leurs séances au laboratoire, Tony soupçonnait que son apprenti portait un
lourd fardeau sur ses épaules… Et ses doutes se sont révélés exacts. Il n’eut pas besoin de
plus de mots pour comprendre le tumulte émotionnel que le jeune homme traverse…

Le génie, ne pouvant plus supporter de voir Peter aussi triste et malheureux, le prit alors
délicatement dans ses bras. Il serra son épaule droite avec sa main droite, tandis qu’il caressa
doucement la tête de l’adolescent avec celle de gauche. Le monte-en-l’air, surprit par ce geste
soudain, s’immobilisa telle une statue de marbre.

- Tony… ? Murmura-t-il d’une petite voix, bien qu’audible pour l’adulte.

Il y eut un silence. Tony prit cet instant de suspension afin de prendre une profonde
inspiration.

- … Tu sais, lorsque je travaillais seul au laboratoire il y a plusieurs mois de ça, je ne pus


m’empêcher de me retourner pour observer instinctivement la table de travail derrière moi. Je
ne savais pas vraiment pourquoi je le faisais au début, mais je sentais que quelque chose
m’échappait, comme si une partie de ma mémoire fut recouverte de brume… Quand les
médias se sont mis à relayer les exploits de Spider-Man, j’ai eu l’impression que ce nom
m’était familier… Pas seulement par rapport au fait que je l’ai déjà entendu, mais aussi que je
l’ai déjà côtoyé, en tant que héros et avec son identité civile.

Le milliardaire marqua une pause.

- Un jour, on a retrouvé des morceaux de toiles carbonisés que tu as utilisées en combat pour
arrêter des mafieux. Lorsque j’ai vu leurs compositions, ce sentiment de familiarité m’est
revenu, plus intensément que lors du reportage que j’ai vu à la télévision… Je n’avais pas
simplement la vague impression de connaître Spider-Man ; je le connais, c’était une certitude.
Il me fallait alors lever le voile sur la partie ombragée de mon esprit, où je pressentais que je
trouverais les réponses à mes questions… Et le déclic qui m’y a aidé est lorsque je me suis
rappelé de Midtown High, et qui a fait revenir de fil en aiguille dans mon cerveau le nom
d’un des étudiants de l’école… Peter Parker.

Peter ne prononçait pas un mot et ne bougeait pas d’un millimètre, mais il écoutait son
mentor avec attention.

- Dès lors que j’ai vu ton nom, je n’avais plus aucun doute… Spider-Man et toi êtes la même
personne. Cependant, je voulais dissiper mes incertitudes une bonne fois pour toute… J’ai
alors discuté de nombreuses fois avec ta tante au cours de rendez-vous que je prenais à
l’hôpital où elle travaille.

Oh… Je comprends mieux pourquoi May rentrait parfois tard le soir à la maison, ou bien
qu’elle reporte son retour au lendemain matin. Pensa le garçon araignée. Il ne s’était pas
vraiment posé de questions à ce sujet jusque-là car il arrivait que sa tante accepte de réaliser
des heures supplémentaires de dernières minutes afin de gagner un peu plus d’argent… Ce
fait restait vrai, mais cela expliquait les quelques nuits où May revenait aux alentours de
vingt heures au lieu de dix-neuf heures.

- Au fur et à mesure que l’on parlait ensemble, mes souvenirs opaques redevinrent petit à
petit plus précis et détaillés, comme si je retrouvais les idées claires. Après plusieurs jours,
j’ai fini par réassembler tous les fragments qui flottaient dans mon esprit, grâce aux paroles
de May puis par moi-même… Et j’ai fini par me remémorer totalement de toi. Le jeune
homme qui est l’un des meilleurs élèves de Midtown High, le jeune homme à l’intelligence
exceptionnelle qui est capable de rivaliser avec la mienne et celle de Bruce, le jeune homme
courageux qui combat le crime, le jeune homme au grand cœur qui voit le bien en autrui et
qui pardonne les erreurs des autres, le jeune homme fan de Star Wars avec qui je vois des
films quand on ne se sent pas l’envie de travailler sur un projet, le jeune homme avec qui
j’aime passer du temps ensemble…

Tony agrippa un peu plus fermement l’épaule de Peter.

- Le jeune homme auquel je tiens et que j’aime comme mon propre enfant.

Les yeux de l’adolescent s’écarquillèrent… Il n’était pas surpris que des personnes qui
fassent partie de son cercle de connaissances se remémorent des précédentes timelines qu’il a
vécu. Bien que la plupart d’entre eux n’en ont que des souvenirs partiels, ces petits fragments
leur ont permis de prendre conscience de leurs erreurs passées afin de ne plus les commettre,
et même à s’améliorer et devenir de meilleures personnes comme ce fut le cas avec Flash.
Peter comprit alors pourquoi Tony se montrait attentif et protecteur envers lui après son
combat contre Mordo quand bien même ils ne se sont pas rencontrés avant cet instant - dans
cette boucle, tout du moins -… Son mentor savait déjà qui il est depuis le début.

- Tu n’es pas seul, Peter. Rien de ce qui t’est arrivé n’est de ta faute. La mort de tes parents et
de ton oncle ne sont pas de ta faute. C’est normal de s’ennuyer ou de trouver le temps long en
cours, surtout à ton âge. De plus, ressentir de la peur ou de l’anxiété avant ou durant un
combat ? Ce sont des réactions absolument normales. Nous sommes des superhéros, mais
nous restons avant tout des humains… Cela dit, malgré ce que tu as vécu par le passé et en
ayant conscience de tes limites, tu affrontes le danger sans l’ombre d’une hésitation. Tu fais
tout ce qui est en ton pouvoir pour sauver des vies sans jamais rien attendre en retour, et tu es
même prêt à donner une seconde chance à tes adversaires s’ils en sont dignes. Tu es très fort,
gamin. Tu es le garçon le plus gentil, le plus brave et le plus fort que je connaisse.

Peter peinait à exprimer un son à cause de sa gorge toujours nouée, mais il a retrouvé
progressivement son calme et sa respiration grâce au discours de Tony. Il se sentit plus léger
après avoir confessé ce qui lui pesait sur le cœur depuis son "éveil", et l’homme qui lui a
sauvé la vie quand il était enfant et dont il voue une grande admiration lui a affirmé qu’il est
une bonne personne et qu’il n’est pas seul… Le jeune homme, pris par les émotions, entoura
timidement ses bras autour de son mentor et agrippa sa veste.

- … Merci, Tony. Dit-il d’une voix un peu rauque, mais plus forte et claire.

- De rien, Pete. Répondit l’adulte en souriant. Il a remarqué que son apprenti l’appelait par
son prénom et non "Mr. Stark" comme il en avait l’habitude auparavant… Cela apparaît
comme un petit détail, mais il en fut intérieurement content.

Le garçon araignée ressentit la chaleur qui émanait du réacteur ARC proche de sa joue. Une
chaleur douce et rassurante qui lui était bien familière…

… Ca va aller. Pensa Peter, une flamme s’allumant dans son regard. Je ne suis plus le garçon
inexpérimenté et impulsif qui agit uniquement avec son instinct et se met inutilement en
danger… J’ai gagné énormément d’expérience et développé de nouvelles compétences en
combat, dans la création d’équipements et d’usages de mes pouvoirs.

L’adolescent renforça son emprise sur le tissu.


Je veux vivre… Je veux que les personnes que j’aime vivent. J’en ai assez des tragédies…
J’en ai assez du destin qui se joue de moi. Je briserai ce sablier sans fin de mes propres
mains… Et je reprendrai mon futur.
L'aube de la guerre

Les jours passent. Les semaines s’écoulent les unes après les autres et se transforment en
mois. Les aiguilles de l’horloge tournent jusqu’à ce qu’arrivent 2018.

Peter observait la ville depuis le sommet d’un building à Manhattan, vêtu de l’Iron Spider,
son collier dissimulé sous son costume et serrant fermement son bâton de combat dans sa
main droite. Bien qu’il se sente en sécurité avec son uniforme superhéroïque le plus avancé,
le jeune homme s’était attaché à garder sa lance rétractable auprès de lui, d’autant qu’elle
l’avait aidé plus d’une fois lors de ses boucles, donc il l’a emporté afin d’être pleinement
tranquille en attendant avec anxiété le danger qui flottait au-dessus de la Terre…

Arriver jusqu’à cet aube lui parut incroyablement long, et pourtant l’année qui la précédait
sembla s’être écoulé en un éclair.

Etant donné que les Avengers ont recouverts des fragments de souvenirs antérieurs de ses
précédentes itérations, Peter redoutait qu’il en fût de même pour Thanos, car s’il se rappelait
du déroulement de leurs combats sur Titan ou même de sa défaite finale des mains des
Défenseurs de l’univers, le Titan Fou aurait réalisé que ses adversaires l’ont devancé dans sa
collecte des gemmes cosmiques et aurait accéléré de ce fait son attaque sur la planète bleue.
Le superhéros araignée fit dès lors part de ce doute à Docteur Strange durant l’une de leurs
séances d’entraînement, soupçon qu’il arborait lui aussi, et l’adulte fut particulièrement
vigilant par rapport à cette possibilité. Le sorcier vérifia régulièrement la moindre
interférence sur les protections mystiques qui entourait la Terre, tandis que le roi d’Asgard
voyagea de temps à autres à travers l’espace grâce à la Pierre d’infinité du même nom afin de
détecter tout vaisseau spatial de l’armée de Thanos gravitant autour de la Voie Lactée.
Cependant, après plusieurs semaines sans mouvement suspect, il apparut que seuls les
Défenseurs de la Terre possédaient l’avantage de la prémonition contre leur ennemi, ce qui
enleva un peu de poids sur les épaules de Peter. Ils réussirent ainsi à retirer la Pierre de
l’Esprit du front de Vision sans le tuer grâce à l’aide de la princesse Shuri, et ils construisirent
un plan d’attaque contre l’Ordre Noir et leurs soldats avec l’aide de T’Challa, le roi du
Wakanda et le héros Black Panther, se tenant dès lors prêt à intervenir en cas d’invasion
venant du ciel.

