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Vénus de Prosper
Mérimée
Le fantastique dans « la Vénus d'Ille » de Prosper
Mérimée, analyse et commentaire
- Les apprentis qui lui jettent la pierre souhaiteraient bien la détruire : « Si tu étais à moi, je te
casserais le cou ».
- Le guide catalan la considère comme méchante : « Mais avec tout cela, la figure de cette idole ne
me revient pas. Elle a l'air méchante ».
- Madame de Peyrehorade lui en veut aussi et aimerait faire fondre la statue « pour en faire une
cloche » : « Je ne peux pas prendre sur moi de regarder la statue qui fait des malheurs comme celui-là.
»
- Le narrateur : La statue est dotée «d'une merveilleuse beauté» mais aussi d'un «caractère étrange»
- Elle a un regard méchant, féroce et beau « Il y a dans son expression quelque chose de féroce, et
pourtant je n'ai jamais vu rien de si beau »
- Le catalan : « C'est une idole, vous dis-je ; on le voit bien à son air. Elle vous fixe avec ses grands
yeux blancs... On dirait qu'elle vous dévisage. On baisse les yeux, oui, en la regardant ».
- Madame de Peyrehorade : « Un beau chef-d’œuvre qu'elle a fait ! casser la jambe d'un homme ! »
- Le narrateur : « Dédain, ironie, cruauté, se lisaient sur ce visage d'une incroyable beauté »
- Alphonse : « Non... je... je ne puis l'ôter du doigt de cette diable de Vénus. » Et il se croit
«ensorcelé» par «cette diable de Vénus»
- L'inscription gravée sur le socle de la statue, en latin, renforce l'aspect maléfique de la Vénus d'Ille :
« Prends garde à toi si elle t'aime ». C'est une prophétie qui annonce la suite de l'histoire.
1. Monsieur de Peyrehorade fait des citations sans faire attention au contexte tragique dans
lesquels ces vers sont situés :
- « C’est Vénus tout entière à sa proie attachée ». Citation de Racine (Phèdre, vers 306). La pièce de
Racine, Phèdre, met en scène Phèdre, qui est une victime de la colère de Vénus.
- « Manibus date lilia plenis » : « Répandez des lis à pleines mains » (Virgile, Énéide, VI, 883). Cette
citation se trouve dans un passage qui raconte les amours de Didon et d'Énée. Énée quittera Didon, et
Didon en mourra d'amour.
- « Veneris nec praemia nôris ». Virgile, Énéide, IV, 33 : « Tu ne connais pas les présents de Vénus. »
Cette citation renvoie à Marcellus, l'héritier de l'empereur romain Auguste. Marcellus mourra alors
qu'il n'est encore qu'un jeune homme.
- « Il en rit beaucoup, et, comparant l'apprenti à Diomède, il lui souhaita de voir, comme le héros grec,
tous ses compagnons changés en oiseaux blancs. » - «Diomède» : Roi d’Argos, un des plus vaillants
guerriers grecs, participa à l’expédition des Épigones contre Thèbes et à la guerre de Troie. Au siège
de cette ville, il avait blessé Vénus. «D'après les légendes, Vénus se vengea de Diomède en
métamorphosant les compagnons de celui-ci en oiseaux blancs.».
- Monsieur de Peyrehorade choisit le vendredi pour marier son fils, car c'est le jour de Vénus (Vener-
di) ; personne, à part lui, ne désire faire de mariage ce jour-là, car, dans la religion chrétienne, c'est le
jour de la mort de Jésus : « - Vendredi! s'écria son mari, c'est le jour de Vénus! Bon jour pour un
mariage! Vous le voyez, mon cher collègue, je ne pense qu'à ma Vénus. D'honneur! C’est à cause
d'elle que j'ai choisi le vendredi ».
- Il veut lui faire des offrandes, et dit qu'il veut faire revivre un culte abandonné depuis longtemps. Il
veut faire un sacrifice à la déesse, comme dans l'antiquité. Les palombes sont en effet les animaux
emblématiques de Vénus : « Demain, si vous voulez, avant la noce, nous lui ferons un petit sacrifice;
nous sacrifierons deux palombes, et si je savais où trouver de l'encens... »
- D'après Monsieur de Peyrehorade, c'est une faveur, presque un honneur d'être blessé par Vénus : «
Ma femme, vois-tu ? dit M. de Peyrehorade d'un ton résolu, et tendant vers sa jambe droite dans un bas
de soie chinée, si ma Vénus m'avait cassé cette jambe-là, je ne la regretterais pas. »
3. Monsieur de Peyrehorade compare souvent la Vénus à la jeune fiancée alors que Vénus est
une déesse connue pour sa jalousie.
- Il met sur le même plan la statue et la jeune fiancée, il les met en rivalité : « Mon fils, choisis de la
Vénus romaine ou de la catalane celle que tu préfères. Le maraud prend la catalane, et sa part est la
meilleure. La romaine est noire, la catalane est blanche. La romaine est froide, la catalane enflamme
tout ce qui l'approche ».
- L'autre folle, surnaturelle, irrationnelle, effrayante, mais vers laquelle nous penchons, qui est celle de
la survivance des pouvoirs des dieux anciens, et, ici, de la Vénus, cette «idole du temps des païens»
dont le maléfice se perpétue à travers le temps, qui s'anime et se venge contre celui qui s’est marié
avec elle mais s’est révélé un mauvais amant.
Pour qu’un texte soit parfaitement fantastique, il faut que l’hésitation entre les deux explications soit
bien maintenue; qu’il soit difficile d’infirmer ou de confirmer l’une ou l’autre. Ici, le fantastique est
fait de mots et de signes qui tracent à travers la nouvelle un réseau de correspondances installant la
Vénus au rang de suspecte sans jamais en faire une accusée. Le mystère de la nature profonde de la
statue subsiste; la seule réalité connue est la mort violente d’Alphonse, mais elle échappe à toute
explication, et le choix est laissé au lecteur de l’attribuer à l’Aragonais ou à la statue.
Que se passe-t-il ?
- l'assassinat d'Alphonse
- la présence de la bague
Le narrateur suppose que c'est M. Alphonse, ivre, qui monte l'escalier pour aller se coucher. Il ne
donne pas d'explication pour les pas qui descendent : "Cela me parut singulier". Le narrateur suppose
que l'assassin est l'Aragonais, mais il est innocenté. Le procureur du roi pense que la jeune mariée est
folle
La jeune mariée raconte que l'assassin est une statue. Le narrateur ressent "un peu de la terreur
superstitieuse" quand il interroge le domestique pour savoir comment la bague est arrivée dans la
chambre : il ne le dit pas, mais on sent qu'il pense que c'est la statue qui a laissé la bague. Le narrateur
ne trouve pas d'explication rationnelle : rien n'est venu "éclairer cette mystérieuse catastrophe" On
suppose que par jalousie la statue a tué Alphonse
Les vignes ont gelé plusieurs fois à Ille depuis que la statue a été fondue pour faire une cloche
M. de P., ami du narrateur, dit qu' « il semble qu'un mauvais sort poursuive ceux qui possèdent ce
bronze ».