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RÉSUMÉ L A C O LO N I S AT I O N D E P U C E R O N S
E N C U LT U R E S D E M E LO N
L’ E M P LO I D E S B A N D E S
L’effet de bandes fleuries sur la coloni-
sation des cultures par le puceron Aphis
gossypii et ses ennemis naturels a été
étudié dans le cadre du projet AGATH,
soutenu par le ministère de l’Agriculture, FLEURIES COMME OUTIL DE
de l’Alimentationet de la Forêt (Casdar)
et porté par le Ctifl de 2013 à 2015. Un
mélange fleuri conçu par l’Inra pour attirer
R É G U L AT I O N
les ennemis naturels de pucerons à proxi-
mité des parcelles de melon sans exercer
en parallèle d’effet délétère sur les cultures La mise en place de bandes fleuries au bord des parcelles de melon pourrait permettre
a été évalué dans un réseau de parcelles d’attirer les prédateurs et/ou parasitoïdes de pucerons et y favoriser la régulation naturelle
réparties dans les trois principaux bassins des populations d’Aphis gossypii.
de production de melons. L’attractivité de
ce mélange fleuri vis-à-vis des principaux
ennemis naturels de pucerons a été carac-
térisée. Les densités des populations d’A.
gossypii et d’arthropodes prédateurs et/ou
parasitoïdes de pucerons mesurées dans
des parcelles de melon bordées par ce
mélange fleuri et dans des parcelles iden-
tiques en termes d’itinéraire technique
mais bordées par une surface de sol nu
ont été comparées.
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T TECHNIQUES SÉBASTIEN PICAULT, CTIFL INFOS CTIFL
BANDES FLEURIES JÉRÔME LAMBION, GRAB MAI 2017 N°331
DAVID BOUVARD, SANDRINA DEBOEVRE, ACPEL
DANIEL LAVIGNE, CEFEL
ALEXANDRA SCHOENY, INRA
LA PROBLÉMATIQUE « APHIS
GOSSYPII » EN CULTURES DE
MELON
© INRA
indirects (sécrétion de miellat, dévelop-
pement de champignons saprophytes,
> FOYER D’INFESTATION D’UNE CULTURE DE MELON PAR LE PUCERON APHIS GOSSYPII
transmission de virus) tout en assurant
la durabilité des autres méthodes de virus lorsqu’ils sont portés par ce puce- importante pour de nombreux auxi-
lutte (notamment génétiques), constitue ron (Boissot et al., 2016). Cependant , liaires des cultures (Lambion, 2013).
aujourd’hui un enjeu majeur. Avec la pression de sélection exercée par un Pour les individus adultes, le nectar des
plus de 650 plantes-hôtes répertoriées, déploiement croissant des variétés pos- fleurs, riche en carbohydrates, est par
A. gossypii est un ravageur très lar sédant Vat peut mettre en péril cette ré- exemple une source d’énergie impor-
gement répandu qui peut entraîner sistance génétique comme en témoigne tante (Pinheiro et al., 2013) et leur pol-
d’importants dégâts en culture de me- l’observation de quelques foyers locali- len est un nutriment essentiel pour la
lon. Les dégâts sont soit directs (arrêt sés d’A. gossypii capables de se dévelop- production d’œufs. Les infrastructures
de la croissance des jeunes pousses, per sur melons résistants. agroécologiques peuvent également
crispation des feuilles) soit indirects en héberger des proies alternatives pour les
gênant l’assimilation chlorophyllienne LUT TE BIOLOGIQUE PAR prédateurs (collemboles par exemple)
(développement de champignons sapro- CONSERVATION DES HABITATS ou des hôtes (certaines espèces de lépi-
