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Fiche à jour au 29 novembre 2011

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Matière : Droit des obligations

Auteur : Clément DUREZ

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I.  ÉNONCE DES CAS PRATIQUES : 4 

II.  CORRECTION DU CAS N° 1 5 

III.  CORRECTION DU CAS N° 2 9 

IV.  CORRECTION DU CAS N° 3 13 

Date de création du document : année universitaire 2010/2011


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Ceci est le Résumé Explicatif du Code Juridique (la version intégrale du
contrat).
4

I. Énoncé des cas pratiques :

M. MELVIN vient vous consulter pour vous soumettre plusieurs


problèmes auxquels il va être confronté dans les semaines à venir.

Il commence par vous exposer le litige qui l’oppose à M. BURQUETTE.


L’hiver dernier, alors qu’il promenait son chien, M. BURQUETTE a été
blessé par une chute de neige provenant du toit de la maison de M.
MELVIN. Ce dernier avait pourtant prévenu les passants du danger
qu’ils encouraient en inscrivant « Attention : chutes de neige ! » sur un
grand panneau accroché à sa maison.
Il y a quelques jours M. BURQUETTE est venu rendre visite à M.
MELVIN pour lui demander une somme importante afin de compenser
l’ensemble des frais médicaux que l’accident a occasionnés. M.
BURQUETTE a prévenu M. MELVIN qu’il n’hésiterait pas à porter
l’affaire devant la justice s’il refusait de lui verser la somme d’argent
réclamée. M. MELVIN s’interroge sur l’issue probable d’un tel procès.

M. MELVIN a également des ennuis avec son meilleur ami M.


ABEYTA. En se rendant chez lui il y a un mois alors qu’il l’avait invité
à dîner, M. MELVIN a violemment heurté la porte vitrée de son salon.
Suite à l’accident M. MELVIN a été immobilisé pendant 15 jours ce qui
eu pour conséquence de lui faire perdre une somme d’argent importante.
M. MELVIN est ennuyé car il hésite à exercer une action en réparation
contre son ami M. ABEYTA. Comme il sait que cela risquerait de
détériorer leurs relations pour toujours il veut être certain d’obtenir gain
de cause avant d’engager une quelconque action.

Enfin M. MELVIN vous explique qu’il pense exercer une action en


justice contre son voisin M. SANDIN. Le week-end dernier, M.
MELVIN a eu avec M. SANDIN un long débat sur la politique actuelle
du gouvernement tout en passant la tondeuse dans son jardin. Au cours
de cette discussion M. MELVIN prêta sa tondeuse quelques minutes à
son voisin le temps de répondre au téléphone. Malheureusement cela
suffit à M. SANDIN pour briser involontairement un magnifique pot en
terre cuite exposé dans le jardin de M. MELVIN en le heurtant avec la
tondeuse. Le pot cassé ayant une grande valeur économique et
sentimentale, M. MELVIN souhaite agir contre M. SANDIN en
réparation du préjudice.
5

II. Correction du cas n° 1

M. MELVIN commence par vous exposer le litige qui l’oppose à M.


BURQUETTE. L’hiver dernier, alors qu’il promenait son chien, M.
BURQUETTE a été blessé par une chute de neige provenant du toit de la
maison de M. MELVIN. Ce dernier avait pourtant prévenu les passants
du danger qu’ils encouraient en inscrivant « Attention : chutes de
neige ! » sur un grand panneau accroché à sa maison.
Il y a quelques jours M. BURQUETTE est venu rendre visite à M.
MELVIN pour lui demander une somme importante afin de compenser
l’ensemble des frais médicaux que l’accident a occasionné. M.
BURQUETTE a prévenu M. MELVIN qu’il n’hésiterait pas à porter
l’affaire devant la justice s’il refusait de lui verser la somme d’argent
réclamée. M. MELVIN s’interroge sur l’issue probable d’un tel procès.

M. BURQUETTE veut obtenir réparation du préjudice qu’il a subi sur le


fondement de la responsabilité de M. MELVIN du fait de la neige
tombée de son toit. Il s’agit donc d’un problème de responsabilité du fait
des choses. Il convient d’étudier les conditions relatives à cette
responsabilité pour savoir si elles sont remplies en l’espèce.

