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A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers


Ordo ab Chao – Deus Meumque Jus

Au nom et sous la juridiction du Suprême Conseil National de France


des Souverains Grands Inspecteurs Généraux du 33ème et dernier degré
du Rite Ecossais Ancien et Accepté

Très Sage,
et vous tous mes Frères Chevaliers Rose-Croix.

Le sujet qui m’a été demandé de vous présenter est « Le signe et le contresigne ».

A la fin de la cérémonie de réception au grade de Chevalier Rose-Croix, dans le Temple


rouge, le Très Sage fait monter les récipiendaires à l’Orient où il leur donne les mots, signes et
attouchements. Il est ainsi communiqué le signe d’ordre du grade dit « du Bon Pasteur », puis
le signe et le contresigne.

Cette communication dans son principe ne doit pas nous surprendre. En effet, en Loge
symbolique, nous avons été instruits successivement des signes correspondant à chacun des
trois premiers grades, qui sont pour l’essentiel liés à la pénalité mentionnée dans le serment
du grade correspondant.

En Loge de perfection, nous retrouvons des signes plus ou moins inspirés de la symbolique de
chacun des grades, certains des signes ayant une connotation plus alchimique.

Au sein du Chapitre, le signe du Chevalier d’Orient et de l’Épée s’inscrit dans la légende du


grade, pour nous rappeler le Pont de Gandara, et la bataille qui y fut livrée, permettant à
l’initié d’acquérir la « Liberté De Passer ».

Le signe du Prince de Jérusalem illustre l’ambassade des Elus Parfaits du peuple de Jérusalem
à Darius roi de Perse, pour la réédification du temple.

Au 17ème degré, nous avons :


- le signe d’ordre et d’entrée qui consiste à se mettre la main au front, et qui peut se
comprendre comme symbolisant l’effort que doit faire l’initié pour discerner la
lumière en même temps que de se préparer à la recevoir,
- et le signe du grade qui consiste à regarder par-dessus son épaule droite, le signe de
réponse étant de regarder par-dessus l'épaule gauche, ce qui symbolise la synthèse que
nous devons faire pour résoudre l'opposition entre la notion d'Orient (qui figure le
monde intelligible qui ne se révèle qu’à l’esprit et d’où provient la Lumière) et celle
d'Occident (qui figure le monde matériel), ces doubles notions étant déjà évoquées au
14ème degré.

Nous retrouvons à cette occasion la pratique du signe de réponse inversée que nous avons
découvert en Loge de perfection, au grade de Maître secret, s’inscrivant dans l'axe qui va du
Trois Fois Puissant Maître à Adonhiram.

Au grade de Chevalier Rose-Croix, le signe consiste à lever la main droite et montrer le ciel
avec l’index, les autres doigts étant fermés, tandis que le contresigne consiste à descendre la
main dans la même position et montrer la terre avec l’index.
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Le signe et le contresigne s’exécutent concomitamment, à trois occasions au cours de la tenue


: à la reprise des travaux, à la suspension des travaux, et lors de la cérémonie de la Cène.

L’instruction du grade nous enseigne que le signe exprime l’idée qu’il y a une puissance
supérieure à l’homme, et que pour arriver à le comprendre, l’esprit doit dominer la matière, ce
que nous retrouvons lors de la suspension des travaux, lorsque le Premier Grand Gardien,
répond au Très Sage qu’il a été reçu Chevalier Rose-Croix par le plus humble de tous, qui est
considéré comme tel parce qu’il était le plus éclairé et savait que toute inspiration vient d’en
haut. Pour le contresigne, il nous enseigne que l’homme est né de la terre et que, après le
dégagement de l’esprit, son corps retournera à la terre.

Dans la cérémonie de la Cène, lorsqu’il brandit le pain, le Très Sage proclame : « Qu'il nous
maintienne en force et en santé ». Et lorsqu’il présente la coupe après l'avoir remplie, il
déclare : « Que ce vin, symbole de l'intelligence, élève notre esprit ». Le pain et le vin sont
ensuite partagés entre tous les membres du Chapitre, tour à tour, par une transmission
ponctuée à chaque fois par le signe et le contresigne, avant d’être consumés avec la
représentation du monogramme I∴N∴R∴I∴, puisque nous symbolisons ainsi par cette
cérémonie de la Cène que nous transformons le matériel en spirituel.

De ce fait, le signe et le contresigne peuvent être compris comme symbolisant à la fois la


conciliation que nous devons accomplir entre la matière et le spirituel, et l’obligation que nous
avons de transmettre un message de Vérité Universelle et éternelle, qui est d’essence divine,
car le feu, que nous avons éprouvé lors de notre initiation au grade d’apprenti comme
symbolisant l’Amour (que nous nommons aussi la Charité) qui doit embraser notre cœur, que
nous retrouvons au degré de Grand Elu de la Voûte Sacrée, est un principe de vie qui anime
tous les êtres, comme le feu du soleil réveille et renouvelle la vie sur la terre au printemps,
non seulement en tant que vie matérielle, mais également comme vie spirituelle, la
combustion étant à la fois vecteur de transformation, comme dans le travail alchimique, et de
régénération, comme le figure le Phénix, nous annonçant le cycle du perpétuel inachèvement
ou de l’éternel recommencement. L’accomplissement du signe et du contresigne autour de la
table fraternelle, peut s’inscrire dans cette perpétuité.

