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Le relèvement ad magistrum

La Chair quitte les os


Quand le phénix sent sa mort proche, il s’expose au soleil jusqu’à ce que les rayons le
consument. De la moelle et des os sort un œuf d’où émerge un oiseau régénéré. Le mot sacré indique
que tout n’est pas mort puisque la moelle est dans l’os. L’essence de la vie est présente dans cette
partie imputrescible de l’être.
L’os, en hébreu, se dit etsem, signifiant essentiel, substance, puissance, authenticité.
Ézéchiel 37, 1 à 14 prophétise la résurrection des corps, la chair revêtant les os : «Et je mettrai sur
vous des nerfs, et je ferai venir sur vous de la chair, et je vous recouvrirai de peau; et je mettrai en
vous le souffle, et vous vivrez; et vous saurez que je suis l’Éternel.»
Selon René Guénon, il existe dans le corps humain une particule indestructible, représentée
symboliquement comme un os très dur, et à laquelle l’âme demeurerait liée après la mort. Cet os est
appelé luz. Ce nom a souvent le sens d’amande. Comme le noyau contient le germe et l’os la moelle,
le luz contient les éléments virtuels nécessaires à la restauration de l’être. Cette restauration s’opèrera
sous l’influence de la rosée céleste revivifiant les ossements desséchés. Cet os serait situé à l’extrémité
de la colonne vertébrale, désigné sous le nom de sacrum. Pour Rachel Franco il aurait une forme
presque cubique et se situerait au sommet de la colonne vertébrale.
Dans le contexte christique de la légende d’Hiram, les deux os en sautoir faisaient
probablement référence aux deux mentions des os qui apparaissent dans deux versets des Évangiles de
la Passion : Luc 24,39 : «Palpez-moi et voyez qu’un esprit n’a ni chair ni os»» et Jean 19,36 : «Car
cela est arrivé pour que l’Écriture s’accomplît, aucun de ses os ne sera brisé.»
Le Soleil est le prototype du mort qui renaît chaque matin. Selon Héraclite, le soleil est
nouveau chaque jour.
Dans le rituel maçonnique, Hiram représente aussi le Soleil, plus idéalement la Lumière, celle
dont il est question au début de la Genèse et celle de l'Évangile de saint Jean : lumière de l’esprit,
intelligence suprême, connaissance de la chose en soi. Le maître relevé accomplit le ni nu ni vêtu du
premier degré, qui avait déjà dépouillé le franc-maçon d’une partie de ses vêtements. Après l’avoir
dépouillé de sa chair, il lui est redonné une vie en lumière1.
Par la substitution du récipiendaire au héros mis à mort, Hiram réédite le mythe de la
réintégration, c’est-à-dire le retour à l’unité qui permet de rassembler ce qui est épars.
La nature offre de nombreux exemples de régénérescence, comme l’arbre sec de l’hiver qui va
reverdir après la saint Jean, comme le grain se décomposant en terre d’où va ressortir une jeune plante,
comme les grappes de raisin pourrissant, mais qui méticuleusement triées, donneront un vin
prestigieux ; de même, des restes d’Hiram surgira un nouvel initié. L’esprit survit à la matière. Selon
Thomas, la résurgence est ici purement spirituelle comme l’exprime le Logion1 de Jésus: «celui qui
trouvera l’interprétation de ces paroles ne goûtera pas la mort.»
L’Évangile de saint Jean dit : «La Parole s’est faite chair». Lorsque la chair quitte les os, ce qui
disparaît ou se perd serait-ce donc la Parole ?
Les Cinq points parfaits
C’est par les cinq (5) points parfaits que se fait le relèvement du maître lors de la cérémonie de
passage.
Les 5 points parfaits préexistaient déjà chez les opératifs sous forme de topage des coteries et
pays (compagnons) ; cet usage, nommé guilbrette, existe encore de nos jours.

