Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
BLPC 206 63-73
BLPC 206 63-73
Présentation
François de LARRARD
Chef de la section Formulation et mise en œuvre des bétons
Division Bétons et ciments pour ouvrages d'art
Laboratoire central des Ponts et Chaussées
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 2 0 6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1996 - RÉF. 4 0 5 3 - PP. 6 3 - 7 3 63
Le souhait des praticiens est donc de voir >- l'anhydrite naturelle ( C a S 0 ) ou l'anhydrite
4
plus large spectre d'application. La synthèse Ils ont affirmé que l'ettringite est le premier pro-
bibliographique qui suit dresse un état des duit à être formé lors de l'hydratation du C A en 3
lieux qui, espérons-le, permettra d'avancer présence de sulfate de calcium, et que le taux de
dans cette voie. formation de cette ettringite est plus faible avec
l'anhydrite qu'avec les deux autres formes du
sulfate (gypse et h é m i h y d r a t e ) . Cette différence
peut être due au taux de dissolution de l'anhy-
Introduction drite qui est le plus faible. Leurs résultats ont
L a principale difficulté rencontrée dans la for- montré que le temps du début de prise pour une
mulation des bétons à hautes performances m ê m e teneur en S O (3 %) dépend de la nature
?
( B H P ) consiste à choisir le couple ciment-super- du sulfate de calcium utilisé. Il est plus court
plastifiant le plus efficace permettant d'obtenir avec l ' h é m i h y d r a t e (15 min). Cette prise rapide
une réduction maximale de l'eau, une bonne est reliée à la conversion en gypse. Il devient
ouvrabilité et une rhéologie satisfaisante du plus élevé avec l'anhydrite (115 min) et ensuite
béton pendant le temps de mise en œ u v r e . avec le gypse (180 min). L a prise plus rapide et
la demande en eau plus grande avec l'anhydrite
Lors de l'utilisation de superplastifiants dans la sont dues à la formation d'une quantité significa-
confection des bétons à hautes performances, tive de différents aluminates de calcium hydratés
certains ciments en présence d'un certain type de plutôt que d'ettringite. L a prise éclair du clinker
superplastifiant peuvent parfois présenter des
en l'absence de sulfate de calcium (inférieure à
phénomènes d'incompatibilité ciment-super-
1 min) est une c o n s é q u e n c e de l'altération de la
plastifiant : irrégularité des affaissements au
morphologie des produits hydratés comme l'ont
cône d'Abrams initiaux et des temps de prise, et
déjà suggéré Locher et al. [6].
surtout, perte rapide de maniabilité après fabrica-
tion. Il faut donc tenir compte, dans la Cottin [7] a r e m a r q u é que le gypsage optimal se
formulation des B H P , du comportement du situe entre 2,5 et 5 % de S 0 ajoutés, m ê m e
3
couple ciment-superplastifiant qui met en cause avec le clinker le plus riche en C A (13 %). 3
la réactivité du ciment et l'efficacité du super- Uchikawa et al. [3] ont rapporté que, pour un
plastifiant. m ê m e clinker, i l y a plus d'ions SO4"" en solution
avec l'hémihydrate qu'avec le gypse et l'anhy-
drite.
