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CHAPITRE VI 

: LES THEORIES DES RELATIONS


INTERNATIONALES
D’après Philippe Braillard, une théorie des RI est : « un ensemble cohérent et
systématique de propositions ayant pour but d’éclairer la sphère des relations sociales que
nous nommons internationales. Une telle théorie est ainsi censé présenter un schéma
explicatif de ces relations, de leurs structures, de leur évolution et notamment d’en mettre à
jour les facteurs déterminants. Elle peut aussi, à partir de là, tendre à prédire l’évolution
future de ces relations ou moins dégager certaines tendances de cette évolution. Elle peut
également avoir pour but plus ou moins direct d’éclairer l’action. Comme toutes théories elle
implique un choix et une mises en ordre des données une certaine construction de son objet,
d’où sa relativité ».
La théorie des RI a donc pour fonction d’expliquer les phénomènes internationaux. A ce
titre, son rôle est, selon Burchill de :

- Conceptualiser et de contextualiser les évènements du passé et ceux du futur ;


- Interpréter les questions complexes ;
- Développer l’esprit vif clairvoyant pour comprendre la complexité de la réalité
internationale ;
- Penser de façon critique logique et cohérente.

Dans le cadre de ce cours, nous verrons d’une part les théories classiques et d’autre part, les
renouveaux théorie.

I- LE REALISME ET LE NEOREALISME

La théorie réaliste tire ses origines chez les précurseurs tels Thucydide, Machiavel et Hobbes.
Ces auteurs ont développé l'idée d'un monde au sein duquel les valeurs morales comme l'amitié, la
paix devraient être délaissées au profit de la recherche d’intérêts égoïstes. L’historien Edwar Car, le
géographe Nicolas SPYKMAN, le théologien Reinhal NIEBUHR et le politiste Hans
MORGENTHAU apparaissent comme les penseurs les plus représentatifs de cette théorie. Les
principales affirmations du réalisme sont :

- l’Etat est l’acteur unitaire, rationnel et monolithique des relations internationales ;

- l'anarchie du système international, due à l'absence d'un supérieur commun conduit les Etats à
rechercher leurs intérêts nationaux, à préserver leur sécurité et à maximiser leur puissance ; la
scène internationale est à leurs yeux, un état de nature où prime le droit de la force ;

- les normes internationales sont aussi fragiles que les Etats les méprisent ;

- L’intérêt national comme but ultime de la politique internationale ;


- La permanence du conflit entre Etats, d’où le dilemme de sécurité; la survie
- La puissance et l’équilibre des puissances sont au cœur du système international.
Les néoréalistes ne se sont pas, dans le fond, complétement détachés des travaux de
leurs prédécesseurs. Ils les ont tout simplement enrichis en prenant en compte les
changements en cours sur la scène internationale. Ainsi, ils reconnaissent que :

- l’Etat n’est plus le seul acteur des relations internationales, mais il demeure l’acteur
central ;

- les institutions internationales existent certes, mais elles ne peuvent pas mettre
un terme à l’anarchie du système international ; seuls les Etat en sont capables ;
- dans la compétition internationale, les Etats recherches, non pas les gains
absolus, mais les gains relatifs ;
- la sécurité et la quête de la puissance demeurent au cœur du système
international.

II- LE LIBERALISME ET LE NEOLIBERALISME

La théorie libérale est une vielle théorie des relations internationales. Elle trouve ses
fondements dans la pensée philosophique d’Erasme dont on reconnait la célèbre formule : «
la guerre ne paye pas ». A la suite d’Erasme, les auteurs comme Emmanuel Kant, Jérémie
Bentham, Adam Smith, Richard Cobden qui défendaient l’idée de la mise en place d’un
système commun des droits et des devoirs capables d’assurer la paix de manière perpétuelle
entre les hommes, ont assuré la continuité de la pensée libérale.

