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à en juger par la manière dont il parle du repas funéraire chez les païens, semble
L'ENVIRONNEMENT CULTUEL DU DÉFUNT ... 383
de~lt grâces ;\ Dieu; ils suivent en cortège son cadavre comme celui d'un vo-
yageur qui se rend d'un endroit à un autre. Si un enfant naît, ils louent Dieu
et s'il meurt en bas-âge, ils louent Dieu encore davantage parce qu'il a passé
sans péché dans ce monde. Et si un des leurs trépasse dans l'impiété et les
péchés, ils pleurent sur lui et gémissent comme sur quelqu'un qui recevra sa
punition l). - Cf. aussi CLÉMENT D'ALEXANDRIE, Strom. VII, 12 (PG. 9,508 B).
? Pour qui ne serait pas sensible à cette mutation dans les représenta-
9 Sur ce dernier point, voir TH. KLAUSER, Der Ursprung des Festes Petri
corpora christianorum terra non texit, sed nullum eorum quisquam a caelo
et terra separavit quam totam implet praesentia sui, qui novit unde resusci-
tet quod creavit ». Le soin que mettent les chrétiens, pourvus des moyens
nécessaires, de préparer de leur vivant la tombe dans laquelle ils reposeront,
leur souci de marquer le lieu de sépulture par des inscriptions funéraires ou
par des signes distinctifs, toute la complexité des usages iunéraires enfin,
vont à l'encontre du détachement exprimé par Augustin.
25
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dans les différents pays ou régions dans lesquels vivaient les chré-
tiens, rites élagués des éléments soit mythologiques soit érotiques
qui pouvaient s'y rencontrer 13. L'adaptation aux coutumes lo-
cales, en matière funéraire, était expressément recommandée 14.
En voici une rapide synthèse 15.
La parenté immédiate et les amis s'occupent directement
de la toilette du défunt, de son exposition sur le lit mortuaire
et du transfert du cadavre à la tombe. En règle générale cependant,
un corps spécialisé, les funerarii, les pollinctores, les vesPillones
se chargent de cette besogne, fournissent les instruments néces-
saires, et font office de porteurs. Les fossores, fossarii ou copiatae
ouvrent la tombe, taillent les loculi ou les arcosols, procurent
les sarcophages, aménagent les cubicula ou les mausolées de di-
verses catégories. Les collegia funeraticia (si les ressources per-
sonnelles du défunt ou de sa famille ne suffisent pas) acquièrent
le ius ad sepulchrum, à moins que des familles amies n'accueil-
lent le cadavre dans leurs propres mausolées; ils veillent au respect
des lois fondamentales relatives à l'inhumation, en particulier
ils s'assurent que la tombe est bien constituée par un locus purus,
c.à.d. un locus neque sacer, neque sanctus, neque religiosus, et qu'elle
se situe en dehors des murs ou des enceintes des localités.
16 Sur ce point. voir FR. J. DOLGER, Die Totenmesse, dans Ichthys, Il,
~o Ainsi JÉRÔME, Epist. 108,29. - Voir aussi note 16 (dies obitus et dies
depositionis) .
21 Acta proconsularia Cypriani V, 6: (l Ita beatus Cyprianus passus est ...
Inde pey noctem sublatum (corpus eius) cum cereis et scolacibus ... cum voto
et triumpho magno deductum est ~.
22 C. Theodos. IX, 17,5 (février 363). - Ce texte n'a pas été repris dans
le Code de Justinien. - Il n'y a pas de différence à faire, semble-t-il, entre
/unus et e:çsequiae, à la période paléochrétienne; dans la langue classique,
/unus désigne les funérailles au sens général; le cortège ou convoi se dit pro-
prement e:çsequiae. Fun~ra, au pluriel, est fréquent, les funérailles compor-
tant plusieurs éléments.
23 Concile de Clermont (535) c. 3: ( Ne paliis vel ministeriis divinis de-
(tl025).
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4. La séPulture (depositio).
Le mode de sépulture des fidèles, durant l'antiquité paléo-
chrétienne, a toujours été l'inhumation et non la crémation,
comme nous l'avons rappelé plus haut ".