Le signe et le contresigne tracent un axe. Cet axe est présent dès nos premiers pas d'initié,
puisqu'il est matérialisé dans la Loge symbolique par le fil à plomb. Ainsi que cela est énoncé
par le Vénérable Maître, lorsqu'il revêt le Second Surveillant de son sautoir, le fil à plomb
symbolise d’une part la recherche de la Vérité dans les profondeurs où elle se cache, et d'autre
part l'élévation des sentiments maçonniques vers les hauteurs. Le Vénérable Maître dit en
effet au Second Surveillant : « En haut, comme en bas, vous découvrirez la beauté de l'esprit
et du cœur ».

Cette double direction nous est donnée dès le début de notre parcours, par l’acronyme
V∴I∴T∴R∴I∴O∴L∴ dans le Cabinet de réflexion, puis par l’épreuve de l'air, puis plus
encore lors de la cérémonie de passage au grade de compagnon, lors du troisième voyage, au
cours duquel l'initié découvre sur le cartouche qui lui est présenté le nom des sept Arts
Libéraux, constitués d'une part du trivium, qui rassemble les sciences de l’âme et qui sont au
nombre de trois, qui est le nombre du Ciel, et d'autre part du quadrivium, qui rassemble les
sciences pratiques et du monde sensible, au nombre de quatre, qui est le nombre symbolisant
la matière, la Terre.

Cet axe entre le Ciel et la Terre va pleinement se révéler dans la cérémonie d'élévation au
sublime grade de Maître, dans lequel l'initié, placé entre l’Equerre et le Compas, change
définitivement de plan, comme nous l'avons mieux compris, en poursuivant notre progression
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en Loge de perfection, puis au sein du Chapitre.

Le signe et le contresigne expriment ainsi l'idée qui se résume dans l'un des passages du texte
de la Table d'Émeraude attribué Hermès Trimégiste qui énonce aussi que « toutes choses sont
nées de cette chose unique par adaptation ». Car nous sommes spirituellement nés de l’Un, et
par « adaptation », nous devons nous mettre être en état de recevoir ce qui est en haut, et pour
cela, les Chevaliers Rose-Croix se sont donnés pour objectif de combattre l’orgueil, l’égoïsme
et l’ambition, pour faire régner à leur place le dévouement symbolisé par le Pélican qui se
sacrifie pour sa progéniture, et la Charité, c’est à dire l’Amour de son prochain, cet amour qui
nous embrase et qui est symbolisé par le Phénix. Ainsi, dans cet axe tracé par le signe et le
contresigne, nous retrouvons le Phénix et le Pélican.

Par notre parcours initiatique, et par la gestuelle du signe et du contresigne, nous pouvons
également comprendre ce texte essentiel de la doctrine hermétique comme exprimant l’idée
d'un lien indéfectible qui s'établit entre l'Univers, c'est-à-dire le Cosmos, et l'Homme qui en
est la réduction. Pour que, à l’image de l’Adam Kadmon qui s’ancre dans le Malkhût et doit
s’inspirer du Kether, l’initié s’inscrive dans cette forme d’union entre l’esprit et la matière,
entre le céleste et le terrestre, entre le fini et l’infini, il doit non seulement soumettre sa
volonté à ses devoirs, comme il est dit au grade d’apprenti, mais se combattre lui-même,
comme il le découvre en vivant le meurtre d’Hiram lors de la cérémonie d’élévation au
sublime grade de Maître, et plus encore dans les degrés de la Loge de perfection, plus
particulièrement peut être dans les grades de vengeance, pour s’apercevoir rapidement que
malgré toutes les purifications entreprises, la construction de notre temple est en permanence
menacée par l’ennemi de l’intérieur, à charge de nous rappeler que nous avons à nous
perfectionner, à nous instruire nous-même, comme cela est dit au grade de Grand Elu de la
Voûte Sacrée.

