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Introduction

Genèse et fondements de l’économie sociale


Magdoud Amina
Genèse de l’économie sociale

En tant que champ de réflexion sur l’intérêt d’activités socioéconomiques


spécifiques, en tant qu’idées et propositions pour un ordre social nouveau plus
équitable et plus harmonieux, l’économie sociale a une origine ancienne. En
réalité la situation de l’économie sociale diffère selon les contextes et on peut
affirmer que si elle émerge à peine dans les pays en voie de développement c’est
plutôt à son renouvellement qu’on assiste dans les pays développés.

Une origine ancienne

L’économie sociale a de profondes racines historiques en même temps que


le thème est d’une grande actualité. L’origine de l’économie sociale remonte, en
effet, en Moyen Age en Europe (corporation compagnonnage). Cependant, c’est
au XIX éme siècle avec l’impact social de la révolution industrielle, que
l’économie sociale a suscité l’intérêt de certains courants , particulièrement dans
le camp socialiste qui cherchait sinon une alternative au capitalisme , du moins à
atténuer les effets sociaux de l’économie du marché par la création et le
développement d’organisations fondées sur d’autres mobiles que le profit.
Plusieurs familles d’auteurs sont considérées comme pionnières et inspiratrices
des premières idées de l’économie sociale.

- Bon nombre d’historiens considèrent J.J.ROUSSEAU (mort en 1778) comme le


véritable précurseur de la doctrine de l’économie sociale. Opposé aux
physiocrates, il considère que l’épanouissement de l’ordre naturel passe par « une
association non contraignante des hommes ». Prônant le développement d’un
cadre associatif « qui protège la personne et les biens de chaque associés » il a en
outre critiqué la propriété privée. Ses idées ont eu une grande influence sur
d’autres auteurs comme PROUDHON. Mais les véritables précurseurs de
l’économie sociale appartiennent à la grande famille des socialistes « utopiques »
en France, en Angleterre et dans d’autres pays européens (Allemagne
notamment. En véritable réformistes, ils prônaient non pas la lutte des classes et
la révolution comme le voulaient les adeptes du socialisme scientifique, mais une
coopération entre classes en vue de la réalisation d’une sorte d’harmonie sociale.
Parmi les représentants les plus connus de ce courant, on peut citer :

- SAINT-SIMON (1760-1825) qui prône le développement d’une industrie qui


vise non le profit mais le bonheur social pour la classe ouvrière et où l’Etat
assume des fonctions de redistribution des revenus.

- Charles FOURRIER (1772-1837) a eu également un apport important en la


matière ; très critique de l’ordre existant, ordre établi par les industriels, les
commerçants et les militaires, l’auteur considère que l’homme est bon mais c’est
la société qui l’a déformé. Pour FOURRIER la clef de la problématique sociale se
trouve dans la connaissance de l’ordonnancement voulu par Dieu. Il propose de
créer un environnement idéal où l’homme peut s’épanouir et se développer de
façon harmonieuse. Cette situation idéale est caractérisée par une communauté de
vie avec une répartition des biens selon le travail, le capital et le talent et où
l’association occupe une place centrale.

-Autre pionnier et non des moindres, PROUDHON P. (1809-1865) est le


précurseur du système mutualisé. Il propose le remplacement de l’argent par des
« bons de circulation » avec des sociétaires qui échangent des services.
PROUDHON , en anarchiste convaincu, refuse toute intervention de l’Etat.
L’auteur comme d’ailleurs FOURRIER me voie dans l’Etat que monopole et
oppression.

En Economie comme en politique PROUDHON croit en la possibilité de


réalisation d’équilibre fondée sur l’action et la réaction de groupe et de force
autonome. Cette équilibre mutuel est un facteur fondamental du développement
social situé entre le capitalisme et la bureaucratie. Le monde de l’économie
sociale est fondé sur des valeurs telles la démocratie, la communauté des
moyens de production, la liberté individuelle et le pluralisme social .

L’historique de la genèse de l’économie sociale relève deux faits


remarquables :

- Une concentration spatiale des précurseurs principalement en France


(Révolution de 1789)
- Le foisonnement d’idées fondatrices de l’économie sociale fut également
localisé dans le temps (XIXéme) dans un contexte socio-économique
particulier, marqué par l’émergence des mouvements sociaux en Europe.

