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28
septembre-décembre 2009 la revue d’
Inter-réseaux
Développement rural
Inter-réseaux
développement
rural
I nter-réseaux développement rural a
été créé en 1996, à l’initiative de per-
sonnes engagées dans le développement
pays francophones ;
– accompagner les acteurs du Sud (en
priorité ceux d’Afrique francophone)
propre pratique professionnelle face à
des enjeux nationaux et internationaux
complexes. Le travail en réseau, par une
rural, et des pouvoirs publics français. dans leurs efforts pour promouvoir leurs réflexion partagée et une large circulation
Ses objectifs sont les suivants : agricultures paysannes familiales dans de l’information, permet de construire
– permettre la participation des acteurs le contexte de la mondialisation. et de proposer des pratiques et des po-
du Sud à la construction des politiques Des convictions : Inter-réseaux est litiques de développement prenant en
agricoles nationales et sous-régionales, convaincu que faire connaître, compa- compte l’intérêt de ceux qu’elles concer-
en disposant de moyens de s’informer rer et discuter librement d’expériences nent le plus directement.
et d’échanger en réseau sur les enjeux multiples, rassembler à ce propos des per- Une particularité : Inter-réseaux réunit
du développement rural ; sonnes issues d’environnements profes- plus de 3 000 membres issus d’organisa-
– animer et renforcer un réseau de sionnels, géographiques et disciplinaires tions paysannes, d’ONG, de services pu-
réflexions, d’échanges, de débats et variés — mais ayant pour centre d’intérêt blics, du Sud et du Nord. Les activités d’In-
d’expériences entre acteurs du déve- commun le développement rural du Sud ter-réseaux s’appuient sur le dynamisme
loppement rural et agricole dans les — permettent à chacun d’améliorer sa et la participation de ses membres.
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Sommaire Éditorial
L’Afrique et la mécanisation :
un paradoxe et une nécessité?
L
Gros sel L’invité de Grain de sel : 4 dispose de condi-
tions physiques plutôt favorables à la mé-
Bassiaka Dao canisation de l’agriculture : vastes éten-
dues de terres cultivables, faibles contraintes
Forum Riz Quels outils de régulation 5 topographiques. A priori les obstacles naturels
à son développement ne sont donc pas majeurs
Sénégal pour relancer la si ce n’est la vulnérabilité des sols tropicaux à
riziculture au Sénégal ? des interventions mécaniques inappropriées.
Or en dépit de ces conditions la mécanisation
y est encore peu développée.
Régulation du La régulation du marché de 7 Pourtant, de nombreuses tentatives d’in-
marché l’oignon au Sénégal troduction de la mécanisation-motorisation
ont été faites en Afrique subsaharienne. La
coopération française a pendant de longues
Initiatives Commercialisation La vente groupée de soja, 9 années tenté, sans grand succès, d’adapter la
un moyen pour mieux motorisation aux exploitations familiales afri-
vendre ? caines ; tandis qu’un certain nombre de pays,
ayant opté après leur indépendance pour la
voie socialiste, ont fait de la mécanisation de
Le dossier Mécanisation et 11 l’agriculture un moyen privilégié de transfor-
motorisation agricole en mation des structures agraires qui s’est, lui
aussi, soldé par un échec.
Afrique : entre mythe et Des travaux de recherche se sont efforcés
réalités d’analyser les causes de ces échecs et en parti-
culier les contraintes d’ordre environnemental
et social qui freinent le développement de la
Initiatives Innovation Quand un technicien 31 mécanisation - motorisation de l’agriculture
paysanne du cacao relaie les dans les pays africains. Ils ont montré l’im-
innovations paysannes pact négatif que peut avoir en milieu tropical
l’usage du tracteur sur la compaction des sols,
induisant de fortes pertes de fertilité. D’autre
Boîte à outils Repères : Évaluer la 33 part, il a été souvent évoqué le risque de voir
productivité de la mécanisation de l’agriculture entraîner une
augmentation du chômage en milieu rural
l’agriculture familiale : et de l’exode vers les villes. L’expérience de
aiguisons nos outils de certains pays (Inde, Maroc) montre que cet
mesure… effet n’est pas systématique. La main d’œuvre
rendue disponible par la mécanisation peut
développer de nouvelles activités et le recours
Vie du réseau Le président du 36 à des prestataires de service pour les travaux
Roppa s’exprime mécanisés n’exclut pas les petites exploitations
des bénéfices de la mécanisation.
sur la mécanisation- Il est important de replacer le débat sur
motorisation la mécanisation dans le contexte actuel des
pays africains. Il y a ans, un paysan afri-
cain devait nourrir en moyenne deux per-
Commerce du bétail en 37 sonnes ; désormais, la modification très ra-
Afrique de l’Ouest, atouts pide du rapport entre population rurale et
et défis pour les éleveurs population urbaine nécessite, si l’on vise si-
non l’autosuffisance du moins une certaine
sécurité alimentaire, que ce même paysan
Projet Réseau Paar,les 39 puisse nourrir à personnes. Pour ce faire
choses avancent! il est nécessaire d’augmenter la productivité
du travail des paysans africains. Cela n’est
Inter-réseaux en Tanzanie guère possible tant que l’agriculture restera
majoritairement manuelle. Le développement
de la mécanisation de l’agriculture apparaît
donc comme une condition indispensable pour
nourrir les populations africaines.
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Gros
Forumsel
sans
commentaire… Une image Une parole Un chiffre
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Forum
L
Pierre Baris est docteur non parfumé importé FCFA et la colère gronde dans la vallée du fleuve
en économie et consultant vient de tomber en octobre à FCFA/ pendant la campagne de contre saison .
indépendant. Il est kg à Dakar, ainsi que dans plusieurs villes du
spécialisé dans les Sénégal. S’il s’agit d’une bonne nouvelle pour le con- Comment contenter producteurs et consomma-
politiques agricoles, sommateur, ce n’est pas le cas pour le producteur teurs ? Cette décision est délicate et nécessite des
l’analyse économique des sénégalais qui voit le prix de son paddy chuter à calculs. Selon une étude récente ¹, un prix « incitatif »
filières et l’intégration FCFA/kg alors qu’il était à FCFA la campagne du paddy à FCFA/kg permettrait de poursuivre
régionale. En juillet , précédente. Il faut savoir en effet qu’au Sénégal, le la relance de la production. Par contre en dessous du
il a conduit une étude sur prix du riz importé conditionne celui du riz local et prix plancher de FCFA/kg, certains producteurs
la compétitivité du riz de la en conséquence celui du paddy. C’est la première fois se détourneront de la double culture et n’investiront
vallée du fleuve Sénégal sur que l’on tombe à un niveau de prix du paddy aussi bas pas dans l’extension des surfaces cultivées. Or, on est
les marches nationaux et depuis le lancement de la Grande offensive agricole déjà aujourd’hui en dessous de ce seuil ! Pour assurer
régionaux (étude financée pour la nourriture et l’abondance (Goana) en , cette fourchette de prix au producteur, le prix du riz
par l’Agence française de qui prévoit l’autosuffisance en riz pour l’horizon importé devrait se situer entre et FCFA/kg
développement). , avec un objectif de production de , millions sur le marché de Dakar. Il a chuté en octobre
de tonnes de riz paddy. à FCFA/kg !
Que faire ? La protection du marché est un enjeu
Une année 2008 exceptionnelle. Peut-on viser central. Rappelons que l’abaissement du niveau de
l’autosuffisance et laisser les prix du paddy chuter en protection du riz à , suite à la mise en place du
dessous de FCFA/kg ? Revenons à , année de Tarif extérieur commun (Tec²) au sein de l’Union éco-
tous les dangers. Le prix du riz triple sur le marché nomique et monétaire ouest africaine (UEMOA) en
international, le dollar fluctue fortement, le prix du , a fortement favorisé au Sénégal l’augmentation
riz importé grimpe sur le marché de Dakar jusqu’à des importations et la dépendance alimentaire qui dé-
FCFA/kg, les consommateurs sont dans la rue. passe aujourd’hui . Le Sénégal, à l’instar d’autres
Le gouvernement gère au mieux la flambée des prix pays d’Afrique de l’Ouest, a vécu dramatiquement les
en suspendant les droits de douanes, puis en sub- conséquences de cette dépendance pendant la crise
ventionnant le riz importé et en évitant la pénurie de . Il s’agit aujourd’hui dans le cadre des négo-
sur le marché. Pour le riziculteur sénégalais, avec un ciations UEMOA/Cedeao sur le Tec et le Mécanisme
prix du paddy qui atteint FCFA/kg suite à l’aug- de sauvegarde communautaire (MSC) ³ de définir une
mentation du prix du riz importé, l’année est politique de protection douanière efficace et équita-
une aubaine. Après des années de stagnation de la ble pour les différents pays de la zone. Le passage des
production, les effets conjugués de l’augmentation droits de douane du riz importé du niveau actuel de
des prix du paddy, des interventions de la Goana et à voire ( bande) est en cours de né-
d’une bonne pluviométrie, ont entraîné une pro- gociation. Ce changement de protection, s’il a lieu,
duction record de plus de tonnes pour l’en- aura de fortes conséquences sur la compétitivité du
semble du pays et une augmentation spectaculaire riz local mais aussi sur le prix au consommateur. Ici
de de la production dans la vallée du fleuve aussi des calculs s’imposent. Sur la base des prix en
Sénégal. Le producteur sénégalais a donc répondu octobre , les simulations montrent que :
à l’augmentation du prix du paddy en investissant – Le passage à la bande (droit de douane de )
dans la double culture et la réhabilitation des amé- entraînerait une augmentation des prix du riz au
nagements abandonnés. Pour la première fois le riz détail à Dakar de (soit FCFA/kg). Si le dif-
de la Vallée se vend significativement sur le marché férentiel de prix entre le riz importé et le riz local
de Dakar à des prix équivalents à ceux du riz im- reste le même, ce qui est probable, le prix du paddy Ü
porté. La crise a démontré que la relance de la rizi-
culture était donc possible au Sénégal pour un prix . Compétitivité du riz de la Vallée du Fleuve Sénégal sur le
attractif du paddy. marché national et régional. P. Baris, N. Gergely. AFD, octobre
Cette relance sera-t-elle sans lendemain suite au .
retournement du prix du paddy ? En effet, en tout . Cf. Repère du GDS -.
s’inverse. Le prix international du riz baisse fortement, . La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest
le dollar perd de sa valeur, et à Dakar le prix du (Cedeao) a décidé de se doter d’un mécanisme de sauvegarde
riz retombe pas loin de son niveau d’avant la crise. communautaire (MSC), qui s’inspirera du mécanisme de
En conséquence le prix du paddy passe en dessous de sauvegarde spécial (MSS) actuellement en discussion à l’OMC.
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Forum
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Idrissa Wade est ’ des cultures d’oignon, soit environ de ses besoins intérieurs.
enseignant chercheur à maraîchères au Sénégal, avec une superficie de Des importations qui posaient il y a quelques années
l’École nationale près de ha en . La production locale de sérieux problèmes aux producteurs.
supérieure d’agriculture de provient essentiellement de deux zones : des Niayes,
iès (Université de iès). bande côtière s’étendant de Dakar à Saint-Louis, et de La concurrence de l’oignon importé. L’approvi-
Oumar Samba Ndiaye est la Vallée du fleuve Sénégal. Malgré sa forte augmen- sionnement des marchés sénégalais connaît deux
directeur d’exploitation à tation, la production locale d’oignon ne couvre pas périodes annuelles d’abondance en oignon. La
l’Agence de régulation des l’intégralité de la demande du fait de la saisonnalité première va de mars à mai avec la présence sur les
marchés (ARM). de la récolte et de la nature du produit qui ne per- marchés d’oignons provenant à la fois des Niayes et
met pas une longue conservation. Le Sénégal importe de la Vallée. La seconde va de juillet à septembre et
donc chaque année entre et tonnes coïncide avec la deuxième période de récolte dans
la majeure partie de la zone des Niayes. Durant ces
deux périodes, la présence concomitante d’oignon
L’Agence de régulation des importé et local sur les marchés entraînait chaque
année une forte baisse des prix. En effet le calen-
marchés (ARM) drier de l’entrée des importations posait problème
à l’écoulement de l’oignon local : les importations
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Initiatives
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Lionel Guézodjé est Z, au centre du avec des retards. Dans la vague de restructuration
agriculteur dans la Bénin, l’Union communale des producteurs au sein du réseau Fupro ¹, l’UCPZ s’est engagée dans
commune de Zogbodomè de Zogbodomè (UCPZ) a entrepris depuis un processus de diversification des productions et
au Bénin, président de un processus de mise en marché collective de d’offres de services économiques à ses membres.
l’Union communale des produits agricoles. L’union a ciblé le soja dans cette Ainsi elle a identifié plusieurs contraintes dans la
producteurs de Zogbodomè démarche en raison de deux importants marchés filière soja locale :
(UCPZ) et secrétaire potentiels d’écoulement de ce produit : deux indus- – Un approvisionnement difficile en semences au mo-
général de la Fédération tries de production d’huiles végétales (à Zogbodomè ment opportun : pour se procurer des semences de
des unions de producteurs et dans la commune voisine de Bohicon) ayant une soja, les producteurs sont parfois obligés de parcou-
du Bénin (Fupro). capacité totale de transformation d’environ rir de longues distances. Ces déplacements, parfois
de tonnes par an, et des femmes transformatrices de infructueux, rendent difficiles les planifications des
soja en fromages et autres produits dérivés. producteurs et obligent à des semis tardifs, ce qui
La première opération de mise en marché collec- provoque des baisses de rendement ;
tive, menée en -, n’a pas été une réussite : – Une faible disponibilité des semences de qualité : les
sur la base d’un objectif contractuel de tonnes semences livrées et achetées ne sont pas toujours
à livrer à un industriel, l’UCPZ n’a pu livrer que certifiées et produites par des spécialistes. Il s’agit
tonnes. En effet, les producteurs n’ont pas respecté parfois de réserves sur des productions ordinai-
leurs engagements car beaucoup étaient contraints res : il s’ensuit de faibles taux de germination, une
de rembourser en nature les usuriers et collecteurs de maîtrise difficile du cycle de la variété et des ren-
produits agricoles qui avaient préfinancé leur campa- dements faibles ;
gne. Pour lever cette contrainte, l’UCPZ a décidé de – Une mise en marché du produit « hasardeuse » : la
pré-financer partiellement ses producteurs à travers plupart des producteurs de soja ont des difficultés
des crédits intrants pour la campagne -, à trouver des acheteurs offrant des prix suffisam-
ainsi que des crédits pour les frais de campagne en ment rémunérateurs, ou utilisent une grande partie
-. Cette action a permis d’augmenter de fa- de leur production pour rembourser les crédits de
çon substantielle la quantité de soja vendue via l’or- campagne qui leur sont octroyés par des usuriers.
ganisation, à la grande satisfaction du client. Ces crédits sont parfois remboursés à des taux d’in-
térêt de , du fait des techniques de rembourse-
Des contraintes au niveau des semences et de ment en nature pratiquées. Le soja est cédé au prix
la mise en marché du soja. À Zogbodomè, le co- le plus bas de la campagne, sans aucune marge de
ton occupait il y a quelques années une place très négociation possible de la part des producteurs.
importante. Mais aujourd’hui le contexte n’est plus
favorable à cette culture : les prix s’effondrent sur Les stratégies mises en œuvre par l’UCPZ. L’UCPZ
le marché international, les producteurs sont payés a mis en place un certain nombre de stratégies pour
tenter de partiellement libérer ses membres de l’em-
prise des usuriers et des collecteurs. C’est ainsi que,
grâce aux appuis du Programme d’appui à la diver-
sification des filières agricoles (PADFA) et du Cen-
tre communal pour la promotion agricole (CeCPA),
l’UCPZ a sélectionné producteurs pour produire
localement des semences de soja, et ainsi réduire la
dépendance de la Commune de Zogbodomè vis-à-vis
de l’extérieur pour l’approvisionnement en semences
© Peasant Farmers Association of Ghana
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Initiatives
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Inter-réseaux
Développement rural
C
’ , il y a une part de
mythe et d’idéologie qui accompa-
gne l’exaltation de la motorisation agri-
cole par les autorités politiques d’Afrique subsaharienne.