Le jeune superhéros renforça l’étreinte de son poing sur le sceptre métallique. Il savait que ce
n’était qu’une question de temps avant que les généraux de Thanos ne viennent briser la
quiétude de son monde et le plonger dans la peur et l’angoisse. Lorsqu’ils apparaîtront
finalement dans sa ville, il ne pourra plus faire marche-arrière… Sa vie, celles de ceux
auxquels il tient et celles de trillions d’êtres par-delà les étoiles reposeront sur l’issue de cette
ultime Guerre de l’Infini.

Alors qu’il fixait l’horizon, une voix venant de derrière lui le sortit soudainement de ses
pensées.

- Tu es ici, Peter. S’exprima le Maître des Arts Mystiques.


- Docteur Strange.

Les deux hommes se saluèrent poliment d’un hochement de tête puis le sorcier se plaça à la
droite de l’adolescent, regardant lui aussi au loin.

- Il me semble que tu devais avoir une sortie scolaire en ce moment. Dit Stephen en
continuant d’observer la ville.

- C’est vrai, mais cela aurait été difficile de quitter le bus qui m’emmènerait loin du centre de
New York sans attirer l’attention de ma classe. Tony s’est alors arrangé avec May et mon
école pour que je n’y aille pas en prétendant m’inclure dans un programme spécial en tant
qu’interne qui nécessite que je reste à la Tour pour la réalisation des projets.

- Je vois. Il t’a donné un alibi pour couvrir ton absence.

- Oui. Répondit Peter en hochant la tête. Grâce à cette couverture, le jeune homme ne
lèverait pas de soupçons sur son identité superhéroïque et sa tante ne sera pas inquiète pour
lui en cas de danger car elle sait qu’il sera en sécurité à la base des Avengers.

Un silence tranquille s’installa par la suite entre les superhéros. Docteur Strange tourna
légèrement la tête vers l'adolescent et remarqua que Spider-Man agrippait fermement son
bâton de combat. Bien que son visage fût caché par son masque rouge, le sorcier devinait
l’anxiété de Peter dissimulée derrière sa détermination de mettre fin à ce conflit. En
considérant ce que le garçon a traversé pour en arriver jusqu’à ce jour, cette réaction apparut
naturel pour Stephen. Il posa alors doucement sa main derrière le dos de Peter en signe de
soutien.

- Je comprends que tu sois inquiet, Peter. Je mentirai si je prétendais que je suis totalement
calme devant l’affrontement cosmique qui approche. Cependant, nous sommes cette fois-ci
préparés pour contrer les attaques de Thanos. Nous savons à quoi nous attendre si nous
engageons un combat contre lui… C’est pourquoi nous ferons en sortes d’en finir le plus vite
possible sur Titan. Cette guerre s’arrêtera aujourd’hui.

- … Oui. Répondit alors Peter après une courte pause.

Un bruit sourd retentit soudainement à l’horizon. Les sens des deux héros se mirent
instantanément en alertes et ils observèrent en direction de la source du son… Une immense
ombre circulaire se dessina à travers les nuages, tel un œil divin s’ouvrant dans le ciel, et
descendit progressivement vers le sol. Les grands buildings environnants parurent petits à
côté de la silhouette noire, et il suffirait d’un mouvement de cette dernière pour que les
bâtisses s’effondrent comme des châteaux de cartes. Il ne fallut pas longtemps pour que Peter
et Stephen reconnaissent le Sanctuaire II, un des vaisseaux spatiaux de l’Ordre Noir.

Les deux hommes s’observèrent alors du regard… Ils savaient ce que l’apparition de ce
cercle métallique signifiait.

La guerre venait de commencer.

L’heure du combat était arrivée.


Des morceaux de briques et de bétons s’écroulèrent de part et d’autres sur les trottoirs des
environs de Greenwich Village par la puissante force de lévitation du Sanctuaire II. Les
passants qui marchaient dans le quartier et ses alentours coururent en panique à la vue du
véhicule circulaire, et s’enfuirent le plus loin possible du danger pour se mettre à l’abri.
Tandis que les rues se vidèrent très vite de toute vie humaine, deux ombres sortirent des amas
de fumées s’étant formés par les chutes de gravas et marchèrent alors le long des chemins
craquelés : Cull Obsidian, le plus grand d’entre eux, était un colosse à l’apparence
reptilienne, le corps recouvert d’écailles reluisantes et tranchantes, disposant d’une
gigantesque massue lourde entre ses mains qui parut impossible à soulever pour tout être sans
force extraordinaire. Ebony Maw, quant à lui, apparut bien plus humanoïde que son
comparse… Si l’on omet son absence de nez et sa peau grise cendrée qui mettait en évidence
ses racines extraterrestres. Il était plus petit et frêle que Cull, mais ses immenses pouvoirs
télékinésiques font de lui un ennemi redoutable capable d’écraser ses opposants au sol tout en
restant immobile et inflexible.

Après un certain temps, Maw s’arrêta au milieu d’une allée accidentée complètement vide,
les mains derrière le dos et la posture droite, tout en tournant la tête à droite et à gauche d’un
air dubitatif…

- Etrange… S’exprima calmement le général. Le porteur d’une des Pierres d’Infinité n’est pas
sur son territoire.

Il aperçut le toit vert du Sanctum Sanctorum ornée de la Fenêtre des Mondes quelques mètres
plus loin de la rue, sanctuaire qu’il savait détenir de nombreuses reliques anciennes aux
pouvoirs mystérieux, mais il ne ressentit aucunement l’aura de la singularité cosmique qu’il
cherche à s’emparer ni celle de son gardien. Il n’eut pourtant aucun doute que les gemmes
manquantes que convoitait son maître étaient rassemblées sur cette petite planète bleue, d’où
le fait que leur ordre se soit séparé pour les récupérer… Où pouvaient-elles bien être ?

Alors qu’Ebony Maw commençait à s’interroger sur l’absence du détenteur d’une Pierre
d’Infinité, le bruit d’une explosion retentit subitement à quelques mètres des deux enfants de
Thanos, créant par la suite un énorme brouillard rouge qui aveugla immédiatement le duo
d’extraterrestres. Iron Man et Quicksilver, qui demeuraient cachés au sommet d’un
immeuble, profitèrent de cet instant d’inattention pour se précipiter en une fraction de
secondes sur Cull Obsidian afin de l’éloigner jusqu’à Central Park. La couleur carmin de la
fumée masqua leurs ombres aux yeux de leurs ennemis, si bien que Maw ne put distinguer les
deux superhéros avant qu’ils n’embarquent son camarade au loin en un coup de vent
extrêmement rapide, et ils disparurent juste après qu’il ne disperse la brume aveuglante avec
ses pouvoirs.

Cull Obsidian, énervé de s’être fait avoir comme un bleu, tournoya sa massue en direction
des Avengers et frappa violemment le sol avec son arme, creusant alors des trous de terre à
son impact. Pietro, doté de sa supervitesse, esquiva sans problèmes les coups de son
adversaire et parvint à lui asséner des coups de pieds au visage lors de courtes ouvertures,
tandis que Tony usa de toute la puissance de feu de son armure contre le reptile géant.
Malheureusement, sa peau paraissait indestructible, aussi incassable que du diamant, si bien
qu’il ne fut nullement déstabilisé de recevoir de nombreuses déflagrations brûlantes en plein
corps et les encaissa sans même vaciller, tout en continuant à s’attaquer à lui et au coureur
aux cheveux blancs. Il apparut clair pour le génie que le vaincre au corps-à-corps ne
marchera pas car le colosse possédait une résistance physique inhumaine, alors il réfléchit à
une autre solution pour le prendre à revers… Une idée germa par la suite dans son esprit
lorsqu’il vit un arbre à proximité de Cull Obsidian. Quicksilver remarqua brièvement entre
deux esquives que Tony dirigeait son bras gauche vers quelque chose et, sentant que l’homme
de fer concoctait un plan, courut instantanément hors de portée du général écaillé.

Le milliardaire lança une déflagration sur l’arbre avec ses répulseurs afin qu’il chute sur Cull,
puis il ouvrit la sortie de son système laser et se mit immédiatement en position de tir. Le
reptile alien aperçut du coin de l’œil le tronc de bois tomber vers lui et le repoussa d’une
seule main comme s’il s’agissait d’une brindille, s’écrasant par terre dans la direction
opposée à la sienne. Il se retourna alors d’un geste vif, les yeux bouillonnant d’une rage
bestiale, mais Tony ne le laissa pas répliquer et lui tira un puissant rayon lumineux droit dans
le crâne. Le colosse émit un râle d’agonie, en ultime geste de défiance contre les Avengers,
avant de s’écrouler lourdement au sol, son arme tombant à ses côtés et la vie s’échappant de
ses iris figées.

De longues secondes s’écoulèrent sans un bruit. Le milliardaire et le mutant observaient


prudemment le corps inerte de Cull Obsidian depuis leurs positions, en guettant le moindre
signe qui leur indiquerait que leur ennemi vivait encore. Ce ne fut que lorsque F.R.I.D.A.Y
confirma sa mort que les deux superhéros s’autorisèrent enfin à reprendre leur souffle.

- Joli tir. Dit Pietro.

- Merci, mais ce n’était pas passé loin. Répondit Tony en reposant les pieds à terre. Il aurait
suffi qu’il incline la tête de quelques centimètres pour que le tir le rate.

- On peut dire qu’il n’a pas vu venir notre vitesse d’adaptation en combat. Quicksilver afficha
un sourire victorieux.

- C’est vrai.

Une ombre flottante se dessina sur l’herbe, puis un son d’atterrissage retentit derrière eux.
Docteur Strange et Peter vinrent ensuite à leur rencontre, les costumes parsemés de poussière
mais indemnes.

