Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
FISCALITE INTERNATIONALE
F TURQ - Université Paris Descartes
Il résulte des dispositions, tant du CGI marocain (art. 5) que du CGI français (art. 209), que
les bénéfices passibles de l'IS sont constitués, en principe, par les bénéfices réalisés dans les
entreprises exploitées sur le territoire ainsi que par ceux dont l'imposition est attribuée à l’état
par une convention internationale relative aux doubles impositions.
I - LES PRINCIPES
I - 1 - le concept d’exploitation
Les lois marocaines ou françaises ne prévoyant que le principe général de territorialité de
l'impôt sur les sociétés, on doit s’appuyer sur la jurisprudence et la pratique administrative.
Selon l’OCDE, l’expression « établissement stable » désigne une installation fixe d’affaires par
l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.
En France, le Conseil d'État a été amené à définir la notion d'« entreprise exploitée en
France » ou à l'étranger. Bien évidemment, les critères définis par cette juridiction ne
s’appliquent qu’en absence de dispositions conventionnelles. Il en résulte que, sont
imposables, les entreprises :
- qui, sans posséder d'établissement sur le territoire, y utilisent néanmoins le concours
de représentants n'ayant pas de personnalité professionnelle distincte de la leur ; ces
intermédiaires sont considérés comme de véritables préposés exerçant une activité
dans le pays pour le compte de l'entreprise étrangère ;
- ou bien, qui, sans avoir sur le territoire d'établissement ou de représentant qualifié, y
réalisent des opérations formant un cycle commercial complet.
Inversement, les entreprises peuvent échapper à l'impôt sur les sociétés, non seulement à
raison des profits tirés d'un établissement situé à l'étranger, mais aussi :
- lorsque les opérations qu'elles réalisent habituellement à l'étranger sont effectuées
avec le concours d'intermédiaires n'ayant pas de personnalité professionnelle
indépendante ;
- ou lorsque lesdites opérations forment un cycle commercial complet à l’étranger et se
détachent des autres opérations de l'entreprise.
Les bénéfices réalisés à l'étranger par une société́ marocaine ne sont pas imposables à l'I.S,
lorsqu’ils sont :
- réalisés par l'intermédiaire d'un établissement situé à l’étranger ;
- réalisés dans le cadre d'un cycle commercial complet d'opérations réalisées à
l’étranger.
1
Toutefois, les rémunérations des prestations de services ponctuelles rendues par la société́
marocaine à ses établissements à l'étranger ainsi que les sommes correspondant à la
participation de ces établissements aux frais de siège de la société́ marocaine restent
soumises à̀ l’I.S. au Maroc dans les conditions de droit commun.1
Au Royaume Uni :
Under the FA03/S148 definition, a non-resident company has a domestic law permanent
establishment in the UK if:
- it has a fixed place of business here through which the business of the company is
wholly or partly carried on, or
- an agent acting on behalf of the company has and habitually exercises here authority
to do business on behalf of the company. (As long as that agent is not of independent
status acting in the ordinary course of his business.)3
a - Établissement
La condition d'exercice habituel d'une activité est notamment remplie lorsque l'entreprise
exploite un « établissement » qui se caractérise, en principe, par l'existence :
- d'un organisme professionnel ;
- dont l'installation présente un certain caractère de permanence ;
- et qui possède une autonomie propre.
Enfin, l'établissement doit constituer une unité propre ayant une certaine autonomie au sein
1
https://www.fiscamaroc.com/pdf/notes_circulaires_articles/article5.pdf
2
https://www.irs.gov/pub/int_practice_units/TRE9450_06_02.pdf
3
https://www.gov.uk/hmrc-internal-manuals/international-manual/intm264050
2
de l'entité juridique constituée par l'entreprise. L'autonomie de l'établissement peut être
caractérisée, notamment, par l'existence des éléments suivants ou de certains d'entre eux :
- d'un personnel distinct ou d'un préposé spécialement délégué ;
- de services commerciaux, financiers ou techniques propres ;
- d'une comptabilité séparée de celle du siège ;
- d'un centre de décision.
Il est parfois procédé au fractionnement des activités sur le territoire : on évite ainsi l’apparition
de l’établissement stable, entité dotée d’un certain nombre de moyens.