Le contexte actuel du développement de l’économie sociale

Ce regain d’intérêt pour un champ certes ancien mais aujourd’hui en pleine


expansion est lié à un contexte marqué par des dysfonctionnements et crises
d’ordre économique et social. Une autre problématique, celle des atteintes à
l’équilibre écologique et la nécessité de préserver l’environnement, s’est
imposée dans les débats actuels relatifs au développement.

- Sur le plan économique


 limites des politiques classiques de développement
 Programmes d’ajustement structurel et désengagement de l’Etat
 Mondialisation et ouverture des marchés
- Sur le plan social
 Extension de la pauvreté
 Analphabétisme et société du savoir
 Détérioration du cadre de vie des populations
 Accroissement du chômage et apparition de nouvelles formes d’éxlusion.

- Sur le plan écologique : viser un développement durable

« Le développement durable est un développement qui permet à la génération


présente de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des
générations futures à répondre à leurs propres besoins »

C’est cette définition du concept du DD (développement durable) qui est


au centre de la problématique du développement telle que perçue par les Nations
Unies.

Le développement durable ou « soutenable » est censé assurer le bien-être des


générations actuelles sans compromettre celui des générations futures. Cette
doctrine défendue par les Nations Unies et le PNUD (Programme des Nations
Unies pour le développement) en particulier est actuellement en vogue et rejoint
les préoccupations des acteurs de l’économie sociale centrées sur un ensemble
d’interrogations.

- L’amélioration du bien être humain doit-t-il forcément passer par la croissance,


en tant qu’accroissement perpétuel de la quantité de marchandises, ou faut-il au
contraire établir une distinction radicale entre les deux concepts ?
- Le développement ne doit-il pas se construire non autour de la valeur
d’échange et du profit mais avec comme objectifs structurants la valeur d’usage
et la qualité du tissu social ?

- La satisfaction des besoins essentiels et l’accès des populations démunies aux


services collectifs de base ne doivent elles pas être au centre des objectifs de
développement ?

- Si oui à quels mécanismes faut il recourir pour améliorer cette accessibilité et


avec quels acteurs et institutions ?

A ces questions et bien d’autres, il est intéressant de comprendre les types de


réponses qu’apportent les institutions de l’économie sociale, à la fois par leurs
modes d’organisations, par leur fonctionnement, par les objectifs qu’elles visent
et les valeurs qu’elles défendent.

Ouvrer pour un développement participatif

L’approche participative du développement accorde une place privilégiée à


l’implication des populations dans l’identification des problèmes locaux, dans la
définition des solutions et la mise en œuvre des projets.

Cette approche se base sur le partage du savoir et du pouvoir et considère que la


population cible est le partenaire avec qui il faut échanger, convaincre, se
concerter et négocier pour l’ensemble des phases d’un projet de développement.

L’approche participative du développement s’est imposée suite à l’échec des


politiques centralisées et verticales, menées en Afrique et dans d’autres pays du
Sud, excluant toute participation active des populations locales aux projets qui
les concernent pourtant.
Le développement participatif suppose davantage de démocratie, en plus grand
rôle pour les organisations locales, une plus grande autonomie administrative, le
respect des droits de la personne humaine, y compris les systèmes juridiques
efficaces et accessibles et c’est pour ces raisons que cette approche est au centre
de l’économie sociale.

Un flou conceptuel

La notion d’économie sociale présente plusieurs ambiguïtés :

Une terminologie variée pour désigner un contenu flou :

L’économie sociale est souvent présentée comme un troisième secteur,


entre le privé et le public mais l’accord est loin d’être réalisé quant à sa
dénomination. Signe à la fois de la complexité des activités de l’économie
sociale et des spécificités des cadres économiques, institutionnels et culturels,
une terminologie riche et variée est utilisée pour désigner ce troisième secteur.

L’économie sociale, un secteur d’activités ?

La notion même de secteur d’activités pose problème au regard de la complexité


et de la variété des organisations qui composent l’économie sociale.

