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Cours Analyse Fonctionnelle

Dr Timack NGOM

Master 1 Mathématiques

Université virtuelle du Sénégal


Table des matières

II Espace de Banach 1
II.1 Norme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
II.2 Espace de Banach . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
II.3 Dual topologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

i
Table des matières

ii
Chapitre II

Espace de Banach

II.1 Norme
On se donne un K-espace vectoriel E (K = R où K = C).

Définition II.1.1 Un espace métrique noté (E, d) est un ensemble E muni d’une application
d : E 2 −→ R+ vérifiant :
1- ∀ (x, y) ∈ E 2 , x = y ⇔ d(x, y) = 0 ( axiome de séparation )
2- ∀ (x, y) ∈ E 2 , d(x, y) = d(y, x) ( axiome de symétrie)
3- ∀ (x, y, z) ∈ E 3 , d(x, y) ≤ d(x, z) + d(z, y) (Inégalité triangulaire )
Deux métriques ( ou distances ) d et d0 de E sont dites équivalentes s’il existe (α, β) ∈ K2 tels
que :
∀(x, y) ∈ E 2 d(x, y) ≤ αd0 (x, y) et d0 (x, y) ≤ βd(x, y).

Autrement dit il existe λ1 et λ2 tels que λ1 d(x, y) ≤ d0 (x, y) ≤ λ2 d(x, y)

Exemple II.1.1 E = R
∀ (x, y) ∈ R2 , d(x, y) = |x − y|

Définition II.1.2 On appelle norme sur E l’application k . k définie de E dans R+ telle que
1- ∀ x ∈ E k x k= 0 ⇔ x = 0E
2- ∀ x ∈ E, ∀λ ∈ K on a k λx k= |λ| k x k
3- ∀ (x, y) ∈ E 2 on a k x + y k≤k x k + k y k .
E muni de k . k noté (E, k . k) est appelé espace vectoriel normé (e v n). Il s’agit d’un cas
particulier d’espace métrique dont la distance est donnée par

d(x, y) =k x − y k ∀(x, y) ∈ E 2 .

1
d est appelée distance induite par la norme k . k.
La topologie sur E est la topologie d’espace métrique. On dit qu’une suite (xn ) ⊂ E converge
(fortement) vers x ∈ E si k xn − x k→ 0 lorsque n → +∞

Exemple II.1.2

(a) Soit [a, b] un intervalle de R et notons C 0 ([a, b]) l’espace vectoriel constitué des fonctions
continues sur [a, b] et à valeurs dans R. L’application k · kC 0 ([a,b]) qui à f ∈ C 0 ([a, b]) on
associe
k f kC 0 ([a,b]) = sup | f (t) |
t∈[a,b]

définit une norme sur C 0 ([a, b]).


(b) Sur C 0 ([a, b]) on peut aussi définir une autre norme,

Z b
k f k = | f (t) | dt
R
a

On peut donc avoir plusieurs normes sur le même espace.

Définition II.1.3 Si E est muni de plusieurs normes on dit que deux normes quelconques
k . ki et k . kj sont équivalentes s’ils existent deux réels strictement positifs α et β tels que :

∀x ∈ E on ait k x ki ≤ α k x kj et k x kj ≤ β k x ki

Proposition II.1.1

1. | k x k − k y k | ≤k x − y k ∀(x, y) ∈ E 2
2. si xn → x alors k xn k→k x k lorsque n → +∞ (xn ) ⊂ E
3. si αn → α et xn → x alors αn xn → αx lorsque n → +∞ (αn ) ⊂ K et (xn ) ⊂ E
4. si yn → y et xn → x alors yn + xn → y + x lorsque n → +∞ (yn ) ⊂ E et (xn ) ⊂ E

Démonstration:

1. Soit (x, y) ∈ E 2 on a

k x k=k x − y + y k≤k x − y k + k y k

2
donc
k x k − k y k≤k x − y k

De même
k y k − k x k≤k x − y k

d’où
| k x k − k y k | ≤k x − y k .

