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Cours Analyse Fonctionnelle

Dr Timack NGOM

Master 1 Mathématiques

Université virtuelle du Sénégal


Table des matières

I Espaces vectoriels topologiques (EVT) 1


I.1 Définitions et théorèmes préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
I.2 EVT associé à une famille de semi-normes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
I.3 Quelques propriétés liées aux espaces vectoriels topologiques . . . . . . . . . . . 5
I.4 Espace de Fréchet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

i
Table des matières

ii
Chapitre I

Espaces vectoriels topologiques (EVT)

I.1 Définitions et théorèmes préliminaires


Définition I.1.1 Soient E et F deux espaces topologiques. On appelle ouvert élémentaire de
E × F tout ensemble de la forme U × V où U est un ouvert de E et V est un ouvert de F .
On appelle ouvert de E × F toute réunion d’ouverts élémentaires. Il est clair que cette fa-
mille d’ouverts forme une topologie. L’espace E × F muni de cette topologie est appelé produit
topologique de E et F .

Proposition I.1.1 Soit E × F le produit topologique des espaces topologiques E et F . Soit


f : E × F −→ G où G est un espace topologique. Supposons f continue.
Alors ∀a ∈ E, ∀b ∈ F fixés, les applications fa de F dans G et fb de E dans G définies par
fa (x) = f (a, x), ∀x ∈ F , fb (x) = f (b, x), ∀x ∈ E sont continues

Démonstration:

On considère fa . Soit x ∈ F et soit Ufa (x) un voisinage de fa (x). Il faut montrer qu’il existe
Ux ⊆ F de x tel que fa (Ux ) ⊆ Ufa (x) .

f : E × F −→ G est continue

Ufa (x) est un voisinage de fa (x) = f (a, x), donc il existe un voisinage U(a,x) ⊆ E × F de (a, x)
tel que ~ f (U(a,x) ⊂ Ufa (x) . Comme U(a,x) est voisinage de (a, x), d’après la définition de la
topologie de E × F , on peut trouver deux ouverts Ua et Ux tel que

Ua × Ux ⊆ U(a,x) (∗ ∗).

(∗ ∗)
fa (Ux ) = f ({a} × Ux ) ⊆ f (Ua × Ux ) ⊆ f (U(a,x) )

1
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

f (U(a,x) ) ⊂ Ufa (x)

Définition I.1.2 Soit K = R ou C. On appelle espace vectoriel topologique tout ensemble E


muni à la fois d’une structure d’espace vectoriel sur le corps K et d’une topologie telles les
conditions soient réalisées :

i) l’application E × E −→ E
(x, y) 7−→ x + y est continue,
ii) l’application E −→ E
x 7−→ −x est continue,
iii) l’application K × E −→ E
(λ, x) 7−→ λ · x est continue.

E est appelé espace vectoriel réel ou complexe selon que K est réel ou complexe.

Proposition I.1.2 Soit E un espace vectoriel topologique sur un corps K. Soient λ ∈ K, λ 6=


0 a ∈ E. Alors la dilatation

φ: E −→ E
x 7−→ λ · x + a est un homéomorphisme de E sur lui même

Démonstration:

La bijectivité (λ 6= 0).
y−a
φ−1 (y) = . Et d’après la proposition I.1.1 φ et φ−1 sont continues.
λ
9



g: K × E −→ E >
>
> 8
>


(λ, x) 7−→ λ · x >
= <
gλ (x) = g(λ, x) = λ · x
continues ⇒ : continues
>

h: E × E −→ E >
>
ha (x) = h(a, x) = x + a
>
>
;
(x, y) −→ x + y


2
I.2 EVT associé à une famille de semi-normes

I.2 EVT associé à une famille de semi-normes


Définition I.2.1 Soit E un espace vectoriel sur K = R ou C. On apelle semi-norme sur E
toute application p : E −→ R+ telle que
i) p(x) ≥ 0 (positivité)
ii) ∀λ ∈ R, p(λ · x) = |λ|p(x) (homogénéité)
iii) ∀x, y p(x + y) ≤ p(x) + p(y) (sous additivité)