En droit marocain, il n'est pas nécessaire, pour qu'une opération soit imposable, qu'elle se
situe dans le cadre d'une activité exercée de manière habituelle. L'opération occasionnelle est
soumise à l'I.S., dès lors qu'en raison de sa nature, elle revêt un caractère lucratif.
MAROC FRANCE
Est réputé établissement stable, sous réserve des D'une manière générale, sont considérés
dispositions des conventions et accords : comme constituant des établissements :
- un siège de direction ou d'exploitation ; - le siège de la direction d'une
- une succursale, une agence, un magasin de entreprise ;
vente ; - une usine ou un atelier de
- un chantier de construction ou de montage ; fabrication ;
- un bureau ou comptoir d'achats exploité au - un bureau, un comptoir d'achat ou
Maroc par une société non résidente qui y de vente
procède à l'achat de marchandises en vue de - une succursale, un magasin, une
leur revente en l’état. agence ;
- une mine, carrière ou tout autre lieu
Il en est ainsi même si : d'extraction de ressources
- ce bureau ou comptoir est destiné à naturelles ;
approvisionner la société non résidente ou un - un chantier nécessitant des travaux
de ses établissements à l’étranger ; importants, continus, de longue
- la revente des marchandises et l'encaissement durée ainsi que la prise de décisions
des fonds n'ont lieu qu'à l'étranger. techniques par des responsables se
trouvant sur ce chantier.
L’installation doit présenter une certaine autonomie à l’égard du siège ; c’est d’ailleurs cette
autonomie qui la rend apte à poursuivre les buts économiques qui lui sont assignés. Une
exploitation qui serait pleinement dépendante du siège et qui ne pourrait fonctionner seule ne
pourrait pas être individualisée fiscalement.
Pour être fiscalement « indépendant », il faut que l’établissement le soit d’abord
économiquement. Autrement dit, l’exploitation située à l’étranger, tout en n’étant qu’un simple
démembrement du siège, fonctionne comme si elle était en réalité une entreprise à part
entière. Elle dispose, pour ce faire, d’un personnel distinct, de services commerciaux,
financiers, techniques propres et parfois d’une comptabilité séparée de celle de la société.
En résumé, il faut que la valeur ajoutée qui sera imposable à l’étranger soit personnellement
« imputable » à l’établissement, qu’elle résulte de sa création propre.
4
http://www.maghress.com/fr/leconomiste/70719
3
Exemple :
Une succursale sans autonomie de gestion qui ne réalise aucune affaire en France, mais
se borne à assurer pour le compte de son siège situé hors de France, auquel est refacturé
l'ensemble des frais qu'elle expose, le suivi et la coordination de budgets de publicité, ne peut
être regardée comme exploitant une entreprise en France, dès lors qu'il n'est pas établi
que son gérant serait investi de pouvoirs lui permettant de conclure des contrats au nom de la
société ou d'intervenir comme instance de décision dans le traitement d'affaires.5
La société Google France a récemment été à l’origine d’un contentieux au terme duquel le
tribunal administratif de Paris a considéré qu’elle ne constituait pas un établissement stable :
Sur le pouvoir de la SARL Google France d’engager la société́ Google Ireland Limited :
…
9. Considérant qu’aux termes du contrat de prestations de services … que l’article 2.1. Dudit contrat
stipule par ailleurs : « Lors de la fourniture de l’assistance de soutien à la vente, [la SARL Google
France] comprend et convient qu’[’elle] n’a pas le pouvoir d’engager la Société́ [Google Ireland
Limited], d’agir comme mandataire ou représentant autorisé à agir en tant que mandataire pour le
compte ou au nom de la Société́ [Google Ireland Limited], ou de signer tout contrat ou accord au nom
de la Société́ . Plus spécifiquement, [la SARL Google France] ne négociera pas de contrats ou de
licences pour le compte de la Société́ [Google Ireland Limited] ni n’acceptera de commandes pour le
compte de [cette dernière] » ;
5
http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/4264-PGP.html
6
https://juricaf.org/arret/FRANCE-COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE DOUAI-20170713-
15DA01938
7
OECD/G20 Base Erosion and Profit Shifting Project- Preventing the Artificial Avoidance of