Couple ciment-superplastifiant
Les résultats expérimentaux de Chen et d'Odler
[8] ont montré qu'une très forte teneur en C A 3
Influence des sulfates sur les comportements (30,1 %) dans le clinker peut causer une fausse
rhéologiques du ciment (sans superplastifiant) prise, voire une prise rapide. Lorsque la teneur
en S 0 est faible (1,5 % de S 0 ) , une prise
Les sulfates jouent un rôle important lors de 3 3
64 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 2 0 6 • NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1996 - RÉF. 4 0 5 3 - PP. 63-73
Influence de la température masse moléculaire du P N S peut varier de 2 000 à
sur l'hydratation du ciment 50 000 [17] à [26] et celle du P M S de 7 900 à
20 000 [17], [20], [27] et [28]. E l l e dépend des
L a chaleur constitue un accélérateur de prise et
conditions de préparation par polycondensation
de durcissement des ciments. L a vitesse d'hydra-
[29] à [31]. Les résultats d'analyses par chroma-
tation du ciment augmente avec la température,
tographie montrent que les échantillons commer-
ce qui entraîne une réduction des temps de prise
ciaux de P N S étudiés contiennent des réactifs de
[10] à [13] Alshamsi et al. [13] ont observé une
départ (des acides 1- et 2-naphtalène sulfoni-
diminution des temps de début et de fin de prise
ques), des produits polysulfonés, des oligomères
des pâtes de ciment Portland avec une élévation
et des polymères de masses moléculaires diffé-
de température : le temps de début de prise
rentes [21], [24], [32] à [34]. Les études de
diminue approximativement de 130 à 70 min et
caractérisation du superplastifiant P N S ont
le temps de fin de prise diminue de 180 à
m o n t r é que le p o l y m è r e présente trois structures
100 min lorsque la température augmente de
possibles : linéaire, ramifiée et réticulée [24] à
20 à 50 °C. Ils ont constaté que l'introduction
[26].
d'un retardateur de prise dans les pâtes de ciment
ne provoque aucune influence significative sur la
prise à des températures élevées (40 °C et 50 °C).
Kjellsen et Detwiler [11] ont calculé une énergie
d'activation apparente de 11,2 kcal/mol pour les
degrés d'hydratation compris entre 20 % et
30 %, ce qui suggère que la vitesse d'hydrata-
tion est contrôlée par un processus chimique.
Au-delà de 30 %, l'énergie d'activation appa-
rente diminue graduellement.
Action du superplastifiant
L'efficacité des superplastifiants dépend de leur
Selon la norme N F P 18-333, un superplastifiant
adsorption sur les constituants du ciment (fig. 2).
est un adjuvant qui, introduit dans un béton,
Les m a c r o m o l é c u l e s flexibles adsorbées forment
mortier ou coulis en général, peu avant sa mise
des boucles et des queues de chaîne [35] à [43].
en œuvre, a pour fonction principale de provo-
Elles peuvent avoir aussi une conformation
quer un accroissement important de l'ouvrabilité
aplatie [35] à [39], [44] à [49] : si l'interaction
du mélange.
segment-surface est forte, les segments d'une
Les superplastifiants sont généralement des chaîne peuvent tous être proches de la surface
p o l y m è r e s de synthèse. Les plus utilisés actuelle- (fig. 3). Dans ce cas, l'adsorption se fait sous la
ment sont les polycondensats de m é l a m i n e sul- forme d'une monocouche et la quantité adsorbée
fonée et de formaldéhyde ( P M S ) et les polycon- est faible. Certains auteurs ont noté que l'adsorp-
densats de naphtalène sulfoné et de tion du P N S se fait en monocouche [20], [36],
formaldéhyde (PNS) (fig. 1). Ce sont des poly- [39], [41], [46] à [49]. E n revanche, l'adsorption
électrolytes anioniques et polydispersés. L a du P M S , du PSS (polystyrène sulfonate) et du PS
A
Influence de la concentration en superplastifiant
66 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 2 0 6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1 9 9 6 - RÉF. 4 0 5 3 - PP. 63-73
- une plage de pourcentages élevés d'adjuvant. Fukaya et Kato [49] ont trouvé que les ions cal-
E l l e concerne des dosages en superplastifiant cium sont adsorbés sur le C S H et sur l'ettringite
supérieurs à 1 % et pouvant atteindre j u s q u ' à et augmentent l'adsorption du superplastifiant :
3 % et plus en extrait sec, surtout en présence de ils ont donc un effet direct sur le m é c a n i s m e
fumées de silice. O n constate i c i un p h é n o m è n e d'adsorption du superplastifiant. Pierre et al.
de refluidification du mortier en fonction du [39] et [41] ont aussi montré que l'adsorption du
temps. Cette refluidification passe par un dosage P N S est fortement favorisée par la présence du
optimal en adjuvant à partir duquel la durée de calcium qui « écrante » les charges négatives, ou
maniabilité décroît ; elle est a c c o m p a g n é e d'une qui établit des liaisons par pontage entre la sur-
désorption du superplastifiant ou encore d'une face et les molécules. E n présence de ces ions
augmentation de la concentration de ce p o l y m è r e calcium et malgré l'adsorption accrue du poly-
dans la solution interstitielle du mortier ; m è r e , la charge effective des particules diminue.
