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AINSI PARLAIT LE SUD-EST

PAR NOURDINE BAOUDRA

"Dans les cafés des petites villes poussiéreuses, des dizaines d'enfants et de vieilles femmes,
tendent leurs mains aux passagers et aux hommes attablés aux cafés. Les enfants de la rue, les
mendiants, les prostitués pullulent et le désespoir gagne les cœurs des enfants et des jeunes",
in "Malaise au Sud-Est" par L.Ideflawen dans Tawiza n° 80, page 10.
Il semble que les fans du septième art reconnaissent ne scène d'un film hindou.
Malheureusement, c'est la vie quotidienne dans les artères des villes ou des pseudo villes du
Sud-est du royaume heureux; oh oui! Ass a degsen nettwali! Ne3ya di lbat'el !! Ainsi parlait le
Sud-est.
Le premier mai 1994, la manifestation d'Errachidya initiée par l'association socioculturelle
Tilelli prit le devant de la contestation publique. Le 3 mai, sept enseignants d'Errachidya et
Goulmima, membres ou sympathisants de l'association Tilelli (Liberté en amazigh), étaient
interpellés. Les charges retenues contre eux: "Trouble de l'ordre public" et "incitation à
commettre des actes portant atteinte à la sûreté intérieure de l'État".
Le peintre amazigh Muhand Saïdi a été interpellé par deux moqaddems qui l'ont convoqué
chez le pacha d'Errachidya; le peintre face aux marionnettes.
Le 29 août 2001, les autorités provinciales d'Errachidya ont convoqué Hamid Lihi et Ali
Harcherras, deux militants reconnus du mouvement amazighs, pour les menacer de poursuites
judiciaires s'ils se décident d’entreprendre toutes sortes de manifestations publiques.
M'barek Taos, militant convaincu, ex-détenu du Mai 94 fut enlevé et torturé par quatre agents
de la D.S.T le 28 février 2003 à Tinghir (Maroc).
Ainsi parlait le sud-est
Le 6 mars, des dizaines d'autochtones d'Imilchil ont organisé un sit-in devant le siège du
gouverneur afin de lui soumettre leurs revendications légitimes. Cette expression populaire a
été barbarement réprimée.
Ainsi parlait le Sud-est.
Actuellement, le réseau associatif, compte des centaines d'associations, englobe presque la
totalité de cette partie de Tamazgha . Ceci ne constitue qu'un signe d'un besoin ressenti par
notre peuple, dans l'élaboration d'un travail collectif mené par des intellectuels qui sont à
l'écoute des revendications populaires. Et ce n'est pas sur le plan culturel, mais social et
politique aussi.
Ainsi parlait le Sud-est.