Permanent Establishment Status - ACTION 7: 2015 Final Report
4
12. Considérant, toutefois, que si les éléments énumérés au point précèdent tendent à̀ faire regarder les
tâches confiées à certains des salariés de la SARL Google France comme excédant le strict cadre des
missions dévolues à cette dernière aux termes du contrat de prestations de services décrit au point 9,
aucun de ces éléments ne permet d’établir que les salariés concernés seraient investis du pouvoir d’agir
pour le compte et au nom de la société́ Google Ireland Limited ; 8
8
TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS N° 1505113/1-1 – 12/07/2017
9
OECD/G20 Base Erosion and Profit Shifting Project - Preventing the Artificial
Avoidance of Permanent Establishment Status - Action 7: 2015 Final Report
5
c - Cycle commercial complet
MAROC FRANCE
Les opérations réalisées au Maroc par une L'exercice habituel d'une activité peut enfin
société non résidente et constituant un cycle résulter de la réalisation d'un cycle commercial
commercial complet sont imposables à l'I.S. et complet d'opérations, alors même que
ce, même si leur réalisation s'effectue en l'entreprise ne posséderait dans le pays
l'absence de tout établissement et sans recours concerné aucun établissement ou représentant
à un représentant mandaté à cet effet par ladite permanent.11
société.10
d - Sites internet
L’évolution technologique et l’élargissement du champ géographique sont des éléments dont
tous les systèmes fiscaux doivent tenir compte, notamment en matière de commerce
électronique.
Traditionnellement, le concept d'établissement stable suppose une présence physique de
l'entreprise sur le territoire, or Internet crée une nouveauté en permettant de réaliser des
opérations commerciales sans disposer nécessairement d'une telle présence. Ce n'est que
dans des cas exceptionnels où l'entreprise étrangère disposerait de son propre équipement
informatique dans un état et y emploierait du personnel pour le faire fonctionner, qu'il serait
facile de considérer que cette entreprise dispose d'un établissement stable dans cet état.
Cette conception traditionnelle permet cependant, s’agissant des serveurs, dans la mesure où
leur appréhension dans l'espace et dans un lieu donné est susceptible d'être effectuée, de leur
appliquer la notion d'établissement stable à l'emplacement où se trouve localisé le serveur.
Le Comité de l’OCDE a toutefois estimé que :
- la localisation d'un serveur ne permet pas à elle seule de retenir l'existence d'un
établissement stable,
- il est nécessaire, en outre, que le serveur soit à la disposition de l'entreprise
- et que des fonctions essentielles de cette entreprise soient réalisées par l'intermédiaire
du serveur.
10
http://www.fiscamaroc.com/pdf/notes_circulaires_articles/article5.pdf
11
http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/4262-PGP.html
6
Bien évidemment, dans le cadre de l’économie numérique, il est aisé de localiser
l’infrastructure technique et physique dans un état à fiscalité privilégiée ; on peut ainsi éviter
une imposition jugée trop lourde.
Cet état de fait a amené l’OCDE à proposer d’établir une imposition en cas de « présence
numérique significative12 ». Pour une entreprise engagée dans une activité entièrement
dématérialisée, une présence numérique significative serait réputée exister dans un pays
lorsque, par exemple :
- Un nombre significatif de contrats prévoyant la vente de produits ou la fourniture de
services entièrement dématérialisés sont signés à distance entre l’entreprise et un
client résident dans le pays à des fins fiscales.
- Les biens ou services numériques de l’entreprise sont largement utilisés ou
consommés dans le pays.
- Des paiements substantiels sont effectués en faveur de l’entreprise par des clients
situés dans le pays en lien avec des obligations contractuelles générées par la
fourniture de biens ou de services numériques effectuée dans le cadre des activités
fondamentales de l’entreprise.
- Une succursale existante de l’entreprise dans le pays exerce des fonctions
secondaires, de type conseil ou commercialisation, qui ciblent des clients résidents du
pays et qui sont étroitement liées aux activités fondamentales de l’entreprise.
