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mars-août 2009 la revue d’
Inter-réseaux
Développement rural
Tourisme rural,
entre rêves et réalités
Inter-réseaux
développement
rural
I nter-réseaux développement rural a
été créé en 1996, à l’initiative de per-
sonnes engagées dans le développement
pays francophones ;
– accompagner les acteurs du Sud (en
priorité ceux d’Afrique francophone)
propre pratique professionnelle face à
des enjeux nationaux et internationaux
complexes. Le travail en réseau, par une
rural, et des pouvoirs publics français. dans leurs efforts pour promouvoir leurs réflexion partagée et une large circulation
Ses objectifs sont les suivants : agricultures paysannes familiales dans de l’information, permet de construire
– permettre la participation des acteurs le contexte de la mondialisation. et de proposer des pratiques et des po-
du Sud à la construction des politiques Des convictions : Inter-réseaux est litiques de développement prenant en
agricoles nationales et sous-régionales, convaincu que faire connaître, compa- compte l’intérêt de ceux qu’elles concer-
en disposant de moyens de s’informer rer et discuter librement d’expériences nent le plus directement.
et d’échanger en réseau sur les enjeux multiples, rassembler à ce propos des per- Une particularité : Inter-réseaux réunit
du développement rural ; sonnes issues d’environnements profes- plus de 3 000 membres issus d’organisa-
– animer et renforcer un réseau de sionnels, géographiques et disciplinaires tions paysannes, d’ONG, de services pu-
réflexions, d’échanges, de débats et variés — mais ayant pour centre d’intérêt blics, du Sud et du Nord. Les activités d’In-
d’expériences entre acteurs du déve- commun le développement rural du Sud ter-réseaux s’appuient sur le dynamisme
loppement rural et agricole dans les — permettent à chacun d’améliorer sa et la participation de ses membres.
2 Grain de sel
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Sommaire Éditorial
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Gros
Forumsel
sans
commentaire… Une image Une parole Un chiffre
4 Grain de sel
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Forum
L
Joël Blin est bio de l’énergie fossile en- Une rencontre entre innovation technique et po-
énergéticien et chimiste traîne, pour les populations du Sud, une perte tentialités agronomiques. Différents types d’agro-
des procédés au Cirad de compétitivité ainsi qu’une augmentation du carburants peuvent être produits au Burkina Faso.
(unité Biomasse-énergie) coût de la vie. Soucieux de sa dépendance énergéti- Néanmoins, la production d’huiles végétales brutes
en poste à l’Institut que et de l’augmentation de sa facture pétrolière, le (HVB) à partir de plantes oléagineuses présente de
international d’ingénierie Burkina Faso s’intéresse aux agrocarburants comme nombreux avantages (technologie simple, accessible
de l’eau et de source renouvelable d’énergie susceptible de rempla- à toutes les échelles). Il est actuellement plus diffi-
l’environnement (IE) et cer les dérivés du pétrole. Mais les controverses sont cile d’y produire du biodiesel (procédé industriel
responsable du laboratoire nombreuses et méritent réflexion pour ne pas céder à non mature pour une estérification éthanolique) ou
Biomasse énergie et la polémique qu’inspire le manque de connaissances du bioéthanol (besoin en eau des cultures, procédé
biocarburant (LBEB) au sur le sujet : elles concernent les impacts écologiques, industriel énergivore, compétition foncière, risque
Burkina Faso. les effets sur la sécurité alimentaire via l’usage des d’exportation, etc.).
sols et le prix des produits alimentaires, les politiques Dans ce pays, les terres agricoles annuellement
Marie-Hélène Dabat est publiques d’accompagnement, et l’identité des béné- emblavées ne représentent que du potentiel
économiste des filières ficiaires de l’essor de ces énergies alternatives. cultivable, laissant de grandes superficies disponi-
agro-alimentaires au Cirad Une étude réalisée en par le Centre de co- bles pour de nouvelles productions. Cependant, la
(unité Politiques et opération internationale en recherche agronomique situation foncière est très variable selon les régions
marchés), accueillie à pour le développement (Cirad), l’Institut international et, notamment dans le Sud-Ouest, on peut trouver
l’UFR Sciences d’ingénierie de l’eau et de l’environnement (IE) et le des situations de saturation des terres où la concur-
économiques et gestion bureau d’études Initiatives conseil international (ICI), rence foncière est réelle. Les plantes énergétiques
(SEG) de l’Université de en aide à la décision du gouvernement burkinabè, sur sont parfois cultivées à la place du tabac ou du coton
Ouaga II au Burkina Faso. financement de la GTZ/KFW, a montré que les avan- car les paysans cherchent à diversifier leurs matiè-
tages et les risques que représentent les agrocarburants res premières. Au nord du pays, les haies vives sont
Garance Faugère est doivent être examinés au cas par cas. Ils dépendent également encouragées par des associations, comme
ingénieur agronome au notamment du type de matière première, du schéma clôtures, ou parfois pour régénérer les sols et lutter
bureau d’études Initiatives d’organisation des filières, du mode d’utilisation de contre l’érosion.
conseil international (ICI) l’énergie produite et des marchés ciblés. Compte tenu du contexte pédoclimatique, les
au Burkina Faso. plantes oléagineuses potentiellement intéressantes
Le pétrole, une source d’énergie coûteuse. Le pour la production d’HVB sont le jatropha, le coton,
Élodie Hanff est Burkina Faso se caractérise par une forte carence le tournesol, l’arachide et le soja.
économico- en ressources énergétiques : ni pétrole ni charbon, L’étude pragmatique des potentialités techniques
environnementaliste pour des potentialités réduites en hydroélectricité, des des agrocarburants montre qu’il est pertinent de pri-
le Cirad et enseignante au ressources solaires peu exploitées et un potentiel vilégier deux scénarios de développement : l’un vise
IE au Burkina Faso. en combustibles ligneux endommagé. La consom- la production de force motrice et le développement de
mation annuelle moyenne par habitant, correspon- l’électrification rurale; l’autre propose de substituer
Nathalie Weisman est dant à , stères de bois ou litres de super, met l’HVB aux hydrocarbures importés pour la production
écologue pour le Cirad et le en exergue la pauvreté du pays en énergie, dont le d’électricité dans les centrales thermiques alimentant
IE/LBEB au Burkina Faso. coût est prohibitif pour le développement industriel le réseau national et/ou décentralisé.
au niveau national et local. Les prix à la pompe ont Chacun de ces scénarios est évaluable selon plu-
Bibliographie : augmenté de plus de en ans, et le coût moyen sieurs critères tels que les terres arables à mobiliser,
Opportunités de de production de l’électricité de plus de en les possibilités d’organisation de filières en aval de la
développement des ans. Ceci rend l’énergie inabordable pour une production agricole, les capacités des acteurs, la ra-
biocarburants au Burkina majorité de la population. En outre, les produits pidité de mise en œuvre des opérations, la flexibilité
Faso. Cirad, IE, ICI. pétroliers à l’entrée au Burkina Faso subissent un permise par les techniques et les marchés.
Rapport pour la KFW/ surcoût d’environ (transport et stockage), lié
GTZ, Ouagadougou, à l’enclavement du pays. État des lieux et perspectives locales. Dans un
décembre , p. Cette situation rend la perspective d’utiliser des contexte de flambée des prix des denrées de base,
www.cirad.bf/fr/anx/ agrocarburants attractive pour alléger la facture éner- les projets en cours au Burkina Faso se concentrent
bioenergie-kfw.php gétique nationale, baisser les coûts de production qui surtout sur le jatropha, dont l’huile n’est pas comes-
limitent le développement économique du pays, et tible. Il y a une assez bonne acceptation de la part des
développer des sources d’énergie en milieu rural. paysans, qui voient dans le développement de cette
filière une source potentielle de revenus addition- Ü
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Û nels dans un contexte de crise du coton, principale terres arables en culture de plein champ et parfois
culture de rente. Au Burkina Faso, à ans après sa en association avec des cultures vivrières.
plantation, le jatropha donne un rendement entre et Ces projets pourraient correspondre au deuxième
, kg de graine par pied. Il peut être vendu entre scénario qui consiste à développer une filière HVB
et FCFA/kg. Il faut environ kg de graine pour afin de produire de l’électricité. Cette option permet,
extraire un litre d’huile. avec une surface dédiée de à des terres arables
Quelques projets concernent la mise en place de selon la plante cultivée, et des technologies simples,
filières courtes pour la production locale d’HVB des- de substituer des hydrocarbures utilisés pour
tinée à alimenter des équipements villageois géné- la production électrique. Elle permet de réduire la
rateurs de force motrice et/ou d’électricité, confor- facture énergétique à hauteur de des hydrocar-
mément au premier scénario. On recense six projets bures importés et ainsi le coût de l’électricité tout
de ce type à dimension villageoise ou associative. en rémunérant les paysans burkinabè plutôt que les
Une faible mobilisation de surface est nécessaire au multinationales pétrolières.
développement de ce scénario : entre et ha de Au total, l’ensemble des projets représente plus
jatropha peuvent subvenir aux besoins énergétiques de ha en plein champ à travers le pays, plus
d’une commune rurale. Ces initiatives peuvent éga- particulièrement dans le Sud où le climat et les ren-
lement viser la reforestation, la régénération de sols dements en graine sont les meilleurs, et parfois au
dégradés et la lutte anti-érosive. Nord lorsque les associations l’encouragent.
Plusieurs projets concernent la mise en place
d’une filière de production d’HVB, et à terme pour Les agrocarburants pour améliorer les conditions
certains de biodiesel, principalement à partir de ja- de vie des populations. Malgré le risque de concur-
tropha. Si certains d’entre eux visaient le marché à rence entre productions énergétique et alimentaire,
l’export, tous maintenant se concentrent sur le mar- faut-il promouvoir la production d’agrocarburants
ché national, voire régional, du fait de l’interdiction dans l’intérêt des populations pauvres des pays du
européenne d’importer des agrocarburants. Ils sont Sud ? La réponse est souvent donnée de façon uni-
conçus à partir d’un approvisionnement paysan car voque : étant donné que le pays n’a pas atteint son
le gouvernement reste réticent à octroyer de larges autosuffisance alimentaire et continue d’importer
superficies à la production d’agrocarburants, cons- des produits agricoles, et qu’une grande partie de la
cient des risques sur la sécurité alimentaire et de la population reste sous-alimentée, il est impensable
concurrence sur les ressources foncières. Sept projets d’allouer des ressources agricoles à la production éner-
à dimension industrielle ont démarré, permettant aux gétique. Mais ne peut-on pas retourner l’argument :
paysans de diversifier leur production en consacrant si le Burkina Faso n’est pas autosuffisant sur le plan
chacun environ ha de leur champ au jatropha. Les alimentaire, c’est peut-être que les déterminants sont
cultures sont localisées dans le sud du pays, sur des davantage liés aux mécanismes économiques et à la
qualité des politiques agricoles qu’aux disponibilités
physiques et aux effets de substitution entre usages
des produits, puisque la production d’agrocarburants
est actuellement à un stade embryonnaire. En favo-
risant l’accès à l’énergie en zone rurale, ne pourrait-
on pas envisager des processus d’augmentation de la
production agricole à la fois à usage alimentaire et
énergétique ? Cette stratégie pourrait permettre de
mécaniser les exploitations, d’améliorer les rende-
ments, d’attirer des investissements, d’ajouter de la
valeur à la production agricole par la transformation
des produits et de générer des revenus à la fois di-
rects (production de biomasse et transformation en
énergie) et indirects (utilisation de l’énergie). Ainsi,
pour constituer un vrai défi plutôt qu’un faux es-
poir pour le développement, une stratégie d’essor
des agrocarburants à l’échelle d’un pays comme le
Burkina Faso doit nécessairement s’affilier et non
s’opposer à la politique nationale de développement
agricole. §
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La rédaction de l’article , . Les récoltes vien- der dans la facilité que les agriculteurs ont à le ven-
est fondée sur un travail de nent de s’achever dans les villages entou- dre. Les circuits de commercialisation sont en effet
recherche mené dans le rant cette petite ville enclavée à l’Ouest du très différents pour le mil et le sésame. Alors que le
cadre d’un mémoire de fin Burkina Faso. Les agriculteurs engrangent leur mil mil passe d’intermédiaire en intermédiaire, du petit
d’étude d’un master et leur sorgho, ainsi que les nombreuses autres cultu- ramasseur vers le grossiste, en charrette, le sésame
d’Économie du res d’hivernage, qui ont bien donné après des pluies lui, est très vite chargé dans les camions et expédié
développement (Sciences- satisfaisantes. L’heure est déjà à la préparation des à Ouagadougou ou à Bobo-Dioulasso, avant d’être
Po). Il repose sur un travail fêtes ; pour cela, il faut se dépêcher de vendre, et ven- exporté. Et contrairement au riz, acheté par des
de terrain mené de dre à bon prix. C’est pourquoi on ne parle que d’une femmes qui le vendent sur les marchés de Nouna,
septembre à février chose : le prix du sésame. boîte par boîte, tine par tine — avec la peur de ne
au Burkina Faso, pas réussir à tout vendre, et donc la nécessité de le
pendant lequel une étude a Le mythe du sésame ? Le sésame est le petit dernier brader à bas prix — le sésame est certain de trouver
été réalisée auprès de de la longue famille des cultures pratiquées dans la un acheteur.
producteurs et de région. Mil et sorgho constituent la base alimentaire C’est que les commerçants sont de plus en plus
commerçants à Nouna et que produisent tous les agriculteurs ; riz et maïs sont nombreux à venir dans la province justement dans
dans villages voisins. Les des cultures vivrières plus intensives ; arachide, ha- le but d’acquérir du sésame. Tirés par une demande
chiffres proviennent de ricot, fonio, oseille et pastèque, des cultures de di- largement insatisfaite, et par la concurrence entre
l’enquête quantitative versification secondaires ; et enfin, coton et sésame, commerçants (ceux-ci font monter les prix pour en-
conduite auprès de les principales cultures de rente. lever de grandes quantités et répondre à leurs com-
ménages interrogés sur ces Le sésame connaît à l’heure actuelle une très grande mandes), les prix montent. Ce qui provoque une si-
trois dernières années. Le popularité et se développe avec une rapidité impres- tuation qui semble tout à fait paradoxale d’un point
mémoire est disponible sur sionnante. « Le sésame se vend bien, et permet de de vue économique : plus l’offre de sésame augmente
demande : résoudre nos problèmes facilement » est le crédo des et plus les prix augmentent !
qstoeffler@gmail.com agriculteurs. Ils citent son prix incroyable : « On a en réalité affaire à un phénomène en chaîne
FCFA la tine ¹ il y a quelques années, il y a deux dû à la situation particulière des villages proches de
ans, l’an dernier, et ça atteint FCFA la tine Nouna, où les infrastructures sont très mauvaises,
cette année [après la récolte de ] ! ». Soit près de et les moyens de transports peu développés. Plus les
FCFA le kg, ce qui dépasse largement le prix des quantités (ou la valeur de la production) vendues
autres cultures, et explique la place que le sésame sont importantes, moins le commerçant a de coûts
a acquise ces dernières années : des superficies qui en termes de transport, mais aussi de temps passé à
ont gagné entre et et sont deux fois l’achat : en somme, il fait des économies d’échelle.
supérieures à celles du riz ou du maïs. Quant à elle, Lorsqu’il est sûr de charger un camion entier rapide-
la production a augmenté de près de . La Direc- ment et de l’envoyer à Ouagadougou, un commerçant
tion départementale de l’agriculture (DPA), l’Ocades peut augmenter le prix proposé. Et acheter à nouveau
(ONG catholique), et les commerçants eux-mêmes rapidement, pour vendre de la même façon. Ainsi,
reconnaissent le succès de la culture du sésame. L’un plus le sésame est produit dans la région, et plus il
de ces derniers se gausse : « pour les agriculteurs, permet aux commerçants de réduire leurs coûts, tout
sésame = grosse moto ». en augmentant la rémunération des producteurs.