Définition I.2.2 Soit E un espace vectoriel sur K et soit P = (Pi )i∈I une famille de semi-
normes sur E (finie ou infinie). Un ensemble U ⊆ E est appelé P − boule ouvert de centre
x ∈ E s’il existe i1 , · · · , im ∈ I (m < ∞) et r1 , · · · , rm > 0 tels que

U = {y ∈ E/Pik (x − y) < rk , 1 ≤ k ≤ m}

Définition I.2.3 Soit E un espace vectoriel sur K et soit P = (Pi )i∈I une famille de semi-
normes sur E (finie ou infinie). Un ensemble U ⊆ E est dit P − ouvert si ∀x ∈ U, il existe Bx
P − boule de centre x tel que Bx ⊆ U. Il est immédiat que la famille de ces P − ouverts est une
topologie sur E. Cette topologie est appelée la P − topologie ou la topologie associée à P.

Théorème I.2.1 Soit E un espace vectoriel réel et P une famille de semi-normes sur E, alors
E muni de la P − topologie est un espace vectoriel topologique.

Démonstration:

Il faut prouver que

i) l’application φ : E × E −→ E
(x, y) 7−→ x + y est continue,
ii) l’application ψ : K × E −→ E
(λ, x) 7−→ λ · x est continue,
iii) l’application Λ : E −→ E
x 7−→ −x est continue.

i) ? Soit (x, y) ∈ E × E, soit Ux+y un voisinage de x + y. Alors il existe une P − boule Bx+y de
centre x + y telle que Bx+y ⊆ Ux+y . Posons B0 := Bx+y − x − y.
1 1 1
B0 est une P − boule de centre 0 de même que B0 . Posons Bx = B0 + x et By = B0 + y.
2 2 2

3
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

Alors Bx et By sont des respectivement des P − boules de centre x et y.


Il suffit de prouver que pour tout (vx , vy ) ∈ Bx × By , on a vx + vy ∈ Ux+y .

1
vx = bx + x, bx ∈ B0
2
1
vy = by + y, by ∈ B0
2
vx + vy − x − y ∈ B0 =⇒ vx + vy ∈ Bx+y ⊂ Ux+y car B0 est convexe. Donc φ(Bx × By ) ⊂ Ux+y
ii) ? Soit (λ, x) ∈ R × E et soit Uλx un voisinage de λ · x. Alors il existe une P−boule Bλx de
centre λ · x, telle que Bλx ⊂ Uλx .

Bλx = {y ∈ E/Pik (λ · x − y) < rk 1 ≤ k ≤ m}.

Montrons qu’il existe un voisinage U(λ,x) de (λ, x) tel que ψ(U(λ,x) ) ⊂ Uλx .
0
On cherche ε > 0 et rk 1 ≤ k ≤ m tels que

B(λ,x)
z }| {
€ 0 Š
ψ ]λ − ε, λ + ε[×{y ∈ E/Pik (x − y) < rk 1 ≤ k ≤ m} ⊂ Bλx

Soit (µ, z) ∈ B(λ,x) , ψ(µ, z) = µ · z.


0
Pik (λ · x − µz) < rk ?
0 0
On sait que Pik (x − z) < rk =⇒ Pik (λ · x − λ · z) < |λ|rk =⇒

0
Pik (λ · x − µ · z) ≤ Pik (λ · z − µ · z) + |λ|rk
0
≤ Pik (µ · x − µ · z − λ · x + λ · z − µ · x + λ · x) + |λ|rk
€ Š 0
≤ Pik (µ − λ) · (x − z) + (λ − µ) · x + |λ|rk
0
≤ |µ − λ|Pik (x − z) + |µ − λ|Pik (x) + |λ|rk
0 0 0
≤ εPik (x) + εrk + |λ|rk < rk (∗)
‚ ‚ Œ  Œ
0 rk rk 0 rk ‹
il suffit de choisir ε et rk ε < inf , et rk < inf 1, tels que (∗) soit vérifié.
3 3Pik (x) 3λ
Au quel cas ψ(B(λ,x) ) ⊂ Bλ·x ⊂ Uλ·x .
iii) ? Utiliser la proposition I.1.1 (ou démonstration directe).


