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Toba Tek Singh'

Deux ou trois ans après la partition, les gouvernements du


Pakistan et de l'Inde eurent l'idée d'échanger leurs fous, comme
ils l'avaient fait pour les prisonniers de droit commun; c'est-
à-dire qu'on enverrait au Pakistan les fous musulmans des asiles
indiens et que les fous sikhs ou hindous qui étaient dans les
asiles pakistanais seraient confiés à la garde de l'Inde.
Etait-ce là une idée folle ou pleine de bon sens? Peu importe.
Des specialistes entamèrent des pourparlers de haut niveau, de
part et d'autre, et, finalement, on fixa un jour pour l'échange
des fous. Chaque cas fut examiné attentivement: on laissa rési-
der en Inde les aliénés musulmans qui y avaient des attaches
familiales, tandis qu'on expédiait les autres à la frontière. Ici, au
Pakistan, puisque à peu près tous les sikhs et les hindous étaient

1. Cette nouvelle est extraite du recueil de nouvelles Phundane (Pompons),


Lahore, Maktaba e Jadid,, 1955, et fut republiée aussitôt après par la revue
Nagoosh (Manto Numbar), n* 49-50, avril 1955, pp. 179-184, numéros dédi-
cacés à Manto après sa mort en janvier 1955. Références: Manto Nama, Sang
e Meel, Lahore, 1995, pp. 11-18; Kulliyat e Manto (Euvres complètes de
Manto), tome I, Educational Publishing House, Delhi, 2004, pp. 631-637. Le
titre est le surnom du héros qui est sikh. Les événements se déroulent à Lahore
en 1948, où Manto était arrivé à la suite de la partition de 1947. (N.d.T.)
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TOBA TEK SINGH 223
déjà partis, il n'était pas
question de garder de retenir
soit : tous les fous sikhs ou
ou
qui mad Ali Jinnah, qu'on appelait Qaid-e-Azam, et
qu'il avait
que ce

la
hindous, absolument tous, fondé un pays à part pour les musulmans, dont le nom était le
sous
protection de la police, furent envoyés à la frontière.
On sait pas ce qui se
ne
Pakistan. Où était situé ce pays, quel était son territoire, ils n'en
passa de l'autre cóté, mais de ce côté-
ci, quand la nouvelle de savaient rien du tout. C'est pourquoi tous les fous de l'asile de
l'échange
arriva dans l'asile de Lahore, Lahore dont l'esprit n'était pas totalement dérangé étaient la
on assista à de très intéressants
amis demanda à
quiproquos. Lorsqu'un
de ses proie d'un dilemme : se trouvaient-ils au Pakistan ou en Inde
unfou musulman, qui lisait
régulièrement le (autrement dit en Hindoustan), et s'ils se trouvaient en Hin-
quotidien Zamindar', «Maulvi Sahib, ce Pakistan,
qu'est-ce que doustan, alors où élait le Pakistan?
c'est?» il lui
répondit, après avoir longuement réfléchi à la ques- Et sils se trouvaient au Pakistan, comment était-ce possible,
tion: «C'est un endroit en Inde où on
fabrique des rasoirs.» puisque peu de temps auparavant et en demeurant au même
Une telle réponse rassura
pleinement son ami. endroit, ils se trouvaient en Inde?
Dans le même ordre d'idée, fou sikh demanda à un autre
un
Un fou fut tellement embrouillé par cette question du Pakis-
fou sikh: « Sardar Ji pourquoi envoie-t-on en Inde? Nous
nous
tan et de l'Hindoustan, de l'Hindoustan et du Pakistan, que son
ne parlons pas la
langue de là-bas ?» L'autre sourit. «Moi, je état mental s'aggrava. Un jour où il était en train de balayer, il
parle la langue de l'Inde, les Indiens sont très méchants. »
grimpa dans un arbre, et, assis sur une branche, il tint pendant
Un
jour, alors qu'il se douchait, un fou musulman s'écria deux heures des discours interminables concernant les questions
«Vive le Pakistan!» avec tant de force
qu'il glissa sur le sol et subtiles du Pakistan et de !l'Tnde. Quand les policiers lui dirent
s'évanouit. de descendre, il grimpa encore plus haut. On lui fit peur, on le
lly avait aussi beaucoup de fous qui n'étaient pas fous, la plu- menaça, et il répondit: «Je ne veux habiter ni en Inde ni au
part d'entre eux étaient des assassins que leurs familles avaient Pakistan, c'est sur cet arbre que j'habiterai. » Après bien des ten-
fait enfermer à l'asile, pour qu'ils puissent échapper à la pen- tatives, une fois sa crise calmée, ii descendit, et, embrassant ses
daison. Ceux-là comprenaient un peu pourquoi on avait divisé amis sikhs et hindous, il fondit en larmes. Son cceur débordait
Inde et ce qu'était ce Pakistan. Mais ils n'étaient pas vraiment de chagrin à l'idée qu'ils allaient le quitter en partant pour l'Inde.
au courant des événements. On n'apprenait rien par les jour- En apprenant la nouvelle de l'échange, un ingénieur de la
naux, et les surveillants de l'asile étaient illettrés et ignorants. radio, diplómé en sciences et musulman, qui se tenait à l'écart
Aucune certitude ne pouvait être déduite de leur conversation. des autres fous dans une certaine clairière du parc, où il passait
Tout ce qu'ils savaient était qu'il y avait uF homme, Muham- ses journées à marcher de long en large, enleva tous ses vête-
ments, les conha à ses amis, et, nu comme un ver, entreprit de
Le Zamindar était le quotidien en ourdou, de Lahore, parcourir tout le parc.
1.
le plus en vue. (N.d.1.)
(Le propriétaire)
Un fou musulman de Chiniot, corpulent, qui avait été un
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conciliabules pendant des heures,


