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Erwan Le Yaouanc
version 1.1ε
1
2
Nous supposons le lecteur familier avec la notion d’application (notion vue en Méthodologie).
1 Généralités
1.1 Ensemble de définition
Définition 1.1 On appelle fonction réelle d’une variable réelle1 toute application f d’une partie non
vide D de R à valeurs dans R. On note alors f : D → R. L’ensemble D s’appelle un ensemble de
définition de la fonction f .
Remarques 1.2
1. Si la fonction est dite « définie par (l’expression) f (x)=<une expression en x> », on parle de
l’ensemble de définition de f qui désigne alors le plus grand sous-ensemble E de R tel que pour
tout x ∈ E, l’expression <une expression√en x> ait un sens. Par exemple, si l’on pose f la fonction
d’une variable réelle définie par f (x) = 1 − x2 , l’ensemble de définition de f est l’ensemble des
réels x tels que 1 − x2 soit positif, c’est-à-dire l’intervalle [−1, 1]. Généralement, on note Df
l’ensemble de définition d’une fonction donnée par une telle expression.
2. Soit a ∈ R. On dit que f est définie au voisinage de a si Df est un voisinage de a.
appartient à F(E, R). Nous pouvons de même construire l’application f g définie par :
Et cette fonction appartient encore à F(E, R). Enfin, la fonction |f | définie pour x ∈ E par :
|f |(x) = |f (x)|
On conviendra, lorsque D est une partie non majorée (resp. minorée) de R, par exemple, si D = [a, +∞[
(resp. D =] − ∞, a[) où a est un réel, que l’adhérence de D contient l’élément +∞ ∈ R (resp. −∞ ∈ R).
En d’autres termes, on considérera D comme contenue dans R. Cette gesticulation nous permet de
considérer, de manière élégante, la notion de limite « à l’infini » comme un prolongement naturel de
la notion de limite en un point de R.
Exercice 2.2 Soient a, b ∈ R tels que a < b. Montrer que l’adhérence de l’intervalle (a, b) est l’intervalle
(fermé) [a, b].
Définition 2.3 Soit D une partie de R et a ∈ D. On dit que a est un point isolé de D s’il existe un
voisinage V de a tel que V ∩ D = {a}. En d’autre termes, a est un point isolé de D s’il existe α > 0,
tel que ]a − α, a + α[∩D = {a}. Un point de D qui n’est pas isolé est dit point d’accumulation ; par
définition cela signifie que pour tout α > 0, l’ensemble ]a − α, a + α[∩D contient un autre point que
a. En termes imagés, un point a de D est un point d’accumulation de D s’il existe des points aussi
proches que l’on veut de a, distincts de a et appartenant à D.
Lemme 2.4 Soit D une partie de R et a un réel. Alors nous avons équivalence entre :
1. a est un point isolé de D ;
2. a est un point isolé de D.
4
preuve:
(1 ⇒ 2) Il est clair que a ∈ D. Soit α > 0 tel que ]a − α, a + α[∩D = {a}. Supposons qu’il existe
β ∈]a − α, a + α[∩D. Alors nous trouvons une suite (Un ) à valeurs dans D qui converge vers β. Soit
ε := min{|β − (a + α)|, |β − (a − α)|}. Puisque la suite (Un ) converge vers β, nous trouvons n0 tel
que pour tout n > n0 , nous ayons : |Un − β| 6 ε. En particulier, nous avons pour tout n > n0 ,
Un ∈]a − α, a + α[∩D ce qui implique que pour tout n > n0 , le réel Un est égal à a. La suite est
stationnaire en a ; elle converge donc vers a. Par unicité de la limite, nous avons β = a. Nous concluons
que ]a − α, a + α[∩D = {a}.
(2 ⇒ 1) Par définition, il existe α > 0 tel que ]a − α, a + α[∩D ⊆]a − α, a + α[∩D = {a}. Ainsi si (Un )
est une suite d’éléments de D convergeant vers a, alors cette suite est stationnaire (même raisonnement
que plus haut). En particulier, a ∈ D. Nous en déduisons que nous avons : ]a − α, a + α[∩D = {a},
c’est-à-dire que a est un point isolé de D.
