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Mécanismes d'adaptation à la salinité et comportement sur eau de mer de


deux halophytes fourragères: Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora

Thesis · February 2002

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1 author:

Noomene Sleimi
University of Carthage
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economic risks View project

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UNIVERSITE DE TUNIS EL MANAR
FACULTE DES SCIENCES DE TUNIS
DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES

THESE

Présentée pour l'obtention du

DIPLOME DE DOCTORAT DE SCIENCES BIOLOGIQUES


(PHYSIOLOGIE VEGETALE)

par

Noomene SLEIMI

Mécanismes d'adaptation à la salinité et comportement


sur eau de mer de deux halophytes fourragères: Suaeda
fruticosa et Spartina alterniflora

Soutenue le 16 février 2002 devant le Jury composé de Messieurs les Professeurs:

Med Habib GHORBEL Président

Med Hédi EL AOUNI Rapporteurs


Mokhtar LACHAÂL

Mokhtar HAJJI Examinateurs


Chedly ABDELLY

Helmut LIETH Invité

doi: 10.13140/RG.2.2.27448.57603
DEDICACES

Pour glorifier les grands sacrifices, la patience, la générosité et le


soutien de ma mère et de mon père,

Je dédie ce mémoire
REMERCIEMENTS

Le travail qui fait l'objet de ce mémoire, a été mené dans le cadre des programmes
de recherche de l'équipe de Nutrition Minérale du Laboratoire d'Adaptation et
d'Amélioration des Plantes de l'I.N.R.S.T. Il constitue une contribution à Action
Concertée "Sustainable Halophyte Utilisation in the Mediterranean and Subtropical Dry
Regions" soutenue par l'Union Européenne et à un programme de recherche sur
contrat financé par le Ministère de la Recherche Scientifique et de la Technologie,
intitulé "Étude d'espèces halophytiques d'intérêt économiques et écologiques".

Monsieur Mokhtar HAJJI, Professeur de physiologie végétale à la Faculté des


Sciences de Tunis, m'a orienté vers la thématique halophyte et m'a proposé le sujet
de ma thèse. Il a suivi avec beaucoup d'intérêt la progression de mon travail et m'a
fait bénéficier de sa compétence scientifique et pédagogique, ses conseils, ses
critiques et son soutien. Je lui exprime mes sincères remerciements et ma profonde
considération.

Monsieur Chedly ABDELLY, Maître de Conférences à l'I.N.R.S.T., a assuré


l'encadrement scientifique de mon travail. J'ai bénéficié de son expérience et de sa
compétence pour la conception des protocoles expérimentaux, l'analyse et
l'interprétation des résultats ainsi que la structuration et la correction du mémoire. Il
m'a prodigué toujours ses conseils, son savoir-faire et sa disponibilité illimitée. Je lui
adresse toute ma gratitude, mon profond respect et ma très haute considération. Je
ne saurais oublier de remercier sa famille qui a montré beaucoup de patience et de
compréhension lorsque je travaillais assez tard les nuits et même les dimanches avec
leur tutélaire.

Monsieur Mokhtar LACHÂAL, Maître de Conférences à l'I.N.R.S.T, m'a accueilli


dans l'équipe de Nutrition Minérale et m'a encadré, auparavant, lors de la
préparation de mon mémoire de DEA. Il m'a initié aux techniques de la recherche et
de l'informatique avec beaucoup de patience, de dévouement et de gentillesse. Son
soutien et sa générosité ont toujours été parfaits. Qu'il trouve ici l'expression de mon
estime, ma sincère reconnaissance et mes vifs remerciements pour l'intérêt et
l'attention qu'il a accordé à ce travail et pour le temps qu'il a consacré pour établir le
rapport de ma thèse.

Monsieur Mohamed Habib GHORBEL, Professeur de physiologie végétale à la


faculté des Sciences de Tunis, me fait l'honneur de juger ce travail et de présider le
jury de soutenance. Qu'il soit assuré de toute ma considération et mon estime.

Monsieur Mohamed Hédi El AOUNI, Professeur d'écologie végétale à la Faculté


des Sciences de Bizerte, m'a toujours témoigné de la sympathie. Il a accordé
beaucoup d'intérêt à mon travail et s'est privé des vacances de l'aïd et de l'hiver pour
lire le mémoire, et établir le rapport de thèse. J'ai profité de ses remarques
pertinentes pour apporter des modifications au manuscrit. Je lui exprime toute ma
reconnaissance, mes sincères remerciements et ma profonde considération.

Monsieur Helmut LIETH, Professeur em. et Coordinateur Général de l'Action


Concerté "Sustainable Halophyte Utilisation in the Mediterranean and Subtropical Dry
Regions" a soutenu mes activités de recherche dans le cadre de cette action. Il a pris
en charge ma participation à des manifestations scientifiques internationales. Qu'il
trouve ici l'expression de toute ma gratitude et mon profond respect.

Monsieur Abdelaziz SOLTANI, Professeur à l'I.N.R.S.T., m'a fait profiter de toute


son expérience, de son savoir faire et de ses connaissances bibliographiques. J'ai
toujours trouvé en lui gentillesse et amour paternel. Qu'il soit assuré de ma très
haute considération.

Monsieur Abdelwahed GHORBEL, Directeur du L.A.A.P. et Monsieur Chaâbane


CHEFI, Doyen de la Faculté des Sciences de Bizerte, m'ont accordé beaucoup de
facilités pour mener dans d'excellentes conditions ce travail. Je leur exprime mes
remerciements et ma reconnaissance.
Monsieur le Professeur Claude GRIGNON m'a fait bénéficier de ses conseils lors
de la structuration du mémoire. Je tiens à lui adresser toute ma reconnaissance.

J'associe ces remerciements pour Madame D. Ben MILED et Messieurs M.


GHARSALLI, A. SMAOUI, E. AOUANI, M. ZARROUK, I. KCHOK, I. MARZOUK,
A. M'LIKI, M. JEBARA, H. ZEMNI, et N. SAIDEN pour leur soutien et leur
encouragements.

Enfin, je remercie tous mes camarades de laboratoire pour leur amitié et leur
sympathie, et je ne saurais oublier le personnel technique: Lotfi Ben THABET, Tahar
KEFI, Mustapha Ben M'HAMED, Ammar M'LAIH et Slim Ben AICHA qui ont
souvent allégé ma tâche matérielle avec beaucoup d'efficacité et de dévouement.