- une plage de pourcentages très élevés (supé- Piotte et al. [24] et [67] ont noté que les poly-
rieurs à 3 % d'extrait sec). O n observe des naphtalènes sulfonates (M-PNS) dont le
pertes de maniabilité pratiquement i m m é d i a t e s . contre-ion ( M ) est un alcalin (monovalent inor-
ganique) présentent tous un effet semblable sur
Cependant, dans toutes les applications indus- la viscosité et le temps d ' é c o u l e m e n t des suspen-
trielles, les dosages en superplastifiant restent sions étudiées. Par contre les contre-ions alcali-
inférieurs à 1 % d'extrait sec, sauf pour les no-terreux (divalents inorganiques) et les
B H P , pour lesquels on peut aller j u s q u ' à contre-ions organiques ont tous un effet particu-
1,5 %. lier sur l'efficacité du polymère : soit sur la
fluidité initiale, soit sur la perte de fluidité en
L'addition du superplastifiant conduit également fonction du temps. L a viscosité initiale de la pâte
à un retard de l'hydratation du ciment, donc à un de ciment avec l'incorporation du C a - P N S est
ralentissement du d é g a g e m e n t de la chaleur légèrement plus élevée et, surtout, la perte de
d'hydratation et à une augmentation de la durée fluidité en fonction du temps est plus importante.
de prise [8], [22], [34], [36], [40], [56] à [61]. 2 +
L a présence de M g peut annuler complètement
L'effet retardateur du superplastifiant est étroite- les qualités dispersantes du polymère. L e T M A
ment lié aux dosages de ce produit. Il augmente ( t é t r a m é t h y l a m m o n i u m ) - P N S et le M E A (mo-
graduellement lorsque la concentration en super- noéthanolamine) - P N S donnent des mélanges
plastifiant augmente [21], [24], [36], [53], [59], plus fluides que les autres. E n revanche le T E A
[61] à [65]. C e retard est dû, d'une part, à l'ad- (triéthanolamine) - P N S montre la p r é d o m i n a n c e
sorption du superplastifiant sur le C A [66], ce 3 de l'effet accélérateur du T E A sur l'effet fluidi-
qui e m p ê c h e le contact de l'eau avec ce c o m p o s é fiant du P N S .
et, d'autre part, à la formation des particules plus
fines d'ettringite dont la texture est plus dense en Influence du mode d'incorporation
présence de superplastifiant [47], [58]. Plus l'ad- du superplastifiant
sorption est forte, plus le retard est amplifié. Ce
L e mode d'incorporation du superplastifiant peut
dernier est plus m a r q u é par la faible teneur en
également influencer la fluidité des pâtes de
C A du ciment [53] et [62]. L'effet retardateur
3
ciment et la vitesse d'hydratation durant la
du superplastifiant contribue à l'intensification
période d'induction. L e superplastifiant est géné-
de son effet plastifiant [59]. U n retard important
ralement plus efficace lorsque son addition est
peut entraîner une réduction de la résistance à la
différée [24], [46], [57], [68] à [70] ou frac-
compression aux jeunes âges (1 jour) [29] et
tionnée (une fraction (1/3) dans l'eau de gâchage
[53].
et la fraction restante (2/3) à la fin de malaxage)
[55], [70] à [73].