Mais au-delà de ce constat, la volonté de mécaniser n’est-elle pas égale-
ment le reflet d’un choix stratégique de « moderniser » l’agriculture africaine ?
Un choix implicite d’une transformation en profondeur de l’agriculture, qui va ten-
dre de la petite agriculture familiale vers une agriculture industrielle et commerciale ?
De ce point de vue, une série de questions émergent. Dans quelle mesure la mécanisation
et la motorisation sont-elles conciliables avec une petite agriculture familiale sur de faibles
surfaces et avec une main d’œuvre familiale ? Le discours sur la mécanisation n’est-il pas un
argument pour promouvoir une agriculture, souvent appelée agrobusiness, caractérisée par de
très grandes superficies, fortement motorisée, utilisant une main d’œuvre salariale qualifiée ? Le
mythe de la mécanisation peut être perçu sous cet angle comme le contre-pied d’une perception
que certains ont de notre agriculture ouest-africaine, qu’ils caractérisent par des exploitations
familiales incapables de se moderniser et de nourrir les populations croissantes.
Pourtant, la mécanisation peut aussi être perçue comme étant une voie de transformation et
de modernisation des exploitations familiales. Des analystes raisonnent sur la mécanisation
des exploitations en termes de trajectoires, le parcellaire s’adaptant en fonction du niveau
de mécanisation. En somme, il se pose la question du choix entre le laisser faire, l’inten-
sification écologique des agricultures familiales, et/ou l’encouragement des investis-
sements vers les agro entreprises.
Daouda Diagne
L
Marcel Mazoyer active du travail ne dépassant pas une tonne dans les pays développés et dans quel-
est ingénieur du monde, qui s’élève à milliard d’équivalent-céréales par actif. À la ques secteurs limités des pays en déve-
agronome, millions de personnes, soit même époque, les systèmes de culture loppement. En quelques décennies, on
ingénieur des eaux environ de la population active attelée lourde sans jachère en Europe, est ainsi passé à des superficies pouvant
et forêts, et du monde, ne dispose en tout et pour ainsi que les systèmes hydrorizicoles aller jusqu’à hectares par actif en
professeur émérite tout que de millions d’animaux de de culture attelée de certains deltas grande culture céréalière, et des ren-
à AgroParisTech. travail, soit environ du nombre d’Asie, permettaient d’obtenir une pro- dements pouvant atteindre plus de
Laurence des actifs agricoles, et de millions ductivité brute de l’ordre de tonnes tonnes par hectare. En conséquence,
Roudart est de tracteurs, soit d’entre eux. La par actif. Les agricultures du monde la productivité brute du travail peut
ingénieur très grande majorité des agriculteurs s’inscrivaient donc dans un écart de aujourd’hui, dans les régions les plus
agronome, du monde continue donc de travailler productivité de l’ordre de à . favorisées, atteindre t/actif.
docteur de à la main, en particulier en Afrique Dès la fin du siècle, l’industrie Mais la situation de l’agriculture
l’Institut national subsaharienne. En effet dans cette ré- commença à produire de nouveaux mondiale est violemment contrastée :
agronomique gion, il n’y aurait par exemple qu’un matériels mécaniques à traction ani- seuls quelques millions d’agriculteurs
Paris-Grignon, et peu plus de tracteurs. male qui furent adoptés par les fermes ont été touchés par cette révolution
professeur de bien dimensionnées dans les colonies agricole. Parmi les agriculteurs non
développement Origine du fossé croissant entre agri- agricoles d’origine européenne et, plus motorisés, deux tiers environ ont été
agricole à cultures : le triomphe de la révolution lentement, en Europe. Les exploitations touchés par la révolution verte, dans
l’Université Libre agricole dans les pays développés et les mieux équipées atteignirent ainsi les régions favorables des pays en déve-
de Bruxelles. dans certains secteurs des pays en une productivité brute du travail de loppement, et produisent entre et
Ils sont auteurs développement. Au milieu du quelque t/actif. tonnes de grain par travailleur, selon
du livre « Histoire siècle, la plupart des paysans du mon- Au siècle, la révolution agricole qu’ils bénéficient ou non de la traction
des agricultures de pratiquait une agriculture stricte- contemporaine stricto sensu (motori- animale. Il reste à peu près un tiers des
du monde. Du ment manuelle (houe, bêche, hache, sation, grande mécanisation, sélection, agriculteurs du monde privés de se-
néolithique à nos machette, etc.), avec une productivité chimisation, spécialisation) a triomphé mences sélectionnées, d’engrais et qui
jours » (éditions disposent uniquement d’un outillage
du Seuil). manuel de culture sommaire utilisé
�������� �� ����� �������� ��� ������������ ��� sur de faibles surfaces. Cette agri-
���� culture paysanne pauvre, orpheline
de toute recherche et de tout projet,
���������������� � � compte encore presque la moitié de
��������� �� ���� �� ��� �� la population agricole mondiale, soit
milliard millions de personnes
������� ��������
(actifs agricoles et leurs familles) vivant
Les étapes du ������� ������� ������ mal ou très mal de l’agriculture et ne
développement pouvant guère dépasser une produc-
de l’outillage ������� ������� ������ tivité brute d’une tonne de grain par
et de la moto- ���� travailleur et par an.
mécanisation ������� ������� ��������� L’écart de productivité du travail
en culture ���������������� �� �
entre l’agriculture manuelle non chimi-
céréalière ��������� �� �� � ��� �� sée et l’agriculture la plus lourdement
motorisée et chimisée du monde est
���������������� ��� � aujourd’hui de l’ordre de à en
��������� �� �� � �� �� productivité brute. Dans ce contexte
où l’Afrique subsaharienne n’a béné-
���������������� �� � ficié ni de la révolution agricole con-
��������� �� �� � �� ��
temporaine ni de la révolution verte
���������������� � � et dont l’agriculture reste principale-
�� ��������� �� ����� �� �� ��
� ment manuelle, il reste à s’interroger
�
� sur les voies possibles pour combiner
� � � �� �� �� ��� ��� au mieux les divers progrès agricoles
���������� ��� ����������� ���� possibles. §
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Des réalités contrastées LeForum
dossier
A
Valentin possibilité d’accès à des crédits rem- traction animale est dominante. Elle
Beauval est un du travail des agricultures fa- boursables sur à ans ont favorisé a permis une nette augmentation de la
agronome ayant miliales des pays en dévelop- cette évolution. D’autres paysans ont productivité du travail, surtout dans les
travaillé ans pement est une absolue nécessité. Plu- choisi de conserver la traction animale zones équipées de semoirs polyvalents,
au Nicaragua, en sieurs raisons à cela : pour permettre en nourrissant leurs animaux grâce d’outils à dents pour les désherbages,
Algérie, au de mieux nourrir les populations de ces aux pailles de riz et à des cultures et de charrettes pour les transports.
Cameroun et au pays, pour produire des denrées plus fourragères sur les collines. Ces deux dernières décennies, la quasi
Sénégal sur des compétitives, et pour freiner l’exode absence de crédits d’équipements a
questions de rural des jeunes de moins en moins D’autres facteurs influencent des malheureusement handicapé le dé-
développement motivés par les agricultures manuel- choix différenciés de mécanisation. veloppement de ces formes de trac-
intégré, les. Or, dans les pays d’Afrique, face Dans les zones soudano-guinéennes, tion animale qui, dans ce contexte
animation, à des situations très diversifiées, il ne où la saison des pluies dure plus de pédoclimatique, ont largement fait
formations peut exister de solution unique en mois, la trypanosomiase freine tou- leurs preuves en termes d’efficience
rurales et matière de traction animale, de mo- jours l’extension de l’élevage de zébus économique et de durabilité envi-
expérimentations torisation et bien entendu de mode et les taurins résistants à la maladie ronnementale.
agronomiques de production. n’ont pas le gabarit suffisant pour ef- Dans les zones sahéliennes du Bur-
en milieu réel. fectuer des travaux lourds. De plus, kina Faso et du Mali, la technique du
Depuis , il Des stratégies de mécanisation di- dans ces zones, des éléments clés des zaï s’est fortement développée de
est agriculteur verses et adaptées. Dans le delta et systèmes de production comme les pair avec la confection de diguettes
en Anjou une partie de la moyenne vallée du gros tubercules (igname, manioc), la et de cordons pierreux. Cela a permis
(France) et a fleuve Sénégal, la traction animale n’a fréquence des vergers ou la présence d’augmenter la productivité du sol ou
réalisé, pas pu se développer pour les opéra- de nombreux arbres utiles dans les au moins d’enrayer son déclin. Mal-
parallèlement tions culturales car les terres sont très parcelles complexifient l’introduction heureusement ces techniques sont très
aux travaux de argileuses et l’aridité du climat rend de la traction animale ou du tracteur exigeantes en temps de travail et des
sa ferme, une difficile l’alimentation des animaux qui permettrait d’accroître la produc- agronomes testent avec des paysans
centaine de de trait hors des casiers rizicoles. La tivité du travail. Les programmes vi- des formes mécanisées de zaï plus
missions d’appui production de fourrages dans ces ca- sant à développer la traction animale économique en travail.
à des projets de siers a été testée, mais a été jugée trop se sont par exemple heurtés au coût
développement coûteuse par les paysans. La motori- de « dessouchage » des parcelles. Dans Quelles solutions sont proposées
rural en Afrique sation a donc été promue même si elle ces zones, des techniques de mise en aujourd’hui aux agriculteurs afri-
de l’Ouest, au a accru les coûts de production déjà place de cultures annuelles sur couver- cains ? Les expériences de motorisa-
Maghreb et en pénalisés par la nécessité de pompage ture végétale sont en cours de test et tion avec introduction de tracteurs en
Amérique latine. de l’eau. peuvent, en complément de certaines Afrique subsaharienne ont eu par le
Nathalie Par contre, au Mali, dans les casiers pratiques paysannes, constituer une passé, et encore aujourd’hui, des résul-
Boquien est rizicoles de l’Office du Niger, la trac- solution pour améliorer la productivité tats mitigés. Plusieurs États africains
animatrice tion animale domine car les terres de certaines cultures annuelles. incitent actuellement à la motorisation
réseaux au sein sont moins argileuses et les paysans Dans les zones guinéennes d’al- (programme Team en partenariat
du secrétariat parviennent encore à nourrir les ani- titude, souvent fortement arrosées, avec l’Inde), mais ces programmes sont
exécutif d’Inter- maux dans les espaces pastoraux lors l’agriculture est principalement ma- souvent mis en œuvre sans réflexion
réseaux des périodes de végétation du riz. nuelle vu la dominance des cultures suffisante.
