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CHAPITRE

V
Espaces vectoriels et applications linéaires

Plan du chapitre
1 • Introduction 49
2 • Espaces vectoriels 49
3 • Sous-espace vectoriel engendré par une famille finie 56

1
Introduction
Dans ce chapitre, on désigne par K l’ensemble des nombres réels R ou l’ensemble des nombres com-
plexes C. Dans la plupart des exemples, ce sera le corps des réels R.

2
Espaces vectoriels

1 Définitions

Définition V.1.
Soit E un ensemble non vide, une loi de composition interne, notée additivement ” + ” sur E, est une
application de E × E dans E, définie par :

E×E → E
(u, v) 7→ u + v.

– On dit que a + b est le composé de a et b par la loi +.


– La notation ( E, +) représente l’ensemble E muni de la loi de composition interne +.

Exemple V.2.
– L’addition et la multiplication usuelles dans les ensembles N, Z, Q, R et C sont des lois de compo-
sition interne.
– La soustraction n’est pas une loi de composition interne sur N, car par exemple «3-5» n’est pas un
entier naturel.
– La division dans N, Z, Q, R et C n’est pas une loi de composition interne. Cependant la division
sur Q∗ , R∗ et C∗ est une loi de composition interne.
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– Soit E un ensemble, on note par P ( E) l’ensemble des parties de E, alors la réunion (resp. l’intersec-
tion) sur P ( E) définie par :

∪( resp. ∩) : P ( E) × P ( E) −→ P ( E)
( A, B) 7−→ A ∪ B( resp. A ∩ B)

sont des lois de composition interne.


– Soit E un ensemble, on note par F ( E, E) (ou encore F ( E) ), l’ensemble des applications de E dans
lui-même :
F ( E, E) = { f : E −→ E}
alors la composition des applications :

◦ : F ( E) × F ( E) −→ F ( E)
( f , g) 7−→ f ◦ g

est une loi de composition interne.

Définition V.3.
Soient E et K deux ensembles non vides, une loi de composition externe, notée multiplicativement •
sur E, est une application de K × E dans E, définie par :

K×E → E
(λ, u) 7→ λ · u.

Exemple V.4.
– Soit E = Mn,p (R), (n, p) ∈ N∗ × N∗ , l’ensemble des matrices à n lignes et p colonnes à coefficients
réels, le produit d’une matrice par un scalaire α défini par :

•R × Mn,p (R) −→ Mn,p (R)


(α, A) 7−→ α · A

est une loi de composition externe.


– Soit E = F (R, R). Alors, le produit d’une fonction par un réel α défini par :

•R × F (R, R) −→ F (R, R)
(α, f ) 7−→ α · f

est une loi de composition externe sur F (R, R).

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Définition V.5.
Un K-espace vectoriel est un ensemble non vide E muni d’une loi de composition interne notée ” + ”,
et d"une loi de composition externe notée ” − ”, satisfaisant les conditions suivantes :
1. La loi de composition interne ” + ” vérifie les propriétés ci-dessous :
– u + v = v + u (pour tous u, v ∈ E)
– u + (v + w) = (u + v) + w (pour tous u, v, w ∈ E)
– Il existe un unique élément 0E ∈ E dit élément neutre, tel que u + 0E = u (pour tout
u ∈ E)
– Tout élément u ∈ E admet un unique élémnet u′ , dit symétrique (ou opposé) et noté −u tel
que u + u′ = 0E .
2. La loi de composition externe ” • ” vérifie les propriétés ci-dessous :
– 1 · u = u (pour tout u ∈ E)
– λ · (µ · u) = (λµ) · u (pour tous λ, µ ∈ K, u ∈ E)
– λ · (u + v) = λ · u + λ · v (pour tous λ ∈ K, u, v ∈ E)
– (λ + µ) · u = λ · u + µ · u (pour tous λ, µ ∈ K, u ∈ E)
– On dit que E est un K-espace vectoriel (K-e.v en abrégé) et on le note par ( E, +, •).
– Les éléments de ( E, +, •) sont appelés des vecteurs.

Exemple V.6. Le R-espace vectoriel R2


Posons K = R et E = R2 . Un élément u ∈ E est donc un couple ( x, y) avec x élément de R et y élément
de R. Ceci s’écrit
R2 = ( x, y) | x ∈ R, y ∈ R .


– Définition de la loi interne. Si ( x, y) et ( x ′ , y′ ) sont deux éléments de R2 , alors :

( x, y) + ( x ′ , y′ ) = ( x + x ′ , y + y′ ).

– Définition de la loi externe. Si λ est un réel et ( x, y) est un élément de R2 , alors :

λ · ( x, y) = (λx, λy).

L’élément neutre de la loi interne est le vecteur nul (0, 0). Le symétrique de ( x, y) est (− x, −y), que
l’on note aussi −( x, y).

λ·u

u+v

0 v

−u

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L’exemple suivant généralise le précédent. C’est aussi le bon moment pour lire ou relire le chapitre
« L’espace vectoriel Rn ».