1
En hébreu les mots «peau», âur (‫)עור‬, et «lumière», aur (‫ )אור‬sont homonymes.
À l'époque ils se nommaient «les cinq points du Compagnonnage».
Dans la coutume opérative, le relèvement des statues, colonnes, taillées couchées, à fin de
finition, donnait lieu à des cérémonies compagnonniques.

Dans les rituels anglo-saxons, on les appelle les cinq points de la fraternité. Ces points sont
aussi appelés les cinq points de la Perfection magistrale, les cinq points parfaits de la maîtrise, ou
encore les cinq points de la fraternité.
Ce n'est qu'en 1724 que certains ouvrages maçonniques font état de cinq points justes, mais
c'est vers 1730 que la maçonnerie traditionnelle introduit un mot sacré. Ce dernier est un élément fort,
constitutif de l’origine et de la tradition maçonniques. Il confère aux cinq points de contact son
caractère de «parfaits» en unissant les natures humaine et divine. On peut les
décrire ainsi :
1° Se prendre mutuellement le poignet droit, en formant la griffe ;
2° s'approcher réciproquement du pied droit par le côté intérieur ;
3° rapprocher les poitrines du côté droit ;
4° se toucher réciproquement le genou droit ;
5° poser réciproquement la main gauche sur l'épaule droite vers le dos, pour se
tenir plus étroitement et s'attirer l'un à l'autre, ou tendre chacun le bras et la
main gauche comme en salut romain derrière l’autre, en signe de protection,
l’ensemble formant de profil une étoile à cinq branche, signe au RSE/REE des cinq points de la
fraternité.

