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Une tout autre histoire
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LE VIEUX-MONTRÉAL
Roger Chartrand
LE VIEUX-MONTRÉAL
Une tout autre histoire
SE P T E N T R ION
Les éditions du Septentrion remercient le Conseil des Arts du Canada et la Société de développement
des entreprises culturelles du Québec (SODEC) pour le soutien accordé à leur programme d’édition,
ainsi que le gouvernement du Québec pour son Programme de crédit d’impôt pour l’édition de
livres. Nous reconnaissons également l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise
du Programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition (PADIÉ) pour nos activités
d’édition.
écrite par la même main, figure sur le côté opposé de la carte. Si le style
est de cette époque et que monsieur Gédéon de Catalogne confectionnait
effectivement des cartes au début du e siècle, il est clair cependant
que la calligraphie est d’une structure beaucoup plus récente et que le
texte a été copié. Un autre détail important doit être signalé : la disposi-
tion des bâtiments sur le plan de monsieur de Catalogne est parfois diffé-
rente de celle que l’on retrouve sur les quatre autres plans.
Qui était Pierre-Louis Morin ? Des recherches effectuées à Bibliothèque
et Archives nationales du Québec ont permis d’apprendre qu’il a exercé la
profession d’arpenteur-géomètre à Montréal, durant une quarantaine
d’années, soit jusqu’à sa retraite en . Durant ses loisirs, il a dû s’inté-
resser vivement à l’emplacement des premières habitations de Montréal,
puisque c’est dès l’année suivante que ses résultats furent publiés dans le
journal La Patrie. L’arpenteur Morin mourut peu après.
Pendant ses recherches, l’auteur s’est mis en frais de reproduire parfai-
tement à l’échelle les résultats de Morin sur un plan de compilation du
cadastre officiel actuel. Il est alors devenu évident que son auteur, malgré
de louables efforts, paraissait parfois avoir laissé voyager son imagina-
tion dans la production de cartes de belle présentation, mais bizarrement
identifiées.
Le présent ouvrage a pu se concrétiser grâce à des sources venues de
tous azimuts. Mais l’auteur a fait appel surtout à cinq d’entre elles qui, à
divers degrés, sont à la base même des résultats obtenus. Il serait fasti-
dieux d’en faire constamment mention. Aussi, ce n’est qu’à l’occasion
que ces sources seront à nouveau signalées.
Un ouvrage de premier plan a servi à définir et à localiser à peu près
tous les sites mentionnés dans ce livre. Il s’agit du second terrier tel qu’il
a été publié par la Société historique de Montréal en , dans un docu-
ment intitulé « Les Origines de Montréal ». La majeure partie du livre est
consacrée à la transcription du terrier tel qu’il a été rédigé vers , et
dont les entrées s’étalent jusqu’en .
En fait, le premier terrier avait été conçu bien avant, soit à partir de
, à la suite d’une ordonnance de l’intendant Talon qui autorisait les
Messieurs de Saint-Sulpice à procéder à l’enregistrement officiel des
concessions. Mais ce registre et le plan qui l’accompagnait ont été détruits.
On comprendra que sa reconstitution entraîna certaines interprétations
pas nécessairement conformes au terrier original, comme on le constatera
à l’occasion, dans le présent ouvrage. Enfin, on doit à l’arpenteur notaire
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Louis Guy une partie des plans qu’il produisit en et que compléta,
beaucoup plus tard, le sulpicien Ovide M. Lapalice. Si les deux hommes
ont fait un travail remarquable qui a permis ce qu’on pourrait appeler un
premier déblayage, il n’en demeure pas moins que leurs plans ne corres-
pondent pas toujours parfaitement à la réalité et demandent parfois à être
interprétés. Mais sans ces pièces, résultat d’un travail complexe, il aurait
été extrêmement difficile de retracer certaines désignations du terrier.
C’est surtout l’édition de du Dictionnaire national des Canadiens
français de l’Institut Drouin qui a servi aux références généalogiques. À
l’occasion cependant, d’autres documents du genre, comme le Diction-
naire généalogique des familles canadiennes de Cyprien Tanguay, ont
permis de compléter l’information.
Montréal a subi trois gros incendies, au temps de la Nouvelle-France.
La description de celui de constitue un apport important dans
l’ouvrage, grâce à The Canadian Antiquarian and Numismatic Journal
qui fit paraître dans son numéro d’avril un rapport saisissant du
sinistre du juin , durant lequel pas moins de cent vingt-huit
maisons et autres bâtiments furent détruits (un rapport subséquent en
mentionne cent trente-huit). C’est François-Marie Bouat, conseiller du
roi et lieutenant-général à Montréal, qui rédigea le premier rapport.
L’édition du Journal publia également un plan daté du juillet qui
montre l’étendue des dégâts. Le document avait été dessiné par l’ingé-
nieur et cartographe Gaspard Chaussegros de Léry. Ce plan et le rapport
du sieur Bouat ont permis d’établir un lien intéressant entre les proprié-
taires de l’époque et ceux qui les avaient précédés.
Le présent ouvrage consacre une large part aux propriétaires fonciers
du e et du e siècle. The Encyclopedia of Canada publiée par l’Uni-
versity Associates of Canada Limited de Toronto, dans son édition de
, permet de mieux connaître les personnages d’origine britannique
qui ont façonné le Vieux-Montréal, après la Conquête.
Comme cinquième source et non la moindre, on doit mentionner le
site Internet http ://www.vieux.montreal.qc.ca qui fournit une excellente
description de tous les bâtiments existants dans le Vieux-Montréal, tout
en y ajoutant la plupart du temps des références historiques sur le
constructeur, le propriétaire ou le locataire de chacun des immeubles.
Enfin, l’auteur lui-même a parcouru, à plusieurs reprises, toutes les
rues du Vieux-Montréal, mesurant les édifices et prenant constamment
des notes.
LE SYSTÈME DE MESURES
Des trois entités territoriales définies plus haut, c’est la terre de Pierre
Gadois qui couvre la plus grande superficie, à l’intérieur du secteur
numéro . Contrairement au sieur Messier du côté de la rue McGill, le
sieur Gadois n’a eu à céder, sur la largeur de sa terre, que la demie ouest
de la rue Saint-Pierre. Par contre, comme son voisin, il a dû rétrocéder
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Sur le plan foncier, une bonne partie des concessions des sieurs Messier
et Gadois ont eu un destin commun. D’abord, en , par la création
du domaine des Récollets au sud de la rue Notre-Dame et, à la fin du
e siècle, avec l’avènement du Centre de commerce mondial. Le présent
chapitre et les deux suivants traitent donc concurremment des deux
concessions.
À part les familles Messier et Gadois, la partie de leurs concessions
comprise entre le côté sud de la rue Saint-Jacques et le mur d’enceinte nord
de la ville n’a jamais connu d’autres propriétaires privés, avant le début du
e siècle. En effet, les deux familles avaient dû rétrocéder cet espace pour
les « besoins du roi », en vertu d’une clause qui les liait dans leurs contrats
et dont il a déjà été question. Ces « besoins du roi » se sont matérialisés par
la construction, notamment, des installations de protection et d’une
poudrière qui se retrouverait aujourd’hui en plein centre de la rue
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dans les tissus et produits connexes que les Anglais appellent « dry
goods » : expression que les francophones traduisirent pendant longtemps
par les mots « marchandises sèches ». Occupant des locaux trop exigus,
John Greenshields emménagea en dans le nouvel édifice construit
sur l’emplacement qu’occupait le défunt théâtre St. Patrick et qui porta
le nom des Greenshields pendant près d’un siècle.
Entre l’édifice Greenshields et une entrée du Centre de commerce
mondial sur le square Victoria, il existe un bâtiment plus étroit (n )
dont les faces latérales sud et arrière, autrefois des murs extérieurs,
donnent sur l’esplanade du complexe (, ruelle des Fortifications).
Construit en , il abrita à partir de le siège social de la Canada
Steamships Lines, déjà propriétaire de l’édifice Greenshields. En ,
Power Corporation se portait acquéreur du , square Victoria et s’y
installa.
Avant l’arrivée des récollets, les héritiers Messier et Gadois avaient déjà
disposé de certains emplacements à même leurs concessions. La dési-
gnation des terrains n’est pas toujours claire. Mais, quoi qu’il en soit, on
sait que c’est Paul Bouchard, le fils d’Étienne, le célèbre chirurgien de
Ville-Marie, qui devint propriétaire de tout l’espace que possédaient les
Messier au nord de Notre-Dame, en front de la rue Augustine, créée juste
en deçà des remparts, et qui correspond de nos jours à l’extrême partie
est de l’emprise de la rue McGill. Signalons que l’emplacement se rendait
jusqu’aux fortifications nord, car la rue Saint-Jacques n’existait pas encore
à l’époque. Sans connaître précisément la date du contrat, il est permis
de croire qu’il s’est matérialisé un peu avant .
Plus tard, le sieur Bouchard procéda à la vente de sa propriété. Mais
une certaine confusion apparaît au terrier quant au moment de cette
transaction et des autres qui ont suivi, et aussi quant à la description des
lots issus de l’emplacement original. Parmi les propriétaires subséquents
en tout ou en partie des lieux, on compte, entre et , Denis Lecours
(Lecourt), Henri Jarry, Anne Badel, veuve de Jean Danis, Jean Poirier et
Pierre Verdon.
Pour ceux qui aimeraient savoir si certains de ces personnages comp-
tent parmi leurs ancêtres, voici quelques détails généalogiques :
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subdivisé en trois lots ayant front sur la rue Notre-Dame. Parmi les
acquéreurs qui se sont manifestés avant , on peut compter les sieurs
Pierre Couturier dit Bourguignon, Jean-Baptiste Ménard, Bernard
Dumouchel, Jacques Périneau dit Lamarche, Jean Latouche dit Saint-
Jean et Philippe Lachenaye.
Qui étaient ces récollets dont l’ordre religieux, s’il existe toujours à travers
le monde, est cependant aujourd’hui disparu au Québec? Le mot « récollet »,
par définition, veut dire celui qui est recueilli. Ces moines réformés préco-
nisaient avant tout une vie austère et le recueillement intérieur.
Au départ, deux branches se formèrent, toutes deux en Espagne. La
première se réclamait de saint Augustin et les religieux s’appelaient les
augustins récollets. C’est sans doute à cause de cette appellation que la
rue qui longeait le côté ouest de leur propriété porta longtemps le nom
d’Augustine, avant de devenir la rue McGill, même si les récollets de la
Nouvelle-France provenaient de la branche franciscaine.
Les récollets passèrent en France sous le règne d’Henri IV qui les prit
sous sa protection. Avec la reconnaissance de Rome qui arriva peu de
temps après, l’ordre connut une notoriété remarquable et Champlain en
fit les premiers missionnaires de la Nouvelle-France où il les amena « à
pied d’œuvre ».
Après avoir été chassés sous le régime Kirke en , les récollets ne
revinrent pas immédiatement à Québec, à la suite du traité de Saint-
Germain-en-Laye. Cependant, sous l’influence de l’intendant Talon, ils
réapparurent en nombre en . Vers , à la suite de nombreuses
transactions, les religieux se retrouvèrent avec un vaste domaine en plein
cœur de Montréal, à même le reste des anciennes concessions que les
Gadois et Messier possédaient encore à l’intérieur des fortifications.
Après quelques échanges stratégiques, de façon à donner une configu-
ration plus pratique à leur domaine, en évitant par exemple d’avoir à
traverser la rue Notre-Dame, la propriété s’est retrouvée alors rapidement
limitée vers l’ouest par la rue Augustine, au nord, par la rue Notre-Dame,
à l’est, depuis la rue Notre-Dame jusqu’aux environs de l’actuelle rue des
Récollets, par la rue Saint-Pierre ; puis, plus au sud, par des emplacements
qui avaient front sur ladite rue Saint-Pierre. Enfin, l’extrémité sud
s’appuyait sur l’arrière des lots qui avaient été auparavant concédés en
front de la rue Saint-Paul. En , la construction de l’église était
terminée. On doit reconnaître que les Récollets ont apporté une contri-
bution significative à la vie montréalaise.
Après s’être bien installés, les religieux constatèrent avec le temps
qu’ils pouvaient disposer d’une partie du domaine qui leur avait été
octroyé, sans nuire à leurs besoins. C’est ainsi que, durant la troisième
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en par Olivier Berthelet et dont il ne reste que la façade aux fenêtres
éventrées, ce qui ne manque pas de donner un cachet particulier à
l’endroit. Jusqu’à un certain point, les trois emplacements d’origine
forment un tout que les descendances des premiers propriétaires pour-
raient considérer comme un patrimoine commun qui leur est propre.
D’après certains documents, les Cousineau, père et fils, auraient béné-
ficié de nombreux contrats pour la construction de maisons en pierre à
Montréal. Mais c’est vraiment à Saint-Laurent que les Cousineau ont fait
leur marque. En plus de ses fils, Jean-Baptiste Cousineau a eu plusieurs
filles, dont Marie-Renée qui épousa Jacques-Joseph Cheval dit Saint-
Jacques, originaire de Tournai en Belgique. Le mariage eut lieu à Saint-
Laurent même, le septembre et le couple s’installa dans les envi-
rons. Ce Cheval dit Saint-Jacques est l’ancêtre commun des Cheval et
des Saint-Jacques.
Les Cousineau, comme la plupart des fondateurs du village, sont sans
doute à l’origine de la culture du fameux melon qui fit la renommée de
Saint-Laurent et dont se délectaient les amateurs, non seulement à
Montréal, mais dans toute la Nouvelle-Angleterre jusqu’à New York. À
l’époque de la récolte, les habitants étaient si nombreux aux champs que
ceux de la côte des Neiges qui surplombait les terres basses apercevaient
au loin d’innombrables taches blanches. C’est alors qu’ils surnommèrent
les cultivateurs du village voisin « les dos blancs de Saint-Laurent », sobri-
quet qui leur restera jusqu’à nos jours. Mais les Cousineau n’ont pas que
cultivé des melons. Ils figurent parmi les familles pionnières qui ont fait
de Saint-Laurent l’agglomération que l’on connaît aujourd’hui.
Quant à Pierre et Gabriel Yvon dit Leber, qu’il ne faut pas confondre
avec d’autres Leber venus également de France, il s’agit du père et du
fils. Originaire de Bretagne, Pierre exerçait à Montréal le métier de
cordonnier.
Toujours en se dirigeant vers le sud, les terrains suivants appartenaient
respectivement à Joseph Parent () et à Étienne Rocbert (). À
l’époque où les Récollets concèdent un emplacement à Joseph Parent,
deux citoyens de Montréal, à peu près du même âge, portaient ce nom.
Des recherches plus poussées pourraient probablement permettre de
déterminer s’il s’agissait du fils de Pierre Parent ou de celui de Thomas
Parent qui ont tous deux eu un fils prénommé Joseph.
Quant au lieutenant Étienne Rocbert, sieur de la Morandière, il était
ingénieur de métier et fut plus tard promu capitaine de troupes. Son père
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(dont nous parlerons lorsqu’il sera question de la place Royale), son frère
Louis, de même que son propre fils Abel ont également embrassé la
carrière militaire. Ces Rocbert se sont tous les quatre mariés en Nouvelle-
France, y compris Abel, dont le mariage fut célébré à Varennes en ,
soit huit ans après le décès de son grand-père, à Rochefort en Charente-
Maritime. Toutefois, on ne retrace plus de Rocbert au pays par la suite.
Les descendants auraient-ils changé leur patronyme pour celui de Robert,
tout en n’ayant aucun lien de parenté avec les autres Robert venus de
France ? Abel et Louis n’ont-ils eu que des filles ? Ou encore, est-ce que
tous les Rocbert ont suivi l’aïeul Étienne qui était retourné mourir sur
sa terre natale ? Seules des recherches plus poussées pourraient le
déterminer.
Parmi les propriétaires qui ont succédé au capitaine de troupes, on
compte Simon Sanguinet, seigneur de La Salle, qui hérita de l’emplace-
ment en épousant Thérèse, la fille de Charles-Auguste Rhéaume qui avait
acheté, en , une partie du terrain que possédait le sieur Rocbert.
Simon et Thérèse Sanguinet sont les grands-parents des patriotes
Ambroise et Charles, exécutés à Montréal le janvier .
Avec les Parent et Rocbert, nous nous trouvons sur une partie des
terrains que l’entrepreneur Charles-Simon Delorme possédait au début
du e siècle, lesquels couvraient également le , rue Lemoyne et des
emplacements de la rue Sainte-Hélène. C’est ce Delorme ou ses enfants
qui construiront la plupart des immeubles qu’on y aperçoit aujourd’hui
et dont certains feront partie du patrimoine familial jusqu’en .
Malheureusement plutôt délabrées, les trois bâtisses actuelles de la rue
McGill (n et , et , et ) présentent des restaurants ou
des commerces plutôt bas de gamme.
Même si aucun autre habitant n’a pu acquérir un emplacement à même
le domaine des Récollets du temps de la Nouvelle-France, il peut quand
même être intéressant de savoir ce qu’il est advenu après la Conquête,
aussi bien des bâtiments que des jardins de la communauté.
L’église, le monastère, le cloître et les autres dépendances des frères
mineurs occupaient essentiellement la partie de leur domaine qui était
comprise entre les rues Notre-Dame et des Récollets, principalement du
côté est de la rue Sainte-Hélène. Une plaque commémorative sur l’édifice
portant le numéro de la rue Notre-Dame trace l’historique religieux
de l’endroit. On apprend que l’église et le monastère des Récollets ont
résisté au temps de à . Après la saisie des biens des religieux, ils
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qui décline. C’est la flammèche qui, abritée du vent par un étui métal-
lique, luit au bout de la perche de l’allumeur de réverbères. La nuit peut
venir. Par toute la ville, des becs de gaz jalonneront le parcours jusqu’au
petit matin. »
En remontant la rue Sainte-Hélène, les deux premiers édifices actuels
du côté ouest (- et ) n’ont pas été construits par le sieur
Delorme ou ses fils. En effet, le marchand Johnson Thompson a démoli
les immeubles qu’il avait acquis de la succession Delorme en , pour
y ériger, six ans plus tard, des magasins entrepôts.
Les quatre bâtiments suivants, qui datent de , ont aussi été
construits en vue d’un objectif similaire. C’est la veuve de John E. Mills
et ses quatre filles qui ont réalisé le projet pour les deux premiers (n
et -), alors que Jesse Joseph, un important promoteur immobilier
du temps, s’est chargé des deux autres.
Les six immeubles entre les rues Le Moyne et des Récollets ont connu,
depuis leur inauguration jusqu’au milieu du e siècle, un nombre impo-
sant de locataires grossistes et importateurs, notamment dans le domaine
des tissus et de la mercerie. Ils étaient accompagnés de chapeliers et de
marchands de fourrures. Aujourd’hui, ces magasins entrepôts ont été
transformés soit en bureaux, soit en condominiums.