Proposition I.2.1 Soit E un espace vectoriel sur K et P = (Pi )i∈I une famille de semi-normes.
Alors, toute P−boule ouverte est convexe.

4
I.3 Quelques propriétés liées aux espaces vectoriels topologiques

Démonstration:

Soit Bx une P-boule de centre x ∈ E

Bx = {y ∈ E/Pik (x − y) < rk , 1 ≤ k ≤ m}.

Soient (u, v) ∈ Bx2 et t ∈ [0, 1] montrons que tu + (1 − t)v ∈ Bx . On a

Pik (x − (tu + (1 − t)v)) = Pik (tx + x − tx − tu − (1 − t)v)


Pik (tx − tu) + Pik (x − tx − (1 − t)v)
≤ tPik (x − u) + (1 − t)Pik (x − v)
< trk + (1 − t)rk = rk .

Donc tu + (1 − t)v ∈ Bx d’où Bx est convexe.




Remarque I.2.1 Les espaces vectoriels munis d’une topologie associée à une famille de semi-
normes sont souvent appelés espaces vectoriels topologiques localement convexes (evtlc). Parce
que tout point a une base de voisinage convexe, c’est-à-dire ∀x ∈ E, quelque soit le voisinage
Ux de x il existe un ouvert convexe Bx tel que x ∈ Bx ⊂ Ux .

I.3 Quelques propriétés liées aux espaces vectoriels to-


pologiques
Théorème I.3.1 Soit K et F sous-ensembles d’un espace vectoriel topologique E. Supposons
que K est compact, F fermé et que K ∩ F = ∅. Alors il existe un voisinage symétrique ouvert
V de 0 tel que
(K + V ) ∩ (F + V ) = ∅.

Remarque I.3.1 Notons que K + V est la réunion de translations x + V (x ∈ K). K + V


est alors un sous-ensemble d’ouverts contenant K. Donc le théorème I.3.1 implique qu’il existe
deux ouverts disjoints contenant respectivement K et F .

Lemme I.3.1 Soit W un voisinage ouvert de 0 dans E, alors, il existe un voisinage ouvert U
de 0 dans E, tel que U est symétrique c’est-à-dire U = −U , et satisfait U + U ⊂ W .

5
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

Démonstration:

Puisque E est un espace vectoriel topologique,

φ: E × E −→ E
est continue en (0, 0).
(x, y) 7−→ x + y

D’où pour tout voisinage W de φ(0, 0) = 0 il existe deux voisinages ouverts V1 , V2 de 0 tels que
φ(V1 × V2 ) = V1 + V2 ⊂ W.
Posons U = V1 ∩ V2 ∩ (−V1 ) ∩ (−V2 ). On a donc U + U ⊂ W


Démonstration du théorème I.3.1 :

Soit x ∈ K, par hypothèse x ∈ F c ouvert. Donc F c − x est un voisinage de 0 car la topologie


des espaces vectoriels topologiques est invariante par translation. En appliquant le lemme I.3.1
deux fois, on obtient : il existe un voisinage ouvert symétrique Vx de 0 tel que

Vx + Vx + Vx + Vx ⊂ F c − x.

D’où
(x + Vx + Vx + Vx + Vx ) ∩ F = ∅.