Après qu’Ebony Maw se soit retrouvé seul après le guet-apens des Avengers, Spider-Man
s’est balancé avec ses toiles au-dessus de sa tête afin d’attirer son attention, tandis que le
sorcier le suivit discrètement dans l’ombre. Le télépathe ne tarda pas à mordre à l’hameçon et
utilisa les débris présents sur la route comme moyen de transport pour pourchasser le garçon
araignée jusqu’aux abords de Staten Island, loin des habitations et proche de la rivière. Pour
une raison qu’il ignore, Maw ressentit la présence d’une énergie cosmique similaire à celle de
la Pierre du Temps autour de Spider-Man ; Faisait-il partie de la petite poignée d’élus qui
possédait la faculté de manipuler les Pierres d’Infinité sans en mourir ou est-ce qu’il
partageait un lien inconnu avec elles ? Qu’importe. Le général alien allait s’emparer de lui
pour mettre la main sur la Pierre du Temps, et s’il opposait une résistance trop importante,
alors il n’aura qu’à le tuer et retrouver la gemme verte par lui-même.
Bien que le champ de bataille empêche Ebony Maw d’utiliser l’environnement comme armes
contre le héros acrobate et que ce dernier échappa à des lancées de terre sans grandes
difficultés, Peter eut cependant du mal à esquiver certaines vagues télékinésiques de son
adversaire, se prenant de temps à autres des boucliers invisibles qui le repoussait à droite ou à
gauche. Lorsque l’adolescent fut projeté dans les airs suite à une attaque basse soudaine,
l’enfant de Thanos s’apprêta à user des câbles enfouis sous les pierres pour l’immobiliser…
C’est alors que Docteur Strange, dissimulé en hauteur du champ de bataille, invoqua un
portail juste derrière son ennemi, fit apparaître une épée dorée entre ses mains et transperça la
poitrine de Maw d’un geste bref et précis. Le général cracha du sang d’un rouge sombre
virant au noir par la bouche, incapable de produire le moindre son, tandis que celui qui
s’écoulait de la plaie au niveau de son torse entacha son uniforme. Le temps se suspendit
quelques instants avant que l’alien ne s’écroule au sol, sans vie. Le sorcier ouvrit par la suite
un nouveau portail pour rattraper Peter, en chute libre, et le faire atterrir au sol sans se blesser.
Dès lors que les deux superhéros furent certain qu’Ebony Maw était mort, Stephen termina le
combat en envoyant le corps de son ennemi disparaître dans les abysses d’Unlivion.

Pietro fut plus rapide que Tony pour enlacer l’adolescent.

- Peter !

- Pietro… ! Le jeune homme prit quelques secondes avant d’entourer ses bras autour du
coureur, soulagé que sa figure fraternelle soit indemne.

- Tu vas bien, frangin !

- Ouais… On va bien.

Le milliardaire soupira de soulagement en voyant son protégé et le sorcier sains et saufs.

- Vous avez réussi à vaincre Voldemort ? Demanda Tony à Docteur Strange.

- Oui. Répondit Strange en hochant la tête. Et Cull Obsidian ?

- Ce reptile était une vraie plaie à combattre, mais on est parvenu à l’achever. Iron Man
pointa le corps écaillé d’un regard derrière lui, suivi par le Maître des Arts Mystiques.

- Notre plan a ainsi marché.

- Oui. C’était moins une, mais il a marché. Tony tourna ensuite la tête vers Peter, qui s’était
légèrement éloigné de Quicksilver entretemps. Merci pour la bombe fumigène, petit. Cela
nous a beaucoup aidés.

- De rien. Son masque cacha un petit sourire.

Les quatre superhéros regardèrent ensuite en direction du Sanctuaire II, toujours en lévitation
et immobile comme une statue.

- Cet énorme vaisseau est encore là… Marmonna Quicksilver.


- … Je doute que Cull Obsidian ou Ebony Maw aient conduit le Sanctuaire II sur Terre par
eux-mêmes. Ce cercle de métal dispose certainement d’un système de pilote automatique
avec des commandes préenregistrées en plus d’un volant manuel. Nota Stephen. Seuls lui et
Peter savaient que cette information était vraie du fait de leurs souvenirs des boucles.

- Je suppose que le vaisseau spatial ne bougera pas tant que quelqu’un n’aura pas activé ce
système, n’est-ce pas ? Rétorqua Tony.

- Oui.

Iron Man et Docteur Strange s’observaient l’un et l’autre durant quelques secondes. Ils
n’eurent pas besoin d’exprimer de mots pour comprendre qu’ils partageaient la même
pensée… Si Thanos décide d’agir et de récupérer lui-même les Pierres d’Infinité qui lui
manquent sur leur planète, le glas sonnera pour la moitié de l’univers et des trillions de vies
disparaîtront par leur échec. La Team New York devait donc donner un point final à ce conflit
en éliminant ses racines à sa source ; en d’autres termes, tuer Thanos sur Titan. Il y a
longtemps de cela, le sorcier aurait privilégié la protection de la Pierre du Temps envers et
contre tout sur Terre au lieu d’un affrontement direct avec le géant à la peau violette…
Seulement, ce ne fut désormais plus le cas. Il savait qu’une stratégie défensive ne
fonctionnera pas contre un être millénaire à la force exceptionnellement puissante et doté
d’un intellect redoutable… Seule l’offensive pouvait lui faire perdre l’équilibre. De plus, lui
et le génie connaissaient très bien quelle finalité attendrait leurs alliés si Thanos leur
échappait et accomplit ses ambitions… Les deux héros ne comptaient pas laisser les erreurs
du passé se reproduire, et ils refusaient d’abandonner quiconque à la mort sans se battre.

Bien-sûr, une partie de Tony était réticente à l’idée d’emmener Peter et Pietro vers la planète
déserte. Cela étant, même si l’un possédait une armure composée des technologies les plus
avancées du monde et l’autre des pouvoirs mystiques ancestraux défiant les limites de la
réalité, vaincre le Titan Fou seulement à deux serait suicidaire. D’autant plus que si Spider-
Man et Quicksilver restaient en retrait, ils n’auraient aucun moyen de rejoindre rapidement
les autres membres des Avengers au Wakanda pour leur prêter main forte car préparer et
piloter un Quinjet jusqu’au royaume prendrait trop de temps sans aide. Il valait dès lors
mieux que la Team New York reste ensemble ; Du moment qu’ils gardent l’avantage de
l’effet de surprise, ils auront une chance de s’en sortir, aussi faible qu’elle puisse être.

- Allons-y. Allons débusquer Thanos. Déclara le génie, le regard tourné le Sanctuaire II.

Peter remarqua qu’il n’émit aucun commentaire particulier envers lui. Connaissant son
mentor et à quel point il tient à lui, il aurait été normalement véhément à l’idée de le laisser
partir vers une planète lointaine.

- Vous… Cela ne vous gêne pas que je reste avec vous ?

- Pas vraiment. Répondit calmement Tony, bien que l’on puisse deviner de l’inquiétude dans
sa voix. À vrai dire, j’aurais préféré ne pas impliquer mon protégé dans une telle mission…
Cependant, la situation à laquelle on a affaire ne nous laisse pas beaucoup d’options.

Le milliardaire marqua une pause, puis il marcha vers Peter et posa ses mains sur les épaules
du jeune homme, le regard sérieux mais rassurant.
- Cela dit, je sais que je peux te faire confiance. Je sais mieux que quiconque combien tu es
fort et dur à cuire. Tu arrives à vaincre de nombreux criminels et à protéger tout le monde
dans cette immense ville par toi-même, après tout. De toute façon, je ne compte pas laisser
Thanos te faire du mal… Si jamais il venait à te blesser, je le lui ferais payer sans retenir mes
coups.

- … Merci, Tony. Répondit Peter, laissant apparaître un sourire sur ses lèvres qui en dessina
par la suite un sur le visage du génie.

Quicksilver tapota le dos de son petit frère de cœur en signe d’approbation, tandis que
Stephen ne put s’empêcher d’esquisser un sourire discret en voyant la scène. Une poignée de
secondes s’écoulèrent en silence, instant durant lequel le sorcier prit une profonde inspiration
et fit le vide dans son esprit avant d’ouvrir un portail doré qui menait à l’intérieur du vaisseau
circulaire, ce qui attira l’attention des Avengers.

- Ce moment de répit qui nous est accordé n’est pas infini… Profitons-en pour se rendre sur
Titan et arrêter cette guerre.

Les trois superhéros hochèrent la tête d’un geste déterminé. Suite à cela, les Défenseurs de la
Terre traversèrent le cercle et se retrouvaient alors au cœur du Sanctuaire II. La technologie
extraterrestre se reflétait absolument partout autour d’eux, du sol aux murs, et reflétait
parfaitement la sensation d’être plongé dans le vide spatiale : la hauteur de plafond et les
profondeurs du vaisseau sous leurs pieds se confondaient entre elles du fait de sa forme
inhabituelle, les couloirs métalliques demeuraient dans la pénombre et la seule source de
lumière qui y apportait une petite étincelle de vie était un écran holographique titanesque
d’un bleu froid.

Aux vues de la grandeur du Sanctuaire, le groupe de superhéros marchaient prudemment sur


les plateformes teintées, vérifiant à chaque mètre à ne pas trébucher sur un câble sauvage ou
des vices mal placées pour ne pas tomber des dizaines de mètres plus bas. Ils finirent par
arriver à la salle de commande du vaisseau au plus haut niveau du cercle au bout d’une
dizaine de minutes d’exploration, non loin de l’emplacement de l’écran holographique. Tony
et Docteur Strange s’attelaient alors ensuite à la tâche de déchiffrer le langage alien du
Sanctuaire afin de programmer leur nouvelle destination, usant de leurs intelligences
respectives et de l’aide de F.R.I.D.A.Y pour résoudre le problème. Sentant que le processus
de démarrage prendra probablement un certain temps, Peter et Pietro sortirent de la pièce et
partirent s’asseoir l’un à côte de l’autre quelques mètres plus loin, dans un coin tranquille et
sans risque de chute.

- Brrr… Cet endroit me fait froid dans le dos. Avoua Quicksilver en fixant des éléments du
Sanctuaire autour de lui. Je me demande comment les généraux de Thanos peuvent voir quoi
que ce soit dans cette obscurité.

- Je pense que leur vision s’est adaptée à cette faible luminosité à force de le piloter à travers
l’espace.

- Hm… Pas faux. En tout cas, je suis bien content d’avoir des lunettes avec vision nocturne.

- Les merveilles de la technologie.


- Héhé, tu l’as dit !