phytes) et en transmettant différents Certaines pratiques agroécologiques doptères, de diptères ou d’hyménoptères
virus (CMV, WMV, ZYMV, CABYV…) favorisant la régulation naturelle des par exemple) pour les parasitoïdes en
(Ebert & Cartwright, 1997). La protec- pucerons pourraient avantageusement général et les micro-hyménoptères en
tion chimique est largement utilisée en compléter les moyens de protection et/ particulier. Toutes les infrastructures
agriculture conventionnelle mais des ou les mesures prophylactiques mises agroécologiques ne favorisent toute-
baisses d’efficacité sont régulièrement en œuvre par les producteurs de melons. fois pas les mêmes types d’auxiliaires
observées, s’expliquant souvent par L’une de ces pratiques est le contrôle bio- (Picault, 2011). Les mélanges fleuris
l’apparition de phénomènes de résis- logique par conservation des habitats. attirent plutôt les prédateurs et/ou para-
tances aux insecticides (Furk & Hines, Ce type de contrôle consiste à attirer, à sitoïdes consommateurs de nectar et de
1993 ; Delorme et al., 1997 ; Nauen & maintenir et à amplifier (augmentation pollen à un moment donné de leur cycle
Elbert, 2003 ; Herron & Wilson, 2011). du nombre d’individus et amélioration biologique (Syrphidae, Coccinellidae,
En France, les premiers clones d’A. gos- de leur fécondité, de leur longévité et de micro-hyménoptères parasitoïdes…)
sypii résistants à un insecticide (pyrimi- leur sex-ratio notamment) à proximité alors que les bandes enherbées hé-
carbe) ont été mis en évidence à la fin des cultures les populations de préda- bergent plutôt les arthropodes appré-
des années 1980. Parallèlement, le gène teurs et/ou parasitoïdes naturellement ciant la structure compacte et complexe
de résistance Vat, identifié au début des présentes dans l’environnement via la d’une végétation dense (Staphylinidae,
années 1980 (Pitrat and Lecoq, 1980), mise en place d’infrastructures agroé- Arachnidae, certaines espèces de Cara-
est aujourd’hui déployé dans plusieurs cologiques (IAE) en bordure de parcelle bidae). Plusieurs travaux ont mis en
variétés commerciales (première variété (mélanges fleuris, bandes enherbées). évidence l’attractivité de différents types
commercialisée au début des années Ces infrastructures constituent en effet de mélanges fleuris vis-à-vis des auxi-
1990). Ce gène confère, d’une part, une zone refuge (site d’hibernation et/ liaires de culture, ceux constitués à base
une résistance à la colonisation de la ou d’accouplement, protection contre de fleurs sauvages étant souvent les plus
plante par A. gossypii et, d’autre part, les pesticides et/ou les intempéries…) attractifs (Altieri, 2004 ; Meek et al.,
une résistance à la transmission des ainsi qu’une source de nutriments 2002 ; Marshall and Moonen, 2002).
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LA COLONISATION DE PUCERONS EN CULTURES DE MELON INFOS CTIFL
L’EMPLOI DES BANDES FLEURIES COMME OUTIL DE RÉGULATION MAI 2017 N°331
En complément, des travaux réalisés d’auxiliaires a été identifiée comme parcelles traitées et des parcelles non
par Bertolaccini et al. (2011) ont montré pouvant avoir une action sur les popula- traitées (Torres and Yard, 1994).
