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« Simple & Sinistre » : tactique de progression

By Pavel Tsatsouline
Posted on 23/05/2017.

En résumé, le programme « Simple & Sinistre » consiste en 10 séries de 10 Swings à un bras


(cinq séries par bras) suivis de 10 Relevés avec un Kettlebell (cinq par bras).
L’objectif, pour un poids donné, est d’être capable de faire les 100 Swings en 5 minutes. Pour
autant, cela ne veut pas dire que vous devez essayer d’atteindre cet objectif à chaque entraînement.
Comme le souligne Al Ciampa, SFG :
La préparation à une compétition est toujours différente de la compétition elle-même.
L’intensité est généralement inférieure, les distances sont plus courtes, etc. Mais une
mode contemporaine vous fait croire le contraire. Alors, si vous mettez « Simple &
Sinistre » dans le contexte actuel des « boot-camps », des méthodes « marche ou crève »
et de ceci ou cela de « haute intensité »… Il est évident que vous aurez envie de
transformer chacune de vos séances en une compétition.

Mais, de la même manière que vous n’allez pas courir un marathon avant le jour de la
course, n’essayez pas d’atteindre l’objectif de « Simple & Sinistre » avant que votre
préparation soit terminée. Cette préparation consiste en plusieurs mois, voire années, de
séances moins intenses de Swings et de Relevés. Sans le chrono, sans la précipitation,
sans le sentiment d’urgence. Laissez l’entraînement provoquer des adaptations dans
votre corps. Après seulement, vous pourrez mettre ces adaptations à l’épreuve, en
essayant d’atteindre l’objectif chronométré du programme.

Au début, quand votre Kettlebell est encore léger, vous pourrez peut-être faire vos 100 Swings
en 5 minutes tous les jours. Mais le poids va grimper et alors, une forme naturelle de périodisation
va se mettre en place pour pouvoir respecter les règles non-négociables de « Simple & Sinistre ». A
savoir : dégager une puissance maximale dans chaque série tout en restant frais jusqu’à la fin de la
séance. Pour cela, avant chaque nouvelle série vous devrez vous reposer suffisamment pour passer
le « test de la conversation ».

La science derrière « Simple & Sinistre »


Malgré son apparente simplicité, « Simple & Sinistre » cache sous le capot quelques concepts
scientifiques fascinants. Dans les années 1980, les chercheurs et coaches Soviétiques (parmi eux,
Prof. Yuri Verkhoshansky) ont proposé ce qu’ils ont appelé « l’entraînement anti-glycolytique »
pour les épreuves d’endurance. L’approche traditionnelle pour gérer la sensation de « brûlure » due
à l’accumulation de l’acide lactique était (et l’est toujours) l’exposition de l’athlète aux acidoses de
plus en plus intenses. Les Soviétiques ont eu l’idée de tester l’approche radicalement opposée :
« Pourquoi ne pas organiser l’entraînement de manière à ce que les muscles produisent/accumulent
beaucoup moins d’acide ? »
Les premières recherches se concentraient sur la mise du métabolisme anaérobie lactique « en
étau » (selon l’expression d’un coach) entre les deux autres systèmes énergétiques : anaérobie
alactique et aérobie. Le premier est responsable des 20 premières secondes d’un effort puissant,
avant que l’anaérobie lactique ne prenne le relais. Le but des nouvelles méthodes d’entraînement
était de renforcer le « réservoir » alactique. Elles cherchaient également à améliorer la récupération
aérobie.
Les expériences ont été couronnées de succès. Pour autant, les chercheurs ont constaté que les
adaptations étaient finalement assez limitées. Ce n’est que récemment que l’entraînement anti-
glycolytique (AGT) a été remis au goût du jour par le Prof. Victor Selouyanov. Il a découvert
comment utiliser les fibres rapides et intermédiaires sous le régime aérobie.

