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Aimé Césaire, Une Tempête : résumé,

personnages et analyse

Une tempête d’Aimé Césaire est une réécriture anticolonialiste et post-coloniale de The Tempete de
Shakespeare pour un “théâtre nègre”. Elle a été publiée et jouée pour la première fois au Festival
d’Hammamet (Tunisie) en 1969. Explorons ensemble cette pièce de théâtre qui illustre l’humanisme
que présente la négritude.

Résumé scène par scène de Une Tempête d’Aimé Césaire


ACTE 1

Scène 1

La scène s’ouvre sur un navire qui fonce droit vers une tempête. Le capitaine et le maître tentent le
tout pour le tout avec les matelots pour éviter que le navire ne s’échoue. Toutefois, Antonio, le frère
et rival de Prospéro, Alonso, le roi de Naples, Gonzalo, le conseiller du roi de Naples et Sébastien, le
frère d’Alonso ne cessent de les déranger. Finalement, le bateau sombre emportant tous les
personnages y compris Ferdinand, la fille du roi de Naples.

Scène 2

Sur l’île, Miranda, la fille de Prospero, le duc de Milan déchu, assiste au naufrage du navire. Elle
demande à son père pourquoi ils ont dû quitter leur île pour venir s’échouer sur cette île. Prospero
lui répond que son titre a été usurpé par son frère et le roi de Naples qui lui ont pris ses papiers et
l’ont dénoncé à l’Inquisition comme “magicien et sorcier”. Le procès n’eut pas lieu, mais il fut
envoyé avec sa fille, Miranda, sur une île déserte. Prospero cite le nom de Gonzalo, le conseiller du
roi de Naples, qui lui a envoyé des vivres et des vêtements ainsi que ses livres et ses instruments
pour qu’ils puissent vivre dans de meilleures conditions.

Prospero confie à sa famille que si le bateau a fait naufrage, c’est que ce navire abritait tous les
hommes qui avaient comploté contre lui. Il a donc demandé l’assistance d’Ariel, l’esprit aérien à son
service depuis qu’il l’a sauvé des griffes de Sycorax, la sorcière. C’est elle qui a créé cette tempête
responsable du sort de ce bateau. Ariel arrive à ce moment avec le cœur lourd. Il a obéi aux ordres
de son maître, mais il est peiné d’avoir vu ce bateau plein de vie couler. Il s’entretient avec Prospero
pour savoir quand il le libérera enfin. Celui-ci lui répond qu’il aura droit à sa liberté quand il jugera
bon de la lui rendre.

Prospero appelle Caliban, le fils difforme de la sorcière Sycorax, qui, selon lui, s’émancipe un peu
trop. Caliban arrive et montre clairement que, même s’il doit servir Prospero, il ne l’apprécie pas
pour autant. Il lui explique que sans lui, il régnerait sur les terres de sa mère. Il se plaint de ses

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conditions de vie, lui qui a été forcé de vivre dans une grotte qu’il qualifie de “ghetto”. Pour
Prospero, ses conditions de vie seraient plus clémentes s’il entretenait un peu plus son lieu de vie. Il
lui rappelle également que s’il l’a évincé, c’était avant tout parce qu’il avait cherché à violer sa fille.
Caliban nie et continue de se moquer de son maître. Lassé, Prospero le menace avec “la trique”*.
Caliban arrête, mais explique à son maître que dorénavant, il ne répondra que sous le nom de “x”,
car il ne veut pas répondre à un nom qui ne lui appartient pas.

Caliban s’en va et Ariel revient. Prospero lui dit qu’il a changé d’avis, il souhaite qu’il les effraie sans
leur faire du mal. Ariel s’exécute et se met à chantonner. Attiré par la douce mélodie, Ferdinand
arrive jusqu’à eux. Il se met à complimenter la beauté de Miranda qui l’accueille. Cependant,
Prospero ne voit pas l’arrivée de ce jeune garçon d’un très bon augure et il décide d’en faire son
esclave.

* la trique “Gros bâton utilisé pour frapper.” (Le Petit Robert)

ACTE 2

Scène 1

Ariel vient retrouver Caliban qui est occupé à chanter dans sa grotte. Il lui avertit que leur maître
Prospero médite sur lui de terrible vengeance. Ariel essaie de demander de l’aide à Caliban, il
souhaite troubler Prospero afin qu’il se rende compte de ses injustices et qu’émerge en lui une
conscience. Caliban, lui, ne rêve que de combat. Il refuse d’aider Ariel dans sa démarche pacifique
estimant que c’est par la violence qu’il arrivera à pousser à son bout son maître. Ils se quittent en se
souhaitant bonne chance.