que les plantes de la famille des Brassi- tions d’A. gossypii en cultures sous abri
caceae, Asteraceae et Chenopodiaceae (Ven Steenis, 1992). Les larves de cocci- LE PROJET AGATH
permettraient de favoriser le dévelop- nelles, par exemple, sont des prédateurs L’aménagement des abords de parcelles
pement ou le maintien des populations importants de ce ravageur : en fonction avec des bandes florales peut permettre
d’auxiliaires du puceron à proximité des des espèces entre 240 et 480 pucerons dans certaines conditions d’attirer, de
cultures légumières, notamment les peuvent être consommés par larve. Le maintenir et d’amplifier les populations
populations de Syrphidae et de Coccinel- micro-hyménoptère Aphidius colemani, autochtones d’ennemis naturels de
lidae. L’effet de mélanges fleuris sur la parasitoïde du puceron commercialisé pucerons à proximité des cultures et par
régulation naturelle des populations de par certains fournisseurs d’auxiliaires, conséquent de favoriser les processus
ravageurs dans les cultures est toutefois a également montré des résultats de régulation naturelle. L’objectif d’une
difficile à évaluer. Des travaux menés encourageants suite à des lâchers en telle mesure est à terme de se rappro-
en cultures de laitue ont par exemple culture de concombre sous abri (Burgio cher d’un écosystème naturel complexe
montré que certaines espèces d’auxi- et al., 1994). Il est aussi déjà utilisé par et résilient, afin de retrouver un équi-
liaires attirées par ce genre de disposi- quelques producteurs de melon bio- libre ravageurs/auxiliaires bénéfique
tif étaient capables de diffuser dans la logique sous abri dans le Sud-Est de pour la production. L’effet de bandes
culture adjacente (espèces de la famille la France, son introduction dans les fleuries sur la colonisation des cultures
des Syrphidae ou des Coccinellidae par cultures se faisant par l’intermédiaire de de melon par A. gossypii et ses ennemis
exemple) et d’y exercer un contrôle biolo- plantes-relais. D’autres auxiliaires tels naturels a ainsi été étudié par l’ACPEL, le
gique significatif (Picault, 2011 ; Alomar qu’Aphelis asychis (Aphelinidae) sont aus- CEFEL, le GRAB et l’INRA dans le cadre
et al., 2008). Selon les cas, celui-ci peut si reconnus comme parasitoïdes du pu- du volet « melon » du projet Casdar
se traduire par une réduction des rava- ceron A. gossypii mais ils ne permettent AGATH (2013-2015) coordonné par le
geurs en deçà d’un seuil de nuisibilité pas à eux seuls d’avoir une régulation Ctifl et labellisé par le GIS PIClég. Les
économique ou bien par une réduction suffisante des populations. En culture travaux mis en œuvre dans ce projet ont
de la durée de colonisation des cultures de plein champ, plusieurs études ont permis de concevoir un mélange fleuri
par les ravageurs. Une large gamme montré l’existence d’ennemis naturel- adapté aux cultures de melon et d’éva-
lement présents dans luer l’efficacité de ce mélange fleuri en
les parcelles (Yard, termes d’attraction pour les prédateurs
1995 ; Ferrari et al., et/ou parasitoïdes de pucerons et de ré-
1994) mais le délai gulation des populations d’Aphis gossypii
entre l’apparition dans un réseau de parcelles réparties
des premières popu- dans le Sud-Est, le Sud-Ouest et l’Ouest
lations de pucerons de la France.
et la mise en place
des ennemis natu-
rels est souvent trop CONCEPTION D’UN MÉLANGE
long, entraînant des FLEURI ADAPTÉ AUX CULTURES
dégâts sur les stades DE MELON
jeunes de la culture.