1) Admission et fondement de la responsabilité générale du fait des


choses :

La responsabilité du fait des choses (RFC) est admise sur le fondement


de l’article 1384 al.1 du Code civil depuis l’arrêt Teffaine rendu le 16
juin 1896 par la chambre civile de la Cour de cassation et l’arrêt
Jand’heur rendu par les chambres réunies de la Cour de cassation le 13
février 1930.

2) Conditions de la responsabilité du fait des choses :

La responsabilité d’une personne du fait d’une chose ne peut être


engagée que si 3 conditions sont remplies. Il faut qu’il s’agisse
effectivement d’une chose, que celle-ci ait joué un rôle dans la
survenance d’un dommage et qu’un individu exerce un pouvoir de garde
sur cette chose.

 Une chose :
L’article 1384 al.1 CC est d’une généralité absolue quant à la chose,
cause du dommage. En effet, aucune distinction ne doit être effectuée
entre les choses mobilières et les choses immobilières (Req. 6 mars
6
1928). De même, aucune distinction ne doit être effectuée entre les
choses dangereuses et les autres : Arrêt Jand’heur précité.
La chose, cause du dommage est, en l’espèce, de la neige. Les juges ont
déjà affirmé que la neige constituait bien une chose au sens de l’article
1384 du Code civil (v. par exemple Civ. 2ème, 17 octobre 1979).
Elle rentre donc au sein des choses visées à l’article 1384 al.1.
La première condition est par là même remplie.

 Le fait d’une chose


La chose doit avoir été l’instrument du dommage, elle doit avoir joué un
« rôle actif » : Civ., 3 janvier 1934. D’après une jurisprudence constante
le rôle actif de la chose est présumé lorsque celle-ci était en mouvement
et est entrée en contact avec la personne lésée. (Pour une illustration, v.
Civ. 2ème, 1er février 1973).
En l’espèce, la neige tombait du toit de M. MELVIN lorsqu’elle a heurté
M. BURQUETTE. La neige était donc effectivement en mouvement et
est entrée en contact avec la victime.
De ce fait, le rôle actif de la neige est présumé. M. MELVIN peut
renverser la présomption en prouvant que la neige n’a pas joué un rôle
actif dans la survenance du dommage ce qui paraît compliqué.
La deuxième condition est ainsi remplie.

 La garde de la chose
Depuis le célèbre arrêt Franck (Chb. Réunies, 2 décembre 1941) les
juges de la Cour de cassation rattachent la garde d’une chose aux
pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle qu’une personne exerce sur
elle. Ainsi « la responsabilité du dommage causé par une chose est liée à
l’usage qui est fait de la chose ainsi qu’aux pouvoirs de surveillance et
de contrôle exercés sur elle, qui caractérisent la garde ».
Peut-on considérer que M. MELVIN est gardien de la neige qui se trouve
sur le toit de sa maison ? La Cour de cassation a déjà été soumise dans le
passé à des litiges de ce genre et elle a considéré que « le propriétaire
d’un immeuble ne peut être considéré comme ayant eu la garde d’un
paquet de neige tombé de son toit » (Civ. 2ème, 18 décembre 1958
confirmé par Civ. 2ème, 9 avril 1973).
En l’espèce la troisième condition n’est donc pas remplie puisque M.
MELVIN ne peut être considéré comme le gardien de la neige tombée de
son toit.

Si les juges n’opèrent pas de revirement de jurisprudence on peut


imaginer que l’action de M. BURQUETTE n’aboutira pas. Cependant, la
solution dépend de l’appréciation des juges du fond qui peuvent
considérer, en fonction de la nature des faits qui leurs sont présentés, que
M. MELVIN était effectivement gardien de la neige au moment où elle
7
est tombée sur M. BURQUETTE (Interprétation a contrario de Civ. 2ème,
17 octobre 1979).
Dans cette opportunité il faut s’interroger sur les possibilités pour M.
MELVIN d’invoquer une cause d’exonération.