Développement Au lac Alaotra, à Madagascar, les associées (arbres et arbustes très utiles Or, si le tracteur accroît la productivité
rural. terres sont souvent argileuses mais les sur les plans économique et alimen- du travail pour certaines activités im-
paysans ont depuis longtemps résolu taire), des pentes parfois excessives, portantes (labour, transport), lorsque
cette difficulté en attelant deux pai- etc. Ces agricultures ont généralement les autres activités comme le semis, le
res de zébus à la charrue. Par contre, une productivité à l’hectare impor- désherbage ou la récolte restent ma-
la disponibilité en pâturages naturels tante mais la productivité du travail nuelles, la productivité globale est au
s’est progressivement réduite et, le coût reste faible et n’a pas beaucoup évolué final peu améliorée.
de production de fourrages dans les jusqu’à présent pour la majorité des Les impacts environnementaux sont
casiers ayant été jugé excessif, de plus cultures annuelles. par ailleurs souvent négatifs, que ce
en plus de paysans optent pour les mo- Par contre, dans les zones souda- soit sur la matière organique des sols,
toculteurs. Le faible coût de ceux-ci, le niennes d’Afrique et, en particulier les l’érosion, ou encore la difficulté de pré-
prix assez attractif du riz ainsi que la zones cotonnières ou arachidières, la server les arbres utiles (karité, néré, Ü
Grain de sel 13
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LeForum
dossier Des réalités contrastées
Le zaï
14 Grain de sel
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Des réalités contrastées LeForum
dossier
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Michel Havard A subsaharienne, la Une nouvelle dynamique pour la trac- et difficiles à réaliser. Elle passe par
a travaillé au traction animale a été intro- tion animale depuis les années 90. l’acquisition puis progressivement
Centre de duite dans les années , afin Malgré le désengagement progressif par la maîtrise technique d’animaux
coopération de développer les cultures industriel- de l’État et le démantèlement des ser- et d’équipements souvent coûteux. En-
internationale en les administrées (coton et arachide), vices para-étatiques d’appui à la trac- suite, pour réussir son intégration au
recherche destinées à satisfaire les demandes des tion animale, les taux d’équipement se sein des exploitations, de nombreux
agronomique huileries et filatures des pays du Nord. sont maintenus et le développement changements sont nécessaires : aug-
pour le Cette mécanisation des exploitations de la traction animale s’est poursuivi mentation si possible des superficies,
développement agricoles, possible grâce à la présence en s’appuyant sur un système de ser- modification des assolements et de
(Cirad) comme d’un cheptel bovin important, visait à vices recomposés. l’organisation du travail, apparition
spécialiste de la augmenter la productivité du travail Les services matériels (réparation de nouvelles activités (gestion des
mécanisation et à favoriser l’essor économique des et entretien des équipements, vente animaux de trait, prestations de ser-
agricole. Il est exploitations. d’animaux, approvisionnement en ma- vice, etc.).
depuis en Entre et , l’adoption de la tériels agricoles, etc.) ont été en grande Acquérir un attelage et des équipe-
poste à l’Institut traction animale fût lente et irrégulière, partie repris par des privés (forgerons, ments demeure une priorité pour de
de recherche alternant phases d’essor et de recul liées vendeurs d’animaux, petites et moyen- nombreux paysans, mais les crédits
agricole pour le entre autres aux conditions proposées nes entreprises). Dans de nombreux d’équipement des sociétés de dévelop-
développement par les services d’appui (crédits, taux pays, l’arrêt des programmes d’appui pement se réduisent, même si tous les
(Irad) au d’intérêt, etc.), aux conditions clima- à l’agriculture a mis en difficulté les pays n’en sont pas au même stade. Au
Cameroun. tiques et aux problèmes de maîtrise de usines de fabrication de matériels agri- Cameroun, il existe encore des crédits
Philippe la santé des animaux. coles de traction animale. L’artisanat d’équipement en traction animale par
Lhoste est Finalement, les paysans choisirent forgeron s’est fortement développé pour la Société de développement du coton
zootechnicien la traction animale pour la rapidité l’entretien et la maintenance des ma- (Sodecoton), alors que dans d’autres
tropicaliste. Il a d’exécution des opérations culturales tériels agricoles de traction animale, pays, ce type de crédits a disparu. La
été chercheur à (labour et semis en particulier) qui leur mais aussi pour la fabrication de cer- pression démographique constante sur
l’Orstom puis au permettait d’augmenter les surfaces tains équipements. Aujourd’hui, les la terre rend par ailleurs plus difficile
Cirad où il a cultivées. Entre le début des années artisans forgerons couvrent l’essen- l’augmentation des superficies des
développé les et la fin des années , la diffusion et tiel de la demande en charrues, sar- exploitations agricoles permettant
approches le financement de la traction animale, cleurs et charrettes ainsi qu’en pièces de rentabiliser la traction animale.
systémiques des le choix des matériels agricoles, leur de rechange. Les produits artisanaux Les trajectoires d’équipements et les
élevages distribution, la formation des artisans fabriqués avec des matériaux de récu- stratégies des agriculteurs pour accéder
tropicaux. et des paysans ainsi que les actions de pération sont souvent de qualité moin- à la traction animale, puis pour con-
Éric Vall est vulgarisation technique étaient sous le dre que les produits industriels, mais server le niveau d’équipement atteint,
zootechnicien et contrôle des sociétés de développement ils ont l’avantage d’être disponibles sont diverses.
a effectué des agricole liées au coton ou à l’arachide. sur les marchés locaux et beaucoup Dans le Bassin Arachidier du Sénégal,
recherches sur la Ces programmes d’appui des socié- moins chers. le taux d’équipement des exploitations
traction animale tés cotonnières et les prix favorables En revanche, les activités de for- est d’environ depuis ans, ce
en Afrique du coton et de l’arachide ont permis mation, d’appui-conseil et les servi- qui signifie que des exploitations
Centrale. Depuis l’augmentation importante du nombre ces financiers et vétérinaires dans ce agricoles possèdent au moins un ani-
, il d’attelages qui a été multiplié par dans secteur ont des difficultés à se péren- mal de trait (cheval, âne ou bœuf) et
développe des le bassin arachidier du Sénégal, par niser : les paysans ont des problèmes au moins un équipement de base (se-
recherches sur au Nord-Cameroun et par dans le pour effectuer les suivis vétérinaires et moir, houe). Les seules évolutions ont
les dynamiques sud du Tchad. En parallèle les travaux zootechniques des attelages et surtout été les acquisitions d’attelages par les
des systèmes de la recherche agricole portaient sur pour financer leurs équipements. nouvelles exploitations créées et le
d’élevage au les outils (plus de ont été testés au remplacement des animaux de trait
Centre Sénégal, ont été proposés à la vul- Des stratégies diverses pour l’accès dans les autres.
international de garisation et une dizaine ont eu une aux attelages : les cas du bassin ara- La majorité des paysans achètent
recherche- diffusion significative), les attelages, la chidier du Sénégal et du Nord Ca- les animaux et les équipements. Ce-
développement mise au point de systèmes de culture meroun. L’appropriation de la traction pendant, le confiage d’animaux et la
sur l’élevage en mécanisés et l’élaboration du concept animale par les agriculteurs nécessite location des attelages se sont intensifiés
zone subhumide de système mixte de production asso- des transformations importantes de entre les exploitations. Des agriculteurs
(Cirdes). ciant l’agriculture et l’élevage. leurs exploitations, souvent longues propriétaires d’animaux les confient à Ü
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A
Pierre Girard ’ , la par la Compagnie malienne de dé- Augmentation du rendement et
est agro- promotion de la motorisation veloppement des textiles (CMDT). Ces fertilité des sols. L’augmentation
économiste. Il agricole prend de l’ampleur au exploitations motorisées sont pour la des superficies cultivées étant limitée,
est actuellement Mali avec la vente à crédit par l’État plupart tenues par les familles fonda- l’accroissement du produit brut des ex-
chef de projets de tracteurs au « monde paysan » trices des villages qui contrôlent une ploitations motorisées doit passer par
vivriers à la et la construction d’une usine d’as- bonne partie du foncier cultivable. une augmentation du rendement afin
Fondation pour semblage de tracteurs en partenariat de rentabiliser l’investissement « trac-
l’agriculture et la avec une entreprise indienne. Avant Une augmentation limitée des sur- teur ». La motorisation devait permettre
ruralité dans le cela, de à , la Coopérative faces. Dans la région de Koutiala, le de labourer rapidement en valorisant les
monde (Farm). ll des exploitations motorisées de Kou- recours au tracteur peut difficilement premières pluies (fin mai, début juin)
a réalisé en tiala (CEMK) a importé de France entraîner une augmentation de la su- afin de semer précocement les parcelles
une étude sur la tracteurs de CV d’occasion avec perficie cultivée : les terres en friche, de cotonnier et de maïs, ce qui favorise
motorisation à l’appui d’Afdi Aveyron. Ces acqui- surtout situées sur des sols gravillon- l’obtention de bons rendements. Cet
Koutiala pour sitions ont été réalisées grâce à des naires peu profonds, sont souvent réser- impact attendu de la motorisation est
l’association crédits octroyés par la banque rurale vées au pâturage en saison des pluies, très recherché aujourd’hui au vu de l’ac-
Agriculteurs Kafo Jiginew. Suite à un faible taux de et les terres agricoles sont cultivées centuation des aléas pluviométriques.
français et remboursement du crédit, Afdi Avey- en continu sans recours à la jachère. Cependant, notre étude portant sur la
développement ron avec l’appui du Cirad a souhaité Dans ce contexte les agriculteurs non campagne agricole - n’a pas
international mieux caractériser les impacts de la motorisés pourraient céder une par- pu mettre en évidence une augmen-
(Afdi) Aveyron motorisation sur les systèmes de pro- tie de leurs champs aux agriculteurs tation du rendement par rapport aux
et le Centre de duction. Ce texte présente les princi- motorisés, mais cela semble être une exploitations non motorisées. Soit le
coopération pales conclusions de l’étude réalisée pratique exceptionnelle, le marché de calendrier de semis a été peu modifié
internationale en auprès de exploitations familiales la terre n’étant pas officiel, et chaque par la motorisation, dans ce cas les
recherche dont motorisées suite à la campa- famille préservant son capital foncier. chefs d’exploitation ont certainement
agronomique gne agricole / ¹. Selon les agriculteurs non motorisés, du mal à combiner opérations cultura-
pour le les risques d’une monopolisation des les manuelles et motorisées et à gérer
développement Qui sont les exploitations motori- terres par les « motorisés » semblent un grand nombre d’actifs familiaux.
(Cirad). sées ? Les exploitations disposant d’un faibles même si la possibilité législa- Soit la faible fertilité du sol constitue
Patrick Dugué tracteur sont toutes de type familial, tive récente d’immatriculation foncière un facteur prépondérant limitant la
est chercheur en avec un chef d’exploitation assez âgé pourrait le permettre. production.
agronomie à et plusieurs ménages : en moyenne Les tracteurs sont équipés le plus L’utilisation des résidus de culture
l’Unité mixte de actifs pour bouches à nourrir souvent d’outils à disques (charrue, pour fabriquer de la fumure organi-
recherche et ha de cultures pluviales. L’ac- crover-crop) pour réaliser un travail que est une pratique courante dans
Innovation au quisition d’un tracteur a été facilitée du sol superficiel. Les autres opérations la zone de Koutiala, quel que soit le
Cirad. Il travaille par la grande taille des familles car les culturales — sarclage, démariage et niveau d’équipement des exploitants.
sur les processus surplus dégagés par les actifs s’addi- récolte — sont réalisées manuellement Même si la motorisation leur permet
d’innovation tionnent. Elle fait suite à une logique ou en traction bovine faute de maté- de récolter plus facilement de grandes
paysans et antérieure d’accumulation du capital riels adaptés au tracteur. Ces travaux quantités de résidus de culture (pailles
l’amélioration facilitée par la régularité des revenus d’entretien nécessitent beaucoup de de céréales, tiges de cotonnier), ils mo-
des systèmes de cotonniers. Avant d’avoir un tracteur, main d’œuvre, rare dans la région bilisent autant le couple âne-charrette
polyculture ces familles possédaient en moyenne à ces périodes de pointe de travail. pour cela, afin de réduire la dépense
élevage. paires de bœufs et certaines avaient Ainsi, dans les campagnes malien- en carburant. Au final, les apports de
déjà acquis des tracteurs de marque nes, contrairement aux pays euro- fumure organique par unité de sur-
Bouyer vulgarisés au début des années péens, le tracteur n’est pas à l’origine face cultivée dans les exploitations
de l’exode rural. motorisées ne sont pas supérieurs à
Au vu de ces deux éléments — con- ceux observés dans les exploitations
. Cette étude s’appuie sur les trainte foncière, chaîne d’équipement en traction animale, car vu la grande
résultats obtenus par un échantillon incomplète — le gain de surface cultivée superficie cultivée le ratio bovin/ha
d’exploitations motorisées durant une par actif est peu significatif : , ha/ cultivé dans les exploitations moto-
mauvaise saison des pluies — / actif pour les motorisées contre , ha/ risées est inférieur à celui des exploi-
— ce qui peut limiter la portée des actif pour les exploitations possédant tations en culture attelée (respective-
conclusions présentées dans ce texte. deux paires de bœufs de labour. ment , bovins/ha et , bovins/ha). Ü
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L
Andriatsitohaina du Lac Alaotra, située permet d’enfouir les mauvaises herbes coïncide avec une conjonction d’oppor-
Rakotoarimanana à km au Nord de la capitale non appétées par les zébus en contre- tunités dans les années : ) L’ar-
est ingénieur Antananarivo, a connu une for- saison. Ce labour est suivi d’un passage rivée sur le marché de motoculteurs
agro-économiste, midable diffusion des petits motocul- à la herse pour émotter et, dans certains chinois « bon marché » qui ont bénéficié
adjoint au teurs chinois (appelés localement « Ku- cas, est suivi d’un piétinement par les de la part du gouvernement d’une dé-
directeur de la bota » du nom de la marque japonaise zébus pour disposer d’une boue dans taxation à l’importation en pour
Cellule de qui y a été vulgarisée dans les années laquelle le riz est repiqué. promouvoir l’agriculture mécanisée.
maîtrise d’œuvre ) au cours des dernières années. Ce Le riziculteur en périmètre irri- Ces motoculteurs sont d’autant moins
déléguée du phénomène est intéressant à étudier gué est soumis à des obligations de onéreux qu’ils arrivent en « pièces déta-
projet BVLac tant sur le plan de la façon dont cet coordination de ses activités avec les chées » dans des conteneurs (ce qui en
pour le Centre de équipement s’est inséré dans les pra- autres usagers de l’eau pour respecter réduisant l’encombrement diminue les
coopération tiques locales que des facteurs qui ont le calendrier cultural dicté par la date coûts de fret) et sont montés sur place
internationale en permis cette mécanisation. prévisionnelle du lâché d’eau du bar- par les revendeurs locaux à bas coût
recherche Les premières expériences de mé- rage et le photopériodisme de la variété (le montage ne nécessite pas de main
agronomique canisation de l’agriculture au Lac Makalioka qui y est largement plan- d’œuvre qualifiée) ; ) Le moindre in-
pour le Alaotra remontent aux années tée. Tout retard est sanctionné par une térêt pour les attelages à quatre zébus
développement avec la vulgarisation de la charrue baisse significative des rendements. Le pour les diverses causes mentionnées
(Cirad). Il est brabant double attelée. Les premiers travail de préparation du sol, avant sa plus haut (vol, maladie, alimentation,
responsable du essais de motoculteurs à roues de fer mise en eau, requiert une force de tra- gestion des animaux, etc.) ; ) La pos-
suivi-évaluation datent des années . Tandis que les vail qui, au Lac Alaotra se fait le plus sibilité de générer un complément de
interne du projet opérations de vulgarisation des pre- souvent à la charrue de type Bajac, at- revenus en diversifiant les usages du
BVLac depuis miers motoculteurs ont démarré dans telée avec deux paires de zébus. Il est motoculteur : service de travail à fa-
. les années - avec démonstra- alors fréquent en système traditionnel çon auprès des autres producteurs,
Philippe tion des possibilités de substitution aux que chaque exploitation détienne au utilisation comme moyen de trans-
Grandjean est travaux attelés traditionnels. Mais le moins deux paires de zébus, également port, etc. ; ) Enfin l’amélioration du
ingénieur vrai boom des motoculteurs au Lac utilisés pour le transport (charrette) et prix de vente du paddy donnant les
agronome. Il Alaotra est récent. pour le battage du riz. L’exploitant doit moyens financiers de l’acquisition de
dirige la cellule de donc disposer d’un parc à bœufs, d’un ces motoculteurs.
maîtrise d’œuvre Rôle de la mécanisation agricole en bouvier et d’une aire de pâturage. Une L’acquisition d’un bœuf de trait
déléguée du riziculture irriguée dans la région du alternative est de louer les zébus pour coûte Ariary ¹ en (
projet BVLac Lac Alaotra. La riziculture est la pre- des travaux à façon. Puisque toutes les ) soit Ariary pour quatre
pour le Cirad mière activité agricole dans la région demandes arrivent au même moment, têtes ( ) sans compter les coûts
depuis . du Lac Alaotra, véritable grenier à riz la disponibilité des zébus influe forte- de dressage, gardiennage, alimenta-
Éric Penot est de Madagascar. La riziculture irriguée ment sur les coûts de ces travaux. tion et entretien.
agro-économiste se concentre dans les bas fonds et les La recrudescence des vols de bœufs Si le tracteur agricole reste hors d’at-
au Cirad. Il est en plaines. Sur ha dans la plaine depuis les années et la réduction teinte pour la plupart des exploitations
poste à du lac, ha ont été aménagés pour des aires de pâturage, due à l’extension familiales du Lac, un motoculteur de
Madagascar l’irrigation de à . Ce type de des cultures sur les collines combinée CV est proposé sur le marché à partir
depuis . riziculture est fait sur des sols lourds à la dégradation des ressources four- de Ariary en ( )²,
Marie-Hélène de type hydromorphes tourbeux al- ragères, ainsi qu’à l’insuffisance de la pratiquement équivalent au prix d’un
Dabat est lant du limoneux au sablo-argileux, couverture de soins vétérinaires ont attelage bovin équipé d’une charrue.
