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L Aristocratie de L Epiderme
L Aristocratie de L Epiderme
Florence Gauthier
DOI : 10.4000/books.editionscnrs.6257
Éditeur : CNRS Éditions
Année d'édition : 2007
Date de mise en ligne : 20 juin 2016
Collection : Histoire
ISBN électronique : 9782271090980
http://books.openedition.org
Édition imprimée
ISBN : 9782271065766
Nombre de pages : 446
Référence électronique
GAUTHIER, Florence. L’aristocratie de l’épiderme : Le combat de la Société des Citoyens de Couleur,
1789-1791. Nouvelle édition [en ligne]. Paris : CNRS Éditions, 2007 (généré le 03 mai 2019). Disponible
sur Internet : <http://books.openedition.org/editionscnrs/6257>. ISBN : 9782271090980. DOI :
10.4000/books.editionscnrs.6257.
L’aristocratie
de l’épiderme
Le combat de la Société
des Citoyens de Couleur
1789-1791
CNRS ÉDITIONS
15, rue Malebranche – 75005 Paris
À Marc Bloch et Albert Mathiez
des Nègres, quels qu’ils soient, métis, gens de couleurs libres, Nègres
affranchis ou Nègres esclaves. Ce préjugé persistant de nos jours,
dans nombre de sociétés contemporaines marquées par l’esclavage,
n’est certes plus tolérable ou plutôt a perdu toute valeur juridique, mais
il n’en continue pas moins d’altérer profondément les rapports entre les
hommes et de sceller le destin de millions de personnes par cette dis-
crimination fondée sur la couleur de peau.
Florence Gauthier est historienne de la Révolution française, de
cet événement, dont Kant, en 1798, dans Le Conflit des Facultés, a sou-
ligné qu’il a suscité la sympathie et l’enthousiasme des contemporains,
qui y ont perçu la manifestation de l’avènement d’une ère nouvelle et
bénéfique de l’histoire de l’humanité. Florence Gauthier étudie cette
période historique en portant une attention aiguë et infatigable aux
principes du Droit naturel moderne, de la justice, de l’égalité et de la
liberté. Et c’est à l’aune de ces principes qu’elle a toujours tenté de
mesurer l’ampleur de cette Révolution, son audace et ses faiblesses, ses
promesses et ses compromissions, (notamment dans Triomphe et mort
du Droit naturel en révolution, 1789-1795-1802, Paris, 1992). Elle
nous aide à comprendre toute l’importance du problème de l’abolition
de l’esclavage dans les colonies françaises des Antilles, particulière-
ment à Saint-Domingue, sous la Révolution. En effet, la Déclaration
des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 proclamait sans
ambiguïté que « tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux
en droits ». Elle déclarait ainsi l’unité du genre humain, par-delà les
inévitables différences, géographiques, culturelles ou de couleur de
peau. Elle confirmait aussi l’idée de liberté et d’égale dignité ontolo-
gique de tout homme, présente dans l’intimité de toute conscience.
Donc, selon les principes mêmes de la Déclaration, la traite, l’esclavage
des Noirs d’Afrique, ou d’ailleurs, et le préjugé de couleur qui lui est
consubstantiel étaient condamnables absolument. Mais les prin-
cipes une fois posés, nous le savons, ne transforment pas d’un coup la
réalité et ce qui nous semble évident aujourd’hui a déclenché dans les
colonies esclavagistes des affrontements meurtriers. Certes les esclaves
et les libres de couleur n’ont jamais vécu leur servitude comme la
conséquence directe de la malédiction biblique de la descendance de
Cham, un des fils de Noé, comme on a pu le faire croire. Les révoltes
et les insurrections se sont multipliées et, en dépit de féroces répres-
sions, jamais la flamme de l’aspiration à la liberté ne s’est éteinte.
Surtout il est important de souligner que les idées révolutionnaires
Préface 7
Qui était Julien Raimond ? L’homme reste mal connu et, lorsqu’il
est évoqué par les historiens, force est de constater la persistance des
préjugés, des contrevérités et de l’incompréhension dont il est l’objet.
Né en 1744 à Bainet, dans la province du Sud de Saint-Domingue,
ce fils de paysan béarnais avait obtenu le statut privilégié de colon. Il
épousa une femme de couleur, qui était la fille légitime d’un riche
colon. Julien, comme ses frères et sœurs, fut envoyé faire ses études à
Bordeaux et à Toulouse. Lorsqu’il rentra à Saint-Domingue dans les
années 1760, les progrès du préjugé de couleur avaient déjà provoqué
la résistance des colons métissés. Julien Raimond devint leur représen-
tant dans la province du Sud de la colonie. En 1783, les colons métissés
décidèrent d’offrir un vaisseau au roi, mais leur proposition fut empê-
chée par le parti des colons ségrégationnistes qui commençait à se
former et refusait de faire reconnaître les libres de couleur comme des
colons à part entière 9.
Raimond eut néanmoins la chance de rencontrer le ministre de la
Marine, Castries, qui était un réformateur et l’autorisa à se rendre à
16 L’aristocratie de l’épiderme
Julien Raimond
à la recherche d’alliés
Août-Novembre 1789
Chapitre premier
Julien Raimond
rencontre Antoine Cournand
nir contre la représentation des colons. Condorcet, qui avait assisté aux
débats de l’Assemblée nationale à Versailles, estima que l’opposition
de la Société à l’admission des députés de Saint-Domingue nuirait
à sa cause : « M. de Condorcet a dit qu’il croyait qu’on était décidé à
admettre douze députés des colonies aux États généraux et que les
efforts que la Société des Amis des Noirs ferait pour empêcher cette
admission, loin d’être utiles à la Société, pourraient au contraire nuire
à ses intérêts 14. »
Un autre point de vue s’opposait à l’admission des députés des
colons dans l’Assemblée, estimant que les colonies, sujettes de l’empire
français, n’avaient pas à être représentées dans le corps législatif. Ce
point de vue était celui de la monarchie et du ministère de la Marine, que
des colons qualifiaient de « despotisme ministériel ». L’abbé Maury, un
des ténors du côté droit de l’Assemblée, s’opposa lui aussi à cette admis-
sion lors du débat : « ...mais je rappellerai aujourd’hui à cette Assem-
blée que je ne fus point écouté à Versailles lorsque je voulus m’opposer
de tout mon pouvoir à l’admission des députés de nos colonies 15. »
À cette époque les colons apparaissaient divisés. Le Comité des
colons de Saint-Domingue, créé par Gouy d’Arsy, fut contesté par
des colons qui se méfiaient d’une représentation à l’Assemblée natio-
nale. Le 20 août 1789, le marquis Mordant de Massiac, le marquis
de Gallifet, le marquis de La Rochejacquelein, le marquis de La
Rochefoucauld-Bayers, le comte d’Agoult, le comte de La Borde, le
vicomte du Chilleau et Duval de Sanadon, riches propriétaires de Saint-
Domingue, créèrent la Société correspondante des colons français,
mieux connue sous le nom de club Massiac 16. Hostile à une représen-
tation des colonies à l’Assemblée nationale pour des raisons bien
différentes de celles qui ont déjà été exposées, il craignait les débats
publics, qui risquaient de faire la lumière sur les réalités coloniales
et provoquer une législation qui remettrait en cause leurs privilèges
et leurs propriétés, en particulier sur leurs esclaves. Ces craintes redou-
blèrent lorsque l’Assemblée vota la Déclaration des droits de l’homme
et du citoyen, le 26 août 1789. Afin d’échapper à son application,
le club avança l’idée d’une constitution spécifique pour les colonies,
à cause de leur régime intérieur esclavagiste et ségrégationniste. Le
thème de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen comme
terreur des colons apparut alors, nous le retrouverons.
Le club Massiac voulait agir dans le secret et recherchait l’appui
du roi et de son entourage pour échapper aux débats et à la législation
26 L’aristocratie de l’épiderme
Julien Raimond arriva à Paris alors que les colons avaient réussi à
se faire représenter dans l’Assemblée. Son combat précédent, mené à
l’occasion des réformes tentées par Castries, puis La Luzerne, avait
échoué. L’ouverture révolutionnaire lui rendait l’espérance. Dès l’an-
nonce de la convocation des États généraux, Raimond reprit contact
avec le ministre de la Marine, La Luzerne, et lui envoya un nouveau
mémoire sur l’état des libres de couleur dans les colonies, le 17 février
1789 22. À Saint-Domingue, les libres de couleur de la province du Sud
demandèrent au ministre une représentation aux États généraux le
15 mars 1789. La Luzerne répondit, en août 1789, que c’était, désor-
mais, du ressort de l’Assemblée constituante. Les libres de couleur du
Sud écrivirent alors à Necker et chargèrent Julien Raimond de suivre
l’affaire 23.
Ce dernier prit contact avec La Luzerne, dont le secrétaire, Saint-
Germain, l’invita à rencontrer le club Massiac 24.
Le 26 août, Raimond se rendit à l’invitation du club Massiac : on
lui expliqua que l’état des gens de couleur était une affaire interne aux
colonies et que les assemblées, formées de colons blancs, règleraient.
C’était le jour même du vote de la Déclaration des droits de l’homme
et du citoyen, et déjà, le club Massiac s’opposait, sur ce point, aux prin-
cipes de la Constitution, qui affirmait dans son article premier que
« tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits 25. »
Dans le récit de sa vie qu’il rédigea pour le Comité de sûreté géné-
rale, le 6 mars 1794, Raimond ne rappelle pas cet épisode. En revanche
28 L’aristocratie de l’épiderme
mêmes qui se sont occupés de l’esclavage des nègres, n’ont rien dit des
gens de couleur, qu’un préjugé barbare ose encore traiter comme des
esclaves 29. »
C’est donc le problème précis du préjugé de couleur, exercé à
l’encontre de cette classe spécifique à la société coloniale esclavagiste,
que posait Cournand. Les colons blancs avaient progressivement
constitué les gens de couleur en classe intermédiaire, entre les blancs et
les esclaves, par un système d’exclusion des fonctions publiques et de
tout recours en justice, fondé sur le préjugé de couleur. Les colons
blancs, qui affectaient de ne point connaître de hiérarchie féodale dans
les colonies avaient, de fait, créé une forme spécifiquement coloniale
d’aristocratie, celle de la couleur. La qualification de sang-mêlé passa
dans la jurisprudence coloniale pour exprimer cette exclusion. La juris-
prudence coloniale du préjugé de couleur hiérarchisait ainsi trois états :
celui de nègres ou esclaves, propriété de leurs maîtres blancs et sang-
mêlé, désignés par l’origine africaine ; celui de colons blancs désignés
par l’origine européenne ; et entre les deux, cette classe de sang-mêlé
au statut proprement bâtard, abandonnée au bon vouloir des colons
blancs :
Cournand considère que les humiliations que l’on a fait subir aux
gens de couleur dépassent, même, celles infligées alors aux Juifs en
Europe : « Je n’imagine pas que les Juifs aient jamais subi autant d’hu-
miliations dans aucun pays de l’Europe 31. »
Cournand, en cherchant à exprimer cette spécificité de la hiérar-
chie de la société coloniale, a trouvé les expressions noblesse de la
peau, prérogative de la peau, puis aristocratie de l’épiderme, propre
à l’aristocratie moderne car inconnue des Anciens : « On a vu des
juges inaccessibles à la corruption, défendre avec un courage vraiment
héroïque, cette prérogative de la peau, contre les plaintes et les meur-
trissures des gens de couleur ; tant il importe de maintenir cette noble
aristocratie de l’épiderme, dont les anciens ne s’étaient point avisés, et
qui est une découverte intéressante que nous devons à l’aristocratie
moderne 32. »
Après avoir fait état de l’existence de cette situation, Cournand
réclame pour cette classe discriminée les droits de l’homme et du
citoyen, que l’Assemblée venait de déclarer le 26 août 1789 : « Les
gens de couleur réclament aujourd’hui, par ma voix, les droits naturels
de l’homme, ceux de citoyens puisque la plupart sont libres, ceux de
propriétaires, puisqu’ils ont des propriétés, et que plusieurs d’entre eux
sont très riches. Il faut intéresser leur fortune particulière à la fortune
publique en les faisant jouir des droits dont on leur a refusé l’exercice
jusqu’ici. Ils sont Français attachés au Roi et à la mère-patrie 33. »
Cournand proposait une législation unifiant l’état de liberté dès la
naissance sans distinction de couleur et interdisant le reproche de sang-
mêlé, en faisant droit aux plaintes qui pourraient s’élever à ce sujet :
gens de couleur, méconnu des uns, occulté par les colons ségrégation-
nistes eux-mêmes.
En réclamant les droits de l’homme et du citoyen pour cette classe
spécifique à la société coloniale que formaient les gens de couleur,
Cournand exposait la réalité de l’aristocratie de l’épiderme dans la
colonie de Saint-Domingue. Il posa le problème de la désignation de
cette classe, en rejetant de la langue de la liberté, le terme insultant de
sang-mêlé utilisé par les colons, pour la maintenir dans un état spéci-
fique de non droit 35.
En restituant leurs droits aux libres de couleur, la législation qu’il
propose a pour objectif de relever l’humanité que les colons blancs
eux-mêmes ont perdue, en s’abandonnant au préjugé de couleur :
« Rougissez donc de vos préjugés, écrit-il aux aristocrates de la peau,
venez les confondre dans des lois douces et humaines qui honorent
autant ceux qui s’y soumettent, que les sages législateurs qui leur don-
neront leur caractère et leur force 36. »
Chapitre 2
Billard, qui précisait, comme cela l’avait déjà été dit à Raimond, que les
demandes des libres de couleur relevaient des compétences d’une
assemblée coloniale régulièrement convoquée sur les lieux. Sous sa
plume, cela laissait entendre que cette future assemblée coloniale serait
composée exclusivement de blancs et que le statut des libres de couleur
restait une affaire interne aux colonies.
Les libres de couleur décidèrent de répondre à ce qu’ils considé-
raient comme un déni de justice, ils présentèrent une pétition à
l’Assemblée nationale et publièrent les procès-verbaux de leurs assem-
blées générales pour se faire connaître. Le 12 septembre, ils prirent
le nom de Société des Citoyens de Couleur, colons américains, et, le
22 septembre, ils achevèrent la rédaction de leur Cahier de doléances 6.
Ce Cahier, rédigé au nom des libres de couleur et des nègres
affranchis de l’ensemble des colonies françaises, demandait que la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen leur soit commune
avec les blancs, insistait sur la nécessité de reconnaître leur partici-
pation à la formation des municipalités, villages, bourgs et villes, et
réclamait expressément la création, dans les colonies, « d’écoles et de
collèges publics », dont l’absence caractérisait les colonies.
Sur la question centrale de l’esclavage, le Cahier proposait une
politique d’affranchissements en faveur des esclaves domestiques.
L’article premier définissait deux statuts juridiques dans les colonies
françaises : celui de libre et celui d’esclave.
L’affranchissement des femmes esclaves, concubines et mères,
faisait l’objet de nombreux articles. L’édit de 1724, pour la Louisiane,
qui interdisait les mariages mistes, devait être révoqué. L’affranchis-
sement des femmes esclaves et concubines était réclamé, du seul fait de
leur grossesse, et leurs enfants seraient également libres « à l’instant de
leur naissance ». Quant à la femme esclave et concubine, sans enfant,
elle demeurait soumise au bon vouloir de son concubin de statut libre.
Les doléances demandaient que la procédure d’affranchissement
soit facilitée et simplifiée, enregistrant gratuitement le nom des maîtres
et celui des affranchis. Cette proposition visait à supprimer la distinc-
tion qui existait, alors, entre affranchis de droit et « libres de savane »,
dont la liberté accordée par le maître n’était pas reconnue de droit.
La suppression des édits de 1716 à 1778, qui permettaient aux
colons de conserver leurs esclaves lors de leur séjour dans le Royaume,
était réclamée. La formulation de l’article 21 mérite d’être citée, car elle
révèle le caractère de la critique de l’esclavage qui anime ce Cahier :
La Société des Citoyens de Couleur 35
« Si l’on ne prend les mesures les plus promptes, les plus effica-
ces ; si la fermeté, le courage, la constance ne nous animent tous ; si nous
ne réunissons pas vite en faisceau toutes nos lumières, tous nos moyens,
tous nos efforts ; si nous sommeillons un instant sur le bord de l’abîme,
frémissons de notre réveil ! Voilà le sang qui coule, voilà nos terres enva-
hies, les objets de notre industrie ravagés, nos foyers incendiés, voilà nos
voisins, nos amis, nos femmes, nos enfants égorgés et mutilés, voilà l’es-
clave qui lève l’étendard de la révolte, les îles ne sont plus qu’un vaste
et funeste embrasement ; le commerce anéanti, la France reçoit une plaie
mortelle et une multitude d’honnêtes citoyens sont appauvris, ruinés ;
nous perdons tout... Mais, Messieurs, il est temps encore de prévenir le
désastre 10. »
révolte des esclaves anéantira les colons et leurs propriétés. Ogé ne pré-
cisait pas davantage son projet dans ce texte, mais proposait de le
développer s’il était admis au club Massiac 11.
Le Cahier de doléances des citoyens de couleur développait des
problématiques proches de celle d’Ogé : conserver à la classe unifiée
des maîtres blancs et de couleur le contrôle du processus d’amélio-
ration de la condition des esclaves pour éviter le « désastre » d’une
révolte d’esclaves. Ce projet se situait dans le prolongement des
réformes tentées par Castries dans les années 1780, mais s’en différen-
ciait, toutefois, en donnant aux libres de couleur une place centrale
dans le maintien de la société coloniale, puisqu’ils devenaient le ciment
de l’unité de la classe des maîtres et le rempart contre une révolte des
esclaves. Ainsi, les citoyens de couleur ne se battaient pas seulement
pour l’obtention de leurs propres droits civils et politiques, mais pour
un nouvel ordre colonial caractérisé non par un aménagement de la bar-
rière de couleur, mais par sa suppression, et par le vœu de contrôler un
processus d’amélioration du sort des esclaves.
Julien Raimond n’a pas signé ce Cahier de doléances et semble
n’avoir fait connaissance avec la Société des Citoyens de Couleur,
colons américains, qu’après l’achèvement de sa rédaction. Il participa
aux réunions suivantes de la Société, ainsi qu’à la rédaction de l’adresse
qu’elle allait présenter à la Constituante, et fut nommé parmi les cinq
députés qu’elle avait choisis pour représenter les citoyens de couleur à
l’Assemblée, avec Ogé, Du Souchet de Saint-Réal, Honoré de Saint-
Albert et Fleury 12.
Grégoire publia dans les jours suivants une Motion en faveur des
Juifs, précédée d’une notice historique dans laquelle il rappelait l’ad-
mission des députés Juifs à l’Assemblée. Il y effectuait un parallèle
entre les persécutions subies par les Juifs et celles des gens de couleur,
libres et esclaves, dans les colonies :
« Le Nègre est issu d’un sang pur ; le Mulâtre, au contraire, est issu
d’un sang mélangé ; c’est un composé du Noir et du Blanc, c’est une
espèce abâtardie.
D’après cette vérité, il est aussi évident que le Nègre est au-dessus
du Mulâtre, qu’il l’est que l’or pur est au-dessus de l’or mélangé (sic).
D’après ce principe, le Nègre libre dans l’ordre social, doit être
classé avant le Mulâtre ou homme de couleur ; donc les Nègres libres
doivent au moins espérer, comme les Gens de couleur, une représenta-
tion à l’Assemblée Nationale, si ces derniers obtiennent cette faveur
qu’ils viennent de solliciter ; les Nègres libres se reposent à cet effet sur
la haute sagesse des Représentants de la Nation ; ils réclament d’ailleurs
les bons offices des Députés de Saint-Domingue, leurs patrons et leurs
protecteurs naturels qui ne souffriront point une exclusion injurieuse à
la pureté de leur origine ; ils ne doutent pas que les Députés de Saint-
Domingue ne dévoilent avec toute l’énergie dont ils sont capables,
l’ingratitude des Gens de couleur qui semblent dédaigner les Auteurs de
leurs êtres, qui les ont oublié volontairement dans leur demande qu’ils
viennent de former au Tribunal de la Nation, en lui faisant une offre
patriotique de 6 millions sans daigner les y comprendre.
Mais les Nègres libres, colons américains plus généreux que leurs
enfants, se proposent de venir incessamment offrir eux-mêmes à
l’Assemblée Nationale un Don patriotique de 12 millions ; ils ont lieu
de croire qu’il sera reçu avec le même enthousiasme et qu’il leur méri-
40 L’aristocratie de l’épiderme
tera les mêmes bontés ; étant en beaucoup plus grand nombre que les
Gens de couleur, non moins fondés en droits et en pouvoirs, ils ne seront
pas plus embarrassés qu’eux à réaliser ce faible Don patriotique. »
Cette rupture avec une politique d’alliance entre les maîtres ouvre
sur une tout autre perspective, celle d’un rapprochement entre les libres
de couleur et les esclaves. Quelques jours plus tard, le 27 novembre, les
Citoyens de couleur réitéraient leur demande de représentation à
l’Assemblée. Les citoyens de couleur réaffirmèrent leur appartenance
au genre humain : « Les Citoyens de couleur ont donc en leur faveur
les droits naturels, les principes du Droit positif, les Lois anciennes des
Colonies, les Décrets de l’Assemblée Nationale, la Justice, la Raison et
l’Humanité ; tout est pour eux 4. »
Tout, à l’exception des députés des colons blancs qui réclamaient
la preuve que les citoyens de couleur étaient bien propriétaires !
Réponse de ces derniers : « Mais tous ont observé, en même temps, que
cette demande était déplacée et la preuve inutile, puisque dans la légis-
lature actuelle, ce ne sont pas les Propriétaires seuls, mais tous les
Citoyens qui ont été admis à la représentation 5. »
En effet, la convocation des États généraux avait donné le droit de
suffrage à tous les chefs de famille domiciliés. Mais, les colons blancs
allèrent plus loin et osèrent demander que les citoyens de couleur
fassent la preuve de leur liberté, c’est-à-dire de leur origine :
L’esclavage est une exception trop honteuse, pour que celui à qui
on l’oppose ne soit pas en droit de se tenir sur la défensive, et d’attendre
que ceux qui ont l’impudence de l’attaquer représentent la preuve de
leur reproche 7. »
Ainsi, l’accueil que firent des Amis des Noirs aux Citoyens de
couleur et à Grégoire fut suivi de véritables marques de soutien dans
une période où, nous le verrons, la Société des Amis des Noirs, divisée
et violemment calomniée par le club Massiac, s’était affaiblie.
Vers la formation
d’un comité des colonies
« Les Députés des Colons blancs ont provoqué une Lettre des
Députés extraordinaires du Commerce ; ils vous ont fait communiquer
des extraits d’une Lettre sans date et sans signature, qui annoncent à la
Martinique une insurrection qui n’existe pas. En vous parlant de sa trop
malheureuse Patrie, l’un des Députés de la Martinique 10 a fondé la nou-
velle de l’insurrection sur l’assertion des Colons Français réunis au Club
Massiac...
Nosseigneurs, la nouvelle de l’insurrection en Martinique n’est
rien moins que certaine. Nous avons reçu une Lettre du 12 octobre,
signée par douze Citoyens, et cette Lettre n’en parle pas. Auraient-ils
gardé le silence, si, comme on ne cesse de l’affirmer, depuis que nous
nous présentons à vos Assemblées, la Colonie avait été en feu ? Le
Gouvernement lui-même n’en serait-il pas instruit ? Vous le laisserait-il
ignorer ? Nous ne saurions le présumer 11. »
54 L’aristocratie de l’épiderme
« Après avoir excité votre intérêt, on vous a parlé des abus qui
règnent dans les Colonies ; on vous a parlé d’une manière générale des
excès auxquels se portent les Administrateurs et leurs Agents, mais on
ne vous a point parlé de la tyrannie des Blancs, de leur despotisme, de
leur cruauté. Eh bien ! nous en parlerons nous-mêmes : et puisque nos
ennemis nous y forcent, nous publierons, et vous en frémirez, nous
publierons les preuves authentiques du régime honteux sous lequel les
Citoyens de couleur ont toujours vécu 12. »
du droit des femmes dont le sang était mêlé s’étendit aux mâles de
sang-mêlé, qui se virent interdire l’exercice des charges militaires et de
judicature, c’est-à-dire les places recherchées qui donnaient pouvoir et
notoriété.
Depuis 1703, du moins dans la loi, la discrimination avait com-
mencé par s’exercer contre les femmes de couleur et rejaillit sur les
hommes nobles qui, alors, dérogèrent en les épousant ; à partir de 1733
l’ensemble des hommes, libres jusque-là, fut discriminé soit pour cause
de métissage, soit pour avoir épousé une femme de couleur. Le passage
de l’exclusion de la noblesse à l’exclusion de tous les hommes de la
partie libre de la société coloniale constitue un changement de fond. La
société coloniale esclavagiste devint un système ségrégationniste tri-
partite : d’un côté les colons de droit, de l’autre les esclaves, entre les
deux le monde des libres hors du droit, qui regroupait aussi bien de
riches planteurs blancs mariés à des femmes de couleur, que des escla-
ves affranchis exerçant de petits métiers ou de petits ou moyens
planteurs liés par la famille au monde de la couleur.
La création du service du piquet instituait, dans la société mili-
taire, l’apprentissage de la discrimination, en obligeant les libres de
couleur des milices à servir les officiers blancs. Ce fut par l’institution
militaire que l’instruction publique du préjugé de couleur fut dévelop-
pée. En 1762, le gouverneur divisait les gens de couleur en séparant les
compagnies en fonction du degré de mélange des sangs.
L’arrêt du Conseil du Cap de 1761 qui mentionnait l’origine des
personnes, sur les actes notariés, officialisait la division juridique de la
partie libre de la société coloniale par la couleur : étaient considérées
comme libres les personnes d’origine européenne, et affranchies celles
qui étaient d’origine africaine, y compris par métissage.
L’esprit du législateur se révèle dans les réponses du ministre de
la Marine, Bourgeois de Boynes, en 1771 : le préjugé est une construc-
tion politique et morale, dont l’objectif, utile, est de contenir les
esclaves dans un état de mépris d’eux-mêmes. La couleur a été le
critère pour les désigner comme espèce différente. Le législateur sait
très bien que ce n’est qu’un préjugé, dont il n’a pas besoin d’être lui-
même dupe, comme le révèle l’emploi qu’il fait du mot préjugé, mais
il mise sur le système lui-même pour entretenir l’abrutissement des
esclaves, considéré comme le fondement de l’ordre de cette société.
La législation de 1703 à 1779 révèle que le préjugé de couleur
était le principe de la constitution de la société coloniale esclavagiste.
Vers la formation d’un comité des colonies 59
sition de Curt, déclara qu’il fallait rendre justice aux hommes libres de
couleur et insista sur la nécessité de maintenir l’esclavage : « Il n’est
pas possible de faire jouir brusquement les esclaves de nos îles des
bienfaits de la constitution française ; il faut attendre et mûrir cette
révolution sans quoi il s’ensuivrait les plus grands maux et pour les
colonies et par contrecoup pour la France. »
Clermont-Tonnerre se prononça en faveur d’un comité des
colonies.
L’Assemblée vota contre la formation de ce comité. On notera que
les idées des députés des colons faisaient cependant leur chemin en ce
qui concerne la non-application de la constitution française dans les
colonies au profit d’une constitution spécifique sur laquelle les assem-
blées coloniales étaient invitées à formuler leurs vœux. De plus, la
campagne en faveur du maintien de l’esclavage avait reçu le soutien
public de Maury et de Lameth. Enfin, la Société des Amis des Noirs se
faisait remarquer par son absence et n’avait pas de réponse au défi lancé
par le club Massiac.
Seul Grégoire avait pris la défense des citoyens de couleur.
Sur la question de la constitution spécifique des colonies, la
Société des Amis des Noirs n’avait pas exprimé de point de vue. Elle ne
s’était pas davantage manifestée, lors de la campagne en faveur du
maintien de la traite et de l’esclavage.
Deuxième partie
grandes espérances et nous dit de laisser nos pièces sur le bureau. Notre
pétition, renvoyée au Comité de vérification parce que nous demandions
une représentation à l’Assemblée constituante, fut examinée et discutée
pendant onze séances de ce Comité et son arrêté fut pour que nous eus-
sions provisoirement une représentation de deux de nos frères.
C’est ici le lieu de vous peindre toutes les humiliations, toutes
les menaces et toutes les entraves que les colons députés nous firent
éprouver. Il existe un témoin irréprochable, un vrai patriote, le citoyen
Grégoire qui seul de l’Assemblée constituante soutenait alors ouverte-
ment nos droits et qui, lui-même, fut plus d’une fois insulté et menacé
par ces mêmes colons. Mais, ainsi que nous, il oubliait tout pour ne s’oc-
cuper que de la défense de nos droits.
Les colons blancs, dont l’orgueil était offensé par la représentation
que nous demandions et que le Comité nous accordait, firent tout pour
empêcher le rapport d’être fait ; et le rapporteur que nous sollicitions
sans cesse, finit après nous avoir amusés longtemps, par nous déclarer
qu’il renonçait à faire son rapport, parce que, nous dit-il, toutes les fois
qu’il montait à la tribune pour le lire, il était couvert de huées par les
colons et le côté droit.*
Obligés de renoncer au droit que nous donnait le Comité de véri-
fication, malgré toutes les démarches que nous fîmes pendant trois mois
consécutifs chez tous les membres de l’Assemblée constituante qu’on
nous avait indiqués comme favorables à notre cause.
Nous n’avions encore à cette époque, février 1790, pour seuls
défenseurs que le citoyen de Joly et Grégoire et c’était vers eux seuls que
se tournaient toutes nos sollicitudes.
Nos adversaires qui étaient en grand nombre, égaraient l’opinion
publique sur notre compte par une infinité d’écrits qu’ils répandaient et
nous étions repoussés de toutes parts. Notre défenseur même, le citoyen
de Joly, nous parut souvent désespérer de réussir à faire prévaloir nos
droits, tant il était affecté de l’effet que faisaient les diatribes que les
colons lançaient de toutes parts contre nous et de tous les obstacles que
nous éprouvions.
* Tous mes collègues peuvent attester ce fait 10. »
Le Mémoire de Grégoire
en faveur des gens de couleur
niale esclavagiste et au rôle de gardien de cet ordre que jouent les libres
de couleur ?