3) Causes d’exonération :

Le gardien d’une chose peut être partiellement exonéré s’il rapporte la


preuve que la faute de la victime a contribué au dommage. Seule la faute
et non le fait de la victime, emporte exonération partielle (Civ. 2ème, 6
avril 1987).
En l’espèce, M. BURQUETTE a commis une faute d’imprudence en se
promenant devant la maison de M. MELVIN malgré l’avertissement que
celui-ci avait accroché à son mur. Sans cette faute, il n’aurait pas été
blessé par la neige. Sa faute a donc, au moins pour partie, contribué au
dommage.
Dans l’hypothèse (peu probable) où les juges considéreraient que M.
MELVIN était effectivement gardien de la neige se trouvant sur son toit
il pourra tout de même être partiellement exonéré car le dommage résulte
en partie de la faute de M. BURQUETTE.
Cette faute peut-elle engendrer une exonération totale de M. MELVIN ?
Le gardien est totalement exonéré lorsque la faute de la victime a
constitué la cause exclusive de son dommage (Civ. 1ère, 6 octobre 1998).
« Les juges ne peuvent retenir une faute de la victime totalement
exonératoire sans relever que l’accident était dû à une cause étrangère
au gardien revêtant pour lui un caractère imprévisible et irrésistible »
(Civ. 2ème, 2 avril 1997).
Pour savoir si la faute de M. BURQUETTE est totalement exonératoire il
faut donc se demander si l’accident est dû à une cause étrangère qui revêt
pour M. MELVIN un caractère imprévisible et irrésistible. En l’espèce
M. MELVIN était conscient du danger représenté par les chutes de neige
puisqu’il avait accroché un panneau d’avertissement sur son mur. En
outre la jurisprudence considère que la transgression d’un avertissement
ou d’une interdiction ne suffit pas à constituer un caractère imprévisible
et irrésistible pour le gardien de la chose à l’origine du dommage (v. par
exemple Civ. 2ème, 18 décembre 1995). On peut donc penser que M.
MELVIN n’avait pas pris suffisamment de précaution pour que le fait de
se promener devant sa maison constitue pour lui un évènement
imprévisible et irrésistible (il aurait du installer des barrières etc.). La
faute de M. BURQUETTE ne peut donc pas être à l’origine d’une
exonération totale de responsabilité de M. MELVIN.
8

4) Conclusion :

En principe l’action de M. BURQUETTE sur le fondement de l’article


1384 du Code civil ne devrait pas aboutir (M. MELVIN n’est pas gardien
de la neige se trouvant sur son toit). Dans l’hypothèse où les juges
retiendraient la solution inverse M. MELVIN pourra invoquer la faute de
la victime pour être partiellement exonéré. Quoi qu’il en soit M.
MELVIN n’a aucun intérêt à verser la somme réclamée par M.
BURQUETTE car il ne peut être considéré comme seul responsable du
dommage.
9

III. Correction du cas n° 2

M. MELVIN a également des ennuis avec son meilleur ami M. ABEYTA.


Il y a un mois, alors que M. ABEYTA l’avait invité chez lui à dîner, M.
MELVIN a violemment heurté la porte vitrée de son salon. Suite à
l’accident M. MELVIN a été immobilisé pendant 15 jours ce qui eu pour
conséquence de lui faire perdre une somme d’argent importante. M.
MELVIN est ennuyé car il hésite à exercer une action en réparation
contre son ami M. ABEYTA. Comme il sait que cela risquerait de
détériorer leurs relations pour toujours il veut être certain d’obtenir
gain de cause avant d’engager une quelconque action.

M. MELVIN s’interroge sur la possibilité d’obtenir réparation du


préjudice qu’il a subi sur le fondement de la responsabilité de M.
ABEYTA car sa porte vitrée a joué un rôle déterminant dans la
survenance du dommage. Il s’agit donc d’un problème de responsabilité
du fait des choses. Il convient d’étudier les conditions relatives à cette
responsabilité pour savoir si elles sont remplies en l’espèce et si M.
MELVIN est certain d’obtenir gain de cause dans l’hypothèse d’une
action en justice.

1) Admission et fondement de la responsabilité générale du fait des


choses :

La responsabilité du fait des choses (RFC) est admise sur le fondement


de l’article 1384 al.1 du Code civil depuis l’arrêt Teffaine rendu le 16
juin 1896 par la chambre civile de la Cour de cassation et l’arrêt
Jand’heur rendu par les chambres réunies de la Cour de cassation le 13
février 1930.

