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Hassan Rachik
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Bienvenue
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5. suggestion pratiques
- Enrichir le document « Notes de cours » qui vous été remis par les notes
prises lors du cours. La partie orale du cours est plus importante
(explications détaillées, exemples multipliés, interactions...)
- Préparer des dossiers par séquence du cours : les « Notes de cours » ne
sont qu’un guide pour vous aider à constituer ces dossiers.
- Ces dossiers comprennent les textes fournis par le professeur, les notes
prises lors du cours, les notes de lecture personnelles, des extraits de textes.
6. Evaluation
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Ni les gens, ni les chercheurs n’attendent les sciences sociales pour avoir
des idées sur leur société. Ils ne peuvent vivre en société sans se faire des
idées sur la famille, la religion, la femme, la politique, le mariage, l’amitié,
l’argent, etc. La difficulté pour un chercheur ou un étudiant en sciences
sociales consisterait d’abord dans le fait qu’il vit dans une société.
Notre première tâche consiste à examiner les attitudes préconisées par les
différentes traditions théoriques à l’égard de la connaissance commune.
1. Les traits de la CC
a. Accessibilité.
b. Evidence.
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Ceci apparaît souvent dans les propositions de bon sens, dans les adages,
les proverbes, qui souvent résument la CC : « Il ne faut pas mettre tous ses
œufs dans un même panier », « Il faut se tenir à l’écart des gens par temps
de grippe », ou « Je crois ce que je vois », « Il faut battre le fer tant qu’il est
chaud ».
Il faut cependant noter que l’évidence n’est pas un trait des phénomènes
sociaux, mais un trait que la CC leur confère.
c. Sens pratique.
d. Absence de méthode.
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Encadré : Stéréotypes
Dans une société donnée, les gens partagent des idées souvent négatives à
propos des groupes sociaux. « Les X sont radins », « Les Y sont lâches »,
« Les Z sont violents » etc. Les traits sélectionnés et qui peuvent être
observables sont abusivement généralisés au groupe concerné dans son
ensemble. On appelle stéréotypes ce type d’idées, de jugements, qui
peuvent faire l’objet de croyances plus ou moins fortes, comme elles
peuvent devenir l’objet de plaisanteries sociales. Ils peuvent être inexacts,
mais le fait qu’ils soient partiellement vrais n’est pas exclu.
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A partir du 19° siècle, s’est posée de façon systématique la question de
savoir si les méthodes des sciences sociales (MSS) doivent imiter celles des
sciences de la nature (SN) Trois types de réponses ont été proposés :
- Des chercheurs et philosophes affirment l’identité des objets étudiés par
les SN et les SS et défendent par conséquent l’identité de leurs méthodes.
- D’autres, tout en affirmant la différence entre les phénomènes sociaux et
les phénomènes naturels, trouvent que les MSS doivent prendre comme
modèle les méthodes des SN.
- D’autres encore pensent qu’il existe des différences essentielles entre les
phénomènes sociaux et les phénomènes naturels, ce qui exige le recours à
des méthodes spécifiques aux SS.
Pour Auguste Comte (1798-1857), la science positive, quel que soit son
objet, la société ou la nature, doit observer, pour mériter le nom de science,
certains principes méthodologiques.
Le primat de l’observation.
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A l’instar des SN, les questions doivent porter sur des faits et doivent par
conséquent se débarrasser des questions métaphysiques sur l’origine des
choses. Autrement dit la science ne doit produire que des énoncés
empiriques, c’est-à-dire des énoncés qui peuvent être confrontés à
l’observation et vérifiés.
Prévision rationnelle
Comte ajoute que « le véritable esprit positif consiste surtout à voir pour
prévoir. » Il ne s’agit pas seulement de voir, d’observer, d’accumuler des
faits aussi précis soit-ils, l’esprit positif doit dégager des relations constantes
entre les phénomènes qui, à l’instar des études astronomiques, doit le
conduire à la prévision rationnelle des phénomènes (A. Comte, Discours
sur l’esprit positif)
La tradition positiviste repose sur les principes suivants :
- Croire dans l’idée du progrès de l’humanité. Comparé aux systèmes de
connaissances antérieures (théologie, philosophie), la science positive est
considérée comme forme supérieure.
- Une confiance exagérée dans les résultats de la science expérimentale.
- Ecarter tout ce qui n’est pas observable (la métaphysique, l’intuition,
l’émotion,…).
Positivisme juridique
Le droit se réduit au droit positif (droit posé par des hommes vs. droit
naturel…)
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Positivisme juridique
« Positif » a été utilisé pour distinguer les sciences modernes fondées sur
l’expérience et l’observation des faits du savoir spéculatif.
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nature et ses lois propres. C’est l’être social. Les phénomènes qui s’y
passent ont assurément leurs dernières racines dans la conscience de
l’individu. La vie collective n’est pourtant pas une simple image agrandie de
la vie individuelle. Elle présente des caractères sui generis que les seules
inductions de la psychologie ne permettaient pas de prévoir. » (Durkheim,
1888, « Cours de science sociale, leçon d’ouverture » « Cours de science
sociale, leçon d’ouverture », in Durkheim, E., La science sociale et
l’action, PUF, 1970. 86, cf. 97)
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S'il en a été ainsi des sciences naturelles, à plus forte raison en devait-il
être de même pour la sociologie. Les hommes n'ont pas attendu l'avènement
de la science sociale pour se faire des idées sur le droit, la morale, la famille,
l'État, la société même; car ils ne pouvaient s'en passer pour vivre. Or, c'est
surtout en sociologie que ces prénotions, pour reprendre l'expression de
Bacon, sont en état de dominer les esprits et de se substituer aux choses. En
effet, les choses sociales ne se réalisent que par les hommes; elles sont un
produit de l'activité humaine. Elles ne paraissent donc pas être autre chose
que la mise en œuvre d'idées, innées ou non, que nous portons en nous, que
leur application aux diverses circonstances qui accompagnent les relations
des hommes entre eux. L'organisation de la famille, du contrat, de la
répression, de l'État, de la société apparaît ainsi comme un simple
développement des idées que nous avons sur la société, l'État, la justice, etc.
Par conséquent, ces faits et leurs analogues semblent n'avoir de réalité que
dans et par les idées qui en sont le germe et qui deviennent, dès lors, la
matière propre de la sociologie.
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Geertz, C., « Les sens commun en tant que système culturel », in Geertz, C.
Savoir local et savoir global, PUF, 1986, p. 108-116
[... ] Les termes que je veux employer de cette façon en ce qui concerne le
sens commun sont: naturel, pratique, mince, sans méthode, accessible.