2. Soit (xn ) ⊂ E telle que xn → x lorsque n → +∞ on a

∀n ∈ N | k x k − k xn k | ≤k x − xn k .

Comme k x − xn k→ 0 lorsque n → +∞ donc k xn k→k x k lorsque n → +∞.


3. Soient (αn ) ⊂ K et (xn ) ⊂ E telles que αn → α et xn → x on a

k αx − αn xn k≤k αx − αn x k + k αn x − αn xn k= |α − αn |· k x k +|αn |· k x − xn k

puisque (αn ) est une suite bornée on déduit αn xn → αx lorsque n → +∞


4. Soit (yn ) ⊂ E et (xn ) ⊂ E telles que yn → y et xn → x on a

k (x + y) − (yn + xn ) k=k x − xn + y − yn k≤k x − xn k + k y − yn k

donc yn + xn → y + x lorsque n → +∞


Définition II.1.4 Soient (X, k · kX ) et (Y, k · kY ) deux K-espaces vectoriels normés.


1. Un ensemble ϑ ⊂ X est un ouvert dans X si

∀x ∈ ϑ ∃ ε > 0 / B(x, ε) = {y ∈ X / k x − y kX < ε} ⊂ ϑ.

2. Un ensemble F ⊂ X est un fermé dans X si X\F est un ouvert dans X.


3. Soit (xn ) une suite de X. On dit (xn ) converge ver l ∈ X si

∀ ε > 0, ∃ N ∈ N / ∀ n ≥ N k xn − l kX < ε.

4. Un ensemble F ⊂ X est un fermé dans X si une suite (xn ) de F converge vers l, alors
l ∈ F.

3
5. Une fonction f de X dans Y est continue sur X si

∀ x0 ∈ X, ∀ ε > 0, ∃ η > 0 / ∀ x ∈ X, k x0 − x kX < η ⇒k f (x) − f (x0 ) kY < ε.

6. Un ensemble A ⊂ X est compact si de toute suite d’éléments de A, on peut extraire une


sous-suite convergente vers un élément de A.
Proposition II.1.2 Soit (X, k · k) un K-espace vectoriel normé.
1. Si A ⊂ X est compact, alors A est fermé borné.
2. Si X est de dimension finie, alors A est compact si et seulement si A est fermé borné.
Démonstration:

1. Soi A ⊂ X un compact montrons que A est fermé borné.


Montrons d’abord que A est fermé.
Soit (xn ) ⊂ A qui converge vers l. Comme A est compact il existe une sous-suite de (xn )
qui converge vers l0 ∈ A. Par unicité de la limite l0 = l ∈ A. Donc toute suite d’éléments
de A qui converge a sa limite dans A d’où A est fermé.
Enfin montrons que A est borné.
Supposons que A n’est borné. Donc

∀ n ∈ N ∃ xn ∈ A / xn > n.

La suite (xn ) ⊂ A ainsi construite n’admet pas de sous-suite qui converge donc A n’est
pas compact ce qui contredit l’hypothèse. D’où A est borné.
2. Soit X est de dimension finie montrons que A est compact si et seulement si A est fermé
borné.
⇒ A est compact alors A est fermé borné.
⇐ A est fermé borné montrons que A est compact.
Soit (xn ) ⊂ A une suite d’éléments de A. Comme A est borné

∃ M > 0 / k xn k≤ M ∀ n ∈ N.

(xn ) est bornée dans X donc d’après le théorème de Bolzano-Weierstrass elle admet une
suite extraite qui convers vers l comme A fermé on a l ∈ A. Donc de toute suite (xn ) ⊂ A
on peut extraire une sous-suite qui converge dans A d’où A est compact.