Des lâchers massifs Les espèces végétales pouvant être im-
peuvent être envisa- plantées au bord des cultures de melon
gés et permettre de pour attirer les ennemis naturels du
pallier cela, mais le puceron A. gossypii doivent être choisies
coût élevé de cette dans le but d’optimiser les effets régula-
technique rend pour teurs tout en minimisant les éventuels
le moment son déve- effets non intentionnels. En effet, une
loppement difficile. augmentation de la diversité dans les
De plus, l’utilisation agrosystèmes peut, dans certains cas,
actuelle de moyens de réduire les populations de bioagres-
protection chimique seurs mais peut également les favoriser
peu sélectifs limite ou avoir un impact neutre. Il est ainsi
l’installation des important de bien choisir les espèces
populations d’auxi- végétales pouvant être utilisées dans le
liaires entraînant cadre d’une stratégie de lutte biologique
© GRAB
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BANDES FLEURIES JÉRÔME LAMBION, GRAB MAI 2017 N°331
DAVID BOUVARD, SANDRINA DEBOEVRE, ACPEL
DANIEL LAVIGNE, CEFEL
ALEXANDRA SCHOENY, INRA
création de foyers d’infestation par les TABLEAU 1 : COMPOSITION DES MÉLANGES FLEURIS TESTÉS PAR LE
pucerons et de sources d’inoculum viral GRAB, L’ACPEL, LE CEFEL ET L’INRA EN 2013, 2014 ET 2015 DANS LE
à proximité des cultures : PROJET AGATH
• être non-hôtes des principales espèces
de pucerons s’attaquant au melon ; ACPEL, CEFEL et INRA GRAB
• être non-hôtes des principaux virus du
melon. Onobrychis viciifolia (sainfoin)
Lathyrus sativus (gesse)
Dans le cadre du projet AGATH, l’INRA Onobrychis viciifolia (sainfoin) Sanguisorba minor (pimprenelle)
(Unité de Pathologie Végétale, Avignon- Lathyrus sativus (gesse) Centaurea cyanus (bleuet)
Montfavet) a poursuivi les expérimen- Sanguisorba minor (pimprenelle) Origanum majorana (marjolaine)
tations initiées en 2011 pour concevoir Centaurea cyanus (bleuet) Calendula officinalis (souci)
Origanum majorana (marjolaine) Matricaria discoidea (matricaire)
un mélange fleuri adapté aux cultures
Ammi majus (grand ammi)
de melon (Schoeny et al., 2014). Des Anethum graveolens (aneth)
expérimentations en conditions contrô-
lées ont permis de caractériser douze hôte des espèces végétales vis-à-vis des cae ne semblent pas être des coloni-
espèces végétales potentiellement inté- principales espèces de puceron décrites sateurs majeurs du melon car les taux
ressantes pour attirer les ennemis natu- sur melon (A. gossypii, A. craccivora et d’acceptation et les potentiels biotiques
rels d’A. gossypii à proximité des cultures M. persicae) ; mesurés sur melon sont très faibles. Par
de melon : ammi élevé, aneth, basilic, • caractériser, par des tests de transmis- conséquent, les espèces végétales hôtes
bleuet, gesse, marjolaine, œillet d’Inde, sion virale (voir encadré ci-dessous), de ces deux espèces aphidiennes ne pré-
pimprenelle, romarin, sainfoin, souci le statut hôte/non-hôte des espèces sentent pas de risque pour la culture de
des champs et souci officinal. Le choix végétales vis-à-vis des principaux virus melon. En ce qui concerne A. gossypii,
de ces espèces végétales s’est appuyé sur infectant les cultures de melon (CMV, quelques espèces végétales présentent
la bibliographie (plantes sécrétant du WMV, ZYMV et CABYV) ; des taux d’acceptation proches de ceux
nectar ou hôtes de pucerons spécifiques Concernant le risque de création de observés sur melon (ammi majus, basi-
pouvant servir de proies aux ennemis foyers d’infestation aphidienne à proxi- lic, œillet d’inde, bleuet, marjolaine)
naturels). L’objectif était de : mité de la culture de melon, les résultats mais les potentiels biotiques mesurés
• caractériser, par des tests d’accepta- montrent que, contrairement à ce que la sur ces espèces sont trop faibles pour
tion d’hôte et des tests d’antibiose (voir littérature laissait penser initialement, représenter un risque pour la culture de
encadré ci-dessous), le statut hôte/non- les pucerons A. craccivora et M. persi- melon.