lls tenaient entre eux des
miitant zélé de la Ligue musulmane' et se lavait quinze ou seize de l'important problème de
durant lesquelles ils débattaient
abandonna brusquement cette habitude. l1 maintenant leur statut dans
l'asile, si l'on
fois par jour, savoir quel allait étre
dans cellule, il déclara la supprimerait.
s'appelait Muhammad Ali. Un jour, sa
garderait une Européens ou si
section pour
on

Muhammad Ali Jinnah. L'imitant leur breakfast ou non? Au


lieu du pain à
qu'i était le grand dirigeant Auraient-ils encore

aussitot, un sikh devint Master Tara Singh.


Il s'en fallut de peu
n'allaient-ils pas devoir
s'étouffer avec ce foutu
les avoir l'anglaise,
que le sang.coulât dans cette cellule. On les sépara après chapati indien?
déclarés tous les deux dangereux. avait fait entrer à l'asile quinze
I yavait un sikh qu'on
hindou de Lahore, bizarre:
homme, un avocat de sa bouche cette phrase
ly avait aussi un jeune entendit dire ans plus tot. Sans répit'sortait
dii be dhyaanaa dii, des
lentilles
avait rendu fou. Lorsqu'il dii anks
qu'un échec amoureux
«Oopar dii goor goor ni la nuit.
à l'Inde, i fut très peiné. La jeune
en lantern.» Il ne dormait ni le jour
qu'Amritsar était attribué cette jaunes, dii wall of dii années, il n'avait
vivait justement dans assuraient qu'au cours de ces quinze
fille dont il était tombé amoureux sa démence il Les vigiles couchait jamais. Tout au
mais malgré seul instant. Et il ne se
ville. La jeune fille l'avait repoussé mit à maudire
pas dormi un
de temps en temps.
conséquence, il se plus prenait-il appui
contre un mur
l'avait pas oubliée. En tous pieds avaient
ne musulmans qui, debout, ses
hindous et A force de rester tout le temps
pêle-mele les dirigeants bien-aimée était
aussi avaient gonflé et malgré cette géne

coupé lInde
en deux : sa enflé. Ses mollets
ensemble, avaient méme pas pour se reposer. Chaque
et lui pakistanais. corporelle, il ne se couchait
devenue indienne des fous expli- discussion à propos du Pakistan,
à parler de l'échange, fois qu'a l'asile il y ayait une
Lorsqu'on commença
morfondre: on l'en-
des fous, il écoutait avec attention.
ne devait plus se de l'Inde et de l'échange
quèrent à
l'avocat qu'l bien-aimée. Mais
avoir son avis, il répondait avec