4


Lemme II.1.1 Soit (X, k · k) un K-espace vectoriel normé. Soit F un sous-espace vectoriel de
X, de dimension finie. Alors

∀ a ∈ X, ∃ b ∈ F / k a − b k= inf k a − x k= d(a, F )
x∈F

Démonstration:

Comme F est de dimension finie, donc F est fermé.


Si a ∈ F on prend b = a.
Si a ∈
/ F alors a ∈
/ F̄ , donc d(a, F ) > 0.
D’après les propriétés de la borne inférieure il existe une suite (bn ) d’éléments de F telle
que k a − bn kn→∞
−→ d(a, F )

∀ ε > 0 ∃ n0 ∈ N / ∀ n ≥ n0 | k a − bn k −d(a, F )| < ε.

En particulier pour ε = 1

∃ n0 ∈ N / ∀ n ≥ n0 k a − bn k≤ 1 + d(a, F ).

Mais d’après l’inégalité triangulaire on a | k a k − k bn k | ≤k a − bn k d’où

∃ n0 ∈ N / ∀ n ≥ n0 k bn k≤k a k +1 + d(a, F ).

La suite (bn ) est donc bornée dans un espace de dimension finie. D’après le théorème de Bolzano-
Weierstrass (bn ) admet une suite extraite (bϕ(n) ) qui converge vers b. Et comme F est fermé,
b ∈ F . On a vu que
k a − bn k −→ d(a, F ).
n→∞

Donc, on a également
k a − bϕ(n) kn→∞
−→ d(a, F ).

Et par continuité de la norme


k a − b k= d(a, F ).


5
Lemme II.1.2 Soit (X, k · k) un K-espace vectoriel normé de dimension infinie. Soit F un
sous-espace vectoriel de E, de dimension finie. Alors

∃ x ∈ B̄(0, 1) = {z ∈ X / k z k≤ 1} / inf k y − x k= d(x, F ) = 1


y∈F

Démonstration:

Soit a ∈ X\F .
D’après le lemme II.1.1

∃ b ∈ F / k a − b k= inf k a − x k= d(a, F ).
x∈F

Comme a ∈ X\F donc d(a, F ) > 0. Posons

a−b
x= .
ka−bk

Il est clair que x ∈ B̄(0, 1).


D’une part comme 0 ∈ F on a :

d(x, F ) ≤k x − 0 k=k x k≤ 1. (II.1.1)

D’autre part pour tout y ∈ F on peut écrire

a−v
x−y = où v = b+ k a − b k y ∈ F.
ka−bk

Ainsi
ka−v k ka−v k
k x − y k= = ≥ 1 car v ∈ F.
ka−bk d(a, F )
Par passage à la borne inférieure on obtient :

d(x, F ) ≥ 1. (II.1.2)

D’après (II.1.1) et (II.1.2) on aboutit à

d(x, F ) = 1.


Théorème II.1.1 (de Riesz)

6
Soit (X, k · k) un K-espace vectoriel normé. Alors X est de dimension finie si et seulement si
la boule unité fermée B̄(0, 1) est compacte.

Démonstration:

⇒ Comme la boule unité fermée B̄(0, 1) est fermée (image réciproque du fermé [0, 1] par
l’application norme qui est continue, puisque X est de dimension finie) et bornée (clair) donc
elle est compacte.
⇐ Supposons que la boule unité fermée B̄(0, 1) est compacte et montrons que X est de
dimension finie.
Raisonnons par contraposition.
Supposons X de dimension infinie.
Soit e1 ∈ B̄(0, 1). On pose F1 = vect(e1 ).
Alors d’après le lemme II.1.2 il existe e2 ∈ B̄(0, 1) tel que d(e2 , F1 ) = 1 ⇒ d(e1 , e2 ) ≥ 1.
Puis on pose F2 = vect(e1 , e2 ).
Alors d’après le lemme II.1.2 il existe e3 ∈ B̄(0, 1) tel que d(e3 , F2 ) = 1 ⇒ d(e1 , e3 ) ≥ 1
d(e2 , e3 ) ≥ 1. Puis on pose F3 = vect(e1 , e2 , e3 ).
Et ainsi de suite.
Il existe en ∈ B̄(0, 1) tel que d(en , Fn−1 ) = 1 ⇒ d(ei , en ) ≥ 1 ∀ 1 ≤ i < n. Puis on pose
Fn = vect(e1 , e2 , e3 , · · · , en ).
Comme X est de dimension infinie, on construit ainsi une suite infinie (en ) telle que :