À l’ouest de la rue Sainte-Hélène, jusqu’à l’emplacement que les
moines avaient cédé au sieur de Fontenelle en , trois bâtiments pren-
nent place entre les rues Notre-Dame et des Récollets.
C’est en novembre que la communauté presbytérienne se débar-
rasse de l’église Saint-Paul et de l’école adjacente, situées à l’ouest de la
rue Sainte-Hélène, en faveur de James Johnston qui démolit les bâtiments
existants pour construire l’édifice actuel sur le coin nord-ouest des rues
Sainte-Hélène et des Récollets. L’entreprise de Johnston et celle de Finley,
Smith & Co., qui lui succède rayonnèrent toutes deux dans le domaine
du textile et des produits dérivés ou connexes (dry goods), jusqu’au début
des années , alors que la société Affiliated Customs Brokers prend
la relève. Ces courtiers en douane l’occupent toujours en ce début du
e siècle.
Le et le de la rue Notre-Dame est un édifice de six étages qui
date d’une vingtaine d’années seulement et qui a remplacé deux des trois
immeubles que l’homme d’affaires James Ferrier avait fait construire en
La rue Saint-Pierre
ruines, pour construire les quatre édifices que l’on voit encore de nos
jours.
Si, à un certain moment, plusieurs locataires se partagent l’espace dispo-
nible, au tournant du e siècle, les épiciers en gros Laporte, Martin & Cie
loueront les quatre magasins entrepôts. En , la E. B. Eddy Company,
une importante société de pâtes et papiers et d’allumettes, achète tout le
complexe. Les édifices seront vendus en et, à partir de , ils feront
graduellement l’objet de restauration et de réaménagement.
La rue Saint-Paul
Pierre. Il n’était donc pas question d’y faire déboucher la rue Sainte-
Hélène. La profondeur des terrains en front de ladite rue Saint-Paul a
permis de créer, à même l’arrière de ces derniers, des emplacements ayant
front sur la nouvelle rue Le Moyne. Les deux rangées de bâtiments actuels
occupent donc des lots qui, autrefois, s’étendaient de la rue Saint-Paul
jusqu’au domaine des religieux.
C’est par leur mère Roberte Gadois que les frères François et Pierre
Prud’homme héritèrent chacun d’un emplacement de cent quinze pieds
de largeur, en front de la rue Saint-Paul. Les deux lots se faisaient face,
celui de François du côté nord de la rue et celui de Pierre du côté sud.
Les héritiers de ce dernier durent cependant se contenter d’une profon-
deur réduite à environ trente-huit pieds, lors de l’érection du mur d’en-
ceinte. Est-ce la raison pour laquelle soixante-sept pieds supplémentaires
ont été ajoutés à la largeur de l’emplacement, quelques années plus tard ?
Il est difficile de le confirmer, mais on sait qu’au début du e siècle
les héritiers de Pierre Prud’homme bénéficiaient, à même la commune,
d’une largeur totale de cent quatre-vingt-deux pieds en front de la rue
Saint-Paul.
Afin de garder une certaine continuité, il convient de terminer
d’abord l’étude des emplacements situés au nord de la rue Saint-Paul
entre les rues McGill et Saint-Pierre, avant de conclure avec ceux du côté
sud.
En , le sieur Jacques Cauchois deviendra propriétaire d’un lot de
soixante-six pieds de largeur, à l’est de celui du sieur François
Prud’homme. Ce Cauchois qui venait de Saint-André, en banlieue de
Rouen, était le beau-frère des deux Prud’homme, pour avoir épousé leur
sœur Élisabeth, une fille de Roberte Gadois. On peut dire que les descen-
dants Gadois ont profité de leur héritage, avant d’en disposer en faveur
de tiers. Ils ont sûrement habité sur la rue Saint-Paul, durant plusieurs
années. Suit, enfin, un terrain de soixante-dix pieds obtenu lui aussi en
, par le sieur Michel Lecourt.
Les trois emplacements en partant de la rue Augustine (McGill) ont
une profondeur qui se rend à peu près à la limite sud de la rue Le Moyne
actuelle. Quant aux deux terrains qui restent avant d’atteindre la rue
Saint-Pierre, ils vont rejoindre, le long de cette rue, celui que le sieur
Pierre-René Gatien dit Tourangeau avait acheté en . La rue Le Moyne
en grugera une partie pour déboucher sur la rue Saint-Pierre. Cette
ouverture, comme toute la rue Le Moyne d’ailleurs, permettra aux
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résidus de lots, de même qu’aux autres terrains vers l’ouest, d’avoir front
sur deux rues parallèles.
Le sieur Antoine Hatanville, un Parisien d’origine, obtint en le lot
voisin de celui du sieur Lecourt, alors que dès le sieur Claude Robutel
de Saint-André était devenu propriétaire de l’emplacement situé au coin
de la rue Saint-Pierre. Hatanville était un autre membre du clan Gadois,
pour avoir épousé Jeanne, la fille de Pierre, le « célèbre serrurier ».
En , le Cadastre officiel reflète toujours l’existence de lots adossés
qui font front, soit sur la rue Le Moyne, soit sur la rue Saint-Paul. Si
globalement, entre les rues McGill et Saint-Pierre, l’écart entre le terrier
et le cadastre demeure très mince, on arrive difficilement à faire coïncider
les limites des lots originaux avec celles d’aujourd’hui. La situation est
due, entre autres, au fait qu’il y a eu divers accommodements dans les
transactions à travers les siècles, en fonction des besoins des proprié-
taires. Il n’est évidemment pas question de remonter les chaînes de titres
pour expliquer les chevauchements. L’auteur fait simplement part des
différences afin d’établir la correspondance entre l’occupation présente
et celle du passé. Il regroupe également les bâtiments actuels selon leur
relation avec chacune des concessions créées au e siècle.
On peut dire sans hésitation que l’édifice Shaughnessy (-, rue
McGill) et les terrains vacants qui l’entourent du côté des rues Saint-Paul
et Le Moyne se trouvent entièrement sur la concession du sieur François
Prud’homme et sur le résidu de terrain du sieur de Saint-Michel dont il
a été question plus haut. Le Shaughnessy en impose par son volume, son
architecture et les dix étages qui le composent. Il faudra démolir deux
hôtels pour le construire, en .
C’est en tant que président du Canadian Pacific Railway et de la
Dorchester Realties que Thomas Shaughnessy entreprend les travaux.
Les titres de propriété seront transférés à cette dernière société, l’année
même de la réalisation du projet. Le rez-de-chaussée sera occupé par le
CPR Telegraph ainsi que par une succursale de la Banque de Montréal
qui y sera locataire durant quatre-vingts ans, soit jusqu’à tout récem-
ment. Il peut paraître surprenant qu’à partir de , alors que l’édifice
appartient toujours à la Dorchester Realties, l’autre grande société ferro-
viaire concurrente du pays y ait eu des bureaux pendant soixante et
un ans.
Entre et , l’homme d’affaires Jesse Joseph construira onze
magasins entrepôts, dans l’espace présentement couvert. Neuf d’entre
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eux occuperont tout le reste des terrains du côté sud de la rue Le Moyne
jusqu’à la rue Saint-Pierre, alors que les deux autres seront érigés sur la
rue Saint-Paul. Si les trois immeubles les plus à l’est sur Le Moyne sont
détruits par le grave incendie de janvier qui ravagea une trentaine
de bâtiments du Vieux-Montréal, monsieur Joseph qui, en plus de brasser
des affaires, sera très longtemps consul de Belgique à Montréal, ne se
découragea pas malgré son âge avancé. Il entreprit immédiatement la
reconstruction des trois édifices incendiés. De l’ensemble « Jesse Joseph »,
il reste dix immeubles, le onzième sur la rue Le Moyne étant aujourd’hui
disparu.
Grosso modo, le - de la rue Saint-Paul et les deux bâtiments
arrière sur la rue Lemoyne ( et ), de même que le lot vacant adja-
cent, occupent la concession du sieur Cauchois, tout en débordant d’une
vingtaine de pieds sur celle du sieur Lecourt. Dans l’édifice de six étages
de la rue Saint-Paul qui date de , des grossistes en chapeaux et en
fourrures se sont installés pour de nombreuses années, après son ouver-
ture. Plus tard, il sera aménagé en bureaux pour diverses entreprises.
Bien sûr, les deux bâtiments de la rue Le Moyne font partie de l’ensemble
construit par Jesse Joseph. En , ils logent des agences et des
résidents.
Sur Saint-Paul, nous arrivons aux deux seuls immeubles que Jesse
Joseph a construits sur cette rue et qui s’appuient à l’arrière sur deux
autres du même ensemble. Ces quatre magasins entrepôts se trouvent
érigés principalement sur l’ancien emplacement que possédait le sieur
Michel Lecourt, mais les deux du côté est (, rue Saint-Paul et , rue
Le Moyne) reposent également sur une lisière d’environ six pieds de
largeur, à même la concession du sieur Antoine Hatanville.
Les quatre bâtiments connaîtront de nombreux occupants. Mais vers
l’Empire Trading Company, une société importatrice de verrerie et
de porcelaine, s’installera à la fois, pour une quarantaine d’années, au
, rue Saint-Paul et dans les deux édifices de la rue Le Moyne ( et
). Depuis le début du présent millénaire, les trois immeubles ainsi que
le de la rue Saint-Paul se sont recyclés en vue d’une vocation à carac-
tère résidentiel.
Le -, rue Saint-Paul et le , rue Le Moyne occupent en largeur
à peu près le centre du lot du sieur Hatanville. Si l’édifice de la rue
Le Moyne fait partie de la série construite par Jesse Joseph, celui de la
rue Saint-Paul ne peut être dissocié de Donald Ross qui le fit construire
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. Il ne faut pas confondre cette rue Saint-Louis avec celle qui porte le même toponyme,
plus à l’est dans le Vieux-Montréal, au nord de la rue Notre-Dame.
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pièces sont inédites et « pour cela devraient être utiles aux archéologues
et aux historiens ». Il est fort probable d’ailleurs que les descriptions des
maisons avec leurs dimensions faciliteraient des fouilles.
À l’intérieur du Journal, on doit d’abord signaler une carte datée du
juillet montrant une partie de la ville de Montréal que Chaussegros
de Léry avait préparée en vue d’un redressement de la rue Saint-Paul, à
l’ouest de la rue Saint-Sulpice. Mais l’ingénieur, ayant pris connaissance
de ce qui venait d’arriver, teinta en jaune la partie dévastée, ce qui permet
de constater l’ampleur des dégâts. Puis, sur une liste, on dénombre cent
vingt-six maisons ou bâtiments détruits en totalité ou en partie. En fait,
l’énumération n’est pas complète puisque, dans une lettre du juin ,
le gouverneur Ramesay parle de cent trente-huit maisons détruites sans
compter les magasins et autres bâtiments. Cette liste n’en demeure pas
moins un document d’un grand intérêt puisqu’elle fournit le nom du
propriétaire et une brève description de chaque maison incendiée. Tout
en rapportant la très grande majorité des cas signalés par le Journal, le
présent ouvrage comporte l’avantage de montrer les emplacements des
bâtiments détruits. Il est alors possible d’établir le rapport entre le
premier concessionnaire, le propriétaire au moment de l’incendie et l’oc-
cupation en ce e siècle.
Bien entendu, la catastrophe a ému toute la Nouvelle-France et les
autorités n’ont pas tardé à réagir. Le numéro déjà cité de The Canadian
Antiquarian and Numismatic Journal fournit des copies des proclama-
tions et des avis qui ont été promulgués à cette occasion.
Peut-on imaginer le désarroi et la détresse des habitants ? Car, sans
compter la perte totale de l’hôpital et de ses dépendances, de même que
de nombreux autres bâtiments publics, chacun est atteint au plus profond
de lui-même. Ceux qui ont conservé leur maison intacte ont un frère,
une sœur, une fille ou un ami très proche qui a tout perdu dans l’héca-
tombe. Parfois, c’est toute « la parenté » qui a écopé. Heureusement, on
ne déplore aucun décès. Mais tous et chacun sont vraiment meurtris et
écrasés par les événements.
C’est la basse-ville qui souffrit et, comme le mentionne Charlevoix
dans son journal historique, la basse-ville comprenait alors « l’Hôtel-
Dieu, les magasins du roi » et c’était « aussi le quartier de presque tous
les marchands ». Ce qui a sans doute causé une grave pénurie.
Si Faillon ne s’étend pas trop sur le drame des habitants, le Journal
rapporte que l’ampleur du désastre fut vite connue à Québec et que
SE C T E U R N UM ÉR O 2
par étapes au site des anciennes fortifications nord de la ville. Ici, la rue
Saint-Paul poursuit sa course à même la commune et les lots qui la
bordent tirent leur origine de celle-ci. Nous sommes dans l’un des
secteurs les plus complexes pour la compréhension de l’organisation du
territoire. Toutefois, l’analyse attentive des documents anciens permet
de s’y retrouver et de bien repérer les concessions originales et les lots
qui en sont dérivés.
On a vu de quelle façon la commune a été créée et comment les terres
furent distribuées par la suite, à partir de sa limite nord. Si plusieurs
concessions sont concernées dans l’espace compris entre les rues Saint-
Pierre et Saint-François-Xavier, c’est celle du sieur Robert le Cavalier,
accordée par Maisonneuve en , qui domine par la superficie qu’elle
couvre. Même si le terrier l’orthographie ainsi, il s’agit en fait de Robert
Cavelier dit Deslauriers. Venu de Cherbourg en Normandie, celui-ci
épousera Adriane Duvivier, un mois après avoir obtenu son lot. On ne
doit pas confondre ce concessionnaire avec le célèbre explorateur Robert
Cavelier de La Salle, qui n’arrivera en Nouvelle-France qu’une quinzaine
d’années plus tard.
Au départ, la concession mesurait deux arpents de largeur sur vingt
de profondeur et dépassait largement vers le nord le site des futures forti-
fications. C’est à même l’extrémité sud de cette propriété que le second
cimetière de Ville-Marie fut installé, un peu avant . De deux arpents
de largeur sur un demi de profondeur, il couvrait un espace compris entre
la rue Saint-Pierre et un point situé un peu à l’est de la rue Saint-Nicolas
actuelle. Il faut dire que le premier lieu de sépulture sur l’extrémité de la
pointe à Callière s’était révélé un choix désastreux. En effet, il subissait
chaque année les inconvénients de la crue printanière. Le deuxième site,
celui qui nous intéresse ici, connut cependant une existence encore plus
brève et on s’orienta rapidement vers l’emplacement qu’occupe en bonne
partie la basilique actuelle, sur la rue Notre-Dame.
La description des emplacements, la compilation des données et leur
juxtaposition sur le cadastre moderne démontrent que la commune
formait bien une lisière de terrain d’un arpent ou cent quatre-vingt-douze
pieds de largeur. Pourtant, deux textes dans le terrier publié en par
la Société historique de Montréal viennent infirmer cette assertion, du
moins dans la partie qui longe le terrain du nouveau cimetière.
Le premier texte se retrouve à la page de la transcription dudit
terrier et porte sur le lot A. On y spécifie que ce lot d’un demi-arpent
L E V IE U X-M O N T R É A L
’
. Il est probable que ce soit la maison sise sur l’ancienne concession du sieur de Bois-
briant qui avait exactement cette largeur de quarante-huit pieds ; les dimensions des
autres bâtiments ne justifiant pas leur présence sur un terrain aussi large en front de la
rue Saint-Paul, à moins de s’agir d’une construction secondaire située à l’arrière.
D’ailleurs, le fournil pouvait fort bien être à cet endroit.
SE C T E U R N UM ÉR O 2
à l’aubergiste Raphaël Beauvais. Il est peu probable que ce fut à cet endroit
que celui-ci tenait son établissement, lors du sinistre. Le bâtiment en bois
de deux étages du sieur Beauvais avait deux cheminées et mesurait vingt
et un pieds sur Saint-Paul et trente-deux pieds le long de Saint-Nicolas.
Quelques années plus tard, il construira un hôtel sur les ruines d’un autre
emplacement situé sur le coin sud-ouest de la place Royale et de la rue
Saint-Paul.
En , sept bâtiments et une aire de stationnement occupent les
anciennes concessions qui étaient situées au sud de la rue Saint-Paul,
entre les rues Saint-Pierre et Saint-Nicolas. À peu de chose près, les deux
premières constructions, de même que les deux autres qui viennent s’y
appuyer à l’arrière, ainsi que l’aire de stationnement qui suit vers l’est
occupent les lots que possédaient les trois frères Décarie, à la fin du e
siècle, sauf la bande de terrain cédée par Louis au sieur de la Découverte,
en .
C’est l’aubergiste François Benoît qui fera construire, en , l’im-
meuble qui fait le coin des rues Saint-Pierre et Saint-Paul. Mais rien
n’indique que le bâtiment a pu servir d’hôtel. Il s’agissait plutôt d’une
maison magasin qui restera dans la famille durant plus de cinquante ans.
Selon les plans de Pierre-Louis Morin, nous sommes, par transposition,
exactement à l’endroit où Jean Lehoux dit Descaris avait construit la
maison familiale, en . Dans le bâtiment que l’aubergiste Benoît a fait
ériger, la maison Via le monde inc. du cinéaste Daniel Bertolino occupe
le haut (n ), alors qu’au rez-de-chaussée on retrouve le restaurant Les
Pyrénées et le marché La Villette. Enfin, au , rue Saint-Pierre, le même
édifice abrite l’agence maritime Navitrans.
Quant au bâtiment suivant (), il date de . Malheureusement, il
ne paie pas de mine et il gagnerait à être restauré. Nous sommes sur le
terrain que possédait Michel Décarie, alors que le stationnement voisin
occupe le résidu demeuré aux mains de son frère Louis, après la cession
de .
C’est un bel édifice qui occupe la partie sud de l’emplacement que le
sieur Paul Décarie avait reçu en héritage de son père. Situé sur le coin de
la rue Saint-Pierre et de la place D’Youville, il porte le nom du marchand
qui l’a fait construire en . Laurent Chaput était un importateur en
épicerie et en vins. Plus tard, le bâtiment servira longtemps à la réfrigé-
ration, avant de devenir un immeuble à bureaux, à partir de . Au
de la place D’Youville loge la galerie d’art Nicolin et Gublin.
L E V IE U X-M O N T R É A L
la ruelle qui le borne sur son côté est (Evans Court) couvrent approxi-
mativement le lot du sieur Michel Lehoux dit Décarie.
Nous arrivons ensuite à un édifice imposant de six étages. Le Coristine
tient son nom de son premier occupant James Coristine, un marchand de
fourrure qui procéda peu à peu à l’acquisition des terrains à partir de .