Dans cette Inde


où habitait sa
Si quelqu'un voulait
en Inde. son
dii goor goor dii anks dii be
verrait
Lahore, car il pensait qu'à Amritsar beaucoup de sérieux: « Oopar
quitter dii wall of dii Pakistan
il ne voulait pas
dhyaanaa dii, des lentilles jaunes,
marcherait pas.
d'avocat ne Anglo-Indiens.
cabinet
il y avait deux Government.»
Dans la section
des Européens,
catastrophe lorsqu'ils
apprirent
Mais plus tard, au lieu de « dii wall of dii Pakistan Govern-
véritable
eux une étaient partis. wall ofdiü Toba Tek Singh Governnnent»
Ce fut pour à lInde les Anglais ment», il opta pour dij
«

sa liberté situait ce Toba


avoir rendu aux autres fous où se
qu'après et se mit à demander
absolument per-
1906) qui Tek Singh dont il était un habitant. Mais
(fondée en
Inde. Ceux qui
cétait au Pakistan
panindienne ou en
musulmane
Pakistan à partir de sonne ne savait si
politique création du
Organisation et la trouvaient conírontés au
1. la partition de lui répondre se
programme
dirigeant tâchaient
avait mis a son instituteur et s'était d'abord trouvé en Inde et qui,
1940. (N.d. T.) Singh partition
(1885-1967), et milita pour dilemme de Sialkot, qui
dit Master Tara
du Pendjab
à la
2. Tara Singh, Dal,
Akali
sikh était opposé
du parti autonome. (N.a.T.
un Etat sikh
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TOBA TEK SINGH 227
d'après la rumeur,
trouvait maintenant au Pakistan. Com-
se

savoir si Lahore, aujourd'hui au Pakistan, n'allait


restait silencieux ou
parfois il répondait Oopar dii,
«
ment goor goor
pas dii, anks dii, be dhyaanaa dii, des lentilles
demain se retrouver en Inde? Ou si toute lInde n'allait jaunes, dii wall of dii
pas lantern».
devenir le Pakistan? Et qui pouvait jurer, la main sur le
caæur, Il avait une fille qui, poussant d'un doigt par mois, devint une
qu'un jour le Pakistan et l'Inde ne disparaîtraient pas pour de
bon? jeune fille en
quinze ans. Enfant déjd, elle
pleurait chaque fois
Les qu'elle voyait son père, et, même devenue jeune fille, elle ne
longs cheveux de ce sikh dément étaient
mainte
nant clairsemés. Et comme il faisait rarement sa toilette, ses pouvait retenir ses larmes.
cheveux et sa barbe s'étaient rejoints, ce qui donnait à son Lorsquel'histoire de l'Hindoustan et du Pakistan commença,
il se mit à demander aux autres fous où se situait Toba Tek
visage un aspect proprement effrayant. Mais l'homme n'était
Singh. l n'obtint pas de réponse satisfaisante et son obsession
pas dangereux. En quinze ans, il n'avait
provoqué aucune augmenta de jour en jour. En même temps, les visites avaient
rixe, ni querelle. Les plus anciens
employés de l'asile savaient cessé.
Auparavant il pressentait qu'on allait lui rendre une visite,
qu'il possédait plusieurs propriétés à Toba Tek Singh. C'était
mais maintenant c'était comme si la voix de son cæur, qui lui
un
propriétaire terrien très à l'aise qui ne manquait de rien,
annonçait chaque fois la venue des visiteurs, s'ëtait tue. Son
lorsque brusquement il avait perdu la raison. Sa famille l'avait
désir était grand de voir ces gens qui lui apportaient des fruits,
fait enchainer et mettre à l'asile d'aliénés.
Ces des sucreries et des vêtements. Eux, au r oins, sauraient certai
gens venaient lui rendre visite une fois par mois et s'en
allaient après s'être assurés qu'il allait bien. Mais cela ne nement lui dire où était Toba Tek Singh, en Inde ou au Pakis-
dura tan, puisquil pensait que ces gens venaient justement de la-bas,
qu'un temps. Lorsque les troubles de la partition commencè-
où se trouvaient ses terres.
rent, leurs visites cessèrent.
Son nom était Bishan Singh, mais tous Al'asile se trouvait un fou qui se prenait pour Dieu. Lors-
l'appelaient Toba Tek qu'un jour Bishan Singh lui demanda si Toba Tek Singh était en
Singh. ll ne savait vraiment plus quel jour ou
quel
mois on était,
ni même combien d'années
Inde ou au Pakistan, comme à son habitude l éclata de rire
s'étaient écoulées. Mais chaque et répondit: «Ça n'est ni au Pakistan ni en Inde. Nous
mois, lorsque ses parents et ses
proches venaient le voir, il repre-
nait conscience de lui-méme. Ainsi il déclarait
n'avons pas encore donné d'ordre àà ce sujet.» Bishan Singh
allait lui rendre visite. Ce jour-là, il se
au
gardien qu'on pria et supplia plusieurs fois ce Dieu de donner son ordre et
baignait soigneusement de mettre fin à cette terrible incertitude, mais il était très
après s'être bien savonné le corps, et il se peignait
enduit la tête d'huile. Il sortait des vêtements
après s'être occupé par une infinité d'ordres à donner. Un jour, excédé,