Il s’en suit que


(x + Vx + Vx ) ∩ (F + Vx ) = ∅. (1)

Puisque K est compact, il existe x1 , · · · , xn ∈ K tels que


n
[
K⊂ (xi + Vxi ).
i=1

Posons n
\
V = Vxi
i=1
n
[ n
[
K +V ⊂ (xi + Vxi + V ) ⊂ (xi + Vxi + Vxi ).
i=1 i=1

Or d’après (1), on a
(xi + Vxi + Vxi ) ∩ (F + V ) = ∅ ∀i,

d’où (K + V ) ∩ (F + V ) = ∅.

6
I.3 Quelques propriétés liées aux espaces vectoriels topologiques

Définition I.3.1 Soit E un espace vectoriel sur le corps K, soit B un sous-ensemble de E.


i) On dit que B est équilibré si

∀α ∈ K, |α| ≤ 1, alors αB ⊂ B.

ii) On dit que B est absorbant si

∀x ∈ E, ∃ t = t(x) > 0 / x ∈ tB.

iii) Si B est absorbant, on appelle fonction de Minkowski ou jauge de B, la fonction


µB : E −→ R+ définit par

x
∀x ∈ E, µB (x) = inf {t > 0 / ∈ B}.
t

Théorème I.3.2 Supposons que B est un sous-ensemble convexe absorbant de E un espace


vectoriel sur le corps K. Alors
i) µB (x + y) ≤ µB (x) + µB (y)
ii) µB (tx) = tµB (x) si t > 0
iii) µB est une semi norme si B est équilibré
iv) si A = {x /µB (x) < 1} et C = {x /µB (x) ≤ 1} alors A ⊂ B ⊂ C et µA = µB = µC .

Démonstration:

i) ? Soit t = µB (x) + ε et s = µ(y) + ε pour ε > 0


x y
alors et sont dans B, d’où
t s
t x s y x+y
× + × = ∈B
s+t t s+t s s+t

Ceci montre que µB (x + y) ≤ s + t = µB (x) + µB (y) + 2ε d’où i).


La propriété ii) est trivial.
iii) ?
µB (0) = µB (0 · x) = 0µB (x) = 0

7
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

−x
µB (−x) = inf {t > 0, ∈ B}
t
x
= inf {t > 0, ∈ B} = µB (x)
t

donc si t < 0
µB (tx) = µB ((−t)(−x)) = −tµB (−x) = |t|µB (x).

iv) ? Nous avons A ⊂ B ⊂ C, d’où


µC ≤ µB ≤ µA .

Pour obtenir l’égalité, fixons x ∈ E et s, t > 0 tels que µC (x) < s < t.
D’où  ‹  ‹
x x x s
∈ C, µB ≤ 1, µB ≤ <1
s s t t
x
d’où ∈ A, il s’ensuit que µA (x) ≤ t.
t
Ceci est vrai pout tout t > µC (x). D’où µA (x) ≤ µC (x)


Lemme I.3.2 Soit E un espace vectoriel topologique, tout voisinage de 0 est absorbant.

Démonstration:

Soit C un voisinage de 0, donc il existe un ouvert U tel que U ⊂ C.

E e.v.t =⇒ ψ : K × E −→ E
est continue
(λ, x) 7−→ λ · x.

Soit x fixé dans E, d’après la proposition I.1.1,

ψx : K −→ E
est continue
λ 7−→ λ · x.

donc ψx−1 (U) est un ouvert, de plus 0 ∈ ψx−1 (U).


Il existe donc B(0, r) ⊂ ψx−1 (U). En particulier

r r
∈ ψx−1 (U). D’où · x ∈ U ⊂ C.
2 2

C est donc absorbant.




8
I.3 Quelques propriétés liées aux espaces vectoriels topologiques

Corollaire I.3.1 Soit f une forme linéaire définie sur un espace vactoriel topologique E. S’il
existe un voisinage V de 0 tel que f (V ) = 0, alors f ≡ 0

Démonstration:

Si V est un voisinage de 0, alors V est absorbant, c’est-à-dire


∀x ∈ E, ∃ t > 0 tel que tx ∈ V , d’où f (tx) = tf (x) = 0
donc f (x) = 0.