"TAQERFIYT": mode d'emploi

La culture, dans son sens large, signifie l'œuvre humaine, à la différence de l'œuvre de la
nature.
Définir la culture peut être influencé par la conception idéologique et philosophique. Parler de
la culture amazighe en général et orale en particulier s'avère une tâche qu nécessite un
matériel lucide, scientifique et donc objectif.
V.Lenin disait: "Pour devenir des hommes cultivés, il faut que les moyens matériels de
production aient acquis un certain développement, il faut posséder une certaine base
matérielle", in "œuvres, t 33, p. 488.
La culture, donc, est la somme des valeurs matérielles et spirituelles crées par l'humanité au
cours de sa pratique socio-historique. La culture berbère orale a certainement joué un rôle
dans la sauvegarde des traditions, valeurs, conceptions philosophiques et morale sociale qui
reflètent la relation sociale entre les individus d'une communauté, tribus ou clans berbères.
"Taqerfiyt, un mot qui nous vient de loin, de très loin dans les temps et dans les profondeurs
des raffinements de la civilisation amazighe, et qui
véhicule un mode de communication orale" , écrivait Zayd Ouchnna dans Tawiza, uttvun 81,
asebter 3. Il ajoute: "Dans la région du Sud-est du pays (Maroc), il n'y a pas meilleur expert
qu'un amazigh, convaincu et jaloux de sa tradition ancestrale, qui s'adresse à d'autres dans ce
mode de communication: Taqerfiyt".
Taqerfiyt, comme mode de communication, existe dans toutes les sociétés, comme d'ailleurs
dans toutes les cultures et dans toutes les cultures. Si nous acceptons que Taqerfiyt caractérise
surtout le dialogue entre l'homme et la femme, alors elle doit caractériser toute l'humanité.
J'avance même, et j'espère ne pas troubler la tranquillité des puristes ni les dieux des
polythéistes, que Taqerfiut existe même chez certains animaux et caractérise le dialogue
mâle/femelle.
Le Sud-est n'est pas le berceau de Taqerfiyt et les Ayt Yaflman ne sont ni les fondateurs ni les
seuls détenteurs de Taqerfiyt. Henri Lhote, dans son ouvrage sur les "Touaregs du Hoggar"
(Arlmand Colin, Paris 1984, pages 182 – 183) rapporte des pratiques similaires à Taqerfiyt
dans le nom de "Ahal". "Ahal" signifie réunion, convention, entretien. Son synonyme est
"idwenni". "Les réunions se font à proximité des campements, à l'abri d'un oued, mais en
dehors de la vue des vieillards et des personnes respectables de la tribu. Elles ont lieu
ordinairement avant le repas du soir". "La présence de plusieurs jeunes filles dans un
campement suffit souvent pour qu'il s'y organise un Ahal. Les jeunes gens des campement
voisins y viennent, toujours vêtus de leurs vêtements d'apparat. Certains font par fois des
centaines de kilomètres pour assister à une réunion où ils savent rencontrer de jolies filles et
une distraction agréable".
"Hommes et femmes, serrés l'un contre l'autre, se font des attouchements audacieux et
s'appliquent les narines les uns contre les autres en s'aspirant mutuellement. C'est la forme
particulière du baiser chez les touaregs". "Les mœurs des jeunes filles sont, en effet, très
libres, au point que le père de Foucault affirmait que le mot 'virginité' n'existe pas en tamahak.
Déflorer se traduit par 'percer un trou'. C'est le même mot pour désigner le forage d'un puits.
"Il n'est pas question, dit le docteur Vermade, d'amener la jeune fille pure jusqu'à son mariage.
Ce sont là des sentiments que les touaregs ne comprennent pas. Aussi, dès qu'elle est nubile,
elle va à l'ahal et ne tarda pas à être déflorée. La virginité n'existe pas, n'a aucune valeur
représentative aux yeux des touaregs".
L'ahal et/ou taqerfiyt semblent, donc, exister chez les anciens des berbères, et ces deux
termes: taqerfiyt au Sud-est et Ahal chez les touregs sont des formes déviées d'un phénomène
ancien. Pour examiner au mieux les bases de taqerfiyt et la comprendre, il est subjectif et
même injuste de citer deux dialogues survenant entre deux couples de jeunes gens
amazighophones.
Je vais prendre l'exemple de Taqerfiyt entre Hennu et Yidir. Les propos des deux jeunes
dévoilent la conception de l'homme de la femme et la conception de la femme de l'homme et
le niveau de vie qui règne dans cette société. Et ce type de relation définie par la vie sociale et
l'histoire de la communauté. C'est pour vous dire que taqerfiyt, comme elle se pratique au
Sud-est marocain n'a rien de particulier ni de 'mythique'. Il suffit de songer au Tchatch, E-
Mail, et les messages téléphoniques – en tamazight – si vous voulez pour se rendre compte
que taqrefiyt est
un phénomène international.
En guise de conclusion, j'aimerai bien un jour chercher à savoir à quel point Taqerfiyt dont "le
principe de base est sur le mode de la domination et de la soumission", constitue un obstacle
devant l'épanouissement de la femme amazighe, et à quel point les traditions orales reflètent
la réalité économique et sociale, ainsi que la nécessité de se méfier de la culture orale utilisée
comme "idéologie" pour nous détourner de nos vrais problèmes. Gabriel Soulages dans "Du
cœur disait: "On comprend qu'une jeune fille, vertueuse et jolie, mais trop pauvre pour
qu'aucun prétendant se décide à demander sa main, maudisse le sort si, par hasard, elle songe
que ce dont elle est, à juste titre, le plus fière, ne lui servira jamais qu' à s'asseoir"