Il réalisa le bâtiment actuel par étapes, entre et . Avec ses
pieds carrés d’espaces locatifs sur six étages, il constitue l’un des plus
imposants du genre à Montréal. Le Coristine présente trois façades sur
rue, soit le , rue Saint-Paul Ouest, le , rue Saint-Nicolas et le , rue
Le Moyne. Inutile de dire qu’il couvre plusieurs concessions dont celles
des sieurs Louis Décarie, Fézeret, Gadois et Raimbault, de même qu’une
partie des terrains des sieurs Decouagne et Migeon de Bransac. Ce dernier
avait encore agrandi son domaine en , à même la terre du sieur
Cavelier.
Le -, rue Le Moyne et le -, rue Saint-Pierre complètent le
pourtour du quadrilatère borné à l’est par la rue Saint-Nicolas et au nord
par la rue Le Moyne. L’édifice en pierre de huit étages ne manque pas de
caractère au niveau architectural. En front de la rue Le Moyne, il occupe
la pleine largeur du lot que le sieur de Bransac avait obtenu à même le
cimetière, en . C’est la firme Beardmore, reconnue dans la fabrication
de produits en cuir, qui construisit l’immeuble actuel, en . Si la compa-
gnie vend le bâtiment trente-cinq ans plus tard, celle-ci demeurera encore
longtemps occupée majoritairement par des locataires actifs dans le
domaine du cuir. Mais la vocation de l’immeuble évoluera rapidement à
partir de , avec l’ouverture du restaurant Les Serres, aujourd’hui fermé,
et la présence d’entreprises du monde des communications.
Le côté nord de la rue Le Moyne donne sur l’arrière de l’édifice du
Montreal Board of Trade, dont l’adresse principale se trouve au de
la rue du Saint-Sacrement. Nous sommes sur la terre du sieur Cavelier
et, plus particulièrement, sur la partie que ce dernier a vendue au sieur
Migeon de Bransac en , et qui aboutira, une vingtaine d’années plus
tard, aux mains du sieur Louis Liénard de Beaujeu, à titre d’héritier, pour
avoir épousé en Denise-Thérèse Migeon de Bransac. Vers l’est, à
même l’ancienne terre de Cavelier, l’immeuble occupe des parties de lots
que le sieur René Decouagne avait achetées successivement en et
en , du sieur Cavelier et de ses héritiers.
Revenons sur la rue Saint-Paul, à l’emplacement qu’avait obtenu
Bénigne Basset dans un échange avec les seigneurs. En fait, le -,
L E V IE U X-M O N T R É A L
Jeanne Cavelier
Guillaume Cavelier
pierre le nom de « Sun Life Annex », alors que l’autre (, rue Notre-Dame
et , rue Saint-Alexis) s’appelle le Sun Life Building. Aussi paradoxal
que cela puisse paraître, l’annexe a été construite en premier. C’est que,
lorsque la célèbre compagnie d’assurance vie érigea son siège social en
, le bâtiment voisin existait depuis onze ans déjà. La Sun Life l’achète
en et le considère comme une annexe à son bâtiment du coin de la
rue Saint-Alexis. Mais son succès financier l’incite rapidement à transférer
ses activités sur la rue Metcalfe. Le nouveau Sun Life Building devient
l’immeuble le plus imposant de l’empire britannique, tant par sa masse
que par sa hauteur. Il gardera ce titre au moins une trentaine d’années. Il
faut dire que la tendance, aussi bien en Angleterre que dans les anciennes
colonies, ne visait pas la construction en hauteur, autant que les villes
américaines de New York et de Chicago.
Le Sun Life Annex avait été construit par un marchand de matériel
ferroviaire du nom de Samuel Waddell. En plus d’y avoir ses propres
bureaux, celui-ci loue des espaces à plusieurs sociétés, certaines nais-
santes comme la compagnie de téléphone Bell, d’autres d’un âge véné-
rable comme la London Assurance Corporation, fondée à Londres en
. La Mutual Life Insurance Company y aura aussi ses bureaux, durant
un certain temps.
Les nombreux éléments décoratifs architecturaux des deux édifices
sont d’une beauté remarquable. C’est l’artiste Henri Beaumont qui
exécuta les sculptures du Sun Life Building. Malheureusement, un
incendie ravagea grandement les deux immeubles en et détruisit
irrémédiablement l’architecture intérieure. Mais la restauration des
façades sera particulièrement bien réussie.
Louis Cavelier
Bertrand Arnaud
Une des dizaines de gargouilles de l’édifice Cunard au coin des rues Saint-Jean
et de l’Hôpital.
d’agrandir son lot vers le nord, mais ce prolongement a été « ensuite, sans
avoir égard à cette promesse, concédé par monsieur de Queylus, à Jean
Martinet de Fontblanche », en .
Voyons comment les frères Milot ont disposé du lot de leur père. Il
semble cependant que ce soit Jacques seul qui ait présidé aux ventes du
patrimoine familial, probablement après le décès de son frère Charles.
Sur le côté ouest de la rue Saint-Éloi, un nommé Pierre Desaulniers
achètera, en , un espace mesurant plus de cent soixante-quinze pieds
de longueur, en partant de la commune. Par la suite, le sieur Desaulniers
subdivisera le lot pour former quatre emplacements dont les acquéreurs,
en se dirigeant du sud vers le nord, seront Nicolas puis Jean-Baptiste
Varin dit Lapistole, Joseph Marcheteau dit Desnoyers et Raymond Baby.
Le fils de Jean Milot attendra ensuite sept ans avant de vendre le reste
jusqu’au coin de la rue du Saint-Sacrement, soit un premier lot de vingt-
six pieds et demi au sieur Laurent Marcheteau dit Desnoyers et le suivant
de même largeur, au sieur Sébastien Magué dit Lacroix.
Du côté est de la rue Saint-Éloi, Jacques Milot vendra, comme suit,
cette portion de la concession de son père : le premier lot au nord de l’an-
cienne commune ira au sieur Jacques Quesnel dit Fontblanche, avec
cinquante pieds de façade. Le terrain suivant, qui a quarante-neuf pieds
de largeur, sera concédé à Pierre Marcheteau dit Desnoyers, le frère des
deux autres du même patronyme qui ont acheté des emplacements juste
en face. Un nommé Barte se portera acquéreur du lot au nord et, le
janvier , le sieur François Mailhot achètera le terrain du coin. Ce
dernier mesure quarante-sept pieds sur la rue Saint-Éloi sur cinquante-
cinq le long de la rue du Saint-Sacrement.
Au moment de l’incendie de , c’est le sieur Claude Dudevoir, époux
de Barbe Cardinal et huissier royal, qui possédait l’emplacement situé
au coin nord-ouest des rues Saint-Paul et Saint-Éloi. Sa maison en bois
d’un étage avec deux cheminées occupait la pleine largeur du lot.
Malheureusement, elle n’a pas échappé aux flammes. Quant à la demeure
que Jacques Milot s’était fait construire sur le coin opposé et qu’il possé-
dait toujours au moment du sinistre, elle connut un sort identique. De
même matériau, cette maison occupait, elle aussi, la largeur totale du lot
avec une profondeur de quarante-cinq pieds.
Parmi les autres maisons incendiées sur la concession originale de
Jean Milot, on en relève deux au nom de Pierre Trottier dit Desaulniers,
sur la rue Saint-Éloi. En pierre, elles mesuraient cinquante-cinq pieds
SE C T E U R N UM ÉR O 2
jusqu’en . Mais, entre les deux guerres mondiales, la Dow Jones Ltd.
y a eu aussi ses bureaux. Il faut dire qu’alors la Bourse de Montréal n’était
pas loin de l’autre côté de la rue, pour cette société qui a laissé son nom
à un indice boursier encore fort reconnu de nos jours, sur tous les
marchés. Ce sont surtout des sociétés de graphisme et de publicité qui
ont pris la relève. Enfin, pour relier le présent au passé, on peut noter que
nous sommes ici sur le site qu’Étienne-Joseph Martel avait cédé au sieur
Antoine Thunay dit Dufresne, cinq ans après l’incendie de son
auberge.
Quant au - du Saint-Sacrement, juste à côté et situé sur une
partie du lot dont avait hérité le fils Martel, il fut construit en . C’est
à cet endroit que la Montreal Telegraph connaîtra ses débuts à
partir de , avant de s’installer dans le bâtiment du coin de la rue
Saint-François-Xavier.
Le sieur de Fontblanche garda son lot jusqu’au août , alors qu’il le
cédera à un certain Livillier. Deux jours plus tard, le lot sera « transporté »
au notaire Raimbault qui, toujours aux aguets, avait dû sans doute flairer
une bonne affaire. L’homme de loi subdivisera ensuite sa nouvelle acqui-
sition en trois emplacements ayant front sur la rue de l’Hôpital. Le plus
à l’ouest sera vendu au sieur Pothier Dubuisson, le lot voisin ira au sieur
Antoine Puyperoux dit Lafosse et le dernier, au sieur François Serat dit
Coquillard qui cédera son terrain à son voisin Puyperoux moins d’un
an après son acquisition, soit en .
Plusieurs Pothier se sont établis en Nouvelle-France, mais il s’agit ici,
de toute évidence, de Guillaume qui épousera Jeanne-Élisabeth, la fille
du célèbre ingénieur et cartographe Gédéon de Catalogne. Antoine
Puyperoux, venu de la Guyenne, était notaire royal et avait épousé Fran-
çoise Petit de Boismorel, à son premier mariage. Quant à François Serat,
le fils de Pierre, un maçon de son métier originaire de la région de
La Rochelle, il était le mari de Françoise Bardet.
Lotbinière s’en est porté acquéreur. Chose pour le moins curieuse, une
plaque sur le bâtiment nous rappelle qu’il s’agit de la « Maison de
résidence du marquis Michel Chartier de Lotbinière (-), chevalier
de Saint-Louis, ingénieur du roi et compagnon d’armes de Montcalm et
de Lévis ». Mais le lecteur aura sans doute remarqué que ce bâtiment a
été érigé douze ans après le décès du marquis !
Jusqu’au janvier , la maison servait de siège social à la compa-
gnie de transport maritime Robert Reford, l’une des plus anciennes dans
ce domaine. Les affaires ont été plutôt prospères et, il y a cent ans, la
famille Reford figurait parmi les plus à l’aise de Montréal. Il existe un
lien entre le site de la rue du Saint-Sacrement et l’un des plus beaux
endroits du Québec. En effet, c’est Elsie, épouse de Robert Reford et sœur
de Lord Mount Stephen, qui entreprit, vers , l’aménagement des
Jardins de Métis, aux portes de la Gaspésie. Madame Reford y consacra
ses étés durant trente ans, manifestant un esprit créateur qui enchante
chaque année des milliers de visiteurs.
champ et qu’il laisserait son nom aux célèbres « plaines » qui sont plutôt
un plateau, en fait. Quant à Toussaint Périneau, le fils d’un Limousin
prénommé Jacques, il s’était installé sur la rue Notre-Dame, auprès de
la demeure de sa belle-mère Marguerite Aubuchon, alors veuve de Jean
Cusson.
Une concession de soixante pieds de largeur s’était intercalée, en ,
entre les lots des sieurs Forget et Desroches. Elle fut accordée à l’auber-
giste Abraham Bouat qui achètera ensuite, des héritiers Desroches, l’es-
pace restant jusqu’à la rue Saint-François-Xavier. Par après, le sieur Bouat
vendra un terrain à l’angle des rues Notre-Dame et Saint-François-
Xavier, au sieur François de La Fargue dit Sainte-Foy. Le reste sera liquidé
beaucoup plus tard par les héritiers Bouat, sauf un emplacement de
soixante pieds de largeur en front de la rue de l’Hôpital, qui restera à
leur mère au moment du partage.
C’est François-Marie Bouat, lieutenant général comme son père
Abraham, qui dressera, le lendemain du drame, le premier rapport avec
les recommandations nécessaires sur l’incendie du juin . Il peut
être intéressant d’en lire le texte, tel qu’il a été publié par le Journal déjà
cité. Cela nous renseigne sur les coutumes du temps et les rapides
mesures de sécurité qui ont été déployées.
L’an mil sept cens vingt et un et le vingtième jour de juin, nous François
Marie Bouat, Conseiller du Roy, et son lieutenant général, au Siège de la
Juridiction Royalle de montréal, Sur ce qui nous a été représenté par le
procureur du Roy en ce siège que les Cheminées et murs des maisons et
battimens qui ont été brullez dans l’incendie arrivée en cette ville le jour
d’hier, sont si en dommagez que la plus part menacent ruine et sont prêtes
à tomber et que même trois ou quatre des cheminées sont déjà tombées ce
jourd’huy à quoy il est de la dernière conséquence d’avoir attention pour
prévenir les accidens qui en pourroient arriver, nous requérant de nous
transporter sur les lieux avec des maitre maçons pour faire faire en notre
présence la visite des murs et cheminées et pour ensuitte être par nous
ordonné sur la démolition qui sera nécessaire à faire. Nous étant pour ce
transporter à la Basse Ville avec ledit procureur du Roy, et notre greffier, et
mandé d’office à la requisition dudit procureur du roy, les nommés Pierre
Janson dit Lapalme, Jean Baptiste Deguire, Jean Daveluy dit Laroze et Jean
Payet dit St-Amour, tous maitres maçons et tailleurs de pierre de cette ville,
a été procédé devant nous à ladite visite par lesdits experts maitres maçons,
Serment préablement par eux fait… de laquelle visite ils nous ont fait rapport
sur chaque maison…
L E V IE U X-M O N T R É A L
le vendre dès . Une autre firme de courtage bien connue, L.G.
Beaubien, l’achètera à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. À partir
de , l’immeuble servira de bureaux à différents groupes de profession-
nels. L’occupation correspond, en gros, à la partie sud du lot que possédait
Pierre Lestage, en , à même la concession de Claude Perrot.
Avant , deux bâtiments avec front sur la rue Notre-Dame se parta-
geaient l’espace que le sieur Deguire dit Larose avait acquis originelle-
ment, au e siècle. Mais Thomas Jenkins les démolira, pour les
remplacer par trois magasins entrepôts qui, s’ils ont perdu leur vocation
première, subsistent toujours, quoique les constructions du centre et de
l’est ne forment plus maintenant qu’une seule propriété (-). Vers
l’ouest (), plusieurs lecteurs doivent se rappeler du long couloir central
à l’intérieur de ce bâtiment longiforme (le ), bordé de comptoirs
surélevés où de nombreux juges et procureurs venaient s’attabler le midi
devant leur « drink », juchés sur leur tabouret et attendant leur assiette.
Certains avaient parfois « oublié » de laisser leur toge au vestiaire. Pour
quelques-uns, c’était peut-être la dernière occasion en vue d’un règle-
ment hors cour. Tout au fond, on atteignait la salle à manger avec son
décor vieillot, où se dégustaient les meilleurs plats de fruits de mer du
Vieux-Montréal. Mais Chez Delmo n’est plus…
Une façade très étroite en front de la rue Notre-Dame s’élève sur sept
étages au coin de la rue Saint-François-Xavier. Longeant cette dernière,
le bâtiment s’élargit plus au nord et déborde sur l’ancienne concession
du sieur Perrot. Mais, avant d’élaborer davantage sur la construction
même, il serait opportun de voir comment a évolué cet espace foncier,
au tournant du e siècle.
On a vu que le sieur Nicolas Godé père avait obtenu la lisière de terrain
dans un échange avec les messieurs. Après être passée aux mains de
Nicolas Godé fils, elle sera achetée, en , par le sieur Jean-Baptiste
Demers qui, vers , en vendra une partie qui donnait sur la rue Saint-
Jacques. L’acquéreur, un marchand du nom de Mathurin Guillet, était le
fils de Pierre Guillet, venu de la Saintonge.
Après avoir procédé à une saisie des biens du sieur Pierre Lamothe
qui, entretemps, s’était porté acquéreur du résidu jusqu’à la rue Notre-
Dame, les Sulpiciens comprirent vite que, s’ils voulaient créer des empla-
cements en front de la rue Saint-François-Xavier, une profondeur de
vingt-trois pieds et demi n’était vraiment pas pratique. Aussi, procédè-
rent-ils à un échange en , avec le sieur Jean-Baptiste Deguire dit
L E V IE U X-M O N T R É A L
l’octroi des concessions, puissent avoir eu une telle hésitation sur leurs
droits de propriété.
La situation pourrait s’expliquer comme suit. Parmi les concessions
accordées par Maisonneuve au milieu du e siècle, deux concernent
la place d’Armes, telle que nous la connaissons de nos jours. Celle qui a
été obtenue en par Jean de Saint-Père couvre un peu plus que la
demie sud, alors que le reste se trouve sur celle qui a été attribuée à
Urbain Tessier dit Lavigne l’année suivante.
Or, en , Agathe de Saint-Père, qui avait épousé le sieur Le Gardeur
de Repentigny, s’est départie de l’héritage reçu de son père, à l’occasion
d’un contrat d’échange avec les messieurs, qui accordait en contrepartie,
aux deux époux, un terrain situé à l’angle des rues Saint-François-Xavier
et Saint-Paul. Par ailleurs, on ne retrace aucun document attestant que
les héritiers Tessier dit Lavigne aient rétrocédé la partie de la place
d’Armes qui leur appartenait. Ce qui n’empêcha pas les sulpiciens
L E V IE U X-M O N T R É A L
réquisitionné pour les remparts. Il s’agit des sieurs Jean Moreau dit
Jolicœur, Gabriel Cardinaux, Michel Leblond, Jacques Picard, Louis
Plessis-Bélair et René Cuillerier.
Sur Saint-Jacques, tout le terrain compris entre l’ancien siège social
de la Banque de Montréal et la rue Saint-François-Xavier se trouve
occupé par un édifice à bureau de quatorze étages que cette institution
financière a fait construire en . Il couvre non seulement tous les
terrains des anciennes concessions, mais il se rend aussi en profondeur,
juaqu’à la rue Saint-Antoine.
Le sieur Urbain Tessier dit Lavigne était originaire de Québec. On expli-
quera, au secteur numéro de l’ouvrage, ce qui a bien pu inciter ce maçon
constructeur à quitter sa ville pour venir s’établir à Montréal, alors que la
Grande Recrue n’était pas encore arrivée et que les quelques rares colons
qui s’aventuraient hors du fort payaient cher leur audace. Les sieurs de
Saint-Père, Godé et Boudard seront assassinés tout près. Quant à Jean Chicot
dit Sicotte, il survivra, mais non sans avoir subi un horrible scalpe.
Urbain Tessier pourrait sans doute mériter le titre de premier promo-
teur immobilier de Montréal. D’après les plans de l’arpenteur Pierre-
Louis Morin, il ne tarda pas à construire une dizaine de maisons aussi
bien sur sa concession que sur celle qu’avait obtenue son beau-père
Jacques Archambault, juste à l’est.