économiste au avec un apport alluvionnaire. La forte réduit l’offre en bœufs de trait. L’en- L’entretien est beaucoup plus sim-
Cirad. Elle a été descente de la nappe phréatique en pé- semble de ces facteurs a contribué au ple que celui d’un tracteur et reste à
en poste à riode sèche réduit fortement les pos- développement des motoculteurs, al- la portée des exploitations familiales :
Madagascar de sibilités de cultures de contre-saison. ternative plus rapide et indépendante des garages pouvant entretenir ou
à et La sécheresse rend le sol très compact des aires de pâturages. réparer les motoculteurs se trouvent
responsable du pendant l’intersaison. La préparation dans presque chaque village bordant Ü
suivi-évaluation du sol nécessite ainsi un labour assez De la traction bovine au motocul-
interne du projet profond ( à cm) et régulier pour teur : un changement majeur dans . Unité monétaire malagasy.
BVLac de à assurer un bon lit du semis et un bon le paysage. Malgré plusieurs tentati- . Prix moyen affiché sur le marché en
. repiquage. Le labour joue un rôle dé- ves antérieures de mécanisation dans pour un motoculteur CV avec
terminant pour la production car il la région du Lac Alaotra, le vrai boom accessoires.
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M’Baïtelsem Grain de sel : Quelles sont les activités semblage géré par les groupements sur la mécanisation agricole mais aussi
Betel Esaïe est du partenariat Atader – Afdi Poitou- de forgerons) un fond de roulement sur les itinéraires techniques des cul-
ingénieur Charentes au Tchad ? qui lui permettait de vendre du ma- tures. Les gens ont aussi l’espoir de
agronome de M’Baïtelsem Betel Esaïe : L’Atader et tériel à crédit aux Gumac. Les taux pouvoir un jour bénéficier d’un crédit
formation. Après Afdi Poitou-Charentes interviennent d’intérêt pratiqués étaient autour de de charrue, car nous sommes en train
avoir travaillé au Logone Oriental, une région produc- du montant total du crédit, pour de chercher de nouvelles possibilités
pour l’association trice de sorgho, mais aussi de riz, de mil une durée de ans pour les charrues, pour l’accès au crédit.
Agriculteurs pénicillaire, de maïs, d’arachide et de ans pour les charrettes.
français et coton, considérée comme le « grenier » Un contrat était signé entre la Sote- GDS : Comment ces Gumac s’organi-
développement du Tchad. Leur intervention porte sur qad, les acheteurs et le chef du village, sent-ils au niveau régional ?
international la sécurité alimentaire, la formation et témoin de la vente. Dans ce contrat MBE : Au niveau villageois les Gumac
(Afdi) Poitou- les visites-échanges entre organisations était stipulé qu’en cas de non rem- constituent des Unions de Gumac, qui
Charentes au de producteurs, et le développement boursement, le matériel serait retiré se regroupent au niveau de la Fédéra-
Tchad, il est de la culture attelée, avec la formation s’il était encore en bon état, sinon le tion régionale. La fédération rassemble
désormais de forgerons, la création d’ateliers de problème serait réglé par les autorités les demandes issues des unions (en
coordinateur de fabrication-réparation de matériels, et compétentes. crédit, charrues et charrettes) et sert
l’Association la création de Groupements d’utilisa- Pendant cette période, au moins d’intermédiaire. C’est elle aussi qui
tchadienne des tion du matériel agricole en commun charrettes et charrues ont organise les formations. Les unions
acteurs du (Gumac). été vendues aux Gumac, et au moins jouent le rôle d’interface entre la fé-
développement producteurs ont pu bénéficier dération et la base. Ce sont elles qui
rural (Atader). GDS : Pourquoi avoir créé des Gumac de ces matériels. Mais il y a eu beau- connaissent les besoins des Gumac qui
L’association et comment s’organisent-ils ? coup d’impayés et l’opération a été les composent, elles assurent aussi le
Afdi Poitou- MBE : Les Gumac ont été créés pour stoppée. suivi des crédits octroyés et rendent
Charentes répondre aux besoins des agricul- Ensuite, entre et , le pro- des comptes à la fédération. Pour per-
intervient depuis teurs en matériel agricole de traction jet Promotion des entreprises privées mettre à ces structures de fonctionner,
dans la animale. Ce sont des petits groupes, (Pep) de l’ONG américaine Volunteers chaque Gumac cotise FCFA/an
région du Logone souvent familiaux, qui se réunissent in technical assistance (Vita) a octroyé à son union et une part est reversée à
oriental, au de façon informelle pour acheter des des crédits d’équipement aux paysans. la fédération.
Tchad, et en outils en commun : principalement la Cette initiative a permis l’accès à
partenariat charrue, achetée FCFA par des charrettes et charrues pour les Gu- GDS : Les Gumac s’intéressent-ils éga-
depuis avec groupes de personnes, et la charrette, mac. Mais le grand problème, c’était lement à la motorisation ?
l’association achetée FCFA par des groupes le taux d’intérêt qui était de par MBE : Dans les zones cotonnières, la
tchadienne de personnes. Chaque Gumac a son an! Cela devenait exorbitant et n’a pas motorisation n’est pas adaptée et on
Atader, qui règlement intérieur pour l’utilisation fonctionné longtemps. doit aider les producteurs à avoir un
regroupe du matériel. Certains ont rencontré des meilleur accès à la traction animale,
fédérations difficultés de gestion car lors des pre- GDS : Et aujourd’hui où en sont les mais nous avons aussi de grandes
professionnelles mières pluies, chacun voulait utiliser Gumac ? plaines rizicoles où il est possible
régionales : la charrue en premier. Maintenant une MBE : Depuis , l’État subvention- d’envisager la motorisation. Pour
fédération des règle a été établie : un vote détermine ne les charrues à FCFA au lieu le moment, ces plaines ne sont pas
artisans (Faflor), l’ordre d’utilisation pour le labour. Une de , et les charrettes à aménagées, et les Gumac souhaitent
des greniers fois qu’ils ont fini dans leurs parcel- FCFA au lieu de . Mais il faut acquérir des équipements (tracteurs,
communautaires les, ils peuvent ensuite louer la char- payer comptant car depuis , les charrues, cultivateurs) pour les met-
(Komadji), des rue, ce qui permet de la rentabiliser. Gumac n’ont plus accès au crédit ! Les tre en culture.
Gumac Aujourd’hui, on compte Gumac Gumac continuent donc de fonctionner Actuellement, la motorisation fait
(Argumac) et des (groupes de à personnes). avec leur ancien matériel. Seulement partie de la politique agricole de l’État,
femmes (Atekor). personnes ont acheté du matériel avec le programme Team . Le Tchad
GDS : Les Gumac ont-ils accès au crédit depuis car peu de producteurs a ainsi reçu des tracteurs et une usine
Consultez la pour l’achat des équipements ? ont les moyens de payer cash. d’assemblage a été créée à N’Djamena.
version longue de MBE : De à , Afdi a mis à Mais des Gumac se créent toujours, Jusqu’à ce jour malheureusement, les
cet interview : disposition de la Société tchadienne même si elles n’ont pas accès aux cré- Gumac n’ont pas encore eu accès à
www.inter- d’équipement agricole pour le déve- dits d’équipement, car cela permet aux ces tracteurs, mais nous sommes en
reseaux.org loppement (Soteqad : l’atelier d’as- membres de bénéficier de formations négociation pour en obtenir. §
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L
Jean-François (MO) Une technique conciliable avec dif- prix se renchérit avec celui des carbu-
Richard est est un élément essentiel de la férents niveaux de mécanisation. Il rants fossiles.
chargé de projets fertilité des sols. De son niveau est possible d’allier agriculture de con- Plus de millions d’hectares ont
à l’Agence dépendent le potentiel de production servation et motorisation ; les outils été cultivés en agriculture de conser-
française de et la stabilité des sols agricoles. Or le agricoles utilisés sont alors, en sus du vation en (Derpsch, ), soit
développement labour et le travail du sol réduisent le tracteur : le semoir spécialisé, le pul- environ des terres cultivables de
(AFD). Il a taux de MO d’autant plus rapidement vérisateur et les machines de récolte la planète, mais ces superficies ont
commencé sa que le climat est chaud : pour perdre qui sont en général des moissonneu- concerné presque exclusivement les
carrière comme la moitié du stock initial de MO après ses-batteuses automotrices. Cela in- agricultures motorisées du conti-
chercheur au défrichage d’une forêt, il faut environ duit une réduction des équipements nent américain et de l’Australie. Les
Centre de ans en régions tempérées, à nécessaires (moins de puissance de superficies en culture manuelle et
coopération ans en régions tropicales et ans en tracteurs) et une baisse des consom- attelée sont restées encore très mo-
internationale en régions équatoriales. L’intégration de mations d’énergie fossiles (moins de destes. L’impact de l’agriculture de
recherche l’élevage et l’utilisation des légumi- fuel par hectare) et par conséquent conservation est limité sur les rende-
agronomique neuses dans la rotation ont permis des productions moins émettrices de ments mais il va en s’accroissant avec
pour le en régions tempérées de conserver gaz à effet de serre, avec une capacité le temps. Il est par contre significatif
développement des niveaux de MO suffisants pour à séquestrer du carbone dans les sols sur la baisse des coûts de production
(Cirad), puis garantir un niveau de production agricoles. (moins d’énergie et de travail) et sur
comme ingénieur élevé. Cette situation ne s’est pas L’agriculture de conservation peut le résultat économique, à condition de
d’étude et de produite en milieux tropicaux où également être pratiquée en culture maîtriser les changements liés à cette
projets seules les jachères ont pu permettre manuelle, avec un outillage pour le innovation.
notamment sur de reconstituer un peu de MO, mais semis (canne planteuse, bâton fouis-
la culture l’accroissement de la pression démo- seur), le contrôle des mauvaises herbes L’agriculture de conservation en
motorisée sous graphique a raccourci les durées voire (pulvérisateur), la récolte pouvant être Afrique subsaharienne : des expé-
irrigation dans le supprimé les jachères, entraînant les réalisée avec une faucille ou un coupe- riences et des défis. En Afrique au
désert de Libye. agricultures dans un cercle vicieux coupe. En culture attelée, il existe des sud du Sahara (ASS), le SCV n’en est
d’agriculture « minière » et d’appau- semoirs spécialisés mais qui sont peu qu’à un stade embryonnaire, avec quel-
vrissement des sols. disponibles sur le marché, les outils de ques expériences en zone cotonnière
L’agriculture de conservation, dont pulvérisation sont manuels et il n’y a au Mali et au Burkina portant sur des
l’étape la plus aboutie correspond aux pas d’outils de récolte. La culture at- superficies de l’ordre de plusieurs di-
systèmes de culture sur couverture telée se justifie pour le transport, la zaines d’hectares, et au Nord Came-
végétale (SCV) tels que ceux mis au charrette étant l’instrument le plus roun avec un début de diffusion orga-
point par des équipes du Cirad per- répandu après la charrue, la houe et nisé sur plusieurs milliers d’hectares.
met de cultiver durablement sans la- le semoir. Cette diffusion est en outre confrontée
bourer, à condition : ) de laisser au Cette option technique offre une à l’absence de disponibilité d’outilla-
champ des résidus de récolte, voire opportunité d’inverser la tendance à ges adaptés. Les semoirs classiques, en
d’accroître la biomasse par des plantes la dégradation des sols par la recons- culture motorisée ou attelée, peuvent
de couverture plantées en intercalaire titution de la matière organique. Cela être utilisés à condition d’écarter de
de la culture principale, généralement se traduit par un accroissement de la la ligne de semis les résidus de récolte,
à une date décalée ; ) de ne pratiquer porosité et de l’agrégation des sols, ce ce qui implique un surcroît de travail
aucun travail du sol pour éviter l’ac- qui permet une meilleure infiltration et ne respecte pas l’orthodoxie de la
célération de la décomposition de la des eaux et par conséquent un moin- pratique.