Un silence s’installa entre les deux jeunes hommes. Tout comme lui avec l’Iron Spider, Pietro
obtint un tout nouveau costume en tant qu’Avengers : son ancien uniforme aux teintes grises
dominantes fut remplacé par des vêtements souples aux couleurs bleues marines et noir,
spécialement conçus pour se fondre avec son corps et adaptés à son métabolisme de mutant à
la vitesse surhumaine. Son torse était entouré d’une protection en kevlar qui servait de gilet
pare-balles, le protégeant ainsi de tirs d’armes mortels. Quicksilver possédait également une
paire de lunettes aux verres bleues remplie de technologies STARK, des bracelets optimisés
capables de générer des boucliers semblables à celui de Captain America ainsi qu’un
poignard en vibranium attaché à la ceinture. Le garçon araignée et le coureur possédaient un
éventail de compétences similaires : une super force, des sens aiguisés, une résistance
physique accrue et des réflexes surdéveloppés. Ils tiraient leurs forces de leurs capacités de
combattants au corps-à-corps, mais ils disposaient malgré tout d’armes secondaires afin de se
protéger contre des ennemis au style de combat plus défensif ou furtif. Ce fut un bâton de
combat et des bombes pour Peter, et ce fut un couteau pour le mutant, simple à dégainer et à
utiliser en cas d’urgence.

Après quelques minutes sans bruit, Pietro tourna la tête vers le jeune homme… Son visage
découvert laissait transparaître une expression calme et stoïque, ses yeux semblant fixer le
vide. Ce n’était pas la première fois que Quicksilver vit son petit frère arborer une posture
tranquille, autant en tant que civil que sous son identité superhéroïque. Cela étant, bien que
ses traits fins apparaissent légers, le langage corporel de Peter trahissait sa peur enfouie de
partir aussi loin de son monde natal pour un affrontement qu’il savait risqué.

Pietro, soucieux pour l’adolescent, s’approcha un peu plus près de son ami et le rapprocha de
lui en un câlin de côté. Il caressa doucement son bras en signe de réconfort. Au départ pris de
court, Peter reprit progressivement son souffle coupé et s’autorisa à se reposer auprès de son
frère.

Le premier combat de la Team New York s’est déroulé sans encombre. Ils ont réussi à battre
les deux généraux les plus puissants du tyran sans blessures… Il ne restait plus qu’à atteindre
Titan pour vaincre Thanos.

Les Défenseurs de la Terre ne laisseront pas le Titan Fou s’échapper de la planète morte.
Crépuscule

L’espace s’étendait à l’infini. Un océan d’étoiles et de planètes défilaient en continu sur


l’écran holographique du Sanctuaire II, à mesure que le vaisseau circulaire volait par-delà les
galaxies aux multiples couleurs pour rejoindre sa destination finale : Titan.

Déchiffrer le langage extraterrestre du véhicule ne fut pas une tâche aisée pour Tony et
Stephen, mais ils parvinrent à programmer leur voyage pour la planète de Thanos grâce à
l’aide de F.R.I.D.A.Y. Dès lors, le cercle de métal vogua de lui-même jusqu’à une lointaine
galaxie, à des milliards d’années lumières de leur monde natal et à une vitesse phénoménale.
Tout ce qu’il leur restait à faire était d’attendre le moment où Titan apparaîtra sur l’immense
moniteur bleu. Iron Man survolait la structure du Sanctuaire II afin de recouvrir toute
ouverture vers le cosmos de glace, Docteur Strange gardait un œil sur la traversée spatiale,
tandis que Peter et Pietro se baladaient à travers les couloirs du vaisseau pour se dégourdir les
jambes et s’occuper l’esprit.

Après une longue suspension du temps, une planète apparut progressivement sur l’écran
holographique, accompagnée d’une indication de cinq symboles qui signifiait "Titan". L’astre
était entièrement recouvert d’une mer de nuages, si bien que l’on ne pouvait pas distinguer
ses contours… Cependant, les Défenseurs de la Terre remarquèrent rapidement les nombreux
débris de roches et de ce qui s’apparentait à des vestiges de structures qui flottaient autour de
la planète, certains d’entre eux étant aussi gros que des morceaux d’astéroïdes. Tony et Pietro
attrapèrent alors les contrôleurs de directions du vaisseau spatial afin d’éviter toute collision
avec les rebuts volants ; malgré le poids imposant des deux poignées métalliques, ils
arrivèrent tant bien que mal à esquiver les fragments oxydées de la planète morte. Une fois
que le Sanctuaire II se soit extirpé du brouillard orangé, les deux pilotes conduisirent le cercle
géant entre les ruines de l’ancienne civilisation qui a autrefois peuplée ces terres désolées il y
a des millénaires de cela. Le groupe de superhéros vola ainsi pendant plusieurs minutes à
travers les décombres jusqu’à ce qu’ils trouvent un endroit suffisamment dégagé pour atterrir.

- Ouf… Je n’imaginais pas ces poignées aussi lourdes et difficiles à bouger. S’exprima Pietro
une fois le Sanctuaire II parfaitement immobile.

- Je suppose qu’elles n’ont pas été utilisées régulièrement par les généraux de Thanos, étant
donné que le vaisseau dispose d’un système automatique pour voyager sans pilote. Répondit
Iron Man. Cela expliquerait pourquoi elles sont peu flexibles.

- C’est possible. Dit Docteur Strange. Peter, lui, hocha silencieusement la tête.

Il y eut un court silence, puis le groupe de superhéros se décida à sortir du vaisseau spatial.
Comme lui et l’adolescent savaient ce qui pourrait potentiellement les attendre s’ils
s’aventuraient dans l’obscurité du cercle de métal, le sorcier ouvrit directement un portail
vers l’extérieur du sanctuaire. Lorsque les Avengers se retrouvent dehors, ils observèrent en
détails le paysage meurtri de Titan : des millions d’infrastructures gargantuesques en formes
d’étoiles s’amoncelaient les unes sur les autres dans un chaos innommable ; certaines d’entre
elles avaient gardées leur apparence d’origine malgré la perte de quelques branches, d’autres
étaient complètement détruites au point que l’on pouvait voir leur fondation brisée et
couverte de rouilles. Des morceaux cassés de fer et de métal jonchaient le sol aride de la
planète à perte de vue, obstruant l’horizon derrière des montagnes de débris sans fin. Le vent
qui soufflait entre la ferraille créa de brèves traînées de sables sur son passage et le soleil qui
commençait lentement sa transition vers le crépuscule repeignit le ciel de couleurs bleues et
rougeâtres, renforçant alors l’atmosphère désertique et abandonnée qui imprégnait Titan. Tout
ce qui entourait les Défenseurs de la Terre semblait crier d’une voix muette qu’une terrible
tragédie est arrivée sur cette planète.

Le milliardaire survola par la suite les gravats afin d’avoir une vue d’ensemble sur leur
nouveau champ de bataille : bien que la gravité paraisse quelque peu instable, étant donné
que ses coéquipiers restaient les pieds à terre mais que des débris de toutes tailles flottaient
autour d’eux, il y subsistait de l’oxygène pour respirer normalement. L’immense quantité de
ferraille amoncelée rendait cependant le terrain difficilement praticable pour mener des
combats au corps-à-corps à cause du peu d’espace non-accidenté où ils pouvaient marcher, en
plus de dissimuler la présence de trous et de vastes crevasses écroulées.

Quelques minutes s’écoulèrent dans un silence profond… Soudain, le sens de l’araignée de


Peter s’activa. Il entendit au loin le son de barres de fer qui tombaient au sol, puis des pas
lourds se rapprocher rapidement de la direction des Défenseurs de la Terre… Il eut à peine le
temps de réagir qu’un être humanoïde à la carrure imposante, à la peau olive et aux larges
tatouages rouges sur le torse sortit tel un diable dans une boîte d’une montagne de débris à sa
gauche, hurlant un cri de guerre à gorge déployée avec deux dagues aux mains.

- Attention, Peter ! Cria Pietro en s’apercevant du danger, avant de courir en une seconde
auprès de son ami et de l’éloigner du guerrier.

Stephen, au départ stupéfait par cette embuscade, se reprit très vite et fit apparaître des
chaînes dorées en claquant des doigts avant de les lancer en direction de l’homme afin de
l’immobiliser, le faisant dès lors tomber au sol.

- Argh ! Qu’est-ce que c’est que ces chaînes ? Scanda l’inconnu en se mouvant
frénétiquement pour tenter de se libérer.

Tony s’aperçut alors de ce qu’il se passait en contrebas et fonça à plein régime vers ses
coéquipiers. Il vit le coureur et son protégé à cinq mètres de Docteur Strange, et aux vues de
l’ouverture qui s’était formé sur la masse de débris suite à cette attaque, cette personne a
essayé de s’en prendre à Peter. Le sang de Tony ne fit qu’un tour, et il ne tarda pas à poser
violemment son pied sur le torse de l’inconnu sous le coup de la colère et de le tenir à bout
portant avec un de ses répulseurs. C’est alors qu’une autre voix masculine sortit du trou
béant, avec un timbre semblable à celui de Pietro :

- Que personne ne bouge ! Menaça-t-elle.

Un homme dans la trentaine portant des vêtements faisant penser à ceux d’un bandit et armés
d’un pistolet à double canons en main se manifesta hors de l’ouverture, ciblant Iron Man d’un
regard dur. Tony ne fléchit pas et le prit également pour cible avec son répulseur, tout en
continuant à pointer son canon vers le guerrier à terre. Derrière le voleur se cacha une jeune
femme avec des cheveux et d’énormes iris noirs, une tenue verte au motif d’une mante
religieuse et des antennes sur le front, plus en retrait que son compagnon.

Dès lors que Peter aperçut les trois personnes, il reconnut tout de suite leurs identités : il
s’agissait des Gardiens de la Galaxie. Le combattant enchaîné est Drax, celui qui tenait Tony
en ligne de mire est Star Lord - de son vrai nom Peter Quill - et celle qui apparaissait comme
une psychiste est Mantis. Stephen sut comme le jeune homme araignée à qui ils avaient
affaire, et il s’apprêtait à intervenir pour éviter un conflit entre les deux équipes… Cependant,
bien qu’il pointe son arme en direction du milliardaire, le chef des Gardiens n’appuya
pourtant pas sur la gâchette. Il se contentait d’observer silencieusement les Défenseurs de la
Terre les uns après les autres, le regard laissant transparaître de la curiosité et du doute. En
temps normal, Quill aurait attaqué les Avengers sans une once d’hésitation car il ignorait à ce
moment-là qu’ils n’étaient pas des soldats de Thanos… Ici, le bandit n’apparut pas aussi
impulsif que lors des précédentes boucles. Aux vues de son comportement défensif, il
semblerait qu’il ne soit pas à l’origine de l’attaque surprise de Drax envers les héros terriens
et que ce soit le colosse qui les aient attaqué de son propre gré en les apercevant au loin suite
à leur arrivée sur Titan.