Après avoir déterminé que le préjugé de couleur n’a pas eu d’exis-
tence continue dans le temps et dans l’espace, Grégoire recherche le
moment de son apparition, et estime qu’il ne s’est fortifié que, « dans
des temps très modernes ; il y a une vingtaine d’années que les sang-
mêlés pouvaient encore atteindre les grades militaires, mais par les
règlements de 1768, on a ôté les brevets à des officiers mulâtres, aux-
quels on ne pouvait ravir le mérite d’avoir bien servi la patrie 4. »
Sur un ton plein d’ironie, Grégoire renvoie la recherche de l’ori-
gine aux « Blancs » eux-mêmes :
mulâtre, qu’il l’est que l’or pur est au-dessus de l’or mélangé (sic).” Si
l’Auteur entend que le Blanc n’est pas issu d’un sang pur, évidemment
il faut le classer après le mulâtre, puisque celui-ci étant mitoyen, parti-
cipe moins à la complexion viciée du Blanc. Si au contraire l’Auteur
donne au Blanc un sang pur, il faut conclure de son raisonnement, que
l’impur peut éclore de principes purs, et que l’or allié à l’argent produit
du plomb. J’avoue que je suis un peu honteux de combattre une telle
objection à la fin du dix-huitième siècle 6. »
« Mais enfin, nous dit-on, si les gens de couleur sont au niveau des
Blancs, vous perdez les colonies, qui ne tiennent à vous que par un fil,
Le Mémoire de Grégoire 71
Grégoire pense que la fin des colonies est à l’ordre du jour. Il est
personnellement, et pour des raisons de principe, anticolonialiste. Il
reviendra sur ce point. Pour l’heure, il formule différentes hypothèses
conduisant à la fin des colonies. Il balaye l’hypothèse d’un séparatisme
blanc :
non pour la réfuter puisqu’il admet son existence, mais pour discuter
des points de détail, et justifier sa nécessité.
La division des colonies d’Amérique selon le critère des couleurs
est d’un ordre qu’il affirme indestructible :
race des Noirs. Il nous semble que des raisons impérieuses qui veulent
que l’on maintienne une distance entre les affranchis et les blancs
peuvent se passer du mépris. Il ne faut mépriser que les vices. On peut
et on doit estimer les vertus partout où elles sont placées et si des motifs
politiques, si des institutions sociales marquent des rangs, ce serait une
grande faute que de ne pas laisser en commun les qualités qui honorent
l’homme dans quelqu’état que le Ciel l’a fait naître. Il est plus d’un
homme de couleur à qui les Blancs prouvent que ces principes sont bien
connus et qu’il est bon de les fortifier.
[...] que le préjugé des Blancs n’est pas aussi inflexible que vous
cherchez à l’établir et que les Gens de couleur peuvent devenir quelques
fois d’heureux usurpateurs. » 11
d’hommes que le commerce des Colonies fait vivre, sont persuadés que
le pain est le premier article de toute constitution et que les droits ne suf-
fisent pas et sont même dangereux pour des hommes affamés. Elle sait
qu’un État peuplé de 26 millions d’habitants et qui dure depuis plus de
treize siècles n’est pas un État à former mais un État existant qui a, si
l’on peut s’exprimer ainsi, un tempérament politique à conserver. Enfin
l’Assemblée Nationale qui sentira bien que la déclaration des droits de
l’Homme n’est pas une plante de tous les climats la gardera dans celui
où elle ne peut produire que des fruits utiles. Elle déclarera à coup sûr
que, par ses décrets, elle n’a entendu rien innover à l’existence politique
des Colonies, et elle aura encore assez de bien à y réaliser pour qu’il ne
soit pas indigne d’elle d’y faire préparer, par les Colons eux-mêmes, la
constitution qui leur est propre, et qu’ils soumettront ensuite à son
approbation.
C’est lors du travail de cette constitution et à cette époque seule
qu’on pourra examiner dans les Colonies si le moment est venu de faire
pour les Gens de couleur quelque chose qui marque encore mieux les
sentiments des Colons pour eux. Le prescrire, c’est entamer cette consti-
tution, c’est faire ce que l’Assemblée Nationale veut éviter ; c’est
préparer sans utilité des semences de division et de haine ; c’est prépa-
rer tous les maux 19. »
« A-t-il daigné s’attendrir une seule fois sur le sort des gens de
couleur ? Il lui paraît très naturel qu’ils soient malheureux ; il n’a garde
de rien proposer qui tende à améliorer leur situation. Il se retranche dans
le préjugé comme dans un fort d’où il croit braver impunément, et les
plaintes des gens de couleur, et les raisons de leurs défenseurs, dont il
ose faire insolemment le sujet de ses railleries. »
chissements faits dans nos îles leur tenir lieu de naissance dans nos îles
[sic], et les esclaves affranchis n’avoir besoin de nos lettres de natura-
lité pour jouir des avantages de nos sujets naturels dans notre royaume,
terres, pays de notre obéissance, encore qu’ils soient nés dans les pays
étrangers 25. »
Ainsi se précise le statut de l’esclave : c’est un étranger, d’origine
africaine. Son affranchissement le naturalise d’office, il devient alors
sujet naturel et libre du roi de France. Les captifs déportés étaient ori-
ginaires de nations africaines ; devenus esclaves sur les plantations, ils
avaient un statut d’étranger esclave spécifique à la colonie, puisqu’il
n’y avait pas d’esclaves, en principe, sur le territoire du Royaume de
France à cette date. Leur descendance créole, bien que née dans la
colonie, héritait de leur statut d’étranger esclave et n’en pouvait sortir
que par l’affranchissement. La liberté seule mettait fin au fait qu’ils
étaient originaires de nations africaines en les naturalisant sujets du
roi de France 26.
Cependant un ordre ségrégationniste s’est peu à peu constitué
dans la partie libre de la société coloniale esclavagiste alors que pro-
gressait en nombre cette nouvelle humanité métissée.
Les esclaves, de plus en plus nombreux à Saint-Domingue, étaient
maintenus dans leur statut d’étranger esclave. En revanche, le statut
des libres a été progressivement bouleversé. Un tournant se produisit en
1724, avec l’apparition dans le vocabulaire des ordonnances de distinc-
tions entre les Nègres affranchis et les libres de couleur et ceci en
rupture avec l’esprit de l’édit de 1685. De 1733 à 1772, les libres de
couleur furent victimes d’une législation les excluant progressivement
des charges de judicature et des offices royaux, puis des fonctions de
médecins, chirurgiens et sages-femmes. Dans les années 1760-1770,
les fonctions d’officiers supérieurs dans les milices locales leur furent
interdites et réservées aux blancs qui n’avaient pas de gens de couleur
dans leur famille. Les actes notariés mentionnèrent l’origine et le degré
de métissage : Nègres libres, mulâtres libres, sang-mêlés, Blancs 27.
Dans son texte anonyme, Moreau de Saint-Méry proposait un
aménagement du critère de couleur dont l’objectif était de protéger la
classe dominante en la renforçant par l’entrée de néo-blancs, sélec-
tionnés en fonction de la légitimité, de la fortune et de la couleur. Il ne
s’agit pas seulement de différencier les trois statuts juridiques de la
société du préjugé de couleur (Blancs, libres de couleur subdivisés en
sous catégories, esclaves étrangers), mais de constituer, dans une
Cournand met à découvert l’Anonyme 105
reconnais donc que l’esclavage est absolument nécessaire, qu’il doit être
maintenu et que la loi qui l’établit est constitutionnelle et inviolable... Je
crois donc qu’il est absurde et dangereux de proposer l’affranchissement
des Nègres 29. »
« Les Nègres libres, qui ont le même droit que les Gens de couleur,
seront également appelés ; plus sages que les Gens de couleur, plus
reconnaissants que leurs enfants, ils se tiennent à l’écart dans ce
moment, mais leur confiance en nous est pour nous un nouveau titre de
défendre leurs intérêts comme les nôtres, ils nous seront toujours aussi
chers ; nous en contractons avec eux un nouvel engagement dans le sanc-
tuaire même des Représentants de la Nation : Nous serons fidèles
à notre serment 7. »
une succession de temps, et par des moyens qui puisse agir, sans causer
un ébranlement funeste aux Colons et à la Métropole 13. »
« Jetés pour ainsi dire au hazard, à trois mille lieux de leur Patrie ;
étrangers au milieu de la Métropole ; frappés du sceau d’une réprobation
qui devait tomber tout entière sur ceux qui la leur ont imposée ; victimes
du préjugé qui les poursuit ; victimes dévouées de la calomnie qui les
outrage ; livrés à eux-mêmes ; abandonnés à eux seuls ; ils n’ont que
vous, ils ne peuvent avoir que la Commune pour appui.
Conquérants, Défenseurs de la liberté française, vous serez aussi
les protecteurs de la justice, de l’innocence et de la vérité. Vos regards
attendris se reposeront un instant sur nos têtes ; ils se reporteront aussi-
tôt sur les Contrées, sur les Colons infortunés que nous avons l’honneur
de représenter : et justement indignés de l’oppression sous laquelle ils
gémissent ; plus indignés encore de la persécution qu’ils éprouvent
au milieu de vous, jusque sous les yeux du Corps législatif, vous
vous déclarerez leurs défenseurs et leurs frères ; vous daignerez appuyer
leurs demandes, EN FAIRE RÉCLAMER LE JUGEMENT PAR VOS
REPRÉSENTANTS À L’ASSEMBLÉE NATIONALE ; vous partagerez,
avec l’ancienne Rome, l’honneur d’un protectorat qui doit désormais
établir, entre toutes les parties d’un grand Empire, l’union qui peut seule
déconcerter les ennemis de notre liberté 22. »
Non, jamais une pareille idée n’est entrée dans nos esprits ; nous
l’avons dit, imprimé dès l’origine de notre Société, et nous le répétons,
afin d’anéantir cette base, aveuglément adoptée par toutes les villes
maritimes, base sur laquelle reposent presque toutes leurs adresses.
L’affranchissement immédiat des Noirs serait non seulement une opéra-
tion fatale pour les Colonies ; ce serait même un présent funeste pour les
Noirs, dans l’état d’abjection et de nullité où la cupidité les a réduits. Ce
serait abandonner à eux-mêmes et sans recours des enfants au berceau,
ou des êtres mutilés et impuissants 4. »
état de choses, de forcer les Maîtres à bien traiter, bien nourrir leurs
esclaves, à favoriser leur population, à les aider dans leurs travaux par le
secours des bestiaux et d’instruments qui multiplieront les travaux en les
facilitant ; parce que ces Nègres étant mieux secondés seront mieux et
davantage, dans le même espace de temps, et par conséquent produiront
davantage ; parce que la population noire s’augmentant par elle-même
dans les Isles, plus de travaux, plus de défrichements et moins de mor-
talité en résulteront, puisqu’il est démontré que les Nègres-créoles sont
plus laborieux, plus tranquilles, mieux acclimatés, et par conséquent
moins sujets aux maladies que les Nègres-africains. » 8
En tout cas, le peu d’écho que la Société des Amis des Noirs reçut
du milieu colon, alors qu’elle le recherchait initialement, reste à appro-
fondir.
Par ailleurs, on voit mal ce qui pouvait rapprocher la Société des
Amis des Noirs, colonialiste et favorable à un « adoucissement » de
l’esclavage, de Julien Raimond et de Grégoire, affirmant la nécessité de
détruire la société coloniale, esclavagiste et ségrégationniste, ce qui
reste également à éclaircir. Un fait apparaît clairement : les fondateurs
de la Société des Amis des Noirs ignoraient l’existence du préjugé de
couleur et ce fut la Société des Citoyens de Couleur qui leur apprit cette
réalité, à partir du 22 octobre 1789.
« Je leur [aux amis des Noirs] dirai seulement qu’ils ont été
trompés quand ils ont cru que la traite française se faisait d’une manière
dure et cruelle ! [...] Aucune traite n’est faite avec plus de ménagements
que la traite française. [...] Je leur dirai que les esclaves de nos colonies
sont soignés avec douceur et humanité et que toute l’attention des
maîtres se porte à la conservation des instruments de leur culture 18. »
ulcérée par les prétentions de l’imbécile orgueil qui gradue l’estime sur
la couleur de la peau, est lasse d’exister dans l’esprit des Blancs, dans
leurs lois mêmes, comme un intermédiaire entre le citoyen libre et l’es-
clave ?
Que gagne-t-elle en effet à la liberté, si ce qu’on a retranché à
son esclavage est remplacé par une domination non moins odieuse ?
si la force qui l’écraserait esclave, s’est changée en mépris qui l’avilit,
libre ? si la même oppression est le résultat d’un nouveau genre de
despotisme ?
Mais pour mettre un terme à de telles humiliations, pour quitter
cette sorte d’existence qui leur ôte des frères et ne leur assure point
des amis, quel moyen leur reste-t-il ? un seul : l’entière destruction de cet
esclavage qui, s’il a pu s’établir entre des vendeurs et des acheteurs, ne
peut être durable entre des frères et des frères, entre des pères et des
enfants, entre des enfants et leurs mères. Est-il un pouvoir humain qui
puisse suffire à faire longtemps subsister un tel renversement des lois de
la nature ? et n’est-ce pas seulement quand l’esclavage sera détruit que
le Noir qui est libre aujourd’hui, mais qui est libre sans honneur et par
conséquent sans liberté, pourra jouir pour la première fois de ses préro-
gatives, parce qu’on n’aura plus sujet de le comparer au Noir esclave ?
et n’est-ce pas alors seulement que le mulâtre, le quarteron, le métis, ne
présenteront plus le mélange du sang avili par l’esclavage, avec celui
que la liberté ennoblit ? et n’est-ce pas alors seulement que, l’injure ne
pouvant plus s’associer avec le préjugé, on verra l’opinion confondre
les variétés de l’espèce humaine avec les autres fortuités, et la loi réunir
les hommes de toute couleur sous l’empire du droit qui appartient à tous
les êtres intelligents ? » 23
avait été bien préparé et Mirabeau avait compris qu’il n’y obtiendrait
pas la parole, comme l’atteste une lettre qu’il écrivit à son collaborateur
Etienne Dumont, le 2 mars : « Je vous envoie, mon cher Dumont, les
premières feuilles de ce discours qui a tant besoin que vous le caressiez.
Je les reprendrai en allant à l’Assemblée, où, cependant, je ne compte
pas parler ce matin 34. »
Le 22 mars, Mirabeau fit une nouvelle lecture de son texte à la
Société des Amis des Noirs. Celle-ci décida de le publier, à ses frais,
avec un avant-propos de Brissot. Ce projet restera en l’état 35.
Ce fut sa dernière intervention sur le problème colonial et aussi sa
dernière participation aux travaux de la Société des Amis des Noirs.
Quelques jours plus tard, il participait avec son ami Condorcet à la
création de la Société de 1789, qui tint sa première réunion le 12 avril
1790. Il se retrouvait aux côtés de Moreau de Saint-Méry. Ce fut aussi
à cette époque que Mirabeau passa au service de la cour.
Chapitre 7
« S’il était des hommes assez insensés pour oser les inviter à une
existence politique isolée, à une indépendance absolue, on leur deman-
derait, en laissant de côté la bonne foi, les engagements et tout ce que les
grandes nations peuvent employer pour les faire valoir ; on leur deman-
derait quel est le secret de leurs espérances ? où sont leurs forces pour
les protéger ? Enlèveront-ils les hommes à la culture pour en faire des
matelots ou des soldats ? les opposeront-ils avec quelque espoir aux pre-
mières puissances du monde ?
Mais, diront-ils, nous nous procurerons des alliances et des garan-
ties ; et les croyez-vous donc désintéressées ? quand elles pourraient
l’être un jour, pensez-vous qu’elles le fussent longtemps ? ne voyez-
vous pas que toute protection serait pour vous le commencement d’un
nouveau gouvernement arbitraire ? Nous, à qui tant de devoirs, à qui tant
de chaînes vous lient, ne pourrions-nous pas vous dire, en oubliant tout,
excepté vos intérêts, voilà nos principes, voilà nos lois ; choisissez d’être
les citoyens libres d’une nation libre ou de devenir bientôt les esclaves
de ceux qui s’offriraient aujourd’hui pour vos alliés 22. »
J. Raimond
au centre de l’information
entre les deux rives
de l’Atlantique
Chapitre premier
J. Raimond publie
la Correspondance secrète des colons,
mai 1790
Dès le 12 août 1789, les députés des colons blancs ont pris
conscience de leur appartenance à la contre-révolution : la révolution
de la liberté les empêche d’exprimer leurs projets dans l’enceinte de
l’Assemblée constituante. Ces colons se trouvent ainsi pris dans un
piège et, comme députés, ils ont conscience de ne plus pouvoir s’expri-
mer ouvertement. Leur devoir est alors d’avertir leurs correspondants
de la situation en France et de passer à l’action dans la colonie. Le
premier acte consiste, pour les colons résidant en France, à retourner à
Saint-Domingue, prendre le pouvoir en formant des assemblées
locales.
Ces colons conseillent ainsi d’émigrer d’urgence vers les colo-
nies. Larchevesque-Thibaud, on l’a vu, abandonna son poste de député
quelques jours plus tard, le 29 août. Cette émigration de colons fait
partie de la première vague qui suivit la Grande Peur de juillet 1789 et
qui vit partir un des frères de Louis XVI, le comte d’Artois. On a noté
que cette première vague s’était faite ostensiblement et que les émigrés
estimaient, comme la lettre des députés des colons blancs le fait aussi,
que la contre-révolution l’emporterait rapidement, en se fondant sur les
expériences récentes de l’échec des révolutions de Genève, en 1782, et
de Hollande en 1787. 8
L’ivresse de la liberté, qui a déjà réussi à priver les députés des
colons blancs des débats publics sur l’esclavage et à obtenir l’interdic-
tion officielle de laisser des esclaves et des libres de couleur, se trouvant
en France, il est urgent de retourner à Saint-Domingue, car « l’esprit du
jour s’oppose sur ce point à nos désirs ».
Les députés conseillent à leurs compatriotes d’organiser d’ur-
gence, non seulement des assemblées coloniales, mais aussi une force
armée pour protéger les habitations, les villes et les bourgs, qui riva-
liseront avec les pouvoirs du gouverneur et de l’intendant. Un ennemi,
cette fois intérieur à la colonie, est désigné : les libres de couleur.
En une courte phrase, cet ennemi est repéré : « partout attachons les
gens de couleur libres, méfiez-vous de ceux qui vont vous arriver
d’Europe ». La colonie doit se constituer en bastion pour défendre,
contre la liberté, ses fondements esclavagistes et ségrégationnistes ;
elle appelle ses membres à rentrer pour mener cette bataille contre
les autorités officielles en créant un contre-pouvoir et se prépare à
déclarer la guerre des épidermes au sein de la partie libre de la société
coloniale.
160 L’aristocratie de l’épiderme
Cette lettre n’a pas fait l’unanimité parmi ses rédacteurs, comme
le révèle un post-scriptum ajouté par le député Jean-Baptiste Gérard :
« PS. Il est possible et même probable, que les bruits alarmants qui
se sont répandus, et qui font la matière de cette lettre, ne soient pas
fondés ; et dans ce cas, il serait fâcheux que cela fit une sensation trop
forte dans la colonie, qui, indépendamment des craintes qu’elle inspire-
rait, pourrait peut-être donner lieu à des dangers plus réels. C’est à vous,
Messieurs, à agir avec la circonspection et la prudence que votre sagesse
vous suggérera : mais nous pensons qu’une sécurité dangereuse ne doit
pas non plus vous empêcher d’avoir les yeux ouverts sur l’effet que
pourra produire dans les colonies la fermentation qui règne dans le
royaume, et que vous ne devez négliger aucunes précautions, aucuns
soins, pour maintenir l’ordre, la paix et la subordination dans votre
sein ; et il nous semble que le meilleur moyen à employer pour assurer
dans tous temps le repos et l’existence dans la colonie, c’est d’affection-
ner à votre cause la classe des gens de couleur. Ils ne demandent
sûrement pas mieux que de confondre leurs intérêts avec les vôtres, et de
s’employer avec zèle pour la sûreté commune. Il n’est donc question, de
votre part, que d’être justes envers eux, et de les traiter toujours de mieux
en mieux. Nous regardons cette espèce comme le vrai boulevard de la
sûreté de la colonie. Vous pouvez les assurer que vos députés, qui sont
aussi les leurs, s’emploieront avec zèle auprès de l’Assemblée nationale
pour l’amélioration de leur sort, et pour leur procurer la juste considéra-
tion qui est due à tout citoyen qui se comporte honnêtement 9. »
Notons que Julien Raimond avait fait lire cette lettre à Mirabeau,
comme l’atteste la référence explicite que ce dernier en fit dans son
Discours sur l’abolition de la traite à la Société des Amis de la
Constitution, les 1er et 2 mars 1790 :
ils osent demander que tout mulâtre né d’une esclave soit déclaré libre.
Ce serait le moyen de mettre le désordre parmi les ateliers ; car les
négresses ne voudraient plus cohabiter qu’avec les blancs. Ceci est la
suite de l’exemple bien impolitique que les colons de Paris leur ont
donné en se réunissant en corps. D’après les principes de l’Assemblée
nationale, les gens de couleur libres obtiendront au moins, quant à leurs
propriétés, tous les droits de citoyen, et par conséquent leur admission
dans les assemblées paroissiales et coloniales. Nous pensons donc qu’il
vaudrait mieux qu’ils tinssent de votre justice et bienveillance ce que
vous croirez devoir leur accorder, sans nuire au respect dû à la couleur
blanche, et qui doit être maintenu dans un pays où il y a vingt esclaves
contre un blanc. Vous sentirez aussi bien que nous tout l’avantage qui
résultera dans ces circonstances critiques, de nous attacher de plus en
plus tous les gens de couleur : ce seront nos meilleurs défenseurs contre
les esclaves. Nous croyons qu’il est juste d’autoriser tous ceux qui sont
majeurs et propriétaires, d’assister aux assemblées de paroisses, où ils
auraient une place à part, et un orateur blanc pour exprimer leurs vœux,
et qu’ils nommeraient par juridiction un représentant à l’assemblée pro-
vinciale et coloniale qui y siègeraient dans un banc à part avec un orateur
blanc, comme dans les assemblées de paroisse 12. »
« Une révolution s’est faite au Cap ; s’il faut en croire les relations
qui nous viennent, une assemblée provinciale s’est formée et s’est
emparée de l’administration intérieure. Sans doute cet exemple a été
suivi dans les autres parties de la colonie. »
Les députés présentent ensuite un compte rendu de leur position
depuis juin 1789 :
en France. Il se pourrait aussi qu’ils n’aient pas pris au sérieux les actes
souverains de l’Assemblée nationale constituante et comptaient sur un
prompt rétablissement de l’ancien régime comme la lettre du 12 août le
laisse entendre. Toujours est-il qu’ils ne pouvaient ignorer que leur
admission, le 4 juillet 1789, correspondait à un acte souverain de cette
Assemblée constituante et non d’une réunion des États généraux,
puisqu’ils savaient bien que les colonies, domaine de la couronne, ne
faisaient pas partie des États généraux, ce que le roi leur avait répondu
depuis longtemps déjà.
Le passage suivant de leur lettre révèle ce qui est au cœur de leur
opposition au processus révolutionnaire :
« C’est du temps qui dissipe les erreurs que nous avons attendu des
circonstances moins périlleuses ; [...] nous avons pris le parti, non seule-
ment de ne présenter aucune demande relative aux Colonies, mais de
mettre tous nos soins à éluder toutes celles qui pourraient être présen-
tées ; et tel était notamment l’objet du comité des Colonies, que nous
avions demandé en dernier lieu. »
Les députés des colons blancs ayant renoncé aux débats publics
ont repris les pratiques secrètes de lobby qu’ils avouent ici et permet-
tent de comprendre comment ils parvinrent à transformer l’esprit
168 L’aristocratie de l’épiderme
8 mars 1790 14. Les colons les avaient repérés comme audacieux et les
considéraient comme suspects.
Cette lettre fournit aussi des informations du plus grand intérêt sur
la préparation du décret et des instructions de mars 1790. Après avoir
recommandé aux colons d’achever la formation des assemblées provin-
ciales et de l’assemblée générale de la colonie, ces députés demandent
d’envoyer d’urgence un projet de formation de ces assemblées en
puisant dans les décrets de la Constituante ce qui leur conviendra. Et
c’est en post-scriptum que la lettre révèle les manipulations, et ce qu’il
faut bien appeler les mensonges, que ces colons et le Comité des colo-
nies n’ont pas hésité à faire pour tromper l’opinion de l’Assemblée
nationale au sujet des libres de couleur :
La correspondance de J. Raimond
avec ses frères de Saint-Domingue
Lorsque Julien Raimond fut arrêté par les soins des agents du parti
colonial, Brulley et Page, en septembre 1793, il décida de publier sa
correspondance avec ses frères de Saint-Domingue pour préparer sa
défense. 1 Nous présenterons ici la partie de cette correspondance qui
éclaire la période de l’Assemblée constituante.
devaient passer ; là, ils en ajustent trois et les étendent morts, les autres
effrayés prennent la fuite ; ils sont poursuivis et plusieurs autres sont
encore tués. Le reste s’échappe et va répandre l’alarme, en disant qu’il
y a sur l’habitation de l’homme de couleur, une armée d’hommes de
couleur qui va venir fondre sur les blancs pour les égorger tous. Tous les
blancs s’assemblent et écrivent au Cap pour demander des forces ; et
voilà ce qui donne lieu à cette proscription. » 11
« J’ai vu, avec peine, que ce discours a fait une forte impression
sur l’esprit de M. Thouret, président de notre Comité, ainsi que sur la
plus grande partie des autres membres ; j’aurais bien voulu, ainsi que
MM. Payen de Boisneuf, Pelerin de la Buxière, Reynaud et Garesché,
pouvoir faire sentir au Comité les inconvénients qui, dans cette circons-
tance, peuvent résulter de l’explication formelle qu’on nous demande.
Nous avons représenté que, dans un moment où tant d’autres inquié-
tudes tourmentent les colons, il y aurait un tel grand danger à leur
donner un nouveau sujet de mécontentement qu’il était plus convenable
et plus sage de leur laisser le mérite et la faculté d’exercer un acte de
générosité très propre à inspirer aux gens de couleur des sentiments
d’affection et de reconnaissance, et à établir la plus parfaite harmonie
dans les différentes classes qui composent la population de la colonie. Il
n’a encore été rien décidé à cet égard par notre Comité ; mais en suppo-
sant que son projet d’instruction laisse les choses dans le vague que je
désirerais, il est à craindre qu’il ne s’élève dans l’Assemblée nationale
des réclamations en faveur de l’explication demandée, et que tous nos
raisonnements soient enchaînés devant les principes qui nous seront
opposés. Au reste, vous ferez dans ce cas, ce que la prudence, la justice
et le patriotisme vous imposeront pour le bonheur et le repos de la
colonie. » 18
veut, dit-il, nous remettre dans notre ligne de démarcation, pour que
nous en imposions au dérèglement de nos idées, et qu’à force de vertus,
nous soyons à la fin des siècles, inscrits sur la liste des bons citoyens, et,
dès à présent, délivrés des humiliations arbitraires.
Ce qu’on appelle ici dérèglement de nos idées, c’est notre repré-
sentation à l’Assemblée nationale et notre entier dévouement au roi
dont nous attendons tout. On nous refuse toujours ici le nom de citoyen
ou d’habitant : on ne veut nous reconnaître que sous la dénomination
de gens de couleur, ou celle injurieuse d’ennemis du bien public ; et
nous sommes les plus tranquilles et les plus patients de la colonie ;
mais, quant aux humiliations arbitraires, jamais encore on n’en a tant
éprouvées.
[...] La conséquence que vous en devez tirer, et celle réelle qui
existe ici, c’est que ce qu’on appelle patriotisme à Saint-Domingue est
la réunion des colons français contre et pour la destruction des colons
américains. La réunion des premiers se sert de l’anarchie où nous
sommes pour vexer ces derniers qui répètent avec franchise :
Ô juste et bienfaisant Louis XVI ! n’as-tu donc provoqué la justice
de la nation que pour nous laisser en proie à nos oppresseurs ? » 24
toutefois envisagé qu’un service militaire leur soit imposé. Ils se voient
reprocher d’avoir fait appel à l’Assemblée nationale pour obtenir une
représentation et interdire, à l’avenir, une telle action qui sera punie
comme crime de lèse-nation, c’est-à-dire le crime politique le plus
grave. Conviés à se présenter pour écouter, ils sont privés de parole.
Jacques Boury, seul, prête serment de fidélité au nom de sa classe.
La lettre des citoyens de couleur à Raimond fait état du refus
général des libres de couleur de cautionner les décisions des assem-
blées coloniales et joint une protestation des habitants de couleur de
Cavaillon à ce sujet, datée du 9 juillet 1790 :
couleur et des esclaves fugitifs, même si les propos tenus par Ogé ne
concernaient que les droits des libres de couleur. Parmi les camarades
d’Ogé et de Chavannes se trouvaient des esclaves qui les avaient rejoint
de leur propre chef pour participer à la lutte.
D’autres mouvements de citoyens de couleur armés apparurent
à la même époque. Dans la province du Sud une troupe de 5 à
600 citoyens de couleur se forma, dans la plaine du Fond, dans le
courant du mois de novembre 1790. On retrouve parmi eux des corres-
pondants de Julien Raimond : André Rigaud, Bleck, Remarais,
Pinchinat. 41 Ils furent capables de battre les forces armées que les colons
blancs des Cayes leur opposèrent, mais furent dispersés par les troupes
que le gouverneur Blanchelande dépêcha, à la fin du mois de novembre
1790, sous le commandement de Mauduit. Rigaud et Pinchinat, entre
autres, furent faits prisonniers et conduits à Port-au-Prince. 42
Une lettre de François Raimond à Julien, datée du 25 mai 1791,
précise comment et pourquoi se forma ce groupe d’insurgés de la pro-
vince du Sud : Jacques Boury réclama l’application des instructions du
28 mars 1790 en faveur des citoyens de couleur. Contraint de prendre
la fuite, il fut soutenu par des libres de couleur qui l’accompagnèrent
dans son refuge du Sud :
Les députés des colons blancs savaient très bien que Julien
Raimond était à Paris et nous voyons dans cette manœuvre une de ces
alliances dont les colons, divisés au point de se faire la guerre armée,
avaient le secret, en restant capables de s’entendre contre un adver-
saire commun. Ainsi, Blanchelande écrivit à la municipalité d’Aquin
passée au parti des « colons patriotes », et qui lui faisait la guerre, que
J. Raimond se trouvait à Aquin sous un faux nom ! Cette contre-infor-
mation visait à présenter Julien Raimond comme un ennemi du bien
public et à confisquer ses biens. Une lettre de son frère François
explique la manœuvre :
massacrer tous. Et par qui, messieurs ? par les noirs ; pouvez-vous crain-
dre des hommes que vous nous peignez si heureux sous votre régime,
que leur sort est infiniment préférable à celui de nos villageois ? Selon
vous, les Nègres se refuseraient à l’échange, ils ne voudraient pas retour-
ner en Guinée, ni même accepter le don de la liberté, par les sang-mêlés.
Calomnie grossière : ils ne demandent paisiblement que la rentrée dans
leurs droits, et l’accès dans vos cœurs ; mais qui peut nous dire à quel
terme les forceront vos duretés 23 ? »
et avoir été aidé par les informations fournies par Julien Raimond. Le
rôle de Raimond se précise : il fut un informateur de premier plan pour
faire comprendre, en France, les manœuvres du parti colonial et de
ses complices. Ces informations nécessitaient d’établir des liens entre
les deux rives de l’Atlantique. Le parti colonial disposait certes d’un
tel réseau, mais Raimond également, et il choisit de mettre le sien au
service de la Révolution.