«Naturel ), « esprit pratique ), « minceur ), « absence de méthode» et
«accessibilité» sont les 'propriétés quelque peu inhabituelles que je veux
attribuer au sens commun en général, en tant que forme culturelle qu'on
trouve partout.
La première de ces quasi-qualités, le naturel, est peut-être la plus
fondamentale. Le sens commun présente les choses - c'est-à-dire certaines
choses et pas d'autres - comme étant ce qu'elles sont dans la simple nature
du cas. Un air d' « évidence ), un sens de « ça se tient ), est projeté avec les
choses - encore une fois certaines choses choisies, soulignées. Elles sont
présentées comme inhérentes à la situation, comme des aspects intrinsèques
de la réalité, la façon dont les choses se passent [. . .]
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complications, aux yeux grands ouverts, croit qu'il est. Sobriété, non
subtilité, réalisme, non-imagination, sont les clefs de la sagesse; les faits"
vraiment importants de la vie sont dispersés ouvertement à sa surface, non
cachés astucieusement dans ses profondeurs. Il n'y a pas besoin, en fait c'est
une erreur fatale, de nier comme le font si souvent les poètes, les
intellectuels, les prêtres et d'autres complicateurs professionnels du monde,
l'évidence de l'évident. La vérité est claire comme de l'eau de roche, comme
le dit le proverbe hollandais.
[.. .]
Quant à l' « absence de méthode », autre qualité pas trop bien nommée
que la pensée du sens commun attribue au monde, elle satisfait aussitôt les
plaisirs de l'inconséquence qui sont très réels pour tous sauf pour les plus
scolastiques des hommes ( Une cohérence stupide est le farfadet des petits
esprits », comme disait Emerson; « Je me contredis, bon, je me contredis.
A lire
Texte : [Primat du tout sur les éléments] (fait social émergent et analogie
avec phénomènes naturels émergents) in Durkheim, Emile (1894), Les
règles de la méthode sociologique. (voir ci-dessous)
Texte : [Du phénomène social], Mauss, Marcel et Fauconnet, Paul [1901],
« La sociologie, objet et méthode in Marcel Mauss, Essais de sociologie,
1968. (voir ci-dessous)
Textes : Positivisme : Définitions des dictionnaires Lalande, Larousse.. ( ci-
dessous, à lire et à analyser en classe) (voir ci-dessous)
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Durkheim ne part pas du postulat de l’identité entre les phénomènes sociaux
et les phénomènes naturels. Il cherche plutôt à observer à l’égard des
phénomènes sociaux des principes méthodologiques similaires à ceux
appliqués par les sciences de la nature.
Selon lui, l’objectivité des faits sociaux est une condition essentielle à
l’application des méthodes positives.
«La première règle et la plus fondamentale est de considérer les faits
sociaux comme des choses »
Cette règle implique deux exigences essentielles :
Ecarter les prénotions considérées comme un obstacle (épistémologique) à
la connaissance scientifique.
Et définir de façon objective les phénomènes sociaux étudiés (les questions
relatives à la définition seront traitées plus loin)
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suffit pas de le vouloir, il faut encore un effort plus ou moins laborieux, dû à
la résistance qu'elle nous oppose et qui, d'ailleurs, ne peut pas toujours être
vaincue (Durkheim, Les règles…)
Les faits sociaux sont objectifs car ils sont extérieurs aux individus. Le
primat de la société sur l’individu.
L’objectivité des FS est affirmée en montrant que la société est une totalité
irréductible à ses parties, c’est-à-dire qu’elle est indépendante des individus,
qu’elle n’est pas la somme des individus qui la composent.
Le fait social est un fait émergeant car il n’a pas pour fondement les
individus. En montrant le primat de la société sur l’individu, Durkheim a
essayé de démontrer le caractère naturel et objectif des phénomènes sociaux.
Les faits sociaux sont objectifs car ils sont extérieurs aux individus, et parce
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qu’ils sont extérieurs aux individus, ils peuvent être traités comme des
choses. Des faits sociaux comme les normes, les habitudes, la langue, les
croyances etc., existent en dehors des individus car ils leur préexistent et
leur survivent.
La contrainte
Les phénomènes sociaux sont plus complexes que les phénomènes naturels.
Pour ces raisons, Durkheim ne préconise pas une simple transposition des
méthodes des SN en sociologie. L’expérimentation, par exemple, ne peut
être qu’indirecte en SS (méthode comparative)
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Texte : Primat du tout sur les éléments (fait social émergent et analogie
avec phénomènes naturels émergents) in Durkheim, Emile (1894), Les
règles de la méthode sociologique.
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milieu, ils ne dépendent pas des mêmes conditions. Ce n'est pas à dire qu'ils
ne soient, eux aussi, psychiques en quelque manière puisqu'ils consistent
tous en des façons de penser ou d'agir. Mais les états de la conscience
collective sont d'une autre nature que les états de la conscience individuelle;
ce sont des représentations d'une autre sorte. La mentalité des groupes n'est
pas celle des particuliers ; elle a ses lois propres. Les deux sciences sont
donc aussi nettement distinctes que deux sciences peuvent l'être, quelques
rapports qu'il puisse, par ailleurs, y avoir entre elles.
Toutefois, sur ce point, il y a lieu de faire une distinction qui jettera peut-
être quelque lumière sur le débat.
Que la matière de la vie sociale ne puisse pas s'expliquer par des facteurs
purement psychologiques, c'est-à-dire par des états de la conscience
individuelle, c'est ce qui nous paraît être l'évidence même. En effet, ce que
les représentations collectives traduisent, c'est la façon dont le groupe se
pense dans ses rapports avec les objets qui l'affectent. Or le groupe est
constitué autrement que l'individu et les choses qui l'affectent sont d'une
autre nature. Des représentations qui n'expriment ni les mêmes sujets ni les
mêmes objets ne sauraient dépendre des mêmes causes. Pour comprendre la
manière dont la société se représente elle-même et le monde qui l'entoure,
c'est la nature de la société, et non celle des particuliers, qu'il faut
considérer. Les symboles sous lesquels elle se pense changent suivant ce
qu'elle est. Si, par exemple, elle se conçoit comme issue d'un animal
éponyme, c'est qu'elle forme un de ces groupes spéciaux qu'on appelle des
clans. Là où l'animal est remplacé par un ancêtre humain, mais également
mythique, c'est que le clan a changé de nature. Si, au-dessus des divinités
locales ou familiales, elle en imagine d'autres dont elle croit dépendre, c'est
que les groupes locaux et familiaux dont elle est composée tendent à se
concentrer et à s'unifier, et le degré d'unité que présente un panthéon
religieux correspond au degré d'unité atteint au même moment par la
société. Si elle condamne certains modes de conduite, c'est qu'ils froissent
certains de ses sentiments fondamentaux; et ces sentiments tiennent à sa
constitution, comme ceux de l'individu à son tempérament physique et à son
organisation mentale. Ainsi, alors même que la psychologie individuelle
n'aurait plus de secrets pour nous, elle ne saurait nous donner la solution
d'aucun de ces problèmes, puisqu'ils se rapportent à des ordres de faits
qu'elle ignore.