De longues secondes passèrent sans que personne n’émette le moindre son… Jusqu’à ce que
Star Lord finisse par dire :

- … C’est bizarre… Vos visages me disent quelque chose. J’ai l’impression que ce n’est pas
la première fois que je vous vois. Il n’y avait aucune trace de moquerie ou de sarcasme dans
sa voix. Quill était sincèrement interrogatif par rapport à cette sensation de déjà-vu qu’il
ressent auprès des Défenseurs de la Terre.

Cette phrase prit Tony et Pietro de court… Contrairement à Peter et Stephen qui
comprenaient son sens caché. Même s’ils ne se sont rencontrés qu’au moment de la Guerre
de l’Infini et dans des circonstances spécifiques, les effets latents de la boucle temporelle ont
permis aux Gardiens de la Galaxie - ou tout du moins à Quill - de recouvrir des morceaux de
leurs souvenirs antérieurs des précédentes itérations. Ils étaient probablement plus petits et
plus opaques que ceux qu’ont retrouvés les Défenseurs de la Terre, mais ils furent
suffisamment marquants auprès de Quill pour le convaincre de ne pas les attaquer
aveuglément.

Pour éviter de briser cet équilibre fragile, Docteur Strange s’interposa entre Iron Man et Star
Lord.

- Doc ? S’exprima Tony sous le coup de la surprise.

- Vous êtes les Gardiens de la Galaxie, n’est-ce pas ? Répliqua le sorcier à Quill. Il
connaissait déjà la réponse à cette question, mais ce qui lui importait était de désamorcer
tout début d’hostilité entre les héros.

Le bandit, quelque peu étonné mais comprenant que les hommes en face de lui ne
représentaient pas une menace, baissa son pistolet vers le sol et répondit par l’affirmative en
hochant la tête. Dès lors que le dialogue s’installa entre les deux équipes, Strange tourna alors
la tête vers Drax et le libéra de ses chaînes.
- Si nous nous trouvons tous ici sur cette planète, alors cela signifie que nous partageons le
même objectif.

- Hein ? S’exclama Quill.

- Vous aussi, vous voulez arrêter Thanos ? Demanda alors Mantis.

- Ouais. Répondit Quicksilver, s’étant entretemps relevé avec Peter après sa course.

- On est venu de très loin pour ça. Continua l’adolescent.

Puisque le but des Avengers et des Gardiens concordaient ensemble, les Défenseurs de la
Terre et les mercenaires décidèrent de s’allier ensemble pour affronter Thanos. Face à un
ennemi aussi puissant que manipulateur, toute force physique et magique devait se souder
afin d’empêcher le génocide de la moitié de l’univers.

Selon les dires de Star Lord, Thanos n’aurait en sa possession qu’une seule Pierre d’Infinité à
son actif, mais elle n’en restait pas moins la plus dangereuse en termes de puissance pure et
destructrice : la Pierre du Pouvoir. Puisque Thor a récupéré les singularités cosmiques de
l’Espace et de la Réalité au nez et à la barbe de tous, l’une d’entre elle octroyant la faculté de
se téléporter d’un bout à l’autre des galaxies en un battement de cil, le colosse à la peau
violette fut ainsi grandement ralenti dans sa collecte des reliques anciennes et ne put mettre la
main que sur une seule d’entre elle après un temps considérable de recherches. Cependant, la
planète Nova a lourdement payé le prix de la garde de la Pierre du Pouvoir… Une grande
partie de la population a réussi à s’échapper à temps avant l’arrivée de Thanos, mais l’armée
de la planète souveraine fut écrasée par celle du titan et de son Ordre Noir, avant que ces
derniers ne réduisent les cités et les villes en flammes. Ce fut l’attaque sur Nova qui alerta les
Gardiens sur le but du père adoptif de Gamora, l’une des membres de l’équipe, et les ont
poussé à récupérer les autres Pierres d’Infinités avant lui. Malheureusement, ils tombèrent
dans une embuscade en cherchant la Pierre de la Réalité chez le Collecteur, et Thanos enleva
sa fille sous leurs yeux car elle et sa sœur Nebula savaient où se trouvait l’une des gemmes
cosmiques qu’il convoite. C’est pour cela qu’une partie des Gardiens partit pour Titan afin de
le confronter et retrouver leurs camarades, tandis que Rocket Raccoon et Groot parvinrent à
détecter la présence de l’armée du tyran et de ses généraux dans la Voie Lactée, et
s’envolèrent dès lors vers la galaxie pour aider ceux qui se dressent contre eux.

L’équipe de Titan se mit par la suite à discuter de la construction d’un plan d’attaque. Peter,
quant à lui, s’isola un peu plus loin et s’assit sur l’un des rares rochers présents au milieu des
ruines pour se vider l’esprit. Il entendit des bouts de phrases çà et là qui soulignaient le
contraste entre le sérieux des Avengers et la nonchalance des Gardiens de la Galaxie,
possiblement dû au fait qu’ils étaient habitués à affronter régulièrement des ennemis
extraterrestres.

Au bout d’une dizaine de minutes, l’adolescent sentit alors une main se poser sur son épaule.
Il tourna la tête et vit qu’il s’agissait de Docteur Strange. Le sorcier s’était brièvement
éloigné du groupe en prétendant vouloir voir les différents futurs possibles où les héros
gagneraient contre le Titan Fou… Ce fut bien-sûr un mensonge. Du moins, pas
complètement… Stephen a déjà vu des millions de futurs, des millions d’issues à la Guerre
de l’Infini au cours de la boucle temporelle. Il n’eut dès lors pas besoin de réitérer cette
action une nouvelle fois car il en connaissait déjà le résultat.

Il y eut un court silence entre les deux hommes, puis ils observèrent l’équipe de Titan au loin.

- Au rythme où va la discussion, tout le monde arrivera au même plan que lors de nos
précédentes tentatives. S’exprima Docteur Strange après un moment de flottement.

- … Si j’utilise mon pouvoir d’arrêter le temps juste après que Mantis ait endormi Thanos,
vous pensez qu’on aurait le temps de lui retirer le Gant de l’Infini ?

- En théorie, ce serait possible. Cependant, enlever un immense gant en or de la main d’un


colosse en moins de sept minutes risque d’être compliqué, même à plusieurs.

Silence.

- Cela étant dit, on peut utiliser l’arrêt du temps bien plus tôt.

- Plus tôt ?

- Oui. J’ai pensé à un plan alternatif pendant notre traversée avec le Sanctuaire II, et si
Thanos arrive bien seul sur Titan avec seulement deux Pierres d’Infinités à son actif…

Stephen regarda alors Peter d’un regard déterminé.

- Alors nous n’aurons peut-être pas besoin de nous battre contre lui.
Soleil couchant

Le silence régnait sur Titan. La lumière du crépuscule peigna le cimetière de fer de couleurs
orangées et rouges, ce qui rendit temporairement une flamme de chaleur à la planète froide et
oxydée.

Les débris flottants volèrent muettement au-dessus des ruines, voguant au gré de la gravité
fluctuante de l’astre rocheux… Soudain, un vaisseau spatial circulaire transperça les nuages
telle une créature divine descendant des cieux, écartant toute présence inorganique de son
passage grâce aux puissants moteurs gravitationnels du Sanctuaire. Après de longues minutes
de vol, le véhicule volant se posa finalement sur la terre aride de Titan, au milieu des vestiges
de l’ancienne place centrale de la cité qui s’érigeait en tant que cœur de la planète morte dans
des temps immémoriaux. Les portes à la base du vaisseau s’ouvrirent par la suite à
l’extérieur, la lueur du soleil couchant révélant dès lors l’apparence du pilote qui en ressortit :
Thanos, le Titan Fou.

Le colosse à la peau violette marcha avec des pas lourds sur le sol poussiéreux de sa terre
natale, le regard grave et perdu à l’horizon. À quand remonte la dernière fois qu’il revint sur
cette décharge de métaux rouillés qu’il appelait auparavant sa maison ? D’aussi loin que
Thanos se souvienne du jour où il a été exilé de Titan par les siens, du fait de sa proposition
de morts impartiaux parmi toutes les classes de la civilisation afin d’endiguer le problème de
surpopulation et de famine qui rongeaient petit à petit son monde. Il a vu les ressources se
tarir, la végétation qui brillait autrefois de son plus beau vert tourner au gris cendré, les
esprits des plus défavorisés s’embrumer de rage et de haine au fil des jours et du sang versé à
cause de la faim… L’astre où il est né s’est étiolé devant ses yeux, et avant même qu’il ne
s’en rende compte, il devint le dernier titan en vie. Cette issue tragique précipita alors le
colosse aux confins de la folie au fil des siècles, un trou noir dont il ignorait s’il s’en était
sorti ou s’il demeurait encore plongé à l’intérieur, et le conforta à accomplir son but :
éradiquer sans discrimination la moitié des peuples de chaque espèce de l’univers afin de leur
épargner le même destin que Titan et leur offrir un avenir de paix et de prospérité. Thanos
était prêt à porter ce fardeau funeste sur ses épaules, peu importe le prix… La Pierre de
l’Âme à son gantelet doré en était l’exemple le plus parlant. En excluant la Pierre du Pouvoir
qu’il détenait déjà, les Pierres du Temps, de l’Espace, de l’Esprit et de la Réalité manquaient
encore à son ornement. C’est pourquoi il a chargé son Ordre Noir de les lui rapporter là où
tout a commencé : sur sa planète d’origine.

Rien ne bougea pendant plusieurs secondes… Le Titan Fou sentit alors une présence derrière
lui. Il se retourna et aperçut une silhouette assise sur les marches d’un escalier, un peu plus en
hauteur de lui ; il s’agissait de Peter, le visage dissimulé derrière son masque, son costume
vaguement amoché et recouvert de sable, et l’Œil d’Agamotto pendant autour de son cou. Le
reste des Avengers et des Gardiens de la Galaxie furent quant à eux cachés derrière des débris
gisant sur la place centrale, non loin du jeune homme.

