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Université Mohamed khidher Biskra

Faculté des sciences et de la technologie


Département d’architecture cours n°:3
3éme année L.M.D
Module :histoire et théories urbaines Année universitaire :2013/2014

L’APPROCHE SYSTEMIQUE ET L’ANALYSE DU SYSTEME URBAIN


Maitre-assistant : ALOUANE FAYCAL

Introduction :
Parmi les approches analytiques utilisées en architecture et en urbanisme et qui ont dominé la
première moitié du 20eme siècle figure l'approche fonctionnaliste. Elle se base sur la « fonction »
Cette dernière était au cœur de toutes les sciences. Elle a longtemps véhiculé la suprématie de la
nature sur l'homme à une époque où les sciences naturelles étaient la source principale de toutes
réflexions scientifiques. La théorie évolutionniste de Darwin, celle de Freud, la théorie
déterministe de la géographie classique. Celle de l'ethnologie classique, la nostalgie de la
cabane primitive en architecture, toutes s'inspirent de la même logique, celle tend à exprimer la
force dont la nature dispose à produire des faits propres à l'homme et à son univers s (B. Ben
Youcef, 1995).
La deuxième moitié du 20eme siècle a connu un très grand bouleversement en matière d'approche.
La culture a remplacé la nature et le concret a remplacé l'abstrait, plusieurs approches ont alors
vu le jour
· L'approche typo-morphologique : elle considère l'espace construit comme système autonome
qui fonctionne selon une logique et des mécanismes propres à lui. Elle s'inspire de la vision
systémique. C'est une approche qui a mûri au sein de l'école italienne. Elle est développée
essentiellement par ses principaux adeptes Aldo Rossi, Cannigia, Muratori etc...
· L'approche_paysagiste  : elle considère l'espace selon un rapport de communication de l'homme
et de l'espace, elle se base sur la perception visuelle et trouve son extension dans les domaines de
la psychologie et de la sémantique de l'espace. Elle a mûri dans l'école américaine, l'un de ses
principaux adeptes est Kevin Lynch.
· L'approche anthropologique  : elle considère l'espace selon un rapport de l'homme à l'espace du
point de vue pratique qui confère à la pratique sociale sa dimension spatiale, l'un de ses adeptes
est Edward T Hall.
· L'approche culturaliste : Son objet tourne autour de la théorie du lieu, l'un de ses adeptes est

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Norberg Chultz. Ce modèle se dégage des oeuvres des philosophes comme Ruskin et William
Morris et à la fin du siècle chez Camillo Sitte et Ebenezer Howard qui deviendra le père des cités
jardins.
· L'approche naturaliste : (Frank Lloyd Wright) se base sur le contact avec la nature.