La Commission européenne prévoit également une réforme fiscale commune applicable aux
activités numériques. Celle-ci devrait permettre aux États membres de taxer les bénéfices (et
non les revenus) qui sont réalisés sur leur territoire, même si une entreprise n'y est pas
présente physiquement. Dans ce cas, on pourrait taxer ces plateformes numériques dans un
État membre si elles ont, dans cet État, une « présence numérique » imposable ou un
établissement stable virtuel. Notons qu'une plateforme numérique sera considérée comme
ayant une « présence numérique » imposable ou un établissement stable virtuel dans un État
membre si elle satisfait à l'un des critères suivants :
- elle génère plus de 7 millions € de revenus annuels dans un État membre ;
- elle compte plus de 100 000 utilisateurs dans un État membre au cours d'un exercice
fiscal ;
- plus de 3000 contrats commerciaux pour des services numériques sont créés entre
l'entreprise et les utilisateurs actifs au cours d'un exercice fiscal.
12
Relever les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie – Note politique Telle
qu'approuvée par le Cadre inclusif sur le BEPS le 23 janvier 2019 - OCDE
7
4. … on considère qu’il n’y a pas « établissement stable » si :
…
e) une installation fixe d’affaires est utilisée aux seules fins d’exercer, pour l’entreprise, toute
autre activité de caractère préparatoire ou auxiliaire ;
Certain processes previously carried out by local personnel can now be performed cross-border
by automated equipment, changing the nature and scope of activities to be performed by staff.
Thus, the growth of a customer base in a country does not always need the level of local
infrastructure and personnel that would have been needed in a “predigital” age.13
II - APPLICATIONS
Il résulte des principes développés que les bénéfices provenant d'opérations effectuées par
les entreprises d’un état dans les « établissements » qu'elles possèdent à l'étranger ne sont
pas imposables à l'impôt sur les sociétés dans cet état. Les entreprises qui exploitent
exclusivement des établissements situés à l'étranger et ne possèdent en France que leur siège
social échappent généralement à toute taxation dans le pays.
Lorsqu’une personne morale soumise à l’IS a son siège en France, sa quote part de bénéfice
dans une structure fiscalement transparente ayant une activité à l’étranger n’est pas
considérée comme imposable en France.
Corrélativement les charges ou les pertes afférentes aux opérations effectuées à l’étranger
ne sont pas déductibles des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés de l’état.
Ce principe doit être modulé en raison du caractère « détachable » ou non des opérations à
l’étranger. On peut en effet trouver des opérations réalisées à l'étranger :
- détachables des autres opérations de l'entreprise
- non détachables des autres opérations de l'entreprise
13
OECD/G20 Base Erosion and Profit Shifting Project - Addressing the Tax Challenges of
the Digital Economy - ACTION 1: 2015 Final Report
8
étaient exécutées en France.14
Un chantier à Monaco d'une société française de travaux publics doit être considéré comme
une entreprise exploitée hors de France en raison de la durée, de la continuité et de
l'importance des travaux alors même que certaines tâches de direction, de gestion et
d'approvisionnement sont exercées en France.15
Représentant autonome :
Une société immobilière qui a son siège en France ne peut y être taxée à raison du gain qu'elle
réalise sur la vente d'un immeuble qu'elle possède dans un pays étranger, dès lors qu'elle a
habilité dans ce pays un représentant qualifié, chargé par elle d'y gérer ses immeubles et, le
moment venu, d'en opérer l'aliénation devant notaire. Il y a lieu, en pareil cas, de réintégrer
dans la base d'imposition en France, la quote-part correspondante des frais généraux
d'administration.17
14
CE, arrêt du 29 juin 1981, n° 16095
15
CE, arrêt du 29 mars 1978, n° 04883
16
CE, arrêt du 17 mai 1989, n° 34 380
17
CE, arrêt du 5 juin 1937, n° 42274
18
CE, arrêt du 14 février 1944, n° 67442
9
à l'équipement et à la mise en fonctionnement d'une usine de même nature dans un pays
d'Asie. Le contrat comportait une clause d'assistance technique au cours de la première
période de fonctionnement de l'usine, clause en vertu de laquelle la société percevait des
redevances. Au cas d'espèce il a été jugé que :
- d'une part, ni la construction - d'ailleurs exécutée en sous-traitance par une tierce