Exemple V.7. Le R-espace vectoriel Rn


Soit n un entier supérieur ou égal à 1. Posons K = R et E = Rn . Un élément u ∈ E est donc un n-uplet
( x1 , x2 , . . . , xn ) avec x1 , x2 , . . . , xn des éléments de R.
– Définition de la loi interne. Si ( x1 , . . . , xn ) et ( x1′ , . . . , xn′ ) sont deux éléments de Rn , alors :

( x1 , . . . , xn ) + ( x1′ , . . . , xn′ ) = ( x1 + x1′ , . . . , xn + xn′ ).

– Définition de la loi externe. Si λ est un réel et ( x1 , . . . , xn ) est un élément de Rn , alors :

λ · ( x1 , . . . , xn ) = (λx1 , . . . , λxn ).

L’élément neutre de la loi interne est le vecteur nul (0, 0, . . . , 0). Le symétrique de ( x1 , . . . , xn ) est
(− x1 , . . . , − xn ), que l’on note −( x1 , . . . , xn ).
De manière analogue, on peut définir le C-espace vectoriel Cn , et plus généralement le K-espace
vectoriel Kn .

2 Sous-espaces vectoriels

Définition V.8.
Soit E un K-espace vectoriel. Une partie F de E est appelée un sous-espace vectoriel si :
1. 0E ∈ F,
2. u + v ∈ F pour tous u, v ∈ F,
3. α · u ∈ F pour tout α ∈ K et tout u ∈ F.

R Remarque V.9.
On peut réduire les conditions 2) et 3) de la définition ci-dessus en une seule :

α · u + v ∈ F.

Exemple V.10.
1. L’ensemble
F = ( x, y) ∈ R2 | x + y = 0


est un sous-espace vectoriel de R2 . En effet :


a) F ⊂ R2 .
b) (0, 0) ∈ F.
c) Si u = ( x, y) et v = ( x ′ , y′ ) appartiennent à F, alors x + y = 0 et x ′ + y′ = 0, donc

u + v = ( x + x ′ , y + y′ ) = x + x ′ + y + y′ = ( x + y) + ( x ′ + y′ ) = 0,

et ainsi u + v = ( x + x ′ , y + y′ ) ∈ F.
d) Si u = ( x, y) ∈ F et α ∈ R, alors x + y = 0 donc αx + αy = α( x + y) = 0, d’où αu ∈ F.
2. L’ensemble   
a b
F = {A ∈ M2 (R) | tr( A) = 0} = a+d = 0
c d
est un sous-espace vectoriel de l’ensemble E = M2 (R). En effet :
a) F ⊂ M2 (R).

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0 0
b) 0E = ∈ F car 0 + 0 = 0.
0 0
   
a b e f
c) Si M = et N = appartiennent à F (c’est-à-dire a + d = 0 et e + h = 0 ),
c d g h
 
a+e b+ f
alors M + N = appartient à F car( a + e) + (d + h) = ( a + d) + (e + h) =
c+g d+h
0+0 = 0.   
a b αa αb
d) Si M = appartient à F (c’est-à-dire a + d = 0 ) et si α ∈ R alors α · M =
c d αc αd
appartient à F car αa + αd = α ( a + d ) = 0.
L’ensemble F = ( x, y) ∈ R2 | x + y = 2 n’est pas un sous-espace vectoriel de R2 . En effet :

e)
Le vecteur nul (0, 0) ∈
/ F.

R Remarque V.11.
1. Tout sous-espace vectoriel est lui même un espace vectoriel muni de lois induites par le "grand
"espace.
2. Le complémentaire d’un sous-espace vectoriel n’est pas un sous-espace vectoriel (car il ne contient
pas 0E ).

Méthodologie.
Pour répondre à une question du type « L’ensemble F est-il un espace vectoriel ? », une façon efficace de
procéder est de trouver un espace vectoriel E qui contient F, puis prouver que F est un sous-espace vectoriel
de E. Il y a seulement trois propriétés à vérifier au lieu de huit !

Définition V.12.
Soient E un K-espace vectoriel, E1 et E2 deux sous-espaces vectoriels de E, alors :
1. Le produit cartésien de E1 et E2 est un sous-espace vectoriel de E × E, donné par :

E1 × E2 = {(v1 , v2 ) | v1 ∈ E1 et v2 ∈ E2 } .

2. L’intersection de E1 et E2 est un sous-espace vectoriel de E, donnée par :

E1 ∩ E2 = {v ∈ E | v ∈ E1 et v ∈ E2 } .

3. La somme de E1 et E2 est un sous-espace vectoriel de E, donnée par :

E1 + E2 = {v1 + v2 | v1 ∈ E1 et v2 ∈ E2 } .

4.

Théorème V.13.
Soient F, G deux sous-espaces vectoriels d’un K-espace vectoriel E. L’intersection F ∩ G est un sous-
espace vectoriel de E.

