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La Bible hébraïque est la source vive de la judéité dans toutes ses manifestations, qui incluent le judaïsme,
le sionisme et bien d’autres choses encore. C’est la thèse – assez peu audacieuse – que j’approfondis
depuis quelque temps, dans le prolongement de mon livre Du yahvisme au sionisme.
Je réponds tout de suite à l’objection selon laquelle la Bible n’est pas un livre mais une bibliothèque
(Biblia est un pluriel) : c’est vrai, mais l’ensemble composé du Pentateuque, Josué, Juges, Samuel 1 et
2, Rois 1 et 2 est, dans sa composition finale, l’œuvre d’une seule école de pensée du 5e siècle avant
notre ère, et les plus importants livres prophétiques comme Jérémie, Ézéchiel et Deutéro-Isaïe,
appartiennent à la même période et à la même école. Malgré des nuances, il y a incontestablement une
unité idéologique très forte dans la Bible hébraïque, et celle-ci est condensée dans la figure de la
divinité, dont le nom principal est Yahvé.
Quant à la question de savoir si la judéité a créé la Bible ou si la Bible a créé la judéité, elle est un peu
comme celle de la poule et de l’œuf, mais on peut la préciser en admettant que la Bible n’est pas
l’œuvre du « peuple juif », mais celle d’une caste héréditaire de Lévites : on peut dire, en simplifiant,
que les Lévites ont créé Yahvé qui a créé la judéité. Yahvé est la judéité, c’est-à-dire un système
d’aliénation inventé par une élite.
Dans mon précédent article, je me suis attaqué au « cryptisme », une stratégie adaptative si bien
assimilée par les juifs à travers les siècles qu’elle est presque devenue instinctive, c’est-à-dire
subconsciente. « Le juif, écrivait Hilaire Belloc en 1922, prend avec une rapidité inexplicable la couleur
de son environnement », moins par désir d’assimilation que par instinct de dissimulation [1]. Appliquée
au domaine des idées de façon concertée et répétée, cet art de la tromperie a permis aux élites
communautaires de faire passer aux yeux des Goyim – et des juifs naïfs – leur suprémacisme juif pour
un universalisme grec. L’efficacité de cette stratégie a toujours dépendu du respect qu’inspirent aux
Goyim la Bible hébraïque, car c’est dans la Bible que, par un tour de passe-passe d’une
incroyable chutzpah, la méchante divinité qui servait aux juifs de dieu national a été travestie en Dieu
suprême, créateur du Ciel et de la Terre, qui par un grand mystère se serait amouraché de quelques
tribus confédérées arpentant avec convoitise les marches du Croissant Fertile il y a trois millénaires.
Cette méprise d’une grossièreté diabolique est la source d’une maladie mentale gravissime dont
l’humanité n’est visiblement pas prête d’être guérie. Je prétends même qu’elle est la source historique
du rejet de Dieu en Occident : si Yahvé est Dieu, alors non merci !
Une autre caractéristique fondamentale du pouvoir juif est l’inversion accusatoire (ou projection
accusatoire). C’est en lisant les livres de Hervé Ryssen – une somme irremplaçable – que j’en ai pris
conscience. Le principe de l’inversion accusatoire consiste pour l’agresseur à se faire passer pour la
victime, afin de justifier sa propre violence comme purement défensive ou rétributive. Dans chacun de
ses livres, et tout particulièrement dans Le Fanatisme juif, Ryssen apporte de nombreuses illustrations
de « l’intellectuel juif » qui « projette sur les autres tout ce dont il se sent coupable, y compris sa propre
inclination à l’inversion accusatoire [2]. » Utilisé de façon massive et systématique, ce procédé a permis
de substituer dans la conscience européenne la « question de l’antisémitisme » à la « question juive » :
la raison de l’hostilité unanime des peuples envers les juifs ne serait plus à chercher dans le
comportement nuisible des juifs, mais dans une mystérieuse et dangereuse névrose que partageraient
tous les peuples, à l’exception évidemment des juifs.