∀ (i, j) / i 6= j ⇒k ei − ej k= d(ei , en ) ≥ 1.

Il sera donc impossible d’en extraire une sous-suite convergente. Donc B̄(0, 1) n’est pas compacte
ce qui contredit l’hypothèse.
D’où X est de dimension finie.


Théorème II.1.2 Dans un espace vectoriel de dimension finie E sur un corps K, toutes les
normes sont équivalentes.

Démonstration:

Soit B = (e1 , e2 , · · · , en ) une base de E et soit

φ :
x=
Xx e
E
n
i i
−→ Kn
7−→ (xi )1≤1≤n .
i=1

7
Pour tout élément de E, x =
X x e avec (x , x , · · · , x ) ∈ K , on note
Cette application est une bijection linéaire, c’est-à-dire un isomorphisme d’espaces vectoriels.
n
i i 1 2 n
n

i=1

N (x) =
X |x | =k φ(x) k .
n
i 1
i=1

L’application N ainsi définie sur E est une norme et φ un homéomorphisme (bijection continue
dont la réciproque est aussi continue) de (E, N ) sur (Kn , k · k1 ) (par construction). Il suffit
maintenant de montrer que toute norme sur E est équivalente à celle-ci. Soit q une norme sur

Soient x =
X x e et y = X y e deux élément de E. On a
E. Démontrons d’abord que q est une application continue de l’espace normé (E, N ) dans R.
n
i i
n
i i
i=1 i=1

|q(x) − q(y)| ≤ q(x − y) ≤


X |x − y |q(e ) ≤ N (x − y) max q(e )
n
i i i i
1≤i≤n
i=1

alors, q est lipschitzienne, et donc continue.


On note S la sphère unité de E pour la norme N :

S = {x ∈ E N (x) = 1} .

L’ensemble S est l’image réciproque par φ de la sphère unité de Kn

S1 = {x ∈ Kn k x k1 = 1} .

Puisque S1 est un compact de l’espace normé (Kn , k · k1 ), alors S est un compact de (E, N ).
Donc, l’application continue q atteint ses bornes sur S. Soient α = inf q(x) et β = sup q(x). Soit
x∈S x∈S
xα ∈ S tel que q(xα ) = α. Puisque N (xα ) = 1 6= 0, le vecteur xα est non nul donc α = q(xα ) 6= 0
car q est une norme sur E. D’où, α > 0.
X
Si x ∈ E et x 6= 0 alors ∈ S et donc
N (x)
‚xŒ q(x)
α≤q = ≤ β ⇒ αN (x) ≤ q(x) ≤ βN (x)
N (x) N (x)

ce qui montre que les normes N et q sont équivalentes.

8
II.2 Espace de Banach
Définition II.2.1 Soit E un espace vectoriel normé. 1) On dit que (xn )n∈N , une suitee d’élé-
ment de E est une suite de Cauchy si

∀ ε > 0 ∃ nε ∈ N / n, m ≥ nε ⇒k xn − xm k< ε.