entreprise - ni l'équipement de ladite usine ne constituaient, pour la société intéressée,
l'exercice habituel à l'étranger d'une activité commerciale détachable de son activité
en France ;
- d'autre part, les prestations fournies au titre de l'assistance technique, ayant été
exécutées à l'aide d'un personnel mis temporairement à la disposition de son
cocontractant, devaient être regardées comme une extension occasionnelle de son
activité, alors même que celle-ci n'aurait pas comporté jusqu'alors de prestations de
l'espèce.19
Activité commerciale :
Cas d'une entreprise sise en France qui, ayant cédé une usine qu'elle exploitait au Japon, a
consenti à l'acquéreur la location de certains éléments de son matériel industriel moyennant
une redevance en partie fonction des bénéfices, la Haute Assemblée a estimé que la société
ne pouvait être regardée, par le seul fait de ce contrat, comme exerçant habituellement une
activité commerciale à l'étranger, qu'au contraire cette opération rentrait par sa nature, bien
que le matériel fût loué hors de France, dans le cadre de l'exploitation de l'entreprise en
France, et ne pouvait, dans les conditions où elle avait été réalisée, en être détachée,
nonobstant la circonstance qu'un représentant ait été spécialement chargé de surveiller sur
place l'exécution dudit contrat.20
C'est ainsi qu'une société qui, sans posséder à l'étranger d'agence ou de succursale, y vend
par l'intermédiaire d'une maison de commission ayant une personnalité indépendante de la
sienne, les produits qu'elle fabrique en France, doit être regardée comme exploitant une seule
entreprise sise en France : elle est par suite imposable à raison de l'ensemble des bénéfices
afférents à cette entreprise.21
Cette jurisprudence a été confirmée dans le cas de sociétés françaises achetant, entreposant
et vendant en gros des vins à l'étranger sans y posséder d'établissement stable. Il a été en
effet jugé que ces opérations de commerce international, bien que matériellement exécutées
hors de France, ne pouvaient être regardées comme réalisées par une entreprise exploitée
hors de France dès lors que toutes les décisions relatives à ces opérations étaient prises en
19
CE, arrêt du 3 avril 1968, n° 70822
20
CE, arrêt du 5 février 1945, n°68348, 72132 et 73150
21
CE, arrêt du 18 mars 1932, n° 16452, 21607 et 24688
22
CE, arrêt du 5 février 1968, n° 62333
10
France, où les sociétés avaient leur siège et leur seul établissement, et que tous les
mouvements financiers correspondant à ces transactions étaient également décidés et
réalisés à partir des sièges sociaux.23
Brevets :
Lorsqu'une entreprise française concède à des sociétés étrangères, moyennant le paiement
de redevances, le droit d'exploiter à l'étranger des brevets lui appartenant, ces redevances
constituent pour elle des recettes qui ne sauraient être détachées de celles qu'elle retire de
son activité en France, sauf en cas d'inscription des droits générateurs des redevances à l'actif
du bilan d'un établissement étranger, si cette inscription est justifiée par l'activité de
l'établissement.24
Activités financières :
Sauf si les placements effectués à l'étranger sont détachables des activités du siège en France
(ce qui peut être le cas lorsqu'ils ont un lien étroit avec un établissement installé hors de
France), les produits correspondants sont imposables en France, à défaut, ils sont réputés
effectués à partir de la France.
Activités immobilières :
Il convient de distinguer les deux hypothèses suivantes :
a. Les immeubles situés à l'étranger sont affectés à l'exercice d'une activité
commerciale habituelle dans le pays de leur situation ou constituent de par leur
gestion, l'exploitation d'une véritable entreprise indépendante.
Lorsqu'une entreprise française exerce une activité commerciale habituelle dans le
pays où sont situés les immeubles, les revenus de ces immeubles - qui figurent à
l'actif du bilan de l'établissement étranger - doivent en principe être compris dans les
résultats de l'activité étrangère et échappent par suite à toute imposition en France.
b. Les immeubles à l'étranger ne sont pas affectés à une activité commerciale
habituelle de la personne morale propriétaire et les conditions de leur gestion ne sont
pas caractéristiques d'une activité détachable de celle du siège.
Dans les situations de ce type, les revenus des immeubles situés à l'étranger sont
imposables en France.