à la terre que possédait Nicolas Godé, père. En , le sieur Jean Viau
dit Lespérance s’en porta acquéreur. Il est plus probable que ce Viau dit
Lespérance se prénommait Jacques plutôt que Jean. C’est un prêtre, Louis
La Faye, qui achètera sa concession deux ans plus tard, pour s’associer
ensuite au sulpicien Souart et céder le tout à un nommé Mathurin Roul-
lier, dans le but de fonder ce qu’on appela « les petites écoles ». Mais, en
, le sieur Roullier transférera la propriété à la Paroisse de Montréal,
avant qu’elle n’aboutisse au séminaire, sous la direction de Dollier de
Casson.
Trop grand pour les besoins d’alors, l’espace fut partiellement morcelé
en . Quatre emplacements virent le jour, deux en front de la rue Saint-
Jacques et les deux autres en front de la rue Saint-François-Xavier. Afin
de ne pas trop ennuyer le lecteur avec les mesures, signalons simplement
que les largeurs variaient entre trente-deux et quarante-trois pieds et que
les profondeurs oscillaient entre quarante-trois et quarante-neuf pieds.
Le terrain du coin fut acquis par le sieur Pierre Janson (Jeanson) dit
Lapalme durant l’année . Dès l’année suivante, ce lot changea de
mains deux fois, d’abord en faveur du sieur Pierre Biron, puis du sieur
Paul Dumouchel. Auparavant, le terrain voisin sur Saint-Jacques avait
été vendu au sieur Nicolas Houé dit Laliberté. Mais le sieur Dumouchel
se montra intéressé à agrandir le sien et il l’achètera dès .
Quant aux deux terrains de la rue Saint-François-Xavier, ils ont été
vendus en : c’est Anne Lemyre, la veuve du sieur Rupalais, qui est
devenue propriétaire du lot situé derrière celui du sieur Jeanson dit
Lapalme, alors que le sieur Pierre Biron prit l’emplacement voisin, juste
au sud. Ce n’est que beaucoup plus tard que les messieurs disposeront de
l’espace restant qui supportait à la fois les écoles et les écuries des
seigneurs.
Moins de la moitié du site de la Banque Canadienne Nationale,
devenue depuis la fusion la Banque Nationale, se retrouve sur la
concession du sieur Godé. L’édifice repose aussi, en grande part, sur deux
autres concessions d’origine. La plus au nord, coincée entre celle du sieur
Godé et celle du sieur Tessier dit Lavigne, a d’abord appartenu au sieur
François Bailly, à partir de . Elle ne contenait qu’un quart d’arpent
en superficie et se trouvait bornée à l’est par la place d’Armes d’aujourd’hui,
c’est-à-dire la concession du sieur Tessier. L’autre concession qui concerne
la banque, c’est celle du sieur de Saint-Père qui, en plus, traversait la place
d’Armes d’ouest en est.
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les personnages qui ont pu marquer les sites au fil des siècles. C’est donc
plutôt brièvement que les plus grands trésors patrimoniaux sont traités.
Leur description et leur histoire ont été abondamment élaborées dans
des centaines sinon des milliers d’écrits et de supports photographiques,
cinématographiques ou autres.
On pourrait croire que les terrains sur lesquels reposent ces trésors
ont toujours été la propriété des messieurs, les seigneurs de l’île de
Montréal. Mais pas tout à fait. En effet, les sulpiciens débarquent à Ville-
Marie en et ce n’est que six ans plus tard que la seigneurie de
Montréal leur sera confiée. Bien plus, construite en pleine rue Notre-
Dame, la première église n’ouvrira ses portes qu’en . Avant l’arrivée
des prêtres de Saint-Sulpice, les célébrations du culte avaient lieu en la
chapelle du Fort, à la pointe à Callière et, de à , les offices parois-
siaux se dérouleront à la chapelle de l’Hôtel-Dieu de Jeanne Mance.
Comme on l’a constaté précédemment, Maisonneuve avait eu le temps
de distribuer des concessions, souvent assez grandes pour être considé-
rées du domaine rural plutôt que du territoire urbain. Cette distribution
des terres avait commencé avant l’arrivée de la Grande Recrue et s’est
accentuée à partir de , en faveur des nouveaux venus
C’est ainsi que l’emprise de la rue Saint-François-Xavier, les lots qui
ont front sur celle-ci du côté est, une certaine étendue des jardins des
sulpiciens, de même que le séminaire ont fait partie d’une concession
accordée dès au sieur Nicolas Godé (Gaudet) père, un maître menui-
sier originaire du Perche, et arrivé à Ville-Marie accompagné de son
épouse, Françoise Gadois, le mai . Le couple assista à la célèbre
messe du père Vimont le même jour. Malheureusement, le sieur Godé
et son gendre, Jean de Saint-Père, seront lâchement assassinés le
octobre , par une bande d’Iroquois. C’est donc avec les héritiers Godé
que les messieurs devront négocier la reprise de la terre, soit Jacques
Lemoine qui avait épousé Mathurine, la veuve du malheureux Jean de
Saint-Père, Jean Desroches le mari de Françoise Godé, ainsi que Nicolas
fils. La concession, qui mesurait théoriquement quatre cent quatre-vingts
pieds de profondeur, traversait la rue Notre-Dame. Elle avait été partagée
en parties égales entre les trois héritiers, le décembre . Le sieur
Lemoine a vendu sa part aux seigneurs en , alors que le sieur Desro-
ches attendra en et que le sieur Godé ne s’exécutera qu’un an plus
tard, lors d’un échange par lequel il acquerra du terrain du côté ouest de
la rue Saint-François-Xavier. La partie au nord de la rue Notre-Dame de
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acquise des seigneurs auprès des héritiers Godé de même que certains
terrains du côté sud passeront plus tard aux mains d’intérêts privés, mais
les sulpiciens en garderont l’essentiel pour réaliser leurs objectifs. En plus
d’une partie de la terre Godé, on doit ajouter au domaine de la Fabrique
de la paroisse de Montréal d’autres concessions, de même qu’un cimetière
qui occupait alors une partie de l’endroit où se dressent aujourd’hui le
presbytère et la basilique. Il faut aussi se rappeler qu’en recevant la
seigneurie de l’île de Montréal les prêtres de Saint-Sulpice avaient
automatiquement obtenu les droits sur les terres non distribuées. Enfin,
pour bien comprendre les faits, on doit également retenir que la première
église paroissiale fut construite dans l’axe de la rue Notre-Dame et non
sur le site de la basilique.
Si les bâtiments actuels sont bien connus du public et font l’émer-
veillement aussi bien des Montréalais que des étrangers qui les visitent,
le grand jardin des sulpiciens, à l’intérieur de l’enclos, leur est beaucoup
moins familier. Cette oasis de paix fait contraste avec le bruyant envi-
ronnement urbain et même avec la magnifique basilique et son flot
continu de touristes et d’événements souvent grandioses, mais qui n’in-
citent pas particulièrement au recueillement, ni ne favorisent la quiétude
de l’âme, ce qui nous fait tant défaut. Et pourtant, il y a tout près de trois
cent cinquante ans, c’est en ce jardin, alors la ferme familiale, ou du
moins tout près – car on ne sait pas exactement à quel endroit de la terre
se trouvait la maison où ils travaillaient – que Nicolas Godé, Jean de
Saint-Père et leur assistant, Jacques Noël, ont connu une fin horrible.
En dehors des sites de culte et communautaires, les sulpiciens possè-
dent trois édifices commerciaux en front de la rue Saint-François-Xavier,
à partir de la rue Notre-Dame. Sans doute inspirés par le sens des affaires
manifesté un peu plus tôt, par les religieuses Hospitalières de Saint-
Joseph, les messieurs les construisirent, jugeant plus rentable, à long
terme, la collecte des loyers qu’une somme unique tirée d’une vente de
terrain. En , ils exploitent toujours les bâtiments et demeurent proba-
blement les plus anciens propriétaires fonciers d’emplacements occupés
par des immeubles commerciaux, sur toute l’étendue de l’île de Montréal.
Construit en , le de la rue Notre-Dame Ouest et le de la rue
Saint-François-Xavier constituent le plus récent des trois immeubles.
D’abord occupé par différentes banques, le rez-de-chaussée a connu des
restaurants comme locataires à partir de . Le dernier de la liste est
spécialisé dans la cuisine japonaise. Le Nagoya se considère comme
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maître dans l’art du sushi. Des compagnies d’assurance, puis des archi-
tectes, occuperont longtemps les étages supérieurs. Ils seront remplacés
par des sociétés de publicité et de design. Le second édifice (-, rue
Saint-François-Xavier), qui présente une façade d’une centaine de pieds,
a longtemps logé des courtiers en valeurs mobilières. Dans le chapitre
qui suit, on comprendra pourquoi. Quant au , beaucoup plus étroit
et le plus ancien des trois édifices, il fut lié avant tout au monde de la
finance et des communications, notamment avec la présence de la
Dominion Telegrah Co. Aujourd’hui, le rez-de-chaussée est occupé par
un épicier-dépanneur.
Monument en l’honneur
de saint Joseph dans le
jardin des sulpiciens.
L E V IE U X-M O N T R É A L
On s’imagine bien que le triste incendie de , qui a connu son origine
à l’Hôtel-Dieu, n’a pas frappé que le côté sud de la rue Saint-Paul. En fait,
il détruisit tous les bâtiments situés de part et d’autre de cette artère, sur
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une distance d’au moins mille deux cents pieds. Par ailleurs, si le côté
ouest de la rue Saint-Sulpice, à l’exception de l’édifice au coin de la rue
Saint-Paul, fut épargné, il n’en a pas été de même pour le côté est de la
rue Saint-François-Xavier. Les maisons ont été détruites jusqu’au théâtre
Centaur, c’est-à-dire jusqu’à la concession qu’avait obtenue le sieur
Lamoureux dit Saint-Germain en . Au moment du drame, c’est le
sieur Maurice Blondeau qui en était devenu propriétaire, après avoir
épousé Suzanne Charbonnier Lamoureux dit Saint-Germain. La maison
en bois de deux étages avec deux cheminées, qui lui venait de sa femme,
mesurait trente-huit pieds de façade sur vingt-trois de profondeur. On
verra dans un autre chapitre que le sieur Blondeau perdit aussi sa propre
résidence et une dépendance sur la rue Saint-Paul.
Toujours en se dirigeant vers le sud, nous passons devant quatre conces-
sions accordées respectivement aux sieurs Jean Mars en , François
Audoin dit Laverdure, un soldat du régiment de Carignan, en , Jean
Bourlis dit Lebreton en et Jean-Baptiste Maublanc dit Saint-Amant,
conjointement concessionnaire avec le sieur Étienne Chancerel, en .
Les quatre emplacements originaux sont aujourd’hui occupés par un
seul bâtiment (-) construit d’abord sur trois étages, en . C’est le
juge Joseph-Amable Berthelot qui est alors propriétaire du terrain. Plus
tard, sa succession fera ajouter deux étages au bâtiment dont l’ensemble
est occupé actuellement par le restaurant et hôtel Bonaparte.
En , les quatre concessions initiales appartenaient, dans l’ordre,
aux sieurs Louis Lebeau, Pierre Saint-Cosme, Jacques Bigot dit La Giro-
flée et Jean-Baptiste Amyot. En fait, la maison en bois de deux étages
érigée sur la première concession était devenue la propriété des enfants
du menuisier Louis Lebeau. Quant à la modeste maison en bois du sieur
Saint Cosme, elle ne mesurait que dix-sept pieds sur dix-huit.
En ce qui a trait au lot juste au sud, le sieur François-Marie Bouat
n’écrit que « La Giroflée » dans son rapport d’incendie, pour désigner
le propriétaire d’une maison en bois de deux étages avec deux feux,
mesurant près de vingt-quatre pieds de largeur sur quarante-trois de
profondeur. Selon une remarque du Journal, il s’agirait « probablement »
du sieur François Santon dit La Giroflée, alors que l’auteur penche plutôt
pour Jacques Bigot dit La Giroflée, qui était le véritable propriétaire du
lot depuis .
La quatrième concession sur laquelle le juge Berthelot a fait construire
un grand bâtiment en appartenait, depuis quatre ans, au sieur Jean-
L E V IE U X-M O N T R É A L
nouveau séminaire, sur la rue Notre-Dame. Mais ici s’arrêtent les spécu-
lations de l’auteur. Aux armes, historiens !
C’est Pierre Raimbault, procureur du roi et notaire royal, qui prendra
possession de l’ancien séminaire, le février , pour en faire sa rési-
dence, et, trente ans plus tard, le sieur Jean-Baptiste Le Comte Dupré se
portera acquéreur du site. Puis, près de cent ans s’écouleront avant que
les sulpiciens ne le rachètent. Mais ce ne sera pas le séminaire qu’ils ont
connu, car il aura été détruit dans l’incendie de juin Ce sera plutôt
le deuxième « château » du sieur Raimbault. Malheureusement, ce dernier
aussi sera incendié, dix ans après son acquisition par les messieurs de
Saint-Sulpice. Nous sommes alors en .
Le célèbre notaire aura été durement éprouvé en , avec la perte du
corps central de l’édifice et de trois annexes importantes, sans compter
une étable et une écurie. Selon le rapport et le plan déjà cités, le bâtiment
principal en pierre de deux étages avec quatre foyers mesurait soixante-
sept pieds sur trente-deux. Une deuxième maison en pierre en annexe,
de vingt-deux pieds sur trente-deux et qui avait aussi quatre cheminées,
fut totalement détruite. Les pertes comprenaient également deux autres
maisons, l’une en pierre et la seconde en bois, auxquelles il convient
d’ajouter les dépendances déjà mentionnées. Les installations sont clai-
rement indiquées sur le plan de Chaussegros de Léry et l’orientation du
« château » légèrement à angle avec la rue Saint-Paul est étrangement celle
que l’on constate pour l’édifice qui couvre l’emplacement de nos jours.
Ce bâtiment (n ), construit immédiatement après l’incendie de ,
est l’œuvre de l’architecte John Ostell. On se serait peut-être servi, du
moins en partie et à deux reprises, des fondations du premier séminaire
de Ville-Marie. L’immeuble fait partie de l’ensemble Frothingham &
Workmann. Une porte cochère permet d’accéder à un édifice résidentiel
rattaché au complexe Habitat Place Royale limitée dont le bâtiment prin-
cipal, traité plus haut, est au - de la rue Saint-Paul.
Si Nicolas Godé avait obtenu, dès , la concession que l’on sait,
d’autres grands terrains, à l’intérieur du périmètre qui fait l’objet du
présent chapitre, avaient aussi été accordés avant l’arrivée des prêtres de
Saint-Sulpice. En partant de l’entrée du « château » de Maisonneuve, il
reste trois concessions originales avant d’atteindre la rue Saint-Sulpice.
La première, avec soixante-quinze pieds de front sur Saint-Paul, fut
accordée en plusieurs contrats, entre et , aux sieurs Jacques
Testard de la Forest, Jacques Le Ber de Senneville et Charles Le Moyne.
L E V IE U X-M O N T R É A L
Il faut dire que les liens, aussi bien familiaux que de carrière, étaient très
forts entre ces trois personnages. Le sieur Le Ber, originaire de la région
de Rouen, avait épousé Jeanne Le Moyne en . Le fils du chevalier
Testard, également de Rouen, qui se prénommait Jacques lui aussi et était
capitaine comme son père, sera un fidèle compagnon de Pierre Le Moyne
d’Iberville. C’est finalement Marie Pournain, la veuve de Testard, qui
héritera de la concession et la passera en à son second mari, le sieur
Jacques Nolan de Lamarque. Le nouveau couple scindera cet héritage
beaucoup plus tard, en en vendant une partie au sieur de la Pipardière,
en .
Aujourd’hui, deux édifices en pierre de trois étages et demi occupent
la concession du sieur Testard de la Forest (- et ). Ils datent de
(circa) et les rez-de-chaussée abritent respectivement le Café Saint-
Paul et un restaurant de cuisine belge qui porte un nom évocateur : Le
Moulinsart. Tintin et le capitaine Haddock y sont à l’honneur.
La concession suivante a d’abord appartenu conjointement aux négo-
ciants de fourrures, les sieurs Jacques Le Ber et Charles Le Moyne. Par
la suite, elle a été amputée d’une partie en faveur du lot situé à l’ouest et
les mesures deviennent plus ambiguës. Le Ber demeure une figure impor-
tante dans l’histoire de la Ville-Marie naissante. Il est l’un des fondateurs
de la Compagnie du Nord. Si certains de ses enfants ont connu des voies
fort différentes, ils n’en ont pas moins laissé leurs traces. Sa fille Jeanne
est la célèbre recluse qui vécut sa vie monastique à l’intérieur du couvent
fondé par Marguerite Bourgeoys. Quant à son fils Pierre, il demeure
sûrement le premier artiste peintre né à Montréal. On lui doit d’avoir
décoré de ses œuvres une chapelle qu’il a lui-même construite à la pointe
Saint-Charles. Un célèbre portrait de la fondatrice des sœurs de la
Congrégation de Notre-Dame lui est attribué.
Charles Le Moyne bénéficia seul, à partir de , de la dernière des
trois concessions. Celle-ci mesurait environ cent soixante-huit pieds en
front de la rue Saint-Paul par cent cinquante le long de la rue Saint-
Sulpice. Il la conservera en entier jusqu’à sa mort survenue en .
Au décès de son épouse, les héritiers Le Moyne ne tardèrent pas à la
morceler. La majeure partie fut vendue au sieur Antoine Pacaud, en .
Elle mesurait cent vingt-trois pieds sur Saint-Paul par toute la profondeur
de la concession originale. Un an auparavant, quatre emplacements
avaient été consentis de la façon suivante : vingt-deux pieds de front
sur Saint-Paul, au sieur Isaac Christin dit Saint-Amour ; le coin des rues
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Sous ce titre, nous traitons les espaces situés de part et d’autre de la place
Royale, dans un ensemble compris entre les rues Saint-François-Xavier
et Saint-Sulpice, depuis la rue Saint-Paul jusqu’à la place D’Youville et,
plus à l’est, jusqu’à la rue de la Commune.
On se rappellera que nous nous trouvons ici sur le territoire de la
commune qui était bornée, vers le sud, à la fois par la petite rivière, soit
la rivière Saint-Pierre jusqu’à son embouchure, et par la grande rivière,
le fleuve Saint-Laurent. Les fortifications longeaient les deux cours d’eau
SE C T E U R N UM ÉR O 3
Deux édifices occupent de nos jours le quadrilatère borné par les rues
Saint-François-Xavier, Saint-Paul, Chagouamigon et de la Capitale. Celui
du côté ouest est connu comme étant l’immeuble Benjamin-Berthelet,
du nom du médecin qui l’a fait construire en . Mais celui-ci, qui avait
obtenu l’emplacement de sa mère l’année précédente, n’en a pas joui
longtemps. Saisi par le shérif, le bâtiment sera vendu, en , à nul autre
qu’Antoine-Olivier Berthelet, le frère du docteur. Cette fois, il restera
dans la famille jusqu’en .