Collepardi et al. [46] ont observé que l'addition
Influence du contre-ion du superplastifiant
différée du superplastifiant (2 min 30 après
mélange eau-ciment) conduit à une augmentation
L'affinité des polyélectrolytes est plus grande
de la fluidité et du potentiel Zêta. Des dosages en
pour les contre-ions divalents que pour les
p o l y m è r e (0,5 - 1,5 % d'extrait sec par rapport
contre-ions monovalents. Les résultats de Simard
au ciment) incorporé en différé augmentent légè-
et al. [53] ont montré que l'effet fluidifiant du
rement l'effet retardateur.
polynaphtalène sulfonate dépend du type de
contre-ion de ce superplastifiant. L a présence Paillère et Briquet [68] ont signalé que les poly-
des ions calcium diminue l'effet fluidifiant du mères de synthèse incorporés en différé (30 min
P N S par rapport aux ions sodium. E n revanche, et plus, après fabrication des mélanges hydrauli-
l'effet retardateur du superplastifiant est indé- ques) présentent un effet fluidifiant très élevé. L a
pendant du type de contre-ion. présence de polynaphtalène sulfonate dans l'eau
de gâchage entraîne systématiquement un gon- heures à une fausse prise i m m é d i a t e voire une
flement de la pâte de ciment en cours d'hydrata- prise rapide ou raidissement. Ce dernier conduit
tion, très supérieur à celui de la pâte témoin ou à une perte d'affaissement au cône d'Abrams et
adjuvantée avec d'autres produits. Ce gonfle- de maniabilité. Quelques cas d'incompatibilité
ment important, qui se produit entre 7 h et 65 h ciment-superplastifiant ont été présentés dans la
ne se manifeste plus lorsque le superplastifiant littérature [55], [66], [70], [73], [77] à [84].
est incorporé en différé (1 h après confection du
A la suite d'un incident survenu en 1962 à l ' a é -
béton).
roport O ' H a r e de Chicago, Dodson et Hayden
Chiocchio et Paolini [69] ont rapporté que l'ad- [79] ont étudié l'influence du gypse et de l'anhy-
dition différée du superplastifiant (polycondensat drite naturelle sur l'hydratation initiale des
de naphtalène sulfoné et de formaldéhyde ou ciments. Ils ont rapporté que l'ajout d'une quan-
polycondensat de m é l a m i n e sulfonée et de for- tité importante d'anhydrite naturelle à un clinker
m a l d é h y d e ) de quelques minutes augmente la contenant une teneur en C A égale à 6,7 %, pour
3
fluidité par rapport à une addition dans l'eau de fabriquer un ciment Portland à faible teneur en
gâchage. Dans ce cas, la diminution de l'ouvra- S 0 (2,5 %), peut causer un p r o b l è m e d'incom-
3
bilité en fonction du temps est faible et la nature patibilité ciment-adjuvant si l ' o n incorpore
du superplastifiant n'influence pas ce change- 0,2 % d'extrait sec de lignosulfonate par rapport
ment de fluidité au cours du temps. L e moment au poids de ciment comme réducteur d'eau. U n
d'addition optimal est de deux minutes après le raidissement par prise rapide peut se produire
m é l a n g e eau-ciment. Il correspond au début de la rapidement en présence d'un lignosulfonate
période dormante de l'hydratation du ciment lorsque le sulfate de calcium est introduit sous
(sans adjuvant). forme d'anhydrite naturelle ou sous forme de
Dans le cas de l'addition du superplastifiant dans m é l a n g e de gypse et d'anhydrite dont le rapport
l'eau de gâchage, le p o l y m è r e est sensiblement gypse/anhydrite est égal à l'unité. L a vitesse de
adsorbé par le ciment et le sulfate de calcium. passage d'ions sulfate en solution de l'anhydrite
A i n s i une faible quantité de superplastifiant reste naturelle est plus faible que celle du gypse. Cette
disponible dans la solution interstitielle et son différence est encore plus m a r q u é e en présence
effet dispersant sur C S et C S est alors considé- d'un lignosulfonate. Ce dernier, par un effet
3 2
rablement réduit, ce qui explique une augmenta- d'adsorption sélective à la surface des particules
tion de la viscosité avec la teneur en ettringite d'anhydrite naturelle, diminue considérablement
formée. Il y a donc une baisse d'ouvrabilité. E n leur cinétique de solubilisation normale. A i n s i
revanche, une addition différée de quelques l'action directe de l'eau sur le C A conduit à un
3
superplastifiant. Paillère et al. [55] et [71] ont C-09 et 5,60 % pour C-13). Ils ont également
m o n t r é l'intérêt de cette addition fractionnée du r e m a r q u é une dégradation de la fluidité (pas
superplastifiant : une fraction dans l'eau de d ' é c o u l e m e n t ) de trois ciments (C-06, C-09 et
gâchage, l'adjuvant jouant son rôle de plastifiant - C-10) riches en C A (8,27 %, 12,68 % et
3
réducteur d'eau, et la fraction restante à la fin du 11 %) et une prise rapide du ciment C-13
malaxage, voire avant la mise en œ u v r e des lorsque le dosage en superplastifiant diminue de
bétons, l'adjuvant jouant alors son rôle fluidi- 2 % à 1 % avec le m ê m e rapport E / C = 0,35.