En effet, les organisations d’économie sociale sont présentes dans des champs
aussi divers et différents tels que : le financement et l’épargne, le commerce,
l’agriculture, l’artisanat, l’environnement, la promotion de la femme, l’insertion
des jeunes, l’alphabétisation, la lutte contre la pauvreté . Il ne s’agit donc pas
d’un secteur classique mais d’organisation et du statut juridique, des objectifs
d’activités et des acteurs qui les animent.
Néanmoins, au-delà de ces différences, les entreprises de l’économie sociale
remplissent des fonctions similaires ou du moins convergentes quel que soit le
pays et sont également fondées sur les mêmes défis, ce qui justifie leur
regroupement dans un même cadre de référence, celui de l’économie sociale en
l’occurrence.

En bref, si l’économie sociale se caractérise par une ambigüité terminologique


selon les pays il y’a cependant un accord sur le large spectre de formes
d’organisations qui la composent et qui reposent à la fois sur la solidarité et sur
la coopération.

Fondements de l’économie sociale

La complémentarité entre objectifs économiques et objectifs sociaux

L’économie sociale, qui fait l’objet de ce cours, se compose de deux notions,


présentées généralement comme étant antinomiques. En effet, l’économique et
le social renvoient en deux logiques, deux rationalités qui seraient différentes,
voir Même opposées.

La rationalité économique et celle de l’économie de marché qui lui est associée


s’appuient sur le profit considéré comme le moteur de l’économie et le mobile
de toute activité.

L’objet de la microéconomie comme de la macroéconomie, les deux principales


branches de la science économique, est de déterminer des lois économiques
,dans le cadre de l’économie de marché.

En revanche, si l’économique renvoie aux notions de rentabilité et d’éfficacité,


le social est fondée sur l’équité et la justice . Des thémes, à connotations sociale,
comme la lutte contre la pauvreté, l’insertion sociale des catégories vulnérables ,
la lutte contre le chômage se sont progréssivement imposés comme sujets
d’activités dans un contexte, local, national et international marqué par le
développement de formes variées d’éxlusion et de marginalité.

Doit-on choisir alors entre la logique de satisfaction des besoins fondamentaux


ou celle, plus économique et séléctive, se limitant à la satifaction des seuls
besoins solvables ?

L’économique et le social sont ils vraiment inconciliables ? Une politique


sociale est-elle incompatible avec l’objectif déclaré de l’économique, à savoir
l’efficacité et la rentabilité ?

La croissance économique peut-elle durable sans développement social ? Et en


même temps, la conduite d’une politique sociale fiable et conséquente peut-elle
se faire sans moyens qui ne peuvent être, justement, que le fruit de la croissance
économique ?

Rien n’est moins sûr, car bien au contraire ces deux logiques, celles de
l’économique et du social, loin de s’exclure, doivent s’articuler et se compléter
judicieusement pour pouvoir faire face aux grands défis économiques et sociaux
de notre époque.

En réalité le développement économique et le développement social sont deux


faces d’une même médaille. Car pour pouvoir redistribuer la richesse, il faut
d’abord la produire, ce qui renvoie au rôle majeur et incontournable de
l’économique. Inversement, la création de la richesse et le fonctionnement
normal de l’activité économique exige le développement du capital social et la
valorisation des ressources humaines notamment par la satisfaction des besoins
fondamentaux de la population. Le développement comprend donc à la fois la
dimension économique et la dimension sociale, ces deux dimensions sont de ce
fait indissociables.

Il s’en suit que l’économie et le sociale sont souvent imbriquées et ont des
articulations multiples :

Dans le contexte socioéconomique actuel, celui de la mondialisation et de la


globalisation des économies, de l’ouverture des marchés, un contexte marqué
socialement par l’extension de la pauvreté, le développement de nouvelles
formes d’exclusion et du chômage, des déséquilibres sociaux et autres
déséquilibres écologiques, l’articulation entre l’économie et le social devient,
plus que jamais, impérieuse.

La réussite des politiques économiques en matière de lutte contre le chômage ,


de croissance économique et d’amélioration de la compétitivité de l’économie,
est largement conditionné par la mise en œuvre de politiques dites
d’accompagnement dans le domaine social et de développement des ressources
humaines.

C’est ainsi que devant les limites des politiques économiques classiques, aussi
bien dans les pays du nord que dans les pays du sud, les thèmes relevant de
l’économie sociale se sont progressivement imposés dans les débats et analyses
socio-économiques, durant les deux dernières décennies, comme thèmes de
premier plan.