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Mais si l'on doit admettre sans examen préalable que les faits appelés
sociaux sont naturels, intelligibles et par suite objets de science, encore faut-
il qu'il y ait des faits qui puissent être proprement appelés de ce nom. Pour
qu'une science nouvelle se constitue, il suffit, mais il faut : d'une part, qu'elle
s'applique à un ordre de faits nettement distincts de ceux dont s'occupent les
autres sciences; d'autre part, que ces faits soient susceptibles d'être
immédiatement reliés les uns aux autres, expliqués les uns par les autres,
sans qu'il soit nécessaire d'intercaler des faits d'une autre espèce. Car une
science qui ne pourrait expliquer les faits constituant son objet qu'en recou-
rant à une autre science se confondrait avec cette dernière. La sociologie
satisfait-elle à cette double condition?
Du phénomène social
Un premier fait est constant, c'est qu'il existe des sociétés, c'est-à-dire des
agrégats d'êtres humains. Parmi ces agrégats, les uns sont durables, comme
les nations, d'autres éphémères comme les foules, les uns sont très
volumineux comme les grandes églises, les autres très petits comme la
famille quand elle est réduite au couple conjugal. Mais, quelles que soient la
grandeur et la forme de ces groupes et de ceux qu'on pourrait énumérer -
classe, tribu, groupe professionnel, caste, commune - ils présentent tous ce
caractère qu'ils sont formés par une pluralité de consciences individuelles,
agissant et réagissant les unes sur les autres. C'est à la présence de ces
actions et réactions, de ces interactions que l'on reconnaît les sociétés. Or la
question est de savoir si, parmi les faits qui se passent au sein de ces
groupes, il en est qui manifestent la nature du groupe en tant que groupe, et
non pas seulement la nature des individus qui les composent, les attributs
généraux de l'humanité. Y en a-t-il qui sont ce qu'ils sont parce que le
groupe est ce qu'il est? A cette condition, et à cette condition seulement, il y
aura une sociologie proprement dite; car il y aura alors une vie de la société,
distincte de celle que mènent les individus ou plutôt distincte de celle qu'ils
mèneraient s'ils vivaient isolés.
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Textes : Positivisme : Définitions des dictionnaires Lalande, Larousse.. (à
lire et à analyser en classe)
Positivisme
Au propre :1° ensemble des doctrines d’Auguste Comte […] A. On donne
par extension ce nom à des doctrines qui se rattachent à celle d’Auguste
Comte ou qui lui ressemblent, quelques fois même de façon assez lointaine,
et qui ont pour thèses communes que seule la connaissance des faits est
féconde ; que le type de certitude est fourni par les sciences expérimentales ;
que l’esprit humain, dans la phi comme dans la science, n’évite le
verbalisme de l’erreur qu’à la condition de se tenir sans cesse au contact de
l’expérience et de renoncer à tout a priori ; enfin que le domaine des chose
en soi est inaccessible, et que la pensée ne peut atteindre que des relations et
des lois. Telles sont en s’écartant du positivisme primitif, les doctrines de
J.S. Mill, de Littré, de Spencer, de Renan, et même de Taine […]
(Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie)
Positivisme
Positivism
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A lire
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A l’instar des sciences naturelles, le chercheur en SS doit être objectif.
L’objectivité est conçue comme une condition de la positivité et de la
scientificité des SS.
Traiter les faits sociaux de façon objective suppose que l’observateur
considère le fait social comme un fait extérieur à lui comme aux individus
qu’il étudie. Ceci veut dire qu’il doit écarter aussi bien les prénotions des
gens étudiés que ses propres prénotions
Etudier objectivement une réalité considérée comme objective c’est écarter
les prénotions (celles de l’observé et de l’observateur) et tout biais similaire
qui peut s’interposer entre l’observateur et son objet.
Le chercheur ne doit pas projeter sur l’objet sa propre expérience ses
propres valeurs. (voir texte ci-dessous, séance suivante : La CC peut
conduire à des résultats erronés) Le rapport à la réalité doit être médiatisé
par des concepts, des théories, des procédures objectives.
Cependant, il serait naïf de croire que la décision d’écarter les prénotions est
simple, et qu’il suffit à un chercheur de le décider pour y parvenir. Ce qui
rend difficile l’affranchissement des prénotions, c’est qu’elles sont l’objet de
sentiments et de passions collectives. Les chercheurs, comme les gens qu’ils
étudient, sont passionnés par les idées politiques, économiques (libérales,
socialistes etc.) Le risque dans ce cas est que le chercheur adopte ou rejette
des résultats selon qu’ils confortent ou non ses convictions.
(Nous allons voir plus loin les différentes techniques dont dispose le
chercheur pour ne pas projeter ses prénotions sur l’objet d’étude).
L’objectivité est une posture intellectuelle.. Elle ne s'appuie que sur ce qui
se présente comme étant la réalité. L’idéal consiste dans une séparation
tranchée entre le sujet et l’objet.
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Illustration :
La Connaissance commune peut conduire à des résultats erronés
L’exemple suivant est une illustration de comment des prénotions du
chercheur sont mêlés à l’observation des faits peuvent conduire à des
résultats erronés.
Dans les années soixante, des chercheurs américains ont conduit, sur
invitation du gouvernement indien, une recherche qui visait la limitation des
naissances. L'étude devait déboucher sur les moyens à mettre en œuvre pour
convaincre les paysannes indiennes de prendre la pilule. L'expérience
connaît un échec. Comment est expliqué cet échec? Les chercheurs en
question pensent que le paysan refuse toute innovation (ici la pilule) parce
qu'il ne peut se détacher des traditions ancestrales, parce qu'il se méfie de
tout produit étranger, parce qu'il n'ose pas agir sur des processus naturels.
Cet exemple est intéressant car il montre comment les explications de ces
chercheurs ont été influencées par leurs idées sur la famille. Ils ont
approché la famille indienne comme s'il s'agissait d'une famille américaine.