L’inversion accusatoire est, comme le cryptisme, une ruse de l’esprit si ancrée qu’elle est devenue une
seconde nature. Comme le cryptisme, elle trouve sa source dans l’idéologie biblique, c’est-à-dire dans
la biographie, la personnalité et la parole de Yahvé. C’est ce que je vais ici démontrer : Yahvé est le
plus cruel de tous les dieux dont l’histoire a gardé le souvenir, mais Yahvé voudrait nous faire croire que
toutes les autres divinités adorées par les hommes, sans exception, sont nuisibles et méritent que leurs
cultes soient éradiqués de la surface de la terre. Yahvé est le dieu infernal qui accuse tous les autres
dieux (y compris le Dieu suprême adoré sous le nom de Baal Shamen) d’être des démons de l’enfer
ligués contre lui, le seul vrai Dieu.
Cryptisme et inversion accusatoire fonctionnent de concert. Si, dupés par le déguisement majestueux
dont les Lévites de Babylone ont affublé leur dieu national, nous prenons les paroles de Yahvé pour
celles de « Dieu », alors il nous faut admettre que les religions du monde, ferments des civilisations, ont
été des abominations, puisque « Dieu » les a ainsi poursuivies de sa haine.
Inversement, dès qu’avec un peu de culture sur les religions antiques, nous perçons à jour la
supercherie de cette crypto-monolâtrie juive, la plus grande opération de hasbara de l’histoire apparaît
pour ce qu’elle est.
Avant d’aller plus loin, je tiens à dire que je n’ai aucun plaisir à offenser la foi religieuse de quiconque.
Certains chrétiens me reprochent de lire l’Ancien Testament au premier degré, sans les lunettes
allégoriques du Nouveau Testament. Ma réponse est simple : lisez le Tanakh hébraïque comme bon
vous semble, et convertissez les juifs à votre lecture si vous le pouvez. Mon objectif est d’expliquer
comment les juifs, qui l’ont écrit, le lisent depuis 2 500 ans, et l’effet que cette lecture a sur leur vision
du monde et de l’avenir, et sur celle de leurs élites cognitives en particulier. Je comprends et compatis
avec les difficultés des chrétiens à participer à cet effort, mais je crois qu’il n’y aura pas de remède
durable à l’influence corruptrice du sionisme international sans une enquête étiologique dépassionnée
et approfondie. Pour évaluer correctement l’influence de la Bible sur ceux qui la considèrent comme
leur « roman national », il faut écarter la notion selon laquelle elle a été inspirée par « Dieu » de
quelque manière, car cette notion induit une dissonance cognitive qui trouble notre jugement rationnel
et moral.
En fait, nous devrions peut-être renoncer à regarder la Bible hébraïque comme un livre religieux, car la
catégorie de la « religion » ne rend pas compte de sa forte influence sur les juifs non religieux. Comme
je l’ai souvent rappelé (ici par exemple), la plupart des dirigeants israéliens, de Ben Gourion à
Netanyahou, sont non-religieux, mais leur vision du monde est néanmoins profondément biblique. C’est
pourquoi elle est aussi prophétique. Ben Gourion prophétisait dès 1962 un nouvel ordre mondial centré
à Jérusalem en se référant à Isaïe, et Attali a refait la même prophétie. Zemmour aussi joue au
prophète national, car son logiciel secret est biblique. Netanyahou a prophétisé dès 1995 « une bombe
nucléaire dans les sous-sols du World Trade Center [3] », mais Isser Harel avait déjà prophétisé avant
lui, en 1980, la destruction des Tours jumelles [4]. Ce sont ces juifs « non-religieux » qui comprennent
le mieux la vraie nature du prophétisme biblique : depuis 2 500 ans, il ne s’agit pas de prévoir l’histoire,
mais de la programmer (en se donnant l’air de la prévoir).
La catégorie la plus appropriée pour appréhender aussi bien la Torah que la judéité n’est pas
« religion », mais « alliance » (berit en hébreu, qui signifie aussi « traité » ou « serment d’allégeance »).