Le développement de l’économie sociale est souvent présenté come une


composante essentielle d’un développement durable et à visage humain. ce type
de développement permettrait de sortir du paradoxe selon lequel des besoins
sociaux considérables restent insatisfaits en même temps que l’emploi des
ressources est loin d’être optimal.

Tel parait être le fondement de l’économie sociale et l’objectif structurant des


activités et des organismes qui la composent.

VALEURS ET PRINCIPES DE L ECONOMIE SOCIALE :

Les entreprises de l’économie sociale sont fondées sur des valeurs communes
qui définissent une éthique particulière. Ces principes fondateurs et fédérateurs
concernent à la fois les finalités de l’activité productive de ces entreprises et
leurs modes d’organisation interne. Considéré sur cet aspect éthique, l’économie
sociale regroupe les activités économiques exercées par des sociétés,
principalement coopératives, des mutualités et des associations dont l’éthique se
traduit par les principes suivants :

FINALITE DE SERVICE AUX MEMBRES OU A LA COLECTIVITE


PLUTOT QUE LE PROFIT

Avec la finalité de service, on insiste sur le fait que l’activité d’économie sociale
est un service rendu aux membres ou à d’autres personnes et non un outil de
rapport financier. Le dégagement d’éventuels excédents est alors un moyen de
réaliser ce service mais non le mobile principal de l’activité.

Le premier principe signifie que l’activité d’une entreprise de l’économie sociale


est sans but lucratif et que son objectif n’est pas la réalisation d’un profit.
Contrairement à une entreprise capitaliste, la réalisation d’excédents n’est donc
pas le mobile principal de l’activité d’une entreprise de l’économie sociale.

AUTONOMIE DE GESTION
L’autonomie de gestion vise principalement à distinguer l’économie sociale de
la production de biens et services par les pouvoirs publics. En effet, les activités
économiques menées par ces derniers ne disposent pas généralement de la large
autonomie qui constitue un ressort essentiel de toute dynamique associative.

PROCESSUS DE DECISION DEMOCRATIQUE

La démocratie renvoie au principe « un homme-une voix » (et nom « une action


–une voix » dans les organes souverains et souligne le fait que l’adhésion et la
participation aux décisions ne peuvent découler principalement de la propriété
d’un capital.

PRIORITE DES PERSONNES ET DU TRAVAIL SUR LE CAPITAL DANS


LA REPARTITION DES REVENUS

Enfin, le quatrième principe découle assez largement des précédents et, en ce


sens, parait moins essentiel. Il traduit surtout diverses pratiques propres à la
coopérative (rémunération limitée du capital, répartition d’excédents sous forme
de ristournes aux membres- usagers).

LES CONTOURS DE L ECONOMIE SOCIALE

Au vu des remarques précédentes, notamment celles relatives au flou conceptuel


qui caractérise la dénomination de l’économie sociale, il est important de
préciser les frontières de ce secteur. Parmi les nombreuses questions qu’on
pourrait se poser à cet égard, deux requiert une attention particulière :

- La première à caractère général et méthodologique, porte sur les contours de


l’économie sociale par rapport aux autres secteurs.
- La seconde plus spécifique aux pays en développement concerne les liens
entre l’économie sociale et le secteur informel.
LE SECTEUR DE L ECONOMIE SOCIALE ET LES AUTRES
SECTEURS

La délimitation du champ des entreprises de l’économie sociale n’est pas


chose aisée ; en fait si on admet que l’économie sociale comprend, outre
les coopératives et les mutuelles, les associatives, c’est cette dernière
catégorie qui pose quelques difficultés pour une classification rigoureuse
et une délimitation nette des frontières entre l’économie sociale et les
autres secteurs.

1. Entreprises coopératives de travail ou d’usagers.


2. Entreprises mutualistes
3. Entreprises associatives (dont la délimitation pose quelques problèmes).
4. Entreprises communales <<participatives
5. Entreprises communautaires mixtes entre l’entreprise associative et
l’entreprise communale
6. Entreprise paritaire relevant de la mouvance syndicale
7. Entreprises privées participatives (au résultat,à la gestion,à la proprieté)s

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