RÉAA. Le très respectable prend le candidat (tué par les mauvais compagnons) par l’index de la main
droite et dit Boaz. Il prend le deuxième doigt et dit Jakin, la chair quitte les os, le corps est pourri.
Enfin il prend le poignet droit et, avec l’aide des deux surveillants qui sont de chaque côté du candidat,
il le relève par les cinq points de perfection en prononçant le mot sacré du maître. Le relèvement n’est
efficient que par une chaîne d’union à trois. Le Maître est retrouvé et il reparaît plus radieux que
jamais après son relèvement.
Les courants maçonniques divergent sur cette pratique nécromantique quant aux
interprétations de ce geste où le vif saisit le mort. Sans exhaustivité, on peut les classer ainsi :
 La fraternité comme code moral.
C’est l’explication qu’en donne le Catéchisme des trois coups distincts (1760). Premièrement, main
contre main, signifie que je tendrai toujours la main à un frère ou une sœur pour l’aider, tant que cela
sera en mon pouvoir. Deuxièmement, pied contre-pied, signifie que je n’aurai jamais peur de m’écarter
de mon chemin pour rendre service à un frère. Troisièmement, genou contre genou, signifie que
lorsque je m’agenouille pour faire ma prière, je ne dois jamais oublier de prier aussi bien pour mon
frère que pour moi-même. Quatrièmement, poitrine contre poitrine, sert à montrer que je garderai les
secrets de mon frère comme les miens propres. Cinquièmement, la main gauche qui soutient le dos,
signifie que je serai toujours prêt à soutenir un frère tant que cela sera en mon pouvoir.
 Le rappel ecclésiologique et spirituel du calvinisme.
La doctrine calviniste, exprimant les fondements de la foi presbytérienne, fut présentée et définie en
cinq points, mieux en cinq contre-points de la réfutation de l’arminianisme au synode de Dordretch en
1618. Ces cinq points, résumés par l’acronyme anglais TULIP (Total depravity, Unconditonal
election, Limited atonement, Irresistible grace, Perseverance of the saints) portant essentiellement sur
le primat et les modalités de la grâce et constituant les clefs de la rédemption en vue du salut éternel.
Ils représentaient des instruments de la résurrection des corps. Le pouvoir résurrecteur des cinq points
du calvinisme suggéra aux rédacteurs du Manuscrit Graham en 1726 l’idée de relever un cadavre,
probablement celui de Noé.
Le Contrat de la loge écossaise de Perth, qui décrit en 1658 le rite calviniste des cinq points du
compagnonnage, développait l’attouchement originel de la griffe. Cette griffe était à considérer d’une
part, ut singuli, comme un double instrument d’union fraternelle et d’onction spirituelle, et d’autre
part, ut universi, comme référence au double symbolisme ecclésiologique et spirituel du temple de
Salomon. La communion fraternelle engendrant l’onction spirituelle, l’onction spirituelle engendrant
la communauté fraternelle.
Le relèvement est donc à interpréter, ici, comme l’affirmation en la foi presbytérienne.
Ce n’est qu’en 1730, sur fond d’opposition religieuse, que la Grande Loge d’Angleterre, en majorité
anglicane, remplace Noé par le cadavre d’un meurtre, Hiram. Par réaction, la légende d’Hiram, occulta
l’interprétation calviniste, allant même jusqu’à identifier les calvinistes aux assassins du bâtisseur.
 La connaissance du métier des compagnons.
Le Manuscrit Graham 1726 se termine en insistant sur le nombre cinq. Outre les cinq points physiques
qui sont pied contre pied, […], le manuscrit faisait référence aux cinq ordres d’architecture et aux cinq
ordres de la maçonnerie, affirmant qu’ils tirent leur force de cinq figures primitives, une divine et
quatre temporelles qui sont comme suit : premièrement le Christ, le chef et la pierre d’angle,
deuxièmement Pierre appelé Képhas, (nom signifiant rocher), troisièmement Moïse qui grava les
commandements (sur deux tables de pierre), quatrièmement Betsaléel le meilleur des maçons (qui
construisit le sanctuaire à l’époque de l’exode), cinquièmement Hiram qui était rempli de sagesse et