2) Conditions de la responsabilité du fait des choses :

La responsabilité d’une personne du fait d’une chose ne peut être


engagée que si 3 conditions sont remplies. Il faut qu’il s’agisse
effectivement d’une chose, que celle-ci ait joué un rôle dans la
survenance d’un dommage et qu’un individu exerce un pouvoir de garde
sur cette chose.

 Une chose :
L’article 1384 al.1 CC est d’une généralité absolue quant à la chose,
cause du dommage. En effet, aucune distinction ne doit être effectuée
entre les choses mobilières et les choses immobilières (Req. 6 mars
10
1928). De même, aucune distinction ne doit être effectuée entre les
choses dangereuses et les autres : Arrêt Jand’heur précité.
La chose, cause du dommage est, en l’espèce, une porte vitrée. Les juges
ont souvent été soumis à des problèmes engendrés par des portes vitrées.
Ils ont toujours considéré qu’une porte vitrée constituait une chose au
sens de l’article 1384 du Code civil (v. par exemple Civ. 2ème, 24 février
2005).
Les portes vitrées sont donc des choses visées par l’article 1384 al.1.
La première condition est par là même remplie.

 Le fait d’une chose :


La chose doit avoir été l’instrument du dommage, elle doit avoir joué un
« rôle actif » : Civ., 3 janvier 1934. D’après une jurisprudence constante
le rôle actif de la chose est présumé lorsque celle-ci était en mouvement
et est entrée en contact avec la personne lésée. (Pour une illustration, v.
Civ. 2ème, 1er février 1973).
En l’espèce, si M. MELVIN est entrée en contact avec la porte vitrée il
semblerait que cette dernière n’était pas en mouvement au moment de
l’accident.
Lorsque la chose était inerte, ou, lorsqu’il n’y a pas eu de contact entre la
chose et la victime, le rôle causal de cette chose dans la survenance du
dommage doit être prouvé par la victime. Ainsi, « une chose inerte ne
peut être l’instrument du dommage que si la preuve est rapportée qu’elle
occupait une position anormale ou qu’elle était en mauvais état » (Civ.
2ème, 11 janvier 1995).
En l’espèce, rien n’indique que la porte vitrée occupait une position
anormale ou qu’elle était en mauvais état. Nous savons tout de même que
la porte vitrée se trouvait dans le salon de M. ABEYTA ce qui n’est pas
un endroit anormal. M. MELVIN peut, par contre, peut être s’appuyer
sur le mauvais état de la porte vitrée. D’après la deuxième chambre civile
de la Cour de cassation « dés lors qu’il résulte des constatations des
juges du fond qu’une porte vitrée, qui s’était brisée, était fragile, la
chose, en raison de son anormalité, a été l’instrument du dommage »
(Civ. 2ème, 24 février 2005).
En l’espèce on ne sait pas si la vitre s’est brisée au moment du choc.
Dans cette hypothèse M. MELVIN pourrait s’appuyer sur cet élément
pour invoquer la fragilité de la vitre qui serait en partie à l’origine de son
dommage.
A cette condition ou à la condition que M. MELVIN prouve la position
anormale ou le mauvais état de la porte vitrée, la deuxième condition
serait remplie.

 La garde de la chose :
Depuis le célèbre arrêt Franck (Chb. Réunies, 2 décembre 1941) les
juges de la Cour de cassation rattachent la garde d’une chose aux
11
pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle qu’une personne exerce sur
elle. Ainsi « la responsabilité du dommage causé par une chose est liée à
l’usage qui est fait de la chose ainsi qu’aux pouvoirs de surveillance et
de contrôle exercés sur elle, qui caractérisent la garde ».
Peut-on considérer que M. ABEYTA est gardien de la porte vitrée au
moment ou M. MELVIN l’a heurté ?
La Cour de cassation fait peser une présomption de garde sur le
propriétaire de la chose (Civ. 2ème, 16 mai 1984). En l’espèce il s’agit
d’une porte vitrée qui se trouve dans la maison de M. ABEYTA. Celui-ci
en est donc le propriétaire. Il est donc son gardien présumé.
La troisième condition est remplie.