Tiqqad
Nurdin BAWEDRA (Goulmima-Maroc)

Key ayennagh,
An-nmun,
Iwa munagh.
Mun yidi,
Xirak at-teggwded ;
Hat amm keyyin
Amm nekkin.
I ma-k-yaghen
Trid at-tinid kra.
Mas nedda ?
Mas nra an-neddu ?
Ddaw ubrid
Nnig ubrid
Matta ubrid ?
Tghald is ur-idd nekk aya ;
Mek ur trid tfested .
Tfested.
Ghas tfested.
Numez abrid,
Gher teghmert,
N wukus n imkuraren :
Ad-dd nger tiqqad,
I gar ikey.
Neskectu cwiy,
Nerzem timukrisin,
Agh-yesmunnden.
Ad-dd neggwez
Seg wayyur,
G –enn nsires tiwirga.
Qan-nn naf iregzen ,
Tiwetmin,
Awd ticirratin.
Iwa awi-d afus,
Hakkak amez digi,
Mar ad ur tderd.
Asidd idrus ;
Iwa slutef,
Gher idmaren nnek
Ad ur terwel tasa .
Tgerd adad nnek ,
Nnil imi nnek.
Akwersi –inn
Ighey ad ig winnek,
Negh win yiwen
Seg infalen yaden.
Magh is ur ak-t nnigh,
Nnigh ak yad :
Hat nneflen.
Mar ad ur-idsen ,
Yakey awdyan
Sbibben –ak keyy
Tunnefla.
Iwa tessend.
Mmgherd ghef tadawt.
Ttu tasmunt nnek
Negh tamettut nnek.
Ad ur ttedsa.
Fast han ayt udghar
Ugin tamusiqt.
Qqen allen nnek.
Qqen imi nnek.
Qqen tiserrawin nnek.
Rzem i ifassen nnek.
Rzem i idarren nnek.
Rzem i twengimt nnek.
Sserxu tafekka ;
Nnek s imikk imikk
Negh s kigan kigan.
Amez taweryitt i twargit ;
Mun d ubrid amellal
Ittyaffren iseggwasen
Agensu nnek.
Mun d ubrid ungal
Ittyaffren iseggwasen
Agensu nnek.
Mun d ubrid aferqac
Ittyaffren iseggwasen
Agensu nnek.
Mun d ubrid warikli
Ittyaffren iseggwasen
Agensu nnek.
Hak s uhezzud
Ma k-yaghen ?
Tegrit issen ;
Ighef nnek ayennagh.
Ad ur k-issiwid.
Ad ur ti-tessiwided.
Hat imk nnagh
Ayd tgid.
Asahla eg-ti-tukzed !
Asahla eg-ki-yukez !
Matta keyyin ?
Trid iselsa ?
Imagh tennfeld ?
Mayd trid iselsa ?
Ma k-ran iselsa ?
Mani wenna k-issawden ?
Ghas keyy ayd illan...
Ur k-iz’ri awdyan
Iz’ir titts nnek ;
Mami tghiyd.
Matta keyy ?
Taghuld d asemnu.
Iàma lemri
Keyy ayd t-iàman ?
Midd netta ayd iàman
Ighf nnes ?
Ma k-yaghen ?
Skunzer wann.
Nnagh d wa.
Ini ayen trid.
Eg ayen trid.
Maka dat uyennagh...
Azen afus nnek,
Ayeffas negh azelmad,
Azelmad negh ayeffas,
Unna ak iwehnen.
GHas ad ig winnek .
Setti-t i tfekka nnek ;
Izir axs ur innegza kra,
Izir axs ur tennegrat- i kra.
Key ayennagh ?
Mek trid tkemzed,