Précisons enfin que cette Lettre à Barnave exprime la position
personnelle de Brissot et non celle de la Société des Amis des Noirs.
Chapitre 4
première étant de « savoir si les gens de couleur libres auront les droits
de citoyens actifs dans les colonies ». Constatant que les « aristocrates
des colonies » refusent leurs droits aux libres de couleur et ont brouillé
les idées d’une grande partie des membres de l’Assemblée nationale,
Raimond donne des compléments sur ce « préjugé de couleur » : « Il
est donc essentiel de les éclairer, et de dire ici, 1o ce qu’ont été les gens
de couleur dans leur origine ; 2o comment ils se sont perpétués ; et enfin
ce qu’ils sont dans le moment actuel 4. »
Dans son historique de l’apparition du préjugé de couleur, Raimond
distingue trois âges de la colonie. Le premier âge remonte aux débuts de
l’établissement des plantations lorsqu’on introduisit des Africains pour
les cultiver. Les colons blancs vécurent alors avec des femmes africaines
et donnèrent naissance à une nouvelle humanité métissée :
des enfants avec leurs maîtres, elles devenaient libres, ainsi que leurs
enfants, qui étaient toujours élevés comme les enfants libres. La facilité
avec laquelle on obtenait alors des terres incultes les mettait à portée
d’en donner à chacun de leurs enfants.
Tel a été l’état des gens de couleur libres au second âge de la
colonie.
Jusque-là on n’avait point connu le préjugé contre cette classe
d’hommes libres. Il n’y avait aucun déshonneur à les voir, à les fréquen-
ter, à vivre avec eux, à faire des alliances avec leurs filles, et on donnait
aux hommes de couleur des commissions d’officiers dans les milices 6. »
Telles étaient encore les choses à la fin du troisième âge des colo-
nies, à l’époque de 1749.
Cette époque ramena dans les colonies quelques jeunes gens des
deux sexes dans la classe des hommes de couleur, que leurs pères riches
avaient envoyés en France, pour les y faire élever et instruire. Les talents
d’agréments qu’ils avaient acquis, et leur fortune, ne servirent qu’à leur
attirer davantage la jalousie des blancs. On leur reprochait leur origine,
parce qu’on ne pouvait leur reprocher autre chose ; mais à cette époque
encore, des blancs honnêtes n’en épousaient pas moins ces filles de
couleur ; ce qui redoubla la rage des ennemis de cette classe. Cependant,
malgré leurs efforts et le mépris dont ils cherchaient à les couvrir, cette
classe s’augmentait, aux dépens même de la population blanche ; et
parce que beaucoup de blancs préféraient de vivre avec des femmes
noires, plutôt que d’épouser des femmes blanches, et parce que le petit
nombre de ces dernières était un autre obstacle à la population blanche.
* En 1763, on comptait plus de trois cents blancs, dont plusieurs gentilshommes,
qui avaient épousé des filles de couleur 8. »
avaient envoyé leurs enfants des deux sexes faire leurs études en
France. Julien fit les siennes à Toulouse et retourna à Bainet où on le
trouve, en 1766, s’occupant de ses indigoteries. Deux de ses sœurs,
Agathe et Elisabeth, restèrent en France où elles épousèrent des
Français, l’un de Toulouse, l’autre de Bordeaux 10.
Raimond rappelle succinctement la législation ségrégationniste
qu’il avait déjà présentée dans Supplique et Pétition des citoyens de
couleur, le 2 décembre 1789 11. Il précise ici que, lorsque les progrès du
préjugé en vinrent à rejeter les Blancs qui avaient épousé des femmes
de couleur dans la catégorie des sang-mêlé, certains d’entre eux se
réfugièrent en France, et que, par ailleurs, nombre de ses correspon-
dants furent victimes d’interdictions professionnelles pour cause de
couleur : « Pendant la guerre de 1766, et avant, messieurs Guillaume
Labadie, Jacques Boury, Jacques Delaunay, d’Avesne, et beaucoup
d’autres, avaient des brevets de capitaine et de lieutenant des milices :
en 1768 on les en dépouilla, quoiqu’ils eussent parfaitement servi en
cette qualité. Ce fut alors que la jalousie des blancs contre les gens de
couleur se déploya avec une fureur dont on n’a pas d’exemple 12. »
Lorsque l’origine fut mentionnée dans les actes officiels, la mère
de Julien Raimond apparut, en 1760, sous la mention « mulâtresse
libre » alors que rien de tel n’existait sur son acte de mariage 13.
Dans son texte, Raimond souligne que plusieurs gouverneurs ten-
tèrent de mettre un frein au préjugé, comme d’Ennery et Bellecombe à
l’époque du ministère de Castries (c’est ce dernier qui l’aida à passer
en France pour défendre la cause des libres de couleur, en 1784).
Raimond conclut son historique en insistant sur le caractère récent
de l’apparition du préjugé de couleur :
quatrième, il en faut deux ou trois. Or, il est évident qu’on trouvera bien
rarement ce nombre de blancs. 16 »
« Toutes ces mesures, soit pour le degré de couleur seul, soit pour
le degré de légitimité, soit les deux ensemble, seraient dangereuses et ne
feraient qu’entretenir le préjugé.
Il faut le détruire en entier, et l’on détruira la cause de toutes les
divisions actuelles. Déclarez que tous les sang-mêlés libres de la colonie
ont droit d’être citoyens actifs, alors beaucoup de blancs ne répugneront
plus à épouser des filles de couleur, parce qu’alors ces mariages ne les
écarteront pas des places ; alors les filles de couleur qui n’attendront que
Julien Raimond passe à l’offensive 235
de leur vertu leur alliance avec les blancs, la pratiqueront. Enfin ces
alliances devenues communes, peu à peu on s’y accoutumera et dans
vingt ans, j’ose le prédire, le préjugé sera effacé ; et si, comme je n’en
doute pas, des filles d’Europe épousent dans les colonies des hommes de
couleur, bientôt les mariages entre blancs purs seront en petit nombre et
les antiques prétentions qu’ils pourraient conserver seraient anéanties
par l’intérêt général de la majorité qui tendrait à les détruire. 20 »
raient consenties, les forcer encore à demeurer dans un pays où ces lois
ne lieraient qu’eux et ne pèseraient que sur eux ?
Si les colons blancs sont autorisés à faire seuls des lois pour les
hommes de couleur libres, etc., si ces lois ne sont obligatoires et ne
pèsent que sur eux, peut-on alors empêcher les hommes de couleur
d’émigrer avec leurs fortunes pour aller chercher ailleurs des lois plus
égales et plus justes ? 23 »
plus efficace d’armer les frères contre les frères, les enfants contre leurs
parents.
L’Assemblée nationale doit être juste envers TOUS, ou elle viole
ses principes et renverse la constitution : les hommes libres doivent être
TOUS au même niveau, ou l’on allume une guerre éternelle dans les
îles. Ses flambeaux brillent déjà ; on les doit à une équivoque des pré-
cédents décrets sur le sort des mulâtres. Les blancs cependant ne
parlent que d’échafauds, de gibets. Mais si, dans cette discorde, il est
des coupables, ce sont les blancs ; s’il est des rebelles aux décrets, ce
sont les blancs. 29 »
Cette lettre est le dernier texte publié dans les Observations sur
l’origine du préjugé par Raimond.
P.B.F. Laborde 31, l’un des Léopardins, député de la province du
240 L’aristocratie de l’épiderme
sion avait été prise la veille, et que l’Assemblée devait s’y tenir. Il y eut
quelque tumulte, puis l’Assemblée vota la levée de la séance. Ainsi le
rendez-vous pris le 3 mars fut annulé le 4 5.
Le 18 mars 1791, la Société des Citoyens de Couleur décidait de
publier le texte de sa pétition pour demander au Comité des colonies
de vérifier ses pouvoirs. Un Avertissement relatait les séances des 3 et
4 mars et mettait en lumière les manœuvres et les arguments de Dillon,
qui présentait les citoyens de couleur comme une espèce d’hommes en
état de domesticité, manipulés par une société de dangereux philan-
thropes vendus aux ennemis de la France : « Les députés des citoyens
de couleur ne lutteront point d’injures avec M. Arthur Dillon, ils le ren-
verront à la déclaration des droits pour lui apprendre qu’il n’y a plus
d’espèce d’hommes, et que ce langage insolent est abandonné à une
aristocratie proscrite. 6 »
Par ailleurs, l’argument qui consiste à faire du considérant du
12 octobre un texte de loi ne repose sur aucun décret de l’Assemblée :
tion et leurs lois intérieures, l’Assemblée nationale allait, pour les aider,
décréter des instructions qu’elles suivraient, et qu’après, l’Assemblée
nationale déciderait en dernier ressort. Voilà donc votre sort en bonnes
mains, puisqu’il est entre celles de l’Assemblée Nationale, ce n’est donc
qu’ici que vous pouvez obtenir justice, et on est disposé à vous la rendre ;
mais mes chers compatriotes, ne vous endormez plus sur mes avis,
croyez-moi, je suis sur les lieux et vois ce qu’il y a à faire ; et si vous ne
vous en rapportez pas à moi qui soutient tout aujourd’hui, envoyez-moi
quelques collègues adjoints et ils agiront avec moi. 21 »
Vers la constitutionnalisation
de l’esclavage et du préjugé de
couleur par la Constituante.
Mars 1790 - Mai 1791
Chapitre premier
La contre-offensive
de Moreau de Saint-Méry
Les Amis des Noirs sont la cause des « troubles des colonies »
« C’est de cet instant qu’il faut compter les troubles des colonies,
parce que c’est alors que le germe en fut conçu. Il a pris naissance dans
une foule d’écrits où l’on a prêché, conseillé et désiré la révolte des
esclaves ; où l’on a vomi les plus horribles imprécations contre les habi-
tants des colonies, contre les commerçants, & cherché tous les moyens
de propager une doctrine qui incite des milliers d’hommes à s’entr’égor-
ger, qui tend à dépeupler des isles entières, & qui ne doit avoir pour
terme que la ruine des empires. 6 »
seuls que la raison puisse avouer, que les colonies sont en péril ; c’est de
la faiblesse de l’Assemblée nationale que les Colons tirent leurs nou-
veaux droits pour être impunément despotes, & pour menacer l’état. Hé
bien, moi, j’ai pris la plume pour démontrer qu’il ne s’est rien passé aux
colonies qui n’y ait été produit par les amis-des-noirs, & que la France
est en danger, si elle ne fait pas cesser des déclamations produites par un
délire prétendu philosophique. 9 »
Moreau a ainsi énoncé trois thèses : les Amis des Noirs sont la
cause des « troubles des colonies » ; les Amis des Noirs prêchent la
révolte des esclaves ; les colons sont les victimes des Amis des Noirs.
La première thèse de Moreau fournit un élément de réponse à la
question que nous avons posée plus haut : pourquoi Moreau déforme-
264 L’aristocratie de l’épiderme
t-il sciemment les objectifs de la Société des Amis des Noirs ? En mar-
telant que les Amis des Noirs sont la cause des « troubles des
colonies », il cherche à réfuter tout le travail d’information que Julien
Raimond a fourni en publiant la Correspondance secrète des colons
députés à l’Assemblée nationale, travail qui révélait, preuves à l’appui,
que les violences commises à Saint-Domingue résultaient de la poli-
tique menée par les assemblées coloniales à l’encontre des libres de
couleur. Moreau se contente de renvoyer la responsabilité de ces faits
aux demandes irrecevables d’égalité des droits, aux actes criminels
commis par Ogé et aux prêches des Amis des Noirs. L’effet recherché
est de produire une explication aux « troubles des colonies », qui puisse
déplacer et contredire le travail d’information fourni par Raimond. 16
« Une vérité affligeante pour tous les cœurs sensibles, c’est que le
bonheur parfait n’est en nul endroit de la terre le partage de l’homme.
En vain, les métaphysiciens pour créer un tableau propre à satisfaire les
âmes purement contemplatives, ont imaginé un état de nature où les
besoins ne naissent qu’avec les moyens de les satisfaire, où le désir est
toujours égal aux facultés, où les passions n’engendrent que des vertus
ou des jouissances pures : mais cette extase du beau idéal s’évanouit
bientôt, parce que notre faiblesse nous avertit que nous avons été créés
pour l’état social & par conséquent pour la dépendance. Qu’on jette les
yeux sur le globe entier, & partout l’on trouvera la démonstration de
cette vérité. Partout les conventions sociales, qu’on peut définir la loi des
forces naturelles mises en commun, se ressentent plus ou moins de l’im-
La contre-offensive de Moreau de Saint-Méry 265
l’emploi des nègres ne nous a été connu que plus de 120 ans après les
Espagnols. J’ajouterai que les Colons n’ont jamais été chercher des
esclaves en Afrique ; mais que ce sont des Européens qui nous les ont
apportés & que ce commerce a toujours été favorisé & protégé par l’ad-
ministration du royaume. » 20
ne statue pas sur le sort des gens de couleur. Voilà le piège, & je le
découvrirai, parce qu’encore un coup ; ce n’est pas autre chose que la
demande de la destruction de l’esclavage. 28 »
Moreau renvoie cette logique, ou ce piège, aux principes de la
Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et plus précisément
à l’idée même d’un droit naturel attaché à la personne et antérieur à
l’ordre social : « La liberté et l’égalité, s’écrient Messieurs Grégoire
et Brissot, sont hors de la constitution ; & l’Assemblée nationale qui
n’a pas de pouvoir pour les régler, ne peut par conséquent déléguer ce
pouvoir, même comme initiative ; elle ne peut, tout au plus, que décla-
rer des droits nés avant tout corps constituant. » 29
Moreau a donc bien saisi la tactique du côté gauche et la menace,
qu’il juge mortelle, pour l’avenir des colonies :
Moreau doit alors opposer à cette logique, qui n’est autre que celle
de la Déclaration des droits, une argumentation analoconforme aux
intérêts de la colonie.
à savoir ce que doit être le pouvoir dans une société esclavagiste, est
essentiel :
« Oui, les hommes de couleur eux-mêmes ne sont ici que des ins-
truments qu’on emploie pour faire mouvoir une plus grande machine.
Que sais-je si on n’a pas poussé la folie jusqu’à compter sur eux pour
faire abolir la servitude, en leur disant, après qu’on en aurait fait des
blancs : « pouvez-vous ne rien accorder à ces malheureux esclaves
lorsque vous avez tant obtenu vous-mêmes », & l’on se ferait ainsi un
titre de leur prétendue gratitude. Je ne me lasserai pas de le redire : si
nos esclaves peuvent soupçonner qu’il est une puissance à laquelle il
appartienne de statuer sur leur sort, indépendamment de la volonté de
leurs maîtres ; si surtout ils acquièrent la preuve que les mulâtres ont
recouru utilement à cette puissance ; s’ils sont convaincus qu’ils ne
sont plus à notre égard dans une dépendance absolue ; s’ils voient enfin
que sans notre participation, les mulâtres sont devenus ou doivent
devenir nos égaux, il n’est plus d’espoir pour la France de conserver ses
colonies. 31 »
plus cher par la difficulté de trouver des bras au moments propices, &
sentez qu’elles ne seraient point achetées, ou qu’elles ne le seraient qu’à
un prix qui commanderait l’abandon des manufactures, puisque les
autres nations à colonies les offriraient à un taux plus bas. Voilà en der-
nière analyse ce que produirait l’affranchissement supposé paisible,
c’est-à-dire une perte de 240 millions de produits pour la France. 32 »
Le maître et sa mulâtresse
« Tous les hommes se doivent le respect les uns aux autres ; les
vicieux seuls sont méprisables ; et c’est donner évidemment des préro-
gatives au vice que de constituer un état civil dans lequel certains
hommes se trouvent obligés d’en respecter d’autres et de leur céder cer-
taines fonctions publiques, à cause d’un accident de la peau, absolument
étranger aux facultés intellectuelles.
Cette bizarre institution serait trop contraire à tous les principes,
pour n’être pas le fondement d’une haine d’autant plus dangereuse,
qu’elle serait légitime de la part des citoyens de couleur envers les
blancs. Les sophismes ne changent rien à la vérité ; cette haine est inévi-
table dans l’état de choses que propose le comité colonial. Il n’y a pas
un homme qui ne se sente disposé à détester ceux auxquels on veut le
soumettre par de mauvaises raisons. Les lumières ne pourraient pas
s’avancer d’un degré dans la classe dégradée, sans que le sentiment d’in-
justice ne devînt plus vif, et, par conséquent, la haine plus violente. 3 »
les crimes et les excès dont les colons blancs, qui ont l’impudence de se
porter ses accusateurs, sont convaincus d’être eux-mêmes les coupables
auteurs ?
[...] M. Moreau ne voit-il pas que le commandement de l’insurrec-
tion est gravé sur les fers mêmes des esclaves ? que les cruautés des
tyrans et les angoisses du martyre prêchent la liberté bien plus éloquem-
ment que les livres ? Eh ! que doit-ce être de l’ardeur de l’insurrection
quand le fracas des Bastilles, qui tombent sous ses coups, retentit
aux oreilles des esclaves ? Oui, les tyrans doivent seuls s’accuser des
révoltes ; elles ne cesseront qu’avec la tyrannie. 6 »
troubles fut la lettre des députés des colons blancs du 12 août 1789,
qui ouvrit une politique de persécution contre les libres de couleur, à
Saint-Domingue.
La seconde cause des troubles réside dans la politique menée par
Barnave depuis mars 1790 et que le projet des Comités tente de pour-
suivre :
cherché une autre du côté du pouvoir exécutif, représenté par le roi, afin
d’échapper à la suprématie de l’Assemblée constituante. Grégoire met
ainsi en lumière la stratégie contre-révolutionnaire du parti colonial :
« Les blancs ont bien senti que cet état de choses ne pouvait pas avoir
une longue durée et que les principes triompheraient tôt ou tard, que les
mulâtres tôt ou tard seraient réintégrés dans leurs droits. Il fallait parer
à ceci : on a levé l’étendard de l’indépendance ; on a témoigné l’inten-
tion de ne plus reconnaître la suprématie de l’Assemblée nationale, de
n’admettre que celle du roi, parce qu’on espérait s’en jouer. » 20
Il rappelle ensuite la lutte menée par les citoyens de cou-
leur depuis leur réception à l’Assemblée le 22 octobre 1789 et les
manœuvres, qui, en France, ont empêché de les entendre, ainsi que
l’aggravation de leur situation dans les colonies, et en particulier à
Saint-Domingue. Il rappelle le combat d’Ogé et, répondant aux calom-
nies de Moreau de Saint-Méry qui le présentait comme un criminel,
prend sa défense :
à tous, que jamais les lois de la nature ne doivent être violées pour des
raisons d’utilité, parce que quelques individus sont intéressés à leur
admission.
Quelle étrange contradiction ne serait-ce pas qu’après avoir
décrété la liberté en France, vous fussiez par vos décrets les oppres-
seurs de l’Amérique. Je demande la question préalable sur le projet de
décret que vous présente votre comité et voici celui que je propose d’y
substituer.
L’Assemblée nationale décrète que les hommes de couleur et
nègres libres, propriétaires et contribuables, sont compris dans l’article 4
du décret du 28 mars.
Enjoint aux commissaires chargés de rétablir l’ordre dans les îles,
d’employer tous les moyens en leur pouvoir pour y faire jouir les
hommes de couleur de tous les droits de citoyens actifs. 23 »
des lois qui les éloignent de vous, et vous ne voudriez pas leur laisser
partager vos droits parce qu’ils n’ont pas le teint aussi blanc que vous ?
Je pourrais dire à plusieurs de ceux qui élèvent des prétentions ridi-
cules : Regardez-vous dans un miroir, et prononcez.
L’édit de 1685 qui accorde aux gens de couleur la liberté civile, cet
édit publié dans les colonies excita-t-il la moindre réclamation ? Les
gens de couleur ne sont-ils pas des citoyens comme les colons blancs ?
Personne n’en doute. Eh bien, il en sera de même de votre décision, elle
sera reçue avec l’effusion et la reconnaissance des colons de couleur et
l’admiration des colons blancs qui ont des lumières et de l’éducation. 30 »
« Lorsque l’on est obligé d’avouer que les colons de couleur ont
reçu les mêmes avantages que les blancs par le croisement des races, par
les effets heureux de la nature, qui nous enseigne assez par là à mépriser
les préjugés ; lorsque, par le croisement des races, ils participent
et de la force des Américains et de l’esprit et de l’intelligence qui dis-
tinguent les Européens ; lorsqu’ils ont la vigueur, l’agilité, l’industrie et
toutes les qualités requises pour être citoyens actifs, les priverez-vous de
ces droits qui leur sont accordés par la nature, la loi et l’usage des pays
circonvoisins ? Craignez une explosion terrible si vous prononcez contre
eux une exclusion éternelle en rendant leurs tyrans leurs juges. 31 »
nes mais non sur l’état des libres de couleur parce qu’ils étaient des
« personnes, propriétaires et contribuables ». Ainsi et sans le dire net-
tement, Pétion laissait entendre que l’initiative ne pouvait porter que
sur l’état des esclaves. Il demanda encore que l’on s’explique claire-
ment sur ce qui avait été décidé lors du débat du 28 mars 1790.
La première partie du débat fut consacrée à ces éclaircissements
concernant la séance du 28 mars. Barnave dut convenir que la rédaction
était ambiguë et que l’intention de l’Assemblée n’était pas d’exclure les
libres de couleur. Lanjuinais expliqua pourquoi le projet des Comités
avait proposé ce congrès à Saint-Martin :
être mise aux voix, si on ne vide pas les amendements. En effet, il s’agit
uniquement de l’initiative sur l’état des personnes. Si vous entendez
parler des nègres, des affranchis et des hommes nés de père et de mère
libres, je serai contre la question préalable ; si au contraire vous excep-
tez les personnes nées de père et de mère libres, je serai pour la question
préalable. 43 »
Au moment du vote, la proposition de Moreau de Saint-Méry fut
amendée avec son accord, de la façon suivante : « L’Assemblée natio-
nale décrète, comme article constitutionnel, qu’aucune loi sur l’état des
personnes non libres ne pourra être faite par le Corps législatif, pour les
colonies, que sur la demande formelle et spontanée des assemblées
coloniales 44. »
Le mot « esclaves » avait ainsi été remplacé par l’expression « non
libres » et le décret ne se limitait désormais plus aux seules colonies
d’Amérique : il concernait à présent toutes les colonies.
Moreau de Saint-Méry avait approuvé le remplacement du mot
« esclaves » par l’expression « non libres », soulignant que les deux
termes étaient pour lui synonymes : « Il ne s’agit pas de se battre sur
les mots ; persuadé que les choses sont bien entendues, qu’elles le
sont comme je les entends moi-même, je retire l’amendement du mot
esclaves. » 45
Soumis au vote, ce texte fut adopté. L’Assemblée constituante
avait constitutionalisé l’esclavage dans les colonies.
mon papa, au nom de dieu, parlez pour nous. GOUY D’ARCI sortant
de la poche de Mr BARNAVE, hélas mon fils je le voudrais bien s’il y
avait seulement 42 % à gagner. »
On aperçoit Gouy d’Arsy miniaturisé, sortant de la poche de
Barnave, un dossier de « Dénonciations » sous le bras droit, un papier
à la main gauche. On sait que Gouy d’Arsy avait sans relâche dénoncé
le ministre de la Marine, La Luzerne, jusqu’à ce que ce dernier démis-
sionne. Le dialogue avec « le petit mulâtre », à ses pieds, fait allusion
aux enfants métissés des colons, abandonnés par les partisans du
préjugé de couleur et de la morale de la machine coloniale décrite par
Moreau de Saint-Méry. 6 La réponse de ce père dénaturé met en évi-
dence la perte des sentiments d’humanité de ces colons plus soucieux
de leurs profits que de la reconnaissance de leurs enfants.
« 12 L’humanité (Robespierre), la justice (Péthion) et la raison
(l’abbé Grégoire) viennent au secours des hommes de couleur que
BARNAVE tient enchaînés et veut livrer aux colons blancs. »
Voici le thème central de l’estampe et le résumé du débat de mai
1791 : Barnave, corrompu par le parti colonial, tient enchaînés les gens
de couleur qu’il veut livrer aux colons avec l’aide du côté droit de
l’Assemblée, tandis que les trois députés du côté gauche, Grégoire,
Pétion et Robespierre, en allégories de la Raison, de la Justice et de
l’Humanité, s’élevant au-dessus de ce grouillement d’intérêts parti-
culiers, défendent les principes et, ici, la cause des gens de couleur. On
aura noté que l’abbé Grégoire, en Raison, est particulièrement dénudé.
Cette Raison portant la lumière est, d’ailleurs, très proche de l’allégo-
rie de la Vérité, c’est-à-dire nue.
À la tête de ce groupe des citoyens de couleur, on aperçoit une
femme qui répond, sur terre, à l’allégorie de l’humanité-Robespierre :
leur position est identique, et moderne, les bras ouverts protégeant un
enfant en bas âge. Une différence toutefois, l’humanité-Robespierre est
représentée par une femme jeune qui, les bras ouverts, donne le sein
à l’enfant, tandis que la figure de l’humanité à la tête des citoyens de
couleur semble âgée et ne donne pas le sein à l’enfant qu’elle protège
de ses bras ouverts.
Cette femme est Jeanne Odo, qui devient célèbre surtout après
1793 : elle conduisait alors la délégation des citoyens de couleur qui fut
reçue au lendemain de la Révolution des 31 mai et 2 juin 1793 : le 3 juin
par la Société des Amis de la liberté et de l’égalité (c’est-à-dire le club
des Jacobins qui changea de nom le 10 août 1792) et dont elle devint
Arrêt sur image 313
autre Lameth dit une chose contraire. Le dessinateur veut-il mettre l’ac-
cent sur les comportements contradictoires des trois frères Lameth ?
C’est possible. En tout cas les trois frères sont dessinés et nous avons
vu Alexandre Lameth occupé à aider Maury (en 3 et 4) à souffler
Barnave, nous retrouverons Théodore en 23. Alors, qui est ce quatrième
Lameth ? Un concentré des trois frères ?
Le colon de couleur (en 15) répond à Charles comte de Lameth, et
lui demande de ne pas confondre l’esclavage et le préjugé de couleur.
« 16 REMOND citoyen de couleur. En l’arrachant de mes mains,
cruel, crois-tu l’arracher de tous les cœurs où elle est écrite cette
immortelle déclaration. 12 »
Julien Raimond, dont le geste est au centre de l’estampe, réclame
l’application des principes de la Déclaration des droits de l’homme et
du citoyen qu’il tient à la main et que la majorité de l’Assemblée vient
de déchirer.
« 17 UNE FIANCÉE. Je faisais à mon pays le sacrifice de ma
fortune et de ma main mais par ce qu’on voit le destin en décide
autrement. »
Ces paroles de la fiancée doivent être rapprochées de la dernière
ligne de la légende : « dans le lointain on découvre l’isle de St Martin
qui s’engloutit et le congrès Barnavite écrasé par la foudre, l’himen
s’envole et fuit des lieux où il devait consommer un cruel sacrifice. »
Le dessinateur fait état de l’échec de la proposition du congrès
de Saint-Martin qui devait décider du sort des libres de couleur et
que le décret du 15 mai a fait échouer. L’alliance entre Barnave et le
parti colonial est exprimée par cette promesse de mariage. La fiancée,
une fleur à la main (en 17), est aux côtés de Dillon, occupé à cor-
rompre Barnave. Ce projet de mariage, que la fiancée considère comme
le sacrifice cruel de sa fortune et de sa main, redouble le thème d’un
Barnave corrompu.
« 18 DAIGUILLON. Ma foi je ne vois pas trop clair dans cette
affaire-là au surplus qu’importe mon suffrage puisque je n’opine
jamais que de la culotte.
19 DUBOIS DE CRANCE. Comme j’allais m’oublier il vaut
mieux abjurer une funeste erreur que de se rendre coupable d’une
orgueilleuse persévérance.
20 MARTIN GUILHERMI. Qu’aviez-vous besoin Mr l’Enchan-
teur de me métamorphoser en l’animal dont je porte le nom et de me
mettre sur le dos deux démocrates. »
316 L’aristocratie de l’épiderme
Le thème de la corruption
La corruptibilité de Barnave évoque l’argent, une alliance matri-
moniale, mais aussi des pressions exercées par le parti colonial pour
Arrêt sur image 319
Voici les noms des treize députés et/ou membres du Comité des
colonies, concernés par cette décision de la Société des Amis de la
Constitution, que nous avons pu retrouver :
– députés des colons blancs de Saint-Domingue : Gouy d’Arsy,
Reynaud de Villeverd, Levasseur de Villeblanche, Jean-Baptiste
Gérard, Courrejolles et Bodkin-Fitz Gerald
– député des colons blancs de la Martinique : Moreau de Saint-
Méry
– député des colons blancs de la Guadeloupe : Curt
– membres du Comité des colonies : Barnave, Alexandre de
Lameth, Lasnier de Vaussenay, Alquier, Pellerin de Nantes.
De ce moment jusqu’à la mi-juillet, la Société des Amis de la
Constitution fut profondément divisée par le grand événement que fut
la tentative de fuite de la famille royale. Reconnue, elle fut arrêtée le
21 juin à Varennes et reconduite à Paris. La découverte de cette trahi-
son et les mesures prises par l’Assemblée constituante pour dissimuler
« l’évasion du roi » accélérèrent la scission de la Société. Le 16 juillet
le côté droit tenta d’entraîner le plus grand nombre de membres, avec
les sociétés affiliées des départements, hors de l’influence de son côté
gauche. Les scissionnistes refusaient « les principes de Pétion et de
Robespierre » et quittèrent les Jacobins 7 de la rue Saint-Honoré, pour
s’installer « aux Feuillants » : ils devinrent la Société des Amis de la
Constitution séante aux Feuillants.
Le 25 juillet, le côté gauche de la Société proposait une refon-
dation sur de nouvelles bases et l’ouverture d’un nouveau registre
d’inscription de ses membres. Il n’est pas dans notre propos de rentrer
dans les détails de l’histoire de la Société dans cette période charnière
mais il nous a paru intéressant de rappeler que l’on retrouve à la tête de
cette refondation, parmi les députés à l’Assemblée, Pétion, Robes-
pierre, Grégoire, Prieur et comme membres de la Société, Etienne
Polverel, Julien Raimond 8, Claude Milscent, qui nous intéressent pour
le rôle qu’ils jouèrent dans la formation du côté gauche sur le problème
colonial. De la fuite du roi à la Fusillade du Champ-de-Mars, le
17 juillet, on les voit participer à la refondation de la Société, dont ils
furent le noyau dur, sur d’autres questions d’importance.