jamais,
qu'il mettait
ne Bishan Singh l'apostropha: « Oopar dii goor goor dii anks dii
tout
et, beau et vêtu deneuf, il se présentait à ceux qui be dhyaanaa dii, des lentilles jaunes, dii wall of wahe Guru ji
lui rendaient visite. Et
quand ils lui posaient une question, u da Xalsa and wahe Guru Ji ki fateh, jo bole so nihaal, sat srii
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TOBA TEK SINGH

serviçe que je
TOBA TEK SINGH
228 bout de six jours... et..
s'ilya un

voilà
le Dieu des
est m o r t e au

je suis à ta
disposition. |Et
akaal'.» Peut-être voulait-il dire: « Tu es
peux te
rendre, dis-le-moi,
toi.»
tu aurais pour
musulmans, si tu avais été le Dieu des sikhs, alors quelques
morvandas que j'ai apportyes
confia au gar-
qu'il
prit le paquet friandises
de
certainement entendu ma prière. »
Bishan Singh «Ou est
à Fazal Din :
de Toba Tek de lui, et demarnda
un musulman
Quelques jours avant léchange, dien debout à côté
ami, lui rendit visite. Il n'était jamais
venu

Singh, qui était son Toba Tek Singh?» est le vil-


détourna et surpris, répondit: «Où
Lorsque Bishan Singh l'aperçut, il se Fazal Din, quelque peu
auparavant.
l'arrêtèrent. « ll est venu te été. »
rebroussa chemin. Mais les gardiens
lage? Là où il a toujours Pakistan ou en
Inde?
:
ami Fazal Din. » demanda encore «f,u
voir, c'est ton Bishan Singh Fazal Din était
Fazal Din et se mit grom- à non... au Pakistan. »

Singh jeta un regard sur


Bishan -

En Inde -
non,
alla en
marmonnant:

sa main sur son confus. Bishan Singh s'en


meler quelque chose. Fazal Din s'avança, posa embarrassé et
des lentilles jaunes,
très longtemps que je pense à venir
te
dii, be dhyaanua dii,
épaule et lui dit: «ll y a «Oopar dii, goor goor
Hindoustàn of dii fite
munh !»
ceux de chez toi sont tous Pakistan and
pas le temps dii listes des
-

voir mais je ne trouve dii wall of terminés. Les


fait tout ce que j'ai pu pour les Les préparatifs de l'échange
étaietit
partis Inde, sains et saufs. J'ai
en
de là-bas qui
viendraient
iraient la-bas et de ceux
aider.. ta fille Rup Kaur...» fous d'ici qui fixé le jour de
remémora; «Ma fille et on avait déja
Mais il s'interrompit. Bishan Singh se ici avaient été
communiquées,

Rup Kaur !» mot: «Oui...