Auprès de la tombe ou dans les environs immédiats ", le
feretrum est posé à terre. Comme ils l'avaient fait lors de la mise
sur le lit d'apparat, parents et amis donnent un baiser au dé-
funt, sur le front ou sur les lèvres. Pour les personnages impor-
tants, un orateur prononce la laudatio funebris. Le défunt est
oint, et l'assistance lui adresse un dernier adieu et des acclama-
tions 30. Il est placé dans la tombe sur un lit de lauriers oU d'her-
tières chrétiens, en surface ou souterrains, n'ont jamais été que des lieux d'in_
humation; les seuls actes cultuels qui s'y déroulaient étaient des actes rela-
tifs à la sépulture. Ce fait est définitivement acquis; cf. TH. KLAUSER, Die
cathedra im Totenkult, p. 123-126.
sa Sur ces acclamations funéraires, conservées par les inscriptions funé-
raires, voir C.M. KAUFMANN, Bandbuck der altchristlicken EPigraPhik, Frei-
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bes odorantes; l'on répand sur lui de la chaux vive, surtout quand
l'inhumation a lieu dans une catacombe. La tombe creusée en
terre est refermée, le couvercle du sarcophage scellé, le loculus fermé
par des dalles soigneusement jointes et obturées. Certains indices
nous permettent de supposer que dans la tombe le défunt est
tourné vers l'Est; cette orientation funéraire n'a pas de rapport
immédiat avec l'orientation cultuelle dans la prière.
La tombe est recouverte de fleurs ou de guirlandes, de roses,
de violettes. Une médaille, un verre doré, une lampe à huile signalent
et identifient la tombe des plus humbles; les plus fortunés ont pris
soin de faire apposer sur la tombe une inscription funéraire men-
tionnant, avec le nom et les acclamations, le jour et le mois de la
depositio (rarement l'année) en vue de la célébration des anni-
versaires.
Avant de se quitter, les participants se réunissent à proxi-
mité de la tombe, quand les lieux le permettent, ou dans les
environs immédiats, parfois dans un lieu couvert approprié, pour
prendre en commun le repas funéraire (refrigerium). La présence
de l'évêque ou d'un presbytre, signalée dès l'aube du Ille siècle,
reste facultative durant toute la période paléochrétienne, sauf
quand l'Eucharistie est célébrée auprès du lieu de la depositin,
seule ou indépendamment du refrigerium 81.
Le cérémonial funéraire complexe qui vient d'être brièvement
retracé ne s'achève pas avec le jour de la depositio; il est renouvelé,
pour ce qui concerne la partie en connexion immédiate avec
la tombe [banquet funéraire et (ou) Eucharistie inclusivement],
le troisième, le septième (ou neuvième), le trentième (ou quaran-
tième) jour. Il est renouvelé aussi au jour anniversaire de la de-
positio, de même lors des rosalia, des dies violarum ou violationis,
ainsi qu'au moment des caristia (charistia) funéraires.
Dès lors, trois questions fondamentales nous sont posées.
les vivants pour qui les soins dont amis et voisins entourent le
défunt sont autant de marques de sympathie et de déférence;
Augustin l'a dit à son ami Paulin de Nole, d'une manière un peu
désabusée sa.
Probablement aussi. ne serait-ce que d'une manière inconsci-
ente ou instinctive, un cérémonial destiné à «( sécuriser» les vivants,
à dissiper leur culpabilité à l'endroit du défunt et à diminuer,
par un faste même dérisoire, leur propre anxiété devant la mort.
Cependant, semble-t-il, il y a plus. Aux rites funéraires re-
vient une fonction apotropaïque, assez ambiguë du reste: paci-
fier le défunt, se le concilier, mais s'en défendre aussi, afin d'éviter
son retour. Cette fonction défensive est précieuse et souhaitable
surtout quand le défunt est un ahore, un biothanate (mieux:
biaiothanate), un enfant mort au moment de l'accouchement.
Les extraordinaires superstitions auxquelles chacun des nombreux
usages funéraires ont donné lieu après la période paléochrétienne,
depuis la toilette du défunt jusqu'au cortège vers le lieu d'inhuma-
tion, suffiraient pour étayer l'eXplication proposée 84.
Une hypothèse explicative, à laquelle on songe tout naturel-
lement, doit être écartée, l'hypothèse selon laquelle les rites fu-
néraires seraient des adjuvants dans la lutte que mènerait « l'âme )
du défunt avec les démons aériens après la mort. Il est bien vrai
qu'au moment du trépas, pendant l'agonie du fidèle, comme pen-
dant la passion du martyr, les démons se déchaînent contre le
chrétien 35.