Définition 2.9 Soit D ⊆ R ⊆ R, f : D → R et ℓ ∈ R. On suppose que −∞ (resp. +∞) est une valeur
d’adhérence de D.
1. On dit que f (x) tend vers −∞ quand x tend vers −∞ (resp. +∞) ou que f admet −∞ pour
limite en −∞ (resp. +∞) si :
∀m ∈ R, ∃µ ∈ R, ∀x ∈ D, (x 6 µ =⇒ f (x) 6 m)
(2.4)
resp. ∀m ∈ R, ∃µ ∈ R, ∀x ∈ D, (µ 6 x =⇒ f (x) 6 m)
2. On dit que f (x) tend vers ℓ quand x tend vers +∞ (resp. +∞) ou que f admet +∞ pour limite
en −∞ (resp. +∞) si :
∀M ∈ R, ∃µ ∈ R, ∀x ∈ D, (x 6 µ =⇒ M 6 f (x))
(2.5)
resp. ∀M ∈ R, ∃µ ∈ R, ∀x ∈ D, (µ 6 x =⇒ M 6 f (x))
Nous aurons aussi besoin des notions de limite à droite et limite à gauche :
Définition 2.10 Soit D ⊆ R, f : D → R et a un réel appartenant à D dont on suppose que a n’est pas
un point isolé. Soit ℓ ∈ R. On dit que f (x) tend vers ℓ quand x tend vers a par valeurs inférieures
ou que f admet ℓ pour limite à gauche en a si : l’application restreinte f|D∩]−∞,a[ admet ℓ pour
limite en a. Nous noterons alors lim f = ℓ ou lim− f (x) = ℓ ou lim f (x) = ℓ
− a x→a x→a
x<a
Définition 2.11 Soit D ⊆ R, f : D → R et a un réel appartenant à D dont on suppose que a n’est pas
un point isolé. Soit ℓ ∈ R. On dit que f (x) tend vers ℓ quand x tend vers a par valeurs supérieures
ou que f admet ℓ pour limite à droite en a si : l’application restreinte f|D∩]a,+∞[ admet ℓ pour limite
en a. Nous noterons alors lim+
f = ℓ ou lim+ f (x) = ℓ ou lim f (x) = ℓ
a x→a x→a
x>a
Remarques 2.12
1. Dans les deux dernières définitions, nous avons considéré les applications restreintes f|D∩]−∞,a[ et
f|D∩]a,+∞[ ; nous avons exclu la valeur en a. Ainsi4 la fonction f , parfois appelée fonction signe,
définie par :
−1 si x < 0
f (x) = 0 si x = 0
1 si x > 0
n’a pas de limite en 0 mais admet des limites à droite et à gauche qui sont égales à 0.
2. Une fonction qui n’est pas définie à gauche (resp. à droite) en a n’admet pas de limite à gauche
(resp. droite) en a.
Définition 2.14 Soit f une fonction de R dans R. Soit A une partie non vide de Df et a un point
adhérent à A. Soit ℓ ∈ R. On dit que f admet une limite ℓ en a suivant l’ensemble A si pour tout
voisinage V de ℓ il existe un voisinage U de a tel que f (U ∩ A) ⊆ V .
Remarque 2.15 Dans la plupart des livres, on n’enlève pas le point a dans la définition de limite au
point a. Sous cette définition, et en supposant que a appartienne à D, si la fonction f admet une limite
en a, cette limite est nécessairement la valeur de la fonction au point a. En particulier, la fonction de
l’exercice 2.20.2 n’a alors pas de limite en zéro. D’autre part, si a est un point isolé de D alors f admet
une limite en a, à savoir la valeur de f en ce point. Remarquons que sous nos définitions, f ne peut
admettre de limite en un point isolé. Mais ce ne sont là que des détails mineurs.
preuve:
1. Nous traitons le cas ℓ ∈ R. Supposons que nous ayons deux limites : ℓ et ℓ′ différentes. Il est clair que
si ℓ′ n’appartient pas à R nous trouvons tout de suite une contradiction. Supposons que ℓ < ℓ′ ∈ R.