matière organique (pour semer sur dre ruissellement. L’effet « mulch » des On peut citer la tentative de mise au
cette biomasse, il faut disposer d’un résidus limite l’évaporation et permet point d’un semoir de semis direct attelé
semoir spécialisé de semis direct) ; ainsi de limiter l’érosion et d’accroître sur résidus de récolte par l’association
) de pratiquer des rotations de cul- la résistance des cultures aux phéno- Agriculteurs français et développement
ture (légumineuses, céréales, autres mènes extrêmes (sécheresses). Outre international (Afdi) Touraine au Mali,
espèces) ; ) de pouvoir contrôler les cet effet d’atténuation, elle permet une utilisant une technologie innovante
mauvaises herbes par des herbicides, gestion durable des sols et participe à où l’angle d’entrure remplace le poids
et notamment un herbicide total avant l’adaptation aux changements clima- pour permettre la pénétration du dis-
le semis, le glyphosate. tiques. Enfin, elle permet de mobiliser que de semis dans le sol. Elle va être
des unités fertilisantes (azote) dont le poursuivie avec ce partenaire et l’ONG
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dossier Des enjeux, des défis
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Betty des pays élevé et plus difficile à gérer. été souscrits. En , sur les
Wampfler est d’Afrique subsaharienne, LVM octroyés, ont été souscrits
professeur l’investissement dans la mé- Des innovations dans l’offre de cré- pour des investissements agricoles dont
d’économie du canisation et, à fortiori, la motorisation, dit équipement. Pourtant, quelques pour la mécanisation et la moto-
développement à dépasse les capacités d’autofinancement institutions financières innovent et dé- risation. Le développement du réseau
Montpellier de la plupart des ménages agricoles, veloppent une offre de CMT finançant Cecam dans la région du lac Aloatra
SupAgro, et rendant incontournable le recours au l’équipement agricole. L’initiative est a accentué cette tendance avec le fi-
chercheur à crédit de moyen terme (CMT). D’autre le fait de banques d’origine agricole nancement des motoculteurs.
l’Unité mixte de part, l’offre de CMT reste peu déve- —Banque nationale de développement L’étude d’impact du réseau Cecam
recherche loppée, malgré le regain d’intérêt et de agricole (BNDA) au Mali, Caisse na- menée entre et a mis en évi-
Marchés, ressources dont bénéficie aujourd’hui tionale de crédit agricole (CNCA) au dence le caractère stratégique de l’accès
organisations, la finance rurale. Sénégal, etc. — de banques de solida- au LVM pour les ménages. Non seule-
institutions et Les causes de ce rationnement de rité et quelques banques commercia- ment il permet l’accès à l’équipement
stratégies crédit sont bien connues. Pour les ra- les comme la Bank of Africa (BOA) à agricole, mais il peut ouvrir un cercle
d’acteurs (UMR res banques commerciales qui expé- Madagascar. Parmi les institutions de vertueux de développement, le capital
Moisa) du Centre rimentent une implantation rurale, le microfinance, ce sont principalement constitué par le bien initial pouvant
de coopération CMT, plus compliqué et risqué que le des réseaux mutualistes qui expérimen- ensuite être mobilisé comme garantie
internationale en crédit court terme, n’est pas une prio- tent le CMT, par exemple les Caisses pour l’accès à un nouveau crédit. Si
recherche rité. Pour la microfinance, le principal d’épargne et de crédit agricole mu- toutes les catégories de ménages y ont
agronomique facteur de blocage réside dans le man- tualiste (Cecam) à Madagascar, Kafo accès, les ménages pauvres prennent
pour le que de ressources financières adaptées. Jiginew au Mali, le Réseau des caisses néanmoins un risque plus important,
développement Confrontées à une très forte deman- populaires du Burkina (RCPB), mais tout aléa pouvant compromettre le rem-
(Cirad). Elle est de en crédit rural, les institutions de aussi les Caisses villageoises d’épar- boursement et les entraîner dans un
également microfinance parent au plus pressé gne et de crédit autogérées (Cveca) au cycle d’endettement.
directrice et concentrent leurs ressources sur Mali. Ces institutions financières ont Qu’il soit crédit-bail ou CMT clas-
adjointe de le crédit court terme. Par ailleurs, le des caractéristiques communes : des sique, ce crédit reste coûteux : taux
l’Institut des CMT nécessite des ressources finan- liens étroits avec le monde agricole, d’intérêt de , à par mois selon
régions chaudes cières longues, immobilisées plus de des ressources (épargne mutualiste les institutions. Pour améliorer l’ac-
de Montpellier douze mois, qui font souvent défaut à ou des migrants, refinancement par cès à l’équipement, l’État malgache
SupAgro. la microfinance. Enfin, comme le CMT des banques proches du monde rural), a expérimenté entre et ,
porte sur des montants plus importants et une implantation dans des zones à plusieurs programmes de réduction
et des durées plus longues que le crédit bon potentiel agricole. des taux d’intérêt par « bonification »
court terme, il engendre un risque plus du crédit, s’inspirant de la politique
Le cas du réseau Cecam à Madagas- de financement de la modernisation
car. Parmi elles, l’expérience la plus agricole française. Les institutions
ancienne et étendue est celle du réseau financières impliquées indiquent des
Crédit-bails de type location-vente Nombre d’octrois
Cecam à Madagascar qui développe résultats positifs : baisse des coûts du
mutualiste (LVM) en 2006 ( %)
depuis un crédit-bail de moyen crédit, croissance du nombre d’em-
Bœufs de trait et vaches laitières 847 (35 %) terme ( mois à ans) pour l’équipe- prunteurs, remboursements satis-
ment agricole et rural : le produit LVM, faisants, etc. Mais une évaluation
Charrettes 390 (16 %) location-vente mutualiste. Le principe rigoureuse de cette expérimentation
du crédit-bail est que l’institution fi- et de la faisabilité d’une bonification
Décortiquerie, dépailleur, broyeur 89 (4 %) nancière reste propriétaire du bien jus- de crédit équipement à échelle natio-
Source : Réseau CECAM, statistiques
qu’à son remboursement intégral par nale reste à faire. Même si la perti-
Motoculteurs 169 (7 %) l’emprunteur. Renforcé par une sévère nence des outils utilisés (bonification,
Sous-total matériels agricoles 1 495 (62 %) procédure de sélection et de suivi des fonds de garantie, ressources dédiées)
emprunteurs, il permet de sécuriser peut être discutée, il est évident que le
Autres véhicules 102 (4 %) le crédit pour l’institution financière, développement d’une offre de crédit
de gagner la confiance des banques de équipement à l’échelle des besoins de
Autres 825 (34 %) refinancement et de développer ainsi la modernisation des agricultures fa-
Total 2 422 (100 %)
une offre significative de CMT. Entre miliales nécessitera une mobilisation
et , plus de LVM ont politique. §
24 Grain de sel
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Des enjeux, des défis LeForum
dossier
D
Marc Dufumier N ancien- de main-d’œuvre. menter sensiblement les quantités de
est depuis nement industrialisés, l’em- Ainsi en a-t-il été récemment dans fumure organique apportées à l’hec-
professeur ploi de tracteurs et d’engins les régions du sud du Mali où grâce à tare. Cela a rendu possible la mise en
d’agriculture motorisés pour déplacer et actionner l’emploi d’équipements attelés, les ex- culture annuelle de ces parcelles, sans
comparée et de les machines agricoles est intervenu à ploitants agricoles ont été en mesure de période de friche. Grâce à ces apports
développement un moment où les agriculteurs équi- substituer progressivement leur ancien de fumure organique en provenance
agricole à pés de divers équipements attelés système d’agriculture sur abattis-brû- des parcs nocturnes, les terrains qui
AgroParisTech. Il avaient déjà les moyens de manier et lis par des systèmes de culture dans peuvent être cultivés tous les ans ne
est également transporter les matières organiques lesquels les parcelles régulièrement se limitent plus seulement à de petits
membre du (biomasse des champs transportés amendées avec des matières organi- « champs de case », mais couvrent
conseil vers les bâtiments d’élevage, fumier ques peuvent être désormais cultivées désormais des superficies bien plus
stratégique de produit dans ces derniers puis étendu tous les ans, sans perte apparente de étendues. Ces parcelles accueillent les
l’agriculture et de sur les champs, même lointains), de fertilité, du moins pour les agriculteurs plantes anciennement cultivées sur les
l’agro-industrie façon à assurer la reproduction de la ayant un nombre de bovins suffisant « champs de brousse » après abattis-
durables fertilité des sols, sans ne plus devoir pour fumer leurs terres. brûlis : le cotonnier, les céréales (maïs,
(CSAAD) du nécessairement laisser leurs terrains Il y a à peine plus de quatre décen- sorgho, mil, etc.) et l’arachide.
ministère de en friche (« jachère »). Le recours aux nies, dans les régions cotonnières du La décision d’emblaver tous les ans
l’Alimentation, de instruments motorisés y a permis d’ac- sud du Mali, seuls les « champs de les mêmes champs semble bien avoir
l’Agriculture et de croître la productivité du travail dans case » situés à proximité des villages relevé d’un choix délibéré. Les paysans
la Pêche. des proportions considérables, par suite et fertilisés par les déchets de cuisine y avaient intérêt pour accroître leurs
de l’extension des superficies mises en et les excréments de petits ruminants productions à l’unité de surface, dans
valeur annuellement par actif agricole, pouvaient être cultivés tous les ans, un contexte de fort accroissement dé-
de la hausse des productions rappor- sans jamais être laissés en friche (« ja- mographique. Les rotations de culture
tées à l’hectare, et de la rapidité avec chère »). Les parcelles plus éloignées, en continu, grâce aux apports réguliers
laquelle ont pu être réalisées les opé- qualifiées de « champs de brousse », de matières organiques et d’intrants
rations post-récolte (battage, décorti- ne pouvaient être cultivées, quant à chimiques, sont très clairement celles
cage, etc.). La moto-mécanisation des elles, qu’épisodiquement, après abattis dont les rendements, les valeurs ajou-
travaux agricoles s’y est traduite par et brûlis du couvert ligneux, entre des tées et les revenus moyens annuels à
une accélération de l’exode rural, du périodes de friche relativement lon- l’hectare, sont les plus élevés. La rota-
fait du remplacement des travailleurs gues. Les désherbages constituaient tion biennale intensive cotonnier - maïs
par les nouvelles machines, et ces der- alors la principale contrainte pour les et celle du maïs en succession conti-
niers ont alors tant bien que mal trouvé paysans dotés strictement d’outils ma- nue avec lui-même parvenaient ainsi
des emplois en ville à une époque où nuels. Mais grâce aux crédits d’équi- en à fournir une valeur ajoutée à
les pays du Nord réalisaient leur ré- pement octroyés par la Compagnie l’hectare de l’ordre de FCFA;
volution industrielle. malienne des textiles (CMDT) et tandis que les rotations dans lesquelles,
Mais tel n’est pas souvent le cas dans gagés sur la production cotonnière, faute de fumure, les agriculteurs de-
les pays non industrialisés du Sud où le nombreux ont été les agriculteurs qui vaient laisser périodiquement les par-
remplacement direct des agriculteurs purent acquérir des animaux de trait celles en « jachère », ne fournissaient
travaillant à la main par des engins mo- et des outils de culture attelée avec qu’une valeur ajoutée de l’ordre de
torisés se traduit aujourd’hui surtout pour effet d’associer plus étroitement FCFA à l’hectare.
par un exode rural occasionnant un agriculture et élevage. Mais bien que plus intensifs en tra-
taux de chômage croissant dans des Les labours à la charrue et les dés- vail, ces systèmes de cultures dans les-
bidonvilles surpeuplés. herbages au sarclo-bineur (« houe at- quels les champs parviennent à être
telée ») leur ont permis tout d’abord cultivés tous les ans sont aussi ceux
La traction animale : une option in- de lutter plus efficacement contre les dont la productivité du travail est su-
téressante pour les pays du Sud. Le herbes adventices. Mais le recours à périeure : de à FCFA par
passage d’une agriculture manuelle à des charrettes attelées pour transpor- jour au lieu de seulement à .
des systèmes de culture ayant recours ter des quantités accrues de déjections Les parcelles cultivées tous les ans sont
à la traction animale permet souvent animales depuis les parcs où les ani- en effet généralement moins distantes
au contraire d’accroître sensiblement maux sont regroupés toutes les nuits en de l’habitat que les terrains soumis
les productions à l’hectare sans pro- hivernage vers les parcelles à cultiver épisodiquement à l’abattis-brûlis et
voquer de déplacements prématurés leur a surtout permis ensuite d’aug- occasionnent donc de moindres dé- Ü
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LeForum
dossier Des enjeux, des défis
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Des enjeux, des défis LeForum
dossier
D
Ousmane Djiré en , Le développement d’outils adaptés équipements aratoires attelés, mo-
est agro- l’Office du Niger (ON) a for- aux besoins des paysans. Au Mali, les toculteurs et accessoires ; la charrue
machiniste, tement encadré la diffusion paysans rencontrent de nombreuses Rumpstad par exemple est un mo-
diplômé en de la traction animale. Il intervenait contraintes d’approvisionnement en dèle développé depuis , adapté
gestion des PME- ainsi dans l’approvisionnement des outils : appui conseil insuffisant pour aux conditions de l’ON, très efficace
PMI. Il travaille paysans en équipements agricoles, le choix de leurs équipements ; faible pour les terres lourdes et permettant
depuis avec le matériel étant importé ou acheté pouvoir d’achat qui ne leur permet pas de lutter efficacement contre le diga ¹
les forgerons de auprès de la Société malienne d’étude d’avoir accès à des équipements de qua- (plus de des paysans en sont
l’Office du Niger, et de construction de matériels agri- lité ; difficultés à obtenir des crédits. équipés actuellement) ;
au Mali, coles (Smecma), et la maintenance Par ailleurs, les pièces de rechange sont – du matériel post-récolte : batteuse,
successivement relevant de la section Travaux et ma- difficiles à obtenir pour la plupart des décortiqueuse, botteleuse, trieuse,
au sein du projet chinisme de l’ON. équipements importés. mini-rizerie locale et charrettes ;
Arpon, puis de Cette situation a radicalement Pour répondre à ces contraintes, – du matériel de transformation
l’AAMA/Action changé dans les années avec le la Socafon offre sur le marché une d’échalote : découpeuse, broyeur,
Forgeron, et désengagement de l’ON des activités gamme très variée de produits fabri- séchoir.