Scène 2

Antonio, Gonzalo et Sébastien découvrent avec Alonso, le roi de Naples, les terres sur lesquelles ils
ont fait naufrage. Ils y découvrent de jolis fruits, mais Sébastien se plaint que la terre soit si aride
par endroit. Gonzalo leur explique qu’ils peuvent compter sur le “guano”, la fiente d’oiseaux qui se
trouve dans les grottes pour fleurir la terre. Toutefois, les nobles n’ont pas l’intention de réaliser ses
tâches eux-mêmes. Ils ont besoin de main-d’œuvre. Ils se demandent si cette île abrite une tribu.
Gonzalo leur explique que s’ils les trouvent, il faudrait éviter qu’il n’apportent avec eux “leurs
défauts”. Alonso lui demande implicitement de se taire. Gonzalo s’exécute. Alonso est profondément
attristé par la perte de son fils et se demande s’il n’est pas mort. Une musique se fait entendre et
Prospero arrive près d’eux en étant invisible. Ils voient des lutins arriver avec des mets succulents.
Au moment où les compagnons s’apprêtent à manger, les lutins reviennent pour leur dérober la
nourriture. Cela aurait pu continuer comme ça, mais Prospero ordonne à Ariel de les laisser manger.
Dérouté, quant aux idées de son maître qui sont un peu trop changeantes, il finit par obéir. Après
avoir mangé, le Roi et Gonzalo se mettent à faire la sieste.

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Scène 3

Antonio essaie de pervertir Sébastien, le frère du roi, afin qu’il puisse exécuter Alonso durant son
sommeil. Il lui avoue que s’il est devenu le Duc à la place de son frère, c’est qu’il a réussi à secouer
les arbres avant qu’il ne soit trop tard. Sébastien demande à Antonio d’exécuter son frère à sa place.
Au moment où Antonio se dirige vers le Roi, Ariel entre et se met à réveiller Alonso et Gonzalo. Il
leur apprend la traîtrise d’Antonio et Sébastien. Il leur apprend également que le maître de cette île,
Prospero, les a sauvés et a souhaité le missionner pour révéler cette traîtrise. Il leur avoue qu’ils ont
pu manger grâce au bon vouloir de son maître et que le fils d’Alonso est bel et bien vivant, sauvé par
Prospero. Ariel les invite, sous les ordres de son maître, à venir assister aux fiançailles de sa fille,
Miranda. Il leur avoue aussi que Prospero leur a pardonné pour leurs méfaits.

ACTE 3

Scène 1

Ferdinand travaille sous les yeux paresseux de Caliban qui n’a absolument pas envie de travailler.
Miranda arrive et constate que Ferdinand n’est pas fait pour ce type de tâche. Le jeune lui explique
qu’il saurait s’en montrer digne si elle lui donnait son nom. Miranda lui confie que cela lui est
interdit par son père. Caliban souffle le prénom aux oreilles de Ferdinand pendant que Miranda est
occupée ailleurs. Quand Ferdinand décide de l’appeler au hasard par “Miranda”, elle sait que c’est
un coup de Caliban. La jeune fille s’en va en voyant son père arriver. Celui-ci examine le travail et se
dit que c’est très bien pour un commencement. Prospero ordonne à Caliban de continuer le travail et
il s’en va avec Ferdinand.

Scène 2

Avec la pluie, Caliban s’est caché sous une brouette. Trinculo, le bouffon du roi de Naples passe par
là et aperçoit Caliban. Il se dit que la vente de cet “Indien” va lui permettre de gagner de l’argent. Il
se pose près de Caliban en attendant que la pluie se calme. Stephano, un des amis de Trinculo,
arrive à son tour. Tout comme Trinculo, il se dit que l’Indien pourrait lui rapporter beaucoup
d’argent. En s’approchant, il prend Trinculo et Caliban comme une seule et même personne et se dit
que ce “Zindien siamois” lui rapportera beaucoup d’argent. Quand il comprend que son ami,
Trinculo, est caché là-dessous, il est heureux. Ils se disent qu’ils n’ont plus à être à la merci d’un
quelconque roi. Se croyant seul sur cette île, Stephano s’autoproclame roi. Caliban leur apprend que
le roi de ces lieux est Prospero, mais qu’il est prêt à les aider pour le détrôner.