2) Un espace de Banach E est un espace vectoriel normé complet, c’est-à-dire toute suite de
Cauchy dans E est convergente (par rapport à la topologie définie par la distance associée à la
norme)dans E.

définie par : S0 = x0 , Sn =
X x et on la note X x . On appelle x
3)Soit (xn )nN une suite de points de E. On appelle série de terme général xn la suite (Sn )nN
n
i
+∞
n n le n-ième terme et Sn la
i=0 n=0

ou simplement série
X x . On dit que la série converge vers S si lim S = S dans E. S est
n-ième somme partielle de la série. La série est souvent appelée la série de terme général xn
+∞

X x . De plus, R = S − S est appelé le


n n
n→+∞
n=0
+∞
alors appelé la somme de la série et on écrit S = n n n
n=0
reste d’ordre n de la série, c’est la somme de la série ayant comme k-ième terme xn+k . Par

Xkx
définition, lim Rn = 0. On dit que la série dans E de terme général xn est normalement
n→+∞
+∞
convergente si la série numérique (de réels positifs) n k est convergente
n=0

Théorème II.2.1

– Soit E un espace de Banach. Alors, toute série


Xx
+∞
n normalement convergente est
n=0
convergente dans E.
– Réciproquement, soit E un espace vectoriel normé dans lequel toute série normalement
convergente est convergente. Alors, E est un espace de Banach.

Xx
Démonstration:
+∞
Supposons que E est un espace de Banach et que n est une série normalement convergente
n=1
dans E et montrons que la série converge.
On a
k Sn+k − Sn k=k
X x k≤ X
n+k
i
n+k
Ü
k xi k= Sn+k − Sn Ü
i=n+1 i=n+1

9
où Sn =
X x et SÜ = X k x k sont, respectivement, les sommes partielles des séries X x et
n n +∞

Xkx
i n i i
i=0 i=0 n=0
+∞
n k. Par hypothèse, cette deuxième série est convergente. On en déduit que (Sn )n∈N est
n=0
une suite de Cauchy. Par la complétude de E, on conclut que (Sn )n∈N est convergente.
Réciproquement, supposons que toute série normalement convergente dans E est conver-
gente et montrons que E est un espace de Banach.
Soit (xn )n∈N une suite de Cauchy dans E. Alors, pour chaque entier positif p, il existe un
entier n(p) tel que
∀ n1 , n2 ≥ n(p), k xn1 − xn2 k≤ 2−p .

Considérons maintenant la suite extraite donnée par yp = xn(p) et posons up = yp+1 − yp on a

∀p ∈ N, k up k=k yp+1 − yp k=k xn(p+1) − xn(p) k≤ max(2−p , 2−p−1 ) = 2−p .

Donc
X k u k≤ X 2
+∞
p
+∞
−p
+∞
d’où la série
X k u k est convergente. Par hypothèse la série X u
p
+∞
p
p=0 p=0 p=0 p=1
est convergente. Puisque

yp = up−1 + yp−1 = up−1 + up−2 + yp−2 = up−1 + up−2 + up−3 + yp−3 = · · · = y0 +


Xu ,
p−1
i
i=0

on conclut que la suite (up )p∈N est convergente vers y ∈ E.


La fin de la démonstration est valable dans un espace métrique quelconque : si une suite de
Cauchy possède une sous-suite convergente, elle est convergente.

∀p ∈ N ∃n(p) ∈ N / ∀ n1 , n2 ≥ n(p), k xn1 − xn2 k≤ 2−p .

Alors pour n1 = n et n2 = n(p) on a k xn − yp k≤ 2−p . Soit ε > 0 en faisant tendre p vers plus
l’infini, on obtient k xn − y k< ε. Ceci montre que la suite (xn )n∈N converge vers y ∈ E


Définition II.2.2 Soit (E, d) un espace métrique et k > 0. Une application f : E → E est
k-lipschitzienne si d(f (x), f (y)) ≤ kd(x, y) pour tous x, y éléments de E.

Théorème II.2.2 Soit (E, d) un espace métrique complet et f : E → E une application


k-lipschitzienne avec k < 1. Alors f admet un unique point fixe.