Cette année-là, le fourreur Samuel Wiseman en prend possession et s’y
installe. Depuis , le restaurant français Le Bourlingueur occupe le
rez-de-chaussée avec entrée sur la rue Saint-François-Xavier, alors que les
étages abritent des bureaux. L’immeuble Benjamin-Berthelet se trouve
érigé sur les lots qui ont appartenu aux sieurs Leduc dit Souligny et Pivert
dit le Parisien, ainsi que sur la demie ouest de celui du sieur Desrivières.
Quant à l’édifice voisin (-, rue Saint-Paul), qui se rend jusqu’à
la ruelle Chagouamigon, elle repose sur l’autre partie du lot du sieur
Desrivières ainsi que sur les terrains des sieurs Decouagne et Sainte-
Marie. L’immeuble fut construit par le quincaillier John Frothingham,
en . C’est une belle structure en pierre avec lucarnes, où s’est installé,
il y a quelques années, un commerce de meubles du Québec, d’inspira-
tion du e siècle.
Au sud de la rue de la Capitale, les bâtiments actuels se rendent jusqu’à
la place D’Youville. Longeant la rue Saint-François-Xavier, il y a la maison
Pierre-Berthelet. Le nom réservé au bâtiment vient du fait que Pierre
Berthelet en fut le propriétaire constructeur. Décédé en , celui-ci
était vraisemblablement le père du docteur Benjamin. L’édifice même
date de (circa). Il occupe essentiellement le terrain que possédait le
sieur Pierre Mallet en . Restauré à plusieurs reprises, il a su garder
son cachet d’autrefois. Avant d’être recyclé en copropriétés, il a long-
temps servi d’auberge dont le premier tenancier s’appelait
Joseph Tourelle. Il faut dire que la proximité du port favorisait ce genre
d’établissement.
La maison qui suit vers l’est (, place D’Youville) se trouve érigée
sur l’emplacement du sieur Michel Massé. Elle est connue sous le nom
de Joseph-Athanase-Normandeau, le propriétaire qui l’a fait construire
en , après l’incendie de sa demeure, une maison en pierre de trois
étages qui avait appartenu à Jean-Baptiste Deleigne et à Geneviève Piette,
les parents de son épouse Thérèse Deleigne. De l’année de sa construc-
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tion jusqu’à la fin des années , les Normandeau la loueront à des
aubergistes. Puis ce seront des commerçants qui les remplaceront. Mais
la succession Normandeau conservera l’immeuble jusqu’en . Recy-
clée en copropriété dans les années , la maison a retrouvé sa vocation
résidentielle de départ.
Un troisième bâtiment en front de la place D’Youville se trouve sur le
lot étroit qu’a possédé madame de Repentigny, à l’extrémité est de la
concession d’origine accordée au sieur Jacques Le Moyne, de même que
sur une partie de la concession obtenue par le sieur Charles Alavoine,
dans un échange avec les messieurs, en . Le est une station de
pompage faisant partie de l’ensemble qui englobe le musée de Pointe-à-
Callière. Considéré comme un « vestige », le bâtiment n’en conserve pas
moins son apparence et son système de pompage d’origine.
concession du sieur Guyon Després et, à chaque extrémité, sur une partie
de celles des sieurs Alavoine et Rocbert.
C’est avec pompes et enthousiasme que Lionel Chevrier, alors ministre
canadien des Transports, présidera à l’ouverture d’un nouvel édifice promis
à un brillant avenir avec l’achèvement de la canalisation du Saint-Laurent.
Mais, là comme à Mirabel, le rêve du ministère des Transports du Canada
s’évanouira avec le temps. Les retombées économiques du grand projet de
la voie maritime ne se refléteront pas vraiment sur la métropole. En ,
les Œuvres de la Maison du père acquerront le bâtiment pour héberger les
hommes en difficulté. Heureusement, le coûteux immeuble aura au moins
servi au mieux-être des défavorisés de la société.
La place Royale
Entre et , cinq concessions originales furent accordées par les
messieurs, depuis la place Royale jusqu’à la rue Saint-Sulpice. Si l’ordre
suivi quant à leur emplacement, ne laisse aucun doute, il a fallu composer
davantage avec les mesures. Mais une analyse poussée des textes du
terrier en relation avec l’espace réel entre les deux extrémités permet de
bien s’y retrouver.
D’ouest en est, on note, en premier, la concession du sieur Charles
d’Ailleboust accordée en deux contrats distincts, passés en et en
. S’il y a contradiction quant à la largeur du lot le long de la rue Saint-
Paul, il demeurerait toutefois difficile de lui donner une mesure supé-
rieure à cinquante-trois pieds.
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L’espace suivant a été cédé en , aux sieurs Jacques Le Ber et Charles
Le Moyne, qui avaient pourtant été bien servis du côté nord de la rue
Saint-Paul, à partir de . La concession avait une largeur de soixante-
quatre pieds, une mesure qui, suivant analyse, comprenait nécessaire-
ment une bande de terrain de douze pieds que le voisin Bénigne Basset
avait dû consentir à remettre, à la demande des seigneurs, sur l’espace
qu’il avait obtenu un an plus tôt. Le notaire ne bénéficiera plus que de
trente-cinq pieds en largeur.
Les deux derniers terrains, qui mesuraient soixante-quatre pieds
chacun, sont allés respectivement au sieur Pierre Picoté de Belestre et au
sieur Jean-Baptiste Migeon de Bransac. Les cinq concessions seront légè-
rement réduites dans leur profondeur par l’ouverture de la rue de la
Capitale.
En , les Le Ber et Le Moyne achètent la concession du sieur d’Aille-
boust. Ils la vendent ensuite au marchand Louis Le Comte Dupré,
quatorze ans plus tard. C’est ce dernier qui procédera au morcellement
pour créer des lots en front de la place Royale. Il vendra deux terrains
en , dont celui au coin de la rue de la Capitale, à son beau-frère, Jean-
Baptiste Charly dit Saint-Ange. Le sieur Dupré habitera sur le reste, au
coin de la rue Saint-Paul, jusqu’à son décès. C’est son épouse, Catherine
de Saint-Georges, qui encaissera la perte d’une maison en pierre de deux
étages avec quatre cheminées, en . La maison mesurait trente-neuf
pieds de façade sur trente-deux de profondeur.
Le février , la pauvre femme demande au tribunal l’autorisation
de vendre le terrain et les débris d’une maison qu’elle possède au coin de
la place d’Armes (place Royale) et de la rue Saint-Paul, et qui avait été
consumée par l’incendie du mois de juin précédent. Un coup l’autorisa-
tion accordée, madame Dupré en profitera pour subdiviser son empla-
cement en deux lots. Celui du coin sera vendu au sieur Antoine Magnan
dit Lespérance et Jean-Baptiste Charly dit Saint-Ange, le beau-frère de
Catherine Dupré, se portera acquéreur du résidu. Le sieur Charly avait
lui-même subi la perte de sa maison en pierre de deux étages avec quatre
feux au coin de la place Royale et la rue de la Capitale.
Au fur et à mesure que nous avançons vers l’est, nous approchons de
plus en plus du foyer d’où le terrible incendie tirait son origine. Les biens
que possédait le sieur Jean-Baptiste Hervieux sur la concession qu’il avait
achetée des sieurs Le Ber et Le Moyne, en , n’échappèrent pas à la
grande calamité. L’important négociant qu’il était devait entreposer
SE C T E U R N UM ÉR O 3
La rue de la Commune
Mais qui étaient ces gens qui, à un moment ou l’autre, ont eu pignon sur
rue ou, du moins, ont possédé une concession d’origine, au sud de la rue
Saint-Paul du temps de la Nouvelle-France ? Lorsqu’il a été question des
concessions au nord de la rue Saint-Paul, nous avons brièvement parlé de
Jacques Le Ber. L’auteur juge qu’il peut être intéressant d’ajouter quelques
mots sur certains autres personnages qui figurent parmi ceux qui ont pu
marquer l’extrême partie sud du territoire dans le secteur numéro .
D’Ailleboust
Charles Le Moyne
Bénigne Basset
C’est du sud vers le nord que nous parcourons ce nouveau secteur. Avant
qu’une concession ne soit accordée aux Dames de la Congrégation, en
, l’octroi d’emplacements par les seigneurs sur le côté sud de la rue
Saint-Paul, entre les rues Saint-Sulpice et Saint-Jean-Baptiste, avait connu
un départ plutôt lent. En fait, deux terrains seulement avaient été
concédés vers . Pour sa part, le sieur André Charly dit Saint-
Ange (Saint-Onge) avait obtenu un emplacement de quarante-huit pieds
de front sur Saint-Paul, tout près de la rue Saint-Jean-Baptiste, qui ne
sera ouverte que beaucoup plus tard. Entretemps, cette concession
sera élargie vers l’est, pour déborder dans le secteur numéro . Quant à
l’emplacement vers l’ouest, il est allé conjointement aux sieurs Claude
Fézeret et Jacques Picot dit Labrie, pour une largeur de quarante et un
pieds.
Un troisième emplacement sera cédé à un particulier par les Dames
de la Congrégation elles-mêmes, en . L’acquéreur, du nom de Pothier,
obtient ainsi un lot de quarante pieds de largeur sur Saint-Paul, juste à
l’ouest de celui des sieurs Fézeret et Picot dit Labrie.
Avant que d’autres terrains soient aliénés, une transaction détermi-
nante s’est effectuée en , entre les Hospitalières de Saint-Joseph et
les Dames de la Congrégation. Ces dernières voulaient s’installer du côté
nord de la rue Saint-Paul. Elles cèdent alors tout l’espace qui leur
appartient du côté sud, pour obtenir, en retour, celui qui est contigu à
l’hôpital, de l’autre côté de la rue. Les Hospitalières deviennent ainsi
seules propriétaires de tout le terrain compris entre la rue Saint-Sulpice
et la concession du sieur Pothier, ce qui correspond à une largeur de près
de quatre cents pieds.
Mais la liquidation ne tardera pas à démarrer. Elle commencera en
cette même année , avec la vente d’une bande de six pieds et demi
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. The Canadian and Numismatic Journal, Third Series, April , volume XII, no .
SE C T E U R N UM ÉR O 4
Sur Saint-Paul
Sur Saint-Sulpice
Après la concession du sieur Duplessis dit Faber ou, si l’on veut, celle
du sieur des Chaillons de Saint-Ours, il ne reste qu’une lisière de treize
pieds du terrain que les Hospitalières de Saint-Joseph avait acquis des
Dames de la Congrégation en . On a vu, plus haut, que tout de suite
après l’acquisition le voisin des religieuses, le sieur Pothier, a acheté une
première bande d’une largeur de six pieds et demi, pour élargir le lot
qu’il avait obtenu des dites Dames de la Congrégation, en .
En , c’est nul autre que le sieur Thomas Joncaire qui se porte acqué-
reur de la propriété du sieur Pothier. Presque aussitôt, il demande aux
Hospitalières de pouvoir accroître la largeur de son lot d’un autre six
pieds et demi supplémentaire. Ce qui lui fut consenti en .
Un « » couronne une vieille plaque commémorative apposée sur
l’édifice qui occupe actuellement le site, en l’honneur de celui qui fut
sans doute le meilleur ambassadeur qu’ont eu les Français auprès des
Amérindiens. Mais ce n’est certainement pas le sieur Joncaire qui occu-
pait ces lieux en . Il faudra attendre encore dix-sept ans !
À son arrivée à Montréal en , en tant qu’officier des troupes de la
Marine, Joncaire n’est à vrai dire qu’un adolescent qui est rapidement
envoyé au combat où il est fait prisonnier par la tribu des Senecas. En
, il marie Madeleine Leguay de Beaulieu et s’installe ensuite sur la
rue Saint-Paul. Puis, en , Joncaire quitte Montréal pour assumer le
commandement du fort Niagara où il décédera une vingtaine d’années
plus tard. Pourtant, il apparaît toujours comme propriétaire de sa maison
de la rue Saint-Paul au moment du grand incendie, puisqu’il figure sur
la liste des sinistrés qui ont perdu leur demeure. Le bâtiment du sieur
Joncaire y est décrit comme étant une grande maison en pierre de deux
étages avec trois cheminées. Elle mesurait quarante-trois pieds en front
de la rue Saint-Paul, sur trente-quatre de profondeur.
Le de la rue Saint-Paul Ouest est un peu en retrait du boulevard
Saint-Laurent. Le ministère de la Culture et des Communications lui a
donné le nom de « Maison Platt », ce qui est tout à fait convenable
puisqu’il fait partie d’un ensemble que madame Elizabeth Mittleberger
Platt a fait construire au e siècle. Les édifices de la rue Saint-Paul et
de la rue de la Commune (n ) sont érigés simultanément en , alors
que les deux dépendances qui les relient viendront quelques années plus
tard. L’une d’entre elles longe le boulevard Saint-Laurent et l’autre se
trouve dans l’arrière-cour.
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Le présent chapitre couvre l’espace compris, d’est en ouest, entre les rues
Saint-Jean-Baptiste et Saint-Sulpice, depuis la rue Notre-Dame jusqu’à
la rue Saint-Paul. Si le quadrilatère a été longtemps dominé par la
présence des religieuses Hospitalières et des sœurs de la Congrégation,
plusieurs concessions sur son pourtour ont été accordées à de simples
citoyens, au début de la colonie naissante. Avant de parcourir les terrains
de l’Hôtel-Dieu et ceux du couvent des sœurs, commençons par ces
concessions. Plusieurs se trouvaient situées le long de la rue Notre-Dame
et s’adossaient aux jardins de l’hôpital. D’autres longeaient la rue Saint-
Sulpice (Saint-Joseph).
Le juillet , le sieur Pierre Pigeon s’est vu octroyer un terrain
carré de quarante-trois pieds de côté, à l’angle des rues Notre-Dame et
Saint-Sulpice. Immédiatement au sud, le sieur Jean Roy obtenait un lot
de mêmes dimensions. S’il est à peu près certain qu’il s’agisse bien ici du
sieur Pierre Pigeon qui avait épousé Jeanne Godart à Montréal, en ,
il demeure plus difficile de déterminer quel est le Jean Roy qui a obtenu
une concession sur la rue Saint-Sulpice, car ils furent nombreux en
Nouvelle-France ceux qui ont porté ce nom au e siècle, aussi bien
dans la région de Montréal que dans la région de Québec.
Actuellement, le coin est occupé par un bâtiment en pierre de dix étages
construit en et connu sous le nom d’Édifice Duluth, en l’honneur
de Daniel Greysolon dit sieur du Luth qui, selon certains documents,
aurait vécu à cet endroit en . Ce qui est fort possible, mais le terrier
SE C T E U R N UM ÉR O 4
était arrivé de Normandie en et avait épousé, trois ans plus tard,
Thècle, une fille de Toussaint Hunault, venu à Montréal avec la Grande
Recrue. En , on le retrouve de l’autre côté du fleuve, le long de la rive,
un peu à l’est du chemin Chambly, sur une terre de deux arpents sur
vingt, acquise de Michel Dubuc. Mais le sieur Chartrand vend son lot
au sieur Antoine Combeth dit Desjardins le septembre et rentre
à Montréal. Il ne serait donc pas étonnant qu’il ait élu domicile sur la rue
Notre-Dame, car ce n’est qu’après son second mariage avec Jeanne Matou
en la paroisse de Montréal, en , qu’il quittera définitivement la ville,
pour aller s’établir du côté du Sault-au-Récollet.
L’emplacement de Coron supporte de nos jours un bâtiment en pierre
de quatre étages. Durant un certain nombre d’années, et ce, jusqu’au
milieu des années , le rez-de-chaussée abritait un bistro français fort
sympathique qui portait le nom de Restaurant à l’ombre de l’église.
Malheureusement, aujourd’hui, on n’y retrouve que des boutiques sans
âme.
En cette même année , le lot de quarante-trois pieds qui suit alla
au sieur Jean Auger dit Baron, qui avait épousé Louise Grisard avant de
quitter la France pour s’établir à Ville-Marie. Les deux propriétaires
subséquents de l’emplacement ont marqué, chacun de façon différente,
l’histoire de Montréal au e siècle. Il s’agit de René Cuillerier et d’An-
toine Adhémar. Le premier a connu une aventure fâcheuse dont il s’est
finalement tiré, mais non sans avoir connu beaucoup de souffrances.
Vers , la ville prenait forme. Les pierres devenant un élément impor-
tant pour la construction, on avait découvert un îlot, près de l’île Sainte-
Hélène, dont les abords pouvaient fournir le précieux matériau en abon-
dance. Le octobre , treize colons partent, sous la direction du
sulpicien Vignal, en quête de pierres qui serviront dans l’érection des
bâtiments. René Cuillerier est du nombre. À peine débarqué, le groupe
est assailli par une trentaine d’Iroquois. Deux Montréalistes, comme on
appelait les habitants de la ville à l’époque, sont tués sur place, pendant
que cinq sont faits prisonniers, dont l’abbé Vignal et notre héros. Les
Amérindiens ne lésinent pas et décident de brûler un prisonnier sur l’îlot
même. Quant au Sulpicien, il sera tué à Laprairie deux jours plus tard.
C’est alors qu’un des prisonniers restants est amené par les Agniers et
les deux autres, dont René Cuillerier, par les Oneiouts. Arrivés au campe-
ment après huit jours de marche, on commence à les traiter de façon
barbare et Cuillerier a les ongles arrachés. Puis le conseil de bande
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d’abord été concédé aux sieurs Simon Cardinault et Pierre Laurin fils,
pour être ensuite retourné aux seigneurs et aboutir finalement aux mains
des sœurs de la Congrégation. Et le terrier d’ajouter : « Tout le terrain […]
est occupé aujourd’hui par la chapelle Notre-Dame-des-Victoires, dans
la cour des sœurs […]. » Simon Cardinault (Cardinal) est l’ancêtre du
notaire Joseph-Narcisse Cardinal, l’un des deux patriotes exécutés à
Montréal le décembres . La chapelle de la communauté sera démolie
en avril , les sœurs adoptant plutôt un nouveau lieu de culte adjacent
à leur couvent, près de la rue Le Royer, dans l’axe du futur boulevard
Saint-Laurent. Une inscription au coin des deux artères nous signale que
la chapelle Notre-Dame-de-la-Pitié se trouvait jadis dans ledit axe.