Un peu de physiologie
Ce qui donne aux fibres « lentes » (type I) leur endurance sont les organites appelés mitochondries.
Les mitochondries permettent aux fibres musculaires de produire efficacement de l’énergie pour les
contractions en utilisant l’oxygène. Selouyanov a trouvé la méthode pour augmenter le nombre
des mitochondries dans les fibres « rapides » (type II) !
Avant de continuer, il faut souligner une chose. L’augmentation du nombre des mitochondries ne
rend pas les fibres « rapides » plus lentes ou plus faibles. Les judokas Russes ont eu beaucoup de
succès avec l’AGT. Or, ils sont souvent capables de monter à 1,5-2 fois leur poids de corps dans le
Développé couché.
Quelques études récentes affirment connaître les mécanismes biochimiques exacts de cette
augmentation. En réalité, ce n’est pas encore le cas. Mais Selouyanov a déterminé les stimuli qui
déclenchent ces mécanismes. Il a compris qu’il s’agit surtout du temps total qu’une fibre reste
dans un état de fatigue et d’acidité légères.

Application de la science à la progression en « Simple & Sinistre »


L’entraînement juste en-deçà du « seuil anaérobie » provoque l’augmentation du nombre des
mitochondries dans les fibres « lentes ». Les coureurs sont familiers avec cet effet. Le « seuil
anaérobie » fait référence au niveau de l’intensité d’un exercice. C’est celui où l’accumulation de
l’acide lactique soudainement s’accélère. L’intensité juste en dessous de ce seuil produit la
condition recherchée de « fatigue et acidité légères ».
Pour le fibres « rapides », le même effet peut être obtenu par une modification des paramètres de
charge dans le « interval training ». Des efforts devront être plus brefs mais plus intenses, les pauses
de repos actif plus longues. Vous devez arrêter chaque série au moment où votre « réservoir
alactique » montre le fond, mais la glycolyse n’a pas encore eu le temps de prendre vraiment
le relais. Généralement, il s’agit de 10 à 20 secondes. Ensuite, vous devez vous reposer plus
longtemps qu’à votre habitude. Il faut laisser le temps à la fatigue de se dissiper et à l’acide, de se
dissoudre. Le repos doit être actif : marchez, faites des exercices de relaxation dynamique, etc. Les
mouvements relâchés facilitent l’élimination de l’acide.
Prof. Selouyanov résume ainsi l’AGT provoquant l’augmentation du nombre des
mitochondries :
…chaque contraction musculaire doit être exécutée avec une intensité quasi maximale.
Pour autant, l’intensité moyenne de l’exercice ne doit pas excéder le seuil anaérobie.
Dans ce cas-là, toutes les fibres musculaires seront actives pendant l’exercice. Mais la
bonne gestion du temps de repos et de la relaxation musculaire permettront l’évacuation
complète des produits métaboliques de la glycolyse anaérobie.

Le test de la conversation
C’est ici que rentre en scène le « test de la conversation ». Les recherches américaines ont
démontré l’effet suivant. Si, pendant votre séance d’entraînement, vous êtes capable de parler
confortablement, alors le niveau d’intensité est juste en-dessous du seuil anaérobie. Si vous n’êtes
pas sûr d’être confortable, alors vous êtes déjà au-dessus.
Mais alors, qu’est-ce qui se passe si on se repose moins ? Si on commence une nouvelle série
alors qu’on est encore essoufflé ? A priori, le mécanisme de fabrication des mitochondries arrête
de fonctionner ou en tout cas, ralentit. L’endurance que vous allez alors développer sera plus
glycolytique de nature. Vous allez optimiser votre morphologie, mais les mécanismes
physiologiques seront différents.

Application de la science à votre entraînement


En ce qui concerne l’entraînement glycolytique, il y a des « pour » et des « contre ». J’en ai déjà
parlé avant et j’en parlerai encore plus dans l’avenir. Le « contre » le plus évident est l’impossibilité
d’avoir des entraînements glycolytiques de bonne qualité au quotidien, tout en restant énergique et
« prêt à partir » en dehors de la salle. Il y a des décennies, les Soviétiques ont compris que
l’entraînement à une prédominance glycolytique est le plus stressant pour le système
hormonal. Il peut facilement amener au surentraînement. Ou, tout du moins, vous rendre en
permanence « cassé ». Ce qui est contraire aux objectifs affichés du programme « Simple &
Sinistre ».
En résumé, votre tactique de progression en « Simple & Sinistre » devrait être la suivante :
Dans la plupart de vos séances, ne vous préoccupez pas du chrono. Attendez d’être capable de
réussir le « test de la conversation » avant d’attaquer la série suivante. Lors de la dernière
séance de la semaine, « mettez les gaz », voire allez-y à fond pour vous tester.

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