38 AUGUSTIN, De cura pro mortuis, III, 2/3 (CSEL 41,627): «Curatio fu-
insepulti, voir F.J. DëLGER, Antike Parallelen zum leidenden Dinokrates, dans
Antike und Ckr-istentum, II, 1930, p. 1-40; FR. CUMONT, Lux Perpetua, Paris,
1949, p. 303-340; J.H. \V'ASZINK, Biothanati, dans Reallexikon filr Antike und
Christentum, II, 1954, 391-394; Sur les superstitions médiévales, voir les élé-
ments bibliographiques recueillis par A. DaR RER, Totenbriiucke. IV. Religio se
Volkskunde, dans Lexikon fiir Theologie und Kirche, 10, 1965, 266-269, et en
particulier les renseignements fournis par H. BACHTOLD-STAUBLI, HandwÔ1'-
terbuck des deutschen Aberglaubens, VIII, 1936/1937 (pratiquement le yo-
lume entier).
35 Ainsi dans la Passio PerpetHae et Felicilatis IV, 10 (vision de l'échelle);
X, 4-14 (la lutte dans l'amphithéâtre est une lutte contre le démon): (! et in-
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tellexi me non ad bestias, sed contra diabolum esse pugnaturum 1), Cf. FR. J.
DOLGER, Der Kamp! mit dem Agypter, dans Antike und Christentum, 1932,
p. 177-188; A. STUIBER, Refrigerium interim, p. 81-88 (Die Wirksamkeit von
Diimonen beim Sterben).
36 Ce qui est dit, vaut pour le défunt ordinaire comme pour le martyr,
bien qu'il faille reconnaitre que nos textes, rares, se rapportent en premier
lieu au fidèle souffrant dans les supplices. Le peu d'intérêt que l'antiquité
paléochrétienne a attaché à une prétendue lutte de l'âme des défunts avec
les démons après la mort, tranche avec l'influence capitale reconnue aux ma-
chinations démoniaques pendant la vie du chrétien: voir A. STUIBER, op. cit.,
p. 82/83 contre J. QUASTEN, Der gute Hirt, dans Miscellanea G. Mercati, l
(Studi e Testi 121), Città deI Vaticano, 1946, p. 1-273. - Texte fondamental
dans la Passio Perpetuae et Felicitatis, XI (vision de Saturus): «et coepimus
terri a quattuor angelis in orientem (aucune indication sur une lutte quelcon-
que avec des esprits aériens) &. La psychomachie post mortem avec les dé-
mons, inexistante dans la vision paléochrétienne, est à distinguer de la re-
présentation populaire d'une lutte entre anges et démons (et non entre âme
du défunt et démons), dont le cadavre du défunt est l'enjeu (p.ex.: lutte entre
s. Michel et les démons pour le corps de Moïse); cf. F. ANDRES, Die Engellehre
der griechiscken Apologeten des 2. Jh., Paderborn 1914, et les articles corres-
pondants chez BÂCHTOLD-STÂUBLI.
3r JUSTIN, Dialogue, 105,3-5 (GOODSPEED 221-222): «Et quand (le psal-
miste) demande que son âme soit sauvée de l'épée, de la gueule du lion, de
la patte du chien, c'était une prière pour que personne ne s'empare de notre
âme; pour que, quand nous parvenons à l'issue de la vie, nous demandions
les mêmes choses à Dieu qui a le pouvoir de repousser tout impudent mau-
vais ange et de l'empêcher de prendre notre âme ... C'est Dieu qui nous en-
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seigne ... à l'issue de la vie, de demander que nos âmes ne tombent pas au pou-
voir de quelque puissance comme celle-là (qui s'est manifestée à propos de
Samuel; cf. l Sam. 28) )}. - Le dossier dans A. STUIBER, op. cit., p. 81-88.
38 TERTULLIEN, De anima 53,5~6 (cc II, 860/861): «Tune et enuntiat
Hippolyte de Rome; cf. B. BOTTE, Note sur l'auteur du, «De Universo)) at-
tribué à saint Hippolyte, dans Recherches de théologie anâenne et médiévale,
18, 1951, p. 5-18 (contre l'attribution à Josippe, prêtre romain, proposée
par P. NAUTIN, HiPpolyte et JosiPpe, Paris, 1947, p. 98/99). - Le texte est
édité par K. HOLL, Fragmente vornicanischer Kirchenviiter aus den Sacra Pa~
rallela, Fragm. 353 ( de Universo) 137-143 (TU NF. V, 2), Leipzig, 1899. Les
Sacra Parallela (dans lesquels est conservé le Fragment) est un ouvrage ascé-
tique attribué à Jean Damascène.