′
Choisissons ε < ℓ 3−ℓ (qui est bien strictement positif puisque ℓ < ℓ′ ). D’une part, puisque f tend vers ℓ
quand x tend vers a, il existe α > 0 tel que pour x ∈ D∩]a−α, a+α[, nous ayons : f (x) 6 ℓ+ε et d’autre
part, puisque f tend vers ℓ′ quand x tend vers a, il existe α′ > 0 tel que pour x ∈ D∩]a − α′ , a + α′ [, tel
que nous ayons : ℓ − ε 6 f (x) ; ce qui est contradictoire lorsque x ∈ D∩]a − min{α, α′ }, a + min{α, α′ }[
(qui est bien non-vide d’après la remarque précédente).
2. (Laissée au lecteur)
Remarque 2.18 Sous les définitions des livres (voir sous-section précédente), on note plutôt :
lim f (x) = ℓ
x→a
x6=a
preuve:
(⇒) Il suffit de reprendre les définitions.
(⇐) Notons ℓ la valeur commune des limites à gauche et à droite. Soit ε > 0. Puisque fD∩]−∞,a[
admet ℓ pour limite, nous trouvons α1 > 0 tel que pour x ∈ D∩] − ∞, a[∩]a − α1 , a + α1 [, nous ayons
|f (x) − ℓ| 6 ε. De même, puisque fD∩]a,+∞[ admet ℓ pour limite, nous trouvons α2 > 0 tel que pour
x ∈ D∩]a, a + α2 [, nous ayons |f (x) − ℓ| 6 ε. Posons alors α := min{α1 , α2 }. Nous avons pour tout
x ∈ D∗ ∩]a − α, a + α[, l’inégalité |f (x) − ℓ| 6 ε ; c’est-à-dire que la fonction f admet ℓ pour limite en
a.
Exercices 2.20
1
1. Montrer que la fonction définie par f (x) = x admet +∞ à droite en 0 et −∞ à gauche en 0.
2. Montrer que la fonction f définie par :
−x si x < 0
f (x) = 1 si x = 0
x si x > 0
preuve:
(laissée au lecteur)
f (x) 6 g(x)
Alors si les fonctions f et g admettent une limite en a, alors nous avons l’inégalité (dans R) :
preuve:
(laissée au lecteur)
f (x) ℓ
lim =
x→a g(x) m
preuve:
(Les preuves sont laissées au lecteur ; il suffit de reprendre les preuves faites dans le chapitre sur les
suites)
preuve:
1er cas : supposons que a ∈ R
Nous pouvons supposer sans perdre de généralité que M > 0. Soit ε > 0. Puisque limx→a f (x) = 0,
ε
nous trouvons α1 > 0 tel que pour tout x ∈ D∗ ∩]a − α1 , a + α1 [, nous ayons : |f (x)| 6 M . La
∗
deuxième hypothèse nous permet de trouver α2 > 0 tel que pour tout x ∈ D ∩]a − α2 , a + α1 [, nous
ayons : |g(x)| 6 M . Ainsi, en posant α := min{α1 , α2 } (qui est bien strictement positif), pour tout
x ∈ D∗ ∩]a − α, a + α[, nous trouvons : |f (x)g(x)| 6 ε, ce qui prouve que la fonction f g admet 0 pour
limite en a.
Les autres cas se traitent de manière analogue.
preuve:
(Exercice pour le lecteur ; il s’agit toujours des mêmes arguments)
Remarque 2.26 Toutes les situations usuelles différentes de celles précédemment décrites n’admettent
pas de description univoque. En d’autres termes, si vous êtes dans une situation non couverte par les
théorèmes précédents, il n’existe pas de théorème général ; on parle alors de « forme indéterminée ».
Généralement on les note ainsi : +∞ + (−∞), ∞ × 0, 1∞ et ∞0 .