Pourtant, sa culture n’est pas en soi démesurément
rémunératrice. Ses rendements moyens sont bien in- Et les autres cultures ? Ces questions de commer-
férieurs à ceux du riz : kg à l’hectare et kg à cialisation touchent en réalité chaque culture de la
la journée de travail pour le sésame, contre kg zone. Parmi elles, quelques exemples révélateurs : le
et kg pour le riz. En et , le sésame se riz, le coton et la pastèque.
vendant à peu près deux fois plus cher que le riz, Le coton est semblable au sésame, en ce qu’il at-
sa valeur ajoutée était par conséquent plus faible… tire les producteurs par la facilité avec laquelle il est
Il n’avait donc rien d’une culture miracle. Dès lors, vendu : il est ainsi une source de « cash » essentielle
comment expliquer un tel succès ? pour les producteurs. La Sofitex, la société coton-
nière œuvrant dans la région, enlève l’ensemble de
La commercialisation particulière du sésame. la production chaque année. Pourtant, cette culture
L’avantage principal du sésame semble en fait rési- demande un temps de travail très important, et a donc
une valeur ajoutée par jour de travail assez peu inté-
. Unité de mesure locale d’environ litres. ressante ; sa valeur ajoutée par hectare est également Ü
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© Quentin Stoeffler
Û faible, étant donné le coût de la main d’œuvre et des gros, à un prix garanti et à un commerçant défini, a
intrants nécessaires. Si les producteurs commencent boosté la production de riz dans la zone : la moitié
à la délaisser (production en baisse de entre des agriculteurs, s’ils parviennent à dépasser cer-
et ), c’est à cause du prix, qui diminue. tains autres blocages — notamment agronomiques
D’autres cultures sont à l’inverse bloquées par des et fonciers — désirent se lancer dans la culture du
conditions de commercialisation trop difficiles, com- riz l’an prochain.
me le maïs, difficile à écouler, ou la pastèque. Celle-ci
est pourtant de loin la culture la plus rémunératrice Les leçons possibles de cet épisode récent. Sésa-
pour les producteurs. Mais, ils sont extrêmement peu me, coton, riz, pastèque, mil, maïs : tant de cultures,
nombreux à en produire, hormis les plus aisés : ceux- mais un point commun, l’importance des conditions
ci peuvent en effet lui allouer une surface importante de commercialisation. La « success story » du sésame
et avoir des contacts avec un commerçant, qui en- est un phénomène largement endogène, sans inter-
lèvera immédiatement l’ensemble de la production. vention d’un quelconque projet. Pourtant, il semble
Car sinon, la pastèque pourrit… Un village proche de que l’on puisse en tirer certaines conclusions sur les
Nouna s’est spécialisé dans la pastèque : car, comme façons d’accompagner cette commercialisation.
pour le sésame, c’est le fait d’en produire beaucoup qui Une garantie d’achat de l’ensemble de la produc-
permet d’avoir des commerçants présents et rapides. tion par l’État (comme pour le coton, et récemment
On appelle cela une économie d’agglomération : la pour le riz à Nouna) est certes prisée par les produc-
concentration, en permettant une commercialisation teurs, mais conduit aussi souvent à un prix d’achat
efficace, entraîne ces gains. peu intéressant. Des initiatives plus locales sont aussi
Le cas le plus intéressant est peut-être celui du riz, envisageables. Des organisations de producteurs peu-
tout d’abord parce qu’il a les meilleurs rendements, vent vendre la production en gros, et permettre aux
parmi toutes les cultures de la zone. Ensuite, parce commerçants d’effectuer des économies d’échelle,
qu’il reste très faiblement développé (moins de et donc de proposer de meilleurs prix. Des crédits
des superficies) en raison des difficultés de vente. En- — éventuellement ciblés sur certains produits — peu-
fin, parce qu’il connaît des bouleversements récents, vent être alloués aux commerçants, qui rencontrent
avec l’initiative de l’État de fixer un prix plancher ( eux aussi des contraintes. Ils pourraient ainsi aug-
FCFA par kg). Ce prix a été jugé très insuffisant par menter les volumes achetés, et donc les prix. Enfin,
les producteurs des grandes plaines rizicoles ¹. Mais des mécanismes de rencontre entre agriculteurs et
à Nouna, les agriculteurs étaient satisfaits d’avoir un commerçants peuvent être élaborés, toujours dans
prix plancher d’une part, et des acheteurs définis, le même but ; ils permettraient aussi d’améliorer le
prêts à acheter en gros, d’autre part. Même si les avis climat de confiance dont le mauvais état actuel nuit
divergent : « on a fait nos calculs, et on pense pou- aux uns comme aux autres.
voir vendre à un meilleur prix, ailleurs », déclare un Quelle que soit l’action envisagée, il est primordial
agriculteur. Quant au groupement d’un autre village, de redonner toute leur place aux questions de com-
il a découvert que son acheteur revendait en fait à mercialisation. Cela a été partiellement fait dans le
un autre marchand, à Nouna même, à un prix bien projet « riz », et explique son succès, au moins autant
supérieur… et s’est empressé de vendre à ce prix- que l’appui technique et la fourniture d’intrants mis
ci. Quoiqu’il en soit, cette possibilité de vendre en en œuvre. Les problèmes touchant le marché des
produits constituent l’une des insécurités les plus
. Voir l’article d’Armel Guenguéré et Patrick Delmas, pénalisantes pour les agriculteurs. Mais comme le
« L’État au secours de la production rizicole au Burkina montrent ces exemples récents, les choses peuvent
Faso ? », Grain de Sel nº . évoluer très rapidement… §
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Ressources naturelles
Gouvernance locale ensemble les ressources naturelles?
Philippe Lavigne Delville (lavignedelville
@gret.org)___________________________
C omment gérer durablement des ressources naturelles
soumises à des pressions croissantes ? Avec des règles
partagées, légitimes et appuyées par des instances locales et
par l’État. Les « conventions locales » peuvent être des outils
pour cela, permettant de concilier règles coutumières et rè-
gles de l’État. À certaines conditions…
L
Philippe Lavigne Delville sur l’espace et les de l’État, lorsqu’il surimpose des règles différentes
est anthropologue. Il est ressources naturelles, les carences des dispositifs et court-circuite les autorités locales. Elles sont de
actuellement chercheur de régulation, provoquent une surexploitation plus fondées sur un principe « d’autochtonie » qui
Gret/IRD (UMR ), des ressources ainsi que des conflits : les réserves fo- peut être problématique aujourd’hui, au sens où il
affecté au Laboratoire restières sont défrichées, les pâturages surexploités, exclut des acteurs installés légitimement de longue
d’études et de recherche les stocks de poissons s’épuisent, les conflits entre date dans l’espace local.
sur les dynamiques sociales agriculteurs et éleveurs s’accroissent dès lors que les La gestion des ressources naturelles pose ainsi des
et le développement local pistes à bétail sont mises en culture. questions de gouvernance locale, au sens de coordi-
(Lasdel) au Niger. Historiquement, l’intervention de l’État n’a pas nation entre pouvoirs hétérogènes à l’échelle locale,
permis de réguler l’usage de ces ressources. Fondée de définition et mise en œuvre négociées de régula-
Bibliographie : sur une « rationalité technique » un peu étroite et des tions, de définition de la citoyenneté locale.
Bertrand A., , logiques de contrôle de rente par les États, les inter-
« Gestion étatique ou ventions publiques ont très fréquemment fragilisé, Les conventions locales de gestion des ressources
gouvernance locale ? », in voire détruit les régulations existantes, contribuant naturelles renouvelables, un outil de gouvernan-
Lavigne Delville (ed). ainsi à accroître la compétition et les conflits. ce locale ? Face à ces enjeux, de nombreux projets
Quelles politiques Face à ces constats, le principe d’une gestion et ONG ont tenté depuis le milieu des années de
foncières en Afrique locale et décentralisée est de plus en plus mis en promouvoir une gestion locale des ressources natu-
rurale? Réconcilier avant, mais il ne va pas de soi, et les conditions relles renouvelables, sous le terme de « conventions
pratiques, légitimité et pour qu’une gestion locale soit possible sont rare- locales », en Afrique de l’Ouest et en particulier au
légalité. Ministère de la ment explicitées. Mali. Il s’agit là d’une gestion « décentralisée » au
Coopération/Karthala, sens où ce sont les populations qui ont la responsa-
Paris. La gestion durable des ressources « communes » : bilité de définir les règles qui leur semblent légitimes
Djiré M. et Dicko A. K., une question d’institutions. Les ressources natu- et pertinentes. Des démarches et des savoir-faire se
, Les conventions relles « communes » sont celles exploitées par un sont progressivement constitués. Le principe vise,
locales face aux enjeux de ensemble d’acteurs : ressources ligneuses d’une
la décentralisation au brousse, mare et ses poissons, pâturages, etc. Pour
Mali, Paris, Karthala, une gestion durable de ces ressources, il faut que les « Le processus est censé aboutir
p. prélèvements (la quantité de bois coupé, de poissons
Lavigne Delville Ph., , pêchés, d’herbe pâturée) soient inférieurs au croît à un ensemble de règles faisant
« Conditions pour une naturel. Pour cela sont mises en place des règles de
gestion décentralisée des contrôle de l’exploitation de ces ressources. Une ges- sens pour les acteurs »
ressources naturelles. tion durable des ressources communes est possible,
Entre “community à un certain nombre de conditions : la légitimité du
failures”, “market caractère « commun » de la ressource, des « ayants avec l’aval des autorités communales, à favoriser la
failures” et “state droit » (ceux qui ont le droit de l’exploiter) définis, négociation entre acteurs locaux, sur un territoire
failures”, construire de des règles d’exploitation définies et des autorités ou autour d’une ressource donnée. Il s’agit parfois
nouveaux “communs” », capables d’en assurer le respect. De telles règles ont d’actualiser des modes de gestion existants, le plus
in Bertrand A., Karsenty historiquement existé dans les sociétés rurales : en souvent d’en définir de nouveaux, répondant aux
A. et Montagne R. eds. Afrique de l’Ouest, le puits sahélien est la propriété enjeux actuels. Plus ou moins long, le processus est
L’État et la gestion locale du lignage de pasteurs qui l’a creusé, celui-ci accep- censé aboutir à un ensemble de règles faisant sens
durable des forêts en te toujours un troupeau de passage, mais définit le pour les acteurs. Une fois finalisée et acceptée par
Afrique francophone et à nombre de jours qu’il peut rester selon l’état de la les services techniques, la convention, signée par les
Madagascar, Cirad/ ressource dans les pâturages accessibles à partir du représentants des villages concernés, est transmise
L’Harmattan, pp. -. puits ; dans les mares, la pêche est souvent réservée à au Conseil communal. Celui-ci prend alors un ar-
la consommation personnelle, en dehors des grandes rêté, donnant force de « loi locale » à ces règles, et les
pêches d’étiage organisées par les maîtres des eaux ; rendant opposables aux tiers. De telles conventions
la cueillette d’un certain nombre de fruits est régulée. peuvent porter par exemple sur la gestion d’un forage,
Cependant, ces institutions peuvent être fragilisées d’une forêt communautaire, ou encore sur la pêche,
par les évolutions sociales, l’arrivée de nouveaux ac- ou la date de la vaine pâture. Elles sont complétées
teurs ne respectant pas ces règles, la pression sur par des aménagements de ces espaces, par une ma-
les ressources, le fait qu’elles soient de plus en plus térialisation de pistes à bétail, etc.
objet de commerce, mais aussi par l’intervention Ainsi conçues, les conventions locales peuvent po- Ü
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Û tentiellement construire une gouvernance locale de plus souvent les règles locales de la négociation et les
la gestion des ressources naturelles, répondant aux conditions dans lesquelles des autorités coutumières
problèmes des contradictions entre règles « coutu- peuvent s’y engager, et sous-estiment les inégalités
mières » et règles de l’État, et de l’articulation entre d’accès aux ressources naturelles (hommes/femmes,
espace de vie des populations et espace communal. autochtones/migrants). L’accent est trop souvent mis
Elles peuvent contribuer à construire la légitimité sur la signature de l’accord plus que sur son effectivité.
des communes, à travers des réponses concrètes aux En pratique, cette effectivité est très variable, et beau-
problèmes de ses citoyens. coup de beaux écrits demeurent lettre morte.
Le principe des « conventions locales » est pourtant
À quelles conditions les conventions locales sont- tout à fait pertinent. Mais un processus d’élaboration
elles effectives ? La simple signature d’une convention de convention locale n’a de sens que : (i) s’il porte
ne garantit pas son effectivité. De nombreux facteurs sur des ressources stratégiques aux yeux de certains
rendent la tâche beaucoup plus complexe : groupes d’acteurs qui ont un intérêt objectif à une
– la volonté de l’État de permettre une gestion dé- régulation, (ii) si le besoin d’une régulation nouvelle
centralisée reste en suspens, et les marges de né- est clairement perçu au-delà de ces acteurs, (iii) si le
gociation avec les services techniques dépendent processus est suffisamment « autonome » et porté par
de l’ouverture de leurs responsables locaux ; des acteurs locaux, (iv) si la réflexion des acteurs lo-
– les responsabilités communales en la matière res- caux porte d’abord sur les enjeux : pourquoi réguler
tent floues, et n’incitent pas à ce type de démarche, telle ressource, tel espace ? Sur quels principes mo-
qui découle d’abord de la bonne volonté des élus : raux et pratiques organiser la coexistence de différents
ils peuvent au contraire jouer la compétition entre usages par différents groupes d’acteurs (agriculteurs,
instances d’arbitrage, la définition autoritaire de rè- éleveurs, pêcheurs, etc.), pour que les règles soient
gles, l’instrumentalisation politique des conflits ; suffisamment légitimes et au maximum équitables et
– selon l’enjeu économique de la ressource, et le de- consensuelles ? Comment dépasser les appartenances
gré de conflictualité, la négociation de consensus socio-ethniques dans l’accès aux ressources et éviter
n’est pas toujours possible. qu’une gestion locale n’exclue les « étrangers » de l’es-
Porteurs d’une vision « communautaire », les in- pace local ? Quels sont les acteurs légitimes pour dé-
tervenants externes sous-estiment fréquemment les finir des règles et en assurer la mise en œuvre réelle ?
enjeux socio-économiques et socio-politiques du Comment gérer la confrontation entre normes locales
contrôle des ressources naturelles, ainsi que les di- et droit écrit dans la convention ? Qu’est-ce qui assure
vergences d’intérêt entre acteurs. Ils négligent le fait que les acteurs chargés de veiller au respect des règles
que la gestion des ressources naturelles s’inscrit dans auront la légitimité et l’autorité nécessaire ?
des rapports de hiérarchie entre groupes sociaux. Ils Bref, des conventions locales effectives sont celles
tendent à supposer que les acteurs ruraux ont à la qui s’ancrent vraiment dans les espaces sociopolitiques,
fois intérêt et capacité à gérer eux-mêmes leurs res- et sont basées sur la (re) négociation des principes du
sources et à dépasser les compétitions et divergences « vivre ensemble », au-delà des compétitions et des
d’intérêt, ce qui n’est pas toujours vrai. Ils ignorent le clivages sociaux. §
10 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
46
-
47
Inter-réseaux
Développement rural
L
’ joue un rôle central
dans les économies ouest africaines :
il contribue à près de la moitié du PIB
agricole (en incluant la traction animale et la fumure organique)
et constitue une source importante d’emplois et de revenus. Cette ré-
gion se caractérise aussi par un faible apport dans l’alimentation humaine
des produits d’origine animale.
Avec une croissance annuelle estimée à , la demande de produits d’origine
animale est appelée à augmenter en Afrique subsaharienne, et notamment en Afri-
que de l’Ouest, de d’ici ; face à cela, l’offre en produits animaux continuera
à prendre du retard si son taux de croissance, estimé à actuellement, n’augmente pas
aussi vite. Répondre aux mutations et aux évolutions alimentaires constitue un défi majeur
pour l’élevage africain.
Le thème de l’élevage nous a paru suffisamment important pour que nous fassions le choix
de construire un dossier de pages au sein d’un numéro double. Après un aperçu des grands
enjeux, de l’évolution et de la diversité des types d’élevage en Afrique de l’Ouest, ce dossier
présente quelques filières animales incontournables. Pour finir, des acteurs s’expriment
sur le pastoralisme et son avenir.
Ce vaste sujet est loin d’être épuisé : vos contributions sont donc les bienvenues !