fiant. Vraisemblablement, cette prise rapide est due à
la consommation c o m p l è t e du superplastifiant.
Cas d'incompatibilité ciment-superplastifiant Rane [80] a présenté un cas d'incompatibilité
Lors de l'utilisation de superplastifiants dans la ciment-superplastifiant survenu au cours de l ' é t é
confection des bétons à hautes performances, 1984 sur un chantier routier. Il a étudié le com-
certains ciments en présence d'un certain type de portement rhéologique de trois ciments issus
superplastifiant peuvent parfois présenter des d'un m ê m e clinker, broyés à la m ê m e finesse
prises aléatoires, allant d'un retard de plusieurs 2
(~ 3 300 cm /g) et sulfatés à la m ê m e teneur en
68 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 2 0 6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1996 - RÉF. 4 0 5 3 - PP. 63-73
S 0 (2,6 % ) . L e premier ciment contient du
3 dix-huit ciments adjuvantes. Cette fluidification
gypse et une proportion considérable d'anhy- sera facilitée si ces teneurs sont faibles.
drite. L e d e u x i è m e contient du gypse et une
Vernet et Noworyta [70] ont m o n t r é que l'appa-
faible quantité d ' h é m i h y d r a t e .
rition d'un raidissement par prise rapide est en
Pour le troisième ciment, i l y a toujours un relation avec la formation d'un hydrate
m é l a n g e de gypse et d ' h é m i h y d r a t e , mais le C A-PNS
3 (polynaphtalène sulfonate) de la
pourcentage de l ' h é m i h y d r a t e est plus élevé. L a famille C A H , stable en présence d'ettringite.
4 I 3
rhéologie des deux premiers ciments est bonne. Cette formation de l'hydrate C A - P N S sera
3
L e troisième ciment présente une fausse prise d i m i n u é e par une vitesse de diffusion et un flux
due à l'hydratation directe de l ' h é m i h y d r a t e en élevés d'ions sulfate vers la surface du C A . 3
gypse, ce qui implique une chute importante de Pour obtenir ce résultat, on n'augmente pas la
2
la sursaturation en S0 ~ entre 0 et 5 minutes (de solubilité du sulfate de calcium, mais plutôt sa
4,03 à 1,33 g/1). vitesse de dissolution. L a présence d'anhydrite
est donc à éviter. L ' h é m i h y d r a t e est a priori le
E n ajoutant 0,6 % de superplastifiant P N S , la
meilleur produit. Par contre, elle sera favorisée
rhéologie du premier ciment est fortement
par la réactivité du C A qui augmente l a concen-
3
dégradée : le mortier ne s'écoule plus dans le
tration en alumínate à l'interface. L e s ciments
maniabilimètre après 30 minutes de repos, le
riches en C A et contenant une forte proportion
3
refus à la sonde de la pâte pure est maximal
-
de grains très fins seront donc plus sensibles à l a
(40 mm). L a déficience en S O ^ devient plus
prise rapide atténuée. E n revanche, les ciments
importante (-1,75 g/1 contre -0,13 g/1). C'est
éventés, dont le C A est préhydraté pendant le
3
donc un raidissement par prise rapide dû à un
-
stockage, auront une réactivité plus faible et
manque de S O ^ dans l a solution de gâchage. L a
seront donc moins sensibles à la prise rapide
rhéologie du d e u x i è m e ciment reste bonne en
atténuée. Ils ont aussi observé l'influence du
présence de superplastifiant. M a i s i l y a quand
P N S sur le temps d ' é p u i s e m e n t du gypse et sur-
m ê m e une diminution de la sursaturation en
tout de l'hémihydrate, ce qui implique probable-
S0 2
4 (de 0,28 à 0,12 g/1). L a rhéologie du troi-
ment une adsorption compétitive des sulfates et