Il est très difficile de n'oublier personne, mais je tiens à remercier sincèrement tous
ceux qui ont de près ou de loin contribué à l'avancement de ce travail.
SOMMAIRE

INTRODUCTION .............................................................................................................. 1

Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE .................................................................... 3

1. INTRODUCTION ............................................................................................................ 3

2. LES HALOPHYTES .......................................................................................................... 4

3. INTERETS DES HALOPHYTES ........................................................................................ 6


3.1. Intérêts fondamentaux ........................................................................................... 6
3.2. Intérêts écologiques ............................................................................................... 7
3.3. Intérêts économiques ............................................................................................. 8
3.3.1. Les halophytes alimentaires ........................................................................... 8
3.3.2. Les halophytes médicinales ............................................................................ 9
3.3.3. Production d'énergie et d'autres matériaux par les halophytes ................... 10

4. POTENTIALITES FOURRAGERES DES HALOPHYTES ................................................... 10


4.1. Problématique et approche ................................................................................... 10
4.2. Production fourragère ......................................................................................... 12
4.3. Valeur nutritionnelle des organes végétatifs ....................................................... 13
4.4. Valeur nutritionnelle des graines ........................................................................ 14
4.5. Importance de la composition minérale des halophytes ....................................... 15
4.6. Appétabilité et digestibilité .................................................................................. 15
4.7. Amélioration de la valeur fourragère .................................................................. 18

5. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL DES HALOPHYTES ......................................... 19


5.1. Stratégie osmotique ............................................................................................. 19
5.1.1. Ajustement par les ions inorganiques .......................................................... 20
5.1.2. Ajustement par les solutés organiques ......................................................... 21
La proline .......................................................................................................... 21
La glycine bétaïne ............................................................................................. 23
Les sucres solubles ............................................................................................ 24
Di-methyl-sulfonio-propionate (DMSP) ........................................................... 25
Autres composés compatibles .......................................................................... 26
SOMMAIRE .............................................................................................................................................................................. ii

5.2. Stratégie d'évitement ........................................................................................... 26


5.2.1. Appareils sécréteurs ..................................................................................... 28
Les glandes à sels .............................................................................................. 28
Les poils épidermiques sécréteurs .................................................................... 29
Les épidermes sécréteurs .................................................................................. 30
5.2.2. Mécanisme de la sécrétion ............................................................................ 30
5.2.3. Exclusion racinaire ....................................................................................... 32

5.3. Alimentation minérale des halophytes ................................................................ 32


5.3.1. Nutrition potassique ..................................................................................... 33
5.3.2. Nutrition calcique ......................................................................................... 35
5.3.3. Nutrition azotée ............................................................................................ 38
Disponibilité de l'azote dans les milieux salins ................................................ 38
Effet du sel sur le prélèvement de l'azote ......................................................... 39
Effet du sel sur l'assimilation et le métabolisme de l'azote .............................. 41
5.3.4. Nutrition phosphatée ................................................................................... 42

6. CONCLUSION .............................................................................................................. 44

Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................... 46

1. MATERIEL VEGETAL ................................................................................................... 46


1.1. Suaeda fruticosa .................................................................................................. 46
1.2. Spartina alterniflora ............................................................................................ 47

2. MULTIPLICATION DES PLANTES ................................................................................ 49


2.1. Suaeda fruticosa .................................................................................................. 49
2.2. Spartina alterniflora ............................................................................................ 49

3. CONDUITE DES CULTURES ......................................................................................... 50


3.1. Aquaculture stricte .............................................................................................. 50
3.1.1. Culture sur solution nutritive ...................................................................... 51
3.1.2. Culture sur eau de mer ................................................................................. 51

3.2. Culture sur sable ................................................................................................. 51


3.3. Suivi des cultures ................................................................................................ 51
3.4. Mesure de la production de biomasse .................................................................. 52
3.5. Surface foliaire ..................................................................................................... 52
3.6. Détermination de la teneur en eau ...................................................................... 52
SOMMAIRE ............................................................................................................................................................................. iii

4. TECHNIQUES D'ANALYSE DES PLANTES .................................................................... 53


4.1. Cations ................................................................................................................. 53
4.2. Chlorure ............................................................................................................... 54
4.3. Azote .................................................................................................................... 54
4.4. Phosphore ............................................................................................................ 55
4.5. Glucides ............................................................................................................... 55

5. TECHNIQUES D'ANALYSE DES MILIEUX DE CULTURES .............................................. 57


5.1. Solutions nutritives ............................................................................................. 57
5.2. Eau de mer ........................................................................................................... 58

6. PARAMETRES D'ANALYSE DES RESULTATS ............................................................... 59


6.1. Croissance moyenne relative (CMR) .................................................................. 59
6.2. Indice de sensibilité (IS) ...................................................................................... 60
6.3. Surface foliaire massique (SFM) ......................................................................... 60
6.4. Assimilation nette par unité de surface foliaire (ANSF) .................................... 60
6.5. Efficacité d'absorption(EA) ................................................................................. 61
6.6. Efficacité d'utilisation(EU) ................................................................................. 62
6.7. Sélectivité K+ / Na+ .............................................................................................. 62
6.8. Vitesse d'absorption des nutriments (J) .............................................................. 62
6.9. Analyses statistiques ........................................................................................... 63

Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda


fruticosa .............................................................................................................................. 64

RESUME ........................................................................................................................... 64

1. INTRODUCTION .......................................................................................................... 65

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL ...................................................................................... 65

3. RESULTATS .................................................................................................................. 67
3.1. Aspect des plantes ............................................................................................... 67
3.2. Croissance pondérale ........................................................................................... 68
SOMMAIRE ............................................................................................................................................................................. iv

3.3. Hydratation des tissus ......................................................................................... 71


3.4. Composition minérale des tissus ......................................................................... 72
3.4.1. Sodium et Chlorure ...................................................................................... 72
3.4.2. Potassium, Calcium et Magnésium .............................................................. 74
3.4.3. Azote ............................................................................................................. 77
3.4.4. Phosphore ..................................................................................................... 78

3.5. Accumulation des sucres solubles ....................................................................... 79

4. DISCUSSION ................................................................................................................ 80
4.1. Limite de tolérance au sel .................................................................................... 80
4.2. Nature des effets du sel ........................................................................................ 81
4.2.1. Effets osmotiques du sel ............................................................................... 82
4.2.2. Effets toxiques du sel .................................................................................... 85
4.2.3. Effets nutritionnels du sel ............................................................................. 87
Sélectivité d'absorption ..................................................................................... 87
Efficacité d'absorption des nutriments ............................................................. 88
Efficacité d'utilisation des nutriments .............................................................. 91

5. CONCLUSION .............................................................................................................. 93

Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina


alterniflora ET COMPARAISON AVEC Suaeda fruticosa ...................................... 96

RESUME ........................................................................................................................... 96

1. INTRODUCTION .......................................................................................................... 97

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL ..................................................................................... 97

3. RESULTATS .................................................................................................................. 99
3.1. Aspect des plantes ............................................................................................... 99
3.2. Croissance pondérale ......................................................................................... 100
3.3. Hydratation des tissus ....................................................................................... 104
3.4. Composition minérale des tissus ....................................................................... 105
3.4.1. Sodium et Chlorure .................................................................................... 106
3.4.2. Potassium, calcium et magnésium ............................................................. 108
3.4.3. Azote ........................................................................................................... 112
3.4.4. Phosphore ................................................................................................... 113
SOMMAIRE ............................................................................................................................................................................... v