Démonstration:

10
Soit x0 ∈ E quelconque, on définit une suite (xn ) par récurrence :

xn+1 = f (xn ) pour tout n > 0.

On montre par récurrence que pour tout m ∈ N d(xm+1 , xm ) ≤ k m d(x1 , x0 ). Donc

d(xn+p , xn ) ≤ d(xn+1 , xn ) + d(xn+1 , xn+2 ) + · · · + d(xn+p−1 , xn+p )


≤ (k n + k n+1 · · · k n+p−1 )d(x1 , x0 )
kn
≤ d(x1 , x0 ).
1−k

Comme k ∈ [0, 1[, ceci montre que d(xn , xn+p ) → 0 lorsque n → +∞ uniformément en p ≥ 0,
et donc que la suite (xn ) est de Cauchy. Comme E est complet, elle converge donc vers une
limite x ∈ E. En passant à la limite dans la relation de récurrence définissant xn , on trouve
que f (x) = x.
Montrons que le point fixe est unique. Soient x et y deux points fixes. On a

d(x, y) = d(f (x), f (y)) ≤ kd(x, y).

Comme k < 1, on a d(x, y) = 0 donc x = y ce qui montre que le point fixe est unique.


Proposition II.2.1 Si (E, d) est espace métrique complet et F ⊂ E. Alors (F, d) est complet
si et seulement si F est fermé dans E.

Démonstration:

Supposons que (F, d) est complet et montrons que F est fermé. Soit l ∈ F̄ . Il existe donc (yn )
suite d’élément de F telle que yn → l pour n → +∞. Comme la suite (yn ) est convergente dans
E, c’est une suite de Cauchy, comme (F, d) est complet, (yn ) converge dans F : ainsi l ∈ F ,
d’où F est fermé.
Réciproquement, supposons F fermé dans E et soit (yn ) une suite de Cauchy dans F , comme
c’est une suite de Cauchy dans (E, d) complet, elle converge vers une limite l ∈ E. Comme
(yn ) ⊂ F et F est fermé, l ∈ F .


Voici un corollaire immédiat cette proposition

Corollaire II.2.1 Tout sous-espace vectoriel (sev) fermé d’un espace de Banach est lui-même
un espace de Banach pour la norme induite.

11
II.3 Dual topologique
Soient E et F deux espaces vectoriels normés, et T : E → F une application linéaire.

Proposition II.3.1 L’application linéaire T est continue de E dans F si et seulement si elle


vérifie l’une des conditions équivalentes suivantes :
a) T est continue en 0,
b) T est bornée sur la boule unité fermée de E,
c) T est bornée sur la sphère unité de E,
d) il existe C > 0 telle que pour tout x ∈ E, on a

k T (x) kF ≤ C k x kE .

Démonstration:

Clairement b) implique c). D’autre part, c) implique d) avec C = sup k T (x) kF puisque,

‚ Œ
kxkE =1
pour tout x ∈ E\0, on a
x k T (x) kF
kT kF = ≤ C.
k x kE k x kE
Ensuite d) implique que T est C-lipschitzienne de E dans F , donc continue (et même unifor-
mément continue). Elle vérifie donc a).
Il reste donc à vérifier que a) implique b).
Soit ε > 0, puisque T est continue en 0, il existe α > 0 tel que

k T (x) kF < ε pour tout x ∈ E tel que k x kE ≤ α.

¯ 1), on a k αu kE ≤ α et de sorte que


Donc, pour tout u ∈ B(0,

ε
k T (u) kF ≤
α

ce qui établit b).




On notera L(E, F ) l’espace vectoriel des applications linéaires continues de E dans F . On


appelle souvent " opérateurs bornés de E dans F " les éléments de L(E, F ). On note L(E)
l’espace L(E, E).