Le vocable Notre-Dame-de-la-Pitié ne tient pas son origine d’une
chapelle, mais bien d’une statue de la Vierge qui a connu une histoire
plutôt fantastique, En bois, l’œuvre, reconnue comme miraculeuse, a été
sculptée au e siècle, par l’un des nombreux artistes italiens attirés à
Avignon par la présence des papes. Elle fit l’objet d’une grande vénéra-
tion de la part des fidèles de Saint-Didier d’Avignon durant près de cinq
siècles. Entretemps, soit en , au début de la Révolution française, elle
fut soustraite à la profanation par une demoiselle Paladère qui la remit,
dans un moment plus calme, au curé de Saint-Didier, un sulpicien du
nom de Fabris. Destinée à une niche trop grande, elle fut substituée par
une statue de plus grande taille et l’originale fut remise, à titre personnel,
à monsieur Fabris. L’historien Faillon, lui-même un sulpicien, voulut que
la vraie Piéta soit offerte aux dames de la Congrégation de Montréal.
Après plusieurs années d’insistance de la part de monsieur Faillon, la
statue arriva à Montréal.
Plus tard, non seulement la nouvelle chapelle du couvent reçut-elle la
statue, mais elle en adopta aussi le nom. L’édifice sera détruit en ,
lorsque les Dames de la Congrégation décideront d’emménager dans leur
nouvelle maison mère sur la rue Sherbrooke. En fait, la démolition du
beau couvent et la destruction de ses magnifiques jardins avaient surtout
pour but de se rendre aux arguments du milieu des affaires qui souhaitait
depuis longtemps voir s’ouvrir un large accès vers le port. Bien sûr, la
statue échappa au marteau des démolisseurs et fut transférée dans le
nouveau couvent de la rue Sherbrooke.
Sauf sur la rue Saint-Paul, on connaît peu de chose sur les quelques
concessionnaires qui ont pu avoir, temporairement, des droits sur le
domaine des Dames de la Congrégation, avant qu’elles n’en prennent
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tisse beaucoup plus tard aux mains des Dames de la Congrégation, lors
d’un échange avec les Hospitalières. Comme elles l’avaient fait avec la
concession du sieur Charly dit Saint-Onge, les sœurs procéderont à sa
subdivision, en créant, cette fois, deux lots sur la rue Saint-Paul qu’elles
vendront et un troisième en arrière, qu’elles garderont et qui se trouve
alors enclavé à l’intérieur de leur domaine. Les lots vendus mesurent
chacun quarante-trois pieds en front de la rue Saint-Paul. Le premier
emplacement au coin de ce qui deviendra, presque deux siècles plus tard,
le boulevard Saint-Laurent sera d’abord vendu, en , au sieur Pierre
Perthuis, sans doute un descendant de celui qui avait déjà eu pignon sur
la rue Notre-Dame. Mais le terrain lui sera retiré peu après par les
sœurs, pour être revendu en , au sieur Pierre Guy. Le lot à l’ouest
ira au sieur Jean-Baptiste Auger, sans que l’on connaisse la date de
transaction.
Construit en , le bâtiment en pierre sur le coin (-, rue Saint-Paul
et , boul. Saint-Laurent) est occupé au rez-de-chaussée par le restau-
rant Moldavie et les étages tiennent lieu de logements, Le - voisin, qui
date de , a plus de caractère. Nous sommes sur la partie sud-ouest
du lot du premier concessionnaire de , le sieur Jean Chapleau. En
, une petite maison en pierre occupait le terrain, alors clôturé d’un
côté par l’Hôtel-Dieu et, à l’arrière, par les Dames de la Congrégation.
Avait-elle été érigée par Jean-Baptiste Auger, un siècle plus tôt ? On ne
le saura sans doute jamais. Mais, après s’en être porté acquéreur, Fran-
çois Perrin la démolira pour la remplacer par l’immeuble en pierre de
trois étages que nous connaissons aujourd’hui. La Guilde graphique en
occupe le rez-de-chaussée.
Nous arrivons au grand emplacement où Jeanne Mance construira
son hôpital qui, après un développement que l’on peut considérer comme
fulgurant, grâce aux religieuses Hospitalières, fut transporté sur la rue
des Pins et n’a pas cessé de s’agrandir par la suite. Depuis les origines,
bien des événements ont eu lieu, pas toujours heureux, comme le grave
incendie de qui causa tant de pertes matérielles aux habitants de
Montréal. L’histoire de l’Hôtel-Dieu est bien connue et les Hospitalières
ont su en perpétuer le souvenir. L’auteur n’a donc pas l’intention de
« refaire » l’histoire. Toutefois, comme pour la majeure partie des maisons
sinistrées, il décrit ici, très sommairement, les dégâts subis par les
Hospitalières, tels qu’ils ont été compilés par le sieur François-Marie
Bouat, le lendemain du drame. On a pris connaissance déjà des pertes
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propres ateliers d’orfèvrerie. Elle possède l’« art » de déposer des grappes
de raisin sur les pièces d’argenterie qui ornent la table des riches et des
grands hôtels des e et e siècles. Combien de nouveaux mariés ont
reçu en cadeau des sucriers, des plats de service et des chandeliers parés
des célèbres grappes de Cassidy’s ! Le -, rue Saint-Paul et , rue
Saint-Sulpice terminent l’alignement sud du projet Les Cours Le Royer.
Comme pour l’immeuble précédent, Victor Bourgeau en sera l’architecte
concepteur. Lui aussi logea l’armée anglaise avant que la compagnie
Hodgson-Summer ne l’occupe à partir de , pour une durée de soixante-
trois ans, soit jusqu’au beau milieu de la grande crise économique.
En nous dirigeant maintenant vers le nord, le long de la rue Saint-
Sulpice, nous apercevons, de l’autre côté des deux derniers bâtiments
étudiés, deux autres immeubles regroupant autrefois une série de maga-
sins entrepôts et donnant à la fois sur les cours Le Royer et la rue de
Brésoles. Le plus à l’ouest (-, rue Saint-Sulpice et -, rue de
Brésoles) fut construit dix ans après les deux précédents, selon les plans
de l’architecte Michel Laurent qui s’est alors largement inspiré de ceux-ci
pour réaliser son projet. C’est un grossiste en alimentation qui louera
sur une longue période. Puis, à partir de la fin de la crise économique,
les importateurs Reich Bros y seront présents jusqu’au milieu des années
. Le nom de la compagnie figure toujours sur la pierre. Par l’inscrip-
tion, on s’aperçoit que ces marchands se spécialisaient dans le commerce
des articles de « fantaisie », des jouets et du « smallware » ou du brimbo-
rion, comme nous corrigeaient les puristes de la langue de l’époque.
Le bâtiment voisin (-, rue de Brésoles et , rue Saint-Dizier) est
aussi de l’architecte Laurent. Il fut reconstruit après un premier incendie,
en . Le grossiste en alimentation L. Chaput & Fils l’occupa alors,
jusqu’à un second incendie moins dommageable, en . Par après,
Chaput trouva des associés et la maison porta le nom de Hudon, Hébert
& Chaput, jusqu’en . Cinq ans s’écouleront avant qu’un autre grossiste
en alimentation prenne la relève. Ce sera la maison Couvrette & Sauriol.
Traversons maintenant la rue Saint-Dizier pour couvrir la dernière
série des magasins entrepôts de l’Hôtel-Dieu. Deux entités distinctes
couvrent aujourd’hui l’espace occupé par cinq maisons entrepôts qu’ont
fait construire les Hospitalières, en -. Originalement, c’est Henri-
Maurice Perrault qui en fut le concepteur, mais ils subirent un grave
incendie en . Toutefois, les nouvelles constructions conserveront
essentiellement les caractéristiques architecturales des premières. Le
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enfin, le sieur Jean Cailloux (Caillau) dit Baron. Quant aux sœurs, elles
attendront beaucoup plus tard avant de morceler leur terrain en plusieurs
lots distincts, qu’elles vendront séparément, à partir de . L’auteur n’a
pu déterminer les raisons qui ont poussé les Dames de la Congrégation à
acquérir un emplacement, sûrement construit du temps du sieur Tessier,
au coin de la rue Saint-Jacques et de la place d’Armes. Elles en conserve-
ront tout de même les droits de propriété, du moins pour la majeure partie
de la superficie, durant quarante et un ans.
Sur son plan du Montréal habité en , l’arpenteur Pierre-Louis
Morin montre quatre maisons du côté est de la place d’Armes qui
auraient toutes été construites en , par le sieur Tessier dit Lavigne.
Trois d’entre elles se trouvent effectivement sur la concession de celui-ci,
alors que la quatrième se situe plutôt sur la concession que possédait le
sieur Jean Bousquet en , mais que celui-ci pouvait fort bien avoir
obtenue beaucoup plus tôt, puisqu’il habitait Ville-Marie depuis quelque
temps déjà. Ce maître armurier, originaire de la Guyenne, avait épousé
Catherine Fourrier, en la paroisse de Montréal, en . Maçon de son
métier, Urbain Tessier a sûrement été appelé à construire des maisons à
l’extérieur de sa concession, mais il n’a jamais été propriétaire de celle
dont jouira plus tard le sieur Bousquet.
L’édifice New York Life occupe, de nos jours, deux des lots créés par
les sœurs, dont celui de trente-cinq pieds de largeur en front de la place
d’Armes sur cinquante de profondeur, vendu au sieur Jacques Cardinal,
en . Le second emplacement au coin de la rue Saint-Jacques, beau-
coup plus grand et en forme de L, ne sera consenti par les Dames de la
Congrégation que vingt-cinq ans plus tard, en faveur du sieur Joseph
Pampanon (probablement Louis-Joseph Pampalon dit Labranche).
La compagnie d’assurance vie new-yorkaise avait fait construire cet
immeuble prestigieux en . Considéré à l’époque comme un gratte-
ciel, il atteint, avec sa tour, à peine la hauteur de la basilique Notre-Dame,
tout près. L’entrée est somptueuse et, ici encore, on a fait appel au
sculpteur Henry Beaumont pour les nombreuses décorations du bâtiment.
La fonderie montréalaise Chanteloup en a exécuté les magnifiques grilles.
On remarquera également les marbres, les mosaïques et les luminaires
qui contribuent à rehausser l’élégance de l’édifice, largement occupé par
des bureaux de professionnels.
Ce premier « gratte-ciel » de Montréal fut sans doute aussi le premier à
être équipé d’un ascenseur. Il ne faut donc pas s’étonner si les Montréalais
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. Jean-Claude Larocque, ancien courtier de la New York Life, d’après des documents
anciens de la compagnie.
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le nom d’Édifice Versailles, n’a rien à voir avec le célèbre château ou ses
jardins. En fait, il s’agit ici du nom de celui qui l’a fait construire en
, à savoir Joseph Versailles. La firme de courtage de ce dernier en
occupe le rez-de-chaussée, jusqu’à la Grande Crise des années .
Versailles déménage alors son bureau au deuxième étage. L’édifice, qui
en compte dix, demeurera aux mains de la famille jusqu’au début des
années .
L’immeuble à l’est (n -), est beaucoup plus modeste. Construit
en , c’est Joseph Versailles lui-même qui en est alors le propriétaire.
Ses héritiers le vendront en même temps que l’édifice précédent.
partie de celle de l’une des filles du propriétaire original ait été emportée
par la côte de la place d’Armes et que le résidu ait été ajouté à une lisière
de terrain de vingt-sept pieds de largeur consentie, en , par le proprié-
taire voisin, le sieur Jacques Tessier, en faveur du sieur Dominique Janson
dit Lapalme.
Il y a lieu de croire que ces opérations ont produit comme résultat la
création du lot qui supporte actuellement le magnifique édifice Great
Scottish Life Insurance, du nom de la société qui l’a fait construire en
. D’autres noms d’institutions financières lui ont été accolés, au fur
et à mesure qu’elles l’ont occupé. De style Second Empire, le bâtiment ne
se rendait pas au départ jusqu’à la ruelle des Fortifications. C’est la
Banque Canadienne Nationale, aujourd’hui Banque Nationale, qui
agrandira l’édifice en le prolongeant vers le nord et en lui ajoutant deux
étages, tout en préservant l’esthétique original, ce qui a été très bien
réussi. En , les façades seront classées monument historique. Durant
un certain temps, La Prévoyance a été propriétaire de cet immeuble,
maintenant recyclé en établissement hôtelier portant le nom d’Hôtel de
la place d’Armes.
Il n’est pas toujours facile de suivre l’évolution des titres de propriété
sur l’héritage laissé par le sieur Urbain Tessier dit Lavigne. Dans sa
nombreuse progéniture, il y avait un Jacques et un Jean. Tous les deux
ont eu un fils prénommé Jacques. Il semble que ce soit Jacques, le fils de
Jean et petit-fils d’Urbain, qui aurait aidé à compléter le lot du sieur
Janson. En effet, il aurait racheté ou repris le lot que son père avait cédé
au sieur Pierre Gauthier dit Saint-Germain, en .
C’est sur la plus grande partie de ce terrain que se trouve l’édifice de
la Banque du peuple, construit en . La firme d’architectes Perrault,
Mesnard et Venne a alors intégré au nouvel édifice la façade, datant de
, de l’un des trois bâtiments démolis. C’est ici même que, Victor
Morin, l’historien et grand amant du Vieux-Montréal, aura son étude
de notaire à partir de . D’abord avec des associés, puis avec son fils
Lucien, à partir de , et ce, jusqu’au milieu des années .
L’extrémité est de la concession du sieur Urbain Tessier, comprise entre
la rue Saint-Jacques et le mur d’enceinte, est allée à sa fille Agnès qui
avait épousé le sieur Guillaume Richard, un soldat du régiment de Cari-
gnan. Devenue veuve, elle vendit son héritage en , au sieur Claude
Caron. En , à la suite de la démolition de plusieurs bâtiments en vue
de l’élargissement de l’étroite rue Saint-Jacques, l’avocat Alexander Cross
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sa mère. Le sieur Michel Huet dit Dulude, qui avait épousé Madeleine,
la fille d’Urbain Gervaise, en , en héritera à son tour et se chargera
de subdiviser l’emplacement en deux lots distincts.
Même après la construction du grand édifice de la rue Saint-Antoine
entre et , La Presse continuera d’occuper le n - de la rue
Saint-Jacques qu’a fait construire son propriétaire du temps, Trefflé
Berthiaume. Les deux immeubles sont reliés par une passerelle, au-dessus
de la ruelle des Fortifications.
Au terrier, tous les Gervaise dont il a été question dans le présent
chapitre sont identifiés sous le patronyme Gervais. Mais, comme les
ouvrages généalogiques orthographient Gervaise le nom de celui qui a
épousé Anne Archambault de même que celui de leurs descendants,
l’auteur s’en est tenu à cette dernière apellation.
Borné au nord par les anciennes fortifications, à l’est par le site
de l’hôtel de ville et le côté est de la place Jacques-Cartier, vers
le sud par la rue de la Commune, vers l’ouest par la rue Saint-
Jean-Baptiste jusqu’à la rue Notre-Dame. De là, il contourne
le palais de justice, pour suivre le boulevard Saint-Laurent
Les neuf lots sur le côté sud de la rue Saint-Jacques avaient une même
largeur d’environ trente-quatre pieds et ils ont tous été vendus par les
Hospitalières, en , sauf le quatrième qui fut aliéné en . On y
retrouve, d’ouest en est, les propriétés des sieurs Pierre Lefebvre, Jean
Brillaud dit Barreau, Bernard Caraquille dit l’Espagnol, Jean Huboux
dit Deslongschamps, Nicolas Gaudry dit Bourbonnière, Séraphin
Marganne de Lavaltrie pour deux lots, Pierre Leroy et Paul Dazé.
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s’est trouvé à hériter, vers , de l’emplacement que son beau-père avait
acheté en . L’Allegrocube se dresse donc aujourd’hui entièrement sur
la propriété que possédait autrefois le sieur Lenoir.
L’édifice même, qui a été achevé en , est l’œuvre de la firme
d’architectes David et Boulva. Son recouvrement particulier à l’extérieur
est formé de plaques de granit provenant des carrières de Rivière-à-
Pierre, dans le comté de Portneuf.
allant vers l’est, il convient de traiter auparavant les emplacements qui sont
situés entre les rues Saint-Jean-Baptiste et Saint-Gabriel, ce qui permet de
garder un certain ordre dans le parcours du territoire.
Nous nous trouvons donc à revenir sur la partie de la terre qu’Élisa-
beth Moyen, la veuve de Lambert Closse, avait cédée à l’Hôtel-Dieu en
, devant le notaire Basset. On se souviendra que la terre du sieur
Closse commençait un arpent au nord de la rue Saint-Paul. Cela voudrait
dire, à toutes fins utiles, à peu près dans le prolongement de la rue Saint-
Thérèse qui borne l’édifice Ernest-Cormier, sur son côté sud.
Les Hospitalières de Saint-Joseph, détentrices des droits de l’Hôtel-
Dieu depuis , subdivisèrent tout cet espace jusqu’à la rue Notre-
Dame. Dans l’intervalle d’un an, à partir du mois d’août , elles
vendirent les neuf emplacements ainsi créés.
Mais, pour une raison qui nous reste inconnue, cinq des neuf terrains
aliénés par les religieuses en furent presque aussitôt retirés aux
concessionnaires, pour être revendus, dès ou , à de nouveaux
propriétaires.
C’est le sieur Denis Sabourin dit Chauvanière, originaire d’Angers en
Anjou, qui obtient le lot situé au coin des rues Saint-Jean-Baptiste et
Notre-Dame, avec cinquante-huit pieds de front sur soixante-quatre le
long de ladite rue Saint-Jean-Baptiste. Mais, dès , par l’entremise des
Hospitalières, l’emplacement passe aux mains des trois frères Demers :
André, Charles et Robert, les fils d’André Demers, celui qui avait obtenu
une concession sur la rue Saint-Paul en , comme nous le verrons un
peu plus loin. Le propriétaire subséquent, Paul Agnier, subdivisera son
lot en deux parties égales qui seront ultérieurement à nouveau réunies.
Mais au e siècle la concession est toujours subdivisée en deux lots
distincts et les constructions qui s’y trouvent en font foi. Les deux bâti-
ments n’auront plus toutefois qu’un seul propriétaire, à partir du moment
où dame Mathilde Barrette, qui détient déjà la maison du coin érigée
vers , achètera le -, rue Notre-Dame. Avec l’entrepôt arrière
qu’elle possède également, le tout formera un ensemble qui se perpétuera
lorsque l’éditeur Beauchemin se portera acquéreur des biens de la succes-
sion Barrette, en . D’ailleurs, l’emplacement des trois immeubles
porte de nos jours une seule désignation cadastrale.
En largeur, les deux bâtiments de la rue Notre-Dame occupent exacte-
ment l’emplacement que les religieuses avaient accordé au e siècle,
d’abord au sieur Sabourin, puis aux frères Demers. Quant à l’entrepôt,
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celle-ci repose sur le terrain que les seigneurs ont concédé à Gabriel
Beaudreau dit Graveline, l’Édifice La Sauvegarde, quant à lui, s’étend
beaucoup plus vers le sud et couvre aussi la concession de Michel Devaux
dit Descormiers et en partie celle de Jacques Arrivé, toutes deux accor-
dées par le sieur de Hautmesnil, en .