Assurance :
Tel est le cas, également, d'une société effectuant en France -où elle a son siège et ses
bureaux- des opérations de courtage de réassurance ; les opérations de même nature qu'elle
réalise à l'étranger où elle ne dispose d'aucune succursale, ni d'aucun établissement, et qu'elle
effectue, soit par correspondance émanant de son bureau en France, soit par l'intermédiaire
de sous-courtiers installés à l'étranger et ayant une personnalité indépendante, doivent être
regardées comme se rattachant à l'activité exercée en France.25
Navigation :
Une compagnie de navigation ayant à l'étranger son siège social où elle ne possède ni local
spécial ni préposé et où elle ne traite aucune affaire, alors qu'elle a en France le siège de sa
direction, où sont installés ses services techniques, administratifs et commerciaux ainsi que
ceux du contentieux et de la comptabilité, doit être assujettie à l'impôt sur les sociétés au lieu
de ce dernier siège pour l'ensemble de ses activités. Jugé à cet égard, que les opérations de
transport de la compagnie doivent être considérées comme effectuées en France dès lors :
23
CE, arrêt du 14 mars 1979, n° 07098
24
BOI-IS-CHAMP-60-10-20
25
CE, arrêt du 18 juin 1969, n° 68042
11
- d'une part, que ladite compagnie ne possède à l'étranger, ni agence, ni succursale et
que, si elle traite certaines opérations de fret par l'intermédiaire d'entreprises
étrangères, celles-ci n'ont pas qualité pour l'engager et gardent une personnalité
commerciale distincte de la sienne ;
- d'autre part, que l'exploitation de ses navires, bien qu'immatriculés hors de France et
effectuant d'un port étranger à un autre port étranger des transports dont le prix est
payé à l'étranger, ne représente pas une activité détachable des autres opérations de
l'entreprise.26
Les exemples précédents s’appliquaient aux cas d’entreprise ayant leur siège dans l’état (la
France ou le Maroc). Par symétrie, les bénéfices réalisés par une entreprise ayant son siège
à l’étranger (hors France ou Maroc) sont imposables dans ce pays, notamment lorsqu'ils
résultent d'opérations constituant l'exercice habituel d'une activité dans ce pays. Cette
condition est réputée remplie lorsque l'entreprise dont le siège est situé à l’étranger :
- exploite un « établissement » sur le territoire national ;
- y réalise des opérations par l'intermédiaire de représentants n'ayant pas de
personnalité professionnelle indépendante ;
- ou encore lorsque les opérations effectuées sur le territoire y forment un cycle
commercial complet.
Plus-values de cession de droits sociaux : sous réserve des conventions internationales, les
plus-values réalisées par des personnes morales ou organismes, quelle qu'en soit la forme,
ayant leur siège social à l’étranger, doivent donner lieu à imposition dans l’état source.
Participation dans un GIE : Les personnes morales étrangères passibles de l'impôt sur les
sociétés sont personnellement assujetties à cet impôt à raison de la quote-part des bénéfices
des sociétés de personnes ou des GIE, correspondant à leurs droits sociaux.
Cette part de bénéfices est déterminée selon les règles applicables à l'impôt sur les sociétés.
Revenus d’immeubles possédés par une entreprise ayant son siège à l’étranger :
D'une manière générale, lorsqu'une entreprise étrangère exerce dans un territoire une activité
habituelle, les revenus des immeubles qu'elle y possède et qui figurent à son actif doivent,
quelle que soit l'affectation de ces immeubles, être compris dans le bénéfice imposable dans
le territoire.
Lorsqu'elle n'exerce aucune activité habituelle, une société étrangère qui possède un
immeuble à usage commercial ou d'habitation donné en location, est également passible de
l'impôt sur les sociétés, en raison de sa forme ou du caractère lucratif de l'opération, sur les
profits retirés de cette location.
26
CE, arrêt du 3 mars 1958, n° 41135
27
http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/4264-PGP.html
12
III - DÉTERMINATION DU RÉSULTAT IMPOSABLE
III - I Principes généraux
La détermination des bénéfices ou des pertes ne soulève généralement pas de difficultés
lorsque les opérations nationales et étrangères sont nettement distinctes et effectuées dans
des établissements autonomes dotés d'une comptabilité particulière. Il en est de même
lorsque l'entreprise possède une organisation comptable centralisée telle qu'il soit possible
d'en extraire les éléments propres à chaque établissement ou à chaque branche d'activité
autonome.
