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LE
LANGAGE
M. WONE
INTRODUCTION
Le langage désigne tout système de signes pouvant servir de moyen de communication.
Cette définition pose déjà l’idée que le langage est spécifique à l’homme, mais elle admet
implicitement l’existence d’autres types de langage : les gestes, l’écriture, le regard, l’art,
la musique, la gestuelle, le langage des fleurs, de la nature, des couleurs etc. Certains
reconnaissent le langage animal qui serait différent du langage humain par ses
caractères. Le langage animal est naturel, innée, instinctif et est l’expression des besoins
de l’animal. C’est aussi un langage répétitif, commun à une espèce particulière. A la
différence du langage animal, le langage humain repose sur des signes qui sont des
instruments, ce qu’on appelle outils linguistiques et ils sont conventionnels. Ils ne sont
pas innés, mais acquis. Dire que les signes sont arbitraires, c’est dire qu’ils ont été
librement choisis et n’entretiennent aucun rapport de ressemblance naturelle avec ce
qu’ils désignent. En d’autres termes, les signifiants (mots) ne ressemblent pas aux
signifiés (objets). Les signes sont aussi relatifs, c’est à dire ils varient d’une société à une
autre et d’une époque à une autre. Bref, nous étudierons ici les rapports entre le langage,
la langue et la parole. Ensuite, nous aborderons les rapports que le langage entretient
avec la pensée et enfin nous examinerons les différentes formes et fonctions du langage.
- La fonction magique ou créatrice peut être perçue dans la pratique du sorcier qui,
par ses incantations, arrive à agir sur le réel, la nature. Avec son abracadabra ou toute
autre formule, le magicien produit l’effet souhaité. La dimension magique du langage
trouve son expression la plus achevée dans le verbe divin. Dans les religions révélées,
Dieu a créé le monde par le pouvoir du verbe en disant à la lumière « sois » et la lumière
fut.
- La fonction thérapeutique : Le langage soigne, il peut permettre de soigner l’individu
de ses peines et souffrances. Celui qui croule sous le poids du remords se soulage
lorsqu’il se confesse. La psychanalyse guérit par la méthode du divan ; le « ndëpp »
(exorcisme, cérémonie pleine de rituels) guérit également.
On constate que le langage a d’autres fins en plus de sa fonction essentielle qui est la
communication. Si le langage rapproche, il peut aussi séparer. En effet, certains mots
peuvent blesser, choquer, nuire à l’intégrité d’autrui. On peut donner l’exemple des
injures, des calomnies. Le langage peut également être source d’incompréhension, de
quiproquo. C’est parce que les mots peuvent avoir plusieurs sens et peuvent être
diversement interprétés. En résumé, on retiendra que le langage peut, à la fois, unir et
séparer. C’est pourquoi Holderlin disait : « Le langage est le bien le plus précieux et le plus
dangereux que les dieux ont donné aux hommes ». Ces différentes fonctions du langage
révèlent ainsi son pouvoir et son efficacité.
V- LE LANGAGE ET LE REEL
Une rupture peut cependant s’établir entre la pensée et le langage. Dans le lapsus et le
délire, le langage est séparé de la pensée. Il arrive aussi que ce que nous disons ne
traduit pas fidèlement la pensée. C’est pourquoi on dit souvent que le langage est
infidèle à la pensée puisque incapable de traduire exactement nos pensées, nos
sentiments, nos émotions etc. Parfois, quand la personne est sous l’effet d’une colère
excessive ou d’une joie débordante, elle a du mal à exprimer ses sentiments. Le langage
présente des limites et c’est pourquoi il peut manquer royalement la réalité ou même la
masquer. Il lui arrive même assez souvent d’être incapable d’exprimer des émotions et
la personne se tait tout bonnement parce qu’elle entre dans l’univers de l’ineffable, de ce
qui ne peut être dit, faute de mots adéquats. C’est à ce titre que Ludwig Wittgenstein
disait : « Ce qu’on ne peut dire, il faut le taire ».
Mais selon Hegel, il est faux de dire que le langage est inapte à traduire nos pensées. A
l’en croire, une pensée qui ne trouve pas son mot n’est pas encore arrivée à maturité,
elle est une pensée « à l’état de fermentation » et trouvera forcément son mot lorsqu’elle
sera mû re. Hegel critique ainsi l’ineffable ; pour lui, tout peut se dire, car tout a un mot. Il
affirme que c’est seulement dans et par le langage que la pensée peut se réaliser. Dès
lors, on peut comprendre Boileau qui disait : « Ce qui se conçoit bien, s’annonce
clairement et les mots pour le dire viennent aisément ».
Conclusion
Le langage a toujours intéressé la philosophie et il doit être l’affaire de tous, surtout des
philosophes. C’est pourquoi Alain a dit : « Celui qui n’a jamais réfléchi sur le langage n’a
pas encore vraiment commencé à philosopher ». Le linguiste Roman Jakobson, dans ses
Essais de linguistique générale démontre que la plupart des actes de langage mettent en
œuvre 6 facteurs : un émetteur (ou locuteur / destinateur) qui transmet un message à
un récepteur (ou destinataire) dans un contexte, selon un code qui est commun à
l’émetteur et au récepteur et par le biais d’un canal (ou contact) qui établit et maintient
la communication (la parole ou l’écrit).
L’étude des langues a considérablement progressé avec l’avènement de la linguistique.
Cette discipline connaîtra son essor avec Ferdinand de Saussure. Ce dernier considère la
langue comme un ensemble, un système de signes (mots). Le signe linguistique est
constitué de deux parties : le signifiant et le signifié. Le signifiant est la partie sonore,
alors que le signifié est l’idée, le concept auquel renvoie le signifiant. Ferdinand de
Saussure dit que le rapport signifiant-signifié est arbitraire et c’est ce qui explique le
caractère conventionnel des langues.
Rappelons enfin que le langage est à la fois animal et humain. Dans le langage humain,
chaque locuteur a un niveau de langage et de vocabulaire en rapport avec ses
préoccupations personnelles, ses intérêts, sa vie professionnelle, comme l’écrit
Wittgenstein : « Les limites de mon langage sont les limites de mon monde ».