3.5. Accumulation des sucres solubles ..................................................................... 114

4. DISCUSSION .............................................................................................................. 115


4.1. Halophilie et résistance au sel ........................................................................... 115
4.2. Effet du sel sur l’expansion foliaire et la capacité photosynthétique ................. 116
4.3. Effets osmotiques et toxiques du sel .................................................................. 119
4.4. Effets nutritionnels du sel ................................................................................. 122
4.4.1. Sélectivité d'absorption .............................................................................. 122
4.4.2. Efficacité d'absorption des nutriments ....................................................... 124
4.4.3. Efficacité d’utilisation des éléments minéraux ........................................... 126

5. CONCLUSION ............................................................................................................ 130

Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora:


IMPORTANCE ET IMPLICATION DANS LA TOLERANCE AU SEL ............. 133

RESUME ......................................................................................................................... 133

1. INTRODUCTION ........................................................................................................ 134

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL ................................................................................... 135

3. RESULTATS ................................................................................................................ 137


3.1. Effet de la salinité du milieu de culture sur la sécrétion foliaire de Na+ et
de Cl– ..................................................................................................................................................................................137

3.2. Effet de l'âge des feuilles sur la sécrétion de Na+ et de Cl– ................................ 139
3.3. Homogénéité de la sécrétion foliaire de Na+ et de Cl– ........................................ 142
3.4. Importance de la sécrétion par rapport aux prélèvements totaux de sel ........... 144
3.5. Sélectivité de la sécrétion ................................................................................... 145

4. DISCUSSION .............................................................................................................. 148


4.1. Contribution de la sécrétion dans le contrôle de l'accumulation ionique ......... 148
4.2. Sélectivité de la sécrétion ................................................................................... 149
4.3. Variations de la sécrétion .................................................................................. 151

5. CONCLUSION ............................................................................................................ 153


SOMMAIRE ............................................................................................................................................................................. vi

Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT NUTRITIONNEL DE Suaeda


fruticosa ET DE Spartina alterniflora CULTIVEES SUR L'EAU DE MER ........ 154

RESUME ......................................................................................................................... 154

1. INTRODUCTION ........................................................................................................ 155

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL ................................................................................... 155

3. RESULTATS ................................................................................................................ 158


3.1. Aspect des plantes ............................................................................................. 158
3.2. Croissance des plantes ....................................................................................... 160
3.3. Hydratation des tissus ....................................................................................... 162
3.4. Statut ionique des tissus .................................................................................... 163
3.4.1. Sodium et Chlorure .................................................................................... 163
3.4.2. Azote réduit ................................................................................................ 165
3.4.3. Phosphore inorganique .............................................................................. 166
3.4.4. Potassium ................................................................................................... 167
3.4.5. Calcium ....................................................................................................... 168
3.4.6. Magnésium ................................................................................................. 169

4. DISCUSSION .............................................................................................................. 170


4.1. Production de biomasse sur eau de mer ............................................................ 170
4.2. Croissance, hydratation et statut nutritionnel des tissus ................................. 171

5. CONCLUSION ............................................................................................................ 177

Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANT LA CROISSANCE


DE Suaeda fruticosa ET Spartina alterniflora EN CONDITIONS DE CULTURE
SUR EAU DE MER ........................................................................................................ 178

RESUME ......................................................................................................................... 178

1. INTRODUCTION ........................................................................................................ 179

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL ................................................................................... 179

3. RESULTATS ................................................................................................................ 181


SOMMAIRE ............................................................................................................................................................................ vii

3.1. Aspect des plantes ............................................................................................. 181


3.2. Croissance pondérale ......................................................................................... 183
3.3. Hydratation des tissus ....................................................................................... 185
3.4. Statut azoté ........................................................................................................ 186
3.5. Phosphore .......................................................................................................... 187

4. DISCUSSION .............................................................................................................. 188

5. CONCLUSION ............................................................................................................. 195

Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES ........................................................ 196

1. INTRODUCTION ........................................................................................................ 196

2. ADAPTATION DES DEUX HALOPHYTES AUX CONDITIONS EXTREMES DU MILIEU 197

3. POTENTIALITES DE CROISSANCE EN MILIEU SALE .................................................. 200

4. COMPOSITION DE LA PHYTOMASSE EN NUTRIMENTS ........................................... 202

5. CHARGE DES PARTIES AERIENNES EN NaCl ........................................................... 204

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ...................................................................... 207


INTRODUCTION

La diminution des réserves en eau douce et des terres fertiles est un problème
commun à plusieurs régions du monde et particulièrement les pays en voie de
développement. L'utilisation des ressources hydriques non conventionnelles (eau
saumâtre, eau usée et même eau de mer) pour l'irrigation des cultures est devenue
inévitable. Cependant, la salinité de ces eaux dépasse les limites de tolérance de la
plupart des plantes cultivées. L'amélioration de la tolérance au sel par la transgenèse
est envisageable et peut contribuer à la valorisation de ces eaux de qualité médiocre
ainsi que des terres marginales. Cependant, l'apport de cette approche demeure
limité compte tenu de la complexité des mécanismes impliqués dans la tolérance des
plantes au sel. En effet, en dépit de la diversité des études conduites dans le domaine
de la salinité, peu de plantes tolérantes ont été créées selon cette approche.
Les halophytes, plantes naturellement tolérantes au sel et présentant des intérêts
économiques (production de fourrage, de produits alimentaires, de matériaux à
haute valeur économique) et écologiques (fixation des sols salins, aménagement des
parcs et ornementation) semblent constituer un outil précieux pour la création de
systèmes productifs dans des conditions de salinité extrême.
La présente étude, inscrite dans le cadre d'une action concertée "Sustainable
Halophyte Utilisation in the Mediterranean and Subtropical Dry Regions" soutenue par
l'Union Européenne et d'un programme de recherche sur contrat financé par le
Ministère de la Recherche Scientifique et de la Technologie et qui s'intitule "Étude
d'espèces halophytiques d'intérêt économiques et écologiques", a porté sur deux halophytes
à potentialités fourragères, Suaeda fruticosa, Chenopodiaceae locale, et Spartina
alterniflora, Poaceae originaire des U.S.A. Le comportement de ces deux plantes est
analysé dans une gamme étendue de NaCl (0 à 800 mM) en vue de déterminer leur
limite de tolérance au sel et d'identifier les mécanismes physiologiques qui
s'intègrent dans leur stratégie de résistance à cette contrainte abiotique. Cependant,
comme l'objectif ultime de nos projets de recherche est de cultiver ces deux
halophytes dans des zones arides où l'eau douce constitue le principal facteur
limitant de la croissance et du développement des plantes, nous avons étudié le
comportement nutritionnel de ces deux espèces en condition d'irrigation à l'eau de
mer. Les nutriments susceptibles de limiter leurs potentialités de croissance dans ces
conditions de culture sont également identifiés.
INTRODUCTION ...................................................................................................................................................................... 2