« Qu’est-ce qu’un homme privé des droits de citoyen actif dans les
colonies, sous la domination des blancs ? C’est un homme qui ne peut
délibérer en aucune manière, qui ne peut influer ni directement, ni indi-
Conclusion 329
rectement sur les intérêts les plus touchants, les plus sacrés de la société
dont il fait partie ; c’est un homme qui est gouverné par des magistrats
au choix desquels il ne peut concourir en aucune manière, par des lois,
par des règlements, par des actes d’administration pesant sans cesse sur
lui, sans avoir usé du droit qui appartient à tout citoyen d’influer pour sa
part dans les conventions sociales, en ce qui concerne son intérêt par-
ticulier. C’est un homme avili dont la destinée est abandonnée aux
caprices, aux passions, aux intérêts d’une caste supérieure.
Voilà les biens auxquels on attache une médiocre importance ! Que
l’on pense ainsi lorsqu’on regarde la liberté – le bien le plus sacré de
l’homme, le souverain bien de tout homme qui n’est point abruti – que
l’on pense ainsi, lorsqu’on regarde la liberté comme le superflu dont le
peuple français peut se passer, pourvu que l’on lui laisse la tranquillité
et du pain, que l’on raisonne ainsi avec de tels principes, je ne m’en
étonne pas. Mais moi, dont la liberté sera l’idole, moi qui ne connais ni
bonheur, ni prospérité, ni moralité pour les hommes, ni pour les nations
sans liberté, je déclare que j’abhorre de pareils systèmes et que je
réclame votre justice, l’humanité, la justice et l’intérêt national en faveur
des hommes libres de couleur 18. »
couleur qu’il soit, jouit en France de tous les droits de citoyen, s’il a les
qualités prescrites par la Constitution pour les exercer 24. »
C’est dans le récit de mes actions depuis 1784 et dans tous mes écrits
publics et privés que je vous soumets, que je vous prie de fonder le jugement
que vous allez porter. Mais avant tout je dois vous parler des causes qui m’ont
mené en France ; la tyrannie la plus cruellement exercée pesait à Saint-
Domingue sur les têtes d’une classe d’individus, qui sont aujourd’hui les plus
ardents amis de notre révolution. 2
Né avec une âme sensible et un ardent amour pour la liberté et l’égalité,
j’ai longtemps gémi à Saint-Domingue, mon pays, sur les maux que faisait
éprouver à mes frères le despotisme le plus révoltant et qui chaque jour s’ag-
gravant davantage, ne laissait à nos cœurs d’autre ressource que le désespoir
ou une grande révolution.
Mais n’apercevant que dans un avenir très éloigné la révolution après
laquelle mon âme soupirait, je résolus de sacrifier à la cause de mes frères ma
fortune, mes jouissances et enfin les restes d’une vie dont plus de la moitié
était déjà passée sous le joug du despotisme le plus affreux.
Déterminé à tous ces sacrifices, j’eus le courage en 1782 de faire
entendre pour la première fois dans les colonies des réclamations qui firent
craindre à mes frères de couleur de me voir devenir la victime de mes senti-
ments philanthropiques. Mais ces premières réclamations adressées aux
administrateurs des colonies étant restées sans effet, je pris le parti de venir en
France à mes frais pour obtenir justice contre des vexations dans tous les
genres, devenues si odieuses qu’elles ne pouvaient plus être supportées même
par les individus les plus apathiques.
Je partis de Saint-Domingue avec mon épouse en mai (2) 1784, pour me
rendre en France, où après avoir mis ordre à mes affaires domestiques, je
342 L’aristocratie de l’épiderme
tisme et l’aristocratie des blancs nous tenaient. Et nous conçûmes dès lors les
plus grandes espérances.
En effet dès cet instant plusieurs membres de cette Société dont
quelques-uns étaient de l’Assemblée constituante travaillèrent avec le plus
grand zèle à faire triompher notre cause qui était celle de la justice et de l’hu-
manité. Différents ouvrages qui contenaient les principes les plus purs, furent
composés par plusieurs des membres de cette Société ; nous les fîmes impri-
mer et distribuer, ces ouvrages produisirent l’effet que nous en attendions, ils
faisaient connaître nos droits et préparèrent les esprits de l’Assemblée consti-
tuante à entendre la discussion que nos ennemis naturels avaient toujours
cherché à écarter sous le vain prétexte qu’il était dangereux d’établir dans les
colonies l’égalité des droits entre les citoyens de ces contrées : non seulement
ils ne voulaient pas que les hommes de couleur pussent jouir de ces droits,
mais ils voulaient encore en priver les Français européens qui n’avaient pas de
grandes propriétés et qu’ils désignaient sous le nom de petits blancs. 5
Le moment arriva enfin où il fallut porter les colonies à l’ordre du
jour pour les organiser (5) d’après les principes de notre révolution. Ce fut au
mois de mars 1790 que sortit le premier décret sur les colonies. Ce décret éta-
blissait des assemblées coloniales dont les fonctions devaient se borner à
présenter leurs vœux au corps constituant sur le régime intérieur des colonies
pour être ensuite statué définitivement par l’Assemblée nationale.
À ce décret qui contenait d’autres articles, il fallut joindre des instruc-
tions pour le mode de convocation des assemblées primaires et pour fixer les
qualités nécessaires pour être citoyen actif.
Comme c’était là le point qui devait décider de notre état politique, alors
notre sollicitude auprès de l’Assemblée nationale et du Comité des colonies
redoubla. Nous demandions que dans les instructions qui devaient fixer les
qualités nécessaires pour être citoyen actif, fut énoncé d’une manière claire et
positive, que les hommes de couleur pourraient en jouir quand ils auraient
d’ailleurs les qualités requises par la loi.
Mais comme les principes d’égalité n’étaient pas ceux que les colons
voulaient adopter et que d’un autre côté ils n’osaient manifester le contraire,
alors ils eurent recours à l’artifice et eurent le crédit de faire rédiger cet article
de manière à pouvoir l’expliquer comme ils auraient voulu dans les colonies. 6
Et malgré les représentations que nous fîmes à Barnave rapporteur du comité
des colonies, en lui observant qu’un simple doute sur cet article ferait naître la
guerre civile dans les colonies, malgré encore nos représentations au Comité
colonial sur ce même objet, l’article 4 des instructions concernant les qualités
pour le droit de citoyenneté resta toujours comme les colons l’avaient dicté et
c’est ce qui a causé les malheurs de la colonie. 7
Mais la grande difficulté était de faire passer cet article 4 des instructions
sans le laisser discuter à l’Assemblée. Les colons blancs savaient que les
Annexes 345
citoyens Robespierre, Grégoire et plusieurs autres députés que nous avions été
voir pour les prier de faire expliquer cet article, devaient demander que les
droits des hommes de couleur y fussent bien clairement énoncés. Et voici
comment nos ennemis et ceux de l’égalité s’y prirent pour tromper la bonne
foi du citoyen Grégoire et (6) celle de nos autres défenseurs. Lorsque le rap-
porteur du Comité eut fait la lecture de l’article 4 conçu en ces termes :
« Art. 4. Immédiatement après la proclamation et l’affiche du décret et de
l’instruction dans chaque paroisse, toutes les personnes âgées de 25 ans accom-
plis, propriétaires ou à défaut de propriété, domiciliées depuis deux ans dans la
paroisse et payant une contribution, se réuniront en assemblée primaire. »
Le citoyen Grégoire demanda qu’il fut expressément et nominalement
expliqué que les hommes de couleur qui auraient les qualités exigées par l’ar-
ticle 4, auraient les droits communs avec les blancs. Alors plusieurs voix des
colons blancs et même celle du rapporteur, pour assurer que leurs intentions
étaient que les hommes de couleur y étaient compris sous la désignation de
toutes les personnes ; d’après cette déclaration authentique, le citoyen
Grégoire n’insista plus et l’article resta sans autre explication. 8
Par les pièces dont vous venez, citoyens, de prendre lecture, il est bien
évident que les colons blancs étaient bien éloignés de reconnaître les droits
des hommes de couleur mais même encore que l’Assemblée nationale eut le
droit de leur concéder.
Mais ce qui est essentiel de faire connaître et de faire remarquer, c’est
que l’Assemblée coloniale de Saint-Marc qui n’avait pu se former que d’après
le décret du 8 mars et les instructions du 28 du même mois, était déjà formée
avant même l’époque où le décret qui devait l’organiser fut rendu. En sorte
qu’il résulte que les colons blancs méconnaissant l’autorité nationale,
s’étaient arrogé le droit de se constituer en assemblée coloniale qui s’attribuait
le droit de faire des lois et de faire des décrets, en un mot de rivaliser avec le
corps constituant. 9
L’Assemblée coloniale de Saint-Marc s’étant formée comme je viens de
le dire avant le décret qui autorisait et donnait le mode pour la convoquer, reçut
le décret de l’Assemblée constituante du 8 mars et les instructions du 28 du
même mois qui l’accompagnaient. Alors les craintes que nous avions témoi-
gnées ici se réalisèrent et cette Assemblée coloniale se permit non seulement
d’interpréter l’article 4 des instructions (7) pour nous refuser les droits qu’il
nous donnait, mais encore elle nous blâmait de nous être adressés à l’Assem-
blée nationale et nous défendait impérativement de nous adresser à l’avenir à
d’autres autorités que la sienne. 10
Voilà quel était l’esprit des colons blancs. Cependant le décret du 8 mars
– et les instructions qui l’accompagnaient - était pour les hommes de bonne
foi un titre pour faire jouir les personnes de couleur des droits qu’ils récla-
maient surtout d’après les explications qui suivirent la motion du citoyen
346 L’aristocratie de l’épiderme
Grégoire et qui fut consignée ainsi que l’explication dans un journal que
faisait le citoyen Garat député à l’Assemblée constituante.
À l’époque de l’envoi du décret du 8 mars dans les colonies, j’envoyais
à mes frères une instruction relative aux circonstances où ils allaient se
trouver. Je connaissais l’esprit des colons blancs et je voulais par ces instruc-
tions éviter les troubles qui ont commencé les malheurs de la colonie. 11
Mes frères les hommes de couleur ne manquèrent pas de se conformer
aux exhortations que je leur faisais pour conserver la paix dans la colonie et
ramener les colons blancs à des actions moins violentes, c’est ce que prouve
la lettre de Boisrond en date du 27 juillet 1790. 12
Mais comme tous les partis qui divisaient la colonie s’accordaient par
l’esprit du préjugé colonial à rejeter la cause des troubles sur les principes
d’égalité établis par notre constitution, lesquels disaient-ils, étaient contraires
à leur convenance locale, alors l’Assemblée constituante entraînée par l’avis
et les rapports de son Comité colonial composé presqu’en partie de colons
blancs et de négociants, abandonna les hommes de couleur à la merci des
colons blancs en les laissant maîtres absolus du sort des hommes de couleur
que Barnave, toujours rapporteur, présentait comme en très petit nombre et
presque sans possessions, et le décret du 12 octobre 1790, et surtout le consi-
dérant qui le précédait, sacrifia mes malheureux frères de couleur à tous les
caprices des colons blancs. 13
Accablés par ce coup terrible qui annonçait un sort affreux à nos frères
de couleur, abandonnés (8) depuis le mois d’avril par le citoyen de Joly notre
premier défenseur, nous nous portions tous les jours à la porte du citoyen
Grégoire notre seul consolateur et le seul défenseur qui nous restât. Ce fut à
cette époque qu’il fit paraître sa belle lettre aux philanthropes qui lui valut
l’honneur d’être pendu en effigie au Cap Français. 14
Ce fut également à cette époque que Brissot fit paraître sa lettre à
Barnave, Pétion son discours en faveur des hommes de couleur, et Clavière un
autre ouvrage, et tous successivement plusieurs ouvrages en notre faveur. 15
Etait-il étonnant qu’après cette époque et ce qu’avaient fait ces hommes
que j’écrivis à mes frères de Saint-Domingue ce que je pensais alors de ces
hommes, surtout à une époque où ils jouissaient de la réputation des plus
chauds patriotes et n’est-ce pas une grande malveillance de la part des colons
mes ennemis de prendre des expressions de la reconnaissance que je témoi-
gnais à ces hommes purs alors aux yeux de tous les patriotes et surtout aux
yeux de ceux dont ils défendaient la cause, n’est-ce pas dis-je une grande mal-
veillance de prendre mes expressions pour une preuve de coalition avec eux
lorsqu’ils sont devenus coupables deux ans après ?
Telle est cependant, citoyens, la marche de mes ennemis ; mais ce qu’il
y a de plus étrange dans leur conduite c’est d’avoir falsifié, tronqué, altéré le
sens de ma lettre du 4 mars.
Annexes 347
1o. Pour me faire paraître coupable de coalition avec des hommes qui
après avoir bien servi la cause du peuple, l’ont ensuite trahie indignement.
2o. De présenter l’action la plus civique, celle de l’offre du don
patriotique de six millions que nous fîmes en 1789, comme une action contre-
révolutionnaire.
3o. En me présentant comme une espèce de concussionnaire qui soustrait
des sommes considérables à mes frères les hommes de couleur pour en faire
mon profit et un usage exécrable.
Citoyens, c’est à vous de juger les intentions que j’ai eues en écrivant
cette lettre sur laquelle mes ennemis ont fabriqué le libelle le plus diffamatoire
contre moi et qui a surpris le civisme du citoyen Amar votre collègue, je
soumets cette lettre à votre censure en vous priant de faire attention à la
manière dont mes ennemis en ont (9) extrait différents morceaux, fait des rap-
prochements perfides, supprimé ce qui donnait le vrai sens pour en donner un
qui paraît me rendre coupable, en un mot à toutes les intentions qu’ils ont paru
avoir en décomposant cette lettre. 16
Telle est la lettre, citoyens, sur laquelle mes ennemis ont fabriqué contre
moi le libelle le plus diffamatoire. Dans cette lettre j’y parle naturellement à
mes frères des personnes qui à cette époque défendaient leur cause, je leur
nomme Brissot, Grégoire, Pétion et Clavière, je cite les ouvrages qu’ils pro-
duisirent pour la défense de leurs droits, enfin je leur parle de ces hommes
comme tout Paris en parlait alors, parce qu’à cette époque on était loin de
penser ni de prévoir que de ces quatre personnes, une seule le citoyen Grégoire
est resté constamment attaché aux intérêts du peuple et que les trois autres
auraient deux ans après trahi des intérêts qu’ils paraissaient prendre avec tant
d’énergie.
Je le demande avec confiance quel est le patriote qui, comme moi alors,
n’eût pas été la dupe de ces hommes ? Comment se fait-il donc que mes
ennemis n’aient inculpé que moi en me présentant comme l’agent d’une faction
qui n’a existé que deux ans après ma lettre écrite, surtout lorsque toute ma cor-
respondance et mes actions sont diamétralement opposées aux sentiments et
aux principes qu’ils ont manifestés depuis. Je dois donc conclure que l’envie
seule de se venger de mes soins pour défendre la cause de mes frères leur a fait
tout hasarder pour y parvenir, et les arrêtés ci-joints des Comités de marine et
des colonies, que je joins ici en sont des preuves assez convaincantes. 17
Quant au second chef d’accusation concernant les six millions du don
patriotique et les prétendues sommes extorquées à mes frères par moi, j’y
répondrai plus bas. Je prends même l’engagement de détruire tous les faits
allégués contre moi par les citoyens Page et Brulley dans leur diatribe inti-
tulée Développement des causes et des désastres de la partie française de
Saint-Domingue, diatribe qui m’a valu la détention que (10) j’éprouve depuis
cinq mois passés. 18
348 L’aristocratie de l’épiderme
personnes qui paraissaient prendre à cœur nos intérêts pour les instruire de nos
droits et nous fîmes imprimer différents ouvrages pour les faire valoir. Tous
ces ouvrages ayant répandu beaucoup de lumières sur notre cause, le décret du
15 mai 1791 fut rendu, mais ce décret dont l’exécution aurait pacifié les colo-
nies ne fut point envoyé officiellement par la perfidie des ministres d’alors et
tout fut mis en usage par les colons blancs pour qu’il ne fût jamais exécuté.
Les forces décrétées pour son exécution ne furent pas organisées, les commis-
saires nommés pour le porter furent retenus à Brest sous différents prétextes,
des lettres incendiaires furent écrites dans les colonies pour engager les colons
blancs à repousser ce décret. 23
Enfin Blanchelande écrivit à l’Assemblée constituante qu’à la nouvelle
de ce décret tous les différents partis s’étaient réunis pour le repousser. 24
L’Assemblée coloniale en fit autant. 25 Les hommes de couleur furent partout
proscrits, ils furent impitoyablement fusillés dans plusieurs parties de la
colonie 26 parce qu’ils réclamaient l’exécution de ce décret ; enfin les troubles
furent à leur (12) comble, mais qui les fit naître, ce ne fut pas assurément la
lettre que j’écrivis alors à mes frères. Je la soumets ici. 27
Les colons qui croyaient ne servir que leur orgueil et leur aristocratie, en
refusant d’obéir au décret du 15 mai et en usant de mesures désastreuses qui
leur furent proposées pour le faire retirer, servaient au contraire les vues per-
fides des ennemis de la nation ainsi que je l’ai expliqué dans mes réflexions
imprimées en janvier 1792. 28
Cependant pressés par les dangers de la révolte, les colons blancs pro-
mirent aux hommes de couleur de reconnaître le décret du 15 mai quand il
arriverait officiellement, et en attendant ils passèrent des concordats qui
garantissaient les droits des hommes de couleur.
L’effet de ces concordats se faisait sentir avantageusement et tant qu’ils
ne furent pas attaqués les quartiers où ils s’étaient passés de bonne foi res-
tèrent paisibles, malgré que l’Assemblée coloniale et Blanchelande les
eussent désapprouvés. 29
Enfin malgré tous nos efforts, malgré ceux des hommes qui paraissaient
toujours les plus voués à notre cause, malgré tous les ouvrages imprimés
que nous firent distribuer pour faire connaître la perfidie des colons blancs et
du gouvernement qui se coalisèrent alors ensemble 30, l’intrigue, la cabale des
royalistes, des prêtres 31, des contre-révolutionnaires l’emportèrent et le décret
du 15 mai fut retiré et celui du 24 septembre prit sa place. Tous ces partis
ensemble eurent encore le crédit de faire appeler ce décret constitutionnel,
quoiqu’il fût rendu après la clôture de l’acte constitutionnel.
Quelque désastreux et terrible que fut ce décret, il ne m’ôta pas l’es-
pérance de le voir changer et loin d’abattre mon zèle pour la cause de mes
frères, il ne fit que l’augmenter. J’écrivis donc à mes frères pour relever leurs
espérances abattues en leur recommandant toujours d’obéir aux décrets et de
350 L’aristocratie de l’épiderme
donner aux colons blancs cet exemple de soumission aux décrets nationaux et
de ne s’adresser qu’à l’Assemblée nationale pour leurs réclamations, qu’elle
seule pouvait tout. 32 Telle fut toujours la morale que j’ai prêchée à mes frères.
Après l’époque du décret du 24 septembre toutes mes espérances se
tournèrent vers la première législature et malgré l’épuisement de nos finances
nous n’en continuâmes pas moins, mes collègues et moi, nos sollicitations et
les dépenses (13) où les impressions et autres frais nous entraînaient. J’étais
celui sur qui le fardeau des dépenses tombait. La vente de mon habitation et
les dispositions de mes fonds me mettait à même de les faire. 33
Nos espérances nous parurent d’autant mieux fondées à cette époque
que tout annonçait les progrès de l’esprit public pour la révolution et que le
parti qui avait combattu nos droits avait fait connaître toute sa perfidie dans
la révision de l’acte constitutionnel et dans l’action infernale de la journée du
Champ de Mars.
Mais ce qui nous flattait le plus et paraissait nous faire toucher au terme
de nos malheurs, c’est que nos défenseurs se multipliaient à l’infini, que tout
Paris et surtout la Société des Jacobins n’annonçait qu’un vœu, celui de nous
rendre les droits que la nature et les lois nous donnaient.
Enfin nos espérances furent remplies et un des premiers décrets mar-
quants de l’Assemblée législative fut celui du 24 mars ou la loi du 4 avril qui
réintégrait les hommes de couleur dans tous leurs droits. Ce décret rendu à
l’unanimité ne laissait plus à nos âmes que le sentiment délicieux de voir la
paix se rétablir dans les colonies, surtout d’après ce que quelques colons
blancs nous disaient.
Pénétrés de reconnaissance pour la nation généreuse qui nous régénérait
nous fîmes hommage à ses représentants des sentiments dont nos cœurs
étaient pénétrés 34.
Ce premier devoir rendu au peuple souverain dans les personnes de ses
représentants nous nous occupâmes à solliciter l’exécution de ce décret et
j’écrivis à mes frères la lettre qui se trouve page 72 de ma correspondance. 35
Cette lettre fait assez connaître le projet de rétablir l’ancien régime, elle
démasque aux yeux de mes frères cette faction qui, cachant ses projets per-
fides sous le masque de partisans des hommes de couleur voulaient les égarer
et les mener à la contre-révolution. Je fis plus je suivis ici un de ces hommes
perfides qui avait su capter mes frères je surpris sa correspondance dans les
colonies, elle était toute contre-révolutionnaire, j’en dénonçais l’auteur,
Ouvière. Ces lettres furent déposées à la mairie par les commissaires de ma
section à qui je les avais remises, et qui étaient chargés d’après ma dénoncia-
tion d’arrêter ce contre-révolutionnaire qui indépendamment de sa (14)
coupable correspondance avait entrepris ici un journal le plus aristocratique
sous le titre du Scrutateur Politique. Je dénonçais encore ce journal et j’en fis
arrêter les six premiers numéros. Les pièces ci-jointes confirment ces faits. 36
Annexes 351
pire que celui qu’ils éprouvaient sous l’ancien régime. C’est ce que j’ai prouvé
dans un mémoire manuscrit remis au Comité de salut public au commence-
ment du mois d’avril 1793. Vous verrez également les mêmes principes dans
les lettres de mes frères et les différents arrêtés qu’ils ont pris et qu’ils m’ont
adressé.
Je dois maintenant prouver que loin d’avoir pressuré mes frères et leur
avoir tiré beaucoup d’argent comme m’en ont accusé les citoyens Page et
Brulley dans leur libelle intitulé Développement des causes des troubles etc.,
j’ai au contraire diminué ma fortune de plus de la moitié.
Je tirerai mes preuves de mes lettres et de celles de mes frères. Ma lettre
du 4 mars sur laquelle mes ennemis ont fabriqué leur libelle est une preuve de
mon désintéressement (16) et combien peu je comptais faire un objet de spé-
culation sur mes frères. Voici comment je m’exprime dans cette même lettre
page 9, ligne 10 : « Je sais par une triste expérience que ma fortune se sent
considérablement de toutes les dépenses où cette affaire m’a entraîné. Je ne
regrette rien puisque c’est pour le bonheur de mes frères, mais au moins qu’ils
achèvent ce que nous avons si heureusement commencé, qu’ils viennent enfin
au secours de leurs frères épuisés et de la nation, afin qu’elle les reconnaisse
pour ses dignes enfants. » Est-ce là le langage de quelqu’un qui soutire de l’ar-
gent à ses frères et qui veut spéculer sur eux ?
Voici dans la même lettre une preuve que je ne comptais pas spéculer sur
mes frères. Ils m’avaient écrit de tirer sur eux afin d’avoir des fonds pour les
frais d’impression et voici ce que je leur disais page 17 de ma lettre du 4 mars,
ligne 10 : « Je me suis appuyé pour tirer ces traites de votre dernière, qui me dit
que vous allez vous assembler pour me faire l’envoi d’une somme pour suivre
notre affaire. Au reste si j’étais assez malheureux pour n’avoir pas votre
confiance pour l’emploi de ces fonds, je vous supplie de nouveau de m’ad-
joindre quelqu’un je vous le demande même en grâce, et vous ne pouvez vous
en dispenser. » Est-ce là encore le langage d’un homme qui veut former des
spéculations de gains sur ses frères, moi qui leur demandais à plusieurs fois
de m’adjoindre quelqu’un pour l’emploi des fonds qu’ils m’auraient adressés ?
Voici encore une preuve que je n’ai pas pressuré mes frères, elle se
trouve dans une lettre de Labuissonnière en date du 6 juillet 1792. 41 Voici ce
qu’il m’écrit : « Je vois avec plaisir que vous ne vous êtes jamais ralenti de
l’ardeur que vous vous êtes imposée d’être utile à notre malheureuse patrie,
soit par vos sages conseils, soit par vos peines, soit enfin par des débours
continuels etc. »
Est-ce ainsi qu’on écrit à un homme que l’on a gorgé d’or comme le
disent de moi les citoyens Page et Brulley ?
Une lettre de Boisrond en date du 12 juillet 1792, page 85, offre de nou-
velles preuves que j’étais en avance de tous les frais faits ici pour la cause (17)
de mes frères et qu’il s’occupait à m’en faire rembourser.
Annexes 353
Enfin si après avoir lu dans presque toutes les lettres de mes frères les
preuves de mon désintéressement vous passez à ma dernière en date du 1er août
1793, vous y remarquerez page 120 de ma correspondance. Vous trouve-
rez page 123 ligne 3 cette phrase : « Croyez-moi chers compatriotes croyez en
celui qui a sacrifié sa fortune et sa santé pour votre bonheur. » Je le demande
celui qui aurait tiré des sommes considérables de ses frères oserait-il leur
écrire ainsi ? surtout dans une lettre que je recommande de rendre si publique
que chacun de mes frères en ait un exemplaire. N’était-ce pas le moyen de me
faire couvrir d’infamie en me faisant démentir, si j’eusse reçu des fonds consi-
dérables ? 42
Voilà je crois des preuves authentiques que les citoyens Page et Brulley
m’ont calomnié lorsqu’ils ont dit que j’avais soutiré des sommes considéra-
bles des hommes de couleur.
Il me reste à prouver qu’ils m’ont également calomnié sur l’objet des six
millions du don patriotique qu’ils ont prétendu que je demandais pour moi ou
pour en faire un usage exécrable. Je livrerai mes preuves de ma propre lettre
du 4 mars sur laquelle les citoyens Page et Brulley ont voulu donner le change
sur l’emploi des sommes que je demandais pour le don patriotique. Si vous
parcourez cette même lettre vous verrez que nulle part je ne laisse aucun doute
sur la destination de ces fonds.
Si vous parcourez cette lettre vous trouverez page 7, 1er paragraphe, ce
qui suit :
« Nous avons offert à différentes fois un don patriotique de six millions
en votre nom. Jusqu’à ce jour, vous nous avez privés d’effectuer cette offre.
Elle vous paraîtra peut-être forte, mais observez que tous les Français ici ont
été contraints de donner le quart de leurs revenus en don patriotique et qu’il
faut l’effectuer pour jouir des droits de citoyen actif. Quel mérite ne vous
ferez-vous pas d’en faire autant, avant les blancs et avant que l’Assemblée
nationale ne le décrète (18) pour les colonies ? N’imaginez pas que ce soit
acheter la justice de l’Assemblée nationale puisqu’ici tous les citoyens y ont
été obligés ; que d’ailleurs ce n’est qu’à des marques de désintéressement
qu’on montre son patriotisme en venant au secours de la nation. »
D’après une explication aussi claire aussi positive sur la destination de
ces six millions, comment mes ennemis les citoyens Page et Brulley ont-ils pu
se permettre dans leurs libelles de vouloir me prêter des vues coupables ?
Page 8, ligne 7 de la même lettre vous lirez ceci :
« Je vous observe que vous êtes les seuls Français qui n’ayez pas fait
encore des sacrifices à la nation. Hâtez-vous donc de faire ce que vous auriez
dû faire il y a longtemps. »
Est-ce là le langage d’un contre-révolutionnaire ? est-ce là le langage
d’un homme qui veut disposer de ces sommes pour lui ?
Page 9, ligne 16, vous lirez ce qui suit :
354 L’aristocratie de l’épiderme
tive une compagnie d’hommes de couleur formée par les soins de Ferrand
homme de couleur et les miens. J’ai fait à cette époque un don patriotique de
500 livres tous les ans pendant tout le temps que durerait la guerre. Voyez-en
la preuve dans les pièces insérées dans ma correspondance page 114 et 115.
À la section des Tuileries que j’ai habitée un an, j’ai donné 300 livres
pour armer un homme lors de la réquisition pour aller dans la Vendée.
J’ai été désigné dans ma section pour loger un Fédéré de ceux qui sont
venus des départements pour accepter la Constitution et j’ai eu chez moi le
député de Bergues (nom illisible). 49
À l’époque du décret de la Convention contre les députés traîtres, j’ai été
pendant les trois jours sous les armes malgré la faiblesse de ma santé fort affai-
blie depuis le mois d’octobre 1792.
Lors de la dernière réquisition des chevaux, j’ai offert les miens et j’ai
abandonné au profit des veuves et des enfants des défenseurs de la patrie et
pour les pauvres de la section (23) cette somme était de 650 livres.
J’ai prêté tous les serments exigés par la loi et par les décrets nationaux.
J’ai été le soixantième de ma section à accepter la Constitution en mon
nom et celui de mes frères de couleur.
Jamais aucun propos incivique n’a sorti de ma bouche. 50
Voilà citoyens ce que j’ai fait, voilà mes actions, daignez les apprécier.
Attaqué du scorbut depuis plusieurs années, cette maladie s’est aggravée
et depuis le mois d’octobre 1792, après une maladie furieuse, je me sentis si
affaibli que je me vouais à la vie la plus sédentaire. Par l’ordonnance de mon
chirurgien je ne sortais que très peu et j’étais depuis cette époque si ignoré que
beaucoup de personnes que j’avais connues me crurent à l’Amérique. Borné
dans ma solitude à instruire mes frères de tout ce qui leur importait de savoir,
j’ai écrit mes Réflexions sur les causes des désastres de Saint-Domingue. Cet
ouvrage publié à l’époque de la déclaration de la guerre avec l’Angleterre
n’annonce pas que je voulais favoriser les projets de Pitt, car je les ai dévoilés
à l’époque.
J’écrivis ma lettre circulaire à mes frères, page 107 de ma correspon-
dance et celles suivantes à Pinchinat et Sonthonax. Toutes ces lettres et celle
insérée page 120 sont assurément des preuves non équivoques de mon
civisme, de mon amour pour la république une et indivisible, de mon attache-
ment à la Constitution qui assure à jamais les droits de mes frères puisqu’elle
est fondée sur les principes de liberté et d’égalité.
1789
– 5 mai : réunion des États généraux.
– 20 juin : Serment du Jeu de Paume. Des colons de Saint-Domingue, bien
que non membres de l’Assemblée Nationale (AN), prêtent serment.
– 4 juillet : 6 députés de Saint-Domingue sont admis à représenter la popula-
tion blanche de Saint-Domingue : Cocherel, Gouy d’Arsy,
Thébaudières, Larchevesque-Thibaud, Perrigny et Gérard.
– 8 juil. : J.R. à Angoulême rencontre Jarnac.
– 29 juil. : J.R. donne procuration à Jarnac pour défendre les gens de couleur
aux États Généraux.
– Juil. : le gouverneur de Saint-Domingue, du Chilleau, est destitué. De
retour à Paris, il devient membre du club Massiac.