Lemme I.3.3 Soient E un espace vectoriel sur un corps K (R où C) et f : E −→ K une


forme linéaire, alors les deux propriétés suivantes sont équivalentes :
i) f est continue
ii) il existe un ouvert U ⊆ E, U 6= ∅ tel que sup |f (x)| < ∞.
x∈U

Démonstration:

i) ⇒ ii) ? f continue.
Posons U = f −1 (BK (0, 1)), U est ouvert, U 6= ∅
car 0 ∈ U, et ∀x ∈ U, |f (x)| < 1.
ii) ⇒ i) ? Soit U 6= ∅, U ouvert tel que

sup |f (x)| < ∞ et soit α = sup |f (x)|.


x∈U x∈U

Soit ε, on cherche un voisinage Uε ⊆ E de 0 tel que

|f (x)| < ε ∀x ∈ Uε .

Soit a ∈ U, alors U − a est un voisinage de 0.


ε
Soit Uε = (U − a), d’après la proposition I.1.2 Uε est un voisinage de 0.
2(α + |f (a)|)
ε
Soit y ∈ Uε , y = x avec x ∈ U − a
2(α + |f (a)|)
ε ε(α + |f (a)|) ε
⇒ |f (y)| = |f (x)| ≤ ≤ < ε.
2(α + |f (a)|) 2(α + |f (a)|) 2
Donc f est continue en 0. Vérifier que f est donc continue en E.


9
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

I.4 Espace de Fréchet


Proposition I.4.1 Si P = (Pi )i∈I est une famille de semi-normes sur un espace vectoriel E,
la P-topologie est séparée si et seulement si pour tout x 6= 0 il existe une semi-norme Pi ∈ P
telle que Pi (x) > 0

Preuve
Supposons que la P-topologie est séparé et montrons qu’il existe une semi-norme Pi ∈ P
telle que Pi (x) > 0.
6 0 il existe une P-boule de centre 0 B0 = {y ∈ E/Pik (y) < rk , 1 ≤ k ≤ m} ne
Soit x =
contenant pas x.
x∈/ B0 ⇒ Pik (x) ≥ rk > 0, 1 ≤ k ≤ m.

Inversement supposons que pour tout x 6= 0 il une semi-norme Pi ∈ P telle que Pi (x) > 0
et montrons que la P-topologie est séparé.
Soient x ∈ E et y ∈ E tels que x 6= y. On a x − y 6= 0 donc il existe Pi ∈ P telle que
Pi (x − y) = r > 0. §
rª §

Les P-boules Bx = z ∈ E/Pi (x − z) < et By = z ∈ E/Pi (y − z) < sont des voisi-
2 2
nages disjoints de x et y.
En effet

r r
z ∈ Bx ∩ By ⇒ Pi (x − y) ≤ Pi (x − z) + Pi (z − y) < + =r
2 2

Définition I.4.1 Un espace vectoriel E muni d’une famille séparante de semi-normes P =


(Pi )i∈I est appelé espace vectoriel topologique localement convexe et séparé (e.v.t.l.c.s)

Théorème I.4.1 Si P = (pi )i∈I est une famille de semi-normes sur un espace vectoriel E, et
q une semi-norme sur E. Alors il y a équivalence entre
(i) q est continue pour la P-topologie.
(ii) Il existe un nombre fini (pi1 , pi2 , · · · , pik ) d’éléments de P et un nombre M tels que q(x) ≤
M sup pij (x) pour tout x de E.
1≤j≤k

(iii) q est bornée sur un voisinage de 0.

Démonstration:

10
I.4 Espace de Fréchet

(i) ⇒ (iii) q est continue

∀ε ∃ V ∈ V(0) / ∀x ∈ V |q(x) − q(0)| < ε

en prenant ε = 1 on a ∀x ∈ V |q(x)| < 1 donc q est bornée sur un voisinage V de 0.