Le libéralisme prône la moralisation des relations internationales. La paix, l’amitié, la


coopération, et les préférences éthiques constituent le socle sur lequel les relations inter
étatiques doivent se construire. Cette théorie comprend trois courants : le libéralisme
républicain, le libéralisme commercial et le libéralisme institutionnel.

Le libéralisme républicain est fondé sur l’idée selon laquelle la nature du régime
politique explique le comportement des Etats sur la scène internationale. Dans son
comportement, l’Etat peut être porté soit à coopérer ; soit à faire la guerre. Pour les
républicains, les Etats dictatoriaux sont plus poussés vers le bellicisme, alors que les
démocraties ne se font pas la guerre. D’où la célèbre formule libérale de la « paix
démocratique ».

S’inspirant des travaux d’Adam Smith, le libéralisme commercial repose sur l’idée que
l’échange commercial facilite la coopération entre les Etats. Bien que chaque Etat poursuive
ses intérêts, il n’est pas interdit que ceux-ci coopèrent pour défendre des intérêts communs. Le
libre-échange encourage l’interdépendance dans l’intérêt de tous.

Le libéralisme institutionnel défend l’idée que, les institutions internationales, dotées


d’un pouvoir stabilisateur, consolident la coopération entre les Etats. A travers ses
mécanismes de sanction, elles dissuadent les Etats de rechercher leurs seules intérêts, pour
défendre les intérêts collectifs par le biais de la coopération multidimensionnelle.

Tout comme les néoréalistes, les néolibéraux ont conservé les acquis de leurs prédécesseurs,
mais ils les ont adaptés à leur environnement international. Ils considèrent que :

- les institutions internationales encouragent la coopération et viabilisent la vie


internationale ;
- la coopération produit les gains absolus partagés par tous les Etats et non relatifs ;
- l’action des Etats n’est pas motivée par la quête de puissance comme pense les
réalistes, mais par la recherche des avantages économiques.

III- LE MARXISME ET LE NEOMARXISME

La théorie marxiste en relations internationales s’inspire des travaux de Karl


Marx (1818-1883). D’abord utilisée pour expliquer les phénomènes sociopolitiques
internes, elle s’est avérée déterminante dans l’explication des phénomènes
internationaux. Son ambition est de déterminer une variable générale, explicative des
relations internationales. Contrairement au réalisme et au libéralisme qui se focalisent
sur les facteurs politiques, elle accorde la priorité aux rapports de force économique. Le
marxisme considère que la structure des relations internationales est dominée par le
capitalisme mondial. Cette idée est au centre des propositions de deux théories
d’inspiration marxiste : la théorie de la dépendance et la théorie du système monde.

A- La théorie de la dépendance
Développée dans les années 1960, la première explique le sous-développement par
la dépendance de la périphérie vis-à -vis du centre. Cette dépendance est :
- commerciale : il existe une détérioration structurelle des termes de
l’échange entre les pays pauvres qui exportent les matières premières vers
les pays industrialisés et les pays riches qui exportent, vers les pays pauvres,
les produits manufacturés ;
- financière : les pays riches exploitent les richesses des pays du sud et
rapatrient les profits réalisés chez eux, plutô t que de les investir dans ces
pays ;
- technologique : les pays riches ne veulent pas véritablement transférer leur
technologie vers les pays du sud. Ce qui contribue à les maintenir dans le
sous-développement ;

- culturelle : les firmes multinationales produisent des biens culturels que


seuls les privilégiés du centre peuvent s’offrir ;
- sociale : au sein de la périphérie elle-même, émerge une élite économique et
politique qui sert de relai aux intérêts de la bourgeoisie occidentale.