Le fondement de la judéité est l’Alliance mosaïque et, dans une moindre mesure, l’Alliance
abrahamique. Les juifs religieux croient que c’est une alliance entre « Dieu » et le seul peuple dont Il se
soucie vraiment. Mais la plupart des élites intellectuelles, culturelles, financières, politiques ou
criminelles juives, ceux admis par exemple dans le B’nai B’rith (« Fils de l’Alliance ») ou dans l’Alliance
Israélite Universelle, admettent que c’est en réalité une alliance des juifs entre eux. Ils ne croient pas en
l’existence réelle de Yahvé, sinon comme égrégore, mais ils pensent que le pacte les relie non
seulement entre eux horizontalement, mais verticalement à leurs ancêtres depuis une centaine de
générations. « Dieu n’a pas élu Israël, c’est Israël qui a élu Dieu », aimait dire Ben Gourion, par quoi il
entendait que, indépendamment de la question de l’existence de Yahvé, les juifs se sont donné une fois
pour toute le destin qui va avec « l’élection » : la domination du monde.
La mythologie de Baal Shamen était très proche de celle d’Osiris : tous deux sont à la fois, avec leur
sœur-épouse, des dieux de la fertilité et de la résurrection, en lutte perpétuelle contre un frère ennemi
qui apporte la sécheresse, la discorde, la maladie et la mort. Le baalisme était une religion morale
portée sur la préparation à l’après-vie, une notion à laquelle le yahvisme est farouchement opposé [12].
Du point de vue des Syriens adeptes de Baal, comme de celui des Égyptiens, le déni de l’immortalité de
l’âme et la préoccupation exclusive pour les biens terrestres, faisaient de la religion de Yahvé une anti-
religion. Mais les yahvistes, eux, s’efforcent de diffamer le baalisme en l’associant à la « nécromancie »,
et en le mettant en scène sous les traits du serpent de Genèse 3. Aucune preuve n’existe que Baal
Shamen était associé à un culte du serpent (en revanche, les Israélites adoraient un serpent d’airain
associé à Moïse, jusqu’à ce qu’Ézéchias le « mit en pièce » 2 Rois 18,4), mais la façon dont le
rédacteur biblique fait parler le serpent renvoie de façon à peine voilée au culte de Baal Shamen.
Lorsqu’il offre aux premiers humains le moyen de « connaître le bien et le mal » pour « ne pas mourir »
et « être comme des dieux (elohim) », le serpent emprunte le langage du baalisme et de la plupart des
grandes religions de son temps, dont le but le plus élevé était de préparer les hommes au grand
passage, vaincre l’anéantissement par la résurrection (l’anastasis des Grecs) : dans ce contexte, les
« dieux » désignent simplement des êtres immortels. Or, selon le rédacteur de la Genèse, la vie
terrestre était la seule prévue par Yahvé, et elle était prévue pour durer éternellement (si seulement
Adam n’avait pas mangé le fruit défendu). Il accuse donc le serpent d’avoir apporté la mort en ce
monde (ainsi que le travail, qu’il décrit comme une malédiction) : inversion accusatoire, puisque c’est
précisément Yahvé qui, en détruisant l’espoir d’une vie après la mort, proclame la victoire de la mort-
anéantissement.
Je sais bien qu’en écrivant ces lignes, je m’attire l’accusation de prendre le parti du serpent, c’est-à-dire
du diable. Accusation ridicule ! Je me place sur le plan de l’histoire des religions antiques et de leurs
polémiques, dans une approche révisionniste permettant de restituer la vérité des cultes dont le
yahvisme, le grand vainqueur de cette guerre des dieux, a déformé ou effacé la mémoire. Et je fais
remarquer en passant que les Pères grecs de l’Église ont insisté sur la « déification » de l’homme
(theosis), rendue possible depuis que « Dieu s’est fait homme afin que l’homme devienne Dieu », selon
la formule consacrée [13]. Le serpent de la Genèse était moins radical.
Laurent Guyénot