Vue générale de la sebkha de Soliman: consommation des halophytes et des


plantes associées par les ovins et les caprins.
CHAPITRE I

REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

1. INTRODUCTION

L'augmentation prévisible de la population mondiale et l'accroissement de la


salinité des superficies agricoles laissent prévoir que la production agricole de la
planète ne couvrira plus les besoins alimentaires à l'horizon 2020-2030. Plusieurs
solutions sont envisagées pour résoudre ce problème. L'une est l'amélioration de la
productivité agricole par augmentation du rendement et la limitation des pertes dues
aux maladies, aux ravageurs et aux agressions édaphiques et climatiques. L'autre est
la mise en valeur des terres aujourd'hui délaissées à cause des contraintes
environnementales diverses qui y limitent les rendements. La salinisation des sols est
l'une des principales contraintes auxquelles l'agriculture moderne est confrontée.
Fréquemment associée à la contrainte hydrique, elle entraîne une réduction des
surfaces cultivables et menace l'équilibre alimentaire mondial (Kinet et al., 1999).
Tous les continents sont affectés par la salinité et, selon certaines estimations, la
superficie des sols souffrant d'un excès de sel dans le monde serait aujourd'hui
d'environ 1 milliard d'hectares (Choukr-Allah, 1996). À cette surface s'ajoutent les
terres arables affectées par la salinité des eaux d'irrigation. Chaque année, 10 millions
d'hectares de terres irriguées sont abandonnés en raison des effets néfastes du sel
(Szabolcs, 1994). En Tunisie, les sols affectés par la salinité s'étendent sur 1.5 millions
d'hectares, soit environ 10 % de l'ensemble du territoire et 18 % des terres agricoles
(Hachicha et al., 1994).
Pour faire face à ce problème, plusieurs auteurs dont Epstein (1985) ont mis
l'accent sur la nécessité de sélectionner des variétés tolérantes à la salinité; ce qui
permettrait une extension de la superficie des terres mises en culture avec une
augmentation de leur productivité (Shannon, 1984). Une seconde approche est celle
qui consiste à dessaler les sols et à mettre en culture des zones marginales. Cette
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................................. 4

opération est, cependant, très coûteuse et nécessite un investissement lourd surtout


dans les régions arides et semi-arides. L'identification d'halophytes utiles et leur
introduction dans les zones fortement salées constitue une approche prometteuse
pour la valorisation de ces zones marginales impropres à l'agriculture, ainsi que des
ressources hydriques non conventionnelles (eau saumâtre, eau de mer, eau usée). En
effet, parmi les halophytes, qui comptent environ 2600 espèces (Menzel et Lieth,
1999), certaines présentent des intérêts économiques (alimentation humaine,
fourrage, matériaux à haute valeur économique) ou écologiques (dessalement des
sols, fixation des dunes, aménagement des parcs). Dans cette revue bibliographique
seront analysés les intérêts des halophytes en accordant une attention particulière à
celles présentant des potentialités fourragères. La physiologie de la réponse des
halophytes au sel ainsi que les facteurs susceptibles de limiter leur croissance seront
également discutés.

2. LES HALOPHYTES

Ces plantes peuvent être soumises dans leur biotope naturel à de fortes
concentrations salines de diverses manières. Certaines d'entre elles le sont par
l'intermédiaire de leurs organes souterrains lorsque ceux-ci se développent dans un
sol riche en sel. D'autres peuvent l'être aussi au niveau de leurs organes aériens
lorsque le sol est, d'une manière régulière ou rythmique, recouvert d'une couche
d'eau salée (Binet, 1999). Au bord de la mer, la végétation des dunes reçoit surtout
des embruns salés, alors que les plantes des marais saumâtres vivent sur un sol salé
et peuvent être, si la mer présente des marées, rythmiquement immergées par l'eau
salée. Dans les régions désertiques, notamment au niveau des chotts et des sebkhas,
le sol constitue une source de particules salées facilement entraînées par le vent vers
les terres et les cultures environnantes.
Les travaux portant sur les plantes natives des milieux salins remontent à
plusieurs siècles. Les caractéristiques de ces plantes ont été analysées afin d'identifier
les stratégies de leur tolérance au sel. Compte tenu de la diversité de la réponse au
sel, plusieurs définitions ont été proposées et discutées dans la revue
bibliographique de Waisel (1972). Il en ressort que Salicornia est la première espèce
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................................. 5

typique des côtes marines, tel qu'il a été mentionné par Lobelius (1576). Ce n'est
qu'en 1809 que le mot "halophytes" a été utilisé pour la première fois par Pallas pour
désigner un groupe d'espèces se développant dans un habitat salin.
Steiner (1935) classe les halophytes en trois types en se basant sur leur contenu
tissulaire en sel. Les premières sont dites "halophytes succulentes" qui tolèrent les
concentrations élevées en chlorures dans leurs tissus comme Salicornia herbacea. Les
secondes, appelées "halophytes non-succulentes", qui résistent au sel par une
désalinisation de leurs tissus en secrétant l'excès du sel par des glandes à sels comme
Spartina alterniflora. Enfin, les halophytes accumulatrices qui n'adoptent pas de
mécanisme spécial pour la compartimentation du sel.
Tsopa (1939) est le premier à classer les halophytes selon leur besoin
physiologique en sel. Il distingue 4 catégories:
(i) Les halophytes obligatoires qui ont besoin du sel pour vivre et croître
(ii) Les halophytes préférentielles qui montrent une croissance optimale
dans des environnements salins.
(iii) Les halophytes secondaires (supporting halophyte) qui sont capables de
croître dans des habitats salins.
(iv) Les halophytes accidentelles qui apparaissent occasionnellement dans
les milieux salés.
De son côté, Chapman (1942) distingue les miohalophytes des euhalophytes. Les
premières se développent dans un milieu légèrement salé (< 0.5 % de NaCl) et les
secondes colonisant des habitats fortement salés. Il divise les euhalophytes en trois
groupes: les mésohalophytes (plantes se développant dans des milieux où la salinité
est comprise entre 0.5 et 1 % du sol sec), les mésoeuhalophytes (plantes colonisant
des habitats dont la salinité est supérieure à 0.5 %) et les eueuhalophytes (plantes
exigeant une salinité minimale de 1 %).
Une autre classification des halophytes, reposant sur l'aptitude des plantes à
ajuster leur potentiel osmotique, a été proposée par Henkel et Shakhov (1945). Ils
distinguent trois catégories:
(i) Les plantes accumulatrices du sel appelées "euhalophytes".
(ii) Les plantes éliminatrices du sel, après son absorption par les racines,
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................................. 6