Concernant le risque de création de
TESTS D’ACCEPTATION D’HÔTE ET DE TRANSMISSION VIRALE foyers d’inoculum viral à proximité de la
culture de melon, les résultats montrent
que certaines espèces sont hôtes du
Tests d’acceptation d’hôte et de potentiel biotique CMV (basilic, bleuet, marjolaine, œillet
Le degré d’acceptation de la plante-hôte ainsi que le potentiel biotique des 3 prin- d’Inde, souci des champs, souci offici-
cipales espèces de pucerons rencontrées sur melon (A. gossypii, A. craccivora et M. nal), du WMV (ammi élevé, aneth, souci
persicae) ont été évalués en conditions contrôlées pour chaque espèce végétale sélec- des champs), du ZYMV (ammi élevé,
tionnée dans cette étude pour attirer les ennemis naturels de puceron à proximité aneth) et du CABYV (aneth) en condi-
des cultures de melon. Pour cela, 10 femelles aptères adultes d’A. gossypii, d’A. crac- tions contrôlées.
civora ou de M. persicae ont été déposées sur une plantule de chacune de ces espèces. À partir de ces éléments, un mélange
Au bout de 24 heures, ces femelles ont été dénombrées puis retirées des plantes, et fleuri minimisant les risques de foyers
le taux d’acceptation a été calculé. Les descendants adultes ont été dénombrés sept d’infestation aphidienne et d’inoculum
jours plus tard afin de calculer le potentiel biotique. Au total, les tests d’acceptation viral a été conçu par l’INRA. Ce mélange
de la plante-hôte et de potentiel biotique ont été répétés dix fois pour chaque couple composé de bleuet, de gesse, de marjo-
puceron-plante-hôte. laine, de pimprenelle et de sainfoin a été
évalué par l’ACPEL, le CEFEL et l’INRA.
Tests de transmission virale Un mélange plus complexe a été évalué
Le statut hôte/non-hôte de chaque espèce végétale sélectionnée dans cette étude au GRAB (Tableau 1).
pour attirer les ennemis naturels de puceron à proximité des cultures de melon a
été caractérisé, en conditions contrôlées, vis-à-vis des principaux virus infectant les
cultures de melon (CMV, WMV, ZYMV et CABYV). Pour cela, les virus non persis- DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL DU
tants CMV, WMV et ZYMV ont été inoculés mécaniquement sur une plantule de PROJET AGATH
chacune de ces espèces végétales, et le virus persistant CABYV a été inoculé via le
vecteur A. gossypii. Au bout de trois semaines, la présence de ces virus à l’intérieur PARCELLES D’ÉTUDE
des plantes a été recherchée à l’aide d’un test ELISA. Au total, les tests de transmis- L’effet du mélange fleuri conçu par
sion virale ont été répétés 6 fois pour chaque couple virus-plante-hôte. l’INRA sur la colonisation des cultures
de melon par le puceron A. gossypii et
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LA COLONISATION DE PUCERONS EN CULTURES DE MELON INFOS CTIFL
L’EMPLOI DES BANDES FLEURIES COMME OUTIL DE RÉGULATION MAI 2017 N°331
TABLEAU 2 : CARACTÉRISTIQUES DES DISPOSITIFS EXPÉRIMENTAUX MIS EN PLACE PAR L’ACPEL, LE CEFEL,
LE GRAB ET L’INRA EN 2013, 2014 ET 2015 DANS LE PROJET AGATH
Part. Année Surf. (m2) Variété Plantation Surf. IAE (m2) Semis IAE
(1)
2013 7 194 Hugo 03/06/13 110 (2 x 55 x 1) 03/04/13
ACPEL 2014 1 900 Escorial(1) 30/05/14 110 (2 x 55 x 1) 02/04/14
2015 9 075 Vigo 18/06/15 110 (2 x 55 x 1) 09/04/15
2013 - - - - -
INRA 2014 3 464 Cisco(1) 27/05/14 330 (2 x 55 x 3) 18/03/14
2015 3 464 Cisco(1) 28/05/15 330 (2 x 55 x 3) 30/03/15
Part. : partenaire ; Surf. : surface de la parcelle d’étude ; Surf. IAE : surface de l’infrastructure agro-écologique étudiée ; IAE : infrastructure agro-écologique.