40 Voir PAULy-WISSOWA, RE Supplem.entum, III, 267-322 (s.v. Daimon)
et KITTEL, Theol. Worterbuch, Il, 6~8, n. 59.
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41 Il faut répéter que les tombes, les cimetières en surface ou sous terre,
n'ont été à l'époque paléochrétienne que des lieux d'inhumation (et non des
lieux de culte communautaire); les seules actions liturgiques qui s'y soient
déroulées relèvent exclusivement du culte funéraire; voir FR. WIELAND, Mensa
und Conlessio (Verofientlichungen aus dem Kirchenhistorischen Seminar Mlin-
chen II, 11), München, 1906; TH. KLAUSER, Die cathedra im Totenkult (LQF 21),
::\HinsterjWestf., 1927, p. 123-126.
4:1 E. FREISTEDT, Altchristliche Totengediichtnisstage und ihre Beziehung
cod. CLXXI (éd. BEKKER, p. 118; PG. 103,499; éd. R. HENRY, PHOTIUS, Bi-
bliothèque, II, Paris, 1960, p. 166), qu'il attribue à un prêtre nommé Eustra-
tios, selon laquelle le 3e jour a été choisi en raison de la résurrection du Sei-
gneur, le ge jour, parce que le Christ est apparu ce jour-là à ses disciples pour
la première fois, et le 40 e jour parce que le jour de la Pentecôte, le Seigneur
s'est manifesté pour la seconde fois. Il en va de même de l'explication don-
née par Goar (Eucllologion, éd. de Venise, 1730, p. 434 n. 3): le 3e jour est le
jour de la résurrection du Christ, le ge jour rappelle les neuf choeurs des anges,
le 40 e jour, la durée du deuil des Israélites pour la mort de Moïse.
44 K. KRU~rBACHER, Studien zu den Legenden des hl. Theodosios (Nachtrag
%ur Sitzung der philos.-phil. Classe vom 7. Mai 1892, dans Sitz.-Ber. der k.
bayr. Akad. d. lViss) , Mtinchen, 1892, p. 341-355.
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~5 On aura remarqué que le second document dont il été fait état pluS
haut, connecte au commentaire physiologique des anniversaires une expli-
cation eschatologique: cette explication qui n'est pas celle de l'Eglise o:'licielle
à la période paléochrétienne, a été répandue dans les milieux proches du gnos-
ticisme; ainsi dans les Acta Philippi (2 e moitié du lIe s.) 137 (éd. BONNET,
AAA II, 2, p. 69): (l Tu mourras d'une manière sainte et, conduit par mes saints
anges, tu parviendras avec eux au paradis ... Mais tu seras exclu du paradis
pour quarante jours, tu seras terrorisé par le glaive de feu et tu gémiras, parce
que tu as fait du mal à tes ennemis. Après ces quarante jours, je t'enverrai
l'archange Michel, lequel domptera l'épée à l'entrée du paradis, et tu con-
templeras les justes qui ont vécu dans l'innocence, et alors toi aussi tu tom-
beras à genoux devant la magnificence de mon Père dans les cieux D. - En
Orient, comme en Occident, à partir du haut moyen âge, l'idée d'un juge-
ment particulier après la mort se fait jour; ainsi dans le Nomocanon de l\'!A-
NUEL MALAXaS (compilé en 1561. mais faisant état de documents plus an-
ciens): «Le quarantième jour, l'âme s'en va adorer (Dieu) et elle reçoit sa place
conformément à la vie qu'elle a menée sur cette terre, jusqu'à la seconde pa-
rousie de notre Seigneur Jésus Christ» (texte communiqué par M. SP. TROÏA-
NOS et Mme. A. SIFONIOU~KARAPA, Académie d'Athènes, qui préparent une
édition critique du Nomocanon).
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XV, 5 (MGR 5s. t'er. mer., l, 724) et la recension latine (plus ancienne que
la recension grecque) de la Passio Bartholomaei 9 (éd. BONNET, AAA, II, 1,
p. 149). - Sur l'ensemble de la question, voir Du CANGE, Glossarium, 5.V.
5eptenarium et Trigenarium, ainsi que A. FRANZ, Die Messe im deutscken
Mittelalter, Freiburg/Br., 1902, p. 243.