appelées "crinohalophytes".
(iii) Les plantes, qui accumulent et compartimentent le sel dans des tissus
spécialisés, appelées "glycohalophytes".
En 1964, Kreeb a distingué les halophytes des glycophytes en se basant sur leurs
comportements vis-à-vis du sel. En effet, la croissance des glycophytes diminue avec
l'augmentation de la salinité du milieu, alors que celle des halophytes semble être
optimale en présence de sel.
Analysant toutes ces données, Waisel (1972) groupe sous le terme "halophytes"
toutes les plantes qui croissent et complètent leur cycle de vie dans un habitat
fortement salé. Généralement, ce terme est réservé seulement aux plantes qui
apparaissent constamment et spécifiquement dans les habitats salés. Les plantes qui
présentent un cycle de vie court se limitant à la saison pluvieuse et celles qui ne se
retrouvent dans les milieux halomorphes que parce qu'elles sont évincées des sols
non salés par des espèces plus compétitives, sont appelées les pseudo-halophytes ou
les halophytes facultatives (Waisel, 1972; Rozema, 1996).
Greenway et Munns (1980) distinguent les halophytes dicotylédones, qui sont
capables de croître sur 200 à 500 mM NaCl, des halophytes monocotylédones, qui
montrent un ralentissement de leur croissance à partir de 100 mM NaCl.
Selon Gorham (1996), les halophytes sont des plantes rencontrées sur les sols où la
conductivité électrique (C.E.) excède 4 mS.cm-1, soit 40 mM de NaCl.
Enfin, Binet (1999) désigne par halophytes tous les végétaux qui sont soumis, dans
la nature, à des concentrations de sel anormalement élevées, concentrations qui
seraient nocives pour la plupart des plantes cultivées.

3. INTERETS DES HALOPHYTES

3.1. INTERETS FONDAMENTAUX

Les halophytes constituent un outil précieux pour l'étude des mécanismes


physiologiques, biochimiques et moléculaires de la tolérance au sel. Les potentialités
génétiques de ces plantes ou celles des glycophytes tolérantes peuvent être
exploitées dans des croisements inter-spécifiques et inter-génériques pour améliorer
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................................. 7

la tolérance au sel (Mudie, 1974). En dépit de la diversité des études conduites dans
ce domaine, le nombre de plantes tolérantes ainsi obtenues est très limité à cause
d'une méconnaissance du contrôle génétique des mécanismes impliqués dans leur
réponse au sel. Ce n'est que lors de la dernière décennie qu'il a été démontré que la
sélectivité K+ / Na+ chez Aegilops squarrosa est contrôlée génétiquement et liée à la
présence du génome D. Elle est codée sur un locus du bras long du chromosome 4 D
(Gorham, 1990). L'incorporation de tels génomes d'une espèce à une autre a conduit
à une amélioration de la tolérance au sel. En effet, le transfert du génome E des
espèces de Lophopyrum au blé hexaploide, s'est traduit par une augmentation de
deux déterminants importants de la tolérance au sel qui sont l'efficacité d'exclusion
de Na+ et la sélectivité K+ / Na+ (Schachtman et al., 1989). La restriction du transport
du sodium vers les feuilles chez Elytrigia elongatum est probablement contrôlée par
un ou plusieurs gènes qui peuvent aussi être transférés au génome de Triticum
aestivum pour améliorer sa tolérance au sel (Storey et al., 1985). D'autre part, le
transfert des gènes de Thinopyrum bessarabicum au blé hexaploide a permis d'obtenir
une nouvelle céréale, Tritipyrum, plus tolérante au sel que le blé (King et al., 1997).
En revanche, les qualités agronomiques des halophytes peuvent être améliorées à
travers des croisements avec des plantes cultivées. A titre d'exemple, il a été
remarqué qu'un écotype spontané de tomate originaire des îles Galápagos est
capable d'exprimer une forte production de fruits en dépit de l'abondance de sel
dans son biotope. Cependant, ces derniers sont de petite taille et de goût amer. Le
croisement de cet écotype sauvage avec une variété de tomate cultivée a permis
l'obtention d'un hybride exprimant les caractères des deux parents. En effet, les fruits
produits en condition d'irrigation à l'eau de mer légèrement diluée (70 % eau de mer)
sont parfumés et de taille acceptable (Shay, 1990).
Outre ces intérêts, plusieurs données récentes suggèrent de nombreuses voies
d'utilisation des halophytes sans modification préalable de leur génome.

3.2. INTERETS ECOLOGIQUES

Certaines données montrent que les halophytes améliorent les propriétés physico-
chimiques du sol. À titre d'exemple, Halocnemum strobilaceum et Arthrocnemum
indicum fertilisent et dessalent l'horizon supérieur du sol permettant ainsi un
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................................. 8

développement important d'espèces spontanées de Medicago réputées sensibles au sel


(Abdelly et al., 1999). Dans le même contexte, Zhao (1991) a montré que Suaeda salsa
est capable de produire 20 tonnes de matière sèche par hectare, contenant environ 3 à
4 tonnes de sel qui sont exportées à partir du sol. Cependant, Batis maritima produit
moins de matière sèche (15 tonnes par hectare) mais exprime le même pouvoir de
dessalement, 3 tonnes de sel par hectare (Le Houérou, 1993).
Outre cette aptitude à dessaler les sols, les halophytes peuvent être utilisées aussi
dans la fixation et l'aménagement les sols secs et sableux. A titre d'exemple,
Limonium delicatulum capable de limiter sa transpiration en conditions sévères de
sécheresse, est utilisée pour fixer les dunes côtières méditerranéennes de l'Egypte
(Batanouny et al., 1992). D'autres espèces comme Cymodocea ciliata, Schangenia
aegyptiaca, Zygophyllum simplex et Suaeda vermiculata colonisent les côtes des Emirats
Arabe Unies (Zahran et al., 1999). Spartina patens domine les marais hautes salées de
l'île de Dernieres et forme ainsi une barrière contre l'érosion (Courtemanche et al.,
1999). Sesuvium portulacastrum est une halophyte rampante très recommandée dans
l'aménagement des parcs (Pasternak et Nerd, 1996). Cette plante ornementale de la
famille des Aizoaceae, fleurit en rose violacée et en blanc (Lonard et Judd, 1997).