– Août : J.R. arrive à Paris avec sa femme, « après le 12 août». J.R. ren-
contre Guffroy aux abords de l’AN.
– 12 août : les députés de St-Domingue mettent en garde leurs commettants
contre des libres de couleur revenant de France et les presse de former
des assemblées coloniales.
– 20 août : la Société correspondante des colons français annonce publique-
ment son existence et se réunit à l’Hôtel Massiac, d’où son nom de club
Massiac, place des Victoires à Paris. À Bordeaux, David Gradis, négo-
ciant bordelais et planteur à St-Domingue, crée une Société américaine
en correspondance avec le club Massiac.
– 21 août : Clarkson, membre de la Société des Amis des Noirs de Londres,
arrive à Paris.
– 25 août : Larchevesque-Thibaud part à St-Domingue organiser les assem-
blées coloniales.
– 26 août : l’AN vote la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
J.R. invité au club Massiac.
– 27 août : le club Massiac décide d’empêcher les gens de couleur se trouvant
en France de retourner à St-Domingue.
– 29 août : des gens de couleur se réunissent à Paris chez l’avocat Joly.
– 30 août : une insurrection d’esclaves en préparation à St-Pierre de la
Martinique est éventée et réprimée avant d’avoir éclaté.
– Août-septembre : J.R. rencontre l’abbé Cournand, vraisemblablement
dans cette période. Ce dernier le présente à Grégoire.
– Septembre : le nouveau gouverneur Peynier arrive à Saint-Domingue.
– 3 sept. : l’assemblée générale de la Société des gens de couleur, présidée par
Joly, rédige un cahier de doléances.
– 7 sept. : Vincent Ogé invité au club Massiac.
360 L’aristocratie de l’épiderme
– 9 sept. : les citoyens de couleur invités au club Massiac avec Joly. L’A.N.
décide que le Comité d’agriculture formera une commission pour s’oc-
cuper des colonies.
– 10 sept. : réponse du club Massiac à Joly.
– 12 sept. : l’assemblée générale de la Société des gens de couleur prend le
nom de citoyens de couleur, colons américains.
– 14-27 sept. : Clermont-Tonnerre préside l’AN.
– Septembre-octobre : Cournand publie Requête présentée à Nosseigneurs
de l’AN, en faveur des gens de couleur de l’île de St-Domingue, et le dis-
tribue aux députés.
– 22 sept. : l’AN admet deux députés de la population blanche de la
Guadeloupe, Curt et Galbert.
– 22 sept. : les assemblées générales de la Société des Citoyens de couleur
(SCC), convoquées les 3, 8, 12 et 22 septembre, publient leur cahier de
Doléances.
– Entre le 14 septembre et le 19 octobre : J.R. propose aux présidents succes-
sifs de l’AN, Clermont-Tonnerre, Mounier et Freteau, une pétition en
faveur des gens de couleur. J.R. publie Réclamations adressées à l’AN
par les personnes de couleur, propriétaires et cultivateurs de la colonie
française de St-Domingue.
– Entre le 22 septembre et le 17 octobre, J.R. rencontre la SCC.
– 27 sept. : accord entre les députés des colons et le ministre de la marine sur
un projet d’assemblées coloniales qui sera porté à Saint-Domingue par
Saint-Germain, secrétaire du ministre.
– 28 septembre-9 octobre : Mounier préside l’AN.
– 5-6 octobre : journées populaires. Le peuple décide de faire venir le roi et
l’AN à Paris.
– Octobre : au Cap, Bacon de la Chevalerie organise une milice patriotique.
Expédition punitive contre Barbé de Marbois responsable du départ de
du Chilleau. Barbé s’enfuit le 26. L’assemblée du Cap décide l’exclu-
sion des gens de couleur des assemblées coloniales, décide d’empêcher
leur retour de France, ouvre les droits politiques aux « petits-blancs ».
Peynier, gouverneur, crée une ligue les Pompons blancs.
– 6 oct. : la proposition de créer un comité de la marine, pour s’occuper des
colonies, est refusée.
– 10-27 oct. : Freteau préside l’AN.
– 14 oct. : une délégation des Juifs d’Alsace, Lorraine et des Evêchés est
reçue à l’AN. Décret qui admet deux députés de la population blanche
de la Martinique, Dillon et Moreau de Saint-Méry.
– 18 oct. : la SCC publie Adresse à l’AN pour les citoyens libres de couleur
des Isles et Colonies françaises.
– 18-24 oct. : campagne de dénonciation contre Moreau de St-Méry au Cap.
Annexes 361
– 2 nov. : lettre des négociants du Havre au club Massiac contre les droits des
libres de couleur.
– 6 nov. : lettre des négociants de La Rochelle au club Massiac proposant un
compromis avec les libres de couleur.
– 19 nov. : Ferrand de Beaudière assassiné par les « colons patriotes» du
Sud, Valentin de Cullion à leur tête.
– 23 nov. : la SCC est reçue par le Comité de vérification de l’AN, chargé de
vérifier les demandes de représentation. Grégoire est membre de ce
Comité. La SCC publie Lettre des Citoyens de couleur des Isles et colo-
nies françaises à MM. Les membres du Comité de vérification.
– 23 nov.-4 déc. : Clarkson présente la SCC, dont J.R., à Boisgelin qui
préside l’AN.
– 24 nov. : la Société des Amis des Noirs (SAN), présidée par Condorcet,
reçoit la SCC et vote une motion en faveur de la demande de représen-
tation des citoyens de couleur à l’AN.
– 26 nov. : à l’AN, Curt propose la création d’un comité des colonies.
– 27 nov. : la SCC publie Dernières observations des citoyens de couleur des
Isles et colonies françaises.
– 28 nov. : les Réclamations des Nègres libres, colons américains demandent
une représentation à l’AN. La Société américaine D. Gradis envoie une
adresse à l’AN pour le maintien de la traite.
362 L’aristocratie de l’épiderme
1790
– Janvier : le ministre de la marine, La Luzerne, renouvelle les primes à la
traite. À St-Domingue, le gouverneur Peynier prépare l’application du
projet La Luzerne : cens électoral réservé aux propriétaires résidents.
L’assemblée générale convoquée pour le 25 mars.
– 17 janv. : l’assemblée du Cap déclare nulle l’ordonnance du gouverneur.
Annexes 363
1791
– 26 janvier : J.R. publie Observations sur l’origine et les progrès du
préjugé des colons blancs contre les hommes de couleur.
– Février : départ de troupes pour les Antilles.
– 23 fév. : exécution d’Ogé et de Chavannes au Cap.
– 1er mars : Moreau de St-Méry, Considérations présentées aux vrais amis
du repos et du bonheur de la France.
– 3 mars : la SCC demande à être reçue à l’AN.
– 4 mars : Dillon empêche la réception de la SCC. Lettre de J.R. à ses frères
de St-D. Arrivée des régiments d’Artois et de Normandie à Port-
au-Prince, soulèvement des « colons patriotes» qui tuent Mauduit.
Blanchelande se réfugie au Cap.
– 5 mars : Caradeux et Praloto prennent le pouvoir à Port-au-Prince.
– 8 mars : adresse à l’AN des Jacobins d’Angers en faveur des citoyens de
couleur.
– 9 mars : circulaire des Jacobins d’Angers aux sociétés populaires en faveur
des citoyens de couleur.
– Mars-avril : campagne des Jacobins en faveur des citoyens de couleur
menée par ceux d’Angers.
– Entre le 9 et le 18 mars : les adresses des Jacobins d’Angers sont lues aux
Jacobins de Paris.
366 L’aristocratie de l’épiderme
– 10 juin 1705 : une ordonnance différencie « les Nègres libres » des « libres
de couleur ».
– 7 octobre 1733 : exclusion des sang-mêlé, et des colons ayant épousé des
femmes de couleur, des charges de judicature et des offices de la milice
(décision du gouverneur).
– 14 mars 1741 : service du piquet imposé aux « Nègres et Mulâtres libres »
(décision du ministre de la marine).
– 1746 : le gouverneur de Saint-Domingue, Larnage, autorise les personnes
se réclamant de « race indienne » de se déclarer dans la classe des
Blancs.
– 7 août 1758 : « Nègres et Mulâtres libres » perdront leur liberté s’ils
hébergent des Nègres marrons. Leur dénonciateur recevra un tiers du
produit de leur vente comme esclave (Arrêt du Conseil du Cap).
– 24 septembre 1761 : les actes notariés préciseront l’origine des « Nègres,
Mulâtres ou Quarterons libres » (Arrêt du Conseil du Cap).
– 17 avril 1762 : défense aux boulangers de vendre du pain aux gens de
couleur même libres (ordre du juge de police du Cap en temps de
détresse).
– 29 mai 1762 : interdiction du port d’armes aux « Nègres et Mulâtres libres »
(décision du gouverneur).
– 20 juin 1762 : milices composées de trois corps séparant « 1o les Blancs,
2o les sang-mêlé et 3o les Mulâtres et Nègres libres». Les grades d’offi-
ciers supérieurs seront réservés aux Blancs (Ordre du gouverneur Bory).
Annexes 369
Introduction
8. Voir infra, IIe Partie, les projets de la Société des Amis des Noirs de Paris.
9. J. Raimond a raconté l’échec de cette tentative initiale des libres de couleur
pour faire valoir leurs droits, dans son premier Mémoire à Castries, qu’il présenta en
1786, Archives d’Outre Mer, (Aix-en-Provence) Col. F3 91.
10. Luc NEMOURS, « J. Raimond, le chef des gens de couleur et sa famille »,
DES s.d. G. Lefebvre. Un résumé sous le même titre a été publié par les soins de
Lefebvre dans AHRF, 1951, p. 257-62, après la disparition brutale de l’auteur ; Yvan
DEBBASCH, Couleur et liberté. Le jeu du critère ethnique dans un ordre juridique
esclavagiste, Paris, 1967, seul le t. 1 est paru ; John GARRIGUS, The Free Colored
Elite of St-Domingue. The Cas of J. Raimond, 1744-1801, 1990. L’auteur a eu l’ama-
bilité de me faire connaître ce texte non publié. Du même, « Sons of the Same Father »,
in C. Adams ed., Visions and Revisions of Eighteenth Century France, Univ. Press
Pensylvania, 1997.
11. Général PAMPHILE DE LACROIX, La Révolution de Haïti, (1819) Paris,
Karthala, 1995. Pierre PLUCHON éditeur de cette réédition, a ajouté des notices bio-
graphiques dont celles de Raimond et de Moreau de St-Méry.
12. Lois et Constitutions des Colonies Françaises de l’Amérique sous le Vent,
Paris, 1781-90, 6 vol. Sur sa rencontre entre Moreau et le physiocrate Le Mercier de
la Rivière voir L.P. MAY, Le Mercier de la Rivière. Aux origines de la science écono-
mique, CNRS, 1975 et F. GAUTHIER, « Le Mercier de la Rivière et les colonies
d’Amérique », Revue d’Histoire des Idées Politiques, Les Physiocrates et la
Révolution française, no 20, 2004, p. 261-283.
PREMIÈRE PARTIE
Chapitre premier
1. AN, AF II 302, 2511, Compte que Julien Raimond rend au Comité de sûreté
générale de toutes ses actions et écrits depuis l’année 1784 vieux style, 16 ventôse
an II - 6 mars 1794, manuscrit de 23 p., p. 1 et 2. Sur le séjour de Raimond en France
de 1785 à 1789 voir L. NEMOURS, J. Raimond, le chef des gens de couleur, sous la
direction de G. Lefebvre, Paris, multigraphié, Institut d’Histoire de la Révolution fran-
çaise, Sorbonne, s.d., 63 p. ; du même, « J. Raimond, le chef des gens de couleur et
sa famille », art. cit. ; J. GARRIGUS, The Free Colored Elite of Saint-Domingue. The
Case of Julien Raimond, 1744-1801, op. cit.
2. Duc de CASTRIES, Le maréchal de Castries, serviteur de trois rois, Paris,
1979 ; J. TARRADE, Le commerce colonial de la France à la fin de l’ancien régime.
L’évolution du régime de l’exclusif de 1763 à 1789, Paris, 1972.
3. B. MAUREL, « Une société de pensée à Saint-Domingue. Le Cercle des
Philadelphes au Cap-Français », Franco-American Review, winter 1938, p. 143-167 ;
J. Mc CLELLAN III, Colonialism and Science. Saint-Domingue in the Old Regime,
Baltimore-London, 1992. En 1789, le ministre de la Marine La Luzerne accorda au
Notes 373
Cercle une subvention de 10 000 livres et lui offrit le titre et les privilèges de Société
Royale des Sciences et des Arts du Cap.
4. Voir G. DEBIEN, Les Colons de Saint-Domingue et la Révolution. Essai sur
le Club Massiac, Paris, 1953, p. 62.
5. BRISSOT, Réplique de Brissot à Louis Marthe Gouy défenseur de la traite
des Noirs et de l’esclavage, Paris, 10 février 1791, 54 p., réed. EDHIS, t. 8, no 5, p. 51.
6. AN ADXVIIIc 116, Discours sur la nécessité d’établir à Paris une Société
pour concourir, avec celle de Londres, à l’abolition de la traite et de l’esclavage des
Nègres, 19 février 1788, 32 p., et Réglements de la Société des Amis des Noirs, s.d.,
46 p., réed. EDHIS, op. cit., t. 6, no 1 et 3.
7. Le registre des séances de la Société a été publié par M. DORIGNY,
B. GAINOT, La Société des Amis des Noirs, 1788-1799, Paris, UNESCO-UNICEF,
1998 : « La Société des Amis des Noirs était ainsi un parfait exemple de lobby colo-
nial qu’il serait absurde d’ériger en adversaires des colonies », Introduction, p. 38. Sur
l’antiesclavagisme des physiocrates voir M. DUCHET, Anthropologie et Histoire au
siècle des Lumières, Paris, 1971, réed. 1977, chap. 3, p. 136 et s.
8. CONDORCET, Au corps électoral contre l’esclavage des Noirs, s.d., 6 p.,
rééd. EDHIS, t. 6, no 7. Membre de l’assemblée de la noblesse du bailliage de Mantes,
Condorcet obtint que la demande d’abolition de la traite et de l’esclavage figure dans
le cahier de doléances. Il le mentionna à la séance de la Société des Amis des Noirs du
31 mars 1789 en présentant la liste des cahiers de bailliage qui avaient formulé une
telle doléance, voir M. DORIGNY, B. GAINOT, La Société des Amis des Noirs, op.
cit., p. 215.
9. AN ADXVIIIc 116, Lettre de la Société des Amis des Noirs à M. Necker avec
la réponse de ce ministre et Réplique à M. Necker, juillet 1789, réed. EDHIS, t.7, no 2.
10. Archives Parlementaires, t. 8, 20 juin 1789, p. 138, intervention de
Gouy d’Arsy. L’Assemblée décida l’admission provisoire de douze députés de
Saint-Domingue. Gouy, Perrigny, Larchevesque-Thibaud, Reynaud, Rouvray,
Bodkin-Fitz-Gérald et Thébaudières prêtèrent le serment du Jeu de Paume et signèrent
comme « députés de Saint-Domingue ».
11. Lanjuinais, député du Tiers de Rennes, n’était pas membre de la Société des
Amis des Noirs. On sait que ce débat avait eu un antécédent à l’occasion de la révision
de la Constitution des États-Unis en 1787, lorsque les députés des États esclava-
gistes obtinrent une surreprésentation proportionnée à la population dans laquelle les
esclaves étaient inclus pour les trois cinquièmes de leur nombre. La critique de
Lanjuinais, reprise par Mirabeau, exprimait le refus d’inscrire l’esclavage dans la for-
mation même de la députation des colonies. Sur la question de l’esclavage dans la
formation des États-Unis voir E. MARIENSTRAS, Les Mythes fondateurs de la
Nation américaine, Paris, 1977 et Nous, le Peuple, Paris, 1988.
12. AP, t. 8, 27 juin 1789, p. 164 ; 3 juillet, p. 186, vote sur le nombre de députés
de Saint-Domingue et élection le 4 juillet, p. 190 ; voir aussi Procès-Verbal de
l’Assemblée Nationale, Paris, Baudouin, 1789, t. 2, no 14 et 15. Sur l’admission des
députés de Saint-Domingue voir A. BRETTE, Les Constituants, Paris, 1897, reprint
Megariotis, Genève, p. 187. Larchevesque-Thibaud retourna à Saint-Domingue en
août 1789 et fut remplacé par Reynaud de Villeverd. D’autres colonies se firent ensuite
374 L’aristocratie de l’épiderme
d’Angoulême n’aboutit pas. Ceci permet de dater le retour de Raimond à Paris plus
vraisemblablement au mois d’août, voir J. GODECHOT, « De Joly et les gens de
couleur libres », AHRF, 1951, p. 50.
21. AN, AFII 302, 2511, Compte que rend Julien Raimond au Comité de sûreté
générale..., op. cit., p. 2. Clermont-Tonnerre présida l’Assemblée constituante du 17
au 30 août, puis du 9 au 14 septembre et Mounier du 28 septembre au 9 octobre, ce qui
permet de dater approximativement la demande de Raimond.
22. AN, ADXVIIIc/118, Observations adressées à l’Assemblée nationale par
un député des colons américains, s. l., s. d., texte de J. Raimond publié vraisemblable-
ment début décembre 1789, 15 p. Raimond publie dans ce texte les lettres qu’il a
reçues de La Luzerne en réponse à ses courriers.
23. Voir Y. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., p. 131 ; J. RAIMOND,
Correspondance de J. Raimond avec ses frères de Saint-Domingue, Paris, an II, impri-
merie du Cercle Social, Lettre de François Raimond à son frère, 1er octobre 1789 :
« Labadie a écrit à M. Necker ; vous êtes à Paris, tâchez de lui parler... ”, p. 3.
24. Ainsi, Raimond ne chercha pas à rencontrer le club Massiac, contrairement
à ce qu’avance DEBIEN, Les colons de Saint-Domingue..., op. cit., p. 157, mais y fut
invité par le ministre lui-même et par son secrétaire.
25. G. DEBIEN, Les colons de Saint-Domingue..., op. cit., p. 157.
26. AN, AFII 302, 2511, Compte que rend Julien Raimond..., op. cit., p. 2.
27. A. COURNAND, Requête présentée à nosseigneurs de l’Assemblée natio-
nale en faveur des gens de couleur de l’île de Saint-Domingue, imprimé, s.l., s.d.,
11 p., permet d’être daté grâce au témoignage de J. Raimond en septembre-octobre
1789, puisqu’il fut distribué aux députés à Versailles, donc avant que l’Assemblée ne
suive le roi, à Paris, à la suite des Journées des 5 et 6 octobre. L’Assemblée tint sa pre-
mière séance à Paris le 19 octobre. Par ailleurs, le 14 octobre, Freteau qui présidait
l’Assemblée fit référence au texte de Cournand. Ces faits et témoignages permettent
de dater la publication de ce texte avant le 14 octobre. Reprint EDHIS, t.4, no 3, qui le
date par erreur en 1790. Sur Cournand, voir Y. DEBBASCH, Couleur et liberté, Paris,
Dalloz, 1967, p. 117.
28. COURNAND, op. cit., p. 1.
29. Ibid., p. 2.
30. Ibid., p. 3.
31. Ibid., p. 6.
32. Ibid., p. 7.
33. Ibid.
34. Ibid., p. 11.
35. Sur la langue de la liberté voir le travail essentiel de J. GUILHAUMOU,
La Langue politique et la Révolution française, Méridiens-Klincksieck, 1989.
36. Ibid., p. 10.
376 L’aristocratie de l’épiderme
Chapitre 2
contre l’esclavage en 1788. Son père était membre du club Massiac, mais pas lui.
FROSSARD publia La cause des esclaves nègres et des habitants de la Guinée portée
au tribunal de la justice, de la religion et de la politique, Paris, 1788, 2 vol. On aura
noté que Grégoire n’a pas cité la Société des Amis des Noirs parmi les défenseurs des
gens de couleur.
14. Voir Le Moniteur, no 76, du 20 au 22 octobre 1789, p. 80 ; AP, t. 9, séance
du 22 octobre. DEBIEN mentionne la réception par l’Assemblée de l’Adresse de la
Société des colons américains, op. cit., p. 163 ; J. GODECHOT la mentionne aussi
dans « Mémoires de E. de Joly », AHRF, 1946, p. 314, mais curieusement DEB-
BASCH semble l’ignorer, Couleur et liberté, op. cit., ainsi que M. DORIGNY, La
Société des Amis des Noirs, op. cit.
15. Si l’Adresse ne parlait qu’au nom des métissés libres, le Cahier de doléan-
ces qui fut déposé à l’Assemblée constituante, mais ne fut pas lu, précisait par contre
défendre les droits de tous les libres de couleur, métissés et nègres libres : « Article 2 :
La classe d’hommes libres comprend non seulement tous les Blancs, mais encore tous
les Créoles de couleur, soit Nègres libres, Mulâtres, Quarterons et autres. » Pourquoi
cette restriction dans l’Adresse ?
16. Voir Le Moniteur, 30 septembre-1er octobre 1789, p. 542, séance de
l’Assemblée du 30 septembre, Projet de Necker et no des 5-8 octobre 1789, séance du
6 octobre, p. 14.
17. Ibid., Extrait du procès-verbal de l’Assemblée générale des Citoyens libres
de couleur des îles et colonies françaises, 31 octobre 1789, 19 p.
18. G. DEBIEN, Les colons de Saint-Domingue et la Révolution. Essai sur le
Club Massiac, Paris, chap. 7, émet l’hypothèse d’une rencontre entre la Société des
Amis des Noirs et Raimond dès l’été 1789 si ce n’est dès le début de l’année 1789,
bien que Raimond « ait prétendu le contraire ». Toutefois, pour s’en tenir aux sources,
Le Patriote français n’a mentionné l’existence du problème posé par les citoyens de
couleur qu’à partir du 21 octobre 1789 et non avant. Par ailleurs, le registre de la
Société des Amis des Noirs mentionne pour la première fois la présence de citoyens
de couleur à sa séance du 24 novembre 1789 : Raimond, Ogé, Fleury, Honoré de Saint-
Albert et du Souchet de Saint-Réal (orthographié par erreur Dufourchet de Naucel),
voir La Société des Amis des Noirs, op. cit., p. 245. Ce qui permet de dater la rencon-
tre entre Raimond, Brissot et la Société des Amis des Noirs dans le courant des mois
d’octobre ou novembre 1789. Voir aussi la critique argumentée des hypothèses de
Debien par Y. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., p. 146, n. 6.
19. On notera l’intérêt que Marat porta à cette séance du 22 octobre, alors qu’il
était pourchassé par des membres de la Commune de Paris et que son Ami du Peuple
ne put paraître. On peut lire dans le no 40, daté du 27 octobre 1789 et resté à l’état de
manuscrit, dans la rubrique « Assemblée nationale, séance du 22 octobre » : « Une
députation des Noirs domiciliés aux Iles admise à la barre, l’orateur qui était à leur tête
a peint les vexations que les colons blancs continuent d’exercer sur les hommes de
couleur ; il a ajouté que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a réveillé
dans le cœur des habitants de l’autre hémisphère le sentiment de la liberté. Il a en
conséquence demandé que les hommes de couleur ne fussent pas davantage privés de
l’exercice des droits politiques et qu’ils eussent part à la représentation nationale ; il a
378 L’aristocratie de l’épiderme
offert à l’état au nom de ses commettants le quart de leurs revenus qui se montent à six
millions et un cautionnement de la cinquantième partie de leurs biens pour l’acquit de
la dette publique. Le discours et les offres de cette députation ont excité des applau-
dissements universels », MARAT, Œuvres Politiques, 1789-1793, réédition par J. DE
COCK et C. GOETZ, Bruxelles, Pôle Nord, 1989, 10 vol., 1, p. 358.
20. AN, ADXVIIIc118, Réclamations des Nègres libres, colons américains,
s.l., s.d., non signé, 3 p. Les citoyens de couleurs commentent ce texte dans leur assem-
blée du 31 octobre, ce qui permet de le dater entre le 22 et le 31 octobre. Il fut publié
dans Le Moniteur du 29 novembre 1789, t.2, p. 259. Voir aussi A.P., t.10, 28 nov.,
p. 329.
21. Ce que DEBIEN admet aisément, op. cit., p. 173 ; J. BINOCHE également
dans « Les députés d’outre-mer pendant la Révolution française, 1789-1799 », AHRF,
1978, no 231, p. 56. On notera d’ailleurs qu’en dehors de ce texte, la Société des
Nègres libres, si elle a jamais existé, ne s’est plus manifestée.
22. ROBESPIERRE, Œuvres, t. 9, Discours à la Convention du 24 avril 1793,
p. 459.
23. AN, ADXVIIIc 118, Extrait du Procès-verbal de l’Assemblée générale des
citoyens libres de couleur des îles et colonies françaises, 31 octobre 1789, 19 p.
Interlude
Chapitre 3
1. AN ACXVIIIc 118, Lettre des citoyens de couleur des isles et colonies fran-
çaises à MM. les Membres du Comité de Vérification de l’Assemblée nationale, Paris,
23 nov. 1789, 24 p., signée Joly, Raimond, Ogé, du Souchet de Saint-Réal, Honoré
de Saint-Albert habitant de la Martinique, Fleury ; ce texte a été distribué aux députés,
cf. A.P., t. 10, annexe de la séance du 28 nov.
2. Ibid., p. 3, 6, 10, souligné dans le texte.
3. Cette analyse audacieuse ne semble pas avoir retenu l’attention de l’historio-
graphie, à l’exception d’A. CÉSAIRE qui l’a rencontrée, non chez Raimond, mais
Notes 379
chez Robespierre, à l’occasion du grand débat de mai 1791 : « Mais, dira-t-on, que
devient dans tout cela le système servile ? Robespierre risqua ce qui semblait un para-
doxe et par un raisonnement tout moderne, où il substituait à la notion de lutte des
races la notion de lutte des classes, il s’enhardit à soutenir que ce n’était pas l’octroi
des droits politiques aux mulâtres qui ébranlerait le système esclavagiste, mais très
exactement le contraire », Toussaint Louverture. La Révolution française et le pro-
blème colonial, Paris, 1961, p. 106.
4. AN ADXVIIIc 118 Dernières observations des citoyens de couleur des isles
et colonies françaises, Paris, 27 nov. 1789, mêmes signatures que pour le texte précé-
dent, 19 p., p. 3.
5. Ibid., p. 13.
6. Ibid., p. 13.
7. Ibid., p. 14, souligné dans le texte.
8. Compte que Julien Raimond rend au Comité de sûreté générale, 6 mars
1794, op. cit., p. 4.
9. La Société des Amis des Noirs, op. cit., Registre de la séance du
24 novembre 1789, p. 246. Le nom de Du Souchet de Saint-Réal a été mal déchiffré et
est devenu Dufourchet de Naucel qu’il convient de corriger, p. 245.
10. Ibid., p. 246. La note 459, p. 247 date de façon erronée la réception de la
Société des Citoyens de Couleur à l’Assemblée constituante qui eut bien lieu le
22 octobre et non comme il est écrit ici le 3 décembre. Thomas Clarkson était un des
fondateurs de la Société pour l’abolition de la traite et de l’esclavage créée à Londres
en 1787. Il vint à Paris en juillet 1789 pour suivre la campagne de la Société des Amis
des Noirs en faveur de l’abolition de la traite. Il rencontra Raimond en octobre et porta
un intérêt visible à la Société des Citoyens de Couleur ; voir F. THESEE, « Autour
de la Société des Amis des Noirs, Clarkson, Mirabeau et l’abolition de la traite »,
Présence Africaine, Paris, 1983, no 125.
11. Ibid., p. 249. À la lecture de ces faits la légende d’un Grégoire fondateur,
ou membre depuis sa création, de la Société des Amis des Noirs tombe d’elle-même.
Le texte de Grégoire sera analysé un peu plus loin.
12. Voir n. 45. AN ADXVIIIc 118, Opinion de M. de Cocherel, député de
Saint-Domingue, sur l’admission des Nègres et Mulâtres libres aux Assemblées pro-
vinciales, Paris, s.d., 4 p. Les A.P. ont confondu ce texte avec un autre de Cocherel,
publié ultérieurement. Cette erreur a été notée par L. DESCHAMPS, Les colonies
pendant la révolution. La Constituante et la réforme coloniale, Paris, 1898, p. 212.
13. Opinion de M. Cocherel, op. cit., p. 3.
14. Ibid.
Chapitre 4
2. Ce texte fut publié dans Le Moniteur, avec Les Réclamations des Nègres
Libres, le 29 novembre, no 99.
3. Le décret du 22 septembre 1789 créa la députation de la Guadeloupe. Curt et
Galbert furent élus par le comité des colons séant à Paris, voir A. BRETTE, Les
Constituants, op. cit., p. 190. A.P., t. 10, séance du 26 nov. 1789, intervention de Curt
p. 263.
4. A.P., t. 10, 26 nov. 1789, p. 263-267.
5. Le Moniteur du 2 décembre 1789. Sur la révolte en Martinique voir
D. GEGGUS, « Esclaves et gens libres de couleur de la Martinique pendant l’époque
révolutionnaire et napoléonienne : trois instants de résistance », trad. de l’anglais,
Revue Historique, 1996, no 597, p. 105-132. Cette remarquable étude fait état de la
rapidité avec laquelle les esclaves et libres de couleur utilisèrent les informations
qu’ils obtinrent sur les évènements révolutionnaires en France. En effet, les organisa-
teurs de cette révolte qui, éventée fin août, ne put se développer, avaient habilement
répandu la rumeur d’un décret d’abolition de l’esclavage que le gouverneur Vioménil
devait faire appliquer. Ce fut la répression que l’on appliqua immédiatement.
6. Sur Nairac voir E. SAUGERA, Bordeaux port négrier, op. cit., p. 230.
7. AD XVIIIc 118, 11 p., signée De Joly, Raimond aîné, Ogé jeune, du Souchet
de Saint-Réal, Honoré de Saint-Albert, Fleury, commissaires et députés des citoyens
de couleur.
8. Ibid., p. 3, souligné dans le texte.
9. Ibid., p. 2.
10. Il s’agit de Moreau de Saint-Méry.
11. Ibid., p. 4.
12. Ibid., p. 5.
13. Ibid.
14. Ibid., p. 6.
15. Ibid., p. 6.
16. Le gouverneur du Chilleau fut destitué en juillet 1789. À son retour à Paris
il devint membre du club Massiac.
17. Ibid., souligné dans le texte, p. 12. Rappelons que le gouverneur Larnage
avait statué en 1746 que les descendants des indigènes, c’est-à-dire les Indiens
caraïbes, seraient réputés blancs ; le ministre supprimait ce statut.