411 Liber sacramentorum Romanae Aeclesiae (Vat. Reg. 316), III, 105
(éd. MüHLBERG, 246): (1 In depositione defuncti tertii, septimi, trigesimi die-
rum vel annualem ». - Voir A. CHAVASSE, op. cit., p. 69 et S8., qui ne se pro-
nonce pas sur l'origine romaine ou franque de la section.
50 Les témoignages les plus anciens sont les suivants: 1) TERTULLIEN,
De exhortatione castitatis Il: « ... pro cuius spiritu postulas, pro qua oblationes
annuas reddis. Stabis ergo ad dominum cum tut uxoribus quot in oratione
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quas tibi fudimus, quum tibi offeretur pro ea (Monica) sacrificium pretii nos tri,
iam iuxta sepulcrum posito cadavere, priusquam deponeretur (inhumation),
sicut illic (Ostia) fieri solet, llec in eis precibus flevi». - Cf. FR.- J. DÔLGER,
op. cil., p. 567 n. 4.
52 Le « troisième jour» est une dénomination cultuelle laqueJle a des
tyr, voir TH. KLAUSER, Altar III (christlich) , dans Reallexikon für Antike
und Christentum, 1, 1950, 334-354; J. BRAUN, Der christlù;he Altar in seiner
geschichtlichen Entwicklung, 2 vol., München, 1924; A.M. SCHNEIDER, Men-
sae oleorum oder Totenspeisetische, dans Ramische Quartalschrift, 35, 1927,
p. 287-301. - La connexion se traduit encore maintenant par l'inclusion
de reliques dans la table d'autel.
57 Les seuls travaux, à ma connaissance, traitant de la finalité escha-
d'abord les mystères avant de s'asseoir. Que ce ne soit pas le dimanche. Après
l'offrande (eucharistique), qu'on leur donne le pain d'exorcisme avant qu'ils
ne s'assoient ... Qu'ils mangent et boivent en suffisance, non jusqu'à l'ébriété,
mais tranquillement, en hommage à Dieu ». - Sur le refrigerium-repas funé-
raire, par différenciation avec le ycfrigerium-repos, voir A.M. SCHNEIDER,
Refrigerium. J. Nach literarischen Quellen und Inschritten, FreiburgfBr., 1928;
A. STUIBER, RetrigeYium interim (Théophaneia 11), Bonn. 1957, p. 105-120
(Der Zwischenzustand im DiCkte der Grabinschrilten). H. FINE, Die Termino-
logie der jenseitsvorstellungen, p. 150-196. - Sur le déroulement du repas
funéraire et les problèmes connexes, voir TH. KLAUSER, Die Cathedra im To-
tenkult der heidnischen und christlichen Antike (LQF 21), MlinsterjWestf., 1927;
TH. KLAUSER, Das altchr·istliche Totenmahl nach dem heutigen Stande der For-
schung, dans Theologie und Glaube, 20, 1928, p. 599-608, travaux d'impor-
tance fondamentale, complétés et mis au point par A. STUIBER, op. cit., p.
120 et ss. (Bildliche Darstellungen ais Niederschlag des Totenkultes): A. PAR-
ROT, Le refrigerium dans l'Au-delà, Paris, 1937; J. DOIGNON, Relrigerium et
catéchèse à Vérone au IVe siècle, dans Hommages à Marcel Renard, II (Lato-
mus 102), Bruxelles, 1969, p. 220-239.
60 Le refrigerium chrétien dans son déroulement est identique au re-
Irigerium pratiqué par les païens de la même époque, sauf élimination des
éléments mythologiques ou érotiques, sauf aussi le choix ou le rejet de cer-
tains aliments rhure de sanglier (sinciput) p. ex.]. La reprise chrétienne en
a été facilitée par la référence possible à Tobie IV, 13: « Sois prodigue de pain
et de vin sur le tombeau des justes, mais non pour le pécheur» et la lecture
erronée de Rom. XII, 13: « Soyez solidaires des mémoires des saints 1) au lieu
de «Soyez solidaires des besoins des saints (<< mneiais fi au lieu de « chreiais f)) ~.
- Voir note 70.