(1)
Variété sans gène Vat.
ses principaux ennemis naturels a été Chaque bande fleurie avait une lon- des charges de l’agriculture biolo-
évalué en 2013, 2014 et 2015 par l’ACPEL, gueur comprise entre 40 et 50 m et une gique : aucun traitement insecticide n’a
le CEFEL, le GRAB et l’INRA dans le cadre largeur comprise entre 1 et 3 m et occu- été réalisé, la fertilisation a été effec-
d’essais de plein champ menés en sta- pait une surface totale comprise entre tuée à l’aide de fertilisants organiques
tion d’expérimentation ou bien chez 110 et 330 m² selon le lieu et l’année de et les maladies fongiques ont été gérées
les producteurs (Tableau 2). Au total, 11 l’expérimentation. Les plants de melon avec du Cuivrol. Les parcelles suivies
essais ont été mis en place dans le projet ont été plantés sur paillage plastique par l’ACPEL, le CEFEL et l’INRA ont été
AGATH : 3 dans la Vienne (parcelles de entre le 30 avril et le 3 juin selon le lieu cultivées de façon conventionnelle :
producteurs suivies par l’ACPEL), 3 dans et l’année de l’expérimentation. Dans elles n’ont reçu aucun traitement in-
le Tarn-et-Garonne (parcelles expé- tous les essais, les variétés de melon secticide, la fertilisation a été effectuée
rimentales du CEFEL), 3 dans le Gard étaient dépourvues du gène Vat (gène avec des engrais minéraux (engrais
(parcelles de producteurs suivies par le de résistance à A. gossypii) sauf dans la NPK, kiésérite et/ou urée) et les mala-
GRAB) et 2 dans le Vaucluse (parcelles parcelle suivie par l’ACPEL en 2015 où dies ont été gérées avec du Cuivrol et/
expérimentales de l’INRA). Chacune des la variété Vigo, dotée du gène Vat, a ou avec des fongicides de synthèse
parcelles a été divisée en deux parties été utilisée. Les parcelles suivies par le (Fongil FL, Hurricane, AcrobatM DG
de façon à créer une zone bordée sur GRAB ont été cultivées selon le cahier et/ou Heliosol).
deux de ses côtés par le mélange fleuri
étudié (zone dite « melon BF ») et une FIGURE 1 : Exemple de dispositif expérimental : parcelle de melon suivie par le GRAB en
zone sans mélange fleuri sur ses abords 2015 constituée d’une zone « aménagée » sur sa partie Ouest (zone bordée sur deux de ses
(zone dite « melon témoin »). Dans tous côtés par un mélange fleuri) et d’une zone « témoin » sur sa partie Est (zone bordée par un
les essais, le mélange fleuri était compo espace de sol nu)
sé de sainfoin, de gesse, de pimprenelle,
de bleuet et de marjolaine. Dans les 40 m 40 m
parcelles d’essai suivies par le GRAB (Fi-
Blande fleurie Sol nu
1,5
2
Distance à la bande fleurie
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DANIEL LAVIGNE, CEFEL
ALEXANDRA SCHOENY, INRA
TABLEAU 3 : MESURES ET OBSERVATIONS EFFECTUÉES PAR LE L’ACPEL, LE CEFEL, LE GRAB ET L’INRA EN 2013,
2014 ET 2015 DANS LES PARCELLES D’ÉTUDE
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LA COLONISATION DE PUCERONS EN CULTURES DE MELON INFOS CTIFL
L’EMPLOI DES BANDES FLEURIES COMME OUTIL DE RÉGULATION MAI 2017 N°331
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POPUL ATIONS D’AUXILIAIRES À
6
FIGURE 2 : Principaux auxiliaires aphidiphages piégés à proximité des aménagements parcellaires (BF = bandes fleuries ; SN = sol nu)