Dans un contexte américain, il est «irrationnel» d'avoir un nombre élevé
d'enfants. L'éducation d'un enfant est coûteuse. On peut dire que les
préjugés des chercheurs américains (la famille restreinte est la famille
normale ; la famille nombreuse est irrationnelle; le paysan est esclave des
traditions séculaires etc.) les ont empêché de comprendre la famille
paysanne indienne et de percevoir la « rationalité» du comportement des
paysans. Pour les paysans indiens la situation est différente. Eux-mêmes
disent que «plus ils ont d'enfants, mieux ils se portent ». Un enfant, non
seulement ne coûte pas cher, mais constitue une force de travail
indispensable au maintien de l'exploitation familiale [voir ci-dessous extrait
de R. Boudon]
On parle d’ethnocentrisme lorsque l’observateur juge et interprète les faits
sociaux en fonction des normes du groupe social auquel il appartient.
Critique de l’objectivisme
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Il faut écarter systématiquement toutes les prénotions […] Elle est, d'ail-
leurs, la base de toute méthode scientifique. Le doute méthodique de
Descartes n'en est, au fond, qu'une application. Si, au moment où il va
fonder la science, Descartes se fait une loi de mettre en doute toutes les
idées qu'il a reçues antérieurement, c'est qu'il ne veut employer que des
concepts scientifiquement élaborés, c'est-à-dire construits d'après la
méthode qu'il institue; tous ceux qu'il tient d'une autre origine doivent donc
être rejetés, au moins provisoirement. Nous avons déjà vu que la théorie des
Idoles, chez Bacon, n'a pas d'autre sens. Les deux grandes doctrines que l'on
a si souvent opposées l'une à l'autre concordent sur ce point essentiel. Il faut
donc que le sociologue, soit au moment où il détermine l'objet de ses
recherches, soit dans le cours de ses démonstrations, s'interdise résolument
l'emploi de ces concepts qui se sont formés en dehors de la science et pour
des besoins qui n'ont rien de scientifique. Il faut qu'il s'affranchisse de ces
fausses évidences qui dominent l'esprit du vulgaire, qu'il secoue, une fois
pour toutes, le joug de ces catégories empiriques qu'une longue
accoutumance finit souvent par rendre tyranniques. Tout au moins, si,
parfois, la nécessité l'oblige à y recourir, qu'il le fasse en ayant conscience
de leur peu de valeur, afin de ne pas les appeler à jouer dans la doctrine un
rôle dont elles ne sont pas dignes.
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les gêne est traitée en ennemie. Une proposition n'est-elle pas d'accord avec
l'idée qu'on se fait du patriotisme, ou de la dignité individuelle, par
exemple? Elle est niée, quelles que soient les preuves sur lesquelles elle
repose. On ne peut pas admettre qu'elle soit vraie; on lui oppose une fin de
non-recevoir, et la passion, pour se justifier, n'a pas de peine à suggérer des
raisons qu'on trouve facilement décisives. Ces notions peuvent même avoir
un tel prestige qu'elles ne tolèrent même pas l'examen scientifique. Le seul
fait de les soumettre, ainsi que les phénomènes qu'elles expriment, à une
froide et sèche analyse révolte certains esprits. Quiconque entreprend
d'étudier la morale du dehors et comme une réalité extérieure paraît à ces
délicats dénué de sens moral, comme le vivisectionniste semble au vulgaire
dénué de la sensibilité commune. Bien loin d'admettre que ces sentiments
relèvent de la science, c'est à eux que l'on croit devoir s'adresser pour faire
la science des choses auxquelles ils se rapportent.
A lire
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Exemple
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La pensée de Rickert est plus nuancée. Pour lui, la science en tant que telle,
et non pas les SN, généralise. La différence entre les deux est qu’elle ne
généralise pas de la même manière. Il récuse l’idée, héritée de la pensée
d’Aristote, selon laquelle l’individuel et le particulier ne doivent pas être
objet de la science. Pour lui, la science n’a pas seulement pour objet le
général mais aussi le particulier.
L’objet des SN est dénué de tout sens et libre de tout rapport aux valeurs.
Du point de vue de l’objet et de la méthode, la nature est définie comme
l’ensemble de la réalité indifférente sur le plan axiologique (dépourvue de
valeurs) et saisie par voie de généralisation.
Sur le plan de la méthode, les SN ne saisissent dans leurs concepts que ce
qui est commun à la plupart des objets.
Elles visent la découverte des relations conceptuelles générales, si possible
des lois.
Les SN rejettent l’individuel et le particulier (conçus comme un simple
exemplaire) en tant qu’inessentiel.
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Les sciences de la culture traitent d’objets liés aux valeurs.
La sélection des objets d’étude est faite sur le mode de l’individualisation
(contrairement aux SN qui considèrent la réalité sur le mode de
généralisation).
Les SN visent à saisir une pluralité d’objets, alors que l’histoire vise un
objet qui est différent des autres : un siècle, un peuple, un personnage etc.
Seul un traitement individualisant rend justice au processus culturel..
Rickert écrit : « …dans la plupart des cas en effet, la signification d’un
processus culturel repose sur la spécificité qui le différencie de tous les
autres, alors qu’à l’inverse, ce qu’il possède en commun avec d’autres,
donc ce qui constitue son essence pour les SN, sera inessentiel pour les
sciences historiques de la culture » « …la signification culturelle d’un
objet, c’est-à-dire le sens et la valeur intelligible dont il est porteur, ne
repose pas… sur ce qui est commun avec d’autres objets mais ce qui l’en
distingue » (Rickert)
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Texte Les faits sociaux sont des choses (texte à analyser en classe)
(Emile Durkheim, Les Règles de la méthode sociologique, Paris, P.U.F.,
1990)
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Séances 6 et 7. Explication
A lire :
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Il existe plusieurs modes d’explication des faits sociaux. L’un des modes
d’explication les plus anciens s’inspire de la philosophie de l'histoire.
Selon Marcel Mauss, « la philosophie de l'histoire a été, en effet, la forme de
spéculation sociologique immédiatement antérieure à la sociologie
proprement dite. C'est de la philosophie de l'histoire que la sociologie est
née: Comte est le successeur immédiat de Condorcet, et lui-même a
construit une philosophie de l'histoire plutôt qu'il n'a fait de découvertes
sociologiques. » Ce mode d’explication vise à dégager les lois de
développement, d’évolution de l’humanité dans son ensemble par rapport à
un domaine déterminé. Dans ce cas la loi est dite évolutive car elle dégage,
pour le domaine étudié, les étapes nécessaires par lesquels l’humanité doit
passer.