(iii) ⇒ (ii) q est bornée sur un voisinage V de 0 donc il existe une P-boule
¦ ©
B = y ∈ E / pij (y) < rj 1 ≤ j ≤ k

sur la quelle q est majorée par µ > 0. Soir x ∈ E on a

pij (x) ε pi (x)


∀ε > 0 t = sup + > j ∀1 ≤ j ≤ k
1≤j≤k rj µ rj
 ‹
pij (x) x x
donc rj > = pij ∀1 ≤ j ≤ k ce qui implique que appartient à B d’où
t t t


q ≤ µ ⇒ q(x) ≤ tµ.
t

En remplaçant t par sa valeur on obtient

pij (x)
q(x) ≤ µ sup + ε ∀ε > 1
1≤j≤k rj

1
donc q(x) ≤ M sup pij (x) où M = µ sup
1≤j≤k 1≤j≤k rj
(ii) ⇒ (i) puis que q vérifie (ii) on a

|q(x) − q(y)| ≤ q(x − y) ≤ M sup pij (x − y)


1≤j≤k

donc § ª
ε
∀ε > 0 ∀y ∈ z ∈ E / pij (x − z) < 1 ≤ j ≤ k , |q(x) − q(y)| < ε
M
d’où q est continue en x


Corollaire I.4.1 Soient P une famille de semi-normes sur un espace vectoriel E, Q une famille
de semi-normes sur un espace vectoriel F et f : E −→ F une application linéaire. Alors f
est continue de E muni de la P-topologie dans F muni de la Q-topologie si et seulement si q ◦ f
est une semi-norme continue sur E pour tout q ∈ Q.

11
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

Démonstration:

Si f est continue pour tout q ∈ Q, alors q est continue sur F donc q ◦ f est continue sur E
comme composée de deux fonctions continues, il est évident que q ◦ f est une semi-norme sur
E.
Supposons que q ◦ f est continue. Soit a ∈ E
Soit V ∈ V (f (a)) montrons qu’il existe W ∈ V(a) tel que f (W ) ⊂ V .
¦ ©
V ∈ V (f (a)) ⇒ ∃B = y ∈ F / qij (f (a) − y) < rj 1 ≤ j ≤ k ⊂ V.

Comme pour tout q ∈ Q q ◦ f est continue on a

∀q ∈ Q, q (f (a) − f (x)) ≤ M sup pil (a − x).


1≤l≤m

Soit  
r
W = z ∈ E / pil (a − z) < 1 ≤ l ≤ m, r = inf rj ,
M 1≤j≤k

si x ∈ W on a

qij (f (a) − f (x)) ≤ M sup pil (a − x) < r ≤ rj ∀1 ≤ j ≤ k.


1≤l≤m

Ce ci fait que f (x) ∈ B donc f (W ) ⊂ B ⊂ V d’où f est continue




Corollaire I.4.2 Si P = (pi )i∈I est une famille de semi-normes sur E, et f : E → K une
forme linéaire, alors f est continue pour la P-topologie si et seulement s’il existe un nombre
fini (pi1 , pi1 , ..., pik ) d’éléments de P et un nombre M tels que, pour tout x ∈ E, on ait

|f (x)| ≤ M sup pij (x)


1≤j≤k

Démonstration:

Il suffit de remarquer que, lorsque f est une forme linéaire, la fonction q : x → |f (x)| est une
semi-norme, que q est continue si f l’est, et que si q est continue, on a

|f (x) − f (y)| = |f (x − y)| = q(x − y) < ε

en tout point y d’un voisinage de x.