B- La théorie du système monde


Elle a été conceptualisée par Immanuel Wallerstein dans les années 1970. Elle
appréhende le système international comme une structure stratifiée au sein de
laquelle chaque nation remplit une fonction nécessaire au bon déroulement de la
division internationale du travail. Elle partage ainsi le monde en trois zones : le
centre, la périphérie et la semi périphérie. Le centre est composé de puissances
capitalistes occidentales qui luttent pour le contrô le du marché mondial. Composée
essentiellement des pays du tiers monde, la périphérie dépend structurellement du
centre. La semi-périphérie joue quant à elle le rô le de stabilisation des relations
économiques et politiques entre le centre et la périphérie. La configuration entre les
trois zones est mobile : les centres peuvent devenir des périphéries et les
périphéries peuvent devenir des semi-périphéries.

IV- LE TRANSNATIONALISME

Le transnationalisme est un courant théorique qui s’est développé sous l’influence des
travaux de James Rosénau. Dans son ouvrage intitulé turbulence in wold politic, Il emploie la
notion de turbulence qui est une métaphore pour désigner le désordre incontrôlable qui
apparaît dans un ensemble de choses ordonnées. Ces désordres affectent la vie interne de
l’Etat.

Le transnationalisme soutient l’idée selon laquelle sur la scène internationale, prolifèrent de


nouveaux acteurs qui tendent à prendre le pas sur les Etats, acteurs traditionnels des relations
internationales.

Le transnationalisme regroupe quatre écoles opposées: le fonctionnalisme, l’Ecole de


l’interdépendance complexe, le mondialisme et l’impérialisme.

L’Ecole de l’interdépendance complexe est animée principalement par deux auteurs


: Robert O.KEOHANE et Joseph NYE. Dans leur ouvrage, Transnational Relations and
World Politics, ils montrent qu’il y’a des interactions réciproques entre le monde des Etats et
les acteurs transnationaux. Ces interactions qui structurent la société internationale peuvent
être divisées en quatre pôles: l’information, le commerce d’objets physiques, les flux
financiers, la libre circulation des hommes et des idées.

L’école du mondialisme a été créée par John Burton. Il structure son étude autour du
concept de la société mondiale. Ainsi, il affirme que :
- progressivement, vont se développer un très grand nombre de relations transnationales,
qu’il qualifie de ''toile d'araignée''
- tous les acteurs vont être liés par des interactions de nature diverse (humanitaire,
politique, économique, informationnelle).
Cela ne se signifie pas que le système va stagner. Mais à un moment l'acteur principal des
RI ce ne sera plus l'Etat mais l'individu lui-même

V- LE CONSTRUCTIVISME
Le constructivisme est né d’une fusion de différentes disciplines des sciences sociales
comme la philosophie, l’histoire, l’anthropologie, la sociologie. Ce courant théorique a été
influencé par des auteurs comme Max Weber, Jürgen Habermas, Michel Foucauld, Berger et
Lukman, Antony Gyddens, Nicolas Onuf, Alexander Wendt, et bien d’autres. Le
constructivisme analyse la réalité sociale comme une construction permanente, d’où
l’expression de construction sociale de la réalité.
- Cette réalité n’est ni objective (déjà donné) ni subjective (en fonction de légitimation),
elle est intersubjective (elle est ce que les croyances partagées des acteurs en font) :
« les gens font la société et la société fait les gens ». Il existe en effet des interactions
entre les agents et les structures. Les acteurs exercent une influence sur les normes et
les institutions en même temps que celles-ci influencent leur comportement.
Cette théorie a été appliquée aux RI grâce à Nicolas Onuf. Ses principales propositions
sont :
 Les structures sont déterminées par les idées partagées plutôt que la force
matérielle ;
 Les identités et les intérêts des acteurs sont construits par les idées partagées
 L'identité nationale est le fruit d’une construction faite de valeurs, d’idées et de
croyances des Etats et des valeurs et des normes partagées internationalement ;
 Les identités fondent l'intérêt national et orientent de ce fait, les objectifs de la
politique étrangère : « Les identités sont à la base des intérêts »
Elles sont donc intersubjectives, car, elles résultent de la représentation que les Etats se font
de d’eux-mêmes et de la représentation qu’ils se font du monde qui les entoure. Elle est
construite à la fois par les Etats et par leur environnement international

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