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Ancien ministre d͛une IVème République discréditée, François Mitterrand connut comme beaucoup,
des débuts difficiles dans le milieu politique qu͛est la nouvelle République.

François Mitterrand est né le 16 Octobre 1916 à Jarnac dans une famille de petite bourgeoisie
provinciale. Il évolue dans un milieu bien pensant de républicains modérés et hérite de sa mère,
catholique pratiquante, un goût certain pour la littérature. Il fait ses études au collège Saint-Paul
d͛Angoulême avant de devenir étudiant en droit à l͛Ecole Libre des Sciences Politiques de Paris.

La guerre tient une place capitale dans la vie de Mitterrand d͛abord par l͛expérience de la captivité
avec 18 mois de stalag dont il s͛évade en 1941, ensuite par une activité à Vichy où il évolue en tant
que fonctionnaire dans le service des prisonniers de guerre puis par un basculement dans la
résistance en 1943 où il est rangé parmi les vichysto-résistants.

De 1947 à 1958, Mitterrand accède à 11 gouvernements successifs avec des responsabilités


croissantes qui l͛amèneront à rencontrer de Gaulle et à s͛opposer à sa politique. Membre de l͛UDSR à
sa fondation, Mitterrand s͛affirme vite comme un républicain de gauche de Ia Vème République. Son
expérience sous la IVème politique font de lui un expert de la « cuisine politicienne » et un fin
connaisseur de la carte électorale.

La disparition de la IVème République le 13 mai 1958 écarte Mitterrand du pouvoir car il est au
nombre des 224 députés qui repoussent l͛investiture de de Gaulle. Mitterrand est battu aux
législatives de la Nievre et entame la partie la plus sombre de sa vie politique.

Mitterrand connait un parcours politique trouble : à l͛origine de droite, il glisse lentement vers la
gauche, position qu͛il conservera jusqu͛à sa mort.

Comment, avec un parcours politique aussi atypique que le sien, Mitterrand a-t-il accéder à la
présidence de la République ?

Nous verrons donc dans un premier tps, l͛évolution politique de Mitterrand jusqu͛en 1981 pour
examiner ensuite son action et sa représentation politique en tant que président.
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Cette période est la plus sombre de la carrière politique de François Mitterrand. Absent de l͛Assemblée
jusqu͛en 1962, il est politiquement isolé : l͛UDSR (Union Démocratique et socialiste de la Résistance) est
déliquescente et le PSA ( Parti socialiste autonome) refuse en 1959 son adhésion.
C͛est dans ce contexte que se déroule le vrai faux attentat de l͛Observatoire. Cet épisode, qui a fait débat,
est encore flou aujourd͛hui . En effet, une version dit que Mitterrand aurait organisé le mitraillage de sa
voiture pour revenir au cœur des affaires politiques. Ce vrai faux attentat l͛aurait davantage discrédité
plutôt que de le ramener dans le jeu politique.
Cette « traversée du désert » politique est cependant féconde quant à la stratégie future de Mitterrand.
En 1964, il écrit 4   
 
 où il dénonce le gaullisme dans lequel il voit « une variété
hybride et édulcorée du virus qui faillit naguère emporter l͛Occident » Cependant, contrairement à ce que
l͛on croit souvent, sa dénonciation du pouvoir personnel porte davantage sur l͛usage que de Gaulle fait de
la Constitution que sur la Constitution elle-même.
En fervent opposant du gaullisme, il envisage dès 1959 une coalition de gauche incluant le PCF.
Il crée la Ligue pour le combat républicain, première organisation véritablement mitterrandienne qui
devient la Convention des institutions républicaines (CIR) en s͛unissant en 1964 avec le Club des Jacobins.