18. Ibid., souligné dans le texte, p. 14.
19. Ibid., p. 14.
20. Ibid., p. 16.
21. Ibid., p. 17.
22. Ibid., p. 19.
23. AP, t.10, p. 347 et s.
24. Grégoire s’était visiblement concerté avec la Société des Citoyens de
Couleur puisqu’il soutient leur demande. Il est curieux que DEBIEN n’ait pas noté le
rapprochement entre Grégoire et la Société des Citoyens de Couleur et interprète l’in-
tervention du premier comme un soutien objectif au club Massiac, Les colons de
Saint-Domingue, op. cit., p. 175.
25. Charles de Lameth était député de la noblesse d’Arras aux États Généraux
Notes 381
DEUXIÈME PARTIE
Chapitre premier
Chapitre 2
21. Ibid., p. 45-47. Les compagnies formeront un seul corps et non des régi-
ments distincts selon la couleur de l’épiderme.
22. L’affranchissement est facilité par la suppression de la fiscalisation et léga-
lisé par l’enregistrement. L’état civil, certes catholique que propose le curé Grégoire,
n’en donne pas moins un caractère public à l’existence des Nègres, c’est-à-dire des
esclaves, en les faisant sortir de la comptabilité privée des maîtres.
23. C’est le concubinage des Blancs à l’encontre des femmes esclaves qui sera
puni. La volonté de responsabiliser les Blancs est évidente bien que limitée au cas
où « le père est connu ». Toutefois, la part de la société réside dans la reconnaissance
de la liberté de l’enfant et dans la publicité de ces comportements, considérés jusque-
là comme privés par les maîtres.
24. La législation discriminatoire à l’égard des libres de couleur est abrogée.
25. Le préjugé de couleur, rendu anticonstitutionnel, devient un délit puni par
la loi.
26. Ibid., p. 45.
27. Ibid., p. 50, n. 24.
Chapitre 3
1. Observations d’un habitant des Colonies sur le Mémoire en faveur des gens
de couleur ou sang-mêlés de Saint-Domingue et des autres îles françaises de
l’Amérique, adressées à l’Assemblée Nationale par M. Grégoire, curé d’Emberménil,
député de Lorraine, anonyme, s.l., 16 décembre 1789, 68 p., signé des lettres
P.U.C.P.D.D.L.M.
2. Ibid., p. 5.
3. Ibid., p. 3, souligné dans le texte.
4. Ibid., p. 11, souligné dans le texte.
5. Ibid., p. 12.
6. Ibid., p. 18.
7. Ibid., p. 19.
8. Ibid., p. 20, souligné dans le texte.
9. Ibid., p. 22, souligné dans le texte.
10. Voir Y. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., Livre 1, chap. 3, Pour
un aménagement du critère de couleur, p. 106-117. Nous reprendrons cette question
un peu plus loin.
11. Ibid., p. 25.
12. Ibid., p. 41 et 36.
13. L. SALA-MOLINS, Le Code Noir ou le calvaire de Canaan, PUF, 1987,
p. 108 et 200.
14. Observations d’un habitant des Colonies, op. cit., p. 59.
15. Ibid., p. 64.
16. Terme propre aux sociétés esclavagistes qui signifie : né libre par opposi-
tion à l’enfant d’une esclave, « né » esclave ou plus exactement sans naissance sociale
384 L’aristocratie de l’épiderme
Chapitre 4
1. Ce texte peut être daté du tout début du mois de janvier car Grégoire l’a
signalé à la Société des Amis des Noirs le 15 janvier 1790, La Société des Amis des
Noirs, op. cit., p. 262. Ce fut Grégoire qui finança la publication du texte de Cournand,
voir Compte que Julien Raimond rend au Comité de sûreté générale, op. cit. : « Et le
citoyen Grégoire fut obligé et me rendit le service de payer au citoyen Simon impri-
meur une somme de 750 livres pour un ouvrage qu’avait fait le citoyen Cournand pour
répondre à la diatribe de Moreau de Saint-Méry », p. 11. Raimond avait alors des dif-
ficultés financières. On devine les liens amicaux qui s’étaient établis entre les trois
hommes.
2. Ibid., p. 3.
3. Ibid., p. 4.
4. Voir l’étude d’un déplacement de cet ordre, chez les physiocrates, par
F. MARKOVITS, L’ordre des échanges. Philosophie de l’économie et économie du
discours au XVIIIe siècle en France, Paris, PUF, 1986 ; voir aussi F. GAUTHIER,
« Mably critique de l’économie politique despotique. Physique sociale contre liberté
en société », Études Jean-Jacques Rousseau, 1999, no 11, p. 195-220.
5. Ibid., p. 6.
6. Ibid., p. 6 et 7.
7. Voir n. 2 de l’introduction. Las Casas débuta sa vie en Amérique comme
colon ayant une encomienda travaillée par des Indiens asservis. Ce fut progressive-
ment qu’il prit conscience de la violence coloniale et mena une lutte pour la justice et
la défense des droits des Indiens. Il renonça alors à son encomienda et se consacra à
cette cause. Il raconte qu’à l’époque où il était colon, il avait envisagé d’employer des
esclaves africains en Amérique et fit son autocritique : « ... comme il le vit et le vérifia
par la suite, la captivité des Noirs était aussi injuste que celle des Indiens », Histoire
des Indes, III, chap. 129, p. 626. Cette autocritique a été retournée par ses ennemis
esclavagistes, comme le fait ici l’Anonyme deux siècles après, pour tenter d’affaiblir
la lutte menée par Las Casas en le rendant responsable d’une justification de la mise
en esclavage des Africains en Amérique. Sur cette étonnante calomnie, qui dure tou-
jours, en plus du travail essentiel de M. Bataillon, voir Las Casas, Très brève relation
Notes 385
de la destruction des Indes, 1552, traduit et réédité par Maspero/La découverte, 1979,
Introduction par R.F. Retamar, p. 29-30 et M. MAHN-LOT, B. de Las Casas, Paris,
CERF, 1997.
8. Observations d’un habitant des Colonies sur le Mémoire en faveur des Gens
de couleur..., op. cit., p. 54.
9. Ibid., p. 10.
10. Ibid., p. 10. Souligné dans le texte.
11. Ibid., p. 12.
12. Ibid., p. 13-14.
13. Ibid., p. 15.
14. Voir Le Moniteur, no 126, 26 décembre 1789, p. 480 et no 131 du 31 décem-
bre, p. 520. Le texte de la pièce a été réédité par E. VARIKAS, Côté femmes éditions,
1989.
15. Ibid., p. 15. L’Anonyme avait ridiculisé les amis des Citoyens de couleur en
les traitant « d’écrivains à tout prix, de Petits-Maîtres, de Femmes à vapeur »,
Observations d’un habitant des Colonies..., op. cit., p. 47.
16. Ibid., p. 16. La seconde partie du texte de Cournand s’intitule : « Suivent les
bévues de l’Anonyme dans ses Observations sur le Mémoire de M. Grégoire », p. 17
à 37.
17. Il le précisa dans un texte postérieur, M.L.E. MOREAU DE SAINT-MÉRY,
député de la Martinique à l’Assemblée nationale, Considérations présentées aux vrais
amis du repos et du bonheur de la France, à l’occasion des nouveaux mouvements de
quelques soi-disant Amis des Noirs, Paris, Impr. Nationale, 1er mars 1791. Faisant le
récit de la demande de représentation par la Société des Citoyens de Couleur, il écrit :
« Les titres ainsi fabriqués par les gens de couleur furent remis au Comité de vérifica-
tion des pouvoirs de l’Assemblée nationale qui ne les adopta pas. Mais M. l’abbé
Grégoire, membre de ce Comité, à l’aide de matériaux que M. Raymond mulâtre lui
avait communiqués, fit un mémoire en faveur de la prétention des hommes de couleur
et fulmina contre les colons. Je pris la plume alors (Note 1 : Au mois de décembre
1789), & je démontrai, du moins je le crois, les inconvénients majeurs de l’opinion que
manifestait M. l’abbé Grégoire », p. 9.
18. Nicolas Louis François de Neufchâteau fut aussi député du Tiers-état (de
Toul) aux États généraux et siégeait à l’Assemblée constituante.
19. L.N. Berthe, Dictionnaire des correspondants de l’Académie d’Arras,
Arras, 1969.
20. On trouve une copie des mémoires de Raimond dans les papiers de Moreau
de Saint-Méry, Arch. Col. F3 91 f 177. DEBBASCH, op. cit., a noté ce fait, p. 157,
note 1.
21. Cette information est fournie par MARAT, L’Ami du Peuple, no 22,
2 octobre 1789, réédition de Cock-Goëtz, op. cit., t. 1, p. 224. L’avocat Joly que nous
avons rencontré avec la Société des Citoyens de Couleur fut également membre de ce
conseil. Marat fut poursuivi par la Commune de Paris et son journal interdit du
8 octobre au 5 novembre 1789, voir « Le guide de lecture » du t. 1 des Œuvres de
Marat, p. 29 et s.
22. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., chap. 3, p. 107. Dans les années
386 L’aristocratie de l’épiderme
Chapitre 5
Commune était aussi à la Société des Amis des Noirs depuis le 4 mars 1788, c’est sans
doute la raison pour laquelle une lettre de remerciement était inutile, ce qui n’était pas
le cas des quatre autres membres. Voir aussi Le Moniteur, 16 février 1790, p. 374, qui
fait état de l’échec de la demande des citoyens de couleur auprès de la Commune.
Chapitre 6
culier chez CONDORCET, Esquisse d’un tableau historique des progrès de l’esprit
humain, écrit en 1793 et publié en 1804.
31. Ibid., p. 109.
32. Ibid., p. 111.
33. J.M. DEVEAU, Le commerce rochelais face à la Révolution française.
La correspondance de J.-B. Nairac, 1789-1790, La Rochelle, 1989, p. 198.
34. J.-L. DUVAL, Souvenirs sur Mirabeau et les deux premières assemblées
législatives, Paris, 1832, cité dans MIRABEAU, Les bières flottantes, op. cit.,
Introduction, p. 10.
35. La Société des Amis des Noirs, op. cit., séance du 22 mars 1790, p. 280. La
publication du texte de Mirabeau était encore au programme éditorial de la Société en
juin 1790 mais ne se fit pas, voir Adresse aux Amis de l’humanité par la Société des
Amis des Noirs sur le plan de ses travaux lue au Comité le 4 juin 1790 et imprimée par
son ordre, Paris, s.d., 4 p., p. 2, reprint EDHIS, op. cit., t. 8, no 3.
Chapitre 7
33. AULARD, ibid. ; DEBIEN, ibid. Son père, le marquis de Beauharnais, fut
gouverneur des Iles du Vent de 1757 à 1761, lorsque Le Mercier de la Rivière fut inten-
dant de la Martinique.
34. AULARD, ibid., p. XLIX. A. BRETTE, Les Constituants, op. cit., p. 189.
35. AULARD, ibid., p. XLIV.
36. Ibid., p. LI. Voir aussi B. MAUREL, Le Vent du large, op. cit., p. 155 précise
que Gérard fut présenté par ses amis Lameth, d’après sa correspondance, et s’y trou-
vait en février 1790.
37. Ibid., p. LXII.
38. Ibid., p. LXIV. Moreau y resta-t-il ? nous l’ignorons, mais rappelons qu’il
se retrouva dans la Société de 1789, avec Mirabeau, Sieyès et Condorcet entre autres,
à sa création en avril 1790.
39. Ibid., p. LXVI ; BRETTE, Les Constituants, op. cit., p. 253 ; B. MAUREL,
op. cit., p. 163.
40. Ibid., p. 381, indication fournie par Le Patriote Français du 23 novembre
1790.
41. Société des Amis des Noirs, op. cit., séance du 5 février 1790, p. 273. La
Société des Amis de la Constitution est dénommée ici « club de la Révolution ».
42. Ibid., séance du 23 janvier 1790, p. 264. Précisons que, parmi les quatre
personnes nommées, seul Grégoire était présent à cette séance. On peut penser que les
trois autres avaient notifié d’une manière ou d’une autre leur avis.
43. AULARD, op. cit., p. XLIII, LIII, LXIX.
44. Voir à ce sujet Y. BENOT, La Révolution française et la fin des colonies, op.
cit., chap 10, « Dans le miroir truqué des historiens ». Ce chapitre brosse un tableau de
l’occultation du problème colonial dans l’historiographie de la Révolution française.
45. H. DESCHAMPS, Les colonies pendant la Révolution, op. cit., p. 58.
46. L. LECLERC, « La politique et l’influence du club de l’Hôtel Massiac »,
AHRF, 1937, p. 343-63.
TROISIÈME PARTIE
Chapitre premier
Chapitre 2
1. AN, DXXV 56, 549, Correspondance de Julien Raimond avec ses frères de
Saint-Domingue et les pièces qui lui ont été adressées par eux, Paris, Imprimerie du
Cercle Social, l’an deuxième de la République française, 136 p., avec un « Avertis-
sement », une « Pétition aux représentants du peuple français composant le Comité de
sûreté générale » et une « Conclusion ». La correspondance comprend des lettres de
ses frères et amis de Saint-Domingue et des pièces qu’ils y ont jointes, des lettres
et circulaires de Julien Raimond envoyées à Saint-Domingue, de 1789 à 1793.
L’« Avertissement » précise que cette publication a été faite cinq décades après l’arres-
tation de Raimond en septembre 1793 : la publication date de la mi-novembre environ.
2. On trouvera un récit assez détaillé dans Thomas MADIOU, Histoire d’Haïti
de 1492 à 1846, 1847, réédition, Port-au-Prince, Deschamps, 1989, t. 1, Livre 3, 1789,
p. 45-52.
3. RAIMOND, Correspondance avec ses frères, op. cit., note 2 p. 41.
4. Ibid., Lettre no 6 de Labadie p. 41., 17 mai 1791. L’année est visiblement
erronée et il faut lire 1790. Labadie était un homme âgé et malgré de nombreuses bles-
sures, il en réchappa.
5. La Société des Amis des Noirs, op. cit., p. 266. À cette même séance fut lu
un article de la Gazette Universelle qui mentionnait ce massacre dans son no du
29 janvier, n. 525, p. 268.
6. Correspondance de J. Raimond à ses frères, op. cit., Lettre de François
Raimond, 16 décembre 1789, p. 6. Nous ignorons quand J. Raimond reçut ce courrier.
7. MADIOU, Histoire d’Haïti, op. cit., t. 1, p. 51.
8. Correspondance de Raimond, op. cit., p. 10.
9. MADIOU, op. cit., p. 53.
10. Ibid., p. 54.
11. Correspondance de Raimond, op. cit., p. 36. Note rédigée par les corres-
pondants de Raimond, pour éclairer cet événement auquel Suire fait allusion dans sa
lettre.
12. Correspondance de Raimond, op. cit., Lettre no 5 des libres de couleur de la
partie du Sud à J. Raimond, 23 juillet 1790, lettre de Suire jointe, p. 36, (souligné dans
le texte).
13. Ibid., p. 35. Cette lettre datée du 23 juillet 1790 est signée par les libres de
couleur suivant : Rémarais, Braquehais, Bleck, N. Morel, Et. Bouet, Narcisse Rollain,
Massé, S. Glezit, Elie Boury et André Rigaud.
14. Ibid., Une lettre jointe de Dubreuil de Foureaux, membre de l’assemblée de
Saint-Marc pour la partie Sud, datée du 13 mai 1790, précise que l’assemblée provin-
ciale du Sud convoqua les libres de couleur pour leur annoncer les décrets des 28 et
30 avril et l’interdit du port d’armes : « On leur lu les décrets de l’assemblée générale,
auxquels ils furent d’abord sensibles aux larmes, n’ayant, dirent-ils avec vérité, jamais
fait un mauvais usage de leurs armes, ils ne pouvaient deviner pourquoi on leur défen-
dait de les porter », p. 21.
15. Ibid., cet extrait a été envoyé à Raimond par Louis Boisrond, un de ses cor-
respondants du Sud, joint au courrier envoyé à la fin du mois de juillet 1790, p. 53-57.
Notes 395
16. Ibid., p. 54, passages soulignés dans le texte publié par Raimond.
17. Ibid., p. 55-56.
18. Ibid., p. 56.
19. Compte que rend J. Raimond, op. cit., p. 5.
20. Correspondance de J. Raimond, op. cit., lettre no 3, p. 11-15. La date du
décret est « 24 mars 1790 », erreur manifeste, il faut lire 28 mars. On sait que Raimond
publia sa correspondance alors qu’il était en prison, ce qui l’a sans doute empêché de
relire les épreuves avant l’impression.
21. Lire : Pour les en empêcher.
22. Correspondance de Raimond, op. cit., p. 11-13.
23. C’est de cette manière que l’historiographie a interprété les propositions de
Raimond jusqu’à présent. L. Nemours présente J. Raimond comme « le chef des gens
de couleur » et limite son action à la seule défense de leurs droits. Certains historiens,
comme Debien, utilisent même le terme de mulâtres pour désigner les citoyens de
couleur, alors que ce mot est une insulte dans la langue du préjugé de couleur, comme
nous l’avons maintes fois rencontré. Pour notre part, nous ne partageons pas ces inter-
prétations parce qu’elles ne correspondent ni aux écrits ni aux actes de Raimond.
24. Correspondance de J. Raimond, op. cit., lettre no 4, p. 15-17. Souligné dans
le texte.
25. Une note de J. Raimond précise que le nom de « colons américains » était
« la qualification que s’étaient donnée les hommes de couleur depuis la révolution »,
p. 17. Nous avons vu que la Société des Citoyens de Couleur de Paris se dénommait
aussi « colons américains », nés en Amérique par opposition aux colons français qui,
bien souvent, ne faisaient que passer dans les colonies pour y faire fortune et retour-
ner en France.
26. Ibid., p. 19 et 31-34. Souligné dans le texte.
27. Lire exclusif au lieu d’excessif.
28. Ibid., p. 25. Suivent les noms de trente sept signataires.
29. Voir DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., p. 177.
30. Correspondance de J. Raimond, op. cit., lettre no 30, p. 128, qui reproduit
le texte voté par l’assemblée de Saint-Marc le 28 mai 1790.
31. Ibid., p. 130-132. Il s’agit bien du même Brulley qui, avec Page et Legrand,
devinrent les dirigeants du réseau colonial en France à partir de juillet 1792 et furent
les calomniateurs, entre autres, de Julien Raimond en 1793.
32. Voir à ce sujet MADIOU, Histoire d’Haïti, op. cit., p. 56-58. De nom-
breuses sources concernant Saint-Domingue, dans cette période, sont accessibles dans
les Archives Parlementaires, op. cit., t. 19 : rapport de Barnave à l’Assemblée consti-
tuante, 12 octobre 1790, p. 546-70. Il s’agit de lettres du gouverneur Peynier et
d’extraits des registres de délibérations de l’assemblée générale de Saint-Marc datés
d’avril à août 1790.
33. Correspondance de J. Raimond, op. cit., lettre de Louis Boisrond, 27 juillet
1790, p. 30, souligné dans le texte.
34. Ibid., p. 32-34. La déclaration des Citoyens de Couleur au gouverneur n’est
pas datée, mais elle est antérieure au 23 juillet 1790, date de la lettre à laquelle elle est
jointe.
396 L’aristocratie de l’épiderme
35. Sur ces évènements, voir MADIOU, Histoire d’Haïti, op. cit., p. 59 et s.
36. Les ségrégationnistes désignaient les sang-mêlé par la couleur jaune ou
rouge en fonction du degré de métissage.
37. Nous avons vu que les députés des colons blancs étaient au courant de ce
projet d’Ogé formulé depuis décembre 1789, dans leur lettre du 11 janvier 1790,
Correspondance secrète des colons, op. cit. Voir IIIe Partie, chap. 1, 3, p. 243.
38. Le gouverneur Peynier démissionna et nomma par interim Blanchelande le
5 novembre 1790 avant de quitter Saint-Domingue le 8 novembre. Voir Le Moniteur,
no du 4 janvier 1791, p. 26.
39. MADIOU, op. cit., p. 75 et s. Le public français fut informé de l’arrestation
d’Ogé par Le Moniteur : le no du 12 janvier 1791, publie une proclamation de
Blanchelande, datée du 12 novembre 1790, contre Ogé et ses partisans et une lettre du
commandant de Santo-Domingo, datée du 9 novembre, faisant état de l’arrestation
d’Ogé et de 16 de ses amis à Hinche, p. 90 ; le no du 14 janvier 1791 publie une lettre
de Port-au-Prince datée du 18 novembre 1790, faisant état de la livraison d’Ogé et de
ses amis, à l’assemblée du Cap, comme « criminels de lèse-nation », p. 105 ; le no du
14 février 1791 publie une lettre du Cap datée du 12 décembre 1790, indiquant que
225 personnes ont été arrêtées comme complices d’Ogé au Cap, p. 370.
40. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., p. 179 et s., insiste sur les aspects
novateurs de la tentative d’Ogé.
41. Correspondance de J. Raimond, op. cit., Remarais, électeur des Cayes,
Bleck et André Rigaud signent une lettre des citoyens de couleur à J. Raimond, datée
du 23 juillet 1790, p. 39 ; Remarais signe une lettre datée du 27 juillet 1790, p. 28 ;
Pinchinat écrit à J. Raimond le 9 avril 1792, p. 68 ; J. Raimond écrit à Pinchinat le
10 février 1792, p. 112.
42. MADIOU, op. cit., p. 81. Rigaud et Pinchinat furent libérés à l’occasion de
la prise de Port-au-Prince, par les « colons patriotes » dirigés par Praloto le 5 mars
1791, et réussirent à fuir la ville, p. 84. Blanchelande se réfugia au Cap, Mauduit fut
massacré par les « colons patriotes », et Caradeux, membre de l’assemblée de Saint-
Marc, succéda à Blanchelande : les provinces de l’Ouest et du Sud avaient fait
sécession.
43. Correspondance de J. Raimond, op. cit., lettre de François Raimond à son
frère Julien, écrite de Bainet et datée du 25 mai 1792, p. 50. L’année 1792 est une
erreur manifeste, il s’agit de 1791, comme le contexte de la lettre l’indique : exécution
d’Ogé et prise de Port-au-Prince, datées de février et mars 1791. Le public français fut
informé de cette insurrection des libres de couleur du Sud par Le Moniteur, no du
14 janvier 1791, qui publie une lettre de Port-au-Prince, datée du 18 novembre 1790,
faisant état de ce mouvement, de l’échec de la première tentative de répression et
annonce l’arrivée de forces du gouverneur, conduites par Mauduit. Cet article permet
de dater l’insurrection du Sud de novembre 1790.
44. Voir IIIe Partie, chap. 2, 4, p. 275.
45. Correspondance de J. Raimond, op. cit., note de J. Raimond, p. 48.
46. Ibid., p. 48. Lettre de François Raimond, datée du 25 mai 1792. Le contexte
laisse penser que c’est une erreur et qu’il faut lire 1791. C’est à ce passage de la lettre
de François Raimond que Julien a ajouté la note que nous venons de lire.
Notes 397
47. J. Raimond précise avoir dépensé 50 000 livres en frais d’impression essen-
tiellement et n’avoir reçu de ses correspondants de Saint-Domingue que 100 pistoles,
soit 1 000 livres oou francs : « Ces cent pistoles sont les seuls fonds que j’aie jusqu’à
présent touchés sur plus de cinquante mille francs de déboursés pour la défense des
droits de mes frères, en frais d’impression et autres indiqués dans mes lettres »,
Correspondance, p. 50.
48. Correspondance de J. Raimond, op. cit., p. 44.
49. Ibid., lettre de P. Labuissonnière, Léogane, 27 août 1791, p. 58.
50. Ibid., p. 59-60. Coustard avait été gouverneur de Saint-Domingue de 1784
à 86.
51. Voir p. 254-5.
52. Ibid., p. 60.
53. On peut rapprocher cet abandon à la force de l’insurrection des esclaves à
venir du roman de Vincent PLACOLY, Frères Volcans. Chronique de l’abolition de
l’esclavage, Paris, La Brèche, 1983. Sous forme d’un journal, un colon créole raconte
l’abolition de l’esclavage en 1848 à la Martinique, conscient d’avoir été corrompu par
l’esclavage et d’être inapte à la liberté inconnue d’une telle société.
54. Voir IIe Partie, chap. 2, 3.
55. MADIOU, Histoire d’Haïti, op. cit., t. 1, p. 71 et s. imagine des portraits
psychologiques d’Ogé et de Raimond construits sur cette interprétation : « Après ces
séances orageuses, il [Ogé] rentrait chez lui la tête brûlante et parlait à Raymond, son
timide ami, d’une régénération soudaine dans la colonie. Raymond calmait sa fougue
révolutionnaire et lui disait que le temps amènerait les améliorations que désirait tout
homme ami de l’humanité. » Les sources manquent toutefois pour prouver la teneur
de leurs propos. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., écrit : « Le groupe parisien,
il [Ogé] l’a quitté parce que trop confiants dans la vertu intrinsèque de la règle de droit,
ses compagnons s’étaient enfermés, avec un bel optimisme, dans un combat purement
juridique. Le refus aux Iles de la législation métropolitaine a convaincu Ogé que c’est
à la force de seconder le droit là où il est nié, dans les Antilles et non point en France »,
p. 180. L’auteur estime pertinent d’opposer l’action directe armée d’Ogé à l’action
juridique de Raimond.
56. MADIOU, op. cit., p. 71.
57. Compte que rend Julien Raimond au Comité de sûreté générale, op. cit.,
6 mars 1794, p. 10.
Chapitre 3
Chapitre 4
çaises » s’interrompit après le no du 9 avril 1791, nous n’en connaissons pas les
raisons.
39. Observations, op. cit., p. 45.
Chapitre 5
1. AN, AD XVIIIc 120, Pétition nouvelle des citoyens de couleur des îles fran-
çaises à l’Assemblée nationale, précédées d’un Avertissement sur les manœuvres
employées pour faire échouer cette Pétition, et suivie de Pièces justificatives, Paris,
18 mars 1791, chez Desenne, Bailly et au bureau du Patriote Français, 19 p., p. 4. Le
texte de cette pétition devait être présenté à l’Assemblée, lorsque la Société en fit la
demande le 3 mars, et fut publié après l’échec de cette demande. L’avertissement est
signé par Raimond aîné, Raimond jeune (son frère), Fleury, Honoré Saint-Albert,
Dusoulchay, Porsade et Audiger.
2. Ibid., p. 10-11.
3. Le Moniteur, no du 5 mars 1791, séance du 3 mars ; AP, séance du 3 mars.
4. AP, séance du 4 mars 1791, p. 665.
5. Ibid., p. 666. Dillon ayant accusé la Société des Amis des Noirs d’être res-
ponsable des troubles dans les colonies, cette dernière lui répondit par une lettre qui
fut lue à l’Assemblée le 5 mars et Moreau de Saint-Méry se chargea de lire la réponse
de Dillon, Le Moniteur du 7 mars. Par ailleurs, la Société des Amis des Noirs publia
La Société des Amis des Noirs à Arthur Dillon, député de la Martinique à l’Assemblée
nationale, Imprimerie du Patriote Français, 10 mars 1791, 11 p., signé Clavière,
Brissot, texte dans lequel elle répondait aux calomnies répandues par Dillon.
6. Pétition nouvelle des citoyens de couleur, 18 mars 1791, op. cit., « Aver-
tissement », p. IV.
7. Ibid., p. V-VI.
8. Ibid., p. 18. Ce texte était déjà paru dans le Patriote Français du 28 février
1791.
9. Ibid., p. VI, n. 1.
10. Voir S. PIOLLET, N. PIQUIONNE, D. ROUX, « Milscent-Créole historien
de la Révolution de Saint-Domingue, 1790-1794 », in F. GAUTHIER éd., Périssent
les colonies plutôt qu’un principe ! Paris, Société des Études Robespierristes, 2002,
p. 23-42. Voir aussi Y. BENOT, La Révolution française et la fin des colonies, op. cit.,
qui a attiré l’attention sur cet intéressant acteur de la période révolutionnaire, p. 249 et
s. Curieusement, l’historiographie n’a accordé de l’intérêt à cet acteur de la période
révolutionnaire que tout récemment. Jusque-là, on n’en connaissait guère plus que ce
qu’en avait signalé A. AULARD dans La Société des Jacobins, op. cit., qui précise sa
présence aux Jacobins de Paris. Le fait que Le Créole Patriote ait été le journal d’ac-
cueil des Jacobins n’a encore donné lieu à aucune étude.
11. AN, ADXVIIIc 116, Adresse de la Société des Amis des Noirs à l’As-
semblée nationale, à toutes les Villes de commerce, à toutes les Manufactures, aux
Colonies, à toutes les Sociétés des Amis de la Constitution, 10 juillet 1791, 318 p., qui
regroupe les adresses de la campagne menée par les Amis de la Constitution d’Angers
402 L’aristocratie de l’épiderme
dans tout le pays et par la Société des Amis des Noirs, reprint EDHIS, t. 9. Les textes
des Amis de la Constitution d’Angers se trouvent p. 229 et 171.
12. Ibid., Adresse d’Angers, p. 230. Ce texte est signé par le président des Amis
de la Constitution d’Angers, Joseph Delaunay et par le secrétaire, Benaben.
13. La Société des Amis de la Constitution d’Angers, 9 mars 1791, p. 172. Ce
texte est signé par Delaunay et Benaben.
14. Ibid., p. 174.
15. Correspondance de J. Raimond, op. cit., p. 70. Milscent publia, sous le
pseudonyme de Michel Mina mulâtre, cette pétition. Pour une analyse du texte de
Milscent voir le mémoire de maîtrise de D. ROUX, Milscent-Créole ou la lutte contre
le préjugé de couleur et l’esclavage, 1790-1793, Université Paris 7-Denis Diderot,
1999, p. 44-90. La lettre de Raimond est datée du 15 avril 1792, mais c’est une erreur
et elle doit plutôt dater de la fin 1791 ou du début 1792 car, au 15 avril 1792, Raimond
connaissait le décret du 4 avril qui répondait aux réclamations des libres de couleur, or
cette lettre n’en fait pas état.
16. Les réponses de ces sociétés à la circulaire de celle d’Angers ont été
publiées dans Lettres des diverses sociétés des Amis de la Constitution qui réclament
les droits de citoyen actif en faveur des hommes de couleur des colonies, Paris,
Imprimerie du patriote Français, 19 p., s.d. et reproduit dans Adresse de la Société des
Amis des Noirs, op. cit, 10 juillet 1791, p. 209-231. Les adresses à l’Assemblée natio-
nale d’Angers, Lisieux et Saint-Tropez dans Lettres, p. 18, 13, 4. L’adresse d’Uzès fut
lue à l’Assemblée le 12 mai 1791, AP, t. 26, p. 4 ; celle de Lorient est mentionnée par
Grégoire dans son intervention à l’Assemblée constituante, AP, séance du 11 mai
1791, t. 25, p. 737 ; celle d’Uzès fut lue par le président de l’Assemblée, AP, séance
du 12 mai, t. 26, p. 4.