En temps normal, le plan initial de la Team Titan était de tromper la vigilance de Thanos en
lui faisant croire que Docteur Strange fut capturé seul par Maw avant de l’attaquer par
surprise. Cette fois-ci, Spider-Man prit la place du Maître des Arts Mystiques pour ce rôle, ce
dernier usant d’un sort d’illusion pour "abîmer" le costume du superhéros afin de prétendre
qu’il a résisté au général alien avant d’atterrir sur la planète abandonnée. Convaincre ses
camarades de cette décision ne fut pas une tâche facile pour Stephen, en particulier envers
Tony et Pietro… Cela dit, il ne leur en tenait aucunement rigueur. Leur inquiétude et leur
peur pour la sécurité de l’adolescent étaient compréhensibles et légitimes aux vues de
l’ennemi auquel ils devaient faire face. Le docteur mentirait s’il prétendait ne pas ressentir de
l’appréhension sur son plan de secours aux facteurs inconnus. Cependant, Peter dissipa leurs
doutes en leur révélant de lui-même son pouvoir d’arrêter le temps par une très courte
démonstration de cette capacité, en tenant les poignées de son mentor et de son frère avec ses
mains afin qu’ils ne soient pas affecté par le sortilège. Docteur Strange apparut au départ
surpris par l’initiative soudaine du garçon araignée, mais cela lui permit d’expliquer à ses
alliés pourquoi il a choisi Spider-Man comme porteur temporaire de la Pierre du Temps et
faux appât pour Thanos. Les Avengers et les Gardiens eurent bien évidemment de
nombreuses questions sur le pouvoir temporel du jeune homme et la connaissance de Stephen
à ce sujet… Cela étant, le regard sérieux et profond du sorcier leur fit comprendre qu’il valait
mieux taire ces interrogations pour le moment. Le Titan Fou demeurait la menace
prédominante, et ils comptaient tous mettre un terme à ses ambitions une bonne fois pour
toute sur ses terres.

- … Est-ce Maw qui t’a amené ici ? S’exprima calmement le colosse après un silence qui
parut durer une éternité.

- Son vaisseau spatial, oui. Lui n’était par contre pas à l’intérieur. Se contenta de répondre
Peter, signifiant au tyran que son enfant adoptif a péri au combat.

Thanos regarda le superhéros araignée d’un œil intrigué… Selon les rapports de son ordre, le
gardien de la singularité cosmique verte était un puissant magicien aux pouvoirs mystiques
résidant sur Terre. Aurait-il compris les intentions du titan et ainsi donné la Pierre du Temps à
un autre héros pour lui échapper, ou bien ledit héros a-t-il pris le réceptacle de la gemme sans
en connaître son contenu en tentant de l’aider ? Au final, cela importait peu. Il disposait
désormais d’une nouvelle Pierre d’Infinité.

- Ce jour nous impose un lourd tribut. Dit le titan. Il aura néanmoins accompli sa mission.

Peter serra instinctivement ses poings. Cette phrase lui était familière… Trop familière.
Cependant, le jeune homme resta tranquille et stoïque. La présence de son collier dans sa
poche, l’aura protectrice de l’Œil d’Agamotto et ses compagnons autour de lui l’aidaient à
garder son calme.

Un court silence s’écoula.

- Je me doute que tu ne me laisseras pas prendre la Pierre du Temps. Comptes-tu te battre


contre moi ? Demanda alors Thanos, tout en gardant une posture solennelle.

-…

Le superhéros araignée demeura muet pendant une poignée de secondes, puis il reprit la
parole :
- Si j’étais un héros avec de grands pouvoirs magiques… Peut-être. Mais je n’ai pas les
moyens d’utiliser cette pierre, et ma force seule est dérisoire face à un géant.

Cette réponse surprit le Titan Fou. Il s’attendait d’une certaine manière à ce que le jeune
héros se batte jusqu’à son dernier souffle pour l’empêcher de s’emparer d’une des Pierres
d’Infinité, tout comme ceux qui se sont dressés sur son chemin dans sa quête des reliques
cosmiques… Seulement, il semblerait que ce dernier ait réalisé le gouffre qui sépare leur
puissance et leurs capacités respectives. Ce ne fut pas un mal en soit pour le colosse… Cela
lui épargnait ainsi de recourir à une exécution sommaire.

- Reconnaître ses faiblesses est une qualité que peu de personnes possèdent. S’exprima
Thanos avec une voix qui s’apparentait à de la compassion. Un sourire triste se dessina
ensuite sur son visage. J’aurais aimé que les miens puisse voir leurs erreurs avant que Titan
ne s’effondre sur elle-même… Peut-être que cette planète serait resté aussi belle et
merveilleuse que dans mes lointains souvenirs de cette époque oubliée.

Il marqua une pause avant de marcher en direction de Peter, le regard de nouveau inflexible.

- Ce n’est pas la responsabilité d’un enfant de porter un poids aussi lourd autour de son cou.
Je me chargerai d’assumer ce fardeau.

Spider-Man ferma brièvement les yeux… Seuls quelques mètres le séparaient de Thanos. Il
entendit le bruit des bottes du titan s’écraser sur les marches frêles de l’escalier, l’une après
l’autre, comme des battements de cœur lancinants. Une marche, puis une autre, puis une
autre… Lorsqu’il sentit que le colosse arrivait à mi-hauteur de lui, Peter ouvrit de nouveau
ses yeux, ses iris devinrent verts et le monde s’immobilisa en un claquement de doigt. Les
débris volants cessèrent leur rotation, les traînées de sables se gelèrent et Thanos demeura
statique comme une statue de marbre.

- Allez-y ! Thanos ne bouge plus ! Hurla Peter à la Team Titan une fois certain que le temps
s’était bel et bien arrêté.

Le signal fut lancé. Les Avengers et les Gardiens de la Galaxie, portant des bracelets d’anti-
magie créée par Docteur Strange qui les immunisait du sortilège, sortirent de leurs cachettes
et s’agrippèrent au Gant de l’Infini afin de le retirer de la main gauche du Titan Fou. Ils
savaient qu’ils ne disposaient que de sept minutes pour récupérer le gantelet avant que le
temps ne recommence à tourner ; si Thanos découvre la supercherie à ce moment-là, il ne se
laissera pas surprendre une seconde fois. La Team Titan tira le Gant de l’Infini de toutes leurs
forces vers eux, mais l’arme doré arrivait à peine à se détacher de quelques centimètres,
comme si elle était greffée au bras du colosse à la peau violette.

- Grrr… Argh ! Ce fichu gant ne s’enlève pas ! Scanda Quill sous le coup de la colère.
Saloperie !

- Sort de là ! Continua Drax, tout aussi remonté que son ami.

Pietro, qui tirait le Gant de l’Infini à partir de la poignée, remarqua une petite fente entre la
main et l’arme, peu ouverte mais suffisamment distincte pour ne pas coincer le gantelet sur le
bras. Une idée germa alors dans son esprit : s’il apparut difficile de couper le bras de Thanos
aux vues de la rigidité de sa peau en plus de sa corpulence imposante, il demeurait cependant
possible de retirer le Gant de l’Infini d’une autre manière qu’avec la force brute… Il prit ainsi
son poignard en main et introduisit la lame à l’intérieur de la fente, la bougeant à droite et à
gauche afin de retirer le contact entre l’or et la peau de Thanos. Docteur Strange comprit d’un
regard l’action de Quicksilver et, observant lui aussi la présence de la fente, créa un poignard
doré avec ses pouvoirs et réitéra les mêmes gestes que le coureur, tandis que le reste de
l’équipe continua à pousser le gant vers leur direction.

L’arme qui resta auparavant immobile commença alors à se mouvoir de plus en plus,
opposant de moins en moins de résistance devant la force cumulée de la Team Titan… Et
après quatre longues minutes de suspension, l’instant de délivrance arriva enfin : le Gant de
l’Infini s’enleva hors du poing du Titan Fou, dont le contrecoup envoya les Avengers et les
Gardiens en arrière. Star Lord fut celui qui serra le gantelet au plus près de lui durant la
chute ; sa respiration était saccadée, irrégulière, et il peinait à formuler des mots tant la
stupéfaction de ce qu’il venait de se passer le tétanisait. Peter, Tony, Stephen, Pietro, Drax et
Mantis regardèrent l’arme dorée entre les bras du mercenaire, tout aussi figé que lui… Avant
de reprendre progressivement leur souffle et leurs esprits en réalisant que leur plan a marché.
Ils ont réussi à prendre le Gant de l’Infini et les deux Pierres d’Infinité manquantes sans avoir
à se battre contre le colosse.

Iron Man fixa par la suite le regard du tyran immobile pendant quelques secondes ; ses yeux
ne dégageaient aucune chaleur ni faiblesse. Ce fut comme contempler le vide abyssal et noir
de l’espace… Thanos était sincèrement déterminé à tuer des trillions d’êtres au nom d’un
idéal irrationnel et faillible, quitte à tout perdre dans le processus et en occultant l’impact
émotionnel et traumatique des survivants d’un tel massacre. Une colère sourde rugit alors à
l’intérieur de Tony…

- Pietro. Reste auprès de Peter. Dit-il à son camarade Avengers. Quill, éloigne-toi de la place
avec tes compagnons et le Gant de l’Infini. Continua-t-il ensuite envers les Gardiens de la
Galaxie.

Les superhéros furent au départ confus par ces paroles, mais la vue de ses poings fermement
serrés et sa voix terriblement calme et grave leur fit vite comprendre qu’il bouillonnait de
rage, et les deux Avengers savaient très bien qu’il ne fallait pas prendre ces signes à la légère,
déduction que les mercenaires ne tardèrent pas à arriver à leur tour. Quicksilver rejoignit alors
son ami en un battement de cil avant de le prendre instinctivement dans ses bras, dissimulant
par la même occasion la vue du jeune homme, tandis que les voyageurs galactiques partirent
se cacher derrière un mur de débris. Dès lors que tous les yeux furent ailleurs, il jeta un
rapide regard auprès de Stephen… Le Maître des Arts Mystiques n’eut nulle besoin de mots
pour deviner les pensées de Tony. C’est vrai… Il leur restait trois minutes. Ces dernières
minutes mettront un point final à la Guerre de l’Infini.