Cette approche nous montre que le signe et le contresigne s’inscrivent dans une mise en
tension, exprimant le principe de la destruction et de la reconstruction, de la mort et de la
renaissance, et donc d’une part ouvrent le chemin de notre profondeur, que nous tentons
d’explorer dans le Cabinet de Réflexion, dans la tombe d’Hiram au grade de Maître, dans le
sépulcre fait en forme d'obélisque, qui nous est présenté au grade de Maître parfait, dans la
grotte où pénètre Johaben pour tuer l’un des trois meurtriers d’Hiram au du grade de Maître
Elu des 9, et dans le tréfonds du temple détruit, évoqué dans la légende des trois Mages du
rituel de Chevalier de la Royale Arche, laquelle se complète dans le grade de Grand Elu de la
Voûte Sacrée, et d’autre part nous rappellent la nécessité de nous élever, par l’esprit et le
cœur. Cette tension entre profondeur et élévation doit conduire chacun à trouver au fond de
lui la composante de son être le plus intime, où brille l’éclat du divin, cet accès à notre
étincelle divine étant symbolisé par la clé d'ivoire du Maître secret, par la clé d'or que le Trois
Fois Illustre remet au récipiendaire lors de la cérémonie de réception au septième grade de
Prévôt et Juge, et par la Chambre Secrète refermant l'Arche Sainte, évoquée dans la
cérémonie de réception au grade d'Intendant des Bâtiments.

Tout cela doit en effet nous rappeler notre origine, celle que nous devons retrouver par notre
quête, grâce à la flamme de l’Espérance qui ne s’éteint pas et qui peut ranimer la Foi et la
Charité, ainsi que le Chevalier Rose-Croix le découvre dans le Temple Noir, cette flamme de
l’Espérance qui continue à nous éclairer, même lorsque que nous somme conduits à nous
confronter à ce qu'il y a de plus infernal, dans le monde intérieur qui est le nôtre, et que nous
devons parvenir à dominer.

Le signe le contresigne nous incitent également à accepter notre impermanence liée à notre
condition matérialisée par notre corps mortel, tout en prenant conscience, par le travail de
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notre esprit et par la rédemption, de la permanence de notre âme, qui est immortelle. Ils nous
invitent à nous efforcer à élever notre âme jusqu'au point où elle s'identifie au Cosmos, dans
lequel règne la permanence de l'Universel et de l'Eternel, à retrouver notre place auprès de
Dieu, celle que nous avons perdue par corruption, conduisant notre âme à devenir prisonnière
d’un corps mortel, la plongeant dans les liens de l'oubli, pour paraphraser la re-création
d’Adam relaté dans l’ouvrage gnostique, qui a reçu pour titre « le Livre des secrets de Jean ».

Car si le profane, se limitant dans sa condition, ne peut rompre les liens de l'oubli, l'initié a
quant à lui pris conscience de ce qu'il possède la clé de son salut, ou plus exactement du salut
de son âme, et que pour découvrir ce trésor, il doit se livrer à une recherche personnelle, à une
introspection volontaire, sincère et continue, par laquelle il sera en mesure de découvrir que
l’âme humaine contient finalement en elle-même, de manière latente, toutes les sciences
nécessaires à la compréhension de l'Inconnaissable, pour reprendre la théorie de celui qui était
surnommé Paraclèse faisant une sorte de référence au salut messianique. Ne nous est-il pas
enseigné, dès nos premiers pas dans les Hauts Grades de notre Rite, et tout particulièrement
lors de la cérémonie de réception du Maître secret que « la Vérité est la Lumière placée à la
portée de tout homme qui veut ouvrir les yeux et qui veut regarder » ?

Nous devons donc chacun parvenir à dialoguer avec notre âme, à la connaître, à la tutoyer, ce
qui ne peut se réaliser que par cette introspection, dans laquelle nous devons développer notre
vie intérieure.

Mais à l'image de la cérémonie de la Cène, lors de laquelle nous pratiquons tour à tour et
ensemble le signe et le contresigne, cette démarche ne peut pas être égoïste ni solitaire, et ne
peut se pratiquer que dans l'altérité, la communion et le dialogue de cœur à cœur, car si je
crois que l'homme est à l'image de Dieu, alors le regard que j'ai pour mon frère et que mon
frère a pour moi, ne peut que me rapprocher davantage de l'Eternel.

Pour finir, je dirais que pour moi, le signe et le contresigne constituent la formulation d'une
promesse, qui prend forme tout au long des grades capitulaires au cours desquels nous
intériorisons les mythodrames des tentatives de reconstruction symbolique du Temple de
Jérusalem, après sa destruction et l’exil du peuple d’Israël à Babylone. En effet, après le
songe de Cyrus, après les voyages effectués de Jérusalem à Babylone puis de Babylone à
Jérusalem, et au vu du tableau de loge du Chevalier d'Orient et d'Occident, représentant une
ville en feu, qui pourrait bien être la Jérusalem terrestre, le signe et le contresigne ne sont-ils
pas annonciateurs d'une nouvelle orientation de notre quête, vers la Jérusalem céleste que le
Chevalier Rose-Croix veut faire descendre sur terre, à l’instar du Maître au 3ème degré qui, par
le signe d’horreur, pourrait signifier qu’il implore l’aide de Dieu et sa présence auprès de Lui,
et cela afin que les initiés puissent établir sur terre le Royaume de l'Eternel, que nous
désignons aussi comme le Saint Empire.

J’ai dit.

Le jeudi 24 mai 6018

Leonel de MENOU, 18ème

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