9
preuve:
Nous supposons que m ∈ R (les deux autres cas se traitant de manière analogue). Le fait que ℓ
appartienne à J résulte du fait que J soit fermé. Soit ε > 0. Puisque g(y) tend vers m quand y tend
vers ℓ, nous trouvons un α > 0 tel que pour tout y ∈ J ∗ ∩]ℓ − α, ℓ + α[ (qui est non vide puisque ℓ
n’est pas un point isolé de J), nous ayons |g(y) − m| 6 ε. Soit maintenant β > 0 tel que pour tout
x ∈ I ∗ ∩]a − β, a + β[ (qui est non vide car a n’est pas un point isolé de I), nous ayons |f (x) − ℓ| 6 α.
Nous obtenons alors que pour tout x ∈ D∗ ∩]a − β, a + β[, l’inégalité |g(f (x)) − ℓ| 6 ε.
2.5.1 Limites en 0
• Pour n ∈ N∗ , nous avons : lim xn = 0
x→0
• Pour n ∈ N∗ , nous avons :
1 −∞ si n ≡ 1 mod 2
lim =
x→0− xn +∞ sinon
lim ln(x) = −∞
x→0+
lim xα ln(x) = 0
x→0+
10
• Nous avons :
ln(1 + x)
lim =1
x→0 x
• Nous avons :
exp(x) − 1
lim =1
x→0 x
2.5.2 Limites en ±∞
• Pour n ∈ N∗ , nous avons :
−∞ si n ≡ 1 mod 2
lim xn =
x→−∞ +∞ sinon
• Pour n ∈ N∗ , nous avons :
lim xn = +∞
x→+∞
• Nous avons :
lim tan(x) = −∞
x→ π
2
+
• Nous avons :
lim ln(x) = +∞
x→+∞
Remarque 3.2
1. Intuitivement, une fonction f , définie sur un intervalle [a, b] où a et b sont des réels tels que a < b,
est continue sur [a, b] si l’on peut tracer son graphe (sa courbe représentative) « sans lever le
crayon ».
2. Dans la situation précédente, la fonction f est continue en a si et seulement si :
2. Nous supposons qu’il existe α > 0 tel que ]a−α, a[∩D 6= ∅ et ]a, a+α[∩D = ∅ (resp. ]a, a+α[∩D 6=
∅ et ]a − α, a[∩D = ∅). Nous avons l’équivalence :
(a) la fonction f est continue en a ;
(b) la fonction f admet une limite à gauche (resp. à droite) en a et nous avons
lim f (x) = f (a) resp. lim f (x) = f (a)
x→a− x→a+
preuve:
Cela résulte directement des définitions.
Remarque 3.4 Le point 2 de la proposition précédente s’utilise lorsque la fonction f est définie sur
un intervalle D = (b, a] avec a extrémité droite de D (resp. définie sur un intervalle D = [a, b) avec a
extrémité gauche de D).
preuve:
(1 ⇒ 2) est immédiat.
(2 ⇒ 1) Il ne reste plus qu’à vérifier que f est continue en b ; on utilise alors la proposition précédente.
7 Ces hypothèses servent à donner un sens aux notions de limites à droite et à gauche au point a.
12
être définie . . .
13
Maintenant par continuité de f en a, nous trouvons α > 0 tel que pour tout x ∈ Df ∩]a − α, a + α[,
|f (x) − f (a)| 6 δ
f: D ∪ {a} → R
fe(x) si x ∈ D
x 7→
ℓ si x = a
fe: R∗ ∪ {0} → R
sin(x)
si x ∈ R∗
x 7→ x
1 si x = 0
−π π x
sin(x)
Fig. 1 – Courbe représentative de la fonction f définie par f (x) =
x
Remarque 3.12 L’histoire ne s’arrête pas là pour l’exemple précédent ; on peut montrer, toujours en
prolongeant les dérivées, que cette fonction est de classe C ∞ sur R.
|x − x′ | 6 α =⇒ |f (x) − f (x′ )| 6 ε
14
Remarque 3.14 Il est immédiat que l’uniforme continuité de f sur D entraîne sa continuité en tout
point de D. La réciproque n’est toujours vraie, mais nous avons le théorème suivant, que nous admet-
trons :
Théorème 3.15 (Heine) Soit I = [a, b] ⊆ R un intervalle fermé borné de R, f : I → R une applica-
tion continue sur I. Alors f est uniformément continue sur I.