Définition II.3.1 Soit T ∈ L(E, F ). La norme de T , notée k T k, est la meilleure constante

12
C dans le d) ci-dessus, autrement dit

k T (x) kF
k T k= sup = sup k T (x) kF
x6=0 k x kE kxkE =1

On vérifie que T →k T k définit une norme sur l’espace vectoriel L(E, F ). Lorsqu’il y a risque
d’ambiguïté, on notera aussi cette norme k T kL(E,F ) .

Proposition II.3.2 Soient E, F deux espaces vectoriels normés. S’il existe un homéomor-
phisme linéaire T de E sur F et si E est complet, alors F est complet.

Démonstration:

Soit (yn ) ⊂ F une suite de Cauchy. Il existe une suite (xn ) ⊂ E telle que yn = T (xn ). Comme
T un homéomorphisme linéaire de E sur F on a

k T −1 (yn+p − yn ) kE ≤ C k yn+p − yn kF ⇒k xn+p − xn kE ≤ C k yn+p − yn kF

donc la suite (xn ) est de Cauchy dans E complet donc elle converge vers x ∈ E.
D’autre part on a

k T (x− xn ) kF ≤ C k x − xn kE ⇒k y − yn kF ≤ C k x − xn kE

où y = T (x). Donc (yn ) converge vers y ∈ F d’où F est complet.




Corollaire II.3.1 Toute espace vectoriel normé de dimension finie est complet.

Démonstration:

x = (x , x , · · · , x ) 7→
X x e est un homéomorphisme linéaire de (K , k · k ) dans E, muni
Soit E un espace vectoriel de base (e1 , e2 , · · · , en ). L’application f de Kn dans E définie par
n
n

X X |x |. Donc E, muni de la norme N est complet. Il est donc complet,


1 2 n i i 1
i=1
n n
de la norme N ( x e ) =i i i
i=1 i=1
quelle que soit sa norme, car toutes les normes de E sont équivalentes.


Corollaire II.3.2 Soit E un espace vectoriel normé. Tout sous-espace vectoriel de dimension
finie de E est une partie fermée de E.

13
Démonstration:

Il suffit de se rappeler que si F est un sous-espace métrique complet d’un espace métrique E
complet alors F est fermé dans E (voir proposition II.2.1).


Proposition II.3.3 Lorsque F est un espace de Banach, L(E, F ) muni de la norme des ap-
plications linéaires continues de E dans F est un espace de Banach.

Démonstration:

Soit (fn ) une suite de Cauchy dans L(E, F ). Pour tout x ∈ E pour tout n, k ∈ N on a

|fn+k (x) − fn (x)| ≤k fn+k − fn kk x kE .

Alors, pour tout x ∈ E, (fn (x))n∈N est une suite de Cauchy de F . Puisque F est complet,
(fn (x))n∈N converge vers une limite que l’on note f (x). On vérifie par un simple passage à la
limite que la fonction f ainsi définie est linéaire : si λ, µ ∈ K et x, y ∈ E,

f (λx + µy) = lim fn (λx + µy) = lim (λfn (x) + µfn (y))
n→+∞ n→+∞
= λ lim fn (x) + µ lim fn (y) = λf (x) + µf (y)
n→+∞ n→+∞

La suite (fn (x))n∈N est de Cauchy et donc bornée dans L(E, F ). Il existe M > 0 telle que, pour
tout n ∈ N et x ∈ E, k f (x) k≤ M k x kE . En faisant tendre n vers l’infini, on obtient que,
pour tout x ∈ E, k f (x) k≤ M k x kE . Donc, f est continue et sa norme est majorée par M .
Il reste à vérifier que la suite (fn ) converge vers f dans L(E, F ). Or, si ε > 0, il existe N ∈ N
tel que, pour tous n, m ∈ N et tout x ∈ B̄(0E , 1) k fn (x) − fm (x) k≤ ε. Finalement, en faisant
tendre m vers l’infini, on a, pour n ∈ N, k fn − f k≤ ε.