pour différents essais suivis entre 2013 et 2015
35
Syrphes
30
Névroptères
25
Coccinelles
20
15
10
0
SN
BF
SN
SN
SN
BF
BF
BF
SN
BF
SN
BF
SN
BF
SN
BF
SN
BF
SN
BF
14
14
13
15
14
13
15
14
15
15
14
15
15
en
en
14
14
15
15
1
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
20
oy
20
oy
L
L
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EL
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GR
GR
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AC
AC
IN
IN
AC
AC
AC
CE
IN
AC
CE
CE
CE
Si
Si
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T0 TECHNIQUES
0 SÉBASTIEN PICAULT, CTIFL INFOS CTIFL
BANDES FLEURIES JÉRÔME LAMBION, GRAB MAI 2017 N°331
PE PE SN SN
L F F
PE PE SN SN
FE FE SN SN
FE FE SN SN
PE PE BF BF
L F F
FE FE B F B F
AB AB SN SN
L F F
AB AB SN SN
AB AB BF BF
RA RA N N
AB AB BF BF
SN SN
m m F F
RA RA N N
RA RA F F
SN SN
R A R A B BF
PE PE B B
PE PE 5 B B
FE FE B B
te te B B
DAVID BOUVARD, SANDRINA DEBOEVRE, ACPEL
IN IN 15 S 15 S
IN IN 14 B 14 B
IN IN 4 S 4 S
AC AC 014 014
AC AC 14 14
AC AC 013 013
AC AC201 015
CE CE 014 014
AC AC 013 013
CE CE 015 015
CE CE 014 014
CE CE 015 015
GR R 5 15
GR GR014 014
GR GR 14 14
GR GR 15 15
Si Si en en
en en
IN IN015 15
15 15
DANIEL LAVIGNE, CEFEL
20 20
20 20
1
20 20
20 20
20 20
F
20
20 20
20 20
oy oy
20 20
oy oy
2
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ALEXANDRA SCHOENY, INRA
L
L
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L
L
PE PE
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2
2
2
2
2
2
AC AC
Si
G
L
L
L
L
L
L
L
L
L
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Si
FIGURE 3 : Densité de population de pucerons Aphis gossypii sur le feuillage de melons bordés de bandes fleuries (BF) ou de sol nu (SN)
pour différents essais suivis entre 2013 et 2015 (+/- erreur-type)
Densité moyenne de pucerons par m2
Densité moyenne de pucerons par m2
600
600
Melons BF
500
Melons SN
Melons BF
500
400 Melons SN
400
300
300
200
200
100
100
0
ACPEL ACPEL ACPEL CEFEL CEFEL CEFEL GRAB GRAB GRAB INRA INRA Site
0 2013 2014 2015 2013 2014 2015 2013 2014 2015 2014 2015 moyen
ACPEL ACPEL ACPEL CEFEL CEFEL CEFEL GRAB GRAB GRAB INRA INRA Site
2013 2014 2015 2013 2014 2015 2013 2014 2015 2014 2015 moyen
FIGURE 4 : Densité de population des principaux auxiliaires aphidiphages présents sur le feuillage de melons bordés de bandes fleuries
(BF) ou de sol nu (SN) pour différents essais suivis entre 2013 et 2015
L N N
L N N
AC AC20 20F F
L BF BF
L F F
L SN SN
AB AB S SN
L F F
L BF BF
AB AB SN SN
2F F
N N
RA RA SN SN
F F
SN SN
m m BF BF
2N N
2F F
SN SN
0
20 20F F
LB B
FE FE 4 B 4 B
FE FE13 B 3 B
PE PE4 S 4 S
PE PE 3 S 13 S
FE FE 5 S 5 S
FE FE4 S 4 S
AB A1B4 B 14 B
AB A1B3 B 13 B
AB AB5 B B
AB AB3 S 3 S
RA RA B B
RA RA5 B B
RA RA S S
PE P0E14 14
PE PE13 13
PE PE15 15
FE FE15 15
FE FE13 13
GR GR015 015
GR GR014 014
GR GR01 015
IN IN 015 15
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NIVEAUX D’INFESTATION DES cerons par m2 (environ deux pucerons la densité de population de pucerons n’a
MELONS PAR LE PUCERON APHIS par feuille) pour tous les sites-années pas été significatif dans cette étude (p
GOSSYPII (Figure 3). Des niveaux d’infestions très > 0,05, test de Wilcoxon signé).