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HASSAN RACHIK
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Nous allons prendre comme exemple deux types de lois.
La loi évolutive (ou loi de succession) prend la forme « A, puis B, puis C »
Dans ce cas le phénomène A sera suivi de B, puis de C.
La loi conditionnelle de forme « si A, B » Dans ce cas, la loi n’exprime pas
une succession mais une condition : dans telles conditions, il se produira tel
phénomène.
1. Loi évolutive
Nous avons choisi comme exemple de loi évolutive, la loi des trois états (ou
loi de l’évolution intellectuelle de l’humanité) d’Auguste Comte. Suivant
cette loi, l’évolution intellectuelle de l’humanité passe successivement par
trois états théoriques différents : théologique, métaphysique et positif. Le
premier est conçu comme préparatoire, le second comme transitoire et
conduisant graduellement au troisième qui est, selon Comte, le « seul
pleinement normal » le « régime définitif de la raison humaine. »
Comte souligne un paradoxe : c’est pendant l’enfance de l’esprit humain
que les hommes se sont posés des questions les plus insolubles telles que
l'origine et les causes premières des phénomènes.
A cet état primordial correspond l’esprit théologique. Celui-ci connaît trois
formes principales : le fétichisme, le polythéisme, le monothéisme.
« Le fétichisme proprement dit, consistant surtout à attribuer à tous les corps
extérieurs une vie essentiellement analogue à la nôtre, mais presque toujours
plus énergique, d'après leur action ordinairement plus puissante. L'adoration
des astres caractérise le degré le plus élevé de cette première phase
théologique, qui, au début, diffère à peine de l'état mental où s'arrêtent les
animaux supérieurs. »
Avec le polythéisme, deuxième forme de l’esprit théologique, « la vie est
enfin retirée aux objets matériels, pour être mystérieusement transportée à
divers êtres fictifs, habituellement invisibles, dont l'active intervention
continue devient désormais la source directe de tous les phénomènes
extérieurs et même ensuite des phénomènes humains » (A. Comte)
La loi des trois états s’insère dans un paradigme plus large qui a dominé le
19° siècle, l’évolutionnisme.
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HASSAN RACHIK
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et la division sociale du travail. Les enfants n’héritent plus forcément le
statut social du père, la famille n’est plus le lieu principal de l’apprentissage.
Ils peuvent acquérir grâce à l’école des statuts sociaux différents (médecin,
instituteur, infirmier, ingénieur, etc.) de ceux du père. On parle ici de
« statut acquis » par opposition au statut prescrit (hérité). L’acquisition du
statut ne dépend plus exclusivement de la famille. Les enfants, une fois leurs
études terminées, sont souvent contraints de chercher du travail loin de leur
famille d’origine. Ils ont ainsi la possibilité de fonder leurs propres familles
Parsons conclut à l'existence d'une loi conditionnelle : lorsqu'un processus
d'industrialisation apparaît, il tend à entraîner un effet de nucléarisation de la
famille. Cette loi conditionnelle peut être formulée ainsi : « Si A
(industrialisation), alors B (famille nucléaire) »
Il faut noter que là aussi, nous sommes également en face d’une loi
évolutive, Parsons affirme que la famille moderne de type nucléaire succède
ainsi à la famille étendue traditionnelle. Les lois de succession peuvent être
la conséquence d’une loi conditionnelle.
On voit ici que la variable milieu familial n’est pas une condition
nécessaire : l’échec ou la réussite peuvent être l’effet d’autres variables
(présence ou manque d’intérêt par les parents aux études de leurs enfants,
par exemple) Lorsqu’on dit qu’une condition n’est pas nécessaire, cela veut
dire que le phénomène étudié peut se produire indépendamment de cette
condition (on trouve B : réussite scolaire sans A : milieu familial favorisé)
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HASSAN RACHIK
MSS
La variable « milieu familial favorisé » n’est pas non plus une condition
suffisante. Elle peut être limitée par le manque d’intérêt des parents aux
études de leurs enfants.(Des parents aisés et éduqués qui accordent peu
d’importance à la scolarité de leurs enfants) Le milieu familial ne détermine
pas la réussite scolaire, il la favorise. Le taux des élèves issus de familles
favorisées peut être plus élevé que celui des élèves issus des familles
défavorisés.
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Analyse fonctionnelle
Expliquer un fait social c’est rendre
compte des fonctions sociales qu’il remplit
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HASSAN RACHIK
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récurrente, telle que la punition d'un crime ou une cérémonie funéraire,
consiste dans le rôle qu'elle joue dans la vie sociale totale et par conséquent,
dans la contribution qu'elle apporte au maintien de la permanence
structurale » (Radcliffe-Brown)
L’analyse fonctionnelle lie le concept de fonction au concept de structure.
La fonction « est la contribution qu'une activité partielle apporte à l'activité
totale dont elle est une partie. La fonction d'un usage social donné consiste
dans la contribution qu'il apporte à la vie sociale totale, c'est-à-dire au
fonctionnement du système social total. Dès lors, un certain type d'unité
que l'on peut appeler unité fonctionnelle caractérise tout système social. »
Radcliffe-Brown note cependant les limites de l’analogie entre l'organisme
et la société.
i. Dans un organisme animal, un chercheur peut observer la structure
organique indépendamment de son fonctionnement. Ceci permet de
constituer une morphologie indépendante de la physiologie, ce qui est
impossible pour les sociétés humaines où la structure sociale ne peut être
observée que dans son fonctionnement. « Sans doute, quelques-uns des
traits caractéristiques de la structure, par exemple la distribution
géographique des individus et des groupes, sont-ils observables directement,
mais on ne peut observer la plupart des relations sociales qui, dans leur
totalité, constituent la structure, telles que les relations de père à fils,
d'acheteur à vendeur, de souverain à sujet, que dans les activités sociales où
fonctionnent ces relations. Il s’ensuit qu'on ne peut pas établir une
morphologie sociale indépendante de la physiologie sociale. » (Radcliffe-
Brown)
ii. La seconde limite « est qu'un organisme animal ne modifie pas son type
structural au cours de sa vie. Un cochon ne devient pas un hippopotame […]
En revanche, une société, au cours de son histoire, peut modifier son type
structural, sans rompre sa permanence. »
Radcliffe-Brown fait remarquer que l’analyse fonctionnelle ne suppose pas
que tout a une fonction sociale, et que des coutumes à contenu identique
peuvent avoir des fonctions différentes.
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HASSAN RACHIK
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il est souvent nécessaire de centrer l’attention sur un élément en le liant à
d’autres éléments et à la société dans sa totalité.