Scène 3

Dans sa grotte, Prospero s’entretient avec les dieux quand arrive un dieu que personne n’a invité du
nom d’Eshu. Prospero lui demande de s’en aller, mais ce “dieu-diable nègre” se met à chanter une
chanson obscène qui fait fuir tous les dieux. Prospero comprend que Caliban complote contre lui. Il
ordonne à Ariel de le punir comme il faut.

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Scène 4

Avec l’aide d’Ariel, Prospero utilise la nature pour venir à bout du complot orchestré par Caliban
avec l’aide de ses deux nouveaux camarades : Trinculo et Stephano. Quand il s’aperçoit que les deux
hommes ne veulent pas aller jusqu’au bout, Caliban décide de résister tout seul. Prospero apparaît
et lui ordonne de le tuer. Caliban n’étant pas un assassin, il s’y refuse et souhaite un combat à la
loyal. Prospero ordonne à Ariel d’emprisonner les trois personnages.

Scène 5

Ferdinand et Miranda jouent tous les deux une partie d’échecs. Ils sont rejoints par Antonio,
Gonzalo, Antonio, Sébastien et Alonso. Ce dernier est heureux de retrouver son fils et il est fier de ce
mariage avec Miranda. Prospero les rejoint avec Ariel. Prospero pardonne à tous ses anciens
ennemis et il rend à Ariel sa liberté. Trinculo et Stephano rejoignent leur maître. Prospero
s’entretient avec Caliban. Il lui pardonne pour tout, mais Caliban porte beaucoup trop de haine dans
son cœur. Contre toute attente, Prospero choisit d’abandonner ses pratiques magiques et de rester
sur l’île afin de rejoindre Caliban en pleine terre.

Présentation des personnages


Prospero est le duc de Milan déchu qui vit depuis plus de 10 ans sur l’île en tant que puissant
sorcier. Il est représenté comme un tyran puis, progressivement, il finit par tout abandonner y
compris ses pouvoirs magiques. Il rejoint Caliban en pleine terre.
Miranda est la fille de Prospero. Elle tombe amoureuse de Ferdinand, le prince de Naples, au
moment même où ils parlent pour la première fois. Elle finit par partir avec le jeune prince en
Europe.
Ariel est un esprit aérien qui a été sauvé par Prospero alors qu’il était sous le joug de
la sorcière Sycorax. C’est un mulâtre qui doit servir Prospero jusqu’à ce que ce
dernier lui accorde la liberté, chose qu’il fera à la fin de la pièce.
Caliban est le fils de la défunte Sycorax. Ce fils difforme est un “esclave nègre” qui doit servir
Prospero, et ce, même s’il le haït au plus profond de son âme. Dans la pièce d’Aimé Césaire, il
représente une allégorie de l’homme opprimé. Il souffre de s’être vu dépouillé de sa terre. Il
rêve de s’émanciper et continue d’user de sa langue authentique pour ne pas oublier son
identité, mais également pour s’opposer aux standards que son maître a souhaité lui
enseigner.
Junon, Iris et Cérès sont des dieux qui s’entretiennent avec Prospero à la scène 3 de l’Acte
III. Outrés par les paroles obscènes d’Eshu, ils décident de s’en aller.
Eshu est le “dieu-diable” nègre qui s’invite lorsque Prospero demande aux dieux de soutenir le
mariage de sa fille avec le prince de Naples. Il se met à chantonner des paroles obscènes qui
font fuir les autres dieux. C’est le seul personnage que l’on ne retrouve que dans cette version
d’Une tempête.
Alonso est le roi de Naples qui, une fois échoué sur l’île, n’aura qu’une seule envie : retrouver
son fils.