Ce dossier a été réalisé grâce à un comité de rédaction élargi. Nous tenons à re-
mercier pour leurs contributions, tous les auteurs, et en particulier Cécile
Broutin, Guillaume Duteurtre, Ludovic Larbodière, Papa Nouhine
Dieye et Philippe Lhoste qui se sont fortement mobilisés pour sa
préparation.
Dossier coordonné par Estelle Deniel, avec l’appui
de l’équipe d’Inter-réseaux.
Évolution du secteur de
l’élevage ouest africain 12
D
Guillaume , l’essor des villes Face à ces questions, plusieurs ap- spécifiques et ses faibles coûts de pro-
Duteurtre est africaines a induit une trans- proches sont défendues par les acteurs duction. Enfin, pour les partisans du
chercheur au formation profonde du modèle du développement et les experts. Se- libéralisme, l’approvisionnement des
Cirad. Il était en alimentaire. Comme dans les autres lon la vision moderniste, la réponse à consommateurs urbains, au pouvoir
poste à l’Institut pays en développement, le secteur de la demande urbaine ne peut se faire d’achat limité, passe par un recours
sénégalais de l’élevage a été particulièrement touché qu’à travers une transformation ra- croissant aux importations de produits
recherches par ces recompositions : les viandes et dicale des systèmes de production et de base bon marché (viande congelée,
agricoles (Isra) à les produits laitiers sont en effet parmi des filières, sur le modèle de la révo- poudre de lait), quitte à ce que les pays
Dakar, de à les produits alimentaires dont la con- lution de l’élevage. Pour d’autres, au augmentent leur dépendance vis-à-vis
septembre . sommation augmente le plus rapide- contraire, l’élevage extensif est sus- du marché international.
Depuis, il travaille ment avec le niveau de vie. Le déve- ceptible de répondre à des « signaux
au Rural loppement urbain a ainsi induit une de marchés », et d’améliorer sa con- Les trois facettes du développement
Development demande nouvelle en produits laitiers tribution à l’approvisionnement des des marchés animaux en Afrique de
Center (Rudec) à et carnés. Les commerces des grandes villes, tout en valorisant ses ressources l’Ouest. Au-delà de ces débats, il sem-
Hanoi (Vietnam). villes présentent aujourd’hui une mul-
titude de nouveaux produits comme les
sachets de poudre de lait, les yaourts,
les laits fermentés, les fromages, ou les
découpes de volaille, générant d’im-
portants débouchés pour l’élevage et
l’industrie agro-alimentaire. Dans la
restauration hors foyer, ces mutations
s’illustrent par l’essor des bars laitiers,
des dibiteries, des restaurants ou des
cantines.
12 Grain de sel
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Évolution du secteur de l’élevage ouest africain LeForum
dossier
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LeForum
dossier Évolution du secteur de l’élevage ouest africain
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Évolution du secteur de l’élevage ouest africain LeForum
dossier
L de produits
animaux représentent des
importations agroalimentaires des
Ces produits sont parmi les premiers
dont la consommation est réduite en
cas de difficulté économique au sein
duits animaux représentent un tiers des
protéines consommées dans le monde et
apportent des nutriments indispensables
pays de la Cedeao. Selon les don- des ménages. Longtemps, l’importa- (acides aminés essentiels, minéraux, vita-
nées commerciales de la FAO, les tion a été considérée comme moins mine A). Le petit élevage est fondamental
importations de produits laitiers et coûteuse que la production locale. La pour la sécurité alimentaire des familles
œufs sont passées de millions de crise des prix alimentaires a cependant paysannes (autoconsommation, revenus
dollars par an sur la période - montré la vulnérabilité induite par ce permettant l’achat de céréales) et son ali-
à millions de dollars sur la choix et les problèmes posés par l’ins- mentation permet de valoriser les restes
période -. Les importations tabilité des prix mondiaux. Or, cette ménagers et résidus de récolte. Enfin, ¹⁄
de viandes ont été multipliées par instabilité est appelée à croître avec des terres mondiales sont trop pauvres
sur la même période en passant de la libéralisation des politiques laitiè- pour des productions végétales mais leur
millions à plus de millions de res dans les grands pays et ensembles exploitation par l’élevage permet la survie
dollars. La viande bovine et les vo- régionaux producteurs et le recul des de populations démunies.
lailles représentent l’essentiel de ces mesures de régulation de ces marchés « L’élevage de ruminants serait la princi-
importations. qui jouent un rôle leader sur les prix pale source d’émissions de gaz à effet de
mondiaux. serre ». L’élevage se situe en troisième po-
Les choix en matière de modèle de sition après l’industrie et les transports,
laitiers est renchéri par la taxation des production sont tout aussi difficiles à avec une production de de ces gaz,
importations. Dans le même temps, les faire. Faut-il privilégier le renforcement essentiellement dans les élevages inten-
organisations de professionnels laitiers des systèmes de collecte de lait en zone sifs des pays développés et émergents. Par
militent et font pression pour mettre rurale, ou encourager le développement ailleurs, l’élevage permet de réduire l’uti-
en place un niveau de taxation suffi- des exploitations laitières intensives lisation d’engrais chimiques et constitue,
sant pour protéger les investissements en zones périurbaines ? pour les plus pauvres, une alternative du-
dans la filière locale et la rémunéra- rable à une mécanisation motorisée con-
tion des producteurs. Dans le cadre Une histoire de l’élevage et du marché sommatrice d’énergies fossiles.
de la négociation de l’APE, la région a qui reste à écrire. Finalement, l’his- « L’élevage de ruminants serait responsable
placé le lait dans les produits sensibles toire de l’élevage en Afrique de l’Ouest de surpâturage ». La concentration des
non libéralisés dans les échanges avec reste encore à écrire. Les phénomènes animaux dans les lieux de regroupement
l’Union européenne. Mais le débat reste de développement des marchés urbains peut générer localement un surpâturage,
entier sur la classification finale de ces sont relativement récents. Et la plupart mais l’élevage mobile constitue le mode
produits dans le nouveau Tec Cedeao des ajustements politiques sont encore de gestion le plus durable de parcours à
en cours de négociation. en négociation. La capacité de l’élevage faible capacité de charge. La transhumance
On touche ici la question des priori- africain à participer aux échanges mar- est même bénéfique pour les écosystèmes
tés politiques, qui constituent le troi- chands dépendra en grande partie de variés qu’elle fertilise et dont elle dissémine
sième point de débat. Dans le cadre des la faculté des acteurs et des décideurs les graines ; elle permet des transferts sai-
stratégies nationales de réduction de la à s’accorder sur des objectifs de déve- sonniers de charge.
pauvreté, les gouvernements d’Afrique loppement communs, sur des modè- « L’élevage pastoral sahélien serait un éle-
de l’Ouest et les partenaires au dévelop- les de développement respectueux des vage de contemplation ou à l’inverse un
pement ont affiché des priorités d’in- réalités locales. Les gouvernements en mode de capitalisation au bénéfice d’une
tervention et de régulation en faveur place devront rechercher une meilleure minorité ». Le cheptel sahélien constitue
des populations les plus vulnérables. cohérence entre politiques commercia- certes une forme de capitalisation, mais
Or, les arbitrages en matière commer- les et politiques sectorielles afin qu’elles la majeure partie du cheptel fait vivre les
ciale sont souvent difficiles : doit-on se complètent, plutôt que de s’oppo- populations pastorales. Il répond largement
ouvrir les marchés pour favoriser l’ap- ser. L’avenir de l’élevage en Afrique de à la demande locale et sous-régionale en
provisionnement des consommateurs l’Ouest dépendra aussi de la capacité viande, de manière compétitive.
urbains les plus pauvres en produits de la région à faire jouer les avantages
de base ? Ou bien faut-il protéger les comparatifs entre les zones et à exploi- Dr Ludovic Larbodiere et Isabelle Tourette-AVSF____
filières domestiques pour offrir des op- ter les complémentarités entre bassins
portunités de croissance aux secteurs de production et bassins de consom-
agricoles et agro-industriels locaux ? mation transnationaux. En Afrique de de processus globaux indéniables, sem-
Dans le cas du lait, et plus largement l’Ouest, les discours sur la révolution blent finalement bien loin des réalités
des produits animaux, qui influencent de l’élevage, bien que rendant compte de terrain. §
Grain de sel 15
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LeForum
dossier Évolution du secteur de l’élevage ouest africain
S
Adrien ’ de l’ur- vis-à-vis des viandes importées (« va- lation étant à musulmane, c’est
Mankor est banisation, de la croissance des che folle », poulet à la dioxine) : en la consommation de volaille qui pro-
enseignant- revenus et des nouvelles atten- , de la viande achetée au Sé- gresse.
chercheur au tes socioculturelles des populations, négal était importée, contre , en Le porc et le poulet sont aussi les
service on assiste, dans les pays du Sud, à . À partir de , avec l’arrivée viandes les moins chères suivies du
d’Économie l’émergence d’une demande crois- du régime libéral au pouvoir, les im- bœuf, le mouton étant la viande la
rurale et gestion sante en produits d’origine animale, portations de viande ont repris et leur plus chère. Ainsi, en juin , le
de l’École inter- concentrée surtout dans les villes. part dans la consommation totale n’a prix moyen du kilogramme de pou-
États des sciences Celle-ci se caractérise à la fois par un cessé de croître, jusqu’à l’apparition let est de FCFA, celui de bœuf
et médecine accroissement des quantités commer- de la grippe aviaire qui a contraint le de FCFA et celui de mouton de
vétérinaires cialisées et par de nouvelles exigences gouvernement sénégalais à interdire les FCFA.
(EISMV) de des acheteurs en termes de qualité. Le importations des viandes de volailles
Dakar, depuis lait et la viande sont particulièrement dès novembre . Aujourd’hui, l’es- Les déterminants de la consomma-
janvier . Il touchés par ces évolutions, du fait de sentiel de la viande est produite loca- tion de viande. La consommation de
occupait leur statut alimentaire (la viande est lement (Sénégal et pays de la sous-ré- viande à Dakar varie suivant des fac-
auparavant un un produit de luxe et le lait est ancré gion), les importations représentant teurs économiques (prix et revenus).
poste de chargé dans les habitudes alimentaires), et de moins de de l’offre totale. En effet, la viande est un produit de
de recherches à leur importante fragilité (périssabilité, D’autres produits ont pourtant luxe dont la consommation augmente
l’Institut sensibilité à la chaleur). L’analyse des échappé à cette concurrence : c’est le avec le revenu des ménages.
sénégalais de comportements alimentaires dans les cas des œufs, de la viande rouge, du Le prix relatif des différents types
recherches villes d’Afrique de l’Ouest a montré poulet villageois, du lait caillé et du de viande est un critère de choix im-
agricoles (Isra) une évolution de la consommation, beurre fermier, pour lesquels la pro- portant, mais il n’explique pas tout.
de à . Il caractérisée par la diversification duction locale est au premier plan pour D’autres facteurs sont en effet suscep-
est spécialisé des produits. La diversité ethnique et l’approvisionnement des villes. tibles de faire basculer le choix des
dans l’étude culturelle de la population urbaine, ménages. Par exemple, les viandes qui
socioéconomique souvent d’origine rurale, est en effet Le poulet gagne du terrain dans une ont peu de pertes à la cuisson et qui
des filières de propice aux changements d’habitudes offre dominée par la viande de ru- peuvent être facilement partagées par
productions alimentaires, rendus possibles par de minants. L’offre de protéines animales un grand nombre de convives sont les
animales, avec plus grandes disponibilité et variété à Dakar est dominée par les produits plus appréciées. C’est ce qui fait que le
un accent de produits sur les marchés. halieutiques. La consommation moyen- bœuf est plus consommé actuellement
particulier sur Pour un certain nombre de pro- ne annuelle de poisson y est de kg que le poulet, malgré un rapport de
l’aval des filières duits, cette explosion de la demande par habitant, contre kg au niveau prix défavorable. La viande de bœuf
(comportements a, par le passé, profité plus directement national, soit plus de trois fois la con- est donc celle qui convient le mieux à
des aux importations. Dans les années , sommation en viande toutes espèces l’alimentation ordinaire des grandes
consommateurs certains auteurs dénonçaient la con- confondues (estimée à kg). familles dakaroises.
et des vendeurs). currence déloyale des importations de Au Sénégal, les activités de la filière Quant au poulet, il est souvent perçu
Il est titulaire viande de basse qualité, subventionnée viande sont principalement tournées par les acheteurs comme étant plus
d’une thèse en et vendue à des prix de dumping dans vers l’approvisionnement de Dakar, où cher, car il est vendu entier, et non
agroéconomie : les villes côtières d’Afrique de l’Ouest. se situe le plus grand centre d’abattage au détail comme le bœuf. La viande
« Étude des Les importations de viande ont en effet du pays. En , l’offre de viande à de mouton, par contre, bien qu’étant
déterminants de connu une nette progression depuis Dakar était constituée pour près de perçue comme la plus savoureuse et la
la consommation le début des années jusqu’en , 2⁄3 de viande de ruminants : de plus tendre, est celle qui fait le plus de
urbaine en où elles ont été marquées par une bœuf, de petits ruminants, pertes à la cuisson, et donc difficile à
viandes en très forte hausse liée à la libéralisa- de poulet et de porc. Ces dernières utiliser pour la nourriture ordinaire.
Afrique de tion. Sur le marché ouest africain, la années, la consommation de poulet Cependant, dans des situations par-
l’Ouest : part des produits carnés importés est augmente régulièrement, passant de ticulières telles que la réception d’hô-
l’exemple de ainsi passée de en , à en , à entre et , au tes, les fêtes, ou le week-end, le poulet
Dakar ». puis à en . Les impor- détriment de la viande de bœuf dont et le mouton sont souvent préférés au
tations ont ensuite progressivement la part est passée de en à bœuf.
chuté suite à l’application de taxes vi- en . Comme dans la plupart Les principales attentes des consom-
sant la protection des filières locales, des pays, la part des viandes blanches mateurs sont d’ordre qualitatif et sani-
et à la méfiance des consommateurs est en hausse, et au Sénégal, la popu- taire. Ils souhaitent en effet avoir une
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Évolution du secteur de l’élevage ouest africain LeForum
dossier
Grain de sel 17
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LeForum
dossier Des systèmes de production, des enjeux, des défis…
D
Djiby Dia et , les fi- le Programme alimentaire mondial pour mettre sur pied le Projet de dé-
Guillaume lières laitières sont une des des Nations Unies, la Banque mon- veloppement de la production laitière
Duteurtre sont priorités des programmes de diale, l’Unicef, la FAO, a connu un dans les Niayes, il n’a pas pu résister
chercheurs au développement de l’élevage en Afrique bilan très mitigé, notamment entre à la concurrence du lait en poudre
Bureau de l’Ouest. Pourtant, les grands projets et . importé et aux difficultés d’alimen-
d’analyses industriels des années et avaient tation du troupeau.
macro- connu bien des échecs. L’émergence ré- … avec les échecs de nombreuses L’Office du lait du Niger (Olani)
économiques de cente de nombreux systèmes artisanaux tentatives d’industrialisation laitière. a été également créé en par le
l’Institut ou semi-industriels de collecte du lait L’intensification laitière dans les pays gouvernement du Niger avec l’aide
sénégalais de de brousse constitue un espoir pour ouest africains a été promue dans le des bailleurs de fonds pour amélio-
recherches l’élevage local. Malgré les importations cadre de grands projets de dévelop- rer la santé et l’état nutritionnel des
agricoles (Isra- de poudre (plus de la moitié de la de- pement industriel. La présence d’une populations (femmes enceintes et
Bame). mande du Sénégal en lait), la partici- industrie de collecte était censée offrir enfants) à travers la consommation
Cécile Broutin pation de l’élevage laitier africain aux un cadre structurant à ce modèle in- de produits laitiers de bonne qualité
est responsable échanges marchands repose en grande tensif. On peut citer l’Office du lait du vendus à des prix accessibles. La fai-
du pôle partie sur un tissu de petites entrepri- Niger (Olani), l’Union laitière de Ba- ble performance de cette entreprise a
alimentation et ses de collecte et de transformation qui mako (ULB), l’Union des coopérations conduit, dans le cadre du programme
agriculture dynamisent le secteur. laitières du Sénégal (Ucolait). Cepen- de privatisation initié par l’État du Ni-
durables du dant, ces projets destinés à stimuler la ger, à sa cession à un groupe de privés
Gret. Un modèle de production intensif production laitière locale ont presque nigériens en , puis à sa transfor-
aux débuts difficiles… Dans le do- tous connu d’importantes difficultés mation en société anonyme.