· L'approche moderniste : Tony Garnier et le groupe des CIAM (Le Corbusier, Baudoin, Lods,
Van Eesteren, Costa ainsi que l'équipe du Bauhaus (Gropius, Mies Van Der Roche),
passionnés de modernité, de rationalisation, d'universalité et d'efficacité et qui veulent adapter
la ville aux fonctions de base : habiter, travailler, circuler, se cultiver le corps et l'esprit.
Toutes ces approches ne sont pas contradictoires, elles sont plutôt complémentaires car
chacune d'elles penche vers une dimension particulière qui ne fait que consolider l'autre. Cet
aspect fragmentaire de la recherche pose à notre problème, car la recherche est aujourd'hui de
moins en moins l'effort du chercheur isolé dans la spécialité de sa discipline et à l'intérieur de
celle-ci dans un champ très particulier. La recherche est devenue un travail d'équipe.
L'architecte, l'urbaniste, l'économiste, le sociologue, le psychologue, le politologue et bien
d'autres peuvent se rencontrer dans une même problématique. Il est alors difficile à ces
chercheurs de communiquer entre eux pour élaborer une problématique commune sur un objet
commun. II ne s'agit pas seulement d'unifier leur vocabulaire mais de formuler des questions,
des hypothèses et de forger des concepts. Pour cela, l'approche des systèmes semble être la
mieux placée pour l'analyse transdisciplinaire.
· L'approche systémique : offre une nouvelle conceptualisation, une nouvelle manière de
constituer les objets à identifier et les problématiques relatives à ces objets et cette
conceptualisation peut être adoptée par des chercheurs en sciences physiques, biologiques,
humaines, sociales etc. sans pour autant effacer ou confondre les particularités de leur objet
propre.
1. QU'EST-CE QU'UN SYSTEME ?
Selon Ludwig Von .Bertalanffy (1968), un système peut être défini comme un complexe
d'éléments en interaction.
Un système est un ensemble complexe formé de composants distincts reliés entre eux par un
certain nombre de relations. Les relations sont essentielles. Les composants eux-mêmes sont
des sous-systèmes, donc le système est un ensemble de sous-ensembles. Un sous-système peut
être soit réduit en sous/sous-système, soit être traité comme en élément provisoirement
indécomposable. Un système est plus complexe que ses parties.
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Selon Bernard. Walliser (1977), c'est un ensemble en rapport réciproque avec un
environnement. Ces échanges lui assurant une certaine autonomie. C'est un ensemble formé
de sous systèmes en interaction. Cette interdépendance lui assure une certaine cohérence.
C'est un ensemble subissant des modifications plus ou moins profondes dans le temps tout en
conservant une certaine permanence.
Selon Edgar Morin (1977), l'organisation, concept absent de la plupart des définitions du
système était jusqu'à présent étouffée entre l'idée de totalité et l'idée d'interrelations, alors
qu'elle lie les deux. Les trois notions (organisation, interrelations, totalité) devenant
indissociables. Dès lors, on peut concevoir le système comme unité globale organisée
d'interrelations entre éléments, actions et individus. Le terme « éléments » ne renvoie pas à
l'idée d'unité simple et substantielle mais est relatif au tout dont il fait partie.
Selon Jean William Lapierre (1992), le système signifie un ensemble d'éléments
quelconques liés entre eux par un ensemble de relations qui en font un tout cohérent. Il
peut être aussi défini comme un concept composé de processus liés entre eux par un
ensemble d'interrelations à la fois assez cohérent et assez souple pour le rendre capable d'un
certain degré d'autonomie. Il faut comprendre par « processus » une séquence de
mouvements, de comportements ou d'actions accomplis par un agent quelconque (individuel
ou collectif) qui peut être appelé acteur de ce processus.
Etymologiquement, le mot système vient d'un verbe grec signifiant « se tenir ensemble ». Les
interactions entre processus ne veulent pas dire que l’un des processus est la cause et l'autre
l'effet, mais les deux sont cause et effet en même temps. Les interactions dépendent les unes
des autres et l'ensemble forme un tout dans lequel tout se tient.

2. UN SYSTEME EST PLUS QUE LA SOMME DES PARTIES :


Comme nous l'avons déjà vu précédemment, il existe une différence entre l'analyse et la
description. Pour la description en science sociale, la famille constituée de parents et
d'enfants, qui contribue à reproduire la population fait partie d'un secteur d'activité sociale qui
relève de la démographie. Une Université avec tous ses départements et ses spécialités fait
partie du secteur de production et de transmission du savoir. Un journal qui communique les

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informations à ses lecteurs ne fait-il pas partie du secteur des médias ? Une ville avec ses
quartiers, ses rues, ses ruelles, qui répartit sur l'espace les habitations et les déplacements des
populations ne fait-elle pas partie de l'objet géographique ? Ce découpage graduel en secteurs
d'activités et en différentes parties est tout à fait justifié pour une description car cette dernière
est le premier degré du savoir.