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Sébastien est le frère du roi de Naples. Il tente d’usurper son trône en demandant à Antonio
de l’assassiner pendant qu’il dort. Celui-ci sera arrêté à temps par Ariel.
Antonio est le frère de Prospero. C’est lui qui a pris les titres de son frère et c’est également à
cause de lui que Prospero est sur cette île depuis dix ans.
Ferdinand est le fils du roi de Naples. Il suit la mélodie d’Ariel et échoue pas loin de Miranda.
Il tombe amoureux de cette dernière.
Gonzalo est le conseiller du roi de Naples. Il aide également Prospero à de nombreux
moments en lui envoyant de la nourriture, des vêtements ainsi que des livres et des
instruments.
Trinculo est le bouffon du roi de Naples, c’est également un ami de Stephano. Ce dernier est
l’intendant du roi, c’est également un ivrogne. Il s’autoproclame roi de cette île. Avec Caliban,
ils marchent contre Prospero dans l’espoir de le détrôner.
Hormis ces personnages, nous avons également le maître d’équipage, le capitaine du navire
ainsi que les matelots.

Analyse de l’œuvre
Les thèmes abordés dans cette pièce de théâtre

Bien connu pour être un haïsseur de l’oppression, Aimé Césaire traite de la négritude dans sa
pièce de théâtre. Parmi les personnages exploités dans cette postiche, seul Eshu (dieu-diable
nègre) est un personnage nouveau. Toutefois, il ajoute des caractéristiques à deux des
personnages : Caliban devient un esclave nègre et Ariel un esclave, ethniquement un mulâtre.
Quand il est arrivé sur l’île, Prospero a tué la sorcière Sycorax et il a fait de son fils, Caliban,
natif de cette île, son esclave.
Dans cette pièce, Ariel représente la résignation. La scène 1 de l’acte II fait clairement
comprendre toute la puissance dont dispose Prospero “Pauvre Caliban, tu vas à ta perte. Tu
sais très bien que tu n’es pas le plus fort, que tu ne seras jamais le plus fort. À quoi sert de
lutter ?”. Ariel fait confiance au maître et reste persuadé qu’il va finir par le libérer. D’ailleurs,
c’est ce qu’il fait comprendre à Caliban “il m’a promis la liberté”. Il accepte d’obéir au maître,
et ce, même si ces ordres vont à l’encontre de ses valeurs comme c’est le cas lorsque Prospero
lui demande de faire couler le navire.
Caliban quant à lui incarne la révolte. Il ne souhaite pas se résigner et se moque d’Ariel “A
quoi crois-tu donc ? À la lâcheté ? À la démission ? À la génuflexion ? C’est ça ! On te frappe
sur la joue droite, tu tends la joue gauche. On te botte la fesse gauche, tu tends la fesse droite.
[…] Eh bien, très peu pour Caliban”. En effet, ce dernier a le désir de se rebeller, quitte à en
perdre la vie : “Mieux vaut la mort que l’humiliation et l’injustice…”. Caliban éprouve de la
colère pour son maître. Il le hait.
La sorcellerie utilisée par Prospero n’est pas issue des pratiques étranges des cultures négro-
africaines. Prospero use de la sorcellerie, représentation des forces du mal, afin de s’assurer la
suprématie devant son opposant, Caliban.

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Les traces d’oralités dans Une Tempête

Dans les œuvres littéraires négro-africaines, les traces d’oralités permettent à la fois d’indiquer les
origines de leurs auteurs, mais elles ont aussi une fonction anticolonialisme et révolutionnaire.
Dans une tempête, cette oralité apparaît dès le début de la pièce avec Caliban qui répond à son
maître en utilisant “Uhuru !” qui est un mot provenant de la langue swahilie qui signifie “Liberté !”.
Cela permet de faire comprendre que dès le début de la pièce, Caliban songe déjà à s’émanciper.

Par ailleurs, Caliban, tout comme Ariel utilise souvent le chant qui est l’une des catégories de la
tradition orale comme cette chanson cantonnée par Caliban :

“Shango marche avec force


À travers le ciel, son promenoir
Shango est un secoueur de feu
chacun de ses pas ébranle le ciel
ébranle la terre
Shango Shango ho “

Shango est une divinité originaire d’Afrique de l’Ouest (Orisha). C’est le dieu de la foudre, mais
aussi de la bravoure. Ce n’est donc pas étonnant que Caliban chantonne des chants avec cet Orisha
en sachant qu’il souhaite se rebeller contre son maître. Dans la toute-puissance de ce Prospero
Sorcier, il s’en remet au pouvoir divin de ses dieux.

Le chant de Caliban est aussi en créole : “Ouendé, Ouendé, Ouendé Macaya” ( “manger encore un
peu, petit à petit, même si on a déjà mangé à sa faim”), qui permet à Caliban de se distraire pendant
qu’il travaille et que son estomac est vide.

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