Un guide de maine de la production laitière, le de fonctionnement. L’Union laitière de Bamako (ULB),
bonnes pratiques modèle intensif promu dès les an- Au Sénégal, par exemple, l’Union créée en à Bamako avec le con-
d’hygiène pour nées a reposé sur l’augmentation des coopérations laitières (Ucolait) a cours de l’Unicef, avait pour objectif
la de la productivité des races locales par été créée en suite aux travaux du de fournir du lait à la population de
transformation l’amélioration génétique et les cultures Centre de recherche zootechnique Bamako et à sa banlieue à un prix ac-
artisanale du lait fourragères. La faible productivité lai- (CRZ) de Dahra visant à intensifier cessible, de contribuer à la promotion
a été élaboré de tière des races locales était vue comme la production par des croisements de la production du lait local. De
façon concertée le principal facteur expliquant les bas entre une race locale, Gobra, et des à , elle a obtenu une assistance
au Sénégal et au niveaux de production du troupeau races exotiques (zébus indo-pakista- du Pam, lui permettant ainsi de ren-
Burkina Faso : africain. Ces programmes, s’appuyant nais). Le projet, appuyé par la FAO, le forcer son approvisionnement en lait
Broutin C., sur le modèle européen du « ménage Pam et l’Unicef, s’est arrêté en , local par une amélioration génétique
Diedhiou Y. exploitant », souffraient du manque de du fait de la sécheresse, de la baisse de des races bovines locales. Cependant,
Dieng M., . connaissances des structures de pro- production laitière consécutive à des l’arrêt du financement en a en-
Maîtrise de la duction en Afrique et de leur fonc- difficultés d’alimentation du bétail, et traîné une baisse progressive de l’ac-
qualité dans la tionnement, aussi bien à l’échelon de de problèmes de gestion. tivité, et en l’ULB est privatisée,
transformation l’exploitation agricole qu’à celui des Durant les premières années d’ex- devenant Mali-Lait.
laitière : guide de collectivités, du village. De ce fait, le ploitation, la collecte annuelle a atteint Les tentatives d’intensification, ba-
bonnes pratiques modèle de ferme laitière intensive n’a un volume de litres, inférieur sées sur l’amélioration des races loca-
d’hygiène. pu être mis en œuvre par des inves- au seuil de rentabilité de l’usine et aux les et la transformation industrielle,
Dakar, Sénégal, tisseurs périurbains ou dans le cadre objectifs de production, fixés à ont été fortement compromises par
ministère de de fermes d’État. litres par jour. L’usine s’est réorientée les crises climatiques, les problèmes
l’Élevage, Les années , coïncidant avec l’ac- dans la transformation de la poudre de gestion financière et comptable et
Fenafils, Dinfel, cession à l’indépendance de plusieurs de lait. la concurrence des importations de
Uppral, p. nations ouest africaines, ont été mar- Le GIE Coplait au Sénégal est un poudre de lait.
www.gret.org/ quées par la poursuite des politiques autre exemple d’échec du modèle in-
ressource/pdf/ d’intensification de la production lai- tensif. Créé plus tard après le déplace- Un système de collecte performant
07686.pdf tière avec pour objectif de fournir aux ment des bovins d’origine pakistanaise au service des mini laiteries. Pendant
populations urbaines du lait de « bonne de Dahra vers la ferme expérimentale les années , plusieurs systèmes de
qualité sanitaire ». Cette politique pro- de l’Institut sénégalais de recherches collecte se sont développés pour appro-
mue par les États et appuyée par des agricoles (Isra) de Sangalkam, où visionner les mini laiteries artisanales
organismes internationaux comme des Montbéliardes ont été importées créées dans plusieurs pays (Sénégal,
18 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
Des systèmes de production, des enjeux, des défis… LeForum
dossier
Mali, Burkina Faso, etc.) sous forme miques de développement, marquées l’oignon au Sénégal. La mise en place
de petites entreprises privées ou de co- par l’émergence en Afrique de l’Ouest de bonnes pratiques d’hygiène tout
opératives d’éleveurs. La collecte peut d’un réseau d’unités de transformation au long de la filière est également un
être groupée (souvent en lien avec des laitière basées sur la pasteurisation du enjeu important pour accroître les
associations d’éleveurs) ou individuelle, lait cru (plus de au Sénégal, collec- revenus des producteurs et transfor-
assurée par des collecteurs équipés de tant le lait des élevages situés dans un mateurs en limitant les pertes, pour
matériel plus ou moins rudimentaire rayon de km). améliorer la durée de conservation
(bidon en plastique) et qui utilisent la En dépit de la forte concurrence et les possibilités de distribution des
bicyclette, la mobylette ou la charrette des importations de poudre de lait, le produits et pour assurer la santé des
asine ou équine comme moyens de contexte d’évolution des mini laiteries consommateurs.
transport du lait des zones de produc- semble favorable du fait notamment Par ailleurs, l’implication des in-
tion vers les unités de transformation. de l’accroissement de la demande en dustriels dans la collecte du lait local
Ces unités collectent à litres par produits laitiers. En effet, les mini lai- demeure un prélude à la croissance
jour. Elles fabriquent essentiellement teries constituent des moyens de con- de la production laitière. Les expé-
du lait fermenté et du lait pasteurisé, nexion entre les zones de production riences à la Laiterie du Berger au Sé-
commercialisés en sachets thermo- laitière et les marchés urbains. Elles négal, où la collecte s’organise autour
soudés de à ml. Cependant, demeurent cependant limitées par leur de campements villageois structurés
certaines laiteries utilisent la poudre capacité à collecter des volumes plus en différents points que des pick-up
de lait pour faire face au déficit d’ap- importants (notamment pendant la rallient deux fois par jour, reflètent
provisionnement en lait frais, notam- période hivernale) et à les distribuer l’intégration des élevages du Nord du
ment en saison sèche. dans des circuits plus longs. L’amélio- Sénégal dans des circuits de commer- Collecte
D’autres systèmes de collecte repo- ration des dispositifs de collecte et la cialisation ; elles contribuent ainsi à la du lait en
sant sur la connexion entre un centre contractualisation avec des groupe- formation de débouchés pour les petits pick-up
de collecte de zone périurbaine ou ru- ments d’éleveurs bénéficiant d’appui producteurs, particulièrement pour les appartenant
rale, et une unité industrielle de zone à la production (notamment amélio- femmes peules qui jouent un rôle dé- à la Laiterie
urbaine ont pu se développer. C’est le ration de l’alimentation des animaux) terminant dans la commercialisation du Berger
cas de l’usine Mali-Lait, approvision- permettront d’augmenter les volumes du lait dans cette partie du Sénégal. La dans les
née en partie par la laiterie de Kasséla transformés et de limiter les impor- nouvelle dynamique basé sur la collecte campements
dans la périphérie de Bamako, qui lui tations massives par des niveaux de du lait, produit identitaire, est source de Richard-
fournit environ litres de lait frais, protection temporaire à l’image de de développement territorial. § Toll
soit près de la moitié de sa collecte
hebdomadaire.
À cela, s’ajoutent des systèmes de
collecte basés sur le ramassage du lait
en pick-up (le lait est contenu dans
des seaux en plastique à l’image de la
Laiterie du Berger à Richard-Toll au
Nord-Est du Sénégal ou dans des bidons
en aluminium) ou sur des centres de
collecte équipés de tanks à lait réfri-
gérés ; le produit de la collecte est alors
transféré vers l’usine par des camions
citerne réfrigérés (exemple de l’ancien
rayon de collecte créé par Nestlé en
zone sylvopastorale sénégalaise).
On trouve aussi d’autre types de
dispositifs, comme des fromageries
utilisant du lait de vache ou du lait
de chèvre.
Au total, on constate un dynamis-
me remarquable de la collecte du lait
local. Ce qui permet à la production
locale d’être en mesure de répondre
à la demande croissante en produits
© G. Duteurtre, octobre
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nº 46-47 — mars – août 2009
LeForum
dossier Des systèmes de production, des enjeux, des défis…
C
Aimé Landry dans diverses régions groupes d’agriculteurs qui en faisaient mances, menées de façon périodique
Dongmo est d’Afrique subsaharienne, la po- un usage sacrificiel et culturel (embou- en dehors de la zone de sédentarisa-
chargé de pulation va doubler au Nord che du taureau abattu lors de la fête tion de la famille. Or, ces ressources
recherche à Cameroun dans les prochaines du Maray chez les Kirdi, moyen de fourragères, de même que les espaces
l’Institut de années. Accroître la production est paiement de la dot chez les Toupouri, qui les supportent, sont très disputées.
recherche désormais urgent pour répondre à la les Massa et les Moundang). Il s’est
agricole du demande croissante en produits vi- étendu à d’autres groupes d’agricul- Une gestion conflictuelle des terri-
Cameroun vriers et éviter l’accentuation des crises teurs suite à l’adoption de la culture toires et des ressources.
(Irad). Il a alimentaires qui ont récemment secoué attelée bovine dans les années , ou
travaillé sur les les pays africains. Or, les terres conti- au contact d’éleveurs sédentarisés à La raréfaction des ressources attise les
systèmes nuent à être cultivées, sans restitution proximité de leurs villages. Au-delà tensions entre éleveurs et agriculteurs.
d’élevage bovins de la matière organique ni entretien des synergies qui se sont créées entre Les agriculteurs développent des stra-
et l’intégration de leur fertilité, ce qui conduit géné- éleveurs et agriculteurs (commerce tégies pour bénéficier au mieux, voire
agriculture- ralement à une baisse drastique du po- et échanges de biens et de services), pour garder l’exclusivité de l’usage des
élevage. Son tentiel productif des sols. De plus, la des problèmes de gestion partagée et résidus de cultures de leurs champs.
sujet de thèse : restriction ou la dégradation des aires durable des ressources se sont posés. À l’opposé, les éleveurs font valoir le
« Territoires, de pâturages et l’absence de cultures En effet, dès qu’ils se sont séden- droit traditionnel de vaine pâture de
troupeaux et fourragères limitent la production ex- tarisés, les pasteurs Peuls ont adopté ces champs et des résidus de récoltes,
biomasses : tensive de ruminants. La quasi-totalité progressivement l’agriculture pour qu’ils considèrent comme une forme de
enjeux de de l’espace étant aujourd’hui utilisée, marquer le territoire, s’approprier compensation pour le fourrage qu’ils
gestion pour un il n’y a pas d’autre alternative qu’une les espaces pastoraux vitaux pour ont perdu suite aux défrichements des
usage durable intensification raisonnée des systèmes leur cheptel et s’adapter au nouveau espaces par les agriculteurs. Les éle-
des ressources de production. genre de vie sédentaire ; leur activité veurs ont également orienté le « par-
au Nord agricole couvre ainsi tout ou partie cage » de leur bétail sur leurs propres
Cameroun ». L’émergence de systèmes agroéle- de leurs besoins vivriers. Dans la parcelles, au détriment de celles des
veurs. Au Nord Cameroun, l’élevage région, environ des unités de agriculteurs, remettant en cause les
Philippe bovin était avant tout l’affaire des so- production (UP) d’agriculteurs ont, traditionnels « contrats de fumure » ;
Lhoste est ciétés pastorales, détentrices de la ma- de leur côté, adopté l’élevage à travers rappelons que le transfert de fertilité
ingénieur jorité du cheptel bovin, et de certains la traction animale notamment, afin par les troupeaux sur les parcelles cul-
agronome, d’étendre leurs cultures, de mieux se tivées se fait essentiellement à travers
zootechnicien nourrir et d’épargner les revenus des cette technique de « parcage ». Ils pro-
tropicaliste. Il a surplus agricoles, ce qui leur a con- cèdent même parfois au broutage vo-
fait sa carrière à Définitions féré le statut d’UP d’agroéleveurs. lontaire de certaines cultures, pour
l’Orstom (ex- Ces agroéleveurs et les pasteurs dissuader les agriculteurs qui tentent
IRD) puis au sédentarisés pratiquent un système d’installer de nouvelles parcelles culti-
Cirad, où il a
développé les
approches
L est un droit
d’usage qui permet aux éle-
veurs de faire paître gratuitement
d’élevage semi-extensif, en dehors
des éleveurs laitiers et des embou-
cheurs qui émergent en zone périur-
vées sur les espaces d’élevage implici-
tement reconnus par tous. Les conflits
sur l’usage de ces ressources fourra-
systémiques des leur bétail dans des champs ne leur baine en développant un système gères et de l’espace sont réguliers et
élevages appartenant pas, après la récolte (va- intensif utilisant des sous-produits les solutions apportées par l’autorité
tropicaux, et a lorisation des résidus de cultures) ou tels que tourteaux, coques de coton locale ne sont que palliatives.
œuvré pour une lors d’une jachère. et sons de céréales. Les agroéleveurs
meilleure Les résidus de culture corres- entretiennent des troupeaux collec- Une délimitation des espaces de plus
association entre pondent à ce qui est laissé dans les tifs de à têtes/UP. Le troupeau des en plus confuse. En outre, les diffé-
agriculture et champs après la récolte (ex : pailles pasteurs est individualisé au niveau rents acteurs ne s’entendent pas sur
élevage. Il dirige pour les céréales). familial ( à têtes) et est constitué les limites du territoire d’élevage. En
la collection La biomasse désigne l’ensemble des bovins des différents membres de effet, la sédentarisation des pasteurs ne
technique : de la matière organique présente la famille. Les pasteurs sédentarisés s’est pas traduite par une stabulation du
« Agricultures en un endroit donné (ici, c’est donc combinent à la fois une valorisation cheptel des éleveurs mais par un sys-
tropicales en la quantité de maïs ou de sorgho des résidus de récolte de leurs cultu- tème de production extensif basé sur
Poche ». produite). res et une valorisation des résidus de l’exploitation des ressources naturelles
cultures sur le terroir des transhu- (fourrage, espace). De ce fait, le terri-
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Des systèmes de production, des enjeux, des défis… LeForum
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LeForum
dossier Des systèmes de production, des enjeux, des défis…
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Olivier Ninot ’A E K, appelé Tabaski consommation. Devant l’importance grands et plus lourds que ceux élevés
est géographe, en Afrique de l’Ouest, est un de la demande, un élevage périurbain au Sénégal, dont le cheptel est surtout
ingénieur de événement majeur au Sénégal s’est développé sur le marché spécifi- constitué par la race de petits mou-
recherche au et dans les autres pays sahéliens. La que de moutons de Tabaski « haut de tons peul-peul.