d’intelligence. Ici l’interprétation lithocentrique du métier des bâtisseurs s’impose confirmée par la
question-réponse 24 du Graham : Qu'est-ce qu'un maçon ? Un ouvrier de la pierre.
 L’interprétation égyptienne.
Comment ne pas remarquer quelques similitudes avec la manière dont Isis transmettait à son enfant les
facultés et les qualités lumineuses qui en faisaient un roi : «à l’aide de quelques opérations magiques
auxquelles s’ajoutait la gestuelle de l’enlacement, de l’effleurement (face à face), de l’embrassement
(sur l’épaule droite), du caressement ou friction (fontanelle et nuque) et de l’aspiration de l’haleine
divine
Le révérend MCW Leadbeater remarque, concernant les anciennes initiations sacerdotales, que les
prêtres avaient leurs propres initiations auxquelles ils étaient seuls admissibles. Il prétend que la croix
était l'emblème de la descente dans la matière, et que, pour représenter cela, le candidat a été posé sur
une bière cruciforme, creusée pour convenir au corps du candidat, fatigué après un long rituel
préliminaire. Ses bras étaient lâchement attachés avec des cordes, et il a ensuite été transporté de la
salle d'initiation dans la crypte (ou voûte inférieure du temple), et placé sur un sarcophage pour
représenter l'enterrement réel. Il est resté ainsi pendant trois jours entiers, tandis que les épreuves de la
terre, de l'eau, de l'air et du feu étaient appliquées à l'âme divorcée, comme une expérience pratique
d'invulnérabilité. Le quatrième jour de la mise au tombeau, il a été mis en avant et exposé aux
premiers rayons du soleil levant, et restauré à la vie naturelle.
 L’interprétation alchimique.
Hermès dit : l'Alchimie «est la science immuable qui travaille sur les corps à l'aide de la théorie et de
l'expérience, et qui, par une conjonction naturelle, les transforme en une espèce supérieure plus
précieuse». C’est essentiellement le Rite de l'étoile flamboyante, dont on retrouve trace dans le
système philosophique des anciens Mages égyptiens, revoilé sous l'emblème maçonnique vers 1750,
qui développa en Franc-Maçonnerie cette interprétation.
 L’interprétation christique.
On ne peut ignorer l’influence réelle d’une culture religieuse catholique dans la maçonnerie française
du XVIIe siècle. La posture de relèvement et d’accueil du nouveau maître est une invitation à déchiffrer
le sens de la légende d’Hiram dont la première version parut dans l’ouvrage de Samuel Prichard
intitulé La Maçonnerie disséquée, divulgation du rituel de la Grande loge de Londres de 1730.
Analysant les deux sources historiques de cette légende, le Graham de 1726 et le Wilkinson de 1727, il
est permis de montrer que la figure d’Hiram était une figure allégorique renvoyant à une réalité bien
précise : Jésus. Et c’est en ce même sens allégorique, sans équivoque, que le rituel de la Grande loge
de Londres reprit la figure d’Hiram, la superposant à celle de Noé, pour élaborer sa légende, afin
d’entamer une herméneutique biblique à l’abri des clergés. La légende maçonnique d’Hiram exprimait
une interprétation spirituelle, et non charnelle, de la résurrection des morts tout en invitant les maçons
à s’interroger sur la notion mystérieuse d’attouchement corporel.
À travers les textes fondateurs, il apparaît clairement que le rituel maçonnique représentait une liturgie
judéo-chrétienne dont les éléments devaient servir de support à l’instruction spirituelle et
d’encouragement à la pratique spirituelle d’une manière analogue aux liturgies religieuses des églises
chrétiennes.
 Le relèvement introduit en psychanalyse par Sigmund Freud, c’est le couché-écoute-debout.
La mise sur le divan, pour le temps de la parole écoutée par l’analysant, suivie du relèvement de
l’analysé, c’est l’être restauré dans sa verticalité après l’horizontalité où l’écoute a redonné une
dimension, une consistance vécue dans l’altérité, une réparation du manque de l’autre. (Solange
Sudarskis, Pour éclairer le chemin, approche philosophique de la Franc-Maçonnerie, éd. de La
Hutte).