|f (x) − f (x′ )| 6 λ · |x − x′ |
Nous dirons qu’elle est contractante (sur I) s’il existe un réel λ appartenant à l’intervalle [0, 1[ tel que
f est lipschitzienne de rapport λ sur l’intervalle I.
preuve:
Pour ε > 0, il suffit de choisir α := ε/λ dans la définition 3.13 .
preuve:
(1 ⇒ 2) Soit ε > 0. Puisque la fonction f est continue en ℓ et définie au voisinage de a, nous trouvons
un δ > 0 tel que ]ℓ−δ, ℓ+δ[⊆ Df et pour tout x ∈]ℓ−δ, ℓ+δ[, nous ayons : |f (x)−f (ℓ)| 6 ε. Maintenant
puisque la suite (Un ) converge vers ℓ, il existe un n0 ∈ N tel que pour tout n > n0 , |Un − ℓ| 6 2δ .
Ainsi pour tout n > n0 , le terme Un appartient à l’intervalle ]ℓ − δ, ℓ + δ[ et donc en particulier, la
suite (f (Un )) est définie à partir du rang n0 . Nous en déduisons que pour tout n > n0 , nous avons :
|f (Un ) − f (ℓ)| 6 ε. Nous concluons que la suite (f (Un )) converge vers f (ℓ).
(2 ⇒ 1) Supposons f non continue en a. Par définition, il existe ε > 0 tel que pour tout n ∈ N∗ , nous
trouvons Un ∈]a − n1 , a + n1 [ et f (Un ) 6∈]f (a) − ε, f (a) + ε[. Nous avons donc construit une suite (Un )
qui converge vers a et telle que la suite image (f (Un )) ne tende pas vers f (a).
Remarque 3.20 Soit a ∈ R. Supposons que f admette une limite ℓ (finie ou infinie) en a, soit non
définie à gauche (resp. droite) en a et qu’il existe δ > 0 tel que f soit définie sur l’intervalle ]a, a + δ[.
Alors si (Un ) est une suite de réels convergeant vers a en restant strictement à droite (resp. gauche) de
a alors la suite (f (Un )) admet ℓ pour limite en a.
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Alors si la suite (Un ) converge, elle converge vers un point fixe de f dans l’intervalle I, c’est-à-dire un
point x ∈ I tel que f (x) = x.
Théorème 3.22 (du point fixe) Soit I un intervalle fermé et borné de R et f : I → R vérifiant
les hypothèses :
1. f (I) ⊆ I ;
2. la fonction f est contractante de rapport λ ∈ [0, 1[.
Soit maintenant un réel α appartenant à I. Posons (Un ) la suite définie par :
U0 = α pour n = 0
Un+1 = f (Un ) pour n > 1
Remarques 3.23
1. Dans la situation du théorème précédent, la fonction f ne peut admettre qu’un seul point fixe
sur l’intervalle I.
2. Nous verrons au chapitre suivant que les fonctions dérivables f sur un intervalle I fermé et borné
et telle qu’il existe ε ∈ [0, 1[ tel que la dérivée f ′ vérifie pour tout x ∈ I, l’inégalité |f ′ (x)| 6 ε
sont contractantes sur cet intervalle.
]m, M [⊆ f (I)
preuve:
Si m = M , la fonction f est constante sur I et nous avons terminé.
Supposons m < M . Et fixons y ∈]m, M [. Par définition des bornes inférieure et supérieure, il existe
(a, b) ∈ I 2 , tel que :
Nous pouvons sans perdre de généralité supposer que a < b. Nous posons alors
E := {x ∈ [a, b] | f (x) 6 y}
L’ensemble E est non vide et majoré ; nous notons c := sup E sa borne supérieure. Par définition, pour
tout entier n > 1, il existe un élément xn ∈ E vérifiant c − n1 < xn 6 c. Par continuité de f en c,
nous en déduisons que la suite (f (xn )) converge vers f (c). Ceci nous permet de dire, par passage à
la limite que f (c) 6 y. Remarquons que nous avons c < b et pour tout x ∈]c, b], l’inégalité f (x) > y.