3.3. INTERETS ECONOMIQUES

3.3.1. Les halophytes alimentaires

Selon l'ouvrage de Shay (1990) portant sur les voies d'utilisation des halophytes,
nous avons dénombré jusqu'à 100 espèces pouvant faire partie de la ration
alimentaire de l'homme. Par exemple, les grains de Zostera marina et de Distichlis
palmeri sont riches en amidon. Les graines de quelques halophytes comme Cakile
edentula, Crithmum maritimum, Kosteletzkya virginica et Salicornia bigelovii constituent
une source importante de lipides qui représentent respectivement 51, 41, 18 et 28 %
de la matière sèche des graines (O'leary et al., 1985; Glenn et al., 1991; Zarrouk et al.,
2001). Ces taux sont de même ordre de grandeur ou dépassent ceux des espèces
oléagineuses conventionnelles telle que le carthame (16 %) (Hamrouni et al., 2001).
Dans ce contexte, il a été montré qu'Argania spinosa, arbre forestier endémique du
Maroc, produit traditionnellement une huile de bonne qualité nutritionnelle (Chimi
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE............................................................................................................................. 9

et al., 1994) caractérisée particulièrement par sa richesse en acides gras insaturés, 80 %


des acides gras totaux (Ksir et al., 1995). Cet arbre peut produire, dans les conditions
optimales, 120 litres d'huile par hectare (Bani-Aameur, 1999). Par contre, les graines
de Mesembryanthemum cristallinum, de Kosteletzkya virginica, et de Salicornia bigelovii
sont riches en protéines qui représentent respectivement 32, 24 et 31 % (O'leary et al.,
1985; Glenn et al., 1991).
D'autres halophytes sont riches en vitamines. Par exemple, Salsola pestifer contient
du carotène (4.5 mg / 100 g) et de l'acide ascorbique (77 mg / 100 g) au niveau de
leurs parties aériennes (Fowler et al., 1985).

3.3.2. Les halophytes médicinales

Alaoui et al., (1995) ont montré que les saponines du bois et du tourteau d'Argania
spinosa, résultant de l'extraction de l'huile, ont des usages médicaux. Les stérols
triterpéniques (Farines et al., 1981) et les flavonoïdes des feuilles et de la pulpe du
fruit peuvent présenter les mêmes intérêts (Fellat-Zarrouk et al., 1987).
Fowler et al. (1985) ont isolé de Salsola kali et Salsola subaphylla respectivement de la
salsolidine et de la N-feruloyl-putrecine qui sont des composés bioactifs ayant des
propriétés anti-hypertensives. De même, il a extrait de Salsola richteri le salsolinol et
la salsoline qui interviennent respectivement dans la stimulation des battements
cardiaques et la vasodilatation.
Les graines de Calophyllum inophyllum contiennent un composé actif, le complexe
4-phényl-coumarine appelé aussi le Callophyllolide qui est un anti-inflammatoire
utilisé dans le traitement du rhumatisme. Les feuilles de cette plante sont riches en
stéroïdes et en alcaloïdes.
D'autre part, on extrait des feuilles d'Adhatoda vasica un alcaloïde, la vascine,
utilisée dans le traitement des asthmes et des bronchites (Shay, 1990).
Les fruits de Balanites roxburghii sont riches en diosgénine qui est un précurseur de
stéroïdes telles que la progestérone, la cortisone et les hormones cortico-
stéroïdiennes. Anemopsis californica présente également un intérêt médicinal; elle est
utilisée pour le traitement du rhume, de la toux et des problèmes de l'indigestion
grâce à son composé actif, le 4-allylveratrole (Shay, 1990).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 10

3.3.3. Production d'énergie et d'autres matériaux par les halophytes

On dénombre à peu près 80 halophytes qui forment une source de matériaux à


haute valeur économique. Par exemple, les graines de Sesbania bispinosa sont utilisées
pour la fabrication de la gomme. De même, Grindelia camporum et Pandanus
fascicularis servent respectivement pour l'industrie de la résine et des parfums.
Plusieurs halophytes sont utilisées comme source d'énergie. En effet, les parties
aériennes de Prosopis Sp., Casuarina Sp. et de Tamarix Sp. servent de bois de chauffe
dans plusieurs régions du monde (Shay, 1990).

4. POTENTIALITES FOURRAGERES DES HALOPHYTES

4.1. PROBLEMATIQUE ET APPROCHE

Les résultats de l'enquête réalisée en 1997 par la Sous-Direction des Statistiques


Agricoles de la DGPA du Ministère de l'Agriculture Tunisien relative à l'utilisation
des sols, montrent que parmi les 8257000 hectares des terres agricoles, seulement
5750000 et 5404000 hectares sont labourables respectivement en 1995-1996 et en 1996-
1997. Ces superficies sont réparties comme suit:

Enquête de 1995-1996 Enquête de 1996-1997


103 hectares Pourcentage 103 hectares Pourcentage

Emblavures céréalières 2012.0 35.0 % 1126.0 20.8 %

Arboriculture 2071.7 36.0 % 2071.7 38.4 %

Légumineuses 107.9 1.9 % 74.3 1.3 %

Fourrages 392.0 6.8 % 367.0 6.8 %

Jachère 602.0 10.5 % 1233.0 22.8 %

Culture maraîchère 191.7 3.3 % 160.0 3.0 %

Irrigables 372.0 6.5 % 372.0 6.9 %

Les cultures fourragères comportent, essentiellement, l'orge en vert, le foin, la


vesce en grains et en ensilage pour les fourrages annuels et la luzerne, le cactus
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 11

inerme, le cactus épineux et certains arbustes pour les fourrages pluriannuels. Il


apparaît ainsi que l'aire de culture des plantes fourragères, ne représente que 6.8 %
des terres agricoles et se répartit comme suit:

Fourrage annuel Fourrage pluriannuel


(103 hectares) (103 hectares)
Nord 186.930 24.430

Centre 15.130 104.880

Sud 2.820 32.530

Total 204.880 161.840

Par ailleurs, en 1966, la superficie des parcours de la zone en dessous de la ligne


Gafsa–Maharès a été estimée à 6.8 millions d'hectares. Cette portion du territoire ne
compte qu'environ 2 millions d'hectares de parcours en 1985, ce qui correspond à
une réduction de 70 % des terres pâturables (Chaieb, 1986). D'autre part, la superficie
actuelle des parcours et des terres destinées à la production fourragère en Tunisie, ne
représente qu'environ 25 % des zones salées incultes. Dans les zones arides
algériennes habituellement à vocation pastorale, la production fourragère diminue
de façon continue depuis une vingtaine d'années pour atteindre une moyenne
annuelle de 66 millions d'unités fourragères lait (U.F.L). Cette production couvre
70 % des besoins en 1978 et uniquement 40 % en 1986 (Houmani, 1999).
Dans ce contexte, il serait intéressant d'identifier des plantes fourragères
tolérantes au sel pour les cultiver dans des zones marginales afin d'augmenter la
production nationale et combler le déficit en fourrage.
L'introduction et la culture des halophytes fourragères a un impact socio-
économique important dans les régions à bioclimat aride ou semi-aride et ayant des
ressources limitées en eau douce et en terres fertiles. L'utilisation des halophytes
offre à ces pays la possibilité d'atteindre leur autosuffisance alimentaire. En effet, la
culture de ces plantes favorise indirectement, mais immédiatement le développement
puisqu'elle améliore la production secondaire sans qu'il soit nécessaire d'introduire
de nouvelles habitudes alimentaires humaines dans ces pays. Le bétail peut être
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 12

familiarisé avec le fourrage halophytique pour produire du lait, de la viande, de la


laine et du cuir qui sont déjà des produits familiers à l'homme.
Une halophyte d'intérêt pastoral doit, en premier lieu, répondre au moins à trois
critères essentiels:
• être appétée par la majorité des espèces animales
• avoir une bonne valeur nutritive
• fournir une bonne production de matière sèche
et en second lieu, elle doit manifester d'autres caractéristiques, telles que:
• la facilité de multiplication
• la résistance au surpâturage
• la capacité de régénération
• la résistance à la sécheresse
• l'aptitude à protéger et à fixer les sols, en particulier sableux