Peut-être que le relèvement de Maître Hiram ne put être réalisé par une seule personne parce
qu’Hiram eût été un géant : en 1440 on découvrit à Sagonte un corps d'une grandeur prodigieuse, et il
y avait sur la pierre qui le couvrait l'inscription suivante (la traduction de l’hébreu en latin nous est
donnée par Billerus, Villalpondu la regarde comme authentique) : Hic est tumulus /Adoniram /Servi
regis Salomonis /Qui venit ut exigeret tribut/ Et mortuus est die2.

C'est dans cette position seulement qu'on se communique alors le mot sacré dont on épelle
alternativement les syllabes à l'une et l'autre oreille.
RER. Ils rappellent aux maçons la sincérité, la cordialité, l’union intime qui doit régner entre eux et
l’obligation de se secourir les uns les autres de tout leur pouvoir.
Au Rite Émulation les cinq points correspondent aux cinq signes du grade : le signe
d’Horreur, le signe de Compassion, le signe pénal, le signe de Douleur et de Détresse et le signe
d’Admiration et de Triomphe, appelé aussi Grand Signe ou Signe Royal.

À partir du relèvement du nouveau maître, véritable kundalini restaurée dans sa verticalité, la


chambre lugubre est réorganisée pour redevenir la chambre du milieu, retrouvée avec la lumière. Les
acclamations qui suivent s’apparentent à une doxologie.