Un paradigme connaît des améliorations, des changements qui répondent à
de nouvelles questions, l’adaptent à de nouvelles conditions. L’une des
modifications majeures consiste dans le dépassement de la conception de la
société comme une totalité On ne peut, notamment pour les sociétés
modernes complexes, étudier la fonction d’un phénomène social dans son
rapport à la société dans sa globalité. Aussi, la tâche est de déterminer le
segment de la société par rapport auquel le phénomène social considéré peut
assurer une fonction sociale.
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Séances 8 et 9
Compréhension
^^^^
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Pour Weber, la compréhension est un moment important dans l’explication
d’un phénomène social. Expliquer un phénomène social c’est d’abord
comprendre le sens des actions individuelles dont il résulte.
Le monde social n’est pas seulement un monde d’objets et de choses, il est
aussi et surtout un monde de sens.
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HASSAN RACHIK
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La compréhension immédiate suppose que le chercheur soit familiarisé
avec le sens donné par les acteurs. Un comportement étrange ou peu
familier ne peut être compris de façon actuelle. Dans ce cas, le chercheur
pose des questions pour accéder au sens du comportement incompris.
La compréhension immédiate et actuelle est proche de la connaissance
commune. Elle reste insuffisante car à des comportements qui paraissent
semblables peuvent être associés à des sens et à des motifs différents.
Avoir ou souhaiter avoir plusieurs enfants peut être lié à des sens et à des
motivations diverses (économiques, religieuses, affectives, etc.)
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HASSAN RACHIK
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il ne s’agit pas de saisir intellectuellement l’activité mais de revivre par
empathie, de façon émotionnelle, l’activité en question (Weber, Economie
et société).
Difficultés
On peut toujours partir des raisons que donne l’acteur lui-même à son
action. Mais ces raisons n’ont qu’une valeur relative, même lorsque l’acteur
est sincère. Le chercheur ne se contente pas des motifs déclarés par l’acteur.
(Weber, Economie et société)
La compréhension par motivation n’est pas un acte immédiat, mais un
processus plus ou moins long. Comprendre c’est surtout recueillir le
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HASSAN RACHIK
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maximum d’informations sur l’acteur, sa situation sociale, le contexte social
de l’action, etc.
L’état (empathique ?) où l’observateur peut se dire « si j’étais à la place de
l’observé, j’aurai fait la même chose », devrait venir à la fin du processus
de compréhension et non à son début.
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HASSAN RACHIK
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6. Dans tous ces cas, « comprendre » signifie saisir par interprétation le sens
ou l’ensemble significatif visé (a) réellement dans un cas particulier (dans
une étude historique par exemple), (b) en moyenne ou approximativement
(dans l’étude sociologique des masses par exemple), (c) à construire
scientifiquement (sens « idéaltypique ») pour dégager le type pur (idéal-
type) d’un phénomène se manifestant avec une certaine fréquence. Les
concepts ou les « lois » qu’établit la pure théorie de l’économie politique
constituent par exemple des constructions idéaltypiques de ce genre. Elles
décrivent comment une activité humaine, d’une nature déterminée, se
déroulerait, si elle s’orientait de façon rigoureusement rationnelle en
finalité, en dehors de toute perturbation provenant d’erreurs ou d’affects, et
si en outre elle s’orientait de façon entièrement univoque d’après une seule
fin (l’économie). Ce n’est qu’en de très rares cas (celui de la Bourse), et
encore de façon approximative, que l’activité réelle se déroule telle qu’elle
est construite dans l’idéaltype. Sur l’utilité de telles constructions, voir
l’Archiv für Sozialwissenschaft, XIX, p. 64 sqq. [WL 190] et infra 11.
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HASSAN RACHIK
MSS
comme pour toute autre hypothèse, il est indispensable de contrôler
l’interprétation significative compréhensible par le résultat, c’est-à-dire la
tournure prise par le déroulement réel de l’activité. On n’y parvient avec une
relative exactitude que dans les cas, malheureusement très rares, qui s’y
prêtent en raison de leur nature particulière, dans l’expérimentation
psychologique. On y arrive aussi avec une approximation extrêmement
variable, grâce à la statistique, dans les cas (également limités) de
phénomènes collectifs dénombrables et univoques du point de vue de leur
imputation. Pour le reste, il n’existe d’autre possibilité que la comparaison
de processus aussi nombreux que possible de la vie historique et journalière
qui sont semblables en tout, mais diffèrent sur un unique point, celui du
« motif » ou « facteur » dont l’importance pratique fait chaque fois l’objet
de la recherche : c’est là une tâche importante de la sociologie comparée.
Lorsque nous voulons faire une imputation causale il ne nous reste
malheureusement souvent que le moyen incertain de l’ « expérience
mentale », c’est-à-dire imaginer la suite possible d’éléments singuliers de la
chaîne des motifs et construire le cours des choses probable en ce cas. […]
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HASSAN RACHIK
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L'adéquation significative fait-elle défaut, nous ne sommes plus en présence
que d'une simple probabilité statistique non compréhensible (ou seulement
imparfaitement compréhensible), même si la régularité du déroulement
(externe aussi bien que psychique) se laisse exprimer de façon précise 1
avec la plus grande probabilité numérique. D'un autre côté, l'adéquation
significative, fût-elle la plus évidente, ne constitue pour la portée des
recherches sociologiques un énoncé causalement juste qu'à la condition
qu'on puisse apporter la preuve qu'il existe une chance quelconque [6] (plus
ou moins déterminable) indiquant que l'activité adopte ordinairement de fait
(en moyenne ou dans le cas « pur »), avec une fréquence ou une i
approximation déterminables, la direction du déroulement qui semble
significativement adéquat. Seules les régularités statistiques qui
correspondent à un sens visé compréhensible d'une activité sociale
constituent des types d'actes compréhensibles (au sens de notre
terminologie), c'est-à-dire des « règles sociologiques ». Seules les
constructions rationnelles d'une activité significative compréhensible
constituent des types sociologiques du devenir réel que l'on peut observer
dans la réalité au moins avec (nie certaine approximation. Cela tic tient pas,
tant s'en faut, au fait que la chance effective de la fréquence du déroulement
qui y correspond s'accroîtrait toujours parallèlement à l'adéquation
significative qu'il est possible d'inférer, Seule l'expérience externe peut
montrer dans chaque cas particulier s'il en est ainsi. - Il existe des
statistiques de phénomènes étrangers à une signification (par exemple
celles qui portent sur la mortalité, la fatigue, le rendement d'une machine ou
sur les chutes (le pluie), exactement dans le même sens qu'il en existe de
phénomènes significatifs. Des statistiques sociologiques, cependant, il n'y en
a que dans le dernier cas (telles celles qui portent sur la criminalité, la
profession, les prix ou les exploitations agricoles). Il va de soi que les cas
qui comportent les deux éléments, significatif et non significatif, sont
fréquents, par exemple celui qui porte sur les récoltes.