sième ciment adjuvante est améliorée : la fausse
des sulfonates sur les sites actifs de dissolution
prise sulfate a presque disparu. L e début de
du C A . 3
l'épaississement de la pâte pure n ' a lieu q u ' a p r è s
dix minutes de repos. E n l'absence de superplastifiant, Tagnit-Hamou
et al. [82] et [83] ont observé que la rhéologie
Paillère et al. [55] ont constaté que les dosages
d'un ciment à faible teneur en C A (2,4 %) et en
très élevés en superplastifiant (supérieurs à 3 % 3
d'extrait sec) conduisent à des raidissements S 0 (2,5 %) est dégradée lorsque le rapport
3
rapides des bétons. Fontaine [73] a également eau/ciment est réduit de 0,6 à 0,5 : i l n ' y a pas
observé que les ciments faiblement sulfatés don- d ' é c o u l e m e n t dans le c ô n e de Marsh. E l l e est
nent lieu à des p h é n o m è n e s de prise rapide considérablement améliorée par l'ajout d'une
lorsque le dosage en superplastifiant est aug- forte dose de superplastifiant (1,5 %) en utili-
menté j u s q u ' à 3 % . sant un rapport E / C égal à 0,40. Ces auteurs ont
noté que ce ciment se comporte du point de vue
L e superplastifiant, fortement adsorbé sur les rhéologique comme un ciment sous-sulfaté suite
grains de gypse, ralentit la dissolution des sulfa- à une interaction entre le ciment, le sulfate de
tes, réduisant l a concentration locale en sulfates, calcium et le superplastifiant. Ils ont trouvé que
e m p ê c h a n t la formation d'ettringite et favorisant l'addition de 1 % d ' h é m i h y d r a t e à ce ciment
l'hydratation rapide des aluminates.
adjuvante (1 %) à rapport E / C constant (0,40)
Rollet et al. [81] ont signalé un cas d'incompati- conduit à une amélioration de la rhéologie qui
bilité ciment-superplastifiant survenu au cours de est équivalente à celle d'un m ê m e ciment conte-
l'automne 1989 à Toulouse. Une perte d'affaisse- nant 1,5 % de superplastifiant avec le m ê m e
ment importante se produisait au bout de 5 m i - rapport E / C (0,40), mais sans addition de l ' h é m i -
nutes (de 20 m m à 8 mm) avec un ciment H P R hydrate.
contenant une quantité anormale d'anhydrite en
présence d'un superplastifiant (mélange de poly-
naphtalène sulfonate et de p o l y m é l a m i n e sulfo-
Conclusions
nate). L e p r o b l è m e était résolu en remplaçant le
ciment avec une addition normale de sulfate de L a formulation des bétons à hautes performances
calcium ou en utilisant deux types de superplasti- dépend donc du comportement du couple
fiants P M S différents. Ils ont aussi montré l ' i n - ciment-superplastifiant. C e comportement est
fluence significative des teneurs en chaux libre et fonction de l a réactivité du ciment d'une part, et
en potassium soluble sur la fluidification de de l'efficacité du superplastifiant d'autre part.
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 206 - NOVEMIIBRE-DECEMBRE 1996 - RÉF. 4053 - PP. 63-73 69
Les données de la littérature font ressortir les gypse aura une influence notable sur les vitesses
différents paramètres qui conditionnent la r h é o - de dissolution, donc sur la prise. Une hydratation
logie des bétons, des mortiers ou des coulis en accélérée du C A provoquant une prise rapide
3
R E F E R E N C E S BIBLIOGRAPHIQUES
70 BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 206 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1 9 9 6 - RÉF. 4 0 5 3 - PP. 6 3 - 7 3
[15] ODLER I., A B D U L M A U L A S., Z H O N G Y A L. and Concrete Research, vol. 2 1 , pp. 765-776.