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Cette période est celle de l͛opposition pour Mitterrand, le gouvernement étant toujours de droite et
Mitterrand étant socialiste, il est toujours considéré comme challenger.
Sa candidature aux présidentielles de 1965 n͛est due qu͛à l͛échec de celle de Gaston Defferre, maire
socialiste de Marseille. Le succès de son projet est fondé sur une analyse simple : seule l͛union de la gauche
a un impact mobilisateur. Il se présente donc en dénigrant le pouvoir personnel et en défendant une
stabilité gouvernementale.
Sa candidature s͛accompagne de la création de la FGDS (fédération de la gauche démocrate et socialiste) le
10 septembre.
La FGDS regroupe la SFIO, les clubs qui entendent reconstruire une gauche moderne et les radicaux. Le
poids de Mitterrand s͛y affirme vite et il impose en mars 1966 la création d͛un contre gouvernement sur le
modèle de l͛opposition britannique.
Il devient alors en 1966-1967 le challenger du pouvoir gaulliste, résultat inimaginable deux ans plus tôt. En
décembre 1966, la signature de l͛accord électoral entre le FGDS et le PCF débouche sur le succès aux
législatives de 67, la coalition au pouvoir ne l͛emportant qu͛à une voix de majorité.
Rétrospectivement, on peut dire que la stratégie mitterrandienne est déjà en place mais c͛était sans
compter l͛épisode de Mai 1968 qui remet en cause ces premiers succès et reporte les échéances.
En effet, alors qu͛il proposait un gouvernement provisoire présidé par Mendes France et qu͛il attendait des
présidentielles anticipées où il se porterait candidat, il essuie le retour du général De Gaulle qui fait échouer
tous ses plans.
Il sera mm absent du scrutin de 1969 auquel Gaston Deferre se présente au nom de la SFIO qui n͛obtiendra
que 5,01% des voix alors que le PCF remporte 21,5% des voix avec Jacques Duclos.
C͛est donc à partir de 1970 avec l͛échec des socialistes que l͛espace s͛ouvre à nouveau pour François
Mitterrand.

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François Mitterrand et ses amis de la CIR adhèrent au PS en 1971 alors que se prépare le congrès d͛unité
socialiste prévu à Epinay.
François Mitterrand devient le premier secrétaire du PS sur une ligne de gauche qui prône une rupture avec
le capitalisme et une union avec les communistes. En 1972, la signature du programme commun de
gouvernement avec le PC de Georges Marchais et le Mouvement des radicaux de gauche (MRG) de Robert
Fabre apporte une solide assise à Mitterrand au sein du PS.
Entre 1971 et 1981, Mitterrand est un chef de parti, une fonction qui ne l͛intéresse pas vraiment quand on
voit qu͛il repousse les deux seuls vrai projets de parti ( celui de M. Rocard qui veut un parti moderniste
appuyé sur la CFDT et le mouvement associatif puis celui du CERES de JP Chevènement qui se veut un parti
militant, bien structuré et actifs dans les confédérations syndicales).
Or Mitterrand est un stratège électoral qui estime que tout se joue à la présidentielle et sa conception du
PS procède de cette analyse.
Il devient naturellement candidat aux présidentielles à la mort de Georges Pompidou le 2 avril 1974 : c͛est
une candidature d͛union de la gauche, d͛emblée soutenue par le PC.
Cette présentation est donc à la fois celle du secrétaire de PS mais c͛est surtout une deuxième candidature
de Mitterrand qui se présente avec ses propres idées, différentes du programme commun et avec un état
major de campagne différent de la direction du PS.
Cette campagne est la plus originale depuis 1965 car c͛est la première présidentielle où le résultatfinal
n͛est pas donné d͛avance, la gauche y part presque favorite, la droite étant représentée par 2 candidats,
Jacques Chaban-Delmas et Valery Giscard d͛Estaing.
Le clivage gauche-droite est très clairement assumé durant ces élections par la personne de Mitterrand.
Son échec (49,33% au 2eme tour) témoigne à la fois du bond en avant des gauches, dont c͛est le meilleur
score depuis 1945 et des limites de leur poussée, dans un pays qui n͛a subi encore aucune atteinte
profonde de la « crise ».
De 1974 à 1978, l͛Union de la gauche confirme sa progression. Apres le revers électoral de mars 1978, la
rupture avec le PC menace la stratégie de Mitterrand et marque aussi le début de l͛affrontement avec
Michel Rocard. Celui-ci, au nom d͛une « deuxième gauche » critique François Mitterrand qui maintient
l͛ancrage à gauche et la ligne unitaire.
L͛élection de 1981 marque le triomphe de la stratégie de Mitterrand : face à une droite divisée et à un PC
qui paye dans son électorat traditionnel le prix de la rupture, il remporte 25,8% des voix au premier tour
(Marchais 15,3% ; Chirac 17,9% ; Giscard 28,3%) et 51,7% au second. Le challenger devient président.