Negh taserrkemed .
Nekk da kemmzegh,
Ihi nekk lligh.
Nekk lligh,
Ihi nekk...
Sikk afus nnek
I adghar nna trid.
Key ayennagh.
Ighef nnek ayennagh.
Sew asekkif nnek
Meqqar degs inzaden.
Axs ur ak
Ikkis udbib asekkif ?
Azen yat tjebbant
I ixeddamen,
Hat da ten ineqqa ighef,
Ku tadeggwat.
Tazend s tisdawit
Ad-dd awin tighenjiw.
Unna yran aledjig
Ad yisin ighetran nnes.
S tit tsawaled ?
Ad idk munegh ;
Magh mad i-trid ?
Han awd nekkin ,
Gigh amm keyyin.
Righ ad allegh dsegh .
Righ ad dsegh allegh.
Kra n tikkal
Meqqtegh tumert.
Mek ts- ed kkigh.
Chal n tikkal
Ayd ghalegh is da tteddugh ,
Amzegh afus ,
Asag ed- fafagh
Taqqen agh -en tazzla ;
Mar an-n nawed .
Iwa mun yidi
An-nawed agensu nnegh.
Ayen nufa hat winnegh.
Xirak at-teggwded.
Amm key amm nekk.
Iwa mayd tannayed ?
Tighmert n tiqqad teqqmer
Tenyama kigan
Anetta drugh tucckid,
Inger igudir ns.
Axs ur trid
Awd keyy
At-tessummed tirrgin ?
Idda wa yerwel
Ighra yas -ed wann
Yufa ka n umettin.
Axs ur idd winnek ?
Magh ur temmut ?
Iwa ddu ghas key
Sucku nekkin
Qad ddugh xs nekk.
Taghufi ats- kksegh
I yeghf inu.
Anerghi at-id-sikkegh
I yeghf inu.
Ma k-yaghen digh
Da teshencird s tlelli ?
Trurid iselsa ?
Kemz,slutef ,nsed
Nekk da kemmzegh,
Ihi nek lligh...
Illa ma k -itfaren kra
Tssend dghi mis nedda ?
Ku yamdan fnan
Suqrat amdan
Ihi suqrat fnan...
Numz abrid
An-neffegh tighmert,
N tiqqad.
An-nmeyyek
Ghef yinfalen
Mis ddan ?
Ma k-igan ?
Hun medden,
Gran ak itnan.
« Asahla eg -ed yaghul »
Tezri-tten
Ur telli tugdut ,
Tar...tar...
Ma k-yaghen tezmummit ?
Aqqmu nnk ayennagh
Tughmas nnk ayennagh
Iferhed
Midd tferhed
Ghalegh is tferhed
Netta zzigh tferhed.
Iwa ddu,
Myagh idsen ifassen ;
Han winu
Tamudint tesmar
Nufa asafar
Win yettnadin
Ad yaf.
Nekkin aya ?
Xiri ad ggwadegh
S tit sawalegh ?
Iwa mun yidi
Munegh didk
Munagh.
Ini yagh ayen nra
Eg agh ayen nra
Ffeghagh takufda
Ur tukit s uzaglu ?
Ur tukiyt s tguta
Tippistimulujin ?
Tsuld -en g wayyur ?
Key da ttisellid
Ihi key tellid
Ihi key...
Z’eyyer tafekka nnek
S imiqq imiqq
Gzey abrid nnek
Tamez-t s dat...
Nurdin BAWEDRA (Goulmima-Maroc) Ghust, 1994

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