17. Adresse de la Société des Amis des Noirs, op. cit., 10 juillet 1791, p. 231-36.
18. BN Lk9 211, Lettres de J. Raimond à ses frères les hommes de couleur,
Paris, Imprimerie du Cercle Social, an II, 28 p., Lettres du 4 mars et du 21 octobre
1791. Lettre du 4 mars, p. 6.
19. DEBBASCH, Couleur et liberté, op. cit., Livre 2, chap. 1, p. 141 et s.,
semble avoir sous-estimé l’action de J. Raimond en la croyant limitée à ses correspon-
dants de la province du Sud. Or, on constate que la résistance des libres de couleur
s’élargissait à Saint-Domingue et cherchait également à s’unifier, ce qui n’avait pas
échappé à Raimond.
20. Lettre de J. Raimond, 4 mars 1791, op. cit.., p. 6. Grégoire et Pétion étaient
députés à la Constituante, mais non Brissot.
21. Ibid., p. 12.
22. Ibid., p. 13.
23. Ibid., p. 16 : « J’ai tiré sur plusieurs de vous pour une somme de vingt-cinq
mille livres tournois pour tous les frais seulement qui ont été faits jusqu’à ce jour. »
24. Lescallier, 1743-1822, fut ordonnateur en Guyane. Il acheta pour La
Fayette deux plantations à Cayenne sur lesquelles furent expérimentées des réformes
de statut des esclaves. Lescallier rentré en France en 1788, assista à des réunions de la
Société des Amis des Noirs en 1789-90. Lorsque les citoyens de couleur y furent
invités, le 24 novembre 1789, Lescallier était présent. Raimond pouvait donc lui avoir
Notes 403
parlé depuis cette époque. Voir La Société des Amis des Noirs, op. cit., séance du
24 novembre 1789, p. 244. Pressenti par le ministre de la Marine, Fleurieu, pour être
commissaire à Saint-Domingue, il ne fut finalement pas nommé, le parti colonial
l’ayant dénoncé comme un Ami des Noirs. Fleurieu lui-même démissionnait le
15 avril 1791, voir Le Moniteur du 7 mai, p. 269. Sur les pressions exercées contre
Lescallier par le parti colonial, voir Réplique de J. P. Brissot à Louis-Marthe Gouy,
Paris, Imprimerie du Patriote Français, 10 février 1791, reprint EDHIS, t. 8, p. 37
et 50.
25. Ibid., p. 16.
QUATRIÈME PARTIE
Chapitre premier
c’est déjà beaucoup [...] Autre argument développé à partir de 1789, la lex de l’acte
d’affranchissement est telle que la liberté n’est octroyée qu’à condition d’inégalité
entre le blanc et l’homme de couleur [...] C’est la manière d’écarter l’article 59. »
28. MOREAU, Considérations, op. cit., p. 45.
29. Ibid., p. 47.
30. Ibid., p. 47.
31. Ibid., p. 48.
32. Ibid., p. 56.
33. Ibid., p. 58.
34. Ibid., p. 70.
35. Ibid., p. 67.
36. Ibid., p. 46.
37. Moreau précise dans ce texte qu’il a répondu au mémoire de Grégoire en
décembre 1789, Ibid., p. 9 et 54. Il ne précise pas qu’il le fit sous l’anonymat.
38. Ibid., p. 68.
39. Ibid., p. 58.
40. Ibid., p. 71.
41. Ibid., p. 73.
Chapitre 2
1. AN, ADXVIIIc 116, Paris, 157 p., texte daté du 28 mars 1791, signé par
Pétion et Brissot et imprimé par ordre de la société, précédé d’un « Avertissement »
daté du 4 avril 1791 et suivi d’un « Post-scriptum important ». Une réédition augmen-
tée de pièces justificatives parut le 10 juillet 1791.
2. Ibid., « Post-scriptum important », p. 153.
3. Ibid., p. 154.
4. Ibid., p. 155. Le projet d’un double cens, en France, excluant les citoyens
passifs du droit de vote et divisant les citoyens actifs : ceux qui auraient le droit de vote
sans être éligibles et ceux qui voteraient et seraient éligibles, était en débat à cette
époque.
5. Voir 4e Partie, chap. 4, 2.
6. Ibid., Avertissement, p. 2.
7. Ibid., p. 5. Dans ses Considérations, op. cit., Moreau avait écrit que jusqu’à
la création de la Société des Amis des Noirs, par Clarkson, l’esclavage et la traite n’au-
raient pas été l’objet de critiques les remettant en cause : « Jusques-là, l’esclavage et
la traite des nègres n’étaient l’objet que de méditations philosophiques, que de regrets
plus ou moins sentis par des hommes dont l’apanage est plutôt de désirer la perfection
que de calculer les bornes de la perfectibilité », p. 3.
8. Ce fut à la séance du 12 mai que Curt intervint pour préciser ce point : « C’est
moi, Messieurs, qui avais été chargé de vous faire ce rapport ; un accident qui m’arriva
m’empêcha de vous le faire. », Archives Parlementaires, op. cit., séance du 12 mai
1791, t. 26, p. 4.
9. AP, séance du 7 mai 1791, t. 25, p. 636.
406 L’aristocratie de l’épiderme
10. Ibid.
11. Ibid., p. 638.
12. Ibid., p. 638.
13. Ibid., p. 638.
14. Ibid., p. 639.
15. Nous avons déjà donné une présentation générale de ce débat dans
Triomphe et mort du droit naturel en révolution, 1789, 1795, 1802, Paris, PUF, 1992,
IIIe Partie, chap. 8, Le débat sur les colonies à la Constituante, mai-septembre 1791,
p. 169-205 ; et une étude particulière sur les interventions de Robespierre dans ce
même débat, « Périssent les colonies plutôt qu’un principe ! De Jaucourt à Marx en
passant par Robespierre et Desmoulins », dans F. GAUTHIER éd., Périssent les colo-
nies plutôt qu’un principe ! Paris, Société des Études Robespierristes, 2002, p. 91-103.
16. Voir BRETTE, Liste des députés et des suppléants élus à l’Assemblée
constituante, op. cit., chap. IV, Tableau des présidents et secrétaires, p. 286.
17. Les termes non libres furent ajoutés à « l’état des personnes », modifiant le
projet des Comités.
18. AP, t. 25, séance du 11 mai 1791, intervention de Grégoire, p. 737.
19. Ibid., p. 738.
20. Ibid., p. 738.
21. Grégoire venait de citer les articles 57 et 59 de l’édit de 1685 et concluait :
« Et qui parlait ainsi ? C’était un roi despote, c’était Louis XIV. », p. 741.
22. Ibid., p. 741.
23. Ibid., p. 742.
24. Ibid., p. 742.
25. Ibid.
26. Ibid., intervention de Barnave, p. 755-56.
27. Ibid., p. 759.
28. AP, t. 26, séance du 12 mai, p. 4.
29. Ibid., intervention de Lanjuinais p. 4.
30. Ibid., p. 5.
31. Ibid., p. 6.
32. Ibid., intervention de Robespierre, p. 8.
33. AP, séance du 12 mai 1791, intervention de Robespierre p. 9.
34. A. CESAIRE, Toussaint Louverture. La Révolution française et le pro-
blème colonial, Paris, Présence Africaine, 1961, p. 106.
35. AP, séance du 12 mai 1791, p. 17 ; Le Moniteur, no du 13 mai 11791, p. 376
et n du 14 mai, p. 385 ; Le Moniteur, no du 17 mai, lettre de Boissy d’Anglas, p. 406.
o
Chapitre 3
1. BN, Cabinet des Estampes, Discussion sur les hommes de couleur, le cata-
logue précise : « non identifié, Paris ?, sans nom, environ 1791, estampe (eau-forte),
23 × 48 cm (trait carré) ». Une présentation rapide de cette estampe a été faite par
Helen WESTON, « Representing the right to represent. The portrait of Citizen Belley,
ex-representative of the colonies by A. L. Girodet », in Anthropology and aesthetics,
New York, 1994, 26, p. 83-99, l’estampe de mai 1791 est reproduite et présentée
p. 87-88.
2. AP, séance du 12 mai, p. 13. Cette intervention de Curt n’apparaissant pas
dans Le Moniteur, on peut penser que l’auteur de l’estampe assista à la séance de
l’Assemblée du 12 mai, dans les tribunes réservées au public.
3. Correspondance secrète des colons, op. cit., p. 17.
4. Voir notre 4e Partie, chap. 4, 4. Le maître et sa mulâtresse.
5. MARAT, L’Ami du Peuple, no 199, 23 août 1790, édition de Cock-Gœtz, t. 2,
p. 1259. Les petites maisons étaient un asile de fous.
6. Voir notre 2e Partie, chap. 3, 3. La morale de la « machine coloniale ».
7. Le Moniteur, no 158 du 7 juin 1793, séance de la Convention du 4 juin, réédi-
tion, p. 568. CESAIRE est le premier à avoir mentionné cet épisode, Toussaint
Louverture, op. cit., p. 187. Voir aussi F. GAUTHIER, Triomphe et mort du droit
naturel en révolution, op. cit., p. 217-20.
8. Voir notre 1e Partie, Interlude.
9. AP, séance du 4 juin 1793, t. 66, p. 56. On trouve aussi le nom de Jeanne
Audotte dans AP, t. 91, séance du 8 prairial an II-28 mai 1794.
10. Voir notre 4e Partie, chap. 4, 1. Les Amis des Noirs sont la cause des
« troubles des colonies ».
11. Cette esquisse se trouve au Musée Carnavalet, à Paris. Son auteur, Charles
Thévenin, a été précisé par P. Bordes, alors directeur du Musée de la Révolution fran-
çaise de Vizille, dans Droits de l’homme et conquête des libertés, Vizille, 1986,
catalogue de l’exposition, p. 44.
12. Notons que le catalogue du Cabinet des Estampes, qui mentionne le nom
des personnes de cette estampe, a omis celui de Raimond, pourtant bien présent dans
la légende !
13. Reynaud de Montlosier (1755-1838) précise qu’il avait de la famille à
Notes 409
Saint-Domingue, voir Souvenirs d’un émigré, 1791-98, Paris, 1907, p. 203. Il était par
ailleurs très lié à Malouet. La légende de l’estampe le qualifiant de « démocrate » est
ironique.
14. BN Lb40 590, DUBOIS DE CRANCÉ, À ses concitoyens, Paris, Imp. Nat.,
4 p., lettre dans laquelle il se plaignait d’avoir été rayé de la liste des gardes nationaux
de son district. Cette affaire s’était produite à la fin du mois d’avril 1791.
15. AP, t. 20, 21 octobre 1790.
16. ROBESPIERRE, Œuvres, t. 7, « Discours sur la nécessité de révoquer les
décrets qui attachent l’exercice des droits du citoyen à la contribution du marc d’ar-
gent ou d’un nombre déterminé de journées d’ouvriers », avril 1791, p. 158-74.
17. Les Révolutions de Paris, no 63, 25 septembre 1790. Cet article, non signé,
est de Sonthonax, membre de la Société des Amis de la Constitution et qui jouera un
rôle de premier plan dans l’abolition de l’esclavage à Saint-Domingue, en 1793. Cet
article est cité dans Y. BENOT, La Révolution française et la fin des colonies, op. cit.,
p. 130.
18. Voir BRETTE, Les Constituants, op. cit., qui précise que d’André fut élu
président du 31 juillet au 30 août 1790, du 21 décembre 1790 au 3 janvier 1791 et du
9 au 24 mai 1791, p. 285. L’allusion à Thésée renvoie probablement à l’épisode de ce
héros qui, invité à un banquet par Hadès, se vit offrir le siège de l’oubli.
19. Cité dans notre 4e Partie, chap. 5, 3. Le débat du 11 mai.
20. On peut voir au Musée Carnavalet, à Paris, une belle gravure coloriée repré-
sentant Le Camp fédératif de Lyon tenu le 30 mai 1790, où se dresse une Montagne
portant à son sommet une statue de la liberté. La Montagne artificielle est remplie
d’écueils, pour signifier que les chemins de la liberté ne sont pas faciles d’accès.
Conclusion
taires, mais son nom a disparu dans l’index général à cette séance, ce qui est curieux
et mériterait éclaircissement. Voir aussi la séance du 25 juillet, p. 51 et 59. Sur
l’histoire de la Société des Amis de la Constitution, Patricia Raze, jeune chercheuse
de l’Université Paris7-Denis Diderot s’y consacre, précisément à l’époque de la
Constituante.
9. Le Moniteur, no du 8 septembre 1791, séance de l’A.N. du 5 septembre,
p. 604.
10. A.P., t. 30, 7 septembre 1791, p. 284.
11. BRISSOT, Discours sur la nécessité de maintenir le décret rendu le 15 mai
1791..., sl, sd, 28 p. Ce discours a été prononcé le 12 septembre 1791 et fut imprimé
sur ordre de la Société des Amis de la Constitution séante aux Jacobins. Reprint
EDHIS, op. cit., t. 8.
12. L’Adresse du 10 juillet 1791 est la dernière source connue de la Société des
Amis des noirs. On ne connaît pas les raisons de son affaiblissement qui conduisit à sa
fermeture, faute d’études sur la question.
13. AP, t. 31, séance du 23 septembre 1791, intervention de Barnave, p. 252
et s. On sait par sa correspondance avec la reine, datée d’août 1791, qu’il préparait la
révocation de ce décret, voir MARIE-ANTOINETTE et BARNAVE, Correspondance
secrète, édition établie par A. Söderhjelm, Paris, 1934.
14. Intervention de Barnave, AP, ibid.
15. AP, op. cit., intervention de Barnave, p. 252.
16. J.-P. FAYE a attiré l’attention sur la position de Barnave justifiant la mise
en esclavage d’êtres humains au nom d’un matérialisme, centré sur la défense d’un
droit de propriété, dont il est difficile de dissimuler la violence et le caractère domina-
teur : « Loin d’être l’idéologue de l’idéalisme bourgeois, Barnave est au contraire l’un
des tout premiers à prononcer avant terme les prémisses d’un matérialisme historique
sur lequel il prend appui pour justifier la défense violente de la domination bourgeoise
et du droit de propriété - y compris sur des esclaves», Dictionnaire politique portatif
en cinq mots, Paris, Idées Gallimard, 1982, p. 112. Voir aussi Souad DEGACHI,
Barnave, rapporteur du Comité des colonies, 1789-1791, Mémoire de Maîtrise sous
la direction de F. Gauthier, Paris 7, publié sur le site internet revolution-française. net,
2007, qui prépare une thèse sur le député Barnave.
17. AP, t. 31, p. 265.
18. Ibid., intervention de Robespierre, p. 276.
19. Le Moniteur, no 269, séance du 24 septembre, p. 771.
20. AULARD, La Société des jacobins, op. cit., t. 3, 25 septembre 1791, p. 148
et s.
21. BHVP, 600563, Grégoire, Adresse aux députés de la seconde législature,
Paris, 26 septembre 1791, 31 p. Voir AULARD, La Société des jacobins, op. cit., t. 3,
p. 150, la lecture qu’en fit Grégoire reçut les « applaudissements de toute la société qui
en a ordonné l’impression sur le champ ».
22. GREGOIRE, op. cit., p. 10.
23. AULARD, La Société des Jacobins, op. cit., t. 3, p. 153.
24. On trouvera un reprint de ce texte dans La Révolution française et l’aboli-
tion de l’esclavage, EDHIS, op. cit., t. 12, 3.
Notes 411
ANNEXES
1. AN, AFII 302-2511, no 48. Compte que Julien Raimond rend au Comité de
sûreté générale de toutes ses actions et écrits depuis l’année 1784 vieux style, 23 p.
Pour la transcription de ce manuscrit de J. Raimond, nous avons respecté l’ortho-
graphe et la ponctuation originales. Les notes sont de la main de Julien Raimond,
exception faite des mentions entre [ ] qui sont de Florence Gauthier. De façon géné-
rale, sauf mention contraire, les références paginées des textes de J. Raimond ont été
vérifiées exactes. Les chiffres en gras entre ( ) indiquent la pagination du manuscrit.
Un seul nom est resté illisible à la page 22 du manuscrit. (N. de F.G.).
2. Lisez une partie des lois arbitraires et cruelles avec lesquelles nous étions
régis dans la Pétition présentée par nous à l’Assemblée constituante le 27 novembre
1789, page 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 [Il ne s’agit pas de la pétition du 27 novembre
mais de Supplique et pétition des Citoyens de couleur des Iles et Colonies françaises,
datée du 2 décembre 1789 ; voir Archives Nationales, AD XVIII c/118, chap. 10,
21 p.]. Lisez aussi tome IIe des Considérations sur l’état présent de Saint-Domingue
le discours III page 74 et suivantes et vous frémirez d’indignation en voyant le genre
de despotisme qu’on exerçait sur les hommes de couleur.
3. Adresse à l’Assemblée nationale dans le recueil ci-joint. Ce fut dans cette
412 L’aristocratie de l’épiderme
première adresse que nous offrîmes au nom de nos frères le don patriotique de six
millions [Ce texte se trouve aux Archives Nationales, ADXVIIIc/118, Adresse
à l’Assemblée nationale par les Citoyens libres de couleur des Iles et Colonies fran-
çaises, 18 octobre 1789, imprimé, 9 p. Ce texte fut présenté à l’Assemblée par la
délégation des Citoyens de couleur à la séance du 22 octobre 1789].
4. Tous mes collègues peuvent attester ce fait. [Cette rencontre avec la Société
des Amis des Noirs eut lieu le 24 novembre 1789, voir M. DORIGNY, B. GAINOT,
La Société des Amis des Noirs, 1788-1799, Paris, UNESCO/UNICEF, 1998, p. 244.]
5. Voyez les lettres du citoyen Gérard, député de Saint-Domingue, page 53 de
ma correspondance. [Archives Nationales, DXXV 56, 549, Correspondance de
J. Raimond avec ses frères de Saint-Domingue et les pièces qui lui ont été adressées
par eux, Paris, Imprimerie du Cercle Social, an II de la République française, 136 p.]
6. Voyez une lettre des députés colons blancs députés à l’Assemblée consti-
tuante à leurs commettants à ce sujet et insérée dans Le Moniteur Colonial, ils y
avouent qu’ils ont dicté tous les articles du décret et des instructions.
7. Voyez page 53 de ma correspondance ce que dit le citoyen Gérard à ce sujet
dans une lettre qu’il écrivait à ses commettants.
8. Le citoyen Grégoire attestera ce fait. Mais pour prouver que l’intention des
colons blancs n’était pas de faire jouir les hommes de couleur de leurs droits, il ne faut
que lire les pièces citées dans ma correspondance, Extrait des registres de délibéra-
tions de l’Assemblée provinciale du Sud de Saint-Domingue et de la séance du 9 mai
1790 de relevée, page 31 de ma correspondance. Lisez encore la lettre du citoyen
Gérard à ce même comité du Sud en date du 15 mars 1790 page 53 de ma correspon-
dance. Lisez également ce que les colons députés écrivirent à cette occasion à leurs
commettants et inséré au Moniteur colonial que je produirai.
9. On ne peut attribuer la formation anticipée de cette Assemblée coloniale qu’à
la lettre des colons députés en date du 12 août 1789. Cette lettre se trouve page 7 de
ma correspondance.
10. Voyez l’extrait du registre des délibérations de l’Assemblée provinciale du
Sud page 31 de ma correspondance. Voyez également la lettre que l’Assemblée de
St-Marc écrivit à l’Assemblée constituante, elle est insérée dans un Moniteur colonial
que je produirai.
11. Cette pièce qui se trouve page 11 de ma correspondance prouvera combien
je prêchais toujours à mes frères la patience, la modération et de n’avoir recours qu’à
l’Assemblée nationale.
12. Cette lettre de Boisrond se trouve page 15 de ma correspondance.
13. Voyez ce décret et le considérant qui le précède.
14. Voyez la fin de la lettre de Labuissonnière, page 64 de ma correspondance.
15. Nous fîmes imprimer à nos dépens tous ces ouvrages et quelques-uns des
miens aussi.
16. Voyez Lettres de J. Raimond à ses frères les hommes de couleur et compa-
raison avec les extraits perfides qu’en ont fait MM. Page et Brulley. [Ce texte se trouve
à la BN, LK9 211, Lettres de J. Raimond à ses frères les hommes de couleur et com-
paraison des originaux de sa correspondance avec les extraits perfides qu’en ont fait
MM. Page et Brulley dans un libelle intitulé : Développement des causes, des troubles
Notes 413
et des désastres des Colonies françaises, Paris, Imprimerie du Cercle Social, l’an II de
la République française, 20 p., suivi de Première Lettre écrite dans la partie Ouest,
Paris, 21 octobre 1791, 8 p.]
17. Lisez ces deux arrêtés, vous y verrez que la mauvaise foi et la malveillance
des citoyens Page et Brulley y sont bien démontrées.
18. Je supplie de lire la pétition que j’ai adressée au Comité de sûreté générale
qui se trouve à la tête de ma correspondance. Je prie aussi d’observer que j’étais si peu
coalisé avec les Brissotins que depuis ma lettre du 28 octobre 1791 [il s’agit de la
Première lettre écrite dans la partie de l’Ouest, Paris, 21 octobre 1791 et non du
28 octobre comme l’a écrit par erreur J. Raimond, op. cit., n. 15], je ne parle plus de
lui dans ma correspondance et que Brissot n’est pas nommé une seule fois. Je pense
produire les originaux comme preuves.
19. J’ai la preuve de ce fait.
20. Je prie de lire à ce sujet la note de la page VI de ma correspondance.
21. On peut voir par les papiers publics de ce temps que ce fut un de ceux qui
parla avec le plus de force en faveur de nos droits lors des décrets du 12 octobre et
15 mai aussi dans ma lettre du 21 octobre 1791 j’en parlais à mes frères comme un de
leurs plus ardents défenseurs. Voyez cette lettre après celle du 4 mars 1791. [Op. cit.,
n. 15.]
22. Voyez ma lettre du 4 mars, vous y verrez bien clairement que je dis que l’ar-
gent nous manquait pour l’impression de tous ces ouvrages. Et voyez avec quelle
mauvaise foi les citoyens Page et Brulley ont tronqué ce passage de manière à lui faire
signifier tout autre chose.
23. Lisez les séances de l’Assemblée constituante à cette époque et vous y
verrez que le citoyen Biauzat dénonça une lettre de Louis-Marthe Gouy d’Arcy,
laquelle lettre fut déposée au Comité colonial.
24. Lisez les séances de cette époque dans Le Moniteur.
25. Voyez ce qu’en disent les citoyens Page et Brulley dans Le développement
des causes des troubles et dans Le discours historique sur les causes et les désastres
de la partie française de Saint-Domingue pages 14, 15 et 16 et la page 13 du même
ouvrage.
26. Le citoyen Page en convient encore dans le même ouvrage.
27. Lettre des commissaires de couleur à leurs frères sur le décret du 15.
[Il s’agit de J. RAIMOND, Lettres des commissaires des citoyens de couleur en
France à leurs frères et commettants dans les îles françaises, Paris, 10 juin 1791, 7 p.
Ce texte a été réédité dans La Révolution française et l’abolition de l’esclavage, Paris,
EDHIS, 1968, 12 t., t. 11, no 3.]
28. À lire page six de mes réflexions à ces mots nous ne devons. [En fait, on
trouvera ces mots nous ne devons non à la p. 6 mais à la p. 8 de J. RAIMOND,
Réflexions sur les véritables causes des troubles et les désastres de nos colonies,
notamment sur ceux de Saint-Domingue. Avec les moyens à employer pour préserver
cette colonie d’une ruine totale, Paris, 1793, 18 p. Texte réédité dans la collection
EDHIS, op. cit., t. 11, no 5.]
29. Voyez les différentes lettres de mes frères à ce sujet, insérées dans ma cor-
respondance et dans mon mémoire [il s’agit du texte de J. RAIMOND, Mémoire sur
414 L’aristocratie de l’épiderme
les causes des troubles et des désastres de la colonie de Saint-Domingue, présenté aux
comités de Marine et des Colonies DANS LES PREMIERS JOURS DE JUIN
DERNIER, par les citoyens de couleur d’après l’invitation qui leur avait été faite par
les comités, Paris, Imprimerie du Cercle Social, 1793, 66 p.] adressé aux Comités de
marine et des colonies.
30. Blanchelande écrivit lui-même qu’à la nouvelle du décret du 15 mai tous les
partis se réunirent pour le repousser. Les citoyens Page et Brulley avouent aussi
page 13 et 14 de leur discours sur la cause et les désastres de Saint-Domingue qu’à la
nouvelle du décret tout le peuple blanc fut indigné.
31. Une singularité que je remarquais c’est que tous les prêtres qui étaient alors
à l’Assemblée constituante volèrent pour faire révoquer le décret du 15. Cependant
comme particuliers, ils n’avaient aucun intérêt à conserver ce préjugé puisqu’ils
n’étaient pas colons. Et comme prêtres, la religion dont ils étaient les ministres leur
commandait au contraire de le faire maintenir. Or rien ne prouve plus selon moi la
coalition des prêtres, des royalistes, des contre-révolutionnaires et des colons.
32. Lisez ma lettre du 21 octobre 1791 imprimée à la suite de celle du 4 mars
même année et la première écrite dans la partie de l’Ouest. [Voir n. 15 et 20 pour les
références de ces textes.]
33. J’appelle à témoignage mes collègues sur ce fait. Les citoyens Page et
Brulley dans leur libelle contre moi m’ont accusé d’avoir pressuré mes frères les
hommes de couleur et de leur avoir levé beaucoup d’argent. Eh bien, j’en suis si
éloigné que les commissaires Viard, Chanlatte, Dubour et Ouvière que les hommes de
couleur avaient envoyés ici pour réclamer contre le décret du 24 septembre, firent faire
ici pour 4 000 livres d’impressions que je fus obligé de payer et d’ajouter encore à mes
premières dépenses.
34. Voyez l’extrait du procès-verbal de cette séance page 82 de ma correspon-
dance. Je ne puis m’empêcher de faire ici une réflexion. Les citoyens Page et Brulley
étaient ici et présents, ainsi que d’autres colons. Pourquoi s’ils étaient comme ils le
disent partisans de ce décret et patriotes ne vinrent-ils pas à la barre de la Conven-
tion [erreur de Raimond, il s’agit de la Législative en avril 1792 et non de la
Convention qui sera élue en septembre 1792] jurer comme nous l’oubli de toutes les
querelles, et enfin parler aux représentants du peuple le même langage que nous dans
nos discours ?
35. Dans cette lettre comme on voit je combats avec force le royalisme et le
système du gouvernement militaire que quelques intrigants voulaient y établir au lieu
des assemblées populaires, sous le vain prétexte toujours que le gouvernement popu-
laire ne pouvait convenir aux colonies.
36. Lisez la lettre de Pinchinat à ce sujet pages 65-66 et 67 de ma correspon-
dance. Lisez la note de la page 65. Lisez l’arrêté pris par les hommes de couleur de la
Province de l’Ouest. Lisez la lettre de Viard et Chanlatte page 67. Lisez également les
développements que j’ai donnés dans mon mémoire au Comité de marine sur les
moyens qu’avaient employés les agents du ci-devant roi pour tromper mes frères.
Lisez encore la première lettre de Sonthonax dans mon mémoire au Comité page 42.
Lisez ma lettre page 71 Voyez les différentes lettres de mes frères et les différents
arrêtés pris par eux tout cela inséré dans ma correspondance.
Notes 415
37. Voyez les différentes lettres de mes frères et les différents arrêtés pris par
eux tout cela inséré dans ma correspondance.
38. Lisez cette lettre page 101 de ma correspondance.
39. Lisez ma circulaire à mes frères page 107 de ma correspondance. Celle à
Sonthonax page 109. Celle à Pinchinat page 112. Enfin mes Réflexions sur les véri-
tables causes des troubles de Saint-Domingue.
40. Page 120 de ma correspondance.
41. Cette lettre se trouve page 91 de ma correspondance.
42. Lisez les notes de la page VI de ma pétition au Comité de sûreté générale à
la tête de ma correspondance, et vous verrez à quoi ma fortune est réduite et ce qu’elle
a été.
43. Voyez toute ma correspondance. Pas une de mes lettres où vous ne trouviez
ces principes développés, surtout dans celle du 30 mai 1792, page 71 de ma correspon-
dance et celle en date du 9 novembre 1792, page 101. Voyez avec quelle force je
combats partout les indépendants qui ne sont autre chose que des fédéralistes.
44. Voyez toute ma correspondance, pas une lettre qui ne prêche cette morale
et toutes les réponses de mes frères annoncent qu’ils goûtaient cette morale. Voyez la
lettre de Boisrond page 16 ligne 13. La copie de la lettre du citoyen Gérard, page 53.
Les instructions sur le décret du 8 mars 1790 page 11, mon adresse aux troupes fran-
çaises destinées à passer à Saint-Domingue page 18 [cette référence est inexacte et
l’adresse de Raimond aux troupes ne se trouve ni p. 18 ni dans le reste de sa
Correspondance.], ma lettre circulaire à l’époque du décret du 15 mai 1791. Lettre de
mes commettants page 34 et suivantes. L’arrêté des hommes de couleur de Saint-Marc
page 66. Lettre de Boisrond page 88 ligne 16. Lettre de Labadie page 94 dernier para-
graphe. Lettre de Casting page 126.
45. Voyez mes réflexions sur les troubles de Saint-Domingue depuis la page 8
jusqu’à la fin.
46. Voyez Le Développement des troubles, des désastres de la partie française
etc. de Page et Brulley et vous lirez page 79 où ils disent que je prêchais à mes frères
de ne point obéir aux arrêtés des assemblées coloniales pour fixer leur regard sur la
France exclusivement aux colonies.
47. Voyez ma lettre du 1er août 1793 page 120 de ma correspondance.
48. À cette époque il y avait des commissaires dans chaque section qui avaient
le droit d’aller partout arrêter les traîtres et les contre-révolutionnaires.
49. Il fallait être reconnu pour bon patriote pour jouir de cette faveur.
50. J’ai des preuves écrites de tous ces faits.
Bibliographie
SOURCES
Sources manuscrites
Sources imprimées
1789
AN, AD XVIII c /124, no 3, Réclamations adressées à l’Assemblée Nationale par les
personnes de couleur, Propriétaires & cultivateurs de la Colonie de Saint-
Domingue, sans lieu, sans date, signé Raimond, 8 p.
AN, AD XVIII c /118, no 7, Lettre des Citoyens de couleur des Isles et Colonies fran-
çaises, à MM. Les Membres du Comité de Vérification de l’Assemblée
Nationale, Paris, Lottin, 23 novembre 1789. Texte signé de Joly ; Raymond
418 L’aristocratie de l’épiderme
1790
Ibid. no 12, Adresse des Citoyens de couleur des Isles & Colonies françaises à
l’Assemblée générale des représentants de la Commune de Paris prononcée le
premier février 1790 par M. de Joly, avocat aux conseils, l’un des représentants
de la Commune, en présentant une députation des Citoyens de couleur, 15 p.,
sans lieu, sans date, sans nom d’imprimeur. Texte signé des mêmes avec
mention de Raimond aîné.