CNRS, au sein de « grande » fête du calendrier musul- gamme ». Ces bergeries périurbaines
l’Unité mixte de man commémore le sacrifice d’un bé- élèvent des moutons de grande taille Des opérations Tabaski mobilisant
recherche lier par Abraham (ou Ibrahim) en lieu issus de races sélectionnées (bali-bali, de nombreux acteurs… L’une des
PRODIG à Paris et place de son propre fils. Aujourd’hui touabir ou ladoum) pour une clientèle particularités fortes de l’événement
(www.cnrs. encore, la « fête du mouton » est, dans urbaine. Enfin, l’élevage rural reste le est le « gonflement » de la filière par
prodig.fr). les familles musulmanes, centrée gé- principal fournisseur de moutons de l’arrivée d’une multitude d’acteurs
néralement autour du sacrifice d’un Tabaski et cet élevage évolue lentement profitant de la large fenêtre com-
Le présent bélier. en réponse au marché. La Tabaski est merciale offerte par la fête. De nom-
article est tiré Chaque année, plusieurs centaines un moment de déstockage important breux sénégalais s’improvisent ainsi
d’une étude de milliers de moutons sont ainsi sacri- qui représente une part importante chaque année éleveurs ou marchands
réalisée en fiés au Sénégal, le matin de la Tabaski. des ventes annuelles pour la plupart de bétail (les célèbres dioula) dans
en partenariat En , les services vétérinaires ont des éleveurs. Néanmoins, les pratiques le cadre « d’opérations Tabaski ».
avec le Cirad et dénombré abattages, dont permettant de répondre qualitative- Il n’existe pas un type d’opération
l’Isra. Voir : Ninot dans la région de Dakar. La ment à la demande spécifique de mou- Tabaski mais une multitude. Cette
O., Dia N., Tabaski correspond donc à un pic de tons de Tabaski (sélection d’animaux, économie de « coups » est orientée
Gassama T.; Seye la consommation de mouton et est à ce embouche plusieurs mois à l’avance) selon les cas vers l’élevage, l’embou-
E.H.M. (). La titre considérée comme le moment clé ne sont pas encore majoritairement che, l’achat ou la vente. Le jeu com-
fête du mouton, de la filière. La date de la Tabaski, qui adoptées. Les béliers commercialisés mun, c’est celui de la spéculation, à
des moutons pour change chaque année en fonction du sont essentiellement de race peul-peul l’image des opérations réalisées sur
la fête. Rapport de calendrier lunaire musulman, consti- et waralé. Le poids et la race sont les le mil, le maïs ou l’arachide achetés
recherche sur la tue ainsi un objectif stratégique pour principaux déterminants des prix des à bas prix juste après les récoltes et
Tabaski au les éleveurs, les marchands et de plus animaux. Ainsi l’on peut trouver sur revendus beaucoup plus cher en pé-
Sénégal. en plus pour tout un ensemble d’ac- les marchés dakarois des moutons de riode de soudure et de semis. Mais la
Document de teurs économiques qui se déploie dans race ladoum à des prix supérieurs à réussite des opérations Tabaski n’est
travail Icare. l’élevage, le commerce des animaux et francs CFA, mais les prix pas toujours celle espérée au départ,
Cirad, dans une multitude d’activités conne- les plus fréquents observés en car il faut bien connaître l’élevage du
Montpellier, p. xes. Au total, une véritable « économie à Dakar étaient toutefois compris entre mouton et son commerce pour réussir
de la Tabaski » se met en place quel- à francs CFA pour des une telle opération. Ainsi, la fête bé-
ques semaines avant la fête. animaux d’environ kg. Les prix néficie sans doute d’abord à ceux qui
observés sont sensiblement plus éle- maîtrisent la filière du mouton, dans
Des circuits d’approvisionnement vés qu’en période normale (souvent sa partie amont aux producteurs, et
diversifiés et structurés. Les types de plus de ) mais sont caractérisés dans sa partie aval aux grands com-
moutons sacrifiés sont très variables. par de fortes variations au cours des merçants qui « (dé)tiennent » les
Ils dépendent du budget de chaque chef derniers jours précédant la fête. En marchés urbains. Les téfankés sont
de ménage, mais aussi des habitudes plus de la production locale, les im- par exemple des personnages clefs du
familiales et des préférences pour tel portations du Mali et de la Mauri- commerce de bétail. À la fois com-
ou tel attribut : âge, couleur de la robe, tanie ( têtes en ; environ merçants, intermédiaires, courtiers,
conformation, race, chanfrein, cornes, un tiers des animaux commercialisés hôtes ou garants, ils sont attachés à
etc. À un marché de consommation à Dakar au cours des années ) un marché où ils jouent le rôle d’in-
de moutons de Tabaski fortement jouent un rôle important dans la régu- termédiaires. Leur compétence tient
différencié et segmenté, répondent lation des stocks et des prix. De plus, à leur connaissance du marché et des
plusieurs systèmes productifs et dif- les animaux élevés au Mali répondent multiples acteurs des lieux ; leur pou-
férentes stratégies des éleveurs. Les aux critères de qualité de la deman- voir est basé sur leur réputation.
élevages urbains fournissent proba- de urbaine à laquelle la production L’agglomération de Dakar compte
blement plus de des moutons de locale peine à répondre. La race de quelques , millions d’habitants, soit
Tabaski dans la région de Dakar. Il moutons bali-bali qui constitue l’es- de la population sénégalaise, mais
s’agit surtout d’un élevage de maison, sentiel du cheptel malien produit en selon les statistiques du ministère de
de cour ou de rue, destiné à l’auto- effet des animaux généralement plus l’Élevage, environ un tiers des abat-
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Des systèmes de production, des enjeux, des défis… LeForum
dossier
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dossier Des systèmes de production, des enjeux, des défis…
L
Lionel ’ en Afrique de plémentaires, tant sur le plan écono- taller des Vaccinateurs villageois de
Guezodje est l’Ouest est une activité com- mique que socioculturel et géographi- volaille (VVV) à travers tout le pays.
aviculteur dans plexe dont l’importance varie que. Ainsi, si le système traditionnel est Enfin un renforcement des capacités
la commune de d’un pays à l’autre. Au Bénin, pays de entièrement rural, l’élevage moderne des agroéleveurs a également été ef-
Zogbodomey au plus de millions d’habitants, deux est périurbain. Cette répartition per- fectué suivant l’approche Farm Field
Bénin, secrétaire grands types d’aviculture sont prati- met de réduire les coûts de production School (FFS).
général de quées : l’aviculture villageoise, basée liés au transport. Mais on constate de
l’Association sur l’élevage de races locales suivant nos jours une forte délocalisation des … mais en proie à des difficultés. Á
nationale des un système extensif, et l’aviculture unités de production, du fait de l’ur- l’instar de tout le secteur agricole,
aviculteurs du « moderne », basée sur l’élevage de banisation. l’aviculture béninoise fait face à des
Bénin (Anab) et races importées. Il convient également de préciser la contraintes de financement. Les pe-
secrétaire L’aviculture villageoise se pratique contribution du secteur avicole (surtout tits producteurs, majoritaires, sont
général de la en milieu rural. Elle joue des fonctions moderne) à l’agriculture périurbaine particulièrement vulnérables du fait
Fédération des économique (viande de volaille pour et à l’arboriculture au Bénin. En effet, notamment de l’émergence et de la
unions de la consommation, œufs de table), de les litières et les déjections sont utili- persistance des épizooties. Cela leur
producteurs du cohésion sociale (activité génératrice sées comme fertilisants organiques par rend difficile l’accès aux crédits auprès
Bénin (Fupro). de revenus pour les femmes, prestige les maraîchers situés à proximité des des banques. Ils se rabattent alors sur
social) et culturelle (utilisation des grands centres urbains. Cette pratique les institutions de microfinance, dont
poulets de race locale et des œufs à favorise une agriculture durable. les conditions ne sont pas toujours
coquille blanche lors des cérémonies appropriées : taux d’intérêt élevé (de
traditionnelles et en ethnopharma- Une filière en plein essor bénéficiant à par an), remboursement
cologie). Les maquis de tout le pays du soutien des autorités… La politique des investissements sur une courte
sont approvisionnés par ces élevages gouvernementale actuelle a retenu l’avi- période ( ans au lieu de ans par
villageois, dont la qualité de viande culture parmi les filières prioritaires. exemple), exigence de garanties im-
est recherchée. Le cheptel national de À ce titre, des actions sont en cours en portantes. Selon une étude effectuée
race locale serait estimé à millions appui direct à la production, comme en par la Direction de l’élevage,
d’oiseaux (FAO, ). Les domaines le financement de plus d’une dizaine sur aviculteurs enquêtés, seuls
de l’habitat, l’alimentation, la santé de microprojets avicoles par le Fonds avaient été financés, dont par des
et la génétique sont en cours d’amé- national de la promotion de l’emploi banques.
lioration. jeune, ou l’élaboration de référentiels Le foncier est un autre facteur li-
L’aviculture moderne est une activité technico-économiques. En , le mi- mitant le développement de la filière
purement économique. Autrefois l’une nistère de l’Agriculture et de la Pêche avicole, surtout en zone périurbaine :
des principales sources de viande du a subventionné à l’acquisition de l’inexistence de plans d’aménagement
Bénin, elle est actuellement réduite à la poussins d’un jour, mais malheureu- du territoire pose des problèmes aux
production d’œufs de table. Le nombre sement cette action n’a concerné que producteurs situés à la périphérie des
de poules pondeuses s’élèverait à plus poussins (soit moins de villes. Contraints de se déplacer régu-
de oiseaux répartis sur plus du cheptel national) et sa reproduc- lièrement, ces « aviculteurs itinérants »
de unités de production (contre tibilité n’est pas certaine. sont dans l’obligation de réinvestir sans
en ), employant directement En ce qui concerne l’élevage des cesse dans leur activité, avant même
environ personnes, dont poulets de race locale, des actions que leurs derniers investissements ne
de femmes. Ce sous-secteur fournirait d’amélioration de la production et soient rentabilisés.
près de millions d’œufs par an, ce de la productivité sont en cours, L’aviculture béninoise rencontre
qui rapporté à la population béninoise avec notamment « l’opération coq » également des problèmes en termes
équivaut à environ œufs par habi- qui consiste à introduire des coqs de de compétences techniques. Les em-
tant et par an (soit des recom- races importées dans les élevages lo- ployés sur les exploitations sont peu
mandations de la FAO). Une partie de caux. Ainsi, entre et , plus nombreux ( ouvriers pour poules
ces élevages de volaille (poulet, pin- de coqs ont été introduits par pondeuses) et très souvent déscolari-
tade, dinde, caille, oie) est toutefois différents programmes et projets. De sés et recrutés sans aucune formation
consacrée à la production de viande, même, des opérations de vaccination préalable. Les rares personnes ayant
de façon saisonnière, en vue des fêtes de masse ont été réalisées contre la suivi une formation dans le domaine
de fin d’année. maladie de New Castle. Cette opé- préfèrent créer leur propre élevage
Ces deux sous secteurs sont com- ration a permis de former et d’ins- ou travailler dans le secteur public.
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Des systèmes de production, des enjeux, des défis… LeForum
dossier
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dossier Des systèmes de production, des enjeux, des défis…
L
Vincent ’ est en pleine système d’élevage extensif a su pren- l’intensification des systèmes artisa-
Porphyre est expansion en Afrique de l’Ouest, dre de l’importance en constituant la naux par l’amélioration de la généti-
vétérinaire et avec selon les pays des croissan- base des filières d’approvisionnement que et de l’alimentation, la maîtrise
chercheur au ces des cheptels de l’ordre de à en viande de porc des villes du sud du des techniques d’élevage et le contrôle
Cirad dans (FAO, ). La production de viande Cameroun. La divagation pose cepen- des maladies.
l’unité de de porc en Afrique subsaharienne est dant de nombreux problèmes notam- Sur le plan génétique, des croise-
recherche d’environ tonnes, soit de ment au niveau du contrôle des patho- ments assez performants entre races
Systèmes la production mondiale. Le Burkina logies animales, de la transmission de porcines européennes (Large White,
d’élevage et Faso, le Nigeria et le Cameroun sont maladies dangereuses pour l’homme, Landrace) et porcs locaux permettent
produits les principaux pays producteurs. Seul le de la destruction des cultures ou des d’améliorer les performances de crois-
animaux. Il Ghana montre une légère décroissance accidents que les animaux peuvent sance et de prolificité, et de bénéficier
s’intéresse aux des effectifs. La viande de porc, qu’elle occasionner. de la souplesse alimentaire des porcs
changements des soit cuite au four comme au Burkina L’élevage paysan en système clos per- locaux (bonne tolérance aux aliments
systèmes de Faso ou à la braise comme au Came- met de mieux maîtriser les conditions volumineux et pauvres). Des animaux
production roun, est très appréciée des popula- d’élevage et de sécuriser les revenus. reproducteurs améliorés et de la se-
porcine des pays tions non musulmanes, et de nombreux Cet élevage semi intensif fournit envi- mence congelée sont ainsi importés à
du Sud. Après de restaurants spécialisés se développent ron de la production totale. Les grands frais, mais le réel défi consiste à
précédents dans les centres urbains. porcs, qui permettent de valoriser les proposer (et à financer) une politique
travaux sur déchets ménagers (eaux grasses), les nationale cohérente, accessible aux pe-
Madagascar, le Des systèmes de production variés. résidus de cultures (sons de riz, fruits) tits producteurs dans la durée.
Vietnam, le Laos, L’élevage porcin représente une source et les sous-produits des activités de Les performances des animaux sont
le Cambodge, il de protéines animales de qualité pour transformation agroalimentaire (drè- en partie liées aux modes d’élevage et
est actuellement les foyers africains et surtout de reve- ches, tourteaux) sont intégralement d’alimentation auxquels ils sont sou-
en poste à la nus pour les paysans. La plupart des dépendants de leur propriétaire, en mis. L’amélioration de l’alimentation
Réunion. Il est élevages porcins sont assurés par des majorité des femmes, qui les nour- avec des apports protéiques et énergé-
également petites unités familiales, selon des mo- rissent et les maintiennent dans des tiques adaptés aux besoins physiolo-
éditeur des de production très diversifiés allant porcheries rustiques, construites à giques des animaux doit permettre à
scientifique du de l’élevage extensif jusqu’au mode de l’aide de matériaux locaux (banco). terme d’aboutir à une croissance plus
site internet production industriel hors-sol. Les manipulations des animaux et les rapide des animaux et à l’amélioration
pigtrop.cirad.fr L’élevage extensif où les porcs sont soins (vaccination, traitements) s’en de la qualité des carcasses. Des efforts
dédié à la laissés en divagation dans les villages trouvent facilités. Ces animaux, élevés sont faits de la part du secteur de la
recherche sur représente une activité de subsistance. parfois pour les besoins de la famille, recherche pour identifier et valoriser
l’élevage porcin Ces animaux jouent le rôle de compte sont surtout destinés à la vente. des matières premières bon marché et
en régions d’épargne ou de police d’assurance en Les élevages porcins de type hors- disponibles localement, mais souvent
chaudes. cas de besoins d’argent (par exemple sol industriels demeurent relativement mal connues.
pour acheter des semences ou des ferti- rares en Afrique de l’Ouest. Ces sys- Dans ce processus d’intensifica-
lisants, rembourser des soins médicaux, tèmes se développent en ville ou à tion, les techniques d’élevage (dépa-
payer les frais de scolarité des enfants, leur périphérie pour bénéficier de la rasitage des animaux, vaccinations,
faire face à une mauvaise récolte, ou proximité des centres urbains. Mais etc.) évoluent et conduisent à mieux
lors des fêtes coutumières). Ce mode à cause du faible pouvoir d’achat des valoriser le potentiel des animaux et à
d’élevage requiert un minimum d’in- populations urbaines, la taille du mar- garantir la pérennité de l’élevage par
trants et de travail, et très peu d’argent ché reste faible. Ils fournissent à peine une bonne gestion financière et une
est investi dans l’alimentation ou les de la viande produite. bonne maîtrise de l’état sanitaire des
vaccins ; la productivité apparaît donc troupeaux. Il s’accompagne ainsi d’une
faible mais en contrepartie le risque Vers une intensification de l’élevage augmentation de la production, d’une
financier l’est également. On estime à porcin… Avec une demande en hausse rentabilisation de l’emploi d’intrants
t, soit de la production en viande porcine, on assiste à un re- plus coûteux, d’une professionnalisa-
totale de l’Afrique subsaharienne, la gain d’intérêt pour le développement tion des éleveurs et de l’émergence de
production de viande de porc issue de de la production porcine en Afrique. groupements de producteurs ; ceux-ci,
ce mode d’élevage. Au sud du Tchad Les programmes pour la sécurisation outre l’intérêt d’acheter en commun
et au Nord Cameroun, zones préser- alimentaire, comme on a pu le voir et donc moins cher les matières pre-
vées de la peste porcine africaine, ce au Burkina Faso, cherchent à soutenir mières alimentaires, sont une force de
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Des systèmes de production, des enjeux, des défis… LeForum
dossier
négociation face aux autres acteurs de de vulgarisation compétents dans le viande de porc reste à renforcer alors
la filière (abatteurs, commerçants) et conseil et l’appui à l’élevage porcin que les toxi-infections alimentaires ou
aux services publics ; ces groupements restent encore rares. la cysticercose sont fréquemment ob-
coopératifs et interprofessions exis- Dans les zones périurbaines, même servées dans les populations africaines,
tent par exemple au Burkina Faso, au si elles demeurent loin des situations notamment chez les enfants.