L'analyse des systèmes prend un tout autre chemin. A ce stade analytique, la recherche doit
toucher le domaine de l'abstrait, ce qui est indistinct c'est à dire les processus relationnels afin
de dégager et comprendre l'interactivité. On ne doit pas se contenter de la description, il faut
passer au second degré du savoir. Dans une famille, les rapports sociaux entre les sexes et entre
les générations sont importants ; les soins et la santé de ses membres nouent entre eux de
nombreux liens. La famille habite quelque part et aménage à sa manière l'espace domestique,
elle a des relations de voisinage avec d'autres familles, elle a aussi des trajets de circulation
dans la ville. Une famille est consommatrice de biens et de services. Le budget familial est
géré d'une certaine manière qui peut susciter accords ou désaccords entre ses membres Il y a
entre eux échange de biens et de services. Les membres d'une famille se communiquent entre
eux certaines informations et ne se communiquent pas d'autres, se transmettent des
connaissances. Une famille a un ensemble de souvenirs valorisés et célébrés, elle a ses fêtes,
ses deuils, son code éthique, ses croyances et ses symboles communs. Une famille a aussi des
règles de la vie familiale et des relations de pouvoir entre parents et enfants, entre conjoints,
entre frères et sœurs etc...
L'université, la ville, le journal etc. sont traversés par une série d'analyses relationnelles
semblables à celles évoquées pour l'exemple de la famille. Pour que se forment des rapports
entre les différents éléments d'un système, il faut qu'il y ait au moins :
a- une population qui vit de génération en génération, se reproduit et se renouvelle
b- un espace où vit, parmi d'autres espèces vivantes, cette population humaine, espace qu'elle
habite et aménage.
c- la production et l'échange des biens et services nécessaires à la vie de cette population.
d- une communication d'informations et de connaissances entre les membres de cette
population.

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e- l'élaboration et la diffusion des symboles, valeurs, croyances qui constituent l'imaginaire
social et la mémoire collective de cette population
f- des règles du jeu social et des relations de pouvoir
Ces rapports relationnels, qui peuvent avoir d'autres ramifications font que l'ensemble
systémique est plus que la somme des parties et qu'une modification sur un point entraîne des
répercussions sur l'ensemble.

3. L'OUVERTURE OU LA FERMETURE DU SYSTEME :


Selon Valaskakis (1975), une approche systémique doit tout d'abord définir le système central et
identifier sa finalité, ce qui permettra la définition de la structure et le bilan des relations
d'entrée et de sortie du système. IL faut ensuite tenir compte de la hiérarchie des systèmes
auxquels appartient le système étudié : celui-ci inclut un certain nombre de sous-systèmes et
est lui-même compris dans une gamme de super systèmes qu'on qualifie d'environnement.
Par rapport à cet environnement, un système est plus ou moins ouvert.et plus ou moins fermé. Il
est ouvert dans la mesure où il agit sur d'autres systèmes et réagit à leur action sur lui. Cette
action de l'environnement fait entrer dans le système de la matière, de l'énergie et de
l'information qui ou bien déclenchent, incitent, stimulent ses processus internes et leur
fournissent les ressources qui leur sont utiles ou bien au contraire, perturbent l'organisation du
système. Ces « variables d'entrée » comme les appelle Landry ont plusieurs synonymes.
Walliser les nomme « flux d'entrée », Le Moigne propose le néologisme « intrant », l'anglais
les qualifie de « input ».
D'un système ouvert sortent vers son environnement de la matière, de l'énergie et de
l'information qui vont agir sur d'autres systèmes en leur apportant des ressources et des
contraintes, des incitations et des perturbations. Ce sont les « variables de sortie », ou
« extrant » ou « flux de sortie » ; en anglais « output ».
Un système est fermé dans la mesure où il ne laisse pas entrer en lui tout ce qui vient de son
environnement et réagit donc sélectivement à l'action des autres systèmes.
Un système tout à fait ouvert, un système absolument fermé ne sont que des concepts limites. Le
concept de système n'est un bon outil d'analyse et de connaissance que quand il est pensé
comme ouvert et fermé à la fois.