Lettre des députés de Saint-Domingue à leurs commettants en date du 12 août 1789,
interceptée par un mulâtre, communiquée à M. le comte de Mirabeau et dénon-
cée à un comité de six cents amis de la Constitution, Paris, mars 1790. Ce texte
a été publié par Julien Raimond dans la Correspondance secrète des Colons,
Paris, 1790 et à nouveau dans Correspondance de Julien Raimond avec ses
frères de Saint-Domingue et les pièces qui lui ont été adressées par eux, Paris,
1793, voir infra.
Ibid. no 30, Correspondance secrète des Colons de Saint-Domingue avec les comités de
cette isle, Paris, l’an 1 de la Liberté, sans date, 53 p., publié anonymement par
J. Raimond avec une introduction et des notes. Nouvelle édition anonyme sous
le titre modifié Correspondance secrète des colons députés à l’Assemblée consti-
tuante, Paris, imprimeur Anjubault, sans date, 43 p., avec la vignette de la Société
des Amis des Noirs en page de titre, une nouvelle introduction et de nouvelles
notes. L’avertissement de la seconde édition précise que la première fut faite en
mai 1790. Par ailleurs, les notes ajoutées à la seconde édition permettent de la
dater de la période thermidorienne. Reprint de la seconde édition dans La
Révolution française et l’abolition de l’esclavage, Paris, EDHIS, 10 t., t. 8, no 10.
1791
BHVP, 10 763, Observations sur l’origine et les progrès du Préjugé des Colons blancs
contre les Hommes de couleur, Par M. Raymond, homme de couleur de Saint-
Domingue, Paris, Belin, 26 janvier 1791, 28 p., précédé de Lettre de Brissot à
M. Raymond, pp. III à VIII, suivi de Lettre de M. Raymond à J. P. Brissot, pp. 29
à 46.
Bibliographie 419
Lettres de J. Raimond à ses frères les hommes de couleur, 4 mars et 21 octobre 1791,
publiées ultérieurement, voir infra an II.
AN, AD XVIIIc 120 no 9, Pétition Nouvelle des Citoyens de couleur des isles fran-
çaises à l’Assemblée nationale, Paris, 18 mars 1791, 19 p. Contenant un
« Avertissement sur les manœuvres employées pour faire échouer cette
Pétition », p. III à XII, signé par Raymond aîné et Raymond jeune, Fleury,
Honoré de Saint-Albert, Desoulchay de Saint-Réal, Desoulchay, Porsade,
Audiger, suivi de « Pétition Nouvelle », p. 1 à 11, et de « Pièces justificatives »,
p. 12 à 19.
BNF, 8o LK9-144, Réponse aux Considérations de M. Moreau dit Saint-Méry, député
à l’Assemblée nationale, sur les Colonies, par M. Raymond, Citoyen de couleur
de Saint-Domingue, Paris, Imprimerie du Patriote Français, 12 mai 1791, 68 p.
Débat de mai 1791 : Archives Parlementaires, t. 25, séance de l’Assemblée nationale
du 11 mai, lecture par le président d’une adresse des commissaires des citoyens
de couleur, p. 742 ; t. 26, séance du 12 mai, lecture par le président d’une lettre
de Julien Raimond, commissaire des citoyens de couleur, demandant à être
entendu à la barre de l’Assemblée, p. 3-4 ; t. 26, séance du 14 mai, lecture par le
président d’une lettre de J. Raimond demandant à être entendu. Réponse favo-
rable après un vote, p. 64. Intervention de Raimond à cette même séance,
pp. 66-69 ; t. 26, séance du 15 mai, lecture par le président d’une lettre de
J. Raimond réclamant les droits que l’Assemblée a déclaré appartenir à tous les
hommes, p. 89.
Journal de la Révolution du 18 mai 1791. Dans son compte-rendu de la séance de la
Société des Amis de la Constitution du 16 mai, on peut lire que Julien Raimond
est venu remercier la Société au nom des hommes de couleur de la part qu’elle
a prise à leur sort. Publié dans AULARD, La Société des Jacobins. Recueil de
documents pour l’histoire du club des Jacobins de Paris, 6 vol., Paris, 1889-97,
t. 2, p. 441.
AN, AD XVIIIc 116, Lettre des Commissaires des Citoyens de couleur en France à
leurs Frères et Commettans dans les Isles françaises, Paris, 10 juin 1791, 7 p.
Texte signé de Raimond l’aîné, Fleury, Honoré Saint-Albert, Dusoulchay de
Saint-Réal. Reprint EDHIS, t. XI, no 3. Publié également dans Adresse de la
Société des Amis des Noirs à l’Assemblée Nationale, Paris, Desenne et Bailly,
10 juillet 1791 qui contient des pièces justificatives dont cette lettre. Reprint par
EDHIS, t. 9, p. 313. On notera que cette lettre est absente de la Correspondance
de J. Raimond avec ses frères de Saint-Domingue.
1792
Une députation des citoyens de couleur conduite par J. Raimond, remercie
l’Assemblée pour son décret du 4 avril 1792. Ce texte, avec la réponse du pré-
sident de l’Assemblée, a été publié dans Correspondance de J. Raimond avec
ses frères de Saint-Domingue, 1793, p. 82, voir infra.
Le Moniteur, 9 septembre, Adresse de Julien Raimond demandant la création d’une
Légion des Américains. Ce texte a également été publié dans Correspondance
de J. Raimond avec ses frères de Saint-Domingue, p. 114. Joseph Boulogne,
420 L’aristocratie de l’épiderme
1789
AN, AD XVIIIc 118, no 2, Extrait du procès-verbal de l’assemblée des gens de
couleur, 12 septembre 1789, 16 p., signé par Joly président, Poizat et Audiger
secrétaires. Comprenant la lettre de Joly au Club Massiac lui demandant un
rendez-vous, datée du 9 septembre ; la réponse donnant rendez-vous le jour
même ; le rendez-vous au Club Massiac ; la réponse écrite du club Massiac
signée par Billard son vice-président, datée du 10 septembre ; la réunion des
gens de couleur commentant cette réponse et préparant une pétition à
l’Assemblée nationale.
Ibid., no 3, Extrait du procès-verbal de l’assemblée des colons américains, 22 sep-
tembre 1789, 1 p., signé par Joly président, Poizat et Audiger secrétaires.
Proposition d’un don patriotique à l’Assemblée nationale du quart de leurs
revenus, soit six millions de livres.
Ibid., no 5, Cahier contenant les Plaintes, Doléances, & Réclamations des Citoyens-
libres & Propriétaires de couleur des Isles & Colonies Françaises, rédigé et lu
dans les assemblées des 3, 8, 12 & 22 septembre 1789, 15 p. Texte signé par
Fleury, Audiger, La Fourcade, Du Souchet l’aîné, Ogé jeune, De Vauréal, le che-
valier de Lavit, Lanon, Hellot, Honoré, Poizat & La Source, de Joly président.
Ibid., no 4, Adresse à l’Assemblée nationale pour les Citoyens libres de couleur des
Isles & Colonies françaises, 18 octobre 1789, 9 p., signé par Joly, Raymond,
Fleury, Audiger, Lafourcade, Du Souchet l’aîné, Ogé jeune, De Vauréal, le che-
valier de Lavit, Lanon, Hellot, Honoré, Poizat & La Source.
Ibid., no 6, Extrait du procès-verbal de l’Assemblée générale des citoyens libres de
couleur des Isles & Colonies françaises, constituée sous le titre de COLONS
AMÉRICAINS, 31 octobre 1789, 19 p., signé par Joly président, Poizat et
Audiger secrétaires. Contenant l’admission de la députation à l’Assemblée
nationale le 22 octobre, la présentation au Roi, à la Reine et à Monsieur ; une
lettre précisant que les Nègres libres font partie de la classe des Citoyens de
couleur.
Ibid., no 7, Lettre des Citoyens de couleur des Isles et Colonies françaises à MM. Les
membres du Comité de Vérification de l’Assemblée nationale, 23 novembre
1789, 24 p., signé par Joly, Raimond aîné, Ogé jeune, Du Souchet de Saint-Réal,
Honoré de Saint-Albert, Fleury.
Ibid., no 8, Dernières observations des Citoyens de couleur des Isles et Colonies fran-
çaises, 27 novembre 1789, 19 p. Texte signé par les mêmes que le précédent.
Ibid., no 10, Supplique et pétition des Citoyens de couleur des Isles & Colonies fran-
çaises à l’Assemblée Nationale, 2 décembre 1789, 21 p. Texte signé par les
mêmes que le précédent.
1790
Ibid., no 12, Adresse des Citoyens de couleur des Isles & Colonies françaises à
l’Assemblée générale des représentants de la Commune de Paris, 15 p. Texte
signé par les mêmes.
422 L’aristocratie de l’épiderme
1791
AN, AD XVIIIc 120 no 9, Pétition Nouvelle des Citoyens de couleur des isles françai-
ses à l’Assemblée nationale, Paris, 18 mars 1791, 19 p. Contenant un
« Avertissement sur les manœuvres employées pour faire échouer cette
Pétition», p. III à XII, signé par Raymond aîné et Raymond jeune, Fleury,
Honoré de Saint-Albert, Desoulchay de Saint-Réal, Desoulchay, Porsade,
Audiger, suivi de « Pétition Nouvelle », p. 1 à 11, puis de « Pièces justifica-
tives », p. 12 à 19.
AN, AD XVIIIc 116, Lettre des Commissaires des Citoyens de couleur en France à
leurs Frères et Commettans dans les Isles françaises, Paris, 10 juin 1791, 7 p.
Texte signé de Raimond l’aîné, Fleury, Honoré Saint-Albert, Dusoulchay de
Saint-Réal. Publié également dans Adresse de la Société des Amis des Noirs à
l’Assemblée Nationale, Paris, chez Desenne et Bailly, 10 juillet 1791, qui
contient des pièces justificatives dont cette lettre. Reprint par EDHIS, t. 11, no 3.
GODECHOT J., « Mémoires de Etienne Dejoly », A.H.R.F., 1946, pp. 289-382. Joly,
électeur de Paris, fut élu délégué du district des Enfants Rouges, puis secrétaire
de l’assemblée des représentants de la Commune de Paris le 27 juillet 1789.
Avocat, il représenta la Société des Citoyens de couleur jusqu’en avril 1790,
date à laquelle il les abandonna.
texte qui évoque une séance du Comité de vérification qui s’est tenue le
3 décembre 1789, peut-être datée des jours suivants. Reprint EDHIS, t. 1, no 6.
AN, AD XVIIIc 119, no 22, Henri GRÉGOIRE, Lettre aux philanthropes sur les mal-
heurs, les droits et les réclamations des Gens de couleur de Saint-Domingue et
des autres îles françaises de l’Amérique, Paris, chez Belin, Desenne et Bailly et
au bureau du Patriote Français, octobre 1790, 21 p. Reprint EDHIS, t. 4, no 9.
Débat de mai 1791 : Archives Parlementaires, séance du 7 mai, t. 25, p. 638 ; 11 mai,
t. 26, pp. 737-42 ; 14 mai, p. 69.
AN, AD XVIIIc 121, no 3, Henri GRÉGOIRE, Lettre aux Citoyens de couleur et Nègres
libres de Saint-Domingue et des autres isles françaises de l’Amérique, Paris,
Imprimerie du Patriote Français, 8 juin 1791, 15 p. Reprint EDHIS, t. 4, no 14.
Ce texte a été réédité dans Adresse de la Société des Amis des Noirs à
l’Assemblée Nationale, seconde édition, Paris, 10 juillet 1791, pp. 306-312.
Reprint EDHIS, t. 9.
BHVP 600 563, GRÉGOIRE, Adresse aux députés, Paris, 26 septembre 1791, 31 p.
Débats de mai et septembre 1791. Interventions de ROBESPIERRE, Archives Parle-
mentaires, 12 mai, t. 26, p. 7-9 ; 13 mai, p. 60 ; 15 mai, pp. 94-5 ; 5 septembre,
t. 30, p. 236 ; 23 septembre, t. 31, p. 274.
AN, ADXVIIIc 195, Michel MINA, Adresse à l’Assemblée nationale par les hommes
de couleur libres de Saint-Domingue, s. d., 120 p. J. Raimond révèle l’identité
de ce Michel Mina : il s’agit de Claude Michel MILSCENT dans Correspon-
dance de J. Raimond avec ses frères de Saint-Domingue, op. cit., p. 70.
Milscent, colon de Saint-Domingue, vint en France dans le courant de l’année
1790. La « pétition de Mina» peut être datée entre mai et septembre 1791.
1789
Lettre à MM. Les députés des trois ordres pour les engager à faire nommer par les
États Généraux, à l’exemple des Anglais, une commission chargée d’examiner
la cause des Noirs, s.l., s.d., (mai 1789), 51 p. Reprint par EDHIS, t. 7, no 1.
Lettre de la Société des Amis des Noirs à M. Necker, avec la réponse du ministre, Paris,
juin 1789, 14 p. Reprint EDHIS, t. 7, no 2.
BRISSOT, Réflexions sur l’admission aux États généraux des députés de Saint-
Domingue, Paris, s.d., 36 p., (juillet 1789).
AN, AD XVIIIc 116, Réponse à l’écrit de M. Malouet sur l’esclavage des Nègres,
424 L’aristocratie de l’épiderme
dans lequel est exprimé le vœu formé par les colons d’avoir des représentants
aux États Généraux, par un membre de la Société des Amis des Noirs, Paris,
1789, 99 p. Reprint EDHIS, t. 6, no 6.
AN, AD XVIIIc 115, BRISSOT, Mémoire sur les Noirs de l’Amérique septentrionale,
Paris, chez Desenne, décembre 1789. Ce texte a été lu à la société le 9 février
1789. Reprint EDHIS, t. 7, no 3.
Il est encore des aristocrates ou réponse à l’infâme auteur d’un écrit intitulé :
Découverte d’une conspiration contre la France, anonyme, s.l., s. d., 15 p.
Reprint EDHIS, t. 4, no 5. Ce texte ayant été commenté à la séance de la Société
des Amis des Noirs du 29 décembre 1789 permet de le dater en décembre 1789.
1790
AN, AD XVIIIc 115, Adresse à l’Assemblée nationale pour l’abolition de la traite des
Noirs, par la Société des Amis des Noirs de Paris, Paris, imprimerie de Potier
de Lille, février 1790, 22 p. Reprint EDHIS, t. 7, no 7.
CLARKSON, Lettre aux auteurs du Journal de Paris, s.l., s. d., imprimerie Hérissant, 4 p.
Ce texte est une réponse à l’article de Mosneron-Delaunay paru dans le Journal
de Paris du 24 janvier 1790, ce qui permet de le dater dans les jours qui sui-
virent. Reprint EDHIS, t. 7, no 5.
Description d’un navire négrier, Paris, 15 p. avec une gravure. Reprint EDHIS, t. 6,
no 5.
M. Lamiral réfuté par lui-même ou réponse aux opinions de cet auteur, sur l’abolition
de la traite des Noirs, suivie de quelques idées sur les établissements libres que
la France ne doit point différer de faire au Sénégal, par un ami des Blancs et des
Noirs, Paris, imprimerie de Potier de Lille, mars 1790, 80 p. Reprint EDHIS,
t. 7, no 4. Ce texte est de François-Xavier Lanthenas qui a fait état de son travail
en cours à la séance du 15 janvier de la Société des Amis des Noirs. Il présente
Julien Raimond dans une note page 73.
MIRABEAU, Les bières flottantes des négriers, PU de Saint-Etienne, 1999. Discours
pour l’abolition de la traite des Noirs, prononcé à la Société des Amis de la
Constitution les 1er et 2 mars 1790. Texte publié initialement par Lucas de
Montigny, réédité ici par M. Dorigny qui a modifié le titre.
AN, AD XVIIIc 115, Seconde adresse à l’Assemblée nationale par la Société des Amis
des Noirs établie à Paris, Paris, imprimerie du patriote Français, 9 avril 1790,
7 p. Reprint EDHIS, t. 7, no 8.
Liste des ouvrages sur la traite et l’esclavage, Paris, imprimerie du Patriote Français,
1790 (mai), 4 p. La Société en décida l’impression à sa séance du 23 avril. Ce
texte indique une liste d’ouvrages en français et en anglais, disponibles chez les
libraires ou pouvant être consultés à la Société. Reprint EDHIS, t. 8, no 2.
AN, AD XVIIIc 115, PÉTION, Discours sur la traite des Noirs par M. Pétion de
Villeneuve, membre de l’Assemblée nationale, suivi par les Observations de
M. Carra sur l’abolition de la traite des Noirs, Paris, imprimerie du patriote
Français, avril 1790, 80 p. Pétion présenta son discours à la séance du 9 avril de
la Société des Amis des Noirs qui en décida l’impression à ses frais. Ce discours
n’a pu être prononcé à l’Assemblée nationale le jour où le rapport de Barnave,
Bibliographie 425
1791
AN, ADXVIIIc116, Réplique de J. P. Brissot à la première et dernière lettre de
L. M. Gouy, défenseur de la traite et de l’esclavage, Paris, Imprimerie du
Patriote Français, 10 février 1791, 54 p. Reprint EDHIS, t. 8, no 5.
Plainte de la Société des Amis des Noirs contre M. Dillon à l’Assemblée nationale,
Paris, 4 mars 1791, 3 p. Reprint EDHIS, t. 8, no 6.
La Société des Amis des Noirs à Arthur Dillon, député de la Martinique à l’Assemblée
Nationale, Paris, Imprimerie du Patriote Français, 10 mars 1791, 11 p. Reprint
EDHIS, t. 8, no 7.
AN, AD XVIIIc 116, Adresse de la Société des Amis des Noirs à l’Assemblée
Nationale, à toutes les Villes de commerce, aux Colonies, à toutes les Sociétés
des Amis de la Constitution, Paris, chez Desenne et Bailly, 10 juillet 1791,
contenant une Introduction datée du 1er juillet 1791, par Clavière, pp. V-XXVIII,
un Avertissement daté du 4 avril 1791, pp. XVII-XXII, suivi de L’Adresse du
28 mars 1791, par Pétion et Brissot, pp. 3-157, suivi de Pièces justificatives,
pp. 158-318, suivi d’un Supplément nécessaire distribué à l’Assemblée natio-
nale le 11 mai 1791, faisant état de la campagne menée par la Société des Amis
de la Constitution en mars-avril 1791, suivi d’une Lettre de Grégoire du 8 juin
1791 et d’une Lettre de J. Raimond à ses frères de Saint-Domingue du 10 juin
1791. Il s’agit du dernier texte, semble-t-il, que cette société publia avant de
fermer ses portes à l’automne. Reprint EDHIS, t. 9, 318 p.
426 L’aristocratie de l’épiderme
Archives Parlementaires. Première série 1787-1799. Recueil complet des débats légis-
latifs et politiques des Chambres françaises, imprimé par ordre du Sénat et de
la Chambre des députés, depuis 1867, t. 8 à 33 pour l’Assemblée constituante.
AULARD A., La Société des Jacobins. Recueil de documents pour l’histoire du club des
Jacobins de Paris, 6 vol., Paris, 1889-1897.
Bibliographie 427
TRAVAUX
Nous avons limité ces références bibliographiques à notre sujet : la Société des
citoyens de couleur à l’époque de la Constituante, 1789-1791. Nous avons
choisi un classement chronologique de parution des ouvrages, discutable certes,
mais révélateur toutefois, d’une histoire de l’historiographie et de ses préoccu-
pations.
Ouvrages généraux
GASTON-MARTIN, Nantes au XVIIIe siècle. L’ère des Négriers, Paris, (1931) 1993.
WILLIAMS E., Capitalisme et esclavage, (London 1964) Paris, 1968 ; L’histoire des
Caraïbes, 1492-1969, (London 1970) Paris, 1975.
MEYER J., L’armement nantais dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, Paris, 1969.
TARRADE J., Le commerce colonial de la France à la fin de l’ancien régime, Paris,
1972.
METTAS J., Répertoire des expéditions au XVIIIe siècle, Paris, 1978.
RENAULT F., DAGET S., Les Traites négrières en Afrique, Paris, 1985.
SALA-MOLINS L., Le Code noir ou le calvaire de Canaan, Paris, 1987.
DEVEAU J-M., La Traite rochelaise, Paris, 1990.
SAUGERA E., Bordeaux port négrier, XVII-XIXe siècles, Biarritz Paris, 1995.
PETRE-GRENOUILLEAU O., Moi, Joseph Mosneron, armateur négrier nantais, Rennes,
1995 ; L’Argent de la traite, Paris, 1996.
MOULIER-BOUTANG Y., De l’esclavage au salariat. Économie historique du salariat
bridé, Paris, 1998.
Voir aussi la revue spécialisée dans l’histoire des colonies esclavagistes Les Anneaux
de la Mémoire, Nantes, qui édite un numéro annuel depuis 1999.
BRETTE A., « Les gens de couleur libres et leurs députés en 1789», Révolution
Française, 1895, pp. 326-45 et 385-407.
LEBEAU A., De la condition des gens de couleur libres sous l’ancien régime, Poitiers,
1903.
GODECHOT J., « Mémoires de Etienne Dejoly » A.H.R.F., 1946, pp. 289-382.
Id., « De Joly et les gens de couleur libres », A.H.R.F., 1951, pp. 48-61.
NEMOURS L., J. Raimond, le chef des gens de couleur et sa famille, DES sous la direc-
tion de G. Lefebvre, Institut d’Histoire de la Révolution Française (Sorbonne) ;
du même et sous le même titre, A.H.R.F., 1951, pp. 257-62, résumé par
G. LEFEBVRE après la disparition brutale de Luc Nemours. Il s’agit de la pre-
mière biographie consacrée à Julien Raimond.
DEBBASCH Y., Couleur et liberté. Le jeu du critère ethnique dans un ordre juridique
esclavagiste. I. L’affranchi dans les possessions françaises de la Caraïbe,
1635-1833, Paris, 1967. Il s’agit d’une remarquable thèse de droit dont, malheu-
reusement, seul le t. 1 est paru.
RENARD D., « Vivre Blanchement : les hommes de couleur libres et la Révolution fran-
çaise », M. VOVELLE éd., Les droits de l’homme et la conquête des libertés,
Colloque de Vizille 1986, Grenoble, 1988, pp. 257-63.
GARRIGUS J., The Free Colored Elite of Saint-Domingue. The case of J. Raimond,
1744-1801, 1990, non publié.
GARRIGUS J., « Sons of the Same Father. Gender, race and Citizenship in French
Saint-Domingue, 1760-1792 », C. ADAMS ed., Visions and Revisions of
Eighteenth-Century France, Univ. Press Pensylvania, 1997, pp. 137-153.
GAUTHIER F., « Le rôle de Julien Raimond dans la formation du nouveau peuple
de Saint-Domingue, 1789-1793 », Esclavage, résistances et abolitions,
123e Congrès des sociétés historiques et scientifiques, Fort-de-France, 1998,
Paris, 1999, pp. 223-33.
GAUTHIER F., « Jeanne Odo ou l’humanité des Africains. Deux portraits, 1791-1794 »,
Cahiers des Anneaux de la Mémoire, Nantes, no 5, 2003, Les Femmes dans la
traite et l’esclavage, pp. 65-82.
GAUTHIER F., « Au cœur du préjugé de couleur : Moreau de Saint-Méry contre Julien
Raimond, 1789-91 », Cahiers des Anneaux de la Mémoire, Nantes, no 6, pp. 41-
70.
Bibliographie 433
Milscent
185, 207, 310, 325, 359, 364, 371, 375, 376, 377, 378, 380, 385, 387,
374, 390, 392, 412, 415, 431 391, 417, 418, 421, 422, 432, 437
Glezit 394 Jouette 196
Goupil-Prefelne 283
Gouy d’Arsy 22, 24, 25, 26, 52, 55, La Borde 25
102, 156, 283, 288, 312, 325, 358, La Fayette 169, 275, 402
359, 364, 373, 426 La Feuillade 46
Gradis David 128, 359 La Galissonnière 198
Grégoire 28, 37, 38, 41, 42, 46, 47, La Jacqueminière 64, 379
59, 60, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, La Luzerne 16, 26, 27, 52, 53, 55,
63, 67, 114, 115, 156, 157, 215,
72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80,
312, 331, 359, 362, 363, 364, 365,
81, 88, 90, 91, 92, 93, 94, 95, 97,
373, 374, 375
98, 100, 109, 110, 111, 113, 116,
La Rochefoucauld-Bayers 25
121, 127, 139, 148, 149, 150, 151, La Rochejacquelein 25
166, 169, 171, 172, 184, 188, 206, La Source 97, 202, 231, 241, 271,
214, 215, 216, 217, 218, 219, 220, 376, 421
221, 222, 223, 224, 235, 236, 242, Labadie 175, 230, 240, 241, 254,
246, 253, 254, 259, 261, 266, 268, 375, 394, 399, 415
269, 270, 274, 275, 282, 283, 284, Labat 67
285, 286, 287, 288, 291, 292, 293, Laborie 24, 67, 195
296, 301, 303, 305, 306, 307, 308, Labuissonnière 16, 203, 204, 205,
309, 312, 313, 314, 316, 317, 320, 206, 208, 222, 352, 397, 399, 412
325, 330, 342, 343, 345, 346, 347, Laffon de Ladebat 376
348, 359, 361, 362, 365, 366, 368, Lameth Alexandre de 325, 390
377, 379, 380, 381, 382, 383, 384, Lameth Charles de 60, 142, 149,
385 171, 219, 285, 298, 299, 323, 380
Guilhermy Jean-François 316, 319 Lameth Théodore, 318
Landes Chevalier des 67
Hello 376 Lanjuinais 23, 24, 283, 284, 290,
291, 294, 373, 406
Hernoux 141
Lanon 376, 421, 422
Heurtault de Lamerville 379
Larchevesque-Thibaud 24, 26, 50,
Hilliard d’Auberteuil 32, 67, 85, 86,
107, 108, 113, 151, 156, 159, 171,
376 173, 176, 248, 358, 359, 373, 374
Honoré 37, 46, 325, 376, 377, 378, Larnage 69, 368, 380
380, 387, 401, 409, 418, 419, 421, Las Casas (Bartolomé de) 10, 97
422 Lasnier de Vaussenay 141, 325, 379
Hubert 196 Lavit 376, 421
Le Chapelier 245, 328, 390
Joly 28, 33, 39, 46, 66, 100, 116, Le Gardeur de Tilly 156
149, 150, 182, 193, 194, 253, 261, Le Mercier de la Rivière 16, 372,
263, 342, 343, 346, 359, 360, 364, 392, 397, 404, 411
438 L’aristocratie de l’épiderme
Legrand 196, 395 282, 283, 284, 286, 293, 294, 295,
Lescallier Daniel 402, 403 296, 297, 307, 310, 312, 314, 325,
Louis XIV 51, 55, 227, 234, 406 327, 334, 348, 358, 360, 368, 374,
Louis XVI 21, 159, 190, 331, 400 380, 384, 385, 401, 403, 404, 406,
Lucas 284, 307, 389, 424 426, 432, 436
Magol 127, 151, 363, 388 Morel 394
Mahon 253, 354 Mosneron-Delaunay 65, 128, 129,
Maissemy 119, 387 130, 151, 362, 363, 389, 424
Malouet 33, 52, 282, 283, 284, 288, Mozard 107
300, 311, 316, 409, 423, 430
Manlius 69 Nairac Pierre-Paul 52
Marat 311, 377, 378, 385, 408, 427 Necker 23, 27, 63, 127, 373, 375,
Marmé 156 377, 423
Marton 276, 310, 311 Noailles (Louis de) 244
Mauduit (Duplessis de) 196
Maupin (maire d’Acquin) 203 Odo Jeanne 312, 313, 314, 432
Maury 25, 60, 245, 284, 295, 296, Œxmelin 67
300, 301, 302, 309, 311, 315, 319, Ogé Vincent18, 35, 36, 37, 43, 46,
374, 390, 406 169, 199, 200, 201, 203, 204, 205,
207, 208, 209, 239, 241, 242, 249,
Mercy d’Argenteau 141, 390
262, 263, 264, 275, 286, 359, 364,
Merlin (député de Douai) 284, 309,
365, 376, 377, 378, 380, 387, 393,
316, 317, 319
396, 397, 400, 418, 421
Millet Thomas 196, 211
Othello 74, 111
Milly 127, 146
Milscent Claude 248, 249, 250, 251, Palisot de Beauvois 217, 335, 398
307, 325, 398, 401, 402, 423, 433, Payen de Boisneuf 182, 390
438 Pellerin 325, 390
Mirabeau 23, 24, 33, 38, 67, 130, Perrigny 24, 156, 359, 373
131, 132, 134, 135, 136, 137, 138, Pétion 145, 214, 245, 253, 254, 275,
139, 140, 145, 151, 161, 169, 214, 282, 283, 284, 288, 293, 294, 296,
245, 316, 324, 363, 364, 373, 379, 305, 306, 307, 308, 312, 317, 325,
389, 390, 391, 392, 393, 418, 424, 346, 347, 364, 391, 402, 405, 424,
430, 437 425, 439
Moïse, 265 Peynier 173, 195, 197, 198, 211,
Monneron Pierre Antoine 283, 284, 217, 241, 242, 359, 360, 362, 363,
288, 301, 302, 321, 374, 407, 426 364, 365, 395, 396, 400, 438
Mordant de Massiac 25 Picot Marie 141
Moreau de Saint-Méry 10, 16, 22, Pinchinat Pierre 200, 201, 356, 357,
26, 52, 54, 67, 101, 102, 103, 104, 396, 414, 415
105, 106, 107, 108, 113, 114, 118, Poizat 376, 421, 422
119, 126, 140, 151, 169, 226, 237, Poncin 64
238, 240, 259, 261, 263, 265, 267, Praloto 365, 366, 367, 396
268, 269, 271, 273, 275, 279, 280, Raimond Agathe 230
Index 439
Préface............................................................................................... 5
Introduction...................................................................................... 9
Le choc de la « destruction des Indes » et la naissance
du premier droit de l’humanité ................................................. 10
Les colonies esclavagistes françaises d’Amérique ................... 12
Portrait des protagonistes.......................................................... 15
Première partie
Julien Raimond à la recherche d’alliés
Août-Novembre 1789
Deuxième partie
L’offensive du club Massiac contre les Citoyens de couleur
pour le maintien de la traite et de l’esclavage
Novembre 1789 - Mars 1790
Troisième partie
J. Raimond au centre de l’information
entre les deux rives de l’Atlantique
Chapitre 1. J. Raimond publie la Correspondance secrète
des colons, mai 1790......................................................................... 155
Lettre du 12 août 1789 : former d’urgence des assemblées
coloniales à Saint-Domingue .................................................... 156
Lettre du 5 décembre 1789 : un projet ségrégationniste........... 161
Lettre du 11 janvier 1790 : la Déclaration des droits
de l’homme et du citoyen est la terreur des colons................... 163
444 L’aristocratie de l’épiderme
Quatrième partie
Vers la constitutionnalisation
de l’esclavage et du préjugé de couleur
par la Constituante
Mars 1790 - Mai 1791
Annexes
Index.................................................................................................. 435