Cameroun ou à Madagascar, avec des extrêmes que l’on peut rencontrer par À moyen terme, on peut douter que
résultats très variables. exemple en Asie avec habitants de forts investissements et de nouvelles
par km² dans les deltas, le manque de installations de porcheries industriel-
… faisant face à de multiples défis. place et la croissance démographique les viennent modifier radicalement le
De nombreuses contraintes pèsent sur pénalisent le développement ou la mo- secteur porcin en Afrique de l’Ouest.
ce processus d’intensification, notam- dernisation des bâtiments d’élevage. Il apparaît plus vraisemblable que son
ment les problèmes de pollution par les La présence de ces élevages porcins développement sera progressif et se
effluents d’élevage, les ruptures d’ap- est déjà remise en question du fait des basera sur la professionnalisation des
provisionnement et les problèmes de nuisances et des problèmes sanitaires petits producteurs ainsi que sur l’émer-
qualité des intrants, les pathologies, dus à la concentration anarchique des gence d’organisations coopératives et
mais aussi les fluctuations des prix élevages, des insuffisances en terme interprofessionnelles. En dehors de ces
des intrants et la forte concurrence de biosécurité et de santé animale, voies classiques de renforcement des
des viandes importées. Les capacités d’autant que les pays d’Afrique de filières d’élevage, des initiatives existent
d’investissement sont encore faibles l’Ouest se trouvent confrontés à la en Afrique et en Asie pour réfléchir à
et l’organisation des filières se heurte perspective d’une réapparition de la un accompagnement de la transition
aux difficultés économiques et socia- peste porcine africaine. Au cours des des éleveurs porcins au travers d’une
les de pays largement affectés par la dernières années, cette pathologie a été valorisation alternative face aux pro-
crise mondiale. observée au Bénin, au Burkina Faso, au duits importés de qualité standardisée.
Face à ce constat et pour que ces fi- Cameroun, au Togo, en Côte d’Ivoire, Sans négliger l’importance de proposer
lières en voie d’intensification puissent au Ghana, au Nigeria ou encore au Sé- un produit sûr pour le consommateur,
perdurer, il faut qu’elles soient perfor- négal où elle a décimé du cheptel des expériences proposent de baser le
mantes, protégées ou que les coûts de en . Avec une mortalité de près développement des filières sur l’amé-
production soient faibles. La question de dans les troupeaux, l’impact lioration de la qualité des produits et
est alors de savoir comment faire, en économique pour les éleveurs et l’en- la mise en place de guides de bonnes
Afrique de l’Ouest, pour soutenir les semble du secteur de l’élevage porcin pratiques reconnaissant le savoir-faire
éleveurs de porcs quand on importe la a été dramatique. Le renforcement des des producteurs africains, ou encore
génétique, une bonne partie des ma- mesures de biosécurité dans les éleva- par une meilleure considération de ces
tières premières, le matériel d’élevage, ges s’avère donc essentiel. systèmes localisés, souvent économes
les médicaments vétérinaires et que En aval de la filière, les structures en intrants et en énergie. Voilà autant
l’agriculture n’est pas subventionnée. d’abattage, de contrôle sanitaire et de d’initiatives qui constituent des pistes
Favoriser la création d’entreprises transformation de la viande demeurent originales pour sécuriser ces filières
(provenderie, fabricant de matériels) insuffisantes. La qualité des viandes porcines encore fragiles mais pourtant
et l’installation de services à l’élevage ainsi que l’hygiène à l’abattage sont bien actives en Afrique de l’Ouest. §
(techniciens d’élevage, vétérinaires) encore faibles. La confiance des con-
s’avère essentiel, alors que les services sommateurs africains vis-à-vis de la
Productions
nationales de
viande porcine en
Afrique de l’Ouest
en 2007, en tonnes
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dossier Des systèmes de production, des enjeux, des défis…
A
Isabelle en séchée, fumée ou congelée, toutes des- zones humides rendent difficile la
Hanquiez, produits animaux ne cesse tinées à la consommation humaine. conduite des élevages « convention-
chargée de d’augmenter au niveau mon- L’Association pisciculture et déve- nels » (bovins, poulets). Un des enjeux
communication dial, en Afrique une stagnation voire loppement rural en Afrique (Apdra) du développement agricole et de la sé-
à l’Association une diminution de la consommation a conduit plusieurs études approfon- curité alimentaire de ces régions est
pisciculture et de protéines d’origine animale par ha- dies sur la consommation de poisson alors de développer une pisciculture
développement bitant est un cas fréquent : dans maints dans les campagnes en Côte d’Ivoire, paysanne capable de satisfaire la forte
rural en Afrique endroits, les faibles niveaux de con- en Guinée et au Cameroun. La der- demande locale.
(Apdra) a sommation engendrent des carences nière de ces études a été réalisée au
travaillé plus de nutritionnelles sévères. Cameroun, sur la base d’un échan- Une pisciculture extensive pour
deux ans sur une Selon la FAO, en Afrique la contri- tillon représentatif de familles rura- développer l’économie rurale. En
action de bution moyenne du poisson dans l’ap- les: foyers de villages, soit Afrique tropicale humide, l’existence
développement port total de protéines animales était de individus, ont été suivis durant une de nombreux bas-fonds aménageables
en Équateur. l’ordre de en . Des disparités année. Pour cet échantillon, le poisson et la forte disponibilité en main d’œu-
existent entre les pays : pour ceux dis- est présent dans plus de la moitié des vre sont des atouts pour les activités
Marc Oswald, posant d’une ouverture sur l’Atlanti- repas et représente des apports piscicoles. En outre, les paysans de ces
responsable du que, ce taux oscille entre et protéiques animaux, avec une prépon- régions ont un niveau de trésorerie as-
département faisant du poisson la première source dérance de poissons d’origine marine sez bas et peuvent difficilement utiliser
Sciences du de protéines animales. (plus de ). La situation est simi- des intrants, aux coûts trop élevés. La
vivant à l’Istom laire en Guinée et en Côte d’Ivoire. pisciculture extensive leur offre la pos-
et président de Les enjeux de la consommation de Mais malgré le rôle crucial du poisson sibilité de produire de façon rentable
l’Apdra a été chef poisson en Afrique tropicale humi- dans l’alimentation des populations un poisson pas cher, qu’ils pourront
du Projet de de. En Afrique tropicale humide, le rurales, sa consommation décroît au facilement vendre ou consommer.
pisciculture en poisson est un aliment de base. Mais moment de la soudure ; l’alimentation La pisciculture extensive consiste à
Guinée forestière les ressources halieutiques issues de la déjà insuffisante en protéines devient utiliser la productivité naturelle pour
(PPGF) et pêche étant largement exploitées (voire alors extrêmement carencée. Dans ces produire du poisson. Il n’est pas né-
assistant surexploitées), l’approvisionnement en régions, la pisciculture pourrait donc cessaire de nourrir les poissons, con-
technique poisson devient de plus en plus difficile. participer au renforcement de la sé- trairement aux systèmes en cages ou
pisciculture en Ainsi, depuis longtemps, les pays du curité alimentaire. circuits fermés, mais il faut entretenir
Côte d’Ivoire golfe de Guinée importent de façon Dans les zones forestières éloignées l’étang, le surveiller, bien l’empoisson-
pendant plus de massive du poisson. La surexploita- des côtes, l’approvisionnement en pois- ner et le récolter. L’élevage simultané
ans. tion des stocks (notamment ceux de son est difficile à cause des temps de de plusieurs espèces aux régimes ali-
petits pélagiques ¹ des eaux côtières) transport importants dus à la mau- mentaires complémentaires permet de
Depuis , ne permet plus de satisfaire à bas coût vaise qualité des pistes, des véhicules mieux valoriser la productivité natu-
l’Apdra la demande. En outre, la mondialisa- et de la chaîne du froid. Le poisson relle des étangs : on associe ainsi le
accompagne les tion a entraîné le détournement des frais est ainsi quasi inexistant sur les tilapia sexé (Oreochromis niloticus) à
agriculteurs et poissons vers des marchés plus ré- marchés ruraux : l’étude réalisée au un petit prédateur (Hemichromis fas-
les organisations munérateurs et ce sont désormais les Cameroun montre que la majorité des ciatus) auquel sont ajoutés l’Heterotis
professionnelles rebuts de chalut qui se retrouvent sur poissons consommés sont congelés ou niloticus et un silure. Les rendements
du Sud dans la les marchés africains. Face à cela, la fumés (, ). oscillent entre , et t/ha/an. Les ale-
mise en place contribution de l’aquaculture est en- En Afrique subsaharienne, la pis- vins sont autoproduits dans un étang
d’une core faible et certains pays comme ciculture occupe encore une position de service complémentaire, souvent
pisciculture la Côte d’Ivoire importent même de marginale dans les économies natio- un étang de barrage.
paysanne Chine plus d’une dizaine de milliers nales (moins de du poisson produit La conduite de cette pisciculture of-
durable et de tonnes de tilapia, poisson pourtant provient de la pisciculture, d’après la fre d’importantes économies d’échelle,
rentable. Elle d’origine africaine. FAO). Pourtant, face à une consom- le travail requis pour la surveillance
intervient Dans le golfe de Guinée, le poisson mation toujours croissante, à la cherté et la gestion de l’eau d’un petit étang
actuellement participe de façon majeure au repas, du poisson congelé et à la mauvaise de moins de ares n’étant pas très
dans pays en particulier dans les campagnes. Sur qualité du poisson fumé, le poisson différent de celui pour un barrage
d’Afrique. les marchés, il est présent sous forme frais est une alternative de qualité d’un hectare.
www.apdra.org pour les populations. En outre, les L’investissement pour la construc-
. Poissons vivant en pleine eau. risques parasitaires élevés dans les tion de la digue de l’étang de barrage
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Des systèmes de production, des enjeux, des défis… LeForum
dossier
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dossier Des regards croisés sur l’élevage pastoral…
Û TJ : Au niveau des intérêts politico- populations de façon régulière car, si en mande locale. Dans ce sens, il faudra
économiques du Burkina Faso, ce hivernage on a beaucoup de lait, en sai- aussi que les taxes soient plus fortes
sont les viandes crues, bovine, ovine son sèche c’est difficile. C’est pourquoi pour limiter les importations et favo-
et caprine qui sont prioritaires à plus nous sommes en train de mettre en place riser le développement de la filière lait
long terme. deux grandes laiteries à Ouagadougou locale, surtout qu’avec la hausse des prix
Concernant le lait, notre préoccupa- et à Bobo-Dioulasso pour permettre mondiaux des produits alimentaires,
tion est de développer la filière locale aux acteurs périurbains d’augmenter nos productions locales sont devenues
pour pouvoir satisfaire les besoins des leur production et de satisfaire la de- beaucoup plus compétitives. §
32 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
Des regards croisés sur l’élevage pastoral… LeForum
dossier
L
Philippe internationales des systèmes de production. Si elle n’est par les instances régionales (Uemoa
Lhoste est attiraient fortement notre atten- pas trop concurrencée par les impor- et Cedeao) en faveur de ces systèmes
ingénieur tion, à la fin du siècle, sur les tations, la production avicole (œufs et d’élevage visent surtout à améliorer
agronome, évolutions très rapides de la consom- poulets notamment) peut aussi contri- les conditions de production (santé
zootechnicien mation et de la production animales, buer fortement, grâce à des systèmes animale, intrants…) et à stimuler la
tropicaliste. Il a avec une étude prospective qui a fait de production diversifiés, à l’offre de commercialisation des produits ani-
fait sa carrière à date : « L’élevage d’ici : la pro- protéines animales ; l’aviculture fami- maux. Les progrès à en attendre sont
l’Orstom (ex- chaine révolution alimentaire » (Ifpri, liale, en particulier, qui permet d’as- réels mais ils ne peuvent être très ra-
IRD) puis au FAO, ILRI, ). Les auteurs y insis- surer une meilleure alimentation des pides…
Cirad, où il a taient sur une prochaine « révolution » campagnes, participe à la lutte contre Dans les systèmes agropastoraux où
développé les de l’élevage, à l’instar de la révolution la pauvreté rurale. les productions animales sont intégrées
approches verte des années pour l’agricultu- La pisciculture représente, elle aussi, à l’agriculture, les perspectives d’évo-
systémiques des re. Ils prévoyaient notamment, pour une belle opportunité et une produc- lution sont plus importantes, mais les
élevages faire face à ces enjeux dans les pays en tion d’avenir qui pourra participer à la mutations en cours sont parfois sources
tropicaux, et a développement, « une ère de progrès sécurité alimentaire des zones humides de conflits autour de la divagation du
œuvré pour une technologiques rapides, notamment où les élevages « conventionnels » sont bétail, des vols d’animaux, des dégâts
meilleure pour l’élevage industriel ». confrontés à des contraintes sanitaires dans les cultures provoqués par les
association entre L’Afrique de l’Ouest a subi les fortes fortes. Là encore, l’Asie a montré la troupeaux et de la concurrence ac-
agriculture et mutations évoquées dans cette étude : voie et l’Afrique possède aussi un réel crue entre troupeaux d’agriculteurs
élevage. Il dirige accroissement démographique élevé, potentiel encore peu exploité. et d’éleveurs pour les pâturages. Ces
la collection exode rural et forte urbanisation, évo- changements permettent néanmoins
technique : lution des modèles de consommation Mais qu’en est-il des systèmes d’éle- une diversification des productions
« Agricultures alimentaire en ville. Elles ont provoqué vage des ruminants, dont la viande et animales et végétales et une intensi-
tropicales en une rapide évolution de la demande le lait restent des produits privilégiés fication raisonnée et autonome de ces
Poche ». alimentaire, en quantité et qualité, no- pour les consommateurs africains ? La « systèmes mixtes ». L’évolution de ces
tamment dans le domaine des produits situation des élevages de ruminants systèmes, bien amorcée dans certaines
animaux. Bien que cette demande soit (bovins, caprins et ovins), herbivores régions d’Afrique subsaharienne, pose
très explicite, les réponses à y apporter valorisant de vastes pâturages natu- des questions d’ordre législatif et ré-
semblent relever d’une combinaison rels subsahariens, est particulière car glementaire d’une part et d’ordre tech-
complexe de décisions politiques, de elle s’inscrit dans des systèmes pas- nique et organisationnel d’autre part.
stratégies commerciales et de dyna- toraux et agropastoraux très impor- Innovations techniques et organisa-
misation du secteur de production. tants aux plans socio-économique et tionnelles doivent donc aller de pair.
Force est de constater, comme le sou- écologique. L’accompagnement des innovations
lignent plusieurs auteurs de ce dossier, Les systèmes pastoraux représentent implique de mettre en place entre les
que la modernisation du secteur éle- d’abord un mode de vie essentiel pour différents acteurs de nouvelles règles
vage en Afrique de l’Ouest tarde à se les sociétés concernées ; ils permettent contractuelles de gestion consensuelle
généraliser. aussi de valoriser de vastes espaces en des ressources naturelles ; en effet, la
Comme dans le reste du monde, zones sèches, dans lesquels il existe peu gestion par les éleveurs des territoires
ce sont les espèces à cycle court qui d’alternatives économiques à cet éle- d’élevage des ruminants ne peut être
devraient permettre de répondre ra- vage extensif naisseur ; ils participent dissociée de la gestion des territoires
pidement et plus efficacement à cette aussi largement, grâce à ce système, à des autres acteurs ruraux. Des conven-
demande croissante — c’est le cas la fourniture d’animaux pour les zones tions locales entre tous les acteurs et
des volailles et du porc, à l’exemple agricoles et pour la consommation des utilisateurs des territoires concernés
de l’Asie. L’élevage porcin a apporté villes. Le cadre législatif foncier de la peuvent répondre à ces nouvelles exi-
des réponses dans nombre de pays et gestion des ressources et des espaces gences, mais il faudra du temps pour
le porc reste la première viande con- pastoraux doit encore faire l’objet de que les droits d’usage des pâturages et
sommée au monde. Malgré de sérieu- mises au point avec les acteurs du pas- des points d’eau se stabilisent.
ses contraintes pathologiques (peste toralisme et les organisations pastora- Ces systèmes mixtes agriculture-
porcine africaine et plus récemment les. Les besoins sociaux des pasteurs élevage prennent de plus en plus de
le virus HN), l’élevage porcin est en (santé, éducation, échanges) doivent poids, en Afrique subsaharienne, pour
expansion en Afrique de l’Ouest et on aussi être considérés, en tenant compte les productions animales et végétales,
observe une intensification progressive de leur mobilité. Les mesures prises vivrières et commercialisables. Le re- Ü
Grain de sel 33
nº 46-47 — mars – août 2009
LeForum
dossier Des regards croisés sur l’élevage pastoral…
34 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
Initiatives
L
Mascha Middelbeek est , les bailleurs de la coopération internationale et les acteurs du tou-
chargée du tourisme rural de fonds et les gouvernements des pays en risme ne considèrent pas ces organisations comme
et coordinatrice pour développement s’intéressent de plus en plus des partenaires possibles. L’isolement géographique
l’Afrique de l’Est au sein à la diversification des moyens de subsistance dans des producteurs et leur faible pouvoir de négociation
d’Agriterra. les zones rurales. En effet, plusieurs enquêtes au ni- sont aussi des facteurs explicatifs.