61 Ces documents littéraires se répartissent comme suit: a) Afrique:
Tertullien ignore encore les refrigeria chrétiens, comme il ressort du De testi-
monia animae 4 et du De resur. carnis 1. AUGUSTIN, Confessia'nes VI, 2: « ... cum
ad memorias sanctorum, sicut in Africa, solebat, pultes et panem et mcrum
(Monica) attulü;set ... canistrum cum solemnibus epulis praegustandis atque
largiendis (aliments en prégustation sur la tombe et en libation, pour le dé-
funt), pluS etiam quam unum pocillum pro sua palato satis sobrio tempera-
tum ... non ponebat ». - b) Italie du Nord: AMBROISE, De Helia et ieiunio 17:
... calices ad sepulcra martyrum deferunt atquc illic in vesperam bibunt ... 0
L'ENVIRONNEMENT CULTUEL DU DÉFUNT". 405
tav. 6): In pace / l Idus Febr. / conss. Gratiani III et Equiti (= 374/375) Flo-
rentius Fortunatus et 1 (Fe)lix ad calice benimus (= ad calicem venimus).
- Terni, Cimetière (DIEHL 1565 B): Mallins Tigrinus / ob refrigerium c(aris
suis) / domum acternalem / vivus fundavit. - Rome, Cimetière de Saint-
Pamphile (SCHNEIDER 32): Fecit... merentibus in refrigerium. - Verre doré
du Vatican (DIEHL 2304): Hilaris vivas cum tuis feliciter. Semper rcfrigeris /
ïn pace dei. - Satafis (Maurétanie), Inscription de l'année 299 [A{nno) pr(ovin-
ciae CCLX)] (DIEHL 1570): Memoriae Aeliae Secundulae / Funeri mu(l)ta
quid(e)m condigna iam misimus omnes / Insuper ar(a)equ (c) deposit(a)e Se-
cundulae matri / Lapideam placuit nobis atponere mensam / in qua magna
eius memorantes plurima facta / Deum cibi ponuntnr calicesq(ue) e(t) coper-
tae / - Autres inscriptions chez DIEHL ILCV (s.v. refrigeriuffi, refrigerare);
A.:VL SCHNEIDER, RefYigeYium, p. 19-23; 27-33; PARROT, Le refrigerium, p.
131-171. - Sur les rapports entre les termes refriget'ium et refrigerare dans
les inscriptions et en liturgie, voir A.M. SCHNEIDER, p, 25-27. - Les équiva-
lents grecs de refrigerium-repos et de refrigerium-repas ont été peu étudiés;
406 CYRILLE VOGEL
lorum (via Appia) chez P. STYGER, Il monumento apostolico della via Appia,
dans Dissertazioni della Pontificia Accademia di Archeologia, II, 13, Rome,
1918 p. 48-89, pl. I-XXV; A.v. GERKAN, Die christlichen Anlagen unte,. San
Sebastiano, dans H. LIETZMAN, Petrus und Paulus in Rom, 2 e éd., Berlin-
Leipzig, 1927, p. 248-301; sur la date des graffiti, voir R. MARICHAL, La date
des graffiti de la Tricha de Saint-Sébastien, dans Archéologie paléochrétienne
et culte chrétien (Revue des Sciences religieuses, 36), 1962, p. 111-154.
66 Documentation sur les lieux de refrigeria ci-dessus indiqués, dans
dicalement différente de celle qui a lieu pour les simples fidèles. Cependant,
le déroulement cultuel tant de l'Eucharistie que du refrigerium est, dans les
deux cas, le même. Le culte des martyrs est issu du (t culte)) des morts en
général.
89 Cyprien reçoit les doléances des évêques d'Espagne rassemblés à Léon,
cf. TH. KLAUSER, Die Cathedra im Tolenkult, p. 2-13 et TH. OHM, Die Gebets-
Gebiirden der Volker und !las Christentum, Leülen, 1948.
L'ENVIRONNEMENT CULTUEL DU DÉFUNT ... 409
chen Antike (LQF 21), MünsterjWestf., 1927. _ L'étroitesse de ces sièges cons-
titue la preuve évidente qu'ils n'ont pas pu servir à des usages pratiques,
ni à des fonctions liturgiques (siège épiscopal!).
76 Documentation dans E. DIEHL, Inscriptiones latinae chYistianae vete-
voir DACL l, 1924, 239-265 s.v. Acclamations) et DACL, VTT, 1926, 670 et ss.
410 CYRILLE VOGEL
«les âmes plus rapidement que les vivants arrivent dans les lieux de culte ».
- En un mouvement inverse, GRÉGOIRE l, Dialogues II (vita s. Benedicti 23).