3) Causes d’exonération :

Le gardien d’une chose peut être partiellement exonéré s’il rapporte la


preuve que la faute de la victime a contribué au dommage.
Seule la faute et non le fait de la victime, emporte exonération partielle
(Civ. 2ème, 6 avril 1987).
En l’espèce, M. ABEYTA devra prouver que M. MELVIN a commis
une faute d’imprudence et d’inattention en heurtant sa porte vitrée. Il
devra prouver que sans cette faute, M. MELVIN n’aurait pas été blessé
par la porte vitrée et donc que sa faute a, au moins pour partie, contribué
à son dommage. Il dispose pour cela d’un certain nombre d’arguments.
Les juges considèrent par exemple que lorsque la vitre « était
suffisamment signalée pour se manifester à une personne attentive elle
n’a pas été l’instrument du dommage » (Civ. 2ème, 28 mai 1986 : renvoi
à l’appréciation du rôle causal joué par la chose). De plus les juges
retiennent l’exonération partielle du gardien de la chose lorsque la
victime a commis une faute d’inattention en percutant une vitre dans un
lieu qu’elle connaissait bien (V. Civ. 2ème, 19 février 2004). En l’espèce
on sait que M. ABEYDA est le meilleur ami de M. MELVIN. On peut
donc imaginer que ce dernier connaît parfaitement la maison de son ami
et qu’il a effectivement commis une erreur d’inattention. Cela reste à
l’appréciation des juges du fond.

4) Conclusion :

Si Monsieur MELVIN décide d’exercer une action en réparation contre


M. ABEYDA il devra prouver que sa porte vitrée était placée
anormalement ou était en mauvais état. S’il y parvient il est probable que
M. ABEYDA arrive à s’exonérer partiellement de sa responsabilité en
prouvant que M. MELVIN a commis une faute d’inattention.
12
En l’espèce on sait que M. MELVIN ne veut agir en justice que s’il est
certain d’obtenir gain de cause. Il semble donc préférable de lui
conseiller de ne pas intenter d’action en justice.
13

IV. Correction du cas n° 3

Enfin M. MELVIN vous explique qu’il pense exercer une action en


justice contre son voisin M. SANDIN. Le week-end dernier, M. MELVIN
a eu avec M. SANDIN un long débat sur la politique actuelle du
gouvernement tout en passant la tondeuse dans son jardin. Au cours de
cette discussion M. MELVIN dû confier sa tondeuse quelques minutes à
son voisin le temps de répondre au téléphone. Malheureusement cela
suffit à M. SANDIN pour briser involontairement un magnifique pot en
terre cuite exposé dans le jardin de M. MELVIN en le heurtant avec la
tondeuse. Le pot cassé ayant une grande valeur économique et
sentimentale, M. MELVIN souhaite agir contre M. SANDIN en
réparation du préjudice.

M. MELVIN souhaite agir en réparation du préjudice qu’il a subi sur le


fondement de la responsabilité de M. SANDIN dans la destruction du pot
qu’il a heurté avec la tondeuse de M. MELVIN. Il s’agit donc d’un
problème de responsabilité du fait des choses. Il convient d’étudier les
conditions relatives à cette responsabilité pour savoir si elles sont
remplies en l’espèce et si M. MELVIN peut obtenir réparation sur ce
fondement.

1) Admission et fondement de la responsabilité générale du fait des


choses :

La responsabilité du fait des choses (RFC) est admise sur le fondement


de l’article 1384 al.1 du Code civil depuis l’arrêt Teffaine rendu le 16
juin 1896 par la chambre civile de la Cour de cassation et l’arrêt
Jand’heur rendu par les chambres réunies de la Cour de cassation le 13
février 1930.

2) Conditions de la responsabilité du fait des choses :

La responsabilité d’une personne du fait d’une chose ne peut être


engagée que si 3 conditions sont remplies. Il faut qu’il s’agisse
effectivement d’une chose, que celle-ci ait joué un rôle dans la
survenance d’un dommage et qu’un individu exerce un pouvoir de garde
sur cette chose.