Agriterra est une agri- veau mondial montrent que à des revenus Pourtant, lorsque les producteurs se structurent
agence fondée par des moyens des ménages ruraux proviennent d’activités en organisation, leur poids politique ou commercial
organisations de non agricoles locales. Dans les pays du Sud comme est renforcé et ils sont plus à même de s’engager vers
producteurs agricoles dans les pays du Nord, le tourisme constitue souvent de nouveaux secteurs.
néerlandais pour venir en une part importante de ces revenus non agricoles,
appui à des organisations contribuant non seulement au développement éco- Les organisations de producteurs : des acteurs clés
de producteurs dans les nomique mais aussi à une meilleure connaissance du développement du tourisme. La reconnaissance
pays en développement ; des richesses du milieu rural. du rôle des OP dans le développement du tourisme
elle vise à encourager, rural va néanmoins grandissante depuis une dizaine
appuyer et financer la Lier agriculture et tourisme. L’engagement des pay- d’années et elles sont quant à elles de plus en plus
coopération internationale sans dans le tourisme peut se faire de différentes ma- conscientes des opportunités qu’offre le tourisme
entre des organisations nières. Un producteur peut, en plus de ses activités rural. Diverses organisations de développement des
rurales des Pays-Bas et des agricoles, proposer un logement ou des excursions : Pays-Bas, comme l’agence de développement néerlan-
pays en développement. il se transforme alors en entrepreneur du tourisme daise SNV, Icco, Agriterra et Solidaridad, facilitent,
Site internet : rural. Une autre option est de vendre ses produits chacune selon ses propres stratégies et pratiques, la
www.agriterra.org (fruits, légumes, produits artisanaux, etc.) au secteur création de liens entre OP et tourisme.
www.viaterra.org touristique : les producteurs deviennent alors fournis- Le développement du tourisme, outre qu’il peut
seurs de marchandises pour le tourisme, une activité être une source d’emplois et de revenus supplémen-
Bibliographie : bien plus proche de leur métier d’origine. taires, peut également améliorer les conditions de
Ashley, C. et Maxwell, S., Une des spécificités du tourisme rural est de pro- vie dans les zones rurales, en incitant, par exemple,
(b). Rethinking Rural poser aux visiteurs une expérience personnalisée, l’installation d’infrastructures, de sanitaires ou de
Development. un aperçu culturel et humain de l’environnement réseaux d’électricité.
Development Policy rural et, autant que possible, de leur permettre de Bien que la participation des OP dans le dévelop-
Review. Vol. , nº . participer aux activités, modes de vie et traditions pement du tourisme reste un défi, plusieurs signes
Séminaire de l’OMC Rural des communautés locales. encourageants plaident pour leur intégration. À tra-
Tourism in Europe: vers les réseaux qu’elles ont déjà dans leurs régions,
Experiences and Une faible participation des organisations de pro- ces organisations rendent les zones rurales plus ac-
Perspectives. Belgrade, ducteurs : plusieurs facteurs en jeu. Le passage à des cessibles au tourisme, facilitent la découverte de lieux
. Présentation de secteurs non agricoles s’accompagne souvent d’obs- intéressants et l’identification d’entrepreneurs ruraux ;
Luigi Cabrini. tacles et d’inégalités, et dans de nombreux pays en ce que ne peuvent pas faire les tour opérateurs, qui
Verma, S.K. Cooperatives développement, le rôle des organisations rurales dans n’ont pas de tels réseaux. Travailler avec les OP devrait
and Tourism: An Asian le tourisme est encore peu reconnu. permettre de faire profiter l’ensemble de la commu-
Perspective. Publication La faible participation des organisations paysan- nauté, plutôt que quelques producteurs individuels,
of National Cooperative nes (OP : organisations de producteurs ou de femmes des retombées positives du tourisme. En outre, cela
Union of India, . en zones rurales, coopératives) s’explique en partie permettrait d’assurer aux OP une meilleure stabilité
Torres, R. and Momsen, par le fait qu’elles n’ont pas conscience des bénéfices financière. Enfin, les producteurs peuvent offrir aux
J.H., (). Challenges que peut leur apporter le tourisme rural. De plus, le touristes de plus en plus attirés par des expériences
and potential for linking manque de ressources, d’expérience et de connais- authentiques et insolites la découverte de leurs modes
tourism and agriculture sance les empêche d’accéder à l’industrie du tourisme de vie, de leur campagne, et de leurs produits.
to achieve pro-poor et il existe peu de capitalisation d’expériences et de
tourism objectives. documents sur des exemples réussis de coopératives Agriterra et le tourisme : le point de vue d’une
Progress in Development touristiques. Ceci limite les OP et ceux qui les sou- agri-agence en appui aux OP. Agriterra intervient
Studies. Vol. , Number . tiennent dans leurs efforts de diversification. dans le tourisme rural depuis , convaincue que
Mais la faible participation des OP dans le tou- cette activité peut participer à la diversification des
Traduit de l’anglais par risme rural n’est pas simplement due aux OP elles- sources de revenus, à la réduction de la pauvreté et
Julia Schwarz. La version mêmes. D’une manière générale, l’appui direct aux au maintien des savoir-faire et héritages culturels
originale est en ligne. OP a longtemps été, et est encore, un aspect négligé locaux. Ü
Grain de sel 35
nº 46-47 — mars – août 2009
Initiatives
Û Dix organisations partenaires (en Amérique la- doit faire preuve d’un réel intérêt pour le tourisme et
tine, Asie et Afrique) ont actuellement développé avoir les capacités suffisantes pour le faire.
des projets d’agrotourisme, avec par exemple des
hébergements chez l’habitant, ou encore des excur- Des activités touristiques qui génèrent des reve-
sions dans les plantations de café ou de thé. Certaines nus pour les agriculteurs. Même si le tourisme peut
accueillent déjà des touristes, d’autres sont en cours contribuer au développement économique des zones
de mise en œuvre. rurales, il n’est pas non plus la solution miracle à la
Pour l’instant, Agriterra accompagne surtout les OP réduction de la pauvreté. Le tourisme rural semble
dans le développement des produits touristiques mais avoir un certain potentiel de développement, mais
peu dans leur intégration en amont dans le secteur la réussite des initiatives dépend de nombreux as-
touristique (fourniture de marchandises aux hôtels pects, tels que la qualité des produits, les compéten-
et restaurants). Les besoins en termes d’investisse- ces des organisations, le marketing et la localisation
ments, de formation et d’éducation sont en effet bien géographique.
moins importants, même si la mise en place de ce En outre, l’industrie du tourisme est de nature
type de liens est complexe. opportuniste, imprévisible et saisonnière ; le tou-
Le programme d’Agriterra se démarque par l’at- risme rural doit donc être appréhendé comme une
tention particulière qu’il porte aux organisations activité complémentaire des activités agricoles pour
paysannes et par son approche « entrepreneuriale », les producteurs. Pour devenir compétitives, les OP
que l’on retrouve à plusieurs niveaux. Premièrement, doivent relever le défi de développer des produits
avec l’intégration, dés le départ, des acteurs du tou- commercialement viables, appropriés et respectant
risme. Les tour-opérateurs peuvent ainsi participer les standards occidentaux. Elles ont pour cela be-
à l’identification d’un site ou encore au développe- soin d’accompagnement technique de la part de pro-
ment d’un produit. Ensuite, en mettant l’accent sur fessionnels du tourisme. De plus, la formation des
le plan d’action. Troisièmement, en insistant sur le personnes impliquées (guides, cuisiniers, gérants de
marketing, qui apparaît comme l’un des principaux chambres d’hôtes, etc.) sur les aspects de gestion et
défis. Enfin, lorsqu’un projet semble prometteur, les d’accueil est cruciale, mais fait bien souvent défaut,
paysans concernés doivent s’y investir et adopter une tout comme le marketing et la promotion des initia-
attitude « entrepreneuriale », c’est-à-dire prendre en tives touristiques.
compte les conditions économiques et profession-
nelles pour développer des activités pertinentes et Un autre défi est d’obtenir des informations sur le
peu risquées. retour sur investissements, car peu d’études « coûts
Une institution de microfinance, une banque ou bénéfices » ont été faites dans ce secteur. Comme les
une agence de crédit est de préférence impliquée. OP sont des acteurs relativement nouveaux dans le
Le tourisme étant en général méconnu par les pay- tourisme rural, il y a encore peu de connaissances sur
sans, des précautions importantes sont nécessaires le sujet. L’objectif d’Agriterra est donc de contribuer
en matière d’appui et de conseil, afin de prémunir les à capitaliser les expériences réussies de coopération
producteurs contre toute mauvaise expérience. Selon dans le tourisme par l’intégration des OP. §
Agriterra, pour se lancer dans un tel projet, une OP
36 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
Boîte à outils
Repères
La définition du Tarif extérieur commun
l’Uemoa et iii) la définition d’outils com-
plémentaires de protection, en tirant les
L
a été ménagée pour les États de la Ce-
Anne Wagner a décision d’étendre le Tarif Exté- niveaux de droits de douane s’échelon- deao non membres de l’Uemoa, en leur
(amjwagner rieur Commun (Tec) de l’Union éco- nant de 0 à 20 %, sont reprises, de même laissant la possibilité de demander des
@gmail.com) nomique monétaire ouest africain que les deux critères principaux utilisés changements de catégorie et donc de
(Uemoa) aux États membres de la Com- pour ventiler les différents produits dans droits de douane, pour un certain nom-
Anne munauté économique des États de l’Afri- ces quatre catégories (cf. encadré n¿ 1). bre de produits.
Wagner suit les que de l’Ouest (Cedeao B) a été prise par Et pourtant, après presque dix ans de L’idée était de permettre aux États de
négociations les Chefs d’États et de Gouvernements mise en œuvre du Tec de l’Uemoa, cette la Cedeao, qui appliquaient des taux de
commerciales de la Cedeao le 12 janvier 2006. logique a montré ses limites et le besoin droits de douane sensiblement différents
multilatérales La définition d’une protection tari- s’est fait sentir de revoir la protection de ceux prévus par le Tec de l’Uemoa, de
(OMC) et faire commune aux frontières de l’es- de certains secteurs stratégiques pour le mettre en place, pour leurs produits stra-
régionales pace Cedeao est une étape importante développement régional, en articulation tégiques, une politique tarifaire davan-
(APE, Tec de l’approfondissement du processus avec les politiques sectorielles telles que tage conforme à leurs réalités et priorités
Uemoa/Cedeao) d’intégration régionale en Afrique de l’Ecowap. Quelles sont donc les marges socio-économiques. Deux listes d’excep-
depuis plusieurs l’Ouest. La région dispose du potentiel de manœuvre ? tions ont été établies. Les exceptions de
années. Elle est de production lui permettant de nourrir Dans cette perspective, trois principaux « type A » concernaient des produits pour
actuellement sa population actuelle et d’assurer la sé- chantiers sont en cours: i) le changement lesquels les pays s’engageaient — à l’is-
conseiller curité d’approvisionnement d’une popu- de catégorie de certains produits, ii) l’ajout sue d’une période de transition de deux
technique au lation estimée à plus de 400 millions de d’une catégorie supérieure, ou 5¨ bande, ans C — à appliquer le tarif commun. Les
ministère du personnes en 2020. C’est le pari qu’elle a aux quatre catégories reprises du Tec de exceptions de « type B » concernaient les
Commerce du fait en adoptant en 2005 une politique produits qui feraient l’objet d’une négo-
Sénégal. agricole commune, l’Ecowap. ciation ultérieure sur le niveau des droits
Les analyses Pour atteindre cet objectif, le Tec doit Encadré n¿ 1 : de douane. Cette catégorie incluait des
développées ne contribuer à la création d’un environ- demandes de reclassement au sein des
représentent nement suffisamment stable et por- Les fondements du Tec quatre bandes tarifaires et des demandes
en aucun cas teur qui garantisse la rentabilité des de création d’un niveau de tarif supérieur
le point de investissements, notamment dans les de l’Uemoa au plafond de 20 %.
vue officiel secteurs agricoles et agro-alimentaires, Le riz et les produits de l’élevage per-
du ministère via des droits de douane suffisants, liés mettent d’illustrer la complexité et la dif-
du Commerce
du Sénégal ;
l’auteure
aux spécificités des différents produits
et à leur compétitivité. L’enjeu est de li-
miter les importations extrarégionales
L e Tec Uemoa, entré en vigueur en
2000, comporte quatre bandes, dont
les taux de droit de douane correspon-
ficulté de ces négociations. Aujourd’hui
taxé à 10 % (qu’il soit entier ou sous forme
de brisures), le riz continue de diviser :
en est seule de produits agroalimentaires, qui repré- dant sont de 0 %, 5 %, 10 % et 20 %. certains États, davantage sensibles aux
responsable. sentent encore aujourd’hui 85 à 90 % des Deux critères fondamentaux ont été enjeux de moyen terme de promotion de
importations de la région de ces mêmes utilisés pour le classement dans les dif- leur filière, demandent un réarmement
produits, et de développer les échanges férentes bandes : le niveau de transfor- tarifaire ; d’autres, plus réticents car da-
intra régionaux. mation et la nature sociale des diffé- vantage dépendants des importations ou
rents produits. En taxant davantage les sensibles aux intérêts à court terme de
Du Tec de l’Uemoa au Tec de la Cedeao. produits transformés, l’Uemoa souhaite leurs consommateurs urbains, plaident
Lors de son adoption, le Tec de la Cedeao encourager et protéger les activités de pour le statu quo ou demandent un dé-
était basé sur le Tec de l’Uemoa. Les mê- transformation et de création de valeur sarmement tarifaire pour un bien qu’ils
mes quatre « bandes » ou catégories de ajoutée dans l’espace communautaire. considèrent social par excellence. Parmi
produits, auxquelles correspondent des Par contre, si le produit est un bien social les produits de l’élevage, le reclassement
(médicaments, livres, etc.), il est exempt à la hausse de la poudre de lait, demandé
1. Les 15 États membres de la Cedeao sont : de droits de douanes. De même, les biens par certaines organisations profession-
le Bénin, le Burkina Faso, le Cap-Vert, la de première nécessité sont faiblement nelles d’éleveurs (OPE) continue de faire
Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana, la taxés, à l’image des matières premiè- débat (cf. encadré n¿ 2). Ü
Guinée, la Guinée-Bissau, le Liberia, le Mali, res de base qui servent d’intrants aux
le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la Sierra industries régionales, des biens d’équi-
Leone et le Togo. Parmi ces pays, 7 ne sont pement ou des produits de grande con-
pas membres de l’Uemoa, à savoir le Cap- sommation comme le lait en poudre ou
Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le les céréales (mil, sorgho, maïs). 2. Ces délais sont devenus caducs avec le
Liberia, le Nigeria et la Sierra Leone. retard pris dans la négociation.
