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Semestre 3
Économie monétaire et financière
La monnaie est un bien qui n'a pas d'utilité en soi. Elle ne peut satisfaire directement
des besoins. Elle n'est utile que dans le cadre d'une économie marchande. Sans
s'immiscer dans les débats savants et idéologiques, disons simplement que
l'économie marchande est caractérisée par un grand développement des échanges.
Elle s'oppose à l'économie de subsistance où l'autoconsommation est dominante.
La monnaie est un phénomène social. Elle ne peut assurer son rôle de moyen de
paiement que lorsqu'elle bénéficie de la confiance de l'ensemble des agents
économiques. Il s'agit en fait de la confiance dans les institutions qui créent la
monnaie et qui constituent, grosso-modo, le système bancaire. En général on ne
peut refuser un paiement en monnaie, on dit qu'elle a cours légal.
Nous présentons dans une première section les fonctions et les formes de la
monnaie pour consacrer la deuxième à la notion de "masse monétaire" avant de finir
le chapitre par un aperçu sur les théories monétaires.
Au cour de l'histoire la monnaie a revêtu des formes successives, élaborées par les
Hommes pour s'adapter à l'évolution des échanges générée par les changements
perpétuels des conditions socio-économiques. L'étude de cette histoire permet de
dégager deux principales constatations :
- L'esprit de créativité de l'Homme. Il a su, chaque fois que les conditions socio-
économiques l'ont exigé, mettre au point la forme de monnaie le plus adéquate pour
permettre la continuité du développement des échanges.
- La dématérialisation progressive de la monnaie. La monnaie a perdu
progressivement sa consistance physique. D'abord une marchandise, puis métallique
(pièces en métal précieux), ensuite en papier avant de devenir scripturale (jeux
d'écriture) et enfin électronique.
A) La monnaie marchandise.
Pendant longtemps, des marchandises (sel, œufs, coquillages,
...) ont joué le rôle de monnaie. Il fallait dépasser à tout prix les insuffisances du troc
et en a pensé utiliser un objet donné comme moyen de paiement. Cependant, le
recours à la monnaie marchandise a révélé un ensemble d'inconvénients qui ne lui
permettaient pas de remplir parfaitement les fonctions de la monnaie. En effet la
marchandise n'est pas toujours divisible, souvent périssable et encombrante
(difficultés d'utilisation). C'est pourquoi on a évolué vers la monnaie métallique.
B ) La monnaie métallique.
Au départ on a utilisé les métaux peu ou non précieux (cuivre,
fer, bronze, ...). Mais ce sont les métaux précieux, l'or et l'argent qui vont s'imposer et
assurer pendant de longs sicles le rôle de monnaie. Ces deux métaux ont une
double valeur :
- Une valeur objective. Ils sont généralement divisibles, inaltérables et pas du tout
encombrants (grande valeur d'achat sous un petit volume).
- Une valeur subjective qui résulte de leur beauté et leur rareté.
La monnaie métallique a été utilisée sous plusieurs formes successives :
# La monnaie pesée. Le prix est annoncé en poids et le métal est pesé à chaque
transaction.
# La monnaie comptée. Fabrication de pièces artisanales, sans inscriptions ni un
poids déterminé.
# La monnaie frappée. On estime en général que le début de l'histoire de la
monnaie coïncide avec l'apparition de la monnaie frappée.
La monnaie comptée (pièces artisanales) ne présente pas des garanties en terme de
pureté et de teneur en métal précieux. Pour remédier à ce problème, il a fallu assurer
les usagers que les pièces en métal ne font l'objet d'aucune fraude. Les autorités
politiques ou religieuses admises à la frappe appliquent sur les pièces de monnaie
un signe distinctif garant de la teneur en métal et du poids. Elles comportent
désormais des inscriptions et une effigie qui les rendent totalement acceptables étant
conformes aux règles de la loi. Elles ont alors un pouvoir libératoire illimité, elles
permettent de s'acquitter d'une dette (ou assurer un paiement) quelle que soit sa
valeur.
Par la suite, les banques ont remarqué que les demandes de convertibilité diminuent
considérablement (intensification de la confiance des agents économiques). Elles en
profitent pour procéder à l'émission d'une quantité de billets dont la valeur nominale
globale dépasse la valeur du stock d'or dont elles disposent : couverture métallique
partielle. La convertibilité devient elle aussi partielle : elle ne concerne plus que les
lingots d'or.
Au lendemain de la crise économique de 1929, les principaux pays de l'époque
(Angleterre, USA, France) suspendent définitivement la convertibilité interne de leurs
monnaies en or. On est passé ainsi au COUR FORCÉ.
Précisons qu'aujourd'hui, l'émission des billets de banque est un monopole de la
banque centrale (voir chapitre 2). D'un autre côté, on peut parler de monnaie
fiduciaire au sens large pour intégrer les pièces de monnaie. Ces dernières sont
élaborées aujourd'hui à partir d'un métal quelconque, elles n'ont pas de valeur
intrinsèque. Elles constituent la monnaie divisionnaire.