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HASSAN RACHIK
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HASSAN RACHIK
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de trouver nous ne savons quelle loi de progrès, d'évolution générale qui
dominerait le passé et prédéterminerait l'avenir. Il n'y a pas une loi unique,
universelle des phénomènes sociaux. Il y a une multitude de lois d'inégale
généralité. Expliquer, en sociologie, comme en toute science, c'est donc
découvrir des lois plus ou moins fragmentaires, c'est-à-dire lier des faits
définis, suivant des rapports définis. » (Mauss, Essais de sociologie, p. 29)
A lire
^^^^
L’objet d’une recherche (ou d’une science) n’est pas quelque chose qui
existe à l’état brut dans la réalité.
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HASSAN RACHIK
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Il est impossible d’observer le réel dans toute sa complexité, il faut
l’analyser en effectuant des choix.
Ces choix se font en fonction d’un cadre théorique qui oriente la définition
de l’objet de la recherche, les hypothèses élaborées en rapport avec cet
objet.
Illustration
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HASSAN RACHIK
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Prenons comme exemple un chercheur qui étudie les loisirs. Il doit définir
cette notion. La question est de savoir si, par exemple, le bricolage, le
jardinage, le tricot doivent être ou non considérés comme un loisir. Tout
dépendra de la définition adoptée.
Si le loisir désigne des activités non productives, alors des activités comme
le bricolage, le jardinage et le tricot seront éliminés du domaine de
l’enquête.
En revanche on peut les intégrer si on adopte une définition plus large du
loisir : toute activité qui se fait en dehors de l’activité principale (étude,
travail, etc.).
On voit ici que le loisir ne réfère pas à un secteur de la réalité qu’on peut
délimiter comme on le ferait pour un champ, ou un terrain. Ce qu’il y a
dans la réalité c’est des activités qu’on peut classer, selon la définition
adoptée, comme loisir.
La définition préalable permet de délimiter (même de façon provisoire) le
champ de l’observation.
Elle permet aussi, selon Durkheim, d’écarter les prénotions et d’approcher
de façon objective les phénomènes sociaux. Une définition objective se
limite au début à identifier les traits (indicateurs, propriétés) extérieurs du
phénomène étudié à partir des propriétés qui lui sont inhérentes.
Par ailleurs, une définition objective ne doit pas être éclectique. Elle doit
rendre compte de tous les phénomènes qui présentent les mêmes caractères,
et non seulement de quelques faits triés.
Le tri peut être fait au hasard, il peut être orienté par un préjugé, un intérêt
matériel ou politique du chercheur.
Pour Durkheim, une définition est objective dans le sens où les faits groupés
et la manière de les grouper dépendent des traits inhérents à ces faits (signes
extérieurs) et non pas des idées du chercheur, de ses convictions religieuses,
politiques etc.
Ceci permet à ses collègues (d'autres chercheurs) et aux lecteurs d'avoir la
possibilité de contrôler la définition proposée.
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HASSAN RACHIK
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Une hypothèse est une explication provisoire qui oriente la recherche et qui
demande à être affirmée. Elle peut être inspirée des recherches antérieures
sur le phénomène étudié, comme elle peut être développée à partir d’une
pré-enquête.
Par exemple, on peut supposer que l’adaptation de l’immigrant à la société
d’accueil est plus aisée s’il appartient à une famille solidaire.
Cette hypothèse oblige d’inclure la famille de l’immigrant dans le champ
d’étude
Elle met en relation deux variables : l’adaptation et la solidarité familiale.
Mais ces deux notions sont vagues. Comment savoir si un immigrant est
adapté, comment savoir s’il est plus adapté ou moins adapté qu’un autre.
Il en est de même pour la notion de solidarité. Comment savoir si une
famille est solidaire, s’il est plus solidaire ou moins solidaire qu’une autre.
Toute étude est faite de mots (pas seulement). On peut classer ces mots de
façon simple en mots logiques et mots descriptifs.
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HASSAN RACHIK
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Les mots descriptifs réfèrent ou nomment quelque chose. Ces mots n’ont
pas la même valeur. La chaise, le cheval, l’autorité, le pouvoir réfèrent à des
phénomènes observables.
Mais on ne peut observer un cheval comme on observe la solidarité,
l’adaptation, le pouvoir, la gestion, le droit, … Ces derniers ne sont pas
directement observables.
Définition opérationnelle
Le concept de solidarité doit être défini. Mais il ne s’agit pas, ici, de définir
de façon théorique l’essence ou la nature de la solidarité sociale. Ce qui est
visée c’est une définition opérationnelle.
Rendre un concept opérationnel, c’est le rendre mesurable, c’est le traiter
comme une variable. La température, par exemple, est une variable, et elle
est mesurée grâce au thermomètre.
La définition opérationnelle n’est pas une définition panacée qui répond à
toutes les questions quel que soit le contexte. Elle réfère à la tentative du
chercheur en sciences sociales de lier ses concepts à des propriétés des
phénomènes sociaux observés.
Dans une enquête, rendre un concept opérationnel, c’est le rendre
mesurable, c’est le traiter comme une variable. Définir de façon
opérationnelle la solidarité familiale, c’est la rendre mesurable à partir de
certains indicateurs (visites, emprunts, échange de biens et de services)
On peut ainsi, à partir des critères choisis, classer les familles en solidaires
et non solidaires et, si nécessaire, en classes de familles plus ou moins
solidaires.
La détermination des indicateurs permet de voir comment des concepts se
traduisent empiriquement dans la réalité.
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HASSAN RACHIK
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Aucune science ne vise son objet dans sa plénitude concrète. Elle choisit
certaines de ses propriétés et s'efforce d'établir des relations entre elles. La
découverte de telles lois représente la fin ultime de toute recherche
scientifique. Cependant, dans les sciences sociales, le choix des propriétés
stratégiques constitue en soi un problème essentiel. Il n'a pas encore été créé
de terminologie rigoureuse à cet usage. On nomme parfois ces propriétés
aspects ou attributs, et l'on emprunte souvent le terme « variable» aux
mathématiques. On appelle description, classification, ou mesure, l'acte
d'attribuer des propriétés à l'objet.