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Boîte à outils
38 Grain de sel
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Boîte à outils
Kiosque
Nourrir le monde, vaincre la faim Exclusion des liens financiers. Microfinance pour
Sylvie Brunel l’agriculture des pays du Sud
Solène Morvant-Roux (sous la direction de)
Dans un livre destiné d’abord aux futurs profes-
seurs, l’auteure, géographe, aborde sans tabous Cet ouvrage fait suite à un colloque international
ni idées reçues les problèmes de l’alimentation « Quelle microfinance pour l’agriculture des pays
et de la population croissante de notre planète. en voie de développement », organisé en décem-
Elle rappelle que ce n’est que lorsque le monde bre 2007 à Paris par la fondation FARM. Grâce à
craint de manquer de nourriture qu’il se préoc- un très bon travail éditorial et à une sélection
cupe de l’agriculture vivrière. Dans les situations rigoureuse, les contributions ont été mises en
de paix, rares sont ceux qui se préoccupent des cohérence en trois parties, avec des introductions
malnutris. Pire, la légitime vague des préoccupa- stimulantes et 23 articles.
tions écologiques risque d’ancrer l’idée que les La première partie montre l’importance du
ressources sont trop limitées pour une planète financement de l’agriculture, sa spécificité, ses
surpeuplée alors qu’il est possible de nourrir risques et, souvent, l’inadéquation des produits
tout le monde. financiers offerts. Sont également fournies des
Au sommaire, des chapitres au titre évocateur indications sur les solutions apportées, avec des
comme « l’utilité politique des famines », « al- exemples indiens et maliens.
lons-nous mourir de faim ?», « peut-on vaincre La deuxième partie analyse certaines innova-
la faim en Afrique ? », etc. En conclusion, un livre tions (crédit, warrantage, assurance) et les im-
pédagogique et courageux, bien illustré. pacts de la microfinance agricole. Les résultats
Édition Larousse observés dépendent de la qualité des services et
285 pages, 25 euros du contexte socio-économique et politique.
ISBN : 978-2-03-584597-9 La dernière partie insiste sur la diversité des
acteurs impliqués et sur l’évolution des moda-
lités de leurs relations aux politiques publiques.
Après l’échec du tout État et du tout marché, il est
maintenant admis que le financement de l’agri-
culture requiert une forte intervention publique
qui, pour être efficace, doit s’inscrire dans le ca-
Souveraineté alimentaire. Refonder les politiques dre de politiques publiques élaborées de concert
agricoles avec les organisations paysannes.
Techniques financières et développement n¿ 94 C’est donc un ouvrage de synthèse et d’ouver-
ture sur les innovations en cours et à construire,
Pour son numéro de mars 2009, l’association Épar- fondé sur des études de cas d’Amérique latine,
gne sans frontière a choisi de traiter, à travers neuf d’Afrique et d’Asie. Un seul inconvénient, son
articles, le thème de la souveraineté alimentaire prix élevé.
et des politiques agricoles la favorisant. La mal- Édition Économica
nutrition d’un milliard de nos contemporains et 459 pages, 39 euros
la montée des risques de crise alimentaire nous ISBN : 978-2-7178-5725-2
obligent à nous interroger sur la capacité des
agricultures à nourrir la planète.
Les politiques agricoles devront mieux prendre
en compte que par le passé le défi de promouvoir
des agricultures devant être à la fois plus produc-
tives et plus respectueuses des ressources natu-
relles. À cet effet la revue aborde l’importance de
la sécurisation foncière et de l’amélioration de
l’accès au financement et aux marchés.
La prise de conscience que la nourriture n’est
pas une marchandise comme les autres est-elle
réelle ? Les discours changent, mais certains ta-
bous demeurent du fait de visions dogmatiques
de la libéralisation et de la dérégulation.
Publication de l’association
Épargne sans frontière-IGO
83 pages, 15 euros le numéro
ISBN : 1250-41
Grain de sel 39
nº 46-47 — mars – août 2009
Vie du réseau
40 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
Vie du réseau
L
de sont unanimes. Tout le monde reconnaît aussi Jean Claude Devèze ’A est la région du mon-
l’importance de l’agriculture familiale, car dans la (jc.deveze@free.fr) est de où la part de la population agricole est, en
majeure partie de l’Afrique, ce sont des familles qui membre fondateur proportion, la plus importante (près des deux
produisent. d’Inter-réseaux, tiers), mais où la ration alimentaire par personne est
Nous nous posons la question de savoir quelle de- secrétaire général la plus faible en calories ( kcalories/j/hab, alors
vra être l’agriculture africaine de demain. L’Afrique d’Inter-réseaux et que les pays de l’OCDE sont à kcalories/j/hab)
est un continent de petites agricultures familiales, directeur de la ainsi qu’en protides et en lipides. C’est aussi la région
attachées à produire une bonne partie de leur ali- publication de Grain de où la population devrait augmenter le plus fortement,
mentation, mais qui apportent aussi, dans une région sel. passant de millions en à , milliard en .
comme l’Afrique de l’Ouest, du PIB régional : Pour faire face à la fois à cette augmentation de po-
on ne peut donc pas les mettre au rebut… pulation et à une amélioration de la ration alimen-
Nous sommes également d’accord et fiers de four- taire à un niveau correct de kcalories/j/hab, la
nir nos régions en produits alimentaires, mais aussi production agricole devrait être triplée d’ici à .
d’exporter. Pour cela nous pensons que le marché Alors que les leaders paysans africains militent pour
ne s’écrit pas au singulier mais au pluriel. Exporter conquérir leur souveraineté alimentaire, des travaux
ne signifie par uniquement expédier des produits de prospective mettent en doute la capacité des agri-
vers l’Europe, les États-Unis ou la Chine : quand le cultures subsahariennes à mieux nourrir leur popu-
Sénégal envoie des produits au Ghana, c’est déjà de lation dans les prochaines décennies.
l’exportation. Nous pensons enfin qu’il y a en Afri- Ainsi deux scénarios ont été élaborés par la pros-
que d’importantes pistes de marchés à structurer : pective Agrimonde ¹, conduite par le Cirad et l’Inra.
les marchés doivent être construits avec des méca- Dans un premier scénario, la croissance économi-
nismes, des règles sur la circulation des produits, que est privilégiée aux dépens de l’environnement et,
leur qualité. Nous avons déjà fait des demandes à ce dans un deuxième scénario la recherche d’un déve-
sujet aux autorités. loppement durable (utilisation de moins d’engrais
Il est cependant difficile de trouver des accords à que dans le premier) et d’une diminution des per-
sur tous les sujets. Cela dit, il n’y a pas de réel- tes le long de la chaîne alimentaire de la récolte à la
les divergences entre les réseaux, mais plutôt des réa- consommation sont mises en avant.
lités et des intérêts différents. Dans les deux hypothèses, l’Afrique subsaharienne
Dans la construction continentale, nous sommes en serait en déficit alimentaire, mais de façon
dans un processus fondé sur la solidarité dans l’auto- plus importante dans le deuxième scénario.
nomie (principe de subsidiarité). À l’échelle continen- Par rapport aux autres régions du monde, l’Afrique
tale, il est évidemment impossible de traiter toutes subsaharienne, comme l’Amérique latine, se carac-
les questions : certaines relèvent du niveau local ou Hypothèses térise par des surfaces cultivables importantes en-
national, et il est important de respecter l’autonomie Agrimonde pour core disponibles et par des surfaces irriguées faibles. Ü
des pays, pour ne se focaliser que sur les questions l’Afrique au sud du
transversales concernant tous les pays, comme les Sahara . voir Kiosque du Grain de sel nº .
négociations à l’OMC, ou encore le taux élevé des
crédits, le coût de l’énergie, le transport, les infras-
tructures…
1er scénario 2e scénario
Si nous arrivons à nous battre ensemble pour ré- Afrique Sud Sahara Situation 2003
2050 2050
gler ces problèmes majeurs, le reste sera du détail.
Nos partenaires doivent aussi comprendre qu’il faut
qu’ils travaillent au renforcement de ces processus, Population 0,7 milliard 1,66 milliard 1,66 milliard
qu’aujourd’hui la structuration aux niveaux natio-
nal, régional et continental est un enjeu primordial
pour les paysans. § Surfaces cultivées (millions d’ha) 202 303 339
Grain de sel 41
nº 46-47 — mars – août 2009
Vie du réseau
Û Agrimonde estime, en , les surfaces cultivées en Dans cette région où le potentiel d’augmentation
Afrique subsaharienne à millions d’hectares et la de production est important, il s’agit de maîtriser
FAO évalue à la part des surfaces cultivées par l’utilisation d’une abondante énergie solaire, d’une
rapport aux surfaces cultivables ; une bonne part de eau à la disponibilité aléatoire et de sols souvent dif-
ces surfaces cultivables actuellement non cultivées ficiles à cultiver. Ce ne sont pas les solutions techni-
sont fragiles et doivent être protégées. Les rendements ques qui manquent, allant de l’emploi de plus d’en-
en équivalent blé, pour comparer les calories dispo- grais à la mise en place de nouveaux systèmes de
nibles par hectare, sont estimés à tonne en Afrique production agro écologiques ; ce sont les conditions
subsaharienne, soit trois fois moins que ceux des ré- de leur mise au point et de leur mise en œuvre qui
gions du monde les plus productives (ces dernières doivent être réunies.
étant souvent près d’atteindre un seuil difficile à dé- Comment appuyer les agricultures familiales sub-
passer sans remise en cause des équilibres d’écosys- sahariennes ? Comment promouvoir en leur sein le
tèmes déjà mis à mal dans trop de cas). capital humain disponible, sachant que celui-ci est
En Afrique subsaharienne, malgré des zones ex- actuellement gaspillé faute de mise à disposition de
cédentaires en produits vivriers et malgré le dyna- possibilités de formation et d’innovation, et d’un
misme des agricultures périurbaines, la balance com- environnement social, économique et réglemen-
merciale des produits agricoles pour l’alimentation taire favorable ?
est déficitaire pour des produits essentiels comme Ceci ne nécessite-t-il pas avant tout une volonté
les céréales, l’huile, le poisson, la viande d’animaux politique africaine forte, et pas seulement au niveau
à cycle court et le lait. Si la balance commerciale en- gouvernemental, pour promouvoir des politiques pu-
tre importations et exportations de produits agroa- bliques réellement concertées, nationales et régiona-
limentaires est légèrement excédentaire, cette région les ? Les priorités ne doivent-elles pas être choisies
s’adapte difficilement à la demande urbaine de pro- avec les organisations agricoles, mais aussi avec les
duits plus faciles à cuisiner et peine pour augmenter autres acteurs, dont les consommateurs urbains ? La
les échanges régionaux. « ténacité » ne doit-elle pas être le maître mot pour
La question qui est posée, après les émeutes de la permettre que les modalités mises au point avec les
faim de , est celle du risque de nouvelles crises acteurs concernés soient ensuite appliquées dans la
alimentaires et de l’augmentation de la part des afri- durée ?
cains mal nourris du fait de l’augmentation rapide Même en cas d’augmentation substantielle de la
de la population et de la stagnation de la production, production vivrière de l’Afrique subsaharienne, au vu
en particulier au niveau des rendements en céréales de la diversité des situations et des aléas multiples, les
et tubercules. Ceci est d’autant plus inquiétant que échanges agricoles seront toujours nécessaires entre
la crise économique en cours, les menaces de crise zones excédentaires et déficitaires régionales. L’enjeu
climatique, la dégradation de certains écosystèmes est la régulation de ces échanges en période de prix
surexploités et le manque d’intérêt de trop de respon- bas comme élevés ; ceci nécessite de mettre en place
sables politiques confortent actuellement les prévi- des mécanismes de stabilisation des prix, de stockage
sions pessimistes concernant l’Afrique subsaharienne. et de protection, à envisager à différentes échelles,
Comment sortir du pénible contraste entre les mul- mais en priorité au niveau régional.
tiples beaux discours sur la nécessité de promouvoir D’après tous les prévisionnistes, il est illusoire de
les agricultures africaines et la faiblesse des résultats compter sur de fortes augmentations des prix agri-
des actions engagées pour y parvenir ? coles en Afrique subsaharienne, vu la pauvreté des
populations urbaines, pour permettre aux agricul-
teurs familiaux d’investir sur leurs exploitations. Ceci
renvoie à la nécessité de transferts financiers en leur
faveur et d’investissements publics pour améliorer
leur environnement économique et social, à l’exem-
ple de ce qui a été fait et est encore fait dans le cadre
des pays de l’OCDE. Le débat porte sur la nature et
les montants de ces transferts, sur leur origine, sur
la maîtrise de leur mise en place, sur leurs conditions
et sur leur compatibilité avec les doctrines libérales
actuellement dominantes. Pour sortir de ces débats
par le haut, un rôle majeur revient aux responsables
africains qui doivent créer un climat de confiance
vis à vis de ceux qui les soutiennent financièrement,
mais aussi et surtout vis à vis de leurs mandants en
rendant crédible leurs politiques et leurs projets. §
© Patrick Delmas
42 Grain de sel
nº 46-47 — mars – août 2009
Vie du réseau
Forum Safir
(septembre
2009)
Grain de sel 43
nº 46-47 — mars – août 2009
on en parle… directeur
de la publication Jean-Claude Devèze
E
A , les paysans rencontrent des diffi- aux idées reçues ;
cultés pour vendre leurs produits agricoles et en tirer un revenu : ii) les commerçants ne sont
manque de débouchés, prix peu élevés et volatils, rapports de pas forcément des voleurs ; iii) transfor-
force défavorables… Pour autant, des paysans et leurs organisations mer, commercialiser et transporter sont de véri-
paysannes (OP) s’organisent et développent des initiatives riches et tables métiers, et les OP ne peuvent pas se substituer
variées pour améliorer les conditions de mise en marché, de négocia- facilement aux professionnels ; iv) il existe une gamme
tion, de transaction, et ainsi mieux vivre de leurs activités. de solutions possibles, collectives mais aussi individuel-
Un Groupe de travail animé par Inter-réseaux est reparti de ces les. Elle dégage enfin un certain nombre de convictions,
initiatives concrètes, trop peu connues. La construction de la réflexion de recommandations et de questions ouvertes quant aux
collective lors de ce processus s’est faite i) en choisissant certaines démarches d’appui aux dynamiques locales.
de ces initiatives, jugées intéressantes à analyser et à partager, ii) En définitive, un document d’une très grande richesse. Le
en créant des espaces et supports d’échanges (visites, fiches, bandes lecteur y trouvera une synthèse sur les différentes manières
sonores, vidéos, guides d’animation…) et iii) en discutant et com- d’améliorer l’accès au marché et une analyse critique des pro-
parant ces expériences lors d’ateliers et forums. cessus d’échange d’expériences et de leurs supports. La lecture
La première partie du document présente la démarche générale du du texte, assez dense, est facilitée par de nombreux dessins,
Groupe de travail qui a directement impliqué plus de personnes illustrations et encadrés. Il permet de dépasser les préjugés et
d’une cinquantaine d’organisations professionnelles et d’appui, dans simplifications pour aller vers des démarches d’analyse et de
une dizaine de pays africains (groupe particulièrement actif entre construction de solutions à adapter à chaque situation, en s’ap-
et grâce au CTA). puyant entre autres sur l’analyse de cas concrets, qui montrent
La seconde partie, cœur du document, est composée de fiches les intérêts mais aussi les limites et risques d’échec de certaines
présentant chacune un type d’action liée à la commercialisation : des « bonnes solutions » prêt à porter.
actions individuelles de paysans (bord champ ou dans les marchés Ce texte illustre bien l’originalité de l’approche d’Inter-réseaux :
de proximité) et des actions collectives menées par des OP, seules sur un sujet important, mener dans la durée une réflexion collective
ou en liens avec d’autres acteurs de la filière (au niveau de plates- à partir de cas concrets et en faisant interagir des acteurs d’horizons
formes de concertation, d’organisations interprofessionnelles et/ou divers (acteurs directs des actions de commercialisation, acteurs
avec l’État). Chaque fiche présente des principes, exemples, intérêts en appui...), grâce à un processus d’animation visant à dépasser les
et limites du type d’action analysé. cloisonnements et idées reçues, au Sud comme au Nord.
La dernière partie tire les enseignements du processus d’analyse
participative des initiatives locales. Elle souligne des facteurs d’échec Commandez gratuitement la version imprimée de ce livre en con-
ou de réussite des actions de commercialisation et apporte des élé- tactant Inter-réseaux soit par email (secretariat@inter-reseaux.org),
ments de réflexion sur la démarche et les outils. soit par téléphone (+ () ). Il est aussi possible de le
La conclusion retient notamment que : i) il faut rester prudent face télécharger : www.inter-reseaux.org
Grain de sel est diffusé par abonnement gratuit pour les ressortissants du Sud, et payant au Nord
(20 euros pour 4 numéros, chèque à l’ordre de Adeprina – Inter-réseaux). Pour vous abonner, envoyez
un courrier postal avec vos prénom, nom, adresse postale et adresse de courrier électronique à Inter-
réseaux, 32 rue Le Peletier, 75009 Paris ou un message à : secretariat@inter-reseaux.org