depuis productives et commerciales. Les Pays- qués localement, à caractère innovant
comme directeur Bas ont alors lancé un projet d’Amé- de par leur facilité d’utilisation, leur Une initiative rentable. Depuis ,
technique de la lioration de la riziculture paysanne à robustesse, leur coût réduit et leur la Socafon a atteint son autonomie fi-
Société l’ON (Arpon), dans le cadre duquel adaptation à la capacité technique nancière. Elle bénéficie désormais de
coopérative des ils ont appuyé la mise en place d’un des utilisateurs. crédit fournisseur avec des modalités
forgerons à réseau de forgerons locaux, et réalisé La qualité des outils est assurée par de paiement intéressantes et n’a donc
l’Office du Niger leur formation et leur équipement, afin l’utilisation de matière première stan- plus besoin de recourir au crédit ban-
(Socafon). qu’ils puissent assurer des prestations dard résistante aux frottements (fer- caire. Cependant, pour ses activités de
de proximité aux agriculteurs. raille industrielle à étirage à froid), ce recherche et d’adaptation de nouveaux
qui permet d’obtenir des outils avec une prototypes, elle a bénéficié de l’appui
La structuration des forgerons en espérance de vie de à plus de ans, de l’Ambassade des Pays Bas jusqu’en
coopérative. En , ces forgerons contre à ans pour les autres produits . L’activité de la Socafon est donc
ont créé l’Association des forgerons locaux. L’emploi de gabarits (modèle rentable, le chiffre d’affaire ayant évolué
de l’ON (Afon) qui a été transformée ou patron de la pièce à fabriquer) au entre et de millions à
en en Coopérative (Cafon), puis sein de la coopérative permet égale- plus de millions de FCFA.
en Société coopérative (Socafon) en ment une uniformité de production La Socafon est ainsi devenue le
. Ces structures ont été mises de la gamme des équipements. premier fournisseur des paysans en
en place par les forgerons pour leur La fabrication locale des outils per- équipements agricoles en zone ON,
permettre de mieux coordonner leurs met aux paysans d’avoir accès à un et a aujourd’hui des options sérieuses
activités, de leur faciliter l’accès au service après vente : maintenance, pour développer l’exportation dans la
crédit, de s’approvisionner de façon réparation. L’approvisionnement en sous-région. Mais la coopérative con-
collective en matières premières, et pièces de rechange est assuré par des naît encore des difficultés dans son
de s’entraider. boutiques villageoises gérées par la développement, liées en particulier au
Aujourd’hui, la Socafon compte Socafon depuis : les pièces sont poids de la fiscalité, à l’accès difficile
ateliers, chacun appartenant à un ainsi disponibles dans des zones très et coûteux à des matières premières
forgeron membre ayant ses propres reculées, ce qui réduit le temps d’im- de qualité ainsi qu’à l’électricité, au
machines-outils, ainsi qu’un atelier mobilisation des machines. D’autres faible pouvoir d’achat des paysans,
central, basé à Niono, dont la gestion opérateurs privés ont d’ailleurs égale- à l’insuffisance de crédits en milieu
est collective. Elle intervient dans la ment ouvert plusieurs dépôts de pièces rural, et au manque de financement
formation des forgerons membres dans la zone. des recherches sur les nouveaux pro-
(techniques de fabrication, mécanique, Les outils sont élaborés en fonc- totypes. §
vie associative et gestion comptable), tion des besoins locaux des paysans,
mais assure aussi l’approvisionnement et la plupart sont adaptés à la trac-
et le préfinancement des matières pre- tion animale et au motoculteur. Parmi
mières. les produits phares de la Socafon, on . Adventice fréquente dans les rizières
peut citer : au Mali ; variété de riz sauvage (Oryzae
– du matériel de préparation du sol : longistaminata).
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LeForum
dossier Des enjeux, des défis
L
Joachim P de relan- ses acquisitions vers ces deux origines. tandis que les autres attendent encore »
Saizonou est ce du secteur agricole (PSRSA) Ainsi, à travers des consultations res- nous a indiqué le directeur général.
l’ancien adopté en conseil des ministres treintes auprès des fournisseurs agréés Selon lui, « il est encore trop tôt pour
directeur de en juin veut faire du Bénin une par les fabricants indiens et chinois, le apprécier l’impact de l’opération ». On
publication de la puissance agricole. Pour atteindre cet PPMA a acquis en plusieurs lots note, par endroits, des augmentations
revue Agri- objectif, il est apparu indispensable que tracteurs avec différents accessoires d’emblavures liées à la motorisation.
Culture. Il est le gouvernement crée les conditions pour la mécanisation des exploitations Il faudra cependant attendre la fin des
aujourd’hui en nécessaires pour réduire la pénibilité agricoles au Bénin. Pour compléter la récoltes pour apprécier l’impact sur la
poste au service des travaux en agriculture, augmenter gamme des tracteurs dont le besoin production.
Information, les surfaces cultivées et la productivité était pressant pour cette première cam- À Copargo, le producteur Moudachi-
communication du travail. La mécanisation et la moto- pagne, le PPMA a acquis essoucheuses rou Alaza qui a obtenu le seul tracteur
et risation s’avèrent donc indispensables. d’origine canadienne. En prélude au de la commune — un tracteur de
documentation Le document de la stratégie nationale démarrage de la deuxième campagne CV au lieu de CV demandé — ne
de l’Association de mécanisation adopté en a déjà (-), d’autres lots de tracteurs peut pas jouir de cette acquisition. Il
inter- balisé le terrain à cet effet. Il s’agissait certainement des mêmes origines sont continue de travailler à la houe et en
professionnelle seulement pour l’actuel gouvernement en commande. « Nous sommes décidés traction animale et pour cause. « Le
du coton du de passer à l’acte. Un fonds d’environ à pousser très loin le niveau de moto- tracteur est d’une puissance trop faible
Bénin (AIC). Il milliards de FCFA a été mobilisé risation de nos exploitations agricoles pour le sol ce qui provoque des pannes
est titulaire par le budget national pour engager et le gouvernement nous accompagne trop fréquentes de cassure des pièces
d’une maîtrise les premières actions. Une structure dans ce sens en y mettant les moyens (charrues, arbre, etc.), un labour trop
en légère, le Programme de promotion nécessaires » a affirmé le coordonna- lent ( ha par jour) ». Actuellement le
communication de la mécanisation agricole (PPMA), teur du PPMA. tracteur est garé à la gendarmerie de la
d’entreprise et a été mise en place pour conduire les localité. À Parakou par contre, aucun
d’un DESS en premières actions, le temps de la créa- Une répartition et une utilisation pro- exploitant individuel n’a pu obtenir
management et tion d’une agence qui sera chargée du blématiques. Pour la première cam- de tracteur. Les tracteurs sont sous la
développement pilotage de la stratégie à long terme. pagne (-) de motorisation, gestion du Centre communal pour la
des projets. Pour la toute première campagne, il on distingue types de bénéficiaires. promotion agricole (Cecpa). Les pro-
s’agissait pour le PPMA d’acquérir Il y a les exploitants individuels, les ducteurs bénéficient des prestations
des tracteurs, de les mettre en place groupements de producteurs, le pro- de services (labour et semis) contre
suivant les conditions définies par le gramme d’insertion des jeunes dans FCFA par ha. À Gogounou,
gouvernement et de suivre leur fonc- l’agriculture et les centres de forma- pour des raisons que le producteur
tionnement. tion. Les centres de formation et les Togou Nourou ignore, les nouveaux
différentes ramifications régionales du tracteurs ne sont pas encore fonction-
Du matériel d’origine indienne et programme d’insertion des jeunes dans nels. « Seuls les tracteurs de la mairie
chinoise. « Pour garantir le bon fonc- l’agriculture sont d’office attributaires qui sont là depuis plus de campagnes
tionnement des tracteurs à mettre en respectivement de et de du continuent de faire le travail ».
place, il était nécessaire de disposer des nombre total des tracteurs acquis par Banikoara est la première commu-
équipements de même type et de même le PPMA. Par contre, les exploitants ne de production cotonnière du Bé-
origine » avait déclaré à la presse le individuels et les groupements doivent nin. Six producteurs individuels ont
coordonnateur du PPMA Monsieur formuler des demandes dont la satisfac- reçu chacun un tracteur de CV et
André Okounlola Biaou lors d’un tion dépend fortement de la disponi- un seul a reçu un tracteur de CV.
débat télévisé sur le sujet. En effet, le bilité. « Pour un total de tracteurs à D’après les statistiques fournies par le
Bénin avait reçu en don une centaine distribuer, nous avons reçu plus de Cecpa, cette acquisition aurait permis
de tracteurs de la Chine et de l’Inde. demandes et ça continue » a signalé le de faire passer les superficies emblavées
Pour assurer la maintenance de ces coordonnateur du PPMA. pour les cultures vivrières (céréales,
équipements qui ont été offerts aux Le Centre régional pour la promo- légumineuses, maraîchage, racines et
Centres régionaux pour la promotion tion agricole (Cerpa) Atlantique Litto- tubercules) de ha pour la cam-
agricole (Cerpa), des cadres béninois ral a reçu tracteurs de CV et pagne - à ha pour la
avaient déjà été envoyés en formation de CV. Tous les tracteurs ne sont campagne - !
dans ces pays. C’est pour profiter des pas accompagnés des accessoires. « Le Presque toutes les communes abri-
expériences acquises par ces tracto- matériel est déjà fonctionnel chez ceux tent des domaines attribués au Pro-
ristes béninois que le PPMA a orienté qui ont eu des équipements complets gramme d’insertion des jeunes dans
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Des enjeux, des défis LeForum
dossier
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LeForum
dossier Des enjeux, des défis
D
Henry-Hervé ’, l’histoire de plus favorisé l’accès des paysans aux sation des synergies entre différentes
Bichat est l’agriculture est celle d’une équipements. Pourtant dans les régions espèces végétales en matière de ferti-
ingénieur général co-évolution des sociétés soudaniennes, là où des productions lisation et de protection sanitaire, et
honoraire du humaines, des systèmes agricoles et de type commercial, comme le coton pratiqué depuis longtemps par toutes
génie rural des de leurs équipements sous la pression ou le riz, ont été mises en place avec les agricultures traditionnelles, notam-
eaux et forêts. Il a de l’évolution démographique. C’est succès, on constate un développement ment en région tropicale, devient une
été le premier particulièrement vrai en Afrique subsa- remarquable de la traction animale qui référence incontournable. Mais pour en
directeur général harienne où, jusqu’à la seconde guerre a permis d’augmenter durablement la améliorer de façon significative la pro-
du Centre de mondiale, les campagnes sont carac- productivité du travail dans les exploi- ductivité du travail, des technologies
coopération térisées par de faibles densités démo- tations familiales. nouvelles devront être développées. On
internationale en graphiques, sauf dans quelques régions Sans tomber dans un béat optimis- peut donc espérer que, dans l’avenir,
recherche privilégiées comme sur les hauts pla- me, les perspectives de la mécanisa- de nouveaux systèmes de culture et
agronomique teaux volcaniques d’Afrique centrale. tion agricole en Afrique subsaharienne d’équipements agricoles adaptés aux
pour le En conséquence, l’agriculture y a été devraient pouvoir bénéficier de l’aug- cultures associées vont émerger.
développement longtemps extensive et son équipement mentation de la demande en produits Dans cette perspective, agriculteurs,
(Cirad) (-), très rudimentaire. agricoles, liée à la croissance démogra- techniciens et chercheurs du Nord et
membre du Mais depuis une cinquantaine phique très rapide des agglomérations du Sud ont un intérêt à coopérer pour
conseil d’années, la croissance démographi- (en plus de de la population mettre au point de nouveaux systèmes
scientifique et que exceptionnelle de l’Afrique sub- sera urbaine contre aujourd’hui). de mécanisation adaptés aux évolutions
directeur général saharienne est en train de provoquer Ce levier des marchés urbains sera rendues nécessaires du fait de la pres-
de l’Institut des changements très rapides des d’autant plus efficace que des politi- sion démographique, des évolutions
national de systèmes agricoles et donc de leurs ques novatrices en matière de foncier économiques et sociales et des aléas
recherche équipements. et d’incitation à la consommation de climatiques. C’est le vœu que nous
agronomique En outre, comme dans toutes les productions locales pourront être mises pouvons tous former en conclusion
(Inra), directeur régions du monde, l’agriculture fa- en place pour accompagner l’évolution de ce précieux dossier. §
général de miliale africaine doit relever le défi des agricultures familiales.
l’enseignement et de l’amélioration de la productivité D’autre part, l’agriculture africaine
de la recherche au des sols et du travail, non seulement devrait bénéficier des efforts poursui-
ministère de pour satisfaire des marchés de plus en vis dans différents pays pour mettre au
l’Agriculture et de plus urbains, mais aussi pour survivre point une nouvelle agriculture suscep-
la Pêche (-), en assurant à la fois sécurité alimen- tible de relever les défis écologiques du
président section taire et revenus. De ce point de vue, le siècle prenant en compte la fin de
du Conseil général passage d’une agriculture manuelle à l’ère des ressources fossiles abondantes En complément
du génie rural des de nouveaux systèmes d’exploitation et à bas prix, et la nécessité de déve-
eaux et des forêts ayant un niveau plus performant de lopper des pratiques s’insérant mieux de ce dossier : des
et président du mécanisation/motorisation est un dans la dynamique des écosystèmes
Groupe de processus incontournable. tout en préservant encore mieux la ressources en ligne
recherche et Or du fait de son histoire mais aussi santé des consommateurs. Le déve-
d’échanges
technologiques
(Gret). Depuis sa
de ses caractéristiques géographiques
et écologiques, la mécanisation des
pratiques agricoles a été et est encore
loppement des systèmes de culture
sous couverture végétale qui connaît
un vif succès dans les régions tropi-
R des res-
sources complémentaires sur
le thème de la mécanisation et de
retraite il est particulièrement difficile en Afrique cales, au Brésil notamment, et qui a la motorisation agricole : versions
président du club subsaharienne : la structure très hé- fait émerger de nouveaux équipements longues des articles et interviews,
« Jardin térogène des sols, les conditions sani- agricoles, constitue une première étape. articles en supplément, etc.
planétaire » de taires, les modes de gestion du foncier Une autre voie d’avenir est constituée Inter-réseaux a par ailleurs réa-
l’association et les systèmes de cultures complexes, par l’agroforesterie qui fait l’objet de lisé un bulletin de veille consacré
« Prospective notamment dans les zones forestières, nombreux travaux. à la mécanisation agricole au mois
». constituent des contraintes difficiles Lorsqu’on s’efforce d’imaginer ce que d’avril (nº ).