Suit, sur Saint-Vincent, l’ancien hôtel Richelieu (n ) qui déborde
de chaque côté du lot que possédait Louis Tétreault en . Il s’agit du
bâtiment principal d’un complexe hôtelier qui s’étendait jusqu’à la place
Jacques-Cartier. C’est le seul qui appartenait à Sérafino Giraldi, les deux
autres étant en location.
Après avoir traversé un passage étroit, nous sommes en présence d’un
ensemble commercial créé par le shérif Edward William Gray. Il s’agit
vraisemblablement du seul du genre dans le Vieux-Montréal, à dater du
e siècle. Le n a servi d’entrepôt et de magasin pour les encans,
alors que le n , un édifice construit en , servait de résidence au
marchand shérif. Ce dernier a été converti en une auberge appelée Le
Guilleret. À l’extérieur, les restaurations ont très bien respecté le cachet
d’origine des deux bâtiments, qui occupent les concessions originales
accordées à André Hunault et à Jean Péladeau dit Saint-Jean et la partie
sud de celle qui a été obtenue par Jean Laurin et Michel Boivin.
Quant au bâtiment en pierre et brique de quatre étages qui se rend
jusqu’à la rue Saint-Amable ( et , rue Saint-Vincent), il est érigé
sur l’emplacement où ont résidé le sieur Bizard et ses filles. Un siècle plus
tard, l’avocat Côme-Séraphin Cherrier y construisit une maison dont il
reste encore quelques vestiges. L’ensemble prendra le nom d’entrepôt
frigorifique Cherrier jusqu’en .
Trois bâtiments sont aujourd’hui situés sur les deux lots que le sieur
Bizard avait vendus de son vivant, en front de la rue Saint-Paul. Le plus
à l’est (n et ) est une maison en pierre de deux étages et demi,
connue sous le nom de Maison du Patriote en raison de l’enseigne qui
figura sur la devanture durant près d’un siècle. Elle fut installée par le
marchand de tabac Alexis Dubord, qui a tenu longtemps son commerce
à cet endroit. L’emplacement correspond en gros à celui qu’avait acquis
Olivier Quesnel du sieur Bizard, en . Originaire de Saint-Malo, ce
Quesnel est l’aïeul de l’épouse d’André Grasset de Saint-Sauveur dont il
a été question précédemment.
Les deux autres bâtiments se partagent le terrain que le sieur Bizard
avait vendu à Jean-Baptiste Deguille dit Leguille. Le plus à l’est (n
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On sait que, dès le départ, l’auteur du présent ouvrage s’est fixé pour
objectif principal d’établir le lien entre les premiers concessionnaires et
l’occupation actuelle des lieux, tout en parcourant le déroulement des
événements d’intérêt qui ont marqué ces endroits, au cours de cent
cinquante ans d’histoire. La place Jacques-Cartier et les terrains qui la
bordent du côté ouest en sont un exemple typique.
L’espace dont il est question ici correspond à deux concessions origi-
nales : l’une accordée au sieur Paul Benoît dit Livernois en , et l’autre
au sieur André Demers dit Chedeville l’année suivante. Évidemment, la
rue Saint-Charles n’existait pas encore, mais on peut supposer que leurs
limites à l’est auraient longé cette rue. Toutes deux d’une largeur d’un
arpent, la concession du sieur Benoît avait front sur la rue Notre-Dame,
et celle du sieur Demers donnait sur la rue Saint-Paul. Avec aussi chacune
un arpent de profondeur, elles s’adossaient l’une à l’autre.
Ces concessions ne tardèrent pas à changer de mains et, dans le cas
du sieur Benoît, à subir un important morcellement. Ainsi, la demie nord
de son emplacement alla à Jacques Mailhot en , puis à Jacques Testard
de La Forest en , pour être aussitôt retirée par le fondateur de
Montréal qui l’octroya au sieur Charles d’Ailleboust des Musseaux, avant
qu’elle n’aboutisse au nom des jésuites en . Ceux-ci subdivisèrent le
terrain en trois lots, dont l’un fut même resubdivisé par après. Pour ce
qui est de la demie sud de l’emplacement de Paul Benoît, elle a aussi été
subdivisée en trois entités que se partageront des acquéreurs différents.
Quant à la concession du sieur Demers, si elle ne fut pas morcelée, elle
connut néanmoins plusieurs propriétaires. Quelques mois après son
obtention, la concession passa aux mains de Pierre Godin dit Chatillon,
et le chirurgien Étienne Bouchard l’a eue un certain temps, avant que
Daniel Dulude de Greslon en devienne propriétaire, en .
Mais, à partir du e siècle, commence un regroupement de tous
ces lots qui conduira en à la reconstitution des deux premières
concessions accordées à Paul Benoît et à André Demers, pour ne faire
qu’une seule entité, celle dont jouira le dernier gouverneur de la Nouvelle-
France, Pierre de Rigaud, marquis de Vaudreuil.
En effet, son père Philippe de Rigaud, marquis de Vaudreuil, alors
gouverneur de Montréal, puis plus tard lui aussi gouverneur de la
Nouvelle-France, amorcera timidement le processus dès , en louant
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À une date qui demeure indéterminée, les jésuites vendent deux terrains
situés à l’extrémité est de leur domaine, en front de la rue Notre-Dame.
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Non, nous ne sommes pas dans Charlevoix ni à l’île d’Orléans, mais bien en
plein cœur du Vieux-Montréal, à quelques pas du Château Ramesay. C’est le
435 de la rue Saint-Louis.
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d’une tour, font qu’il est difficile d’imaginer une quelconque ressem-
blance avec le château de .
Le Musée du Château Ramesay n’en constitue pas moins l’un des plus
beaux joyaux que nous a laissés l’époque française. Son passé est égale-
ment chargé d’histoire, tant par les personnages célèbres qui y ont
séjourné que par les institutions qui l’ont occupé.
Pour ce qui est de l’extrême partie ouest de la propriété du sieur de
Ramesay et du terrain que le sieur d’Ailleboust avait réservé à son gendre
le sieur De Muy, ils constituent, de nos jours, ce que l’on a appelé la place
De La Dauversière, ainsi nommée en l’honneur du fondateur de la Société
Notre-Dame qui a conduit à la fondation de Montréal, en .
Madame de Portneuf, la fille du sieur De Muy, hérita de l’emplacement
en . Elle le vendra au sieur Jacques Lemoine-Despins qui construira
sur le site, en , une grande et magnifique maison que la Ville, devenue
propriétaire, fera malheureusement démolir au début du e siècle. Enfin,
quelques années après la disparition de Jean Drapeau, certes l’un des
plus illustres maires qu’a eus Montréal, un monument fut érigé en son
honneur, dans le jardin même de la place De La Dauversière.
Mais que s’est-il passé avec les concessions de la rue Saint-Paul, en
partant de la place Jacques-Cartier ? Trois bâtiments construits le long
de ladite place occupent aujourd’hui celle qu’avait obtenue le sieur Paul
Benoît, en . Le quatrième, au coin de la rue Le Royer, se trouve sur
l’extrémité sud du premier terrain concédé au sieur Charles d’Ailleboust,
six ans plus tard.
La construction de la vieille maison de deux étages et demi sur le coin
de la rue Saint-Paul, avec lucarnes du côté de la place Jacques-Cartier,
remonte à . À l’étage, elle abrite le restaurant Le Homard fou. La
deuxième maison, en se dirigeant vers le nord, est de style identique à la
précédente.
Au , on retrouve les Jardins Nelson, un café-terrasse qui, en saison
estivale, sert les clients sur son espace arrière et sur celui qui est caché
par la façade d’un vestige sur la rue Saint-Paul. Vient ensuite l’Hôtel
Nelson érigé en par le propriétaire-constructeur, Amable Prévost.
On arrive enfin à la maison Vandelac (n ), du nom de celui qui y a
tenu longtemps une taverne au e siècle. Ce bâtiment en pierre fut
cependant construit beaucoup plus tôt, soit entre les années et .
De retour sur la rue Saint-Paul, on constate que les limites des
propriétés actuelles ne coïncident généralement pas avec celles des
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Les trois bâtiments qui suivent, sur Saint-Claude, sont du e siècle,
même si certaines structures peuvent remonter au début du e. Les
deux premiers (n et à ) sont situés sur la même unité cadas-
trale. Ils sont en fait intégrés l’un à l’autre, le plus au nord contournant
l’arrière du , devenu en quelque sorte, une dépendance. Au , on
retrouve Le Club chasse et pêche, dont le restaurant offre au public une
table de qualité, dans un décor et une ambiance agréables.
Avec le troisième immeuble qui mesure tout près de cent pieds en
façade, l’ensemble couvre l’extrême nord du terrain des sieurs Lefebvre
et pratiquement tout le grand lot que les héritiers Ramesay n’avaient
vendu qu’en , au sieur Nicolas Morand. Le à , rue Saint-Claude
est un bâtiment résidentiel récent conçu par la firme d’architectes
Provencher, Roy et associés et construit par la Société immobilière du
patrimoine architectural de Montréal (SIMPA).
D’allure plutôt minable, la construction suivante de deux étages
semble servir de local utilitaire aux entrepreneurs qui construisent Le
, en front de la rue Notre-Dame. Au début du e siècle, le et ,
rue Saint-Claude aurait été relié au bâtiment du coin, lorsque la maison
de tissus et de « marchandises sèches » Coutlée et Frères, déjà installée
au de la rue Notre-Dame, a décidé de faire l’acquisition des deux
édifices et de les transformer radicalement.
Aujourd’hui, c’est le resto-café l’À propos qui se trouve au rez-de-
chaussée du , alors que les étages sont consacrés au résidentiel. Les
deux édifices occupent largement la partie ouest de la concession qu’avait
obtenue le sieur de Catalogne en . Agrandie comme on l’a vu avec
le notaire Barolet, celle-ci couvre aussi l’emplacement du voisin.
À la fin du e siècle, ce secteur de la rue Notre-Dame était un
endroit de prédilection pour la haute bourgeoisie de Montréal. En ,
le juge John Fraser acheta non seulement l’ancien lot des Ramesay au
coin de la rue Saint-Claude, mais également les deux concessions origi-
nales suivantes qui avaient été accordées vers , respectivement au
sieur Pierre Hunault et au sieur Antoine Courtemanche. Ces acquisitions
procurèrent au juge Fraser un emplacement de près de deux cent
cinquante pieds de largeur sur Notre-Dame. C’est à ce beau-frère que la
mère du futur grand explorateur confia son fils Simon, pour lui permettre
d’entreprendre des études dans un collège de Montréal.
En , le négociant William Maitland deviendra propriétaire de la
maison du juge. Il la fera démolir pour en construire une nouvelle. Mais,
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Plaque commémorative
sur la maison où Joseph
et Louis-Joseph Papineau
ont habité.
chacun que la partie avant de l’une ou l’autre des concessions. C’est celle
du coin de la rue qui a appartenu à Jean-Baptiste, à partir de , alors
qu’André n’obtiendra la sienne que sept plus tard.
La concession obtenue en deux temps par le maître charron Nicolas
Brazeau père s’étendait de la rue Notre-Dame à la rue Saint-Paul. La
section en front de cette dernière rue lui avait été accordée en et
celle de la rue Notre-Dame en . Le sieur Brazeau, qui avait épousé
Pérette Billard, cédera le tout à son gendre, le soldat Guillaume Tougard
(Tougas) dit Laviolette, l’époux de Marie Brazeau.
Ce sont les de Beaujeu, les seigneurs de Soulanges, qui entreprirent
de construire le - en , sur l’emplacement qui avait appartenu
un temps au soldat Tougard. Pendant un quart de siècle, l’immeuble
gardera une fonction hôtelière. Depuis plusieurs années, c’est le ° En
cave, une maison spécialisée dans la conservation des vins et la vente
des accessoires qui permettent d’exercer cette activité, qui loge au .
À partir d’ici, les mesures du cadastre actuel ne concordent plus très
bien avec celles du terrier. Mais on peut quand même conclure que le
- de la rue Saint-Paul repose sur une partie de la concession qu’avait
obtenue le sieur François Brunet dit Belhumeur en et que le -
se trouve sur le reste de ladite concession et sur une partie de celle qui a
été accordée au sieur Abraham Bouat en .
À l’ouest du ° En cave, se trouve l’auberge Le Beau Soleil et, par une
porte cochère, on atteint, tout à fait à l’arrière du terrain, un ancien
bâtiment de service qui a été transformé en établissement hôtelier en
. D’allure coquette, il porte le nom d’Auberge Bonsecours. En façade
du bâtiment de la rue Saint-Paul, on remarque la boutique Senteurs de
Provence, tenue par un parfumeur et marchand d’odeurs.
Datant de , le - mesure tout près de quatre-vingts pieds de
largeur. Il a servi d’hôtel jusqu’en . Durant soixante-dix ans, il a été
connu sous le nom d’Hôtel du Canada puis, d’Auberge du Canada,
quoiqu’un autre établissement hôtelier, maintenant démoli, ait aussi porté
ce nom à la même époque, dans le Vieux-Montréal. Parmi les commerces
actuels qui occupent le rez-de-chaussée, il y a la boutique Tant qu’il y
aura des fleurs () et le restaurant La Boucherie ().
L’espace voisin, vers l’ouest, est un terrain de stationnement qui rejoint
le bâtiment sur le coin de la rue Saint-Claude, où a commencé l’étude
du pourtour du quadrilatère formé des rues Saint-Claude, Notre-Dame,
Bonsecours et Saint-Paul.
L E V IE U X-M O N T R É A L
Les d’Ailleboust
Par la suite, le terrain fut subdivisé en trois lots, dont celui du coin,
d’une largeur de trente-huit pieds, qui revint au roi pour le corps de
garde. Les deux autres allèrent en guise de dot aux sieurs Jean-Baptiste
de Coste et Charles Charpentier qui avaient épousé les filles du sieur
Marchand. Le plus à l’ouest, celui du sieur de Coste, avait une largeur de
quarante pieds. Le lot de Charpentier ne mesurait, quant à lui, que vingt-
cinq pieds de front. La somme des trois largeurs présente un léger excé-
dent sur la mesure originale de la concession, ce qui était tout à fait
normal à l’époque. Signalons que le terrain du sieur Charpentier, de
vingt-cinq pieds qu’il était, fut augmenté de quinze pieds cinq ans plus
tard, à même le lot voisin qui appartenait alors aux héritiers du sieur
François Blot (Bleau), ce qui en fit un lot de dimensions équivalentes à
celles de l’emplacement de son beau-frère.
On peut dire que les dimensions d’origine des trois lots formés du
poste de garde et des emplacements des sieurs de Coste et Charpentier
correspondent presque à la perfection, du moins en largeur, à celles des
trois bâtiments qu’ils supportent de nos jours.
Au coin de la place Jacques-Cartier, c’est l’épicier en gros Thomas
Tiffin qui fit construire, en , le bâtiment actuel qui occupe exacte-
ment le site du poste de garde. L’incendie de fera disparaître le
fronton triangulaire d’origine et l’édifice sera alors doté d’un toit plat.
À la suite de Thomas Tiffin, d’autres épiciers en gros exerceront leurs
activités à cet endroit, sur une longue période. De nos jours, le rez-de-
chaussée abrite Le Panoramique, un restaurant de spécialités italiennes,
ainsi qu’une boutique d’artisanat appelée L’Amérindien.
Le bâtiment suivant, construit sur la concession du sieur d’Ailleboust
ou plus précisément sur le lot du sieur Jean-Baptiste de Coste, est un
édifice en pierre de trois étages et demi sur Saint-Paul et de quatre et
demi sur de la Commune, la différence étant due à la forte dénivellation
entre les deux artères. Sa construction ne date que de . Le mène
aux niveaux supérieurs, alors que le rez-de-chaussée est occupé par deux
restaurants : Le Sénateur (n ) et le Ménara (n ). Ce dernier sert
des mets typiquement marocains.
Quant au -, rue Saint-Paul et de la Commune construit sur
le dernier lot provenant de la concession du sieur d’Ailleboust, à savoir
celui du sieur Charpentier, il a été érigé en . Rénové en , il abrite
entre autres, en son rez-de-chaussée, le restaurant Place Saint-Paul.
L E V IE U X-M O N T R É A L
Le marché Bonsecours
coup d’ouvrages de tout genre y ont été consacrés. Mais, dans le cas du
marché Bonsecours, le contexte est différent, en ce sens que le site a des
liens directs avec plusieurs familles qui l’ont occupé jadis. Ici, l’impor-
tant, c’est le rapport qui relie l’histoire des premiers habitants à ce qui
existe de nos jours. Ainsi, nous constatons que les descendants de
nombreux pionniers ont eu des ancêtres qui, autrefois, habitaient sur
l’emplacement actuel du marché Bonsecours.
Les premières concessions étaient relativement grandes, mais elles ont
été rapidement subdivisées et partagées entre plusieurs propriétaires.
Notons qu’au moment où elles furent accordées les grands ouvrages des
fortifications n’étaient pas encore commencés et on considérait la rue
Saint-Charles comme la limite est de la ville. La rue Saint-Paul s’arrêtait
là. Plus loin, c’était la friche au travers de laquelle un simple sentier
menait aux installations des sœurs de la Congrégation.
D’ouest en est, en partant de la concession du sieur Drapeau dit
Desforges, les concessions originales se répartissaient comme suit :
Claude Robutel de Saint-André pour une concession de quatre-vingt-
seize pieds accordée entre et ; celle de Jean Petit de Boismorel
pour une largeur de cent quarante-quatre pieds (). Ensuite, vient un
emplacement de quatre-vingt-onze pieds dont la description originale
demeure obscure, mais qui sera subdivisé en trois lots dès . Enfin,
plusieurs concessionnaires se partageront un dernier espace de cent
quatre-vingt-trois pieds entre et .
Ce qui est intéressant, c’est de pouvoir suivre dans l’ordre, à partir de
la rue du Marché-Bonsecours, l’occupation approximative des maisons
des premiers propriétaires, à l’endroit de l’édifice actuel. On a donc, en
partant du lot du sieur Pierre Roy, soit près de la limite ouest du bâtiment,
des concessions qui, à un certain moment, ont appartenu aux sieurs
Étienne Truteau (Trudeau) ( pi), Charles Désery ( pi), André Mercil
( pi), Timothée Sylvain ( pi), Vincent Lenoir ( pi), Pierre Devanchy
( pi), Pierre Chêne dit Saint-Onge ( pi), et Charles Le Moyne de
Longueuil, pour un résidu de treize pieds dont il prit possession le juillet
. Évidemment, le baron de Longueuil n’aurait su que faire de cette
étroite bande de terrain, si la veille du juillet il n’avait pas pris soin
d’acheter la propriété voisine qui appartenait alors au sieur Chêne dit
Saint-Onge, ce qui lui donna une largeur totale de soixante-six pieds.