En revanche, lorsqu'il n'existe qu'une seule comptabilité qui enregistre les résultats
d'ensemble de l'entreprise, il convient alors de procéder à une ventilation des produits bruts et
des frais et charges communs à l'ensemble de l'exploitation afin de déterminer la fraction du
bénéfice imposable - ou de la perte déductible - que l'entreprise concernée a réalisé dans
chacun des pays.
Ainsi, dans le cas d'une société qui possède en France une fabrique et des services
commerciaux et qui a d'autre part, à l'étranger, un dépôt de marchandises dont la direction est
confiée à un agent spécial résidant sur place et chargé soit d'exécuter les ordres reçus du
siège, soit de recevoir directement les commandes des clients et d'y pourvoir à l'aide de
marchandises en magasin, le bénéfice réalisé sur les affaires traitées avec l'étranger doit être
regardé comme provenant à la fois de l'entreprise industrielle française et de l'entreprise
commerciale exploitée à l'étranger. Il y a donc lieu de rechercher si et comment ce bénéfice
total doit être réparti en un bénéfice de fabrication imposable en France et un bénéfice de
vente imposable pour partie en France et pour partie à l'étranger.28
Dans tous les cas où, ni les conditions de fonctionnement de l'entreprise, ni la comptabilité, ne
permettent de déterminer avec précision les opérations nationales et étrangères, il convient
d'avoir recours à une ventilation forfaitaire. Il y a lieu de noter, toutefois, que le terme
« forfaitaire » employé ici doit être entendu au sens d'« évaluation approchée », mais faite à
partir de données comptables incontestables.
28
http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/4271-PGP.html
13
Bénéfice brut de l’établissement distinct
Bénéfice brut de l’ensemble de l’entreprise
Un comptable peut être étonné par cette méthode de répartition du bénéfice par un rapport de
bénéfices !
Ou bien, pratique plus répandue :
CA de l’établissement distinct
CA de l’ensemble de l’entreprise
la société n'avait pas été en mesure, au cours des opérations de contrôle, d'indiquer le montant
des dépenses engagées pour les opérations réalisées en Côte d'Ivoire et au Maroc ni
d'évaluer, en l'absence de comptabilité analytique, le montant du bénéfice correspondant, et
qu'elle ne contestait pas davantage les calculs auxquels l'administration avait procédé pour
évaluer ce bénéfice, à proportion du rapport entre le montant brut de recettes perçu par la
société provenant de ces trois entreprises et les recettes totales de la société.29
Article 10
4. Lorsque les contribuables dont l'activité s'étend sur les territoires des deux États
contractants sont dans l'impossibilité de faire ressortir distinctement et exactement les
bénéfices afférents aux établissement stables situés dans l'un et l'autre État, le bénéfice
respectivement imposable par ces États peut être déterminé en répartissant les résultats
globaux au prorata du chiffre d'affaires réalisé dans chacun d'eux.
Cette analyse est également applicable pour la répartition de frais communs. C'est ainsi que,
dans le cas d'une société possédant des établissements en France et à l'étranger, il a été jugé
que les frais engagés dans l'intérêt de l'ensemble de l'entreprise, notamment ceux concernant
la gestion du capital et la direction générale de la société, devaient donner lieu à ventilation.
La part de ces frais imputable à l'établissement sis en France a pu être valablement fixée,
dans les circonstances de l'affaire, d'après la proportion existant entre le chiffre d'affaires de
l'établissement français et le chiffre d'affaires global de la société.
Mais, dans de nombreux cas et plus spécialement, lorsque l'on se trouve en présence :
29
Conseil d'État n° 398258 20/12/2017
14
- soit d'activités commerciales auxiliaires ou préparatoires réalisées dans un
établissement, tel qu'un bureau d'achat ou un bureau de vente ;
- soit de prestations de services diverses effectuées sur le territoire, par exemple, par
un bureau d'études, ou de publicité, qui, dans l'un et l'autre cas, caractérisent l'exercice
habituel d'une activité imposable, il convient de recourir à la « méthode de la
commission ».