4.2. PRODUCTION FOURRAGERE

Selon Shay (1990) et Malcolm (1996 a et b), 80 halophytes présentent des


potentialités fourragères. Mountasser et al. (2000) citent les feuilles et la pulpe
d'Argania spinosa comme source de fourrage pour les troupeaux au Maroc. De même,
Aslam et al. (2000) mentionnent plusieurs halophytes utilisées comme fourrage au
Pakistan, telles que Leptochloa fusca, Festuca arundinaceae, Sesbania aculeata et Leucaena
leucocephala. Aux Émirats Arabes Unies, des halophytes comme Paspalum vaginatum
et Avicennia marina sont utilisées dans l'alimentation du bétail, surtout des chameaux
(Böer et Lieth, 1999). Des expériences conduites en Palestine sur six halophytes
fourragères irriguées à de l'eau salée, montrent que Distichlis spicata produit des
quantités importantes d'une phytomasse de bonne qualité fourragère,
particulièrement pauvres en sel (Bustan et Pasternak, 2000). A Djibouti, les
mangroves constituent les principales ressources fourragères pour les dromadaires
(Faye, 1993). Spartina alterniflora, halophyte utilisée comme foin en Louisiana aux
U.S.A., produit 15 tonnes de matière végétale sèche par hectare et par an (Turner,
1993). Cette même espèce peut produire annuellement jusqu'à 48 tonnes MS / ha
dans la région de Georgia aux U.S.A. (Schubauer et Hopkinson, 1984). Cependant, le
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 13

ray-grass d'Italie et le dactyle, plantes fourragères conventionnelles, n'en produisent


respectivement que 22 et 26 tonnes (Binet, 1999). Dans les estuaires de l'ouest
européen, les parties aériennes des halophytes montrent un rendement en MS plus
élevé que celui de la luzerne, irriguée à l'eau douce et qui produit au maximum 10
tonnes / ha . an dans la région de Foggia au sud d'Italie (Martiniello, 1998). À titre
d'exemple, Salicornia Bigelovii Torr. produit 14 à 23 tonnes de matière sèche / ha . an
en condition d'irrigation à l'eau de mer (Glenn et al., 1997). La production annuelle
est de 7.3 tonnes de MS / ha chez Atriplex hastata (Binet et Thammavong, 1982), et de
17 et 24 tonnes de MS par hectare par an, respectivement chez Atriplex linearis et
Suaeda esteroa (Glenn et al., 1996). En milieu salé, Suaeda salsa et Batis maritima
produisent respectivement 20 et 15 tonnes de MS / ha . an (Zhao, 1991; Le Houérou,
1993). Cette production annuelle de biomasse est largement supérieure à celle des
Poaceae conventionnelles comme la fléole (7 tonnes / ha), le dactyle (10 tonnes / ha)
et la fétuque élevée (13 tonnes / ha) qui sont cultivées en conditions favorables
(Gillet, 1980). D'une façon générale, le rendement en matière sèche des halophytes les
plus productives varie de 8 à 17 tonnes /ha . an. Ce rendement est comparable à celui
du trèfle irrigué à l'eau douce (10 tonnes MS / ha . an; Bublot et Hallet, 1981) ou aussi
à celui d'une association de plantes fourragères conventionnelles formée de Trifolium
alexandrinum L. et de Lolium multiflorum L. (23 tonnes MS / ha . an; Mezni et al., 2000).
On peut même rencontrer des plantes fourragères dont la productivité est très faible,
comparativement à celles des halophytes. En effet, la productivité moyenne de la
strate herbacée de la chênaie est de 1 à 2 tonnes / ha . an (Qarro et De Montard,
1989).

4.3. VALEUR NUTRITIONNELLE DES ORGANES VEGETATIFS

Les études de Sleimi et Abdelly (2000) montrent que les parties aériennes de
Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora sont riches en azote, 3 à 4.2 % de la matière
sèche. D'autre part, Goodin (1979) signalent que les parties aériennes d'Atriplex
accumulent d'importante quantité de protéines brutes avec une teneur de 11 à 24 %
de la matière sèche. Ce taux dépend essentiellement de l'âge des plantes au moment
des récoltes et de la salinité du milieu de culture. Il est de l'ordre de 12 % du poids de
matière sèche chez la plupart des halophytes examinées par Bayoumi et al. (1990). À
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titre d'exemple, Atriplex halimus, Suaeda fruticosa et Nitraria retusa ont une teneur en
protéines, respectivement, de 13.2, 12.1 et 11.3 %. Atriplex barclayana et Atriplex
lentiformis, cultivés sur eau de mer, en contiennent respectivement 11.6 et 16.7 %
(Glenn et O'leary, 1984). Par contre, Zygophyllum album ne contient que 6.2 % de
protéines (Abd El Rahman, 1996). Par ailleurs, les résultats sont également attrayants
lorsqu'on examine la quantité de protéines totales accumulées par les différentes
halophytes. Glenn et al. (1996) montrent que des espèces comme Batis maritima,
Atriplex linearis, Salicornia bigelovii, Suaeda esteroa et Sesuvium portulacastrum
produisent une matière sèche relativement riche en protéines, environ 2 tonnes par
hectare. La production de protéines totales de la plupart des halophytes fourragères
varient de 0.6 à 2.6 tonnes par hectare (O'leary et al., 1985). L'estimation de la teneur
moyenne de trois prélèvements échelonnés dans le temps, montrent que Atriplex
barclayana et Atriplex nummularia contiennent respectivement 18 et 24 % de protéines
par rapport au poids sec des feuilles. Il apparaît ainsi que le rendement quantitatif et
qualitatif est sensiblement le même que celui de la luzerne irriguée à l'eau douce qui
ne produit que 0.5 à 3 tonnes de protéines totales par hectare (O'leary et al., 1985).
Ces teneurs en protéines rencontrées chez les halophytes sont largement suffisantes
pour l'alimentation animale. Kearl (1982) considère que des teneurs en protéines
brutes de l'ordre de 10 % sont assez élevées pour l'entretien et la croissance des
moutons et des chèvres. Cependant, les espèces fourragères ayant des taux bas en
protéines, peuvent être utilisées par les ruminants et permettent de couvrir les
exigences de leurs micro-organismes (El Shaer, 1997).