à surmonter. Des appuis techniques pourrait être une agriculture à basse
et des systèmes de financement lacu- consommation énergétique, d’engrais www.inter-reseaux.org/mot/mecanisation-
naires ainsi qu’un environnement éco- et de produits chimiques, le modèle des motorisation
nomique peu sécurisé n’ont pas non cultures associées, fondé sur la valori-
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Initiatives
A
François Ruf est , programme national. Mais d’une part ce programme,
économiste au Centre de Sulawesi, à l’est de l’archipel indonésien, a loin des acquis de la recherche malaisienne, repose
coopération internationale connu un des booms du cacao les plus ra- sur une nouvelle technique de production de matériel
en recherche agronomique pides de l’histoire. D’une production méconnue de végétal — l’embryogenèse somatique — qui semble
pour le développement quelques dizaines de tonnes au début des années , prometteuse mais n’est pas encore au point. D’autre
(Cirad) à l’Unité mixte de Sulawesi flirte avec le seuil de tonnes dans part, ces programmes d’aide publique sont lents, en
recherche Innovation. les années . Comme l’État ne taxe pas la filière, retard sur les calendriers agricoles, avec des subven-
Yoddang est ingénieur les paysans en profitent directement, passant de la tions annoncées qui n’arrivent pas forcement. Presque
agricole en contrat avec le marche à pied à la moto japonaise. Les antennes sa- tout semble programmé à Sulawesi pour que l’histoire
Cirad. tellites poussent dans les jardins. Un des facteurs de des récessions cacaoyères se répète. Sauf que…
Cette approche de cette « success story » est le formidable réseau d’in-
l’innovation dans le formation circulant parmi les populations Bugis, le Les réseaux familiaux et la diffusion de clones
secteur cacao indonésien groupe le plus important à Sulawesi, et l’un des plus malaisiens. Les réseaux d’information, qui avaient
s’intègre dans un projet de dynamiques, se risquant à l’aventure commerciale si bien réussi aux familles Bugis en phase de boom,
recherche financé par dans tout l’archipel indonésien, et même au-delà, pourraient bien réduire les risques de récession. Les
l’aide bilatérale notamment en Malaisie. rares plantations de cacao encore en activité en Ma-
australienne, Ausaid, en laisie emploient toujours quelques Bugis. Dans plu-
coopération avec La malédiction cacaoyère. À la fin des années , sieurs villages de Sulawesi, des Bugis ont bénéficié
l’université de Sydney, sur Sulawesi semble pourtant ne pas échapper à la « ma- d’une formation informelle auprès d’un parent ou
un projet intitulé lédiction cacaoyère ». Les rendements prestigieux, de ami en Malaisie, ou revenu de Malaisie. Ces réseaux
Agricultural Markets in l’ordre de ou kg/ha retombent en des- leur permettent de diffuser les techniques de greffe
Tropical Commodity Value sous de kg/ha, et même en deçà de kg/ha et de microgreffe : des technologies au point, maîtri-
Chains: e Case of Cocoa dans les zones les plus touchées. Les insectes et les sables par les paysans, qui permettent de remonter
Farmers in Indonesia. maladies viennent dévaster les vergers. Malgré des les rendements rapidement. Alors que les planteurs
Cette analyse et les nouvelles plantations créées chaque année, la pro- restent sceptiques sur les plants d’embryogenèse so-
opinions ébauchées dans duction retombe à tonnes en . Presque matique, ils sont de plus en plus convaincus de la
l’article n’engagent que les tous les ingrédients de la récession cacaoyère sem- nécessité de replanter avec des techniques de gref-
auteurs, et non les blent réunis : vieillissement d’une partie du verger et fage en pépinière.
institutions citées. des planteurs, maladies et dégâts sur les cacaoyers, Cette conviction, récente, s’est d’abord cons-
concurrence du palmier à huile, faible vulgarisation truite par une diffusion de savoirs entre paysans,
agricole, éloignement de la recherche. Seuls trois fac- souvent au sein d’un réseau familial, puis s’ouvrant
teurs limitent l’ampleur de la chute : la quasi absence vers d’autres planteurs, en tant que nouvelle activité
de taxation du secteur par l’État, l’efficacité d’un sys- commerciale, assurant du même coup la promotion
tème de commercialisation en forte concurrence, et des techniques.
la relative faiblesse des alternatives au cacao.
Quinze ans avant l’Indonésie, la Malaisie, pays voi- Les clones construits par Muhtar, le grand inno-
sin, connaît lui aussi son boom du cacao. La recherche vateur paysan. Ici et là, depuis le début des années
publique et les plantations privées travaillent sur ce , quelques commerçants nous montraient des
qui apparaît alors comme de nouvelles techniques fèves d’une taille exceptionnelle mais ne voulaient
de réhabilitation cacaoyère, tel le greffage et la sélec- pas ou ne pouvaient pas en donner l’origine, si ce
tion de clones. Cependant, ce travail de recherche ne n’est « vers Masemba », un des districts de Sulawesi.
suffit pas à sauver le cacao de Malaisie. La politique Ce clone, devenu « Muhtar », est le produit d’une
malaisienne de restriction des migrations de travail remarquable innovation, restée confidentielle.
d’origine étrangère et le palmier à huile avec ses éco- L’histoire remonte aux années . En , dans la
nomies d’échelle condamnent les chances du cacao région de Masemba, le jeune Muhtar entend parler
dans ce pays. « En Malaisie, avec le palmier, tu roules des richesses apportées par le cacao en Malaisie et
en ×, avec le cacao, tu restes sur ta moto ». voit les tout premiers vendeurs ambulants propo-
Souvent, dans l’histoire du cacao, la recherche ac- ser des plants de cacao. Il décide d’aller lui-même
cumulée dans un pays en fin de cycle cacaoyer tend à en Malaisie pour en apprendre plus sur la culture.
se perdre et le pays qui prend le relais ne profite pas de Muhtar y reste ans, dans une plantation de ha.
cet investissement. Ainsi, en , l’État indonésien À l’insu de son patron, il se finance lui-même des
décide enfin d’aider ses planteurs de cacao avec un cours de pollinisation manuelle et, ne parlant pas Ü
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Initiatives
Muhtar © F. Ruf
Û anglais, va même jusqu’à se payer un traducteur apportée par sa hiérarchie permettent cette démar-
pour suivre les cours. che. L’objectif et les moyens sont ainsi reportés sur
De retour à Sulawesi dans les années , il se crée la réhabilitation.
progressivement une plantation de hectares, com- Une première priorité est donnée à la greffe sur les
mence ses propres essais et croisements par polli- arbres adultes. Ce n’est pas encore la solution qui sauve
nisation manuelle, et sélectionne ses clones. Il part le cacao de Sulawesi mais elle permet aux planteurs
du matériel végétal « local », en choisissant certains de régénérer des arbres en quelques mois, et donc de
arbres pour leur production, et d’autres pour la taille ne pas prendre trop de risques en se lançant dans un
de leurs fèves. Loin de tout centre de savoir officiel, il abattage/replantation. L’important ici est de trouver et
obtient ses premiers clones dès . Mais c’est surtout construire du matériel végétal, si possible tolérant aux
à partir des années et des déclins de rendements, maladies et dégâts d’insectes. Husin et le projet ont
que des planteurs s’intéressent à ses innovations. Il l’intelligence d’organiser des concours entre planteurs,
commence alors à former des groupes de planteurs, pour identifier du matériel végétal performant. C’est
mais même avec une telle générosité, le processus de une excellente méthode pour transférer du savoir et
diffusion, sans grands moyens, reste lent. La chance de l’innovation paysanne vers des projets. C’est ainsi
de Muhtar s’appelle Husin Purung. qu’Husin va découvrir le premier clone de Muhtar,
d’abord indirectement, via un des planteurs formés
Le relais par Husin Purung, merveilleux techni- par Muhtar. Il faudra plusieurs mois avant que, par
cien, et par un projet « empirique ». En , tout un coup de chance, les deux hommes se rencontrent.
en prenant soin de s’associer aux institutions loca- À partir de là, Husin Purung découvre des trésors
les, y compris la vulgarisation agricole, une grande de clones, qu’il va pouvoir mettre en test.
société internationale du chocolat décide d’investir En , l’essentiel des clones en diffusion à Su-
directement dans un programme de recherche-déve- lawesi et dans les îles voisines viennent des mains de
loppement à Sulawesi. Il s’agit alors de lutter contre Muhtar, relayées par Husin Purung. Certes, le projet
l’insecte foreur de cabosses qui ravage les plantations. est financé par une société internationale, accom-
La première chance de cette société est de disposer pagné par des ingénieurs qui connaissent le cacao,
d’un remarquable technicien malaisien, Husin Pu- des chercheurs de niveau international, y compris
rung, qui va pouvoir s’appuyer sur son expérience australiens, mais au départ tout repose sur l’inno-
malaisienne et celle de sa famille ayant plusieurs vation d’un planteur et d’un technicien. La force du
années dans la production de cacao. technicien se mesure d’ailleurs au choix des noms
Après ans de projet, Husin Purung et son équipe de clones, portant celui de son créateur.
font avancer les moyens de contrôle de l’insecte, mais
prennent conscience d’un problème récurrent : les Un prix Nobel de l’innovation. S’il existait un prix
attaques d’insectes et les maladies sont surtout les Nobel de l’innovation, il faudrait le donner aux quel-
symptômes du vieillissement des arbres. Ces con- ques rares Muhtar et Husin Purung, très souvent
traintes ramènent Husin Purung et le projet au cœur oubliés de l’histoire du développement. Grâce à eux,
du problème cacao : la réhabilitation des vieilles ca- et quelques autres de la société multinationale qui ont
caoyères. Si c’est une chose d’en prendre conscience, su promouvoir et reconnaître leurs initiatives, ce qui
c’en est une autre de transformer la conclusion en n’est pas le moindre des accidents dans l’histoire du
action, car souvent la lourdeur de la recherche pu- développement, Sulawesi va peut-être s’avérer être
blique limite la flexibilité et le changement d’objec- un des premiers cas de l’histoire du cacao à éviter la
tif. Ici pourtant, la technicité d’Husin et la souplesse récession. §
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Repères
Évaluer la productivité de l’agriculture
Isabelle mobilisant le concept de valeur ajoutée
Touzard brute (VAB). Celle-ci représente la richesse
mesure…
est responsable brute, ou VAB, est le produit brut dimi-
du service Defis nué des consommations intermédiaires :
(Développe- VAB = PB - CI
ment, expertise, – Le Produit Brut (PB) traduit la valeur de
L
formation la production annuelle finale. Il s’appli-
et ingénierie a productivité est au cœur des un rapport entre une production réali- que aux quantités produites finales sur
pour le Sud) mécanismes économiques globaux. sée, et les quantités de facteurs de pro- l’ensemble de la surface totale consa-
de l’Institut L’agriculture étant un secteur pro- duction utilisées pour l’obtenir. La pro- crée au système de culture étudié, mul-
des régions ductif clé, les gains de productivité, mo- ductivité est une grandeur qui permet tipliées par le prix unitaire de chaque
chaudes, teurs de la croissance économique, consti- de mesurer l’efficience d’un processus produit ou sous produit, quelle que soit
Montpellier tuent une des priorités des États. L’Afrique de production. Un processus est une leur destination (PB = productions fina-
SupAgro. Elle vient de dépasser le milliard d’habitants. combinaison de moyens de production les annuelles * prix unitaires) ;
a récemment Comment améliorer la productivité des (terre, capital) auxquels on applique une – Les consommations intermédiaires
élaboré, agricultures locales pour nourrir cette po- certaine quantité de travail, pour créer (CI) sont les biens et services intégra-
avec Nicolas pulation ? D’autant plus que la plupart une nouvelle richesse. lement détruits au cours d’un cycle de
Ferraton, des pays africains revendiquent leur sou- Or, ces processus de production dans production. Il s’agit pour « les biens »
un manuel veraineté alimentaire. À leur niveau, les l’agriculture sont complexes ; c’est pour- des semences, des plants, des engrais,
méthodologi- agriculteurs eux aussi cherchent à être quoi on utilise les concepts de systèmes des pesticides et du carburant achetés ;
que intitulé les plus efficients possibles, c’est-à-dire à de culture B et systèmes d’élevage C pour les « services » sont des prestations
« Comprendre produire le plus possible en fonction des les décrire et les comprendre. La producti- que l’agriculteur ne peut pas réaliser
une agriculture facteurs de production dont ils disposent, vité s’applique donc à un système et non lui-même faute de savoir-faire, de tech-
familiale : afin de garantir un revenu suffisant pour à une pratique ou à une culture isolée. Il nicité ou d’équipements.
l’analyse leurs familles. s’agit de mesurer la richesse créée grâce Cette richesse créée (VAB) rapportée
diagnostic des L’agriculture familiale est couram- à un mode de production donné pour à un facteur, en l’occurrence à la quan-
systèmes de ment qualifiée de moins « productive » tenir compte de toutes les interactions tité de force de travail E investie mesurée
production » que les autres formes d’agriculture (agri- — liées aux assolements et aux rotations en homme-jours (HJ), ou bien encore à
(Éditions Quae, culture capitaliste ou agri business). Les entre autres —, et des pratiques réelles la quantité de terre mobilisée (hectare :
2009). exploitations agricoles manuelles, ou des agriculteurs qui, à l’échelle de leur ha), permet de mesurer respectivement
Khalid Belarbi plus généralement celles qui utilisent système de production D, raisonnent la productivité du travail (VAB/HJ) et de la
(khalid.belarbi peu d’intrants ou peu de capital tech- quotidiennement de façon globale. La terre (VAB/ha) pour le système de culture
@supagro.inra.fr) nique, sont quant à elles souvent qua- productivité est mesurée en valeur, en ou le système d’élevage considéré.
est ingénieur lifiées « d’extensives », par opposition à
Formation des formes d’exploitation utilisant des 1. Ensemble des modalités techniques La productivité de la terre :
conseil à Defis semences dites améliorées, des engrais, mises en œuvre sur des parcelles traitées VAB d’un système de culture ramenée
de l’Institut des produits phytosanitaires, des équi- de manières identiques. Ce concept à la surface = VAB totale pour un SC ⁄ la
des régions pements mécanisés voire motorisés, et s’applique donc à l’échelle des parcelles surface consacrée à ce SC (ha)
chaudes, dites « intensives ». Or de la façon dont qui sont exploitées de la même manière. Cette variable permet de comparer
Montpellier on « juge » une agriculture et ses per- Un système de culture se caractérise par des systèmes de culture en termes de
SupAgro. formances, dépendent bien entendu les une homogénéité dans la conduite d’une richesse produite par unité de surface.