Le milliardaire dégaina une lame en photons sortant de son répulseur droit, vola à la hauteur
de la tête du géant et lui trancha la gorge d’un geste vif, sans que son ennemi n’oppose de
résistance. Une traînée de sang s’échappa de la plaie béante, se gelant en une seconde dans
les airs à cause de l’arrêt du temps encore actif. Bien que la tête reste attachée au reste du
corps du colosse, il était certain qu’il ne se remettrait pas d’une telle blessure. Cela étant, afin
de garantir que Thanos ne se relève plus, Docteur Strange invoqua une épée dorée dans ses
mains et lui transperça le torse au niveau du cœur. Il laissa la lame planté pendant quelques
instants avant de l’enlever ; une tâche rouge vermillon apparut ensuite sur la nouvelle plaie,
maculant les vêtements bleus du Titan Fou d’une teinte sombre et humide.

Le monde gris reprit lentement ses couleurs. Les ruines flottantes auparavant parfaitement
statiques recommencèrent à se mouvoir, tout comme les gouttes de sang piégées entre ciel et
terre. Le sortilège s’apprêtait à se lever, donc Iron Man et le sorcier s’éloignèrent par
prudence du titan en reculant de quelques mètres. Une fois le cours du temps revenu à la
normale, l’expression stoïque sur le visage de Thanos changea de manière presque
imperceptible… Ses yeux s’agrandirent très légèrement, sa bouche sembla se mouvoir, mais
aucun son n’en sortit. Il resta debout durant une trentaine de secondes, droit comme un pilier,
avant que ses jambes finissent par le lâcher. Il s’effondra de toute sa longueur et de tout son
poids sur l’escalier, dans un vacarme bruyant et son sang tombant avec lui dans sa chute. Un
moment de flottement s’écoula dans un silence profond… Après dix secondes sans bouger,
Tony et Stephen s’approchèrent du colosse d’un air méfiant et vérifièrent son état afin d’avoir
la certitude de son trépas… Il était inerte. Ils ne sentirent aucun pouls émanant de lui. Avec
ces éléments, les deux superhéros se permirent finalement de soupirer de soulagement.

Thanos est mort.

En entendant le bruit derrière lui, Pietro regarda par-dessus son épaule afin de connaître son
origine et il entraperçut le corps figé du Titan Fou en contrebas de l’escalier. Un bref coup
d’œil lui suffit pour savoir que leur ennemi n’allait plus faire de mal à qui que ce soit.

- … Pietro. Murmura Peter, toujours contre lui.

- Hm ?

- Est-ce que Thanos est mort ? Demanda l’adolescent après une longue inspiration.

- Oui, il est mort. Répondit le coureur avec assurance et certitude.

Les yeux de Peter s’écarquillèrent brièvement suite à cette réponse, et tous ses muscles se
gelèrent… Son audition captura quelques bribes de conversations entre son mentor et le
docteur, et bien qu’il ne put les voir depuis sa position, leurs voix plus tranquilles et apaisées
laissaient clairement entendre que le colosse à la peau violette a bel et bien passé l’arme à
gauche. De plus, Tony a reçu un appel de Steve et ce dernier lui a confirmé qu’ils ont réussi à
arrêter l’armée de Thanos et les derniers membres de l’Ordre Noir grâce à l’aide de l’armée
du Wakanda, des deux Gardiens de la Galaxie présents et de certains guerriers asgardiens
venus prêter main forte aux Avengers restés sur Terre. Il y avait certes des blessés à déplorer,
mais aucun Défenseur de la Terre n’est tombé au combat.

Une fois l’adrénaline complètement retombée, Peter retrouva le contrôle de son corps et
entoura ses bras autour de son frère, son visage recouvert peu à peu de larmes… Cependant,
ce furent cette fois-ci des larmes de joie.

Il est vivant. Tony est vivant, tout comme Pietro, Stephen, les protecteurs du cosmos ainsi
que les Avengers. Thanos n’est plus, tout comme ses généraux. Personne n’aura à mourir
d’un horrible génocide ou de ses conséquences.
La Guerre de l’Infini est enfin terminée.
Epilogue

Vendredi 8 février 2019.

Un vent frais parcourut les rues du Queens. Bien que la température fût basse, le soleil brillait
à travers les nuages blancs qui recouvraient le ciel, et la météo n’annonça aucune pluie durant
la journée.

Peter contempla son quartier depuis le toit de son immeuble, ses bras reposant sur le muret de
béton qui le séparait du vide.

Un an s’est écoulé depuis la fin de la Guerre de l’Infini ; après que Thanos et son armée
soient tombés, Thor vint chercher ses compagnons Avengers isolés sur Titan avec la Pierre de
l’Espace. Le portail dimensionnel s’ouvrit vers l’ancienne place centrale de la cité autrefois
prospère qui régnait en maître sur la planète abandonnée, et la première chose qu’aperçut le
dieu du tonnerre à son arrivée fut ses amis et les Gardiens de la Galaxie, tous réunis en bas de
l’escalier délabré et sains et saufs. Il soupira de soulagement en voyant ses frères d’armes en
vie, un sourire illuminant son visage quelque peu endommagé par le combat qu’il venait de
mener au Wakanda, au point qu’il prit Peter et Pietro dans ses bras sous le coup de l’émotion.
Les deux jeunes héros furent au départ surpris par cette apparition soudaine, mais ils finirent
eux-mêmes par sourire lorsqu’ils reconnurent l’Asgardien, tout comme les autres protecteurs
du cosmos après quelques minutes de suspension. Ce ne fut qu’après qu’il eut de nouveau la
tête froide que Thor distingua le corps inerte de Thanos sur l’escalier un peu plus loin du
groupe, les marches colorées de rouge vermillon. Bien que son visage arbore brièvement une
expression de choc, le dieu du tonnerre parvint rapidement à retrouver son calme… À la vue
des deux endroits où coulaient le sang, il n’eut pas vraiment besoin de se rapprocher du titan
pour comprendre que deux de ses camarades lui ont assénés deux coups fatals afin de
s’assurer qu’il ne se relève pas. Thor se souvient que Thanos l’avait nargué de ne pas l’avoir
achevé d’un coup de hache dans la tête quand il en avait l’occasion dans la timeline
originelle… Cette fois-ci, les Avengers ont mis fin au tyran sans l’ombre d’une hésitation.

Etant donné que les mercenaires de l’espace ont été blessés suite à leurs rencontres avec les
soldats de Thanos et leur chef, les Défenseurs de la Terre proposèrent aux Gardiens de la
Galaxie de passer quelques temps sur la planète bleue afin de guérir de leurs plaies, une offre
que Quill accepta avec plaisir. Star Lord et ses compagnons retrouvèrent ainsi le reste de leur
équipe à la Tour des Avengers, dont Nebula qui est venu prêter main forte à Rocket Raccoon
et Groot, légèrement amochés mais en un seul morceau. Seule Gamora demeurait absente…
Quill apprit par l’androïde à la peau bleue que Thanos l’a torturé pour forcer sa sœur à révéler
l’emplacement de la Pierre de l’Âme à leur père, qui se trouvait sur la planète Vormir, avant
de la laisser derrière eux. Nebula réussit à se libérer de ses chaînes après de longues minutes
de débattement et partit au départ à la recherche du colosse, mais des ondes radios transmises
par un communicateur de Rocket Raccoon parvinrent à son vaisseau, et découvrit que les
Gardiens se battaient sur Terre pour vaincre l’armée du tyran. Le vaisseau spatial de Thanos
se trouvait plus proche de la Voie Lactée que de la galaxie où se situait Vormir, et le véhicule
volant qu’a pris Nebula disposait d’un système de vitesse lumière limité à un nombre défini
d’années lumières, qui fut trop faible pour s’y rendre… Même si elle aurait été capable
d’atteindre sa destination, le titan serait sans doute déjà parti avec la Pierre d’Infinité qu’il
convoite au prix de la vie de Gamora, sans qu’elle ne puisse faire quoi que ce soit pour la
sauver et sans moyen de repartir rapidement de la planète reculée. Nebula bouillonnait de
rage et de tristesse en sachant cela, et maudissait son père adoptif de l’avoir séparé de sa
sœur… Cependant, elle était toujours capable de stopper l’avancée de son armée et de
l’empêcher de récupérer plus de reliques cosmiques. Elle prit alors une grande inspiration
avant de s’envoler vers la Terre et épauler ses compagnons et les Avengers.

Ce serait mentir de dire que Star Lord n’eut aucune réaction à l’annonce de la mort de la
femme qu’il aime. Son visage déformé par le chagrin et la colère reflétait parfaitement ce
qu’il ressentait. Cependant, contrairement à ce que les Gardiens auraient imaginé, Quill
n’hurla pas de rage ou scanda des plans insensés pour essayer de la faire revenir… Au
contraire, il resta silencieux. Etait-il furieux d’avoir perdu Gamora ? Oui. Cela étant dit, la
jeune femme lui avait déjà fait part de la possibilité qu’elle perde la vie durant cette guerre
peu de temps après l’attaque de Nova, et que si son père venait à l’enlever pour accomplir
son but, elle préférait mourir de la main de ses amis que celle de Thanos… Acte qu’il n’a
malheureusement pas pu réaliser à cause de l’embuscade que le tyran leur a tendu sur
Knowhere. De plus, aux vues de sa gestuelle et de son absence de choc pur, Docteur Strange
et Peter devinèrent que Quill semblait posséder des réminiscences de l’instant où il découvrit
le sacrifice de Gamora pour l’obtention de la Pierre de l’Âme lors des précédentes boucles…
La différence étant qu’il fut au courant de cette mort après la fin de la guerre, et non au
moment où Thanos ne fut pas encore vaincu par la Team Titan.