Le bénéfice réputé réalisé sur le territoire doit alors correspondre à celui que réaliserait
l'établissement, le dépôt ou le bureau en cause s'il effectuait pour le compte de tiers les
opérations qu'il exécute pour la société étrangère dont il dépend.
En d'autres termes, ce bénéfice peut être évalué en défalquant les frais exposés localement
du montant des commissions ou rémunérations diverses que l'entreprise étrangère aurait dû
verser à des tiers (représentants ou prestataires de services) pour effectuer les opérations
qu'elle réalise ainsi directement elle-même.
Bien entendu, la méthode de répartition par comparaison ne saurait être retenue que dans le
cas où la comptabilité ne permet pas l'évaluation exacte des résultats de l'activité déployée ou
lorsque la méthode de répartition au prorata du chiffre d'affaires ne peut être retenue.
15
Cas particulier des intérêts versés par les succursales dans un état à des banques
étrangères.
En ce qui concerne les banques et les autres établissements financiers et de crédit, il
convient de distinguer, dans les relations entre un siège et ses succursales étrangères :
- d'une part, les dotations attribuées aux succursales à titre de quasi-capital ;
- d'autre part, les avances en comptes courants inhérentes à la nature même de
l'activité des établissements, c'est-à-dire le commerce de l'argent.
III - 3 Obligations des sociétés passibles de l’IS ayant des activités à l’étranger
Les documents comptables et fiscaux que les entreprises sont tenues de produire doivent être
de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans la déclaration à laquelle ils doivent
être joints.
S'agissant de personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés, ces résultats
imposables s'entendent uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées
dans le territoire ainsi que ceux dont l'imposition lui est attribuée par une convention
internationale relative aux doubles impositions.
Dans le cas français, les sociétés et personnes morales assimilées exerçant partiellement leur
activité à l'étranger sont tenues de produire deux séries de tableaux normalisés à l'appui de
leur déclaration de résultat :
- la première, regroupant les éléments comptables concernant l'ensemble des
activités exercées quelle que soit leur localisation ;
- la seconde, mentionnant les éléments afférents aux seules opérations dont le
résultat est imposable en France.
30
BOI-IS-CHAMP-60-10-40
31
Cour Administrative d'Appel de Versailles, N° 09VE02376 – 08/03/2011
16
IV LE REGIME DES QUARTIERS GENERAUX ET CENTRES DE COORDINATION
Le quartier général exerce des fonctions de direction, de gestion, de coordination ou de
contrôle. Le centre de logistique exerce des fonctions de stockage, de conditionnement,
d'étiquetage ou de distribution de produits et les activités administratives liées à ces fonctions.
Ce type d’entité a trois caractéristiques :
- il fait partie d’un groupe,
- il peut n’avoir aucune personnalité juridique,
- il peut n’avoir aucun produit, étant alors un simple centre de coûts.
MAROC FRANCE
Article 2.- Personnes imposables Instruction du 21 janvier
I.- Sont obligatoirement passibles de l’impôt sur les sociétés :
1997 :
… On considère comme
5°- les centres de coordination d’une société non résidente
« quartier général » une
ou d’un groupe international dont le siège est situé à l’étranger.
société dont le siège est en
Par centre de coordination, il faut entendre toute filiale ou
France ou un
établissement d’une société ou d’un groupe international dont
établissement stable situé
le siège est situé à l’étranger et qui exerce, au seul profit de
en France d'une société
cette société ou de ce groupe, des fonctions de direction, de
dont le siège est à
gestion, de coordination ou de contrôle. l'étranger, qui dépend d'un
groupe international
Article 8.- Résultat fiscal contrôlé depuis la France
… ou l'étranger, et qui exerce
IV.- La base imposable des centres de coordination … est au seul profit de ce groupe
égale à 10 % du montant de leurs dépenses de des fonctions de direction,
fonctionnement. A cette base s’ajoute, le cas échéant, le de gestion, de coordination
résultat des opérations non courantes. ou de contrôle.
17
la condition que cette marge ne soit pas ridiculement faible, le code de conduite ne devrait pas
s’appliquer. La situation est différente lorsque cette marge « cost plus » ne comprend qu’une
petite partie des frais exposés par la société.32
32
Schaffner – Droit fiscal international – Promoculture Larcier 2014
18