léchange. les camions remplis
des fous
Fazal Din poursuivit en butant sur chaque Il faisait un froid mordant quand le départ, escortés
elle.. elle aussi, elle va très bien elle est partie-avec eux. »
sikhs de l'asile de Lahore prirent
et hindous
déclara : « Ils zdministratifs les accompa-
Din
Bishan Singh resta silencieux. Fazal Des responsables
nouvelles. Et j'ai par des policiers. fror.tière, les c o m m i s s a i r e s des
souvent de tes
m'avaient demandé de prendre aussi. Arrivés au poste
nos frères
gnaient accomplies, on pro-
entendu dire que tu vas en Inde Salue de ma part
formalités
deux pays se
rencontrèrent
et, les
Amrit Kaur nuit.
Balbir Singh et Wadhava Singh... et notre soæur
heu-
céda à l'échange, qui dura toute la confier aux respon-
ami Balbir Singh que Fazal Din est très des camions et les
aussi. Dis à mon
Faire sortir les fous Beaucoup
laissées très pénible.
par- c'était là u n travail
en
r e u x - sur les deux buftlesses brunes qu'ils ont
sables d'en face, étaient
et l'autre une génisse. Mais la génisse à sortir et ceux qui acceptaient
tant, l'une a eu un veau
d'entre eux se refusaient côtés. On
s'enfuyaient de tous
difficiles à maîtriser, parce qu'ils
ils déchiraient et arrachaient
1. «Wahe Guru ji da Xalsa and wahe
Guru Ji ki fateh mélange de pend- n

habillait ceux qui étaient nus, mais


du Gourou (chef spiri insultes. lls se
jabi, d'anglais et d'ourdou,
Gloire
« au gouvernement
vêtements. Certains proféraient des
au Gourou». «Jo bole
so nihaal, sat srii akaal» leurs
tuel des Sikhs) et victoire entre eux. D'autres pleuraient et
srii akaal» («le vrai Dieu
le dira, le vrai Dieu éternel », Sat querellaient
«

disputaient et se
Prospère qui
«

courante.
éternel») est la salutation sikhe la plus
230
TOBA TEK SINGH
TOBA TEK SINGH 231
sanglotient. C'était une totale
cacophonie. Ajoutés à cela le
tumulte des folles et ur froid tellement le laissa là, debout, et
monde claquait des
dent intense que tout ce contraindre, on

léchange des fous.


on continua à procéder à

La majorité des fous


éjiit contre cet échange parce
pouvaieint pas comprend fe où on les jetait qu'ils ne Avant le lever du soleil,
séleva dans la nuit
de la gorge muette de Bishan Singh
cri un déchirant.
Les responsables
du cote
chés à leir terre. Les que après les avoir arra- indien et ceux de ce côté accoururent, et on vit que I'homme
lques fous qui
quelque chose lançaient des slogans: «pouvaient comprendre qui s'était tenu debout nuit et jour sur ses jambes pendant
«À bas le Pakistan! Vive le Pakistan!» et était
Oij
frisa
»
l'6émeute deux ou trois fois guinze ans allongé face contre terre. Au-delà des barbelés
car I'Tnde et de
ces slogans avaient le dor. de mettre en rage tant les musulmans Cétait
beau
ce côté-ci des barbelés c'était le Pakistan. Et
que les siklhs.
au milieu, sur ce morceau de terre qui n'avait pas de nom,
gisait Toba Tek Singh.
Lorsque ariva le tour de Bishan Singh et
pendant que le res
ponsable administratif de l'autre côté du poste frontière de
Wagah entrait son nom sur le registre, il lui demanda
Toba Tek Singh? Au Pakistan ou en Inde?» :« Où est

Leresponsable administratif se mit à rire. «Au Pakistan, »

A ces mots, Bishan Singh sursauta


puis courut rejoindre ses
compagnons qui restaient encore de ce côté-ci. Les policiers
pakistanais s'emparèrent de lui et entreprirent de l'emmener
de l'autre cótéj mais il re usa de marcher:
« Toba Tek Singh
est ici!» et il se mit à
hu rler :« Oopar goor goor dii, be
dii,
dhyaanaa di, des lentilles jaunes, dii wall of Toba Tek Singh and
Pakistan. »
On s'efforça de lui expliquer que « maintenant Toba Tek
Singh fait partie de l'Inde. Et si ce n'est pas encore le cas on ly
mettra tout de suite», mais il n'était pas d'accord. Et lorsqu'on
voulut le contraindre à passer de l'autre côté, il se campa,
debout sur ses jambes enlées comme à son habitude, à mi-che
min, de sorte qu'aucune force ne pouvait le faire bouger de là.
L'homme ne constituant pas une menace, on cessa de le

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