2
Ragon, Tuileur général de la Franc-maçonnerie, Manuel de l’initié, note de bas de page 1 de la p.106 :
< fr.calameo.com/read/002954374c29c401af964>
L’Assomption
Le maître, après avoir été littéralement assommé par le coup fatal du maillet du troisième
mauvais compagnon, enterré sous le tertre, puis retrouvé, est relevé à la vie par une force qui lui est
extérieure. Alors peut-on parler d’assomption ?
L’étymologie le permettrait à partir du mot «somme» et de ses différents sens :
 La somme, dérivée de summus, le point le plus élevé, désigne le résultat d'une addition et
s'apparente à sommet, sommité, summum.
 La somme, issue de sagma, la charge, le bât, désigne, sous l'expression bête de somme,
l'animal qui porte les fardeaux.
 Le somme provient, comme son cousin sommeil, du dieu Somnus, l'équivalent romain du grec
Hypnos, frère jumeau de Thanatos, le dieu de la mort.
 Le verbe «assommer» s’apparente au somme-sommeil. Assommer quelqu'un c'est le faire
dormir. Sauf que le mot avait au départ le sens d'abattement moral et n'a pris qu'ensuite le sens de tuer,
puis celui d'endormir brusquement. Certains pensent qu’assommer ce serait «accabler sous un
fardeau» de sagma, la bête de somme. Le mot aurait dérivé de sens par contagion étymologique avec
le somme-sommeil. L’idée de sommeil se retrouve depuis les premiers siècles de l’Église, tant chez les
Latins que chez les Grecs dans dormitio pour signifier le trépas, et même la fête de l’Assomption de
la Vierge.
 Assomption provient de ad sumere, prendre avec soi, s'adjoindre quelqu'un, quelque chose. On
retrouve cette étymologie dans «assumer». En logique, c'est le fait d'ajouter une hypothèse dans un
raisonnement. En théologie, c’est l’élévation-résurrection de Marie aidée par son fils. Le Christ a fait
l'Ascension tout seul, mais Marie a été aidée, c’est l’assomption.
Synthétisant ces étymologies, le relèvement du maître, à la fois assommé, endormi, porté au sommet,
ressuscité et accueilli par le respectable Maître assisté des deux surveillants, ne peut-il s’apparenter à
une assomption ? Et dans ce cas, dans cette mission de psychopompe, comme sur les images de la
dormition des saints, les trois premiers officiers sont devenus des anges.
La Résurrection
La résurrection est une vielle conception iranienne qui a pénétré le judaïsme, puis le
christianisme et l'islam. On trouvait déjà chez les prophètes de l’Ancien
Testament ce thème de résurrection et pour mémoire : Elie s'étendit trois
fois sur l'enfant, invoqua l'Éternel, et dit Éternel, mon Dieu, je t'en prie,
que l'âme de cet enfant revienne au dedans de lui ! (1 Rois 17:17-24).
Élisée monta, mit sa bouche sur sa bouche, ses yeux sur ses yeux, ses
mains sur ses mains, et s'étendit sur lui. Et la chair de l'enfant se réchauffa.
(II Rois 4.34)…Et comme on enterrait un homme, voici, on aperçut une de
ces troupes, et l'on jeta l'homme dans le sépulcre d'Élisée. L'homme alla
toucher les os d'Élisée, et il reprit vie et se leva sur ses pieds. (2Rois
13.21).
Le sens réel de résurrection, en tant que promesse placée devant les croyants dans les
Écritures, a été très généralement perdu de vue, en partie parce que ce terme est employé de diverses
manières.
Résurrection peut prendre le sens de retour à la vie, grâce au sacrement de pénitence de l’âme morte à
la suite d’un péché mortel. Cette définition fut inventée récemment par l’Église.
Dans l’usage courant, il n’est pas rare d’utiliser ce terme au sens figuré. En disant ressusciter
pour réveiller, revigorer, faire sortir de sa torpeur, ranimer, rendre force tant à des objets, à des idées
qu’à des personnes.
Dans l’usage biblique, il y a une autre confusion terminologique entre un simple réveil et une
résurrection pleine et entière hors de toute mort. On évoque la résurrection comme une obéissance de
«re-vie» suite aux injonctions verbales de Jésus, ainsi celle de Lazare quand Jésus dit «sors d’ici», ou
celle du fils de la veuve de Naïn, quand il dit «jeune homme lève toi», celle de la fille de Jaïrus, lui
ordonnant «Jeune agnelle, debout». Les chrétiens donnent à ce vocable de résurrection le même sens
qu'aux promesses eschatologiques. À remarquer le terme d’agnelle préfigurant le sacrifice de l’agneau
Jésus. Or, il n'est pas vrais que Lazare et les autres furent ressuscités ; ils furent simplement réveillés,
ranimés. Réveiller signifie simplement faire fonctionner à nouveau l'organisme de la vie. Ranimation,
«ressuscitation» ou «ressuscitement» c'est ce qui fut fait pour Lazare, pour le
fils de la veuve de Naïn ou pour la fille de Jaïrus. Ceux-ci étaient encore
soumis à la sentence de mort, ils n'obtinrent qu'une brève prolongation des
conditions de la vie mourante.
Le terme «résurrection», tel qu'on le trouve dans le Nouveau
Testament, vient du mot grec anastasis ou anistèmi (de histèmi se tenir
debout après s’être couché et du préfixe ana de bas en haut). Il se trouve
quarante-trois fois dans le Nouveau Testament et signifie se tenir debout à
nouveau, ou se relever. On ne l'emploie, cependant, jamais pour désigner le
relèvement debout d'un cadavre dans un tombeau, pas plus pour désigner la
simple reviviscence ou une remise en fonction de l'organisme de la vie. Il est employé comme
l'antithèse, ou l'opposé, de la mort, le rétablissement hors de la mort.
Pour les chrétiens, il n'y a que deux hommes qui aient possédé cette vie parfaite : le premier,
Adam, avant sa transgression, avant qu'il n’ait attiré sur lui la malédiction ou la sentence de mort, à
l'instant où la sentence de mort fut prononcée contre Adam, sa vie fut perdue, le processus de mort
commença son œuvre. Adam était dans la mort, il n'était donc plus en vie. Le second, l'homme Christ
Jésus.
La postérité d'Adam n'a jamais eu la vie, l'étincelle qui vacille pendant quelques années n'étant
pas considérée par Dieu comme étant la vie, étant donné que la sentence de mort demeure sur tous, et
que ceux qui naissent dans le monde ne reçoivent pas la vie dans le plein sens de ce terme, mais
simplement une vie mourante. Dieu ne reconnaît comme ayant la vie parfaite que ceux-là seuls qui
s’uniront au Fils de Dieu, rédempteur des hommes, donateur de vie.
Cette idée de la résurrection serait héritée du mythe d’Osiris, qui se retrouve en Grèce avec
celui de Dyonisos, héros qui meurt et renaît périodiquement (ancien «Feu divin»). Cette héritage
explique la conception qui avance que la nature de Dionysos serait unique : différente de celle des
autres dieux puisqu'il est soumis à la mort, mais également des mortels puisqu'il renaît (sur un
talisman, on le montre, crucifié comme Jésus). Le mythe du dieu fait homme, qui meurt et ressuscite,
se prolonge avec Athis, Adonis et Mithra.
L'essence des rites d'initiation shamanique est l'expérience de la mort et de la renaissance. Les
shamans sibériens, dont les pratiques sont restées assez inchangées depuis l'âge de pierre, subissent
une maladie initiatique et une dissolution de leur personnalité, se culminant par une mort durant
laquelle ils reposent dans un état inanimé à l'intérieur d'une loge ou dans un endroit isolé pendant trois
à sept jours. Ils sont ramenés à une conscience normale seulement après l'expérience de l'initiation.

Hiram ne ressuscite qu’à travers autrui, c’est-à-dire à travers la naissance d’un nouveau maître
assurant la poursuite de l’œuvre dans le temps et devant les hommes 3.

3
On pourra visionner le documentaire concernant ce sujet sur : <youtube.com/watch?v=-wb0zr-8AGo>.

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