L’équipe de superhéros fit le nécessaire avec les Nations Unies pour répertorier ce qu’il
s’était passé conformément aux Accords, puis ils décidèrent d’aider à la reconstruction des
quartiers détruits par les généraux de Thanos, que ce soit financièrement ou manuellement
aux côtés des ouvriers du bâtiment. Le garçon-araignée prêta lui aussi main forte dans les
chantiers les plus proches de son territoire lorsqu’il le pouvait. Docteur Strange, quant à lui,
s’était chargé des Pierres d’infinités ; en tant qu’élu capable de les manipuler, il connaissait la
puissance dévastatrice que renfermait une seule de ces reliques cosmiques. Ce ne sont pas les
gemmes qui causent des tragédies, mais des êtres aux sombres desseins qui ont la faculté de
les utiliser qui les réalisent. Certes, il peut arriver que les Pierres d’Infinités puissent réagir
par elles-mêmes, comme la Pierre du Temps qui a conféré des pouvoirs temporels à Peter…
Cependant, ce sont bien les porteurs des reliques cosmiques qui décident de leur
manipulation, en bien comme en mal. L’existence de ces gemmes a créées beaucoup trop de
drames durant leur millénaire d’errance à travers l’univers… Le sorcier était résolu à couper
cette chaîne de malheurs. Avant cela, il tint sa promesse de libérer Spider-Man des traces de
la Pierre du Temps qui l’imprégnait et parvint à ramener Gamora à la vie avec l’aide de Thor.
Une fois ces tâches accomplies, le Maître des Arts Mystiques et le dieu du tonnerre
détruisirent ensemble les Pierres d’Infinités, donnant un point final à la Guerre de l’Infini et à
la boucle temporelle.

Dès lors, la paix revint sur Terre. Plus aucune menace extraterrestre ne descendit du ciel pour
plonger la planète bleue dans le chaos. Aucun dieu maléfique, aucuns généraux armés, aucun
titan… Rien. Bien-sûr, des criminels continuaient toujours de semer le trouble dans la ville,
mais ils faisaient pâle figure à côté du protecteur de New York, et si certains d’entre eux
mettaient la main sur des armes spatiales, les Avengers se chargeaient de leur arrestation.
La guerre était enfin terminée, et Mordo n’est plus. Après plusieurs boucles à répéter les deux
mêmes années, Peter a réussi à briser le sablier dans lequel il était piégé. Il possédait de
nouveau sa liberté et le contrôle de son destin. Plus rien ne l’empêchait désormais d’avancer
vers le futur et de devenir adulte. Bien-sûr, le garçon-araignée savait que la levée de la boucle
temporelle signifiait la disparition de « l’immortalité » temporaire qu’elle lui octroyait… S’il
venait maintenant à mourir au combat ou d’une autre manière, que ce soit par un accident ou
une blessure grave, il n’aura pas de seconde chance. Sa mort sera permanente. Cependant,
cette connaissance de sa mortalité retrouvée renforça la volonté de Peter de préserver sa vie.
Il comptait pleinement vivre chaque jour qui passe jusqu’à son dernier souffle.

Le vent continua de souffler au Queens, bougeant sporadiquement quelques mèches des


cheveux de l’adolescent et le manteau qui le couvrait… Soudain, la porte d’accès au toit
s’ouvrit. Le jeune homme tourna la tête vers la source du bruit et aperçut Tony se dessiner
dans l’encadrement rectangulaire, vêtu d’un de ses costumes et de ses fidèles lunettes de
soleil.

- Tony ! S’exclama Peter d’un air surpris.

- Hey, Peter. Répondit le milliardaire en souriant.

- Je ne vous ai pas vu arriver ici.

- J’ai dû garer ma voiture un peu plus loin. J’avais eu une réunion un peu plus tôt pas loin du
Queens, donc je suis directement venu ici.

- Je suppose que vous avez été ravi de partir le plus loin possible du lieu de la réunion à la
minute où elle a pris fin. Remarqua Peter avec un petit sourire, sachant que son mentor
détestait ces formalités.

- Oh oui. Tony poussa un soupir d’exaspération.

- Je reste admiratif du fait que vous ne laissez jamais rien paraître à ce moment-là.

- J’ai des années d’expérience dans ce domaine.

Il y eut un petit silence, puis Tony et Peter rigolèrent doucement.

- Au fait, qu’est-ce que tu faisais ici, gamin ? Demanda alors le milliardaire.

- Rien de particulier. J’avais juste envie de prendre l’air.

- Quelque chose te tracasse ?

Peter resta muet quelques minutes, le regard fuyant, avant de soupirer.

- J’aurais bientôt mes examens de milieu de trimestre. Je sais que ce n’est pas encore l’année
où je vais avoir mon diplôme… Mais je ne sais pas quelle école choisir après la fin du lycée.
Je ne sais pas vraiment quel métier je voudrais faire après mes études.
Oh… C’est vrai qu’il avait mentionné des examens à venir lors de nos dernières séances au
laboratoire. Pensa Tony.

Le superhéros comprenait les interrogations de son protégé. Lui-même ignorait quel rêve
poursuivre lorsqu’il était enfant. Il avait confié ses doutes à sa mère lorsqu’ils étaient seuls,
mais il n’a jamais osé les révéler à son père de peur de s’attirer sa colère. L’environnement
dans lequel Tony a grandi ne lui laissait qu’un nombre limité d’options pour son avenir… Il
était le fils d’un homme important ayant créé l’une des entreprises les plus puissantes et
influentes du monde ; il savait ainsi depuis longtemps qu’il allait reprendre l’héritage
d’Howard Stark et devenir le prochain dirigeant de Stark Industries, peu importe s’il
ressentait le désir de porter le flambeau ou non. Le petit garçon qu’il fut ravala alors ses
incertitudes, porta un masque de confiance et de détermination et suivit la voie de
l’ingénierie avec le plus grand sérieux - une obligation qui se transforma en passion sincère et
dont il put en vivre une fois adulte. Cela dit, Tony était conscient qu’il fut capable de devenir
l’homme qu’il est aujourd’hui avec des facteurs qui ont joué à son avantage, avec des
privilèges que peu de personnes possèdent. Ce n’est pas n’importe qui qui peut se permettre
d’intégrer des écoles prestigieuses comme Midtown High ou la MIT, ou qui savent très tôt ce
qu’ils veulent faire après les études. Certains n’ont même pas le choix de poursuivre une
passion et décident de prendre un métier qui leur garantit une vie stable, au mépris parfois de
leur propre épanouissement. Tony a eu de la chance de ce côté, mais une partie de lui gardait
une forme de colère contre sa famille pour ne pas lui avoir laissé le choix de décider de son
futur ou de l’avoir guidé pour ne pas hériter des torts d’Howard… Une erreur qu’il refuse de
répéter avec Peter.

Le milliardaire garda le silence pendant une poignée de secondes, avant de s’approcher de


Peter et de poser ses mains sur ses épaules.

- Ne t’inquiète pas, Peter. Ce n’est pas grave de ne pas savoir tout de suite ce que tu veux
faire après tes études. Comme tu l’as dit, ce n’est pas cette année que tu quitteras le lycée, et
personne ne s’attend à ce que tu commences à gagner ta vie une fois que tu auras obtenu ton
diplôme. Tu as le temps de découvrir ce qui te passionne, ce qui te donne envie d’avancer
dans la vie. Ta vie t’appartient, gamin. Quel que soit le rêve que tu voudras poursuivre, je
respecterai ta décision et je ferai tout pour t’aider à le réaliser. C’est le moins que je puisse
faire pour un garçon exceptionnel comme toi. Un sourire se dessina sur les lèvres de Tony.

Peter écarquilla brièvement les yeux suite à ces mots, puis il sourit à son tour. Même s’il se
sentait plus âgé mentalement du fait du temps qu’il a passé dans la boucle temporelle, il
restait un adolescent de 16 ans. Le jeune homme disposait de tout le temps qu’il souhaite
pour penser à son futur. Il arrivera un moment où il devra répondre à cette interrogation au-
delà d’être le superhéros Spider-Man… Et il y répondra en temps voulu. Peter ignorait encore
quel était son rêve, mais il le trouvera, et savoir que ses proches serait là pour lui à ce
moment-là le rassurait.

- Merci, Tony. Remercia Peter avant d’entourer ses bras autour de Tony.

- De rien, Peter. Répondit le milliardaire en câlinant son protégé en retour.

Les deux hommes ne bougèrent pas durant plusieurs minutes, profitant de la tranquillité des
rues du Queens. Après un moment de flottement, le milliardaire s’éloigna de quelques
centimètres du jeune homme, ressentant de légers frissons aux bras.

- Brrr… Il commence à faire frais. S’exprima l’ingénieur en frottant ses avant-bras pour
essayer de se réchauffer.

- C’est vrai. Je ferais mieux de rentrer à l’appartement.

- Ta tante est à la maison ?

- Non, elle travaille. L’hôpital avait besoin d’elle.

- Hm… Dans ce cas, tu veux passer du temps à la Tour ?

- Je peux ?

- Bien-sûr, Pete. Tony afficha un grand sourire. Tu es toujours le bienvenu. Je préviendrai ta


tante de ton départ et je te ramènerai ici quand tu le voudras. Tu pourras tester le nouveau
modèle de lance-toile que j’ai imaginé en plus de celui que je t’ai réparé lors de ta dernière
patrouille.

- C’est vrai ? C’est super ! Ce sera avec plaisir.

- Très bien. Allons-y !

Tony et Peter ouvrirent alors la porte d’accès et descendirent les escaliers jusqu’au dernier
étage de l’immeuble avant de rejoindre l’ascenseur et de se diriger vers l’entrée. Ils
marchèrent une dizaine de mètres jusqu’à la voiture du milliardaire, puis ils prirent la route
vers Manhattan, en direction de la Tour des Avengers. En chemin, Peter regarda l’extérieur à
travers la fenêtre… Les nuages blancs s’étaient dissipés avec le vent, laissant apparaître la
couleur azure du ciel.

Le visage du jeune homme s’illumina d’un sourire. Auparavant, Peter refusait de lever les
yeux au-dessus de sa tête parce qu’il ne voyait que des ciels ombragés ou tempétueux, même
lors des journées claires, et pensait qu’il n’était plus capable d’apercevoir le ciel bleu à cause
du désespoir qui le rongeait lors de ses dernières boucles… Ce ne fut plus le cas désormais.

Il a réussi à surmonter ses peurs et ses doutes. Il s’est borné à garder une flamme d’espoir en
lui malgré les difficultés, et sa détermination d’arriver à une bonne fin ont payés. Il n’avait
plus rien à craindre de l’avenir, car il sait qu’il n’est pas seul.

Les miracles existent quand les araignées pleurent.


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