Soient E, F deux espaces vectoriels normés. Si f : E → F est linéaire, on montre aisément


que l’application x 7→ k f (x) kF est une semi-norme sur E. Le théorème de continuité des
applications linéaires s’exprime alors ainsi.

Théorème II.3.1 Une application linéaire f : E → F est continue si et seulement si


q(x) =k f (x) k est une semi-norme continue sur E.

Démonstration:

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Il est évident que q est une semi-norme.
Si f est continue, il existe M > 0 tel que, pour tout x ∈ E, k f (x) kF ≤ M k x kE .
Soient x, y ∈ E. On a, en utilisant le fait que q est une semi-norme,

|q(x) − q(y)| ≤ q(x − y) =k f (x − y) kF ≤ M k x − y kE .

Donc, q est lipschitzienne d’où q est continue sur E.


Réciproquement, si q est continue sur E, q est continue en 0, donc

∀ε > 0 ∃δ > 0 / k x kE < δ ⇒k f (x) kF = q(x) ≤ ε.

Puisque f (0) = 0, on conclut que f est continue en 0 et donc continue sur E.




Définition II.3.2 Le dual topologique d’un espace vectoriel normé E sur le corps K est, par
définition, l’ensemble des formes linéaires continues de E, c’est-à-dire des applications linéaires
continues de E dans K. On note cet ensemble E 0 . Ainsi, E 0 = L(E, K) et, par ce qui précède,
E 0 muni de la norme k · k définie par :

|f (x)|
k f k= sup |f (x)| = sup |f (x)| = sup
kxkE =1 kxkE ≤1 x∈E, x6=0 k x kE

est un espace de Banach puisque K est complet.

Le dual algébrique d’un espace vectoriel normé E sur le corps K est, par définition, l’ensemble
des formes linéaires de E, c’est-à-dire des applications linéaires de E dans K.
Noter que si E est de dimension finie, le dual topologique de E coïncide avec le dual algé-
brique (puisque toute forme linéaire est continue), et sa dimension est la même que celle de E.
Cependant, la norme de E 0 dépend de celle de E.

Proposition II.3.4 Soit D une partie dense d’un espace vectoriel normé E et soit f ∈ E 0 . Si,
pour tout x ∈ D, f (x) = 0, alors f = 0.

Démonstration:

Si x ∈ E, il existe (xn )n∈N une suite d’éléments de D qui converge vers x. Puisque f est continue,

f (x) = lim f (xn ) = 0


n→+∞


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Définition II.3.3 Soit E un R-espace vectoriel. Un hyperplan affine de E est un ensemble de
la forme
{x ∈ E / f (x) = α}

où f est une forme linéaire sur E, non identiquement nulle et α ∈ R.

Proposition II.3.5 Soit E un espace vectoriel topologique, f ∈ E 0 \0 et α ∈ R alors f est


continue si et seulement si l’hyperplan {f = α} est fermé.

Démonstration:

Si f est continue l’hyperplan {f = α} = f −1 1(α) est évidemment fermé.


Pour la réciproque, on suppose sans perte de généralité que α = 0 et que l’hyperplan
H = ker(f ) est fermé. Soit x0 tel que f (x0 ) = 1, il existe un voisinage de 0, U0 tel que
x0 + U0 ⊂ f 6= 0, on peut aussi supposer que U0 est équilibré (c’est-à-dire λU0 ⊂ U0 pour
λ ∈ [−1, 1]) et donc en particulier symétrique (U0 = −U0 ). Supposons par l’absurde qu’il
existe u0 ∈ U0 tel que f (x0 + u0 ) < 0, alors il existerait λ ∈ [0, 1] tel que f (x0 + λu0) = 0
or x0 + λU0 ⊂ x0 + U0 ⊂ f 6= 0 ce qui constitue la contradiction recherchée. On a donc
x0 + U0 ⊂ {f > 0} et comme U0 = −U0 on en déduit que |f | ≤ 1 sur U0 de sorte que f est
continue.


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