Dans l’ensemble, les essais ont été réa- faibles sont en général peu propices à
lisés dans des conditions de pression en la mise en évidence d’un éventuel effet POPUL ATIONS D’AUXILIAIRES DANS
pucerons faibles. En effet, les niveaux significatif du facteur expérimental LES CULTURES DE MELON
moyens d’infestation observés dans la étudié. Conformément à cet attendu, En dépit des faibles densités de popu-
modalité SN ont été inférieurs à 300 pu- l’effet de l’aménagement parcellaire sur lation de pucerons observées, de nom-
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LA COLONISATION DE PUCERONS EN CULTURES DE MELON INFOS CTIFL
L’EMPLOI DES BANDES FLEURIES COMME OUTIL DE RÉGULATION MAI 2017 N°331
breux auxiliaires aphidiphages ont névroptères, taxon le mieux représenté, raison des différentes espèces se sont
colonisé les cultures de melon, quel que n’augmente que de 20 % avec un amé- étalées sur la saison et des pucerons
soit le type d’aménagement parcellaire nagement de type bandes fleuries, et cet spécifiques ont été observés sur bleuet.
(Figure 4). Dans la majorité des essais, effet n’est pas significatif (p > 0,05, test Dans certains cas, la bande fleurie a en
les névroptères (quasi exclusivement de Wilcoxon signé). outre permis une présence continue des
des chrysopes) ont été les auxiliaires les auxiliaires dans la culture, alors que
plus abondants sur melons bordés de sol les auxiliaires n’ont colonisé la parcelle
nu. En moyenne, ils représentent 60 % ENSEIGNEMENT DES témoin qu’une fois les pucerons instal-
des comptages, soit 4 et 5 fois plus que EXPÉRIMENTATIONS MENÉES lés dans la culture. Les essais réalisés en
les autres taxons (coccinelles, syrphes, conditions de production ont permis de
microhyménoptères parasitoïdes). Pour Les bandes fleuries, en comparaison montrer que l’implantation des bandes
quasiment tous les essais, les auxiliaires d’un sol nu, ont attiré dans la culture fleuries doit être soignée : des faux se-
ont été plus abondants sur melons bor- plus d’auxiliaires spécifiques du puce- mis, une irrigation doivent être mis en
dés de bandes fleuries que sur melons ron, essentiellement des coccinelles. place pour améliorer leur installation
bordés de sol nu. Globalement l’effet Ces résultats confirment les observa- et ainsi optimiser leur potentiel régu-
des bandes fleuries est significatif sur tions de la bibliographie selon lesquelles lateur. Même si l’effet sur la réduction
l’abondance totale des taxons suivis (p les mélanges fleuris fournissent des des populations de pucerons en culture
< 0,05, test de Wilcoxon signé). L’effet sources de nourriture par complémen- de melon est encore difficile à mettre
est significatif pour les coccinelles et les tation (nectar, pollen) et supplémenta- en évidence, ces travaux ont permis
syrphes (doublement des populations) tion (proies alternatives) susceptibles de montrer la faisabilité de ces bandes
ainsi que pour les micro-hyménop- d’attirer un grand nombre d’auxiliaires fleuries, et leur capacité à renforcer la
tères (triplement des populations). Les différents. En effet, les périodes de flo- présence d’auxiliaires dans la culture. ▪
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