9 Ici m peut valoir −∞ par exemple . . .
16
Maintenant par continuité de f en c, nous avons : f (c) = lim+ f (x) qui doit être plus grand ou égal à
x→c
y par passage à la limite. Nous concluons que f (c) = y. Nous avons ainsi montré que l’ensemble f (I)
est convexe ; d’après ce que nous avons vu dans le chapitre sur les nombres réels, cela prouve que f (I)
est un intervalle.
Corollaire 3.25 Soit f : [a, b] → R continue. Alors f ([a, b]) est un intervalle fermé borné de R, à
savoir [m, M ] où m := inf [a,b] f et M := sup[a,b] f .
preuve:
D’après le théorème précédent, nous savons toutes les valeurs comprises strictement entre m et M sont
atteintes. Il ne reste plus qu’à montrer que les valeurs m et M sont prises. Puisque m est la borne
inférieure de f sur [a, b], il existe une suite (xn ) d’éléments de [a, b] telle10 que (f (xn )) converge vers
m. Le théorème de Bolzano-Weierstraß nous assure que nous pouvons extraire de la suite (xn ) une
sous-suite (xnk ) convergente ; notons c la limite de notre sous-suite. Nous avons a 6 c 6 b (inégalités
passées à la limite) et la suite (f (xnk )) reste convergente vers m qui vaut f (c) par continuité de f en
c et unicité de la limite. Le raisonnement est exactement le même pour M .
Remarques 3.26
1. On utilise souvent le corollaire précédent dans la situation suivante : f : [a, b] → R est une fonction
continue sur [a, b] telle que f (a) < 0 et f (b) > 0 (ou l’inverse). Dans ce cas, l’équation f (x) = 0
admet une solution dans l’intervalle ouvert ]a, b[.
2. Il faut noter que cela est une propriété spécifique des fonctions de R dans R. Par exemple la
fonction f : Q → Q définie par f (x) = x2 − 2, vérifie f (0) < 0 et f (x) > 0 mais l’équation
f (x) = 0 n’a pas de solution (dans Q).
(l’inclusion de droite découlant du fait que pour tout x ∈ I, nous avons m 6 f (x) 6 M , par définition
de m et M ). De plus, nous avons, pour tout x ∈ I : f (x) 6 f (a) ; donc f (a) est un majorant de f (I)
qui de plus appartient à f (I) donc c’est le plus grand élément de f (I), c’est-à-dire l’extrémité droite
de f (I). Supposons maintenant que limx→b f (x) = inf I f soit atteinte par un élément x ∈ I, alors
puisque x < b, nous pouvons trouver y ∈]x, b[, qui serait alors, par stricte décroissance de f tel que
f (y) < inf I f = f (x) ; ce qui contradictoire. Les autres cas se traitent de la même manière.
preuve:
(1 ⇒ 2) Nous montrons la contraposée. Supposons f non strictement monotone. Il existe donc x1 , x2 , x3
et x4 appartenant à I tels que
Cette application, comme composée d’application continue, est continue. Remarquons alors que g(0) =
f (x3 ) − f (x4 ) 6 0 et que g(1) = f (x1 ) − f (x2 ) > 0. D’après le théorème des valeurs intermédiaires,
nous en déduisons qu’il existe t0 ∈ [0, 1] tel que g(t0 ) = 0. Maintenant, comme nous avons x1 < x2 et
x3 < x4 , nous avons nécessairement t0 · x1 + (1 − t0 )x3 < t0 · x2 + (1 − t0 )x4 ; ce qui prouve que f n’est
pas injective.
