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Jean-Luc Marion
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Transcendantal
6. Athénagore D’Athènes, Supplique au sujet des Chrétiens, VIII, 2, éd. B. Pouderon, « Sources
Chrétiennes » n° 319, Cerf, Paris, 1992, p. 92.
Mais ici se pose une troisième question, que voit fort bien H.-J. Gagey
et qui soutient la réflexion de V. Holzer : le retournement, pour ne pas
dire la conversion du Je (ou d’un Dasein) à une fonction essentielle-
ment dérivée ne conduit-elle point à « la passivité du témoin » (loc. cit.,
p. 51) ? Cette passivité dériverait obligatoirement de «…son incapacité à
comprendre l’événement ».7 D’où s’ensuivrait, malgré nos protestations
répétées,8 une sous-estimation de l’herméneutique, désormais en droit
(a) Elle admet ce qui fait l’essentiel de notre point de vue : le témoin
reçoit un donné, qu’il ne maîtrise pas et qui le définit, ne fût-ce qu’en
marquant sa capacité de réception. Quelle que soit la nature, d’abord
énigmatique sans doute puis progressivement méditée et formulée, de ce
donné, l’événement déclencheur reste le fait accompli de l’événement qui
se donne.
(b) Dès lors, si le témoin se déploie dans l’acte d’une réponse, toujours
à lui proportionnée et donc provisoire et insuffisante, à un appel donné
à l’encontre des conditions communes de l’expérience, cette posture
d’appel et de réponse ne le borne pas plus à une pure et simple passivité
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9. Voir aussi notre commentaire de la rencontre du Christ avec les deux disciples en Luc
24, « Ils le reconnurent et lui-même leur devint invisible », Le croire pour le voir, Paris, 2009,
p. 195 sq.
d’un cœur lent à croire » (Luc 24, 25). Notre réticence devant les intui-
tions documentées par les textes et l’histoire s’explique surtout par notre
inintelligence et notre fermeture aux concepts « venus du ciel », qui en
permettent pourtant seuls l’herméneutique. L’herméneutique définit
certes le travail du théologien, mais elle ne dépend pas seulement, ni, à la
fin, d’abord de ses ressources.
L’accès au donné chrétien ne se résume pas à l’herméneutique de ses
médiations, mais il les exige parce qu’il les permet. Au commencement
comme à l’achèvement se trouve le donné. Et nous nous en faisons les her-
méneutes parce que nous ne sommes ni au commencement, ni à l’achè-
vement. Nous sommes dans le temps de la réponse à l’appel d’un donné.
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