Démonstration. Soient F et G deux sous espaces vectoriels d’un espace vectoriel E, on a :

1. 0E ∈ F et 0E ∈ G donc 0E ∈ F ∩ G ⇒ F ∩ G ̸= ∅.

2. Espaces vectoriels 53
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2. Soit ( x, y) ∈ ( F ∩ G )2 et (λ, β) ∈ K2
donc x ∈ F , x ∈ G , y ∈ F et y ∈ G or F et G sont deux sous espaces vectoriels par suite α.x + β.y ∈ F
et α.x + β.y ∈ G ⇒ α.x + β.y ∈ F ∩ G
donc F ∩ G est un sous-espace vectoriel.

Exemple V.14.
Soit D le sous-ensemble de R3 défini par :

D = ( x, y, z) ∈ R3 | x + 3y + z = 0 et x − y + 2z = 0 .


Est-ce que D est sous-espace vectoriel de R3 ? L’ensemble D est l’intersection de F et G, les sous-ensembles
de R3 définis par :
F = ( x, y, z) ∈ R3 | x + 3y + z = 0


G = ( x, y, z) ∈ R3 | x − y + 2z = 0

G
D

Ce sont deux plans passant par l’origine, donc des sous-espaces vectoriels de R3 . Ainsi D = F ∩ G est un
sous-espace vectoriel de R3 , c’est une droite vectorielle.

R Remarque V.15.
La réunion de deux sous-espaces vectoriels de E n’est pas en général un sous-espace vectoriel de E.

Exemple V.16.
Soient F = ( x, y) ∈ R2 | x = 0 et G = ( x, y) ∈ R2 | y = 0 deux R-sous espaces vectoriels de
 

R2 . Alors F ∪ G n’est pas un sous-espace vectoriel de R2 , car si u = (0, 1) ∈ F et v = (1, 0) ∈ G mais


u + v = (1, 1) n’appartient pas à F ∪ G, donc F ∪ G n’est pas un sous espace vectoriel de R2 .

54 C HAPITRE V • E SPACES VECTORIELS ET APPLICATIONS LINÉAIRES


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(1, 1)

(0, 1)
G
0 (1, 0)

Définition V.17.
Soit E un K-espace vectoriel, et soient F et G deux sous-espaces vectoriels de E. On définit la somme
de F et G par 
F + G = u + v | u ∈ F, v ∈ G .

Proposition V.18.
Soient F et G deux sous-espaces vectoriels du K-espace vectoriel E. Alors, F + G est un sous-espace
vectoriel de E.

Démonstration.

1. 0E ∈ F, 0E ∈ G, donc 0E = 0E + 0E ∈ F + G.
2. Soient w et w′ des éléments de F + G. Comme w est dans F + G, il existe u dans F et v dans G tels
que w = u + v. Comme w′ est dans F + G, il existe u′ dans F et v′ dans G tels que w′ = u′ + v′ . Alors
w + w′ = (u + v) + (u′ + v′ ) = (u + u′ ) + (v + v′ ) ∈ F + G, car u + u′ ∈ F et v + v′ ∈ G.
3. Soit w un élément de F + G et λ ∈ K. Il existe u dans F et v dans G tels que w = u + v. Alors
λw = λ(u + v) = (λu) + (λv) ∈ F + G, car λu ∈ F et λv ∈ G.

3 Sous-espaces vectoriels supplémentaires

Définition V.19.
Soient F et G deux sous-espaces vectoriels de E.
1. La somme F + G est dite directe, et on la note F ⊕ G, si F ∩ G = {0E }.
2. F et G sont dits supplémentaires dans E, si E = F ⊕ G. C’est-à-dire

E = F ⊕ G ⇐⇒ F ∩ G = {0E } et F + G = E.

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3
Sous-espace vectoriel engendré par une famille finie

Définition V.20.
Soient E un K-espace vectoriel et F = {u1 , . . . , un } , n ≥ 1, une famille de n vecteurs de E. On dit
qu’un vecteur u ∈ E est combinaison linéaire d’éléments de F s’il existe des scalaires α1 , . . . , αn de K
tel que :

u = α1 u1 + α2 u2 + . . . + α n u n .
Les scalaires α1 , . . . , αn sont appelés les coefficients de la combinaison linéaire.

Exemple V.21.
Considérons les trois vecteurs v = (−1, 0, 4), u1 = (−1, −2, −3) et u2 = (0, 2, −1). Montrer que le vecteur
v est combinaison linéaire des vecteurs u1 et u2 . En effet,
On cherche alors deux réels α1 et α1 tels que

v = α1 u1 + α2 u2 ,

ce qui donne 
 −1 = − α1 ,
0 = −2α1 + 2α2 , ⇐⇒ α1 = α2 = 1.
−4 = −3α1 − α2 ,

Donc v est combinaison linéaire des vecteurs u1 et u2 car v = u1 + u2 .

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