(2 ⇒ 1) Supposons par exemple f strictement décroissante. L’ensemble R est totalement ordonné donc
pour tout (x, y) d’éléments de I tel que x 6= y, nous avons x < y ou x > y, ce qui donne f (x) > f (y)
dans le premier cas et f (x) < f (y) dans le deuxième cas ; nous avons donc f injective sur I.
g(y) = x ⇐⇒ f (x) = y
preuve:
1. Il suffit d’utiliser le lemme précédent pour constater que fe est injective. Comme les valeurs prises
par fe sont exactement les éléments de J = f (I), l’application fe est bijective. La croissance (resp.
décroissance) de fe résulte de celle de f .
2. C’est la définition de l’application réciproque de fe.
3. Le fait que g soit croissante (resp. décroissante) est clair : soient y, y ′ des éléments de J tels que y < y ′ .
Puisque fe est surjective, nous trouvons deux éléments x, x′ dans I tels que f (x) = y et f (x′ ) = y ′ , de
plus, fe étant une application les deux éléments x et x′ sont distincts.
1er cas : Supposons f strictement croissante.
Supposons alors que nous ayons x′ < x. Puisque fe est croissante, nous aurions y ′ = f (x′ ) < f (x) = y
ce qui est une contradiction. Nous concluons donc que g(y) = x < x′ = g(y ′ ) puis à la stricte croissance
de g.
2ème cas : Supposons f strictement décroissante.
Supposons alors que nous ayons x < x′ . Puisque fe est croissante, nous aurions y ′ = f (x′ ) < f (x) = y ce
qui est une contradiction. Nous concluons donc que g(y ′ ) = x′ < x = g(y) puis à la stricte décroissance
de g.
4. Nous supposons f strictement croissante (le cas f décroissance est complètement analogue)
Fixons y0 ∈ J différent des éventuelles extrémités de J. Notons x0 l’antécédent de y0 par fe. Par stricte
monotonie de fe, le point x0 est intérieur à l’intervalle I (i.e. différent des éventuelles extrémités de
I). Soit donc ε > 0 tel que ]x0 − ε, x0 + ε[ soit inclus dans I. Il s’agit de trouver δ tel que l’image de
l’intervalle ]y0 − δ, y0 + δ[ par g soit inclus dans ]x0 − ε, x0 + ε[.
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Posons δ := min{y0 − fe(x0 − ε), fe(x0 + ε) − y0 } (qui est un réel strictement positif puisque fe est
strictement croissante). Soit y ∈]y0 − δ, y0 + δ[. Notons x ∈ I son image par g. Nous avons alors, par
définition du réel δ :
Ce qui est bien l’inégalité recherchée. Dans le cas où y0 est une extrémité de l’intervalle I, il suffit de
ne raisonner qu’avec une des inégalités.
Remarques 3.30
1. Les applications f et fe ne sont pas égales ; l’une est surjective et l’autre pas ;
2. La fonction g est appelée la fonction réciproque de la fonction f (sur l’intervalle [a, b]) et est
notée f −1 , comme l’application réciproque de la fonction fe;
Exemple 3.31 La fonction sin est continue strictement croissante sur l’intervalle − π2 , π2 ; elle admet
donc une fonction réciproque notée Arcsin qui est définie sur [−1, 1]. Par définition, pour y ∈ [−1, 1]
et x ∈ R, nous avons l’équivalence :
x ∈ − π2 , π2
Arcsin(y) = x ⇐⇒
sin(x) = y
Nous pouvons reformuler notre résultat sur les fonctions réciproques de la manière suivante :
f : I → f (I)
est un homéomorphisme.
Corollaire 3.34 Soit I un intervalle de R. Toute partie homéomorphe à I est un intervalle de même
nature.
preuve:
Posons f : I → X un homéomorphisme. Puisque f est continue sur I et injective, nous en déduisons,
d’après le lemme 3.28, que f est strictement monotone sur I. Puis par la proposition 3.27, nous en
déduisons que X = f (I) est un intervalle de même nature que I.
Exercice 3.35 Montrer que les intervalles ]0, 1[ et R sont homéomorphes. Dire pourquoi les intervalles
[0, 1] et ]0, 1[ ne sont par homéomorphes.
19
Cf −1
y=x
Cf
Remarque 3.36 Nous traitons de nombreux exemples, en détails, dans le chapitre sur les fonctions
usuelles.