(1987), Effect of Hydration Temperature on
[29] COLLEPARDI M., CORRADI M., VALENTE M .
Cement Paste Structure, Materials Research
Society Symposia Proceedings, vol. 85, (1981), Influence of Polymerization of Sulfonated
Microstructural Development During Hydration Naphthalene Condensate and its Interaction with
of Cement, ed. Leslie J. Struble and P.W. Cement, Proceedings of the Second international
Brown, pp. 139-144. Conference on Development in the Use of
Superplasticizers, Malhotra V . M . éd., A C I SP
[16] S Y L L A H . M . (1988), Reaktionen im Zementstein
68-27, pp. 485-498.
durch Warmebehendlung, Beton, 38, pp. 449-
454. [30] BASILE F., BIAGINI S., FERRARI G.,
COLLEPARDI M. (1986), Effect of Condensation
[17] A I G N E S B E R G E R A . (1969), Sonderdruck ans
Degree of Polymers Based on Naphthalene on
Zement-Kalk-Gips, Heft, 7, pp. 397-405.
Fluidities of Cement Pastes, Proceedings of the
[18] KITSUDA T., Y A M A K A W A C , HATTORI K. 8th International Congress on the Chemistry of
(1975), Method for Maintaining Fluidity of Cement, Rio de Janeiro, vol. V I , pp. 260-263.
Cement Compositions, Canadian Patent
N° 961866, pp. 1-19, janvier. [31 ] A B S I - H A L A B I M . . L A H A L I H S.M., A L - K H A L E D T.
(1987), Water-Soluble Sulfonated Amino-
[19] FERRARI G . , B A S I L E F., D A LB Ô A . , M A N T O N I
Formaldehyde Resins. I. Melamine Resins,
A . (1986), The Influence of the Molecular Weight
Synthesis, Journal of Applied Polymer Science,
of Beta-Naphthalenesulfonate Based Polymers
vol. 33, pp. 2975-2984.
on the Rheological Properties of Cement Mixes,
II Cemento, vol. 83, pp. 445-454. [32] G A R V E Y M.J., T A D R O S Th. F . (1972),
[20] ANDERSON P.J., R O Y D. M., GAIDIS J.M. Fractionation of the Condensates of Sodium
(1987), The Effects of Adsorption of Superplas- Naphthalene 2-sulphonate and formaldehyde by
ticizers on the Surface of Cement, Cement and Gel Permeation chromatography, Kolloid-Z. u.
Concrete Research, vol. 17, pp. 805-813. Z. Polymère, 250, pp. 967-972.
[21] V I C H O T A . (1990), Les polyméthylènenaphtyl- [33] (1988), Etudes chromatographiques
F A R C A S F.
sulfonates : modificateurs de la rhéologie, de polyméthylène-naphtylsulfonates, D E A de
Thèse de doctorat de l'Université Paris V I , nov. l'Université Pierre et Marie Curie, juin.
[22] U C H I K A W A H . , H A N E H A R A S., S H I R A S A K A T . , [34] COSTA U., GOLSIS M . , G U E R R A G . (1992),
SAWAKI (1992), Effect of Admixture on
D.
Application ofHPLC in the Characterization of
Hydration of Cement, Adsorptive Behavior of Naphthalene Sulphonate-based Superplastici-
Admixture and Fluidity and Setting of fresh zers, Proceedings of the 9th International Con-
Cement Paste, Cement and Concrete Research, gress on the Chemistry of Cement, New Delhi,
vol. 22, pp. 1115-1129. vol. IV, pp. 619-626.
[23] YILMAZ V.T., KINDNESS A., GLASSER F.P.
[35] H E S S E L I N K F.Th. (1977), On the Theory of
(1992), Determination of Sulphonated Polyelectrolyte Adsorption, Journal of Colloid
Naphthalene Formaldehyde Superplasticizer in and Interface Science, vol. 60, pp. 448-466.