 Une chose :
L’article 1384 al.1 CC est d’une généralité absolue quant à la chose,
cause du dommage. En effet, aucune distinction ne doit être effectuée
14
entre les choses mobilières et les choses immobilières (Req. 6 mars
1928). De même, aucune distinction ne doit être effectuée entre les
choses dangereuses et les autres : Arrêt Jand’heur précité.
La chose, cause du dommage est, en l’espèce, une tondeuse. Elle rentre
au sein des choses visées à l’article 1384 al.1.
La première condition est par là même remplie.

 Le fait d’une chose


La chose doit avoir été l’instrument du dommage, elle doit avoir joué un
« rôle actif » : Civ., 3 janvier 1934. D’après une jurisprudence constante
le rôle actif de la chose est présumé lorsque celle-ci était en mouvement
et est entrée en contact avec la personne lésée ou l’objet endommagé
(Pour une illustration, v. Civ. 2ème, 1er février 1973).
En l’espèce, la tondeuse a heurté le pot en terre cuite ce qui l’a brisé. La
tondeuse, conduite par M. SANDIN, était donc effectivement en
mouvement et est entrée en contact avec l’objet endommagé.
De ce fait, le rôle actif de la tondeuse est présumé. M. SANDIN peut
renverser la présomption en prouvant que la tondeuse n’a pas joué un
rôle actif dans la survenance du dommage ce qui paraît compliqué.
La deuxième condition est ainsi remplie.

 La garde de la chose
Depuis le célèbre arrêt Franck (Chb. Réunies, 2 décembre 1941) les
juges de la Cour de cassation rattachent la garde d’une chose aux
pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle qu’une personne exerce sur
elle. Ainsi « la responsabilité du dommage causé par une chose est liée à
l’usage qui est fait de la chose ainsi qu’aux pouvoirs de surveillance et
de contrôle exercés sur elle, qui caractérisent la garde ».
Peut-on considérer que M. SANDIN est gardien de la tondeuse au
moment ou celle-ci a heurté le pot ?
La Cour de cassation fait peser une présomption de garde sur le
propriétaire de la chose (Civ. 2ème, 16 mai 1984). En l’espèce M.
MELVIN est propriétaire de la tondeuse. Il est donc son gardien
présumé. Pour s’exonérer de cette responsabilité il doit prouver qu’en
prêtant sa tondeuse à son voisin il lui a délégué les pouvoirs d’usage, de
direction et de contrôle sur celle-ci. Cela risque d’être particulièrement
difficile car dans une affaire du même genre les juges de la deuxième
chambre civile ont considéré que « le propriétaire confiant une chose à
un tiers ne cesse d’en être responsable que s’il est établi que le tiers a
reçu corrélativement les pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle de
la chose ; tel n’est pas le cas, s’agissant d’une tondeuse confiée à un
tiers par son propriétaire, pour un court laps de temps et pour un usage
déterminé dans son propre intérêt » (Civ. 2ème, 19 juin 2003).
En l’espèce on sait que M. MELVIN a confié sa tondeuse à M. SANDIN
le temps de répondre au téléphone pour qu’il continue à tondre dans son
15
propre jardin. Le prêt ne durait donc qu’un court laps de temps et avait
un usage déterminé dans l’intérêt de M. MELVIN.
Il semblerait donc que M. MELVIN ait conservé la garde de la tondeuse
au moment de l’accident même s’il l’avait temporairement confiée à son
voisin.
La troisième condition n’est donc pas remplie. Il n’est pas nécessaire de
s’interroger sur les causes d’exonération.

4) Conclusion :

En principe l’action de M. MELVIN sur le fondement de l’article 1384


du Code civil ne devrait pas aboutir (M. SANDIN n’est pas le gardien de
la tondeuse). La solution dépend de la libre appréciation des juges du
fond mais il est peu probable que ceux-ci donnent raison à M. MELVIN.
M. MELVIN peut éventuellement invoquer la responsabilité quasi-
délictuelle de M. SANDIN sur le fondement de l’article 1383 du Code
civil mais il devra prouver que ce dernier a commis une imprudence. Or,
comme M. SANDIN s’est servis de la tondeuse dans l’intérêt de M.
MELVIN il est peu probable que les juges retiennent sa responsabilité.
En l’espèce il semble préférable de conseiller à M. MELVIN de ne pas
intenter d’action en justice.

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