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L͛élection de François Mitterrand à la présidence de la République le 10 mai 1981, marque la première
grande alternance politique sous la Vème République. Apres avoir été cantonnée dans l͛opposition durant
23ans, la gauche accède enfin au pouvoir. Elle entend traduire l͛aspiration au « changement » dont
Mitterrand a fait son principal thème de campagne.
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Avec ses « 110 propositions », Mitterrand prône une rupture avec les gouvernements précédents, autant
en matière politique qu͛économiques et sociales. A peine élu, il pense déjà aux prochaine présidentielles et
pour s͛assurer le soutient de son électorat, il tient ses promesses faites lors de sa campagnes, notamment
celles qui traitaient des problèmes sociaux.
Ainsi le début du septennat a été très favorable aux libertés, davantage que sa seconde moitié. Pour
conduire le « changement », François Mitterrand entend profiter de l͛Etat de grâce, c'est-à-dire de la forte
confiance dont bénéficie tout nouveau gouvernement auprès de l͛opinion au cours des premiers mois. Les
grandes réformes volontaristes interviennent donc dans les deux premières années du septennat, la
gauche tenant ses engagements : les principales réformes étant l͛abolition de la peine de mort (18
septembre 1981), l͛abaissement de l͛âge de la retraite à 60 ans, la hausse de 10% du SMIC, de 20% du
minimum vieillesse et de 25% des allocations familiales, la réduction de 40 à 39 heures de la durée
hebdomadaire légale du travail et la création d͛une 5ème semaine de congés payés, l͛abrogation de la loi
anticasseurs, la suppression des tribunaux d͛exception, l͛acceptation du droit de recours individuel
européen, l͛abrogation partielle de la loi sécurité et liberté mais aussi des textes portant sur
l͛homosexualité, l͛avortement, l͛audiovisuel͙

En plus de ces changements sociaux, une rupture davantage politique est à mentionnée; c͛est celle qui se
produit avec la formation autour de Pierre Mauroy, d͛un gouvernement appuyé sur une majorité absolue
des seuls socialistes à l͛Assemblée nationale et qui intègre pour la première fois depuis 1947, quatre
ministres communistes auxquels Mitterrand doit de précieux électeurs.

En matière européenne, François Mitterrand est sans doute celui auquel on doit le plus le rapprochement
avec l͛Allemagne et qui accélère ainsi la construction européenne.
En effet la politique extérieure prend une place croissante dans les préoccupations du Président avec une
accélération de la construction européenne, surtout au cours du second septennat de Mitterrand. L͛Acte
unique européen (février 1986) qui prévoit la création d͛un « marché unique européen » et le traité de
Maastricht de 1991 qui institue l͛Union européenne ont tout les deux été ratifié sous Mitterrand. De plus,
après l͛occupation du Koweït par l͛Irak en Aout 1990, François Mitterrand engage la France aux cotés des
Etats-Unis dans la première guerre du Golfe, en janvier-février 1991

. L͛ « impératif culturel » incarné par Jack Lang, se traduit par l͛importante augmentation du budget du
ministère et la multiplication des initiatives (aide à la création, fete de la musique͙) Tout au long de ses
septennats, Mitterrand a été l'initiateur d'une série de grands travaux de prestige qui contribuent à
modifier le visage de Paris : la Pyramide du Louvre, la Grande Arche de la Défense, l'Opéra-Bastille, la Cité
des sciences et de l'industrie de la Villette, le ministère des Finances de Paris-Bercy et, enfin, la
Bibliothèque nationale de France, qui porte son nom

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De 1981 à 1993, la vie politique française semble saisie par l͛instabilité, malgré le maintien, à la tête de
l͛Etat, de François Mitterrand, triomphalement réélu en 1988. Les élections législatives de 1986, 1988 et
1993 donnent lieu à chaque fois à une alternance. Ces résultats contradictoires expriment l͛insatisfaction
des français face à la manière dont ils sont gouvernés mais aussi face à l͛offre politique qui leur ait
proposée. Quatre gouvernements voir cinq avec celui de Balladur de mars 1993, se succèdent en sept ans
sans pouvoir toujours conduire toutes les réformes auxquelles ils s͛étaient engagés.
A l͛issue des élections législatives du 16 mars 1986, la France expérimente une situation politique nouvelle
et alors qu͛il n͛y est pas obligé par la Constitution, Mitterrand nomme non pas l͛homme de son choix mais
le chef du principal parti de la nouvelle majorité : il nomme donc Jacques Chirac comme Premier ministre,
tout en ayant obtenu des garanties sur ses prérogatives en matière de diplomatie et de défense. Pendant
deux ans, conformément à l͛article 20 de la Constitution, c͛est bien le Premier ministre qui « détermine et
conduit la politique de la nation » appliquant le programme du RPR-UDF. L͛élan du gouvernement est
cependant freiné dès décembre 1986 par le retrait, devant la grève étudiante, du projet Devaquet de
réforme des universités. C͛est cet épisode qui a mécontenté l͛opinion et qui a fait largement réélire
François Mitterrand le 8 mai 1988 avec 54,01% des suffrages contre Chirac.