D ) La monnaie scripturale
Lorsque les banques réceptionnent des dépôts pour une échéance donnée (dépôts à
terme ou bloqués) et accordent des crédits à partir de ces dépôts pour en général la
même échéance, il n'y a pas de création de monnaie. Les banques ne font que
prêter aux uns les disponibilités des autres. Le taux d'intérêt appliqué aux déposants
est évidemment inférieur à celui demandé aux emprunteurs. L'écart entre les deux
taux d'intérêt constitue la rémunération des banques pour le rôle d'intermédiation
qu'elles assurent.
Avec l'arrivée des banques de dépôt la situation va considérablement changer. Ces
banques reçoivent essentiellement des dépôts à vue qui restent continuellement
disponibles pour les déposants. Ces derniers peuvent en avoir usage (retraits,
virements, ...) à tout moment. Les banques observent le comportement des
déposants et constatent, en se basant sur la loi des grands nombres, que les dépôts
à vue ne sont globalement utilisés qu'à un faible pourcentage. Elles en profitent pour
accorder des crédits malgré la nature de leurs dépôts (à vue). Il résulte de cette
pratique une création de monnaie. En effet LES BANQUES "ALIMENTENT" LES
COMPTES DES BÉNÉFICIAIRES DE CRÉDITS SANS DÉBITER LES COMPTES
DES DÉPOSANTS.
La monnaie créée est scripturale (jeux d'écriture), elle est inscrite sur les comptes
des clients des banques et dispose d'un pouvoir libératoire illimité. Elle est mesurée
par l'ensemble des dépôts en comptes courants auprès des banques. Elle permet
donc d'assurer sans limite un paiement ou un règlement de dettes. Elle circule par
chèques, par virements et par cartes bancaires.
Aujourd'hui, la monnaie scripturale domine largement par rapport à la monnaie
fiduciaire, notamment dans les pays modernes ou qui se modernisent.
Cependant l'identification des actifs financiers (ou supports de la monnaie) n'est pas
un exercice aisé. En effet, les actifs financiers n'ont pas tous un caractère monétaire
parfait (dans le sens "permettre l'acquisition immédiate de biens et de services").
Certains sont parfaitement liquides et leur intégration dans la masse monétaire est
automatiques en raison de leur caractère monétaire incontestable. D'autres en
revanches sont plus ou moins liquides et on se pose la question de savoir si on doit
ou non les inclure dans la masse monétaire.
On distingue
# Les actifs liquides : billets et pièces de monnaie + les dépôt à vue
mobilisables par chèques (monnaie scripturale).
Le Maroc a adopté la stratégie suivante : sont retenus dans la masse monétaire les
actifs parfaitement liquides (monnaie fiduciaire et monnaie scripturale) en plus de
ceux qui sont conformes aux critères suivants :
- Actifs aisément et rapidement convertibles en monnaie,
- actifs émis et/ou gérés par les banques,
- actifs mobilisables sans perte en capital.
L'objet du débat entre les économistes qui se sont intéressés à la monnaie est de
déterminer jusqu'à quelle mesure les phénomènes monétaires impactent-ils
l'évolution de l'activité économique. Deux points de vue se dégagent : celui de la
monnaie passive et celui de la monnaie active.
Les courants classique et néoclassique considèrent que la monnaie est passive. Elle
n'affecte pas l'économie réelle, elle n'a pas d'incidence sur le niveau de la la
production et de l'emploi par exemple. Il n'y a pas d'interactions ente la sphère
monétaire et la sphère réelle (dichotomie). Ainsi la monnaie est neutre, ce n'est qu'un
voile qui cache le fait que les biens s'échangent contre des biens. La monnaie n'est
pas désirée pour elle même, elle acquise pour être remise en circulation.
Cette théorie repose sur deux principaux fondements :
On part de l'égalité MV = PY
M est la quantité de monnaie en circulation, V est la vitesse de circulation de la
monnaie, P représente les prix et Y le volume de la production
PY est la valeur monétaire globale de la production.
Les partisans de cette théorie estiment que V et Y sont constants. V est liée aux
habitudes de consommation qui sont en général stables. Y est conditionné par les
disponibilités matérielles et techniques qui, elles aussi, sont stables à court et moyen
terme. DANS CES CONDITIONS UN ACCROISSEMENT DE LA QUANTITÉ DE
MONNAIE EN CIRCULATION (M) N'A POUR INCIDENCE QU'UN
ACCROISSEMENT DES PRIX (inflation).
Si en plus tous les prix augmentent proportionnellement à M (dans le même
rythme que M), les prix relatifs ne changeront pas, d'où le maintien des mêmes
conditions de production et d'échange. Le pouvoir d'achat non plus ne change pas
puisque le salaire, prix du travail, augmente lui aussi dans le même rythme que les
autres prix : L'ÉCONOMIE RÉELLE N'EST PAS IMPACTÉE.
Pour J.M KEYNES la monnaie est active, elle affecte l'évolution de la production et
de l'emploi. Pour justifier son point de vue, il avance que la détention de la monnaie
ne répond pas au seul motif de transaction comme le pensent les classiques. Pour lui
il y a trois motifs de détention de la monnaie.
1) Motif (ou encaisse) de transaction. C'est la part du revenu réservée
pour les dépenses courantes et qui se renouvellent régulièrement (alimentation,
habillement, loyer, électricité, gaz, ...). L'encaisse de transaction est proportionnelle
au revenu, elle est d'autant plus élevée que le revenu est important.