12
I.4 Espace de Fréchet


Théorème I.4.2 Si P = (Pi )i∈I est une famille dénombrable et séparante de semi-normes
sur un espace vectoriel E, la P-topologie peut être définie par une distance d invariante par
translation, c’est-à-dire vérifiant pour tout x, tout y et tout z éléments de E : d(x + z, y + z) =
d(x, y), pour laquelle les boules sont convexes.
Inversement, si P = (Pi )i∈I est une famille de semi-normes et si la P-topologie est métri-
sable, il existe une suite croissante (Pik )k∈N de semi-normes pour laquelle la P-topologie coïncide
avec la topologie définie par la famille des (Pi )i∈I .
Démonstration:

Soit P = (Pk )k∈N est une famille dénombrable et séparante de semi-normes sur un espace
vectoriel E, montrons que la P-topologie peut être définie par une distance d invariante par
translation, c’est-à-dire vérifiant pour tout x, tout y et tout z éléments de E : d(x + z, y + z) =
d(x, y), pour laquelle les boules sont convexes.
Posons
pn (x − y)
d(x, y) = sup αn ∀(x, y) ∈ E 2
n 1 + pn (x − y)
où (αn )n∈N est une suite réelle positive et décroissante qui tend vers zéro (n’importe laquelle).
Montrons que d est une distance
i) d(x, y) = 0 ⇒ pn (x − y) = 0 ∀n ∈ N ⇒ x − y = 0 ⇒ x = y et d(x, x) = 0.
pn (x − y) pn (y − x)
ii) d(x, y) = sup αn = sup αn = d(y, x).
n 1 + pn (y − x) n 1 + pn (x − y)
t
iii) Soit f la fonction qui à tout réel positif t on associe f (t) = . on a
1+t

1
f 0 (t) = >0
(1 + t)2

donc f est croissante.


D’autre part on a

pn (x − y) ≤ pn (x − z) + pn (y − z) ⇒ f (pn (x − y)) ≤ f (pn (x − z) + pn (y − z))

donc
pn (x − y) pn (x − z) + pn (y − z) pn (x − z) pn (y − z)
≤ ≤ +≤
1 + pn (x − y) 1 + pn (x − z) + pn (y − z) 1 + pn (x − z) pn (y − z)
d’où
d(x, y) ≤ d(x, z) + d(y, z).

13
Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

i) ii) et iii) impliquent que d est une distance. Cette distance est clairement invariante par
translation.
Soit B(x0 , r) une boule ouverte de centre x0 et de rayon r > 0 pour la métrique d. On veut
vérifier que c’est un voisinage de x0 pour la P-topologie. Si x ∈ B(x0 , r), alors on a

pn (x − x0 )
d(x0 , x) = sup αn < r.
n 1 + pn (x − x0 )

Donc il existe ε > 0 tel que

pn (x − x0 )
∀n ∈ N αn < ε < r. (I.4.1)
1 + pn (x − x0 )

Si αn ≤ ε ∀n ∈ N alors B(x0 , r) = E. Sinon il existe N ∈ N tel que αn ≤ ε ∀n > N et αn > ε


pour n ≤ N. Pour n ≤ N, on en déduit de (I.4.1)

ε
pn (x − x0 ) <
αn − ε

On vient de prouver l’inclusion


 
\ ε
B(x0 , r) ⊂ z ∈ E/pn (z − x0 ) < .
n≤N αn − ε

Montrons que  
\ ε
B(x0 , r) = z ∈ E/pn (z − x0 ) < .
n≤N αn − ε
 
\ ε
Soit x ∈ z ∈ E/pn (z − x0 ) < on a
n≤N αn − ε

pn (x − x0 )
∀n ≤ N αn <ε
1 + pn (x − x0 )

et
pn (x − x0 )
∀n > N α n ≤ ε ⇒ αn ≤ε
1 + pn (x − x0 )
donc
pn (x − x0 )
∀n ∈ N αn ≤ε<r
1 + pn (x − x0 )
d’où x ∈ B(x0 , r).
On vient de montrer l’égalité donc B(x0 , r) est une intersection finie de P-boules d’où

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I.4 Espace de Fréchet

B(x0 , r) un ouvert pour la P-topologie. Ce qui montre que la P-topologie est plus fine que la
topologie associée à d et que les boules de d sont convexes.
D’autre part soit V un ouvert de la P-topologie et soit x ∈ V il existe une P-boule Bx
centrée en x tel Bx ⊂ V