La seconde cohabitation met en présence, après un triomphe des droites aux élections législatives de mars
1993, le président et Edouard Balladur, son dernier Premier ministre. Cette cohabitation est assombrie par
la dégradation de la santé du Président, opéré à deux reprises d͛un cancer de la prostate. Cette deuxième
cohabitation est plus paisible que la première car E Balladur n͛a pas comme Chirac d͛ambitions
présidentielles et donc n͛est pas appelle à entrer dans une concurrence électorale.

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Cultivant un gout du secret remarquable, Mitterrand sait utiliser le suspense comme une arme, mais cette
habitude de laisser le passé dans l͛ombre fit planer des doutes au sein de l͛opinion française.
Il fait l͛objet de violentes polémiques à la suite des révélations du journaliste Pierre Péan sur son rôle sous
le gouvernement Pétain et de son amitié avec René Bousquet, haut fonctionnaire de Vichy inculpé de crime
contre l͛humanité pour sa responsabilité dans la Rafle du Vel d͛Hiv de juillet 1942 (ß    

 



Devant cette polémique, il déclare qu'il est nécessaire de « mettre un terme à la guerre civile permanente
entre Français », argument qu'avait déjà utilisé Georges Pompidou, une vingtaine d'années plus tôt, à
propos de l'affaire Touvier. Pour certains, cette attitude relève surtout de son souci de maintenir son
propre passé dans l'ombre. Pour d'autres, François Mitterrand, profondément marqué par la violence
politique des années 1930, répugne à raviver ces plaies encore douloureuses, au risque d'être accusé de
sympathie à l'égard des « enfants perdus » de la République.
De plus, les scandales politico-financiers qui se multiplient durant son second mandat font que les français,
de gauche comme de droite, perdent confiance dans les partis accusés de corruption. Les csqces morales
sont dévastatrices pour les partis politiques, en particulier pour le PS, dont l͛image est sérieusement
écornée par les « affaires »
 


Unificateur de courants socialistes divisés dans les années 1950, 1960, Mitterrand se pose avant tout en
garant de la cohésion nationale. Il fut le premier président socialiste de la Vème République et le premier à
être élu au suffrage universel direct. Il fut également le premier président à expérimenter le système de
cohabitation et surtout à réussir à passer au travers. A l͛inverse il est le dernier homme d͛Etat français à
avoir vécu en tant que jeune adulte la seconde guerre mondiale. A la fin de sa vie il aurait déclaré « Je suis
le dernier des grands présidents͙Enfin je veux dire le dernier dans la lignée de de Gaulle. Apres moi, il n͛y
en aura pas d͛autres en France. A cause de l͛Europe͙ à cause de la mondialisation͙ à cause de l͛évolution
nécessaire des institutions. » Le   
 Georges-Marc Benamou, 1996.
Même si des rumeurs ont circulées à son sujet, personne ne peut nier que Mitterrand est le symbole par
excellence du PS qui n͛a pas connu depuis sa disparition de chef aussi charismatique.
François Mitterrand décède le 8 janvier 1996, salué par un concert d͛éloges auquel participe son successeur
Jacques Chirac. Sa mort marque la fin d͛un cycle politique où la France laisse davantage de place à l͛Union
européenne pour mener la politique intérieure et extérieure à l͛Etat.

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Ouvrages généraux :

Avril P, 4
  !"#$ %  # $  &     ## presses universitaire de France, 1987,
Paris.

Bernard M, 4

&  '()**)#   &  +, Librairie Générale française, 2005.

jVerneuil C, %  # $  #



& )**, Ellipses, 2008, Paris.

Ouvrages spécialisés :

Favier P, Martin-Roland M, !&  


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 Schabert T, 
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