Cement : a New Spectrofluorimetric Method and
Assessment of the UV Method, Cement and [36] KONDO R., D A I M O N M., SAKAI E . (1978),
Concrete Research, vol. 22, pp. 663-670. Interaction between Cement and Organic
Poly electrolytes, II Cemento, vol. 75, pp. 225-
[24] PIOTTE M . (1993), Caractérisation du
230.
poly(naphtalènesulfonate) - Influence de son
contre-ion et de sa masse molaire sur son inter- [37] W A N G T . K . (1987), Adsorption de quelques
action avec le ciment, Thèse de doctorat (Ph.D.) polymères à l'interface silice-eau : approche
de l'Université de Sherbrooke, avril. expérimentale de leur conformation, corrélation
[25] F E R N O N v. (1994), Caractérisation de produits avec les mécanismes de floculation des suspen-
d'interaction adjuvants / hydrates du ciment, 3 e sions colloïdales, Thèse de doctorat de l'Univer-
Journée Technique Adjuvants, Technodes S A , sité Pierre et Marie Curie, juin.
Guerville, 29 septembre.
[38] ANDERSON P . J . , R O Y D . M . , G A I D I S J . M . (1988),
[26] FERNON (1994), Etude de nouveaux solides
V. The Effect of Superplasticizer Molecular Weight
lamellaires obtenus par coprécipitation d'hy- on its Adsorption on, and Dispersion of Cement,
drate aluminocalcique et de sulfonate aromati- Cement and Concrete Research, vol. 18,
que, Thèse de doctorat de l'Université d'Or- pp. 980-986.
léans, novembre.
[39] PIERRE A. (1988), Contribution des interactions
[27] CUNNINGHAM J . C ,DURY B . L . ,G R E G O R Y T.
électriques dans les mécanismes d'adsorption
(1989), Adsorption Characteristics of Sulfo-
des fluidifiants du ciment sur le dioxyde de
nated Melamine Formaldehyde Condensates by
titane et le carbonate de calcium. Application à
High Performance Size Exclusion Chromatogra-
la dispersion des particules, Thèse de doctorat
phy, Cement and Concrete Research, vol. 19,
de l'Université de Franche-Comté, Besançon,
pp. 919-928.
juillet.
[28] YILMAZ V.T., GLASSER F . P . (1991), Early
Hydration of Tricalcium Aluminate-Gypsum [40] FOISSY A. (1989), Les effets fluidifiants,
Mixtures in the Presence of Sulphonated Mela- Séminaire « Connaissance générale du béton »,
mine Formaldehyde Superplasticizer, Cement ENPC, novembre.
BULLETIN DES LABORATOIRES DES PONTS ET CHAUSSÉES - 2 0 6 - NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1996 - RÉF. 4 0 5 3 - PP. 6 3 - 7 3 71
[41] PIERRE A., L A M A R C H E J.M., MERCIER R., Cement and Concrete Research, vol. 23,
FOISSY (1989), Adsorption d'un fluidifiant
A. pp. 939-950.
du ciment sur le carbonate de calcium, Cement
and Concrete Research, vol. 19, pp. 692-702.
[54] PIERRE A., C A R Q U I L L E C , L A M A R C H E J.-M.,
FOISSY A., MERCIER(1988), Adsorption
R.
[42] PEFFERKORN E., JEAN-CHRONBERG A . - C , d'un polycondensat d'acide naphtalene sulfo-
(1989), Relaxations structurales de
V A R O Q U I R. nique (PNS) et de formaldehyde sur le dioxyde
polyélectrolytes adsorbés à une interface solide- de titane, Cement and Concrete Research,
liquide, C. R. Acad. Sci. Paris, t. 308, Série II, vol. 18, pp. 18-28.
pp. 1203-1208.
[55] PAILLÈRE A.-M.. SERRANO J.-J., G R I M A L D I G.
ABSTRACT
Cement-buperplastlcizer compatibility in htqh-performance eoncmtes. a bibliographic synthesis