à propos de religieuses excommuniées mais inhumées dans l'église. A l'appel
du diacre: «Si quis non communicat det locum », les âmes des religieuses en-
terrées quittent l'église: « nutrix earum quae pro eis oblationem Domino de-
ferre consueverat, eas de sepulcris suis progredi et exire de ecclesia videbat ».
Cf. FR. J. DOLGER, Ichthys, II, p. 562 n. 2.
80 AUGUSTIN, De moribus Ecclesiae 34 (PL. 32,1342): «luxuriosissime
super mortuos bibere et epulas cadaveribus exhibere &; De civit. Dei, VIII, 27:
(l epulas suas eo (defuncto) deferre 1); Contra Faustum, XX, 21 (PL. 42,384):
defunctorurn umbras vino placare et dapibus 1); Confess. VI, 2: « !taque curn
ad memoriam sanctorum, sicut in Africa solebat, (Monica) pultes et panern
et merum attulisset)); Sermo XIII, 4 (PL. 46,857): « currcre ad memorias
martyrum, benedicere calices suos de memoriis martyrum, redire saturatos )).
- PAULIN DE NOLE, De Feliciis nativit. carmen IX, 566 (PL. 6L661): (l sanctis,
perfusis, halante mero, gaudere sepulcris)). - ZÉNON DE VÉRONE, Tract.
l, 6,15 (PL. 11,3(6): «per sepulcra discurrere, foeterosis prandia cadaveribus
sacrificare rnortuorum; amore luxuriandi atque bibendi in infamibus locis,
lagenis et calicibus subito sibi martyres parire 1),
L'ENVIRONNEMENT CULTUEL DU DÉFUNT ... 411
Je faisais donc des prières pour lui. Entre mon frère et moi-même, il
y avait un grand intervalle qui nous empêchait de nous rejoindre. Et dans
le lieu où se trouvait Dinocratès, il y avait une piscine remplie d'eau dont
la margelle était trop haute pour la taille de l'enfant. Dinocratès se penchait
pour boire et il ne le pouvait pas, ce dont j'éprouvais une grande douleur.
Je me réveillais et j'ai compris que mon frère souffrait, mais j'avais la cer-
titude que je pouvais l'aider et je priais pour lui tous les jours, jusqu'au mo-
ment où nous filmes transférés à la prison militaire ...
(Le refr'Ïgerium). Le jour où nous étions enchaînés, j'eus une nouvelle
vision. Je revis le lieu que j'avais vu auparavant et je vis Dinocratès, propre,
bien habillé, bien à l'aise (refrigerans). Là où était sa plaie, je vis une cica-
trice. Le puits avait '3a margelle abaissée, à la hauteur de la taille de l'en-
fant. Dinocratès puisait de l'eau sans arrêt (version grecque: l'eau coulait sans
arrêt). Sur la margelle était placée une coupe d'or remplie d'eau. Dinocratès
s'avança et but à la coupe, laquelle ne s'épuisait pas. Désaltéré, il quitta l'eau
et se mit à jouer comme font les enfants. Je me réveillai et je sus qu'il avait
cess6 de souffrir (Passio Perpetuae et Felicitatis, VII- VIII) » 8a.
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Quelques lignes suffiront pour conclure. Dans l'ensemble, les
us et coutu1l1es funéraires chrétiens sont les mêmes que les usages
funéraires païens, y compris le banquet funéraire, élimination
faite des éléments mythologiques et érotiques, ainsi que du scep-
ticisme désabusé tel qu'il apparaît dans certaines inscriptions
funéraires antiques. On hésitera, pour la période paléochrétienne
et en raison des réserves faites plus haut, de qualifier ces usages
de ,< liturgiques» au sens strict. Sont spécifiquement chrétiennes,
d'abord la prière des vivants pour les morts, attestée depuis 200
au moins, dont le formulaire n'est pas conservé; ensuite la célé-
bration de l'Eucharistie, toujours facultative, en connexion to-
pographique plus ou moins étroite avec la tombe du simple fi-
dèle. Ce rapprochement local entre tombe et Eucharistie se retrouve
dans le culte des martyrs, à partir du moment où celui-ci s'est
zum leidetuien Dinocyates in der Passin Pe·rpetuae, dans Antike und Christen-
tu/nt, II, 1930, p. 1-40.
L'ENVIRONNEMENT CULTUEL DU DÉFUNT... 413