Il anime priorités qui seront faites en termes de ou de plusieurs cultures sur un ensemble Elle traduit souvent le caractère plus ou
régulièrement politiques agricoles, de mesures d’accom- de parcelles : mêmes espèces, associations moins intensif du système de culture.
des formations- pagnement et de soutien. Il est primor- de culture, mêmes successions En général, les producteurs ayant peu
actions dans dial pour les acteurs, amenés à orienter culturales, mêmes itinéraires techniques de terres ont intérêt à mettre en œuvre
plusieurs pays ces choix, de s’accorder sur le diagnostic (Sébillotte M. 1987). des systèmes de culture ayant une forte
d’Afrique. porté sur ces agricultures. 2. Un système d’élevage se définit à productivité de la terre. Pour un système
Qu’en est-il précisément de ces notions l’échelle du groupe d’animaux de même de culture comprenant une rotation avec
de productivité de la terre et du travail ? espèce, conduits de la même façon, des jachères, on ajoute les valeurs ajou-
Qu’est-ce que l’intensification, l’augmen- depuis la naissance jusqu’à la fin de leur tées par hectare des différents cycles qui
tation de la productivité ? De quels pro- « carrière ». C’est : une ou des espèces et se succèdent dans le temps (tout au long
cessus parle-t-on ? Les définitions sont races données ; une conduite donnée du de la rotation), divisées par le nombre
désormais fixées et il est important de troupeau ; des produits finaux (Landais E. d’années total «n» que comprend la Ü
s’y référer, pour s’accorder sur les juge- 1993).
ments portés sur les agricultures et sur 3. C’est une façon de combiner les 4. On évalue le temps de travail requis
les voies de leur développement. facteurs de production pour obtenir pour chaque opération. L’unité de mesure
diverses productions. Il correspond à une du temps de travail est l’homme/jour
Qu’est ce que la productivité en agri- association spécifique de systèmes de (H/J). Elle correspond au travail d’un actif
culture ? La productivité est toujours culture et d’élevage. agricole pendant une journée de travail.
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Û rotation, y compris la jachère. même si la productivité du travail est tensifs en consommations intermédiaires
– Exemple : Coton⁄⁄ Fmaïs⁄⁄mil⁄⁄jachère faible (2 400 FCFA/HJ). ne sont pas forcément ceux qui procurent
deux ans ; L’usage des notions de productivité de la plus forte valeur ajoutée par unité de
– VAB/ha = (VAB/ha du coton + VAB/ha la terre et du travail amène donc à rela- surface. Prenons le cas de la production
du maïs + VAB/ha du mil) / 5. tiviser totalement la notion de « renta- d’oignons : de nombreux producteurs en
bilité » d’une activité. Afrique de l’Ouest ne sont pas tant en at-
La productivité du travail : tente de nouveaux engrais ou produits qui
VAB d’un système de culture ramenée à Qu’est-ce qu’une agriculture intensive ? augmenteraient leurs rendements, mais
la quantité totale de travail nécessaire = En anglais, le terme « intensive » se rap- plutôt de solutions qui leur permettraient
VAB totale pour un SC ⁄ temps de travail porte à la quantité de facteurs mobilisés de décaler leurs cycles de production et
total consacré à ce système de culture pour le processus de production. Des sys- de vendre leurs produits au meilleur prix.
(homme-jours) tèmes « land intensives » sont gourmands Dans les Terres Neuves du Sénégal, sur les
La productivité du travail permet de en terre : ils mobilisent beaucoup de sur- champs de case fumés où l’on sème dès les
mesurer la richesse créée par journée face à des fins de productions végétales premières pluies du maïs et du mil souna
de travail investie dans le système de ou animales. Les latifundias sud-améri- de cycle court, qui arriveront à maturité
culture. Quand la main d’œuvre se fait cains, fondés sur de vastes étendues de en pleine période de soudure (valeur de
relativement rare (par rapport à la terre), prairies naturelles pour l’élevage bovin, la production calculée au prix maximum),
il devient intéressant de mettre en œuvre sont selon cette définition « land inten- la valeur ajoutée produite par hectare est
des systèmes de culture procurant une sives ». Toujours dans les conceptions an- plus grande que dans les champs de cé-
forte productivité du travail. glophones, les systèmes de production réales en rotation avec l’arachide fertilisés
Les graphes ci-dessus tirés des résul- « labor intensive » mobilisent quant avec de l’engrais chimique. Ces exemples
tats d’une étude menée à Siniéna, dans la à eux beaucoup de main d’œuvre par montrent qu’il faut se pencher sérieuse-
zone cotonnière du sud-ouest du Burkina unité de surface. ment sur les conditions dans lesquelles les
Faso, en décembre 2008, illustrent par- Dans les approches francophones, la agriculteurs produisent et vendent pour
faitement ces notions de productivités notion de « système agricole intensif » se réfléchir aux voies les plus appropriées de
de la terre et du travail. Un système peut rapporte soit à la quantité d’intrants, soit l’intensification.
avoir une faible productivité de la terre à la quantité de travail mobilisée par unité
mais être intéressant pour le propriétaire de surface exploitée. Il en ressort que des Quelles sont les voies de l’augmentation
qui dispose de beaucoup de terres : c’est systèmes de culture manuels, tels que la de la productivité en agriculture ? L’aug-
le cas ici du système de culture « man- production de riz inondé, la culture de la mentation de la productivité en agricul-
guier », qui bien que ne procurant que patate douce en bas-fonds, la culture de ture peut prendre des voies très variées,
130 000 FCFA par hectare, « rapporte » produits vivriers en association peuvent selon que l’on considère la productivité
à l’agriculteur plus de 21 000 FCFA par être très intensifs… en travail, même si de la terre, la productivité du travail, ou
journée de travail consacrée aux vergers. les agriculteurs n’ont recours à aucun les deux conjointement.
En revanche un système procurant une intrant. Ces modes de production ne
forte productivité de la terre, comme le peuvent donc en aucune façon, comme L’augmentation de la productivité du
maraîchage sur les rives de la Comoé c’est malheureusement souvent le cas, travail. La mécanisation des opérations
(800 000 FCFA/ha), intéresse tous ceux être qualifiés d’extensifs. manuelles, c’est-à-dire l’emploi de machi-
qui ne disposent que de peu de terres, Dans les systèmes intensifs, les rende- nes, et l’usage de la traction animale ou
ments, c’est-à-dire les productions par motorisée, autrement dit la substitution
5. ⁄⁄ : Ce symbole correspond à une unité de surface, sont en général élevés. de l’énergie humaine par l’énergie ani-
succession inter annuelle. Mais attention, les systèmes de culture in- male ou thermique, sont les principaux
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L’intensification ?
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L
Bernard Bonnet et ’ de bétail en en -. Les importations de viande rouge ont
Bertrand Guibert sont Afrique de l’Ouest et du Centre est en pleine donc considérablement réduit au profit de celles de
chargés de programme évolution sous l’effet de la demande croissante volaille : l’offre brésilienne en viande rouge a ainsi
au pôle Acteurs, en viande. Elle se caractérise par de grands circuits, reculé de , celle de l’Argentine de et celle de
ressources et territoires à illustrant le fait que le bétail constitue un facteur im- l’Union européenne de , entre et .
l’Institut de recherche et portant d’intégration des échanges régionaux. Aux Concernant les prix, une ascension a été amor-
d’applications des circuits verticaux anciens construits autour des com- cée à partir de , jusqu’en où le prix de la
méthodes de plémentarités entre zones pastorales septentrionales viande a atteint des niveaux records. Dans les pays
développement (Iram). et zones littorales plus densément peuplées, s’ajoutent exportateurs, on assiste également à une augmenta-
Cet article vient en de nouveaux circuits horizontaux nés autour de la tion des prix, de à en Europe, plus du double
complément du dossier forte demande nigériane ou encore de l’urbanisation au Brésil, avant de chuter récemment depuis le der-
Élevage du Grain de sel croissante des régions côtières et des changements nier trimestre .
nº -. alimentaires que cela implique. Le marché mondial des produits animaux se trou-
Il s’appuie sur une étude ve ainsi dans une tourmente dont il est difficile de
réalisée pour la SNV Au niveau des grandes tendances commerciales, il prévoir clairement l’évolution et les conséquences
(Organisation y a lieu de souligner un net accroissement des échan- pour l’élevage de l’Afrique de l’Ouest.
néerlandaise de ges de bétail et de produits animaux entre les pays
développement) par de la sous-région. Durant les deux dernières décen- Au niveau du marché régional, l’offre est handicapée
l’Iram et le Laboratoire nies, les transactions de l’élevage sont en très nette par de multiples fragmentations de nature commer-
d’analyse régionale et augmentation. De l’ordre de millions de dollars ciale, monétaire ou encore fiscale. Face à cela, les po-
d’expertise sociale US en , elles sont passées à millions de dol- litiques commencent à s’organiser au niveau régio-
(Lares) en : lars en . Aujourd’hui en , les transactions nal. À ce titre, la nouvelle ossature du Tarif extérieur
B. Guibert, M. Banzhaf, auraient quasiment doublé depuis . commun (Tec) de la Cedeao prévoit une cinquième
B. G. Soulé, D. H. Sur la période - à -, les impor- bande tarifaire à où devraient se retrouver la
Balami, G. Idé, Étude tations ouest-africaines de viandes, toutes catégories plupart des produits animaux.
régionale sur les confondues, ont doublé, passant de à Par ailleurs, des politiques plus incitatives se met-
contextes de la tonnes. Toutefois, derrière cette tendance générale, tent en place en faveur du développement du sec-
commercialisation du il faut noter que ce sont les importations de viandes teur de l’élevage. On assiste à un regain d’intérêt
bétail – accès aux de volailles, principalement des abats à très bas prix, au niveau continental avec l’inscription de l’élevage
marchés et défis qui dominent. La part de cet approvisionnement par- comme cinquième pilier du Programme détaillé de
d’amélioration des ticulier est ainsi passée de en - à développement de l’agriculture africaine, notam- Ü
conditions de vie des
communautés pastorales,
SNV-Iram/Lares, avril
, p. Trois pôles majeurs structurent les échanges
de produits animaux en Afrique de l’Ouest
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on en parle… directeur
de la publication Jean-Claude Devèze
responsable du dossier Nathalie Boquien
responsable du hors dossier Joël Teyssier
comité de rédaction Roger Blein, Nathalie Boquien, Patrick
Delmas, Daouda Diagne, Benoît Faivre-
www.inter-reseaux.org
L
dépôt légal 4e trimestre 2009
, les sommets mondiaux sur
ISSN 1253-0166
l’alimentation se suivent et se ressemblent souvent, sans parler
des Sommets du G, Forum de haut niveau et autres événe- terrain, etc. Les princi-
ments. Les objectifs ? Savoir « Qui va nourrir le monde », comment pales difficultés qui en résultent
« Garantir la sécurité alimentaire pour tous », « Comment nourrir sont : un financement au coup par coup, la
le monde en ? ». Les titres nous interpellent, les annoncent sont création de structures parallèles non pérennes,
grandiloquentes mais le constat demeure alarmant : milliard de l’accaparement des ressources humaines locales, l’af-
personnes souffrent de la faim. faiblissement des capacités locales, la multiplication des
Entre juin et juillet , plus de milliards de dollars ont procédures. L’aide à l’agriculture est donc un système rodé,
été annoncés par les principaux pays donateurs pour apporter des mais qui manque cruellement d’efficacité.
réponses d’urgence à la crise alimentaire et investir durablement À travers des illustrations concrètes, l’étude dresse ensuite
dans l’agriculture des pays en développement. Parallèlement, les pays un premier bilan des financements et des interventions mis
donateurs et bénéficiaires, les agences des Nations Unies, la Banque en œuvre dans les trois pays en réponse à la hausse des prix
Mondiale et d’autres acteurs appellent à une meilleure coordination alimentaires de . Si l’on constate un certain réengagement
des interventions sur le terrain, ainsi qu’à un investissement accru financier depuis , il s’est agi principalement d’actions d’ur-
dans les stratégies et les politiques nationales. gence visant à soulager les populations les plus vulnérables, à
Lancé à la veille du sommet mondial sur l’alimentation qui s’est soutenir les mesures des gouvernements, ou à assurer, à court
tenu à Rome du au novembre , le rapport « Aide à l’agri- terme, un niveau de récolte suffisant. Par ailleurs, la majorité des
culture : des promesses aux réalités de terrain » revient sur la mise financements ne semble pas être le reflet d’une aide additionnelle
en œuvre des promesses faites par la communauté internationale au et durable, mais plutôt d’une réallocation de financements desti-
cours des douze derniers mois pour soutenir l’agriculture et assurer nés initialement à d’autres secteurs de développement. L’urgence
la sécurité alimentaire dans trois pays ouest africains : le Burkina dans laquelle ont été mis en œuvre les projets n’a par ailleurs pas
Faso, le Niger et le Ghana. Un rapport qui pointe du doigt le manque favorisé la coordination des interventions des PTF.
d’efficacité dans la coordination de l’aide sur le terrain. L’étude expose dans un troisième chapitre la nécessité de renforcer
L’étude analyse dans un premier temps les caractéristiques de les politiques nationales de développement agricole des pays d’inter-
l’aide à l’agriculture dans les pays étudiés : la part des financements vention. L’étude fait le constat d’une part de l’état d’avancement de
extérieurs des partenaires techniques et financiers (PTF) dans les l’élaboration de ces politiques dans les pays étudiés, des principaux
budgets nationaux dédiés au secteur rural est située entre et , facteurs de blocage de l’intervention des PTF via les programmes
les projets sont nombreux (par exemple au Burkina Faso en , nationaux, et de l’importance de s’aligner sur les procédures et prio-
partenaires au développement intervenaient dans le domaine agro- rités nationales. Elle rappelle enfin les engagements de Maputo et
sylvo-pastoral à travers projets) mais ont des durées et des moda- qu’il est essentiel que les États démontrent activement leur volonté
lités variées, avec des visions de développement souvent différentes à mettre en œuvre ces programmes en faisant du secteur agricole
et parfois divergentes, un manque de coordination des actions de et alimentaire une véritable priorité budgétaire.
Grain de sel est diffusé par abonnement gratuit pour les ressortissants du Sud, et payant au Nord
(20 euros pour 4 numéros, chèque à l’ordre de Adeprina – Inter-réseaux). Pour vous abonner, envoyez
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