Bx = {y ∈ E / pj (x − y) < εj j ∈ J ⊂ N J fini}

Soient ε = min εj , N = max j. Montrons qu’il existe une boule Bdx de la topologie métrique
j∈J j∈J
centrée en x telle que Bdx ⊂ Bx .
ε
Soit y ∈ Bdx (x, αN ) on a
1+ε

ε pn (x − y) ε
d(x, y) < αN ⇒ αn < αN .
1+ε 1 + pn (x − y) 1+ε

αN
Pour tout n ≤ N on a ≤ 1 donc
αn

pn (x − y) ε
∀n≤N < ⇒ pn (x − y) < ε
1 + pn (x − y) 1+ε

donc
∀ j ∈ J pj (x − y) < ε

d’où
Bdx ⊂ Bx ⊂ V.

On obtient
[
V = Bdx .
x∈V

V est une union quelconque de boules ouvertes de la topologie métrique donc un ouvert de la
topologie métrique ce qui montre que la topologie associée à d est plus fine que la P-topologie.
Donc la P-topologie est définie par la métrique d.
Inversement, soit P = (Pi )i∈I une famille de semi-normes sur un espace vectoriel topologique
E telle que la P-topologie soit métrisable montrons qu’il existe une suite croissante (Pik )k∈N de
semi-normes pour laquelle la P-topologie coïncide avec la topologie définie par la famille des
(Pi )i∈I .
Si, maintenant, la P-topologie est métrisable, définie par une distance d, chaque boule
Bd (0, 2−k ) est un voisinage de 0, donc contient une P-boule, il existe donc une partie finie

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Chapitre I. Espaces vectoriels topologiques (EVT)

Jk ⊂ P et un réel strictement positif εk tels que

{x ∈ E / ∀ p ∈ Jk p(x) < εk } ⊂ Bd (0, 2−k ).


[
Soit (qm )m∈N l’énumération de l’ensemble dénombrable P0 = Jk . Montrons que la P0 -
k∈N
topologie est plus fine que la P-topologie initiale.
Soit V un ouvert de la P-topologie et soit x ∈ V . Alors il V − x est un voisinage de 0 donc
il existe k0 ∈ N tel que Bd (0, 2−k0 ) ⊂ V − x d’où

B0 = {x ∈ E / ∀ p ∈ Jk0 p(x) < εk0 } ⊂ Bd (0, 2−k0 ) ⊂ V − x.

B0 est un ouvert de la P0 -topologie donc Vx = B0 + x ⊂ V est un ouvert de la P0 -topologie


[
d’où V = Vx est un ouvert de la P0 -topologie comme union quelconque d’ouverts de la P0 -
x∈V X
topologie. Il suffit maintenant de prendre pn = qm pour avoir la suite croissante recherchée.
m≤n


Remarque I.4.1
Il résulte de ce qui précède qu’une suite (xn ) converge alors vers a si pk (xn − a) → 0 pour tout
k. Une suite (xn ) est de Cauchy pour d si et seulement si, pour tout k et tout ε > 0, il existe
un rang N tel que pk (xm − xn ) < ε pour m et n supérieurs à N , ou encore que (xm − xn ) tend
vers 0 quand m et n tendent vers l’infini.
On remarque ainsi que la complétude de E ne dépend alors que de la P-topologie, et pas de
la distance invariante par translation choisie.

Définition I.4.2

1. On appelle espace de Neumann tout espace vectoriel semi-normé séparé complet.


2. On appelle espace de Fréchet tout espace vectoriel semi-normé métrisable complet.
3. On appelle espace de Banach tout espace vectoriel normé complet.
4. On appelle espace de Hilbert tout espace vectoriel normé complet dont la norme est issue
d’un produit scalaire.

Remarque I.4.2 Pour tout espace vectoriel :

de Hilbert ⇒ de Banach ⇒ de Fréchet ⇒ de Neumann

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