Le sociologue parle de « mesure », dans un sens plus large que le
physicien ou le biologiste. Lorsqu'on constate qu'au sein d'une organisation,
tel service manifeste un degré plus élevé de satisfaction au travail que tel
autre, on dit qu'on a opéré une mesure, même si elle n'est pas exprimée par
un nombre. En général, on tentera néanmoins de parvenir à des mesures, au
sens traditionnel du mot, par la construction de métriques précises. On note
déjà certains progrès dans ce domaine; mais nous nous trouvons encore dans
la phase initiale de ces recherches formelles, qui ne correspondent elles-
mêmes qu'à une partie très limitée de l'ensemble des opérations de mesure
utilisées dans la pratique.
Nous examinerons ici, de manière très générale, la démarche suivie par le
sociologue pour caractériser son objet d'étude: on verra que, quand on veut
déterminer des « variables» susceptibles de mesurer des objets complexes,
on est généralement amené à suivre un processus plus ou moins typique. Ce
dernier permet d'exprimer les concepts en
termes d'indices empiriques et comprend quatre phases majeures: la
représentation imagée du concept, la spécification des dimensions, le choix
des indicateurs observables, et la synthèse des indicateurs constituant les
indices.
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HASSAN RACHIK
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Un problème classique de la sociologie industrielle est l'analyse et la «
mesure)) de la notion de gestion. Mais qu'entend-on exactement par «
gestion », « direction» et « administration»? Le contremaître peut-il être
considéré comme un agent de gestion? Le concept de gestion est peut-être
apparu le jour où on a remarqué que deux usines, placées dans des
conditions identiques, peuvent être bien ou mal dirigées. Ce facteur
complexe, favorisant le rendement des hommes et la productivité de
l'équipement, fut alors identifié sous le nom de « gestion ». Depuis, les
sociologues des organisations se sont efforcés de préciser cette notion et de
lui donner un contenu plus concret.
2. LA SPÉCIFICATION DU CONCEPT
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HASSAN RACHIK
MSS
évidemment pousser très loin l'analyse du concept. Un exemple aussi riche
que celui-ci est certainement rare. Cependant, en règle générale, la
complexité des concepts employés en sociologie est telle que leur traduction
opérationnelle exige une pluralité de dimensions.
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HASSAN RACHIK
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L’observation
Le questionnaire
L’entretien
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HASSAN RACHIK
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Annexes
1. A B C D 10. A B C D
2. A B C D 11. A B C D
3. A B C D 12. A B C D
4. A B C D 13. A B C D
5. A B C D 14. A B C D
6. A B C D 15. A B C D
7. A B C D 16. A B C D
8. A B C D 17. A B C D
9. A B C D 18. A B C D
19.
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MSS
20
1. Parmi les critères suivants, indiquez une variable contextuelle [A] le nombre de tribunaux
dans une ville [B] le sexe [C] l’âge [D] Aucun choix
4. La question suivante : « D’une façon générale êtes-vous satisfaits ou pas de la façon dont
la démocratie se déroule dans votre pays ? a. satisfait ; b. non satisfait ; c. ne sait pas » est
une question [A] fermée [B] une question de fait [C] une question ouverte [D] Aucun
choix
5. Rechercher les motivations d’un comportement social, c’est [A] le définir de façon
objective, [B] c’est le comprendre [C] c’est le traiter comme une chose [D] Aucun choix
6. La loi évolutive prend la forme de [A] « X, puis Y, puis Z» [B] « X est cause de Y, et
Y cause de Z » [C] « si X, alors Y» [D] Aucun choix
7. On parle de variable pour désigner [A] une proposition provisoire, [B] un critère de
classification [C] une définition théorique [D] Aucun choix
8. Parmi les questions suivantes indiquez une question d’opinion [A] Que préférez-vous, le
célibat ou le mariage ? [B] Est-ce que vos ami(e)s sont célibataires [C] Etes- vous
célibataire? [D] Aucun choix
9. L’entretien a d’abord pour fonction [A] de collecter des données statistiques [B] de
produire des données de seconde main [C] reconstruire le sens « subjectif », le sens vécu des
comportements des acteurs sociaux [D] Aucun choix
10. H. Rickert définit la culture comme [A] dépourvu de sens [B] une chose qui croît
indépendamment de l’activité humaine [C] dépourvu de valeur [D] Aucun choix
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HASSAN RACHIK
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11. La connaissance scientifique se caractérise par [A] la familiarité [B] l’accessibilité [C]
l’évidence [D] Aucun choix
12. On parle de statut prescrit dans le cas où [A] l’individu émigre [B] l’individu change de statut
social [C] le statut social de l’individu est hérité [D] Aucun choix
13. Une structure est [A] un système de relations [B] un processus social [C] une fonction sociale
[D] Aucun choix
La compréhension peut signifier d’une part la compréhension actuelle du sens visé dans un
acte. Nous « comprenons » par exemple le sens de la proposition 2 x 2 = 4 que nous
entendons ou lisons ou un éclat de colère qui se manifeste par une mimique, ou le
comportement d’un bûcheron ou d’une personne qui saisit une clenche pour fermer une porte
… Elle peut également signifier d’autre part une compréhension explicative. Nous
« comprenons », parce que nous saisissons la motivation, le sens qu’une personne a associé à
la proposition 2 x 2 = 4 qu’elle prononce ou qu’elle a écrite, à cet instant précis et dans ce
contexte, si nous la voyons plongée dans une comptabilité commerciale, dans une
démonstration scientifique, dans un calcul technique … Nous comprenons le mouvement du
bûcheron ou l’acte d’épauler un fusil non seulement actuellement mais dans sa motivation, si
nous savons que le bûcheron accomplit son acte pour gagner sa vie, soit pour ses besoins
personnels, soit pour des raisons de santé … de même nous comprenons le geste de la
personne qui épaule un fusil si nous savons qu’elle fait cet acte soit pour fusiller quelqu’un
sur ordre, soit pour combattre des ennemis ou bien par vengeance.
16. La compréhension du sens visé recherche [A] le sens juste, [B] le bon sens, [C] le sens
vrai [D] Aucun choix
17. Les prénotions sont [A] des théories [B] des idées objectives [C] des concepts
grossièrement formés [D] Aucun choix
17. « Droit naturel, celui considéré comme résultant de la nature des hommes et de leurs
rapports indépendamment de toute convention ou législation » est une [A] définition
opérationnelle, [B] générique, [C] théorique [D] Aucun choix
18. Une variable dépendante est une [A] une condition nécessaire [B] une variable
explicative [C] variable à expliquer [D] Aucun choix
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19 Définir le positivisme
20 définir l’hypothèse
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