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4. DYNAMIQUE ET HIERARCHIE DU SYSTEME :
Un système peut être plus ou moins stable s'il conserve ses propriétés malgré les modifications
internes qu'il peut subir et malgré les interactions avec l'environnement. Le manque de stabilité
se traduit par un renforcement ou une désagrégation. L'évolution du système peut être liée aux
modifications internes qui peuvent affecter ses composantes, aux modifications dans les
relations qui unissent les différentes parties du système, aux interactions qui peuvent s'établir
entre systèmes et environnement. Le système est dit dynamique dans le sens où il vit, évolue,
se développe ou s'atrophie. La situation présente n'est qu'un moment d'une évolution. Il intègre
la variable temps. II est dit hiérarchisé dans le sens où en matière de classification, il se situe
à un niveau tel qu'il est considéré comme système comprenant des sous-systèmes et sous-
système inscrit dans d'autres méga-systèmes plus larges.
5. LES POSTULATS DE L'ANALYSE DES SYSTEMES :
Quelques postulats fondamentaux de l'analyse des systèmes
· L'objet à connaître est complexe, irréductible à des éléments simples. On peut distinguer des
systèmes qui le traversent et dans ceux-ci des sous-systèmes qui ne sont pas nécessairement
moins complexes.
· Un système est dynamique. C'est un ensemble de processus en interaction les uns avec les
autres.
· Un système est organisé : les interactions entre les processus ne sont pas le fruit du hasard.
Elles ne sont pas non plus déterminées par un ordre immuable. L'organisation du système
implique de l'ordre et du désordre des processus désorganisateurs et réorganisateurs.
· UN système ne peut être compris que par rapport à son environnement à l'égard duquel il a
un certain degré d'autonomie. Ce qui signifie qu'il est à la fois ouvert à cet environnement et
relativement fermé.
· Le degré d'autonomie correspondant à l'autorégulation a pour condition une mémoire, c'est à
dire un processus interne d'accumulation et de disponibilité des informations précédemment
entrées dans le système.
· Un même objet peut être analysé de plusieurs manières. Tout dépend de la problématique
formulée.

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6. ANALYSE DU SYSTÈME URBAIN :
Le système urbain et l’environnement sont deux termes d’une situation dialectique. L’un et
l’autre sont également complexes et on ne peut pas les séparer.
L’environnement dans lequel se trouve placée la ville est le résultat de l’action humaine, parfois
prolongée et multiforme, sur un espace à la fois proche et lointain. C’est la projection d’une
société sur le cadre physique, donc la mise
en rapport avec ce que les économistes désignent depuis le XIXe siècle par l’expression de
((biens naturels)), (Derycke in Vaquin, 1977).
Ces biens naturels rassemblent le sol, le sous-sol, l’air, l’espace sonore et, j’ajouterais
éventuellement, l’eau, la végétation… Ces données jouent de diverses manières : elles sont à la
fois objets (par leur existence même) et sujets (par le rôle qu’elles jouent vis-à-vis les unes des
autres ou envers les entreprises humaines).
Elles fournissent : le site immédiat de l’origine et du développement et la situation plus générale.
Favorable ou défavorable. Dont jouit la ville (carrefour, rivage maritime. Vallée resserré …), et
parfois un certain nombre de produits nécessaires à sa vie ou, au moins à ses activités ; elles sont
souvent, pour des motifs divers et variables, l’occasion même de la ville ; elles sont plus ou
moins contraignantes par leur nature (et, en cela, elles peuvent influencer le développement. Le
dessin. Les conditions de vie et les activités urbaines) et soumises à une utilisation dont l’homme
peut user et abuser : pollution et spéculation sont deux termes qui sont fréquemment associés
aux mentions des biens naturels.
BIBLIOGRAPHIE
Benyoucef B, Analyse urbain, éléments de méthodologie, OPU, Alger 1995.
Bertalanffy L. V, Théorie générale des systèmes. Physique, Biologie, Psychologie, Sociologie,
Philosophie, Traduction française J-B Chabrol, Dunod, Paris 1973. Lapierre J.W, De
l'explication dans les sciences sociales : la fonction et le système in êtres contemporains, Presses
universitaires du Quebec, Quebec p.13-31.
Lapierre J.W, L'analyse des systèmes, l'application aux sciences sociales, Syros, Paris 1992.
Le Moigne J.L, La théorie du système général, théorie de la modélisation, PUF, Paris 1984.
Lynch K, Image de la cité, Dunod collection Aspects de l'urbanisme, Paris.
Rossi A, Architecture de la ville, l'Equerre, Paris 1989.
Valaskakis K, Fondements épistémologiques de l'analyse interdisciplinaire par l'approche
systémique, note et doc des recherches de l'université de Laval n°6, p.99, Lavai 1975.
Walliser B, systèmes et modèles, introduction critique à l'analyse des systèmes, Seuil, Paris
1977.
Jacqueline beaujeu-garnier , géographie urbaine , le système urbain, page 24, édition
Armand Colin.

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