Toutefois, l’appétit du sieur de Longueuil qui projetait la construction
de son manoir ne s’arrêta pas là. Petit à petit, il acheta également les
L E V IE U X-M O N T R É A L
soit au , se trouvent situés les bureaux du Conseil des métiers d’art
du Québec.
--
-
La chapelle Notre-Dame-de-Bon-Secours
au sieur Jean Sarros dit Laviolette et le plus à l’est au sieur Henri Catin,
dans le prolongement de celui qu’il obtiendra sur la rue Saint-Paul. Nous
arrivons alors au terrain du sieur Léonard Paillé dit Saint-Amour qui,
comme on l’a mentionné précédemment, s’étendait de la rue Saint-Paul
à la rue de la Friponne. Il reste alors deux autres lots avant d’arriver au
coin de la rue Saint-Gilles, soit celui qui a été obtenu par le sieur François
Guillemot dit Lalande, en , suivi de celui qui été du sieur Toussaint
Hunault, le fils de celui du même patronyme arrivé avec la Grande Recrue
de .
Six bâtiments se dressent de nos jours sur le pourtour du quadrilatère.
Trois d’entre eux forment un ensemble qui occupe exactement les conces-
sions que possédaient les sieurs Beaujean, Mauquin, Catin, Laviolette et
Paillé dit Saint-Amour, au e siècle. Les trois immeubles ont été
construits au début du e siècle, pour satisfaire aux besoins de la
fonderie Lymburner Limited, à savoir des bureaux, un atelier d’usinage
et la fonderie même. Probablement à cause d’un changement de vocation
à un certain moment, le , rue Saint-Paul porte, gravée dans la pierre,
l’inscription Credit & Warehouse Corporation.
Quant aux trois autres bâtiments, ils longent la rue Berri. Il semble bien
que celui qui est situé au coin de la rue Saint-Paul occupe la concession du
sieur Couturier, alors que les deux autres immeubles se trouvent sur celle
du sieur Guillemot dit Lalande qui avait front sur la rue Saint-François (de
la Friponne). En effet, les deux concessions qui longeaient la rue Saint-
Gilles auraient été emportées lors de la création de la rue Berri.
Le , rue Saint-Paul est un édifice résidentiel qui date de .
L’édifice d’un étage au sud a été construit en et il ne soulève pas
tellement d’intérêt. Par contre, celui du coin de la rue de la Friponne
avait sûrement plus de caractère lors de sa construction, il y a une
centaine d’années. Mais un malheureux incendie, en , lui aurait fait
perdre beaucoup d’éléments décoratifs qui n’ont pas été remplacés. À
l’origine, le propriétaire constructeur, l’hôtelier Hormidas Courtois, avait
installé sa taverne au rez-de-chaussée et son logement à l’étage. C’est le
restaurant Le Tug qui occupe maintenant le de la rue Berri.
L’espace au sud de la rue de la Friponne, qui se rendait jusqu’au fleuve,
a connu plusieurs concessionnaires. Il est à se demander cependant s’il
a déjà été construit au temps de la Nouvelle-France. Chose certaine,
l’érection de l’enceinte n’a laissé qu’une bande étroite de terrain qui, de
nos jours, a été transformée en petit parc.
SE C T E U R N UM ÉR O 6
-
Partie de l’ancienne gare Dalhousie occupée de nos jours par le cirque Éloize et
dessus des anciens rails.
SE C T E U R N UM ÉR O 6
une plaque commémorative rappelle que c’est de cette gare que partit, le
juin , le premier train transcontinental régulier, ce qui consacrait
l’unification du pays au niveau du transport ferroviaire. Aujourd’hui, le
bâtiment qui porte le n de la rue Berri abrite le cirque Éloize. C’est
droit devant nous, dans l’ancienne rue Saint-Paul, que les grosses
locomotives à vapeur crachaient leur fumée noire. Le niveau du sol
aménagé en promenade laisse voir le dessus des anciens rails qu’on a pris
soin de laisser sur place.
À notre droite, soit au sud du tronçon disparu de la rue Saint-Paul en
allant vers les fortifications érigées pas très loin du fleuve, le terrain était
occupé jadis par les casernes militaires, où logeaient et s’exerçaient les
soldats de l’armée française. Actuellement, on y aperçoit un complexe
moderne d’habitation dont la hauteur varie de trois à sept étages. L’en-
semble s’étend vers l’est, au-delà de la porte Québec, pour se rendre
jusqu’à la rue Saint-Hubert et couvrir une aire plus grande que le site
des casernes militaires. Si le complexe demeure une réalisation conve-
nable, on peut se demander pourquoi on n’a pas mieux tiré profit du
caractère historique de ce site où la « Canoterie du roi » venait longer les
casernes.
deux autres, comme on l’a vu précédemment, ayant front sur la rue Saint-
Paul. L’édifice antérieur au bâtiment actuel a logé le journal Le Devoir
de à , avant qu’il ne déménage sur la rue du Saint-Sacrement.
Suit un bâtiment d’appartements en copropriété.
Le de la rue Notre-Dame correspond à l’ancienne église orthodoxe
grecque syrienne, construite en . Après avoir servi de lieu de culte
jusqu’en , l’immeuble abrita par la suite le centre socioculturel de la
communauté belge, durant tout près de cinquante ans. Il fut par la suite
transformé en copropriétés.
Les deux derniers bâtiments avant d’atteindre la rue Berri s’appellent
les Maisons George-Étienne Cartier. Propriétaire de ces deux résidences
dont la famille Cartier demeurera en possession jusqu’en , l’homme
politique canadien les habitera à tour de rôle, les deux périodes étant
entrecoupées par un séjour à Québec, entre et . Le gouverne-
ment du Canada se portera acquéreur de l’ensemble en , pour en
faire un musée.
L’arrière des constructions qui s’élèvent du côté nord de la rue Notre-
Dame, entre les rues Bonsecours et Berri, occupe plus ou moins l’empla-
cement de l’ancien mur d’enceinte. Ce sont les derniers bâtiments à être
traités dans ce livre. L’espace plus au nord était considéré comme « hors
de la ville », du temps de la Nouvelle-France.
L’édifice d’appartements en copropriété à l’angle des rues Bonsecours
et Notre-Dame a été construit entre les années et . Juste au nord,
le n avec commerce au rez-de-chaussée et logement aux étages date
de et occupe le site d’une ancienne école qui avait été érigée à cet
endroit vers .
De retour sur Notre-Dame, nous rencontrons la plus à l’est (n )
des quatre maisons magasins que Mary Grant, la veuve de Nicolas-
Fortuné-Charles de Montenach, a fait construire, en . Deux ans après
le début des travaux, l’opticien Robert F. Andrews et l’ébéniste John
Tweedy occuperont le seul bâtiment qui résistera au temps. La façade
cependant sera reconstruite par madame de Montenach, lors de
l’élargissement de la rue Notre-Dame.
Devenue la nouvelle propriétaire en , Ann McCormack y installe
son commerce de « marchandises sèches ». Comme elle n’a laissé ni
héritier ni testament à son décès vingt-neuf ans plus tard, c’est le gouver-
nement du Québec qui recouvrera les biens de madame McCormack.
Plus tard, l’édifice deviendra un refuge pour les miséreux, appelé la
SE C T E U R N UM ÉR O 6
. Certaines études tendent à démontrer que la population était très inférieure à
âmes. Par contre, il faut penser que, si la colonie était de habitants en , il
est difficile de concevoir que Montréal constituait un groupe de moins de
personnes, même si la population de l’époque était fortement rurale. Montréal repré-
sentait un pôle stratégique de haute importance vers l’intérieur de l’Amérique du Nord.
Sur son plan, l’arpenteur Morin établit le nombre d’habitants à .
L E V IE U X-M O N T R É A L
Canadian Antiquarian and Numismatic Journal (The), Third Series, April ,
volume XII, no .
Dictionnaire national des Canadiens français, Institut généalogique Drouin,
.
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Toronto, .
L’Hôtel-Dieu de Montréal (-), Les Cahiers du Québec, Hurtubise HMH
ltée, .
L’Île de Montréal en , Aveu et dénombrement des Messieurs de Saint-Sul-
pice par Antoine Roy, Archives de la Province de Québec, .
Montréal en , « Déclaration du fief et seigneurie de L’isle de Montréal au
papier terrier du Domaine de sa Majesté » faite par Jean Brassier p.s.s. –
Présenté par Claude Perrault – B.C. Payette, .
Les Origines de Montréal, Mémoires de la Société historique de Montréal,
.
Lanctot, Gustave, Images et figures de Montréal sous la France, La Société royale
du Canada, .
Lanctot, Gustave, Montréal au temps de la Nouvelle-France, G. Ducharme
éditeur, .
Lanctot, Gustave, Montréal sous Maisonneuve -, Librairie Beauchemin
limitée, .
Morin, Victor, Le Vieux-Montréal -, Les Éditions des Dix, .
Pinard, Guy, Montréal : son histoire, son architecture, Les Éditions La Presse,
.
Robert, Jean-Claude, Atlas historique de Montréal, Art global inc. et Éditions
Libre Expression, .
Tessier, Marcel, Marcel Tessier raconte, Chroniques d’histoire, Les Éditions de
l’Homme, .
Trépanier, Léon, Les Rues du Vieux-Montréal au fil du temps, Fides, .
Trudel, Marcel, Le Terrier du Saint-Laurent en , Éditions du Méridien,
.
index
Cet index fournit les noms propres de personnes dans la forme sous
laquelle ils sont apparus dans les ouvrages consultés. Il arrive que dans
un même document, ces noms s’orthographient différemment et que
plusieurs noms propres se retrouvent dans l’identification d’un même
personnage.
L’auteur n’a pas nécessairement éliminé toutes les ambiguïtés qui
peuvent surgir. Mais dans l’ensemble, il croit avoir réalisé une synthèse
qui ne pose pas problème. L’utilisateur de l’index devrait donc s’y
retrouver facilement.
DUVERNAY, Ludger, , GADOIS, Roberte, , , ,
DUVIVIER, Adriane, GAGNÉ, Pierre, -
GAGNIER (Gagné), Pierre,
FABRE, Édouard-Raymond, GALARNEAU, Marie-Madeleine,
FABRIS, GALIPEAU, Gilles,
FAILLON, Étienne-Michel, -, , GALIPEAU, Marie,
GAMELIN, Ignace,
FAIRIE, James, GAMELIN, Laurent-Eustache,
FELDS, Ferdinand, GAMELIN, Marguerite,
FERRIER, James, GAMELIN dit MAUGRAS, Pierre, fils,
FERRON dit SAUCERRE, Jean, -,
FÉZERET, Claude, , GAR EAU dit SAINT-ONGE, Jean,
FÉZERET, René, , -
FILIAU (FILIAULT), François, GAREAU dit SAINT-ONGE, Pierre,
FLEURY dit DESCHAMBAULT, Jacques- -,
Alexis de, -, GARNIER, Gilles,
FLEURY dit DESCHAMBAULT, Jeanne- GASTIGNON, Thérèse,
Charlotte, GATIEN, François-Lucien,
FOISY, Martin, GATIEN, René,
FONTENELLE dit CHAMPAGNE, Jean, GATIEN dit TOURANGEAU, Pierre-
, , , , - René, ,
FOOTNER, William, GATINEAU, Madeleine,
FORESTIER, Antoine, GAUCHET, Catherine, -, , ,
FORGET, Louis-Joseph, GAUDRY dit BOURBONNIÈRE, Nicolas,
FORGET dit DESPATIS, Nicolas, - ,
FORSYTH, John, GAUTHIER, Joseph,
FORTIER dit FORESTIER, Antoine, GAUTHIER, Marguerite,
FORTIER dit FORESTIER, Pierre, -, GAUTHIER dit SAINT-GERMAIN,
Pierre,
FOUBERT, Marie, GAUTIER (GAUTHIER), Jean,
FOUCHER, Jeanne, GAUTIER dit RABOT, Pierre, ,
FOUCHER, Marie-Anne, GENDRON, Catherine,
FOUQUEREAU, Marie-Anne, GÉNÉREUX, Esprit,
FOURNIER DUVIVIER, Hector, GEOFFRION, Henri,
FRASER, Alexander, GERVAIS, Jean,
FRASER, John, - GERVAISE, Charles, -,
FRASER, Simon, - GERVAISE, Jean, -,
FROBISHER, Benjamin, GERVAISE, Madeleine,
FROBISHER, Joseph, -, , GERVAISE, Urbain, , -
FRONTENAC, Louis de Buade de, , , GIBAULT (GIBEAU), Étienne,
FROTHINGHAM, John, , GIBEAULT, Angélique,
GIBEAULT, Étienne, -
GADOIS, Françoise, GIRALDI, Serafino,
GADOIS, Jeanne, GODARD dit LAPOINTE, Joseph,
GADOIS, Pierre, , -, , , , -, GODART, Jeanne,
, , , , , GODDARD FROTHINGHAM, Louisa,
GADOIS, Pierre, fils, -, -,
L E V IE U X-M O N T R É A L
ROCBERT, Étienne, , , , , , , SANGUINET, Ambroise,
, SANGUINET, Charles,
ROCBERT, Louis, SANGUINET, Simon, ,
ROCBERT, Marie-Élisabeth, SANSON, Moullart,
RODIER, Séraphin, SANTON dit LA GIROFLÉE, François,
ROLLAND, Jean-Baptiste, ,
RONFARD, Jean-Pierre, SAREAU, Pierre,
ROSE, Nicolas, SARRAZIN, Nicolas,
ROSS, Donald, , SARRAZIN, Thomas,
ROULLIER, Mathurin, SARROS dit LAVIOLETTE, Jean,
ROUSSEL, dit LE TAILLANDIER, Pierre, SAUVAGEAU, René,
SAVAGE, Alfred,
ROY, Angélique, SÉDILOT, Marguerite,
ROY, Jean, , SENÉCAL, Jean,
ROY, Joseph, SÉNÉCAL, Jean,
ROY, Marie, SÉNÉCAL, Joseph,
ROY, Pierre, , SENET dit LACHENAYE, Esprit,
ROY dit DESCHATS, Jean, SERAT dit COQUILLARD, François, ,
ROYBON d’ALONNE, Madeleine de, ,
SERAT dit COQUILLARD, Pierre,
ROYER de la DAUVERSIÈRE, Jérôme le, SERRE, Jean,
SEYMOUR, Hiram,
RUOT, Geneviève, SHAUGHNESSY, Thomas, ,
RUPALAIS, SIMONET, François,
SOUART, Gabriel, , , , , ,
SABATIER, François,
SABOURIN dit CHAUVANIÈRE, Denis, SOUMANDE, mademoiselle,
SOUMANDE, Pierre,
SAINT-AMANT, Madame, STEPHENS, George W.,
SAINT-ANDRÉ, Claude Robutel de, , STEPHENS, Harrison, ,
, SUBERCASE, Daniel Auger de,
SAINT-COSME, Pierre, SURAULT-BLONDIN, Madeleine,
SAINT-DIZIER, Étienne Nivard de, SUTHERLAND, William,
SAINT-DIZIER, veuve, SYLVAIN, Timothée, ,
SAINT-GEORGES, Catherine,
SAINT-OURS, Pierre de, , TABAUT, Jean, ,
SAINT-OURS, Jean-Baptiste des Chaillons TABEAU,
de, , TALON, Jean, , ,
SAINT-PÈRE, Agathe de, , TANGUAY, Cyprien,
SAINT-PÈRE, Jean de, , , , , TARDIF, Claude,
, , TARTRE, Guillaume,
SAINT-PÈRE, Mathurine de, , TATE, Jane,
SAINT-ROMAIN, François Chorelle de, TAVERNIER, Marie-Anne,
, TESSIER, Marie-Hypolite,
SAINT-VALLIER, monseigneur Jean- TESSIER dit LAVIGNE, Agnès, ,
Baptiste de la Croix de Chevrières de, TESSIER dit LAVIGNE, Jacques, ,
SALVAIL dit TRÉMONT, Antoine, TESSIER dit LAVIGNE, Jean,
L E V IE U X-M O N T R É A L
Remerciements
Introduction
Les sources
Le système de mesures
Méthodologie
Aperçu historique
SECTEUR NUMÉRO
Les débuts
Messier dit Saint-Michel
De Pierre Gadois à la Banque Royale
Le Centre de commerce mondial
Le quadrilatère McGill, Saint-Jacques, Saint-Pierre et Notre-Dame
Les récollets
Les rues Saint-Pierre et Saint-Paul
SECTEUR NUMÉRO
Un important repère
Conflagration
Commune et cimetière
Un réseau urbain prend forme
Le morcellement s’accentue
Le côté sud de la rue Saint-Paul jusqu’à la rue Saint-Nicolas
Un gouverneur pas très « catholique »
Le polygone borné par les rues Saint-Paul, Saint-Pierre et du Saint-
Sacrement et par la limite est de la concession de Robert Cavelier
Héritage et partage
La concession de Jean Milot
La concession de Jean Desroches (partie sud)
Le quadrilatère compris entre les rues du Saint-Sacrement
et Notre-Dame, depuis la concession de Robert Cavelier
jusqu’à la rue Saint-François-Xavier
Le polygone compris entre les fortifications et les rues
Saint-François-Xavier, Notre-Dame et Saint-Pierre
SECTEUR NUMÉRO
Urbain Tessier dit Lavigne
La Banque Canadienne Nationale
Les Messieurs de Saint-Sulpice
La Bourse de Montréal
Un secteur durement touché
Le château de Maisonneuve
Au sud de la rue Saint-Paul
SECTEUR NUMÉRO
Jeanne Mance et l’Hôtel-Dieu
Au sud de la rue Saint-Paul
Les Hospitalières et les Dames de la Congrégation
Au nord de la rue Notre-Dame
SECTEUR NUMÉRO
Les concessions de Lambert Closse
« Les » palais de justice
Sabrevois de Bleury et les barons de la fourrure
Le milieu des patriotes, des intellectuels… et aussi de la société
mondaine francophone du e siècle
Le côté sud de la rue Saint-Paul
Le domaine du gouverneur
SECTEUR NUMÉRO
L’hôtel de ville
Le côté nord de la rue Notre-Dame entre les rues Gosford
et Bonsecours
Le de la rue Saint-Louis
Autour du château Ramesay
Saint-Paul côté sud, de la place Jacques-Cartier à la chapelle
Notre-Dame-de-Bon-Secours
Sainte-Marguerite-Bourgeoys et le bienheureux André-Grasset
La parenté est arrivée
Le coteau Saint-Louis
Conclusion
Crépuscule et aube nouvelle
Bibliographie
Index
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