4.4. VALEUR NUTRITIONNELLE DES GRAINES

Le sel accumulé au niveau des tissus végétatifs n'est pas mobilisé vers les graines.
En effet, les tissus végétatifs de quelques halophytes, irriguées avec une eau salée,
accumulent de fortes quantités de NaCl. Cependant, leurs graines sont riches en
protéines et accumulent, normalement, de faibles quantités de sel (O'leary et al.,
1985). A titre d'exemple, les graines d'Atriplex lentiformis, Salsola pestifer, Cakile
edentula, Kosteletzkya virginica et Salicornia europaea contiennent respectivement 13, 17,
29, 24 et 30 % de protéines (O'leary et al., 1985). Cependant, la production des graines
chez les légumineuses et les Poaceae fourragères, cultivées en zones
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 15

méditerranéennes, est tributaire de l'évaporation, des précipitations et de la


température durant la période de croissance de la plante (Martiniello et Ciola, 1994).

4.5. IMPORTANCE DE LA COMPOSITION MINERALE DES HALOPHYTES

Les besoins des animaux en éléments minéraux varient en fonction du nutriment


et de l'animal. Selon Kearl (1982), une teneur en potassium comprise entre 0.6 et
0.8 % de matière sèche est suffisante pour l'alimentation des ruminants. La
concentration de cet élément chez plusieurs halophytes dépasse largement leurs
besoins. Ainsi, chez Nitraria retusa, Tamarix aphylla, Zygophyllum album, Salsola
tetrandra, et Suaeda fruticosa les taux de K+ dans leurs tissus sont respectivement 0.66,
0.78, 1.14, 1.29, et 1.45 % (Bayoumi et al., 1990; El Shaer et al., 1991).
Sans atteindre le seuil de toxicité, le contenu de la plupart des halophytes en
sodium et en calcium dépasse largement les besoins nutritionnels des animaux
(El Shaer, 1997). En effet, la diète des camélidés doit contenir 0.18 à 0.6 % de calcium
et 0.1 % de sodium (Kearl, 1982). Nitraria retusa, Tamarix aphylla, Avicennia marina et
Suaeda fruticosa accumulent respectivement 0.36, 0.43, 0.48 et 0.59 % de Mg2+ dans
leurs tissus (Bayoumi et al., 1990; El Shaer et al., 1991; Faye et al., 1992). Cependant,
les besoins du bétail sont de l'ordre de 0.13 % (Kearl, 1982). Les travaux de Bayoumi
et al. (1990) et d'El Shaer et al. (1991) ont montré que les halophytes étudiées sont
déficientes en soufre et en phosphore à l'exception de Nitraria retusa et Salsola
tetrandra qui contiennent respectivement 0.22 et 0.41 % de phosphore dans leur
matière sèche. Selon Kearl (1982), une matière végétale contenant 0.18 à 0.26 % de
soufre et 0.18 à 0.43 % de phosphore couvre les besoins nutritionnels des moutons et
des chèvres en ces éléments.
La diète des ruminants doit contenir aussi des micro-éléments tels que Zn et Cu.
Les besoins sont de 25 à 50 ppm pour le premier élément, et de 5 à 10 ppm pour le
second (N.R.C., 1981). Plusieurs halophytes examinées par El Shaer (1997)
contiennent des quantités adéquates de Zn et de Cu pour les herbivores.

4.6. APPETABILITE ET DIGESTIBILITE

Les teneurs élevées en NaCl dans le feuillage des halophytes constituent une
contrainte majeure de son utilisation dans l'alimentation du bétail. En effet, les
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 16

feuilles d'Avicennia marina et d'Avicennia officinalis peuvent contenir entre 46 et 88 g


de NaCl par Kg de matière sèche (Kotmire et Bhosale, 1980; Shukla et Shukla, 1986).
Cette caractéristique explique l'utilisation préférentielle de cette plante par le
dromadaire, capable d'ingérer des aliments très salés (Faye, 1993). Pour remédier à ce
problème d'ordre alimentaire, les halophytes sont fournies comme une composante
d'une diète mixte plutôt qu'une source unique d'alimentation. Des essais conduits
sur des chèvres ont montré que lorsque les parties aériennes d'Atriplex lentiformis et
d'Atriplex barclayana irriguées avec l'eau de mer constituent 25 % de la diète des
animaux, l'appétabilité et la digestibilité sont améliorées (Wiley et al., 1982). Une
autre alternative consiste à laver les plantes pour lessiver les sels. A titre d'exemple, 3
lavages des rameaux feuillés d'Atriplex par l'eau de pluie réduit de 66 % les teneurs
en cendres, mais ne modifie pas l'acceptabilité et la digestibilité par les animaux
(O'leary et al., 1985).
Les feuilles d'Avicennia marina, cultivées à Djibouti, sont pauvres en matières
azotées digestibles, environ 1.7 %. Cependant leur valeur énergétique, estimée par
l'énergie rapidement fermentescible, est élevée (Faye et al., 1992). Elles sont aussi
pauvres en cellulose (inférieure à 10 %), mais riches en lignine (supérieure à 6 %), ce
qui diminue la digestibilité du fourrage. Une complémentation azotée (sous forme de
concentrés à base de céréales) et minérale (blocs à lécher ou sels minéraux incorporés
au concentré) s'avère indispensable pour maintenir l'état de santé du cheptel
camélidé et permettre une croissance normale des jeunes dromadaires (Faye, 1993).
Atriplex halimus exprime une potentialité optimale de croissance à des
concentrations de sel comprises entre 50 et 200 mM (Ben Ahmed et al., 1996). Elle
constitue, en période de sécheresse, un fourrage apprécié par les camélidés, et
particulièrement par les ovins et les caprins qui constituent une importante source de
protéines animales pour l'alimentation des populations du sud du Maghreb (Kinet et
al., 1999; Benchaabane, 1999). Cependant, Atriplex stipitata est rarement consommée
par le bétail à cause de sa faible appétabilité qui est due essentiellement à des teneurs
élevées en saponine (Malcolm, 1996 a). Stiles (1987) a montré que les camélidés sont
beaucoup plus efficients que les bovins dans la conversion des végétaux en lait. Les
études, réalisées au Nord du Kenya, ont montré que le dromadaire peut produire
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 17

1 litre de lait par 2 Kg de matière sèche végétale consommée. Par contre, les bovins
consomment 9 Kg de matière sèche, pour produire la même quantité de lait (Stiles,
1987). Les études faites par Kinet et al. (1999) ont montré que les espèces, les
provenances ou les individus d'Atriplex les plus intéressants ne sont pas
nécessairement les plus agréables du point de vue goût. En effet, une palatabilité
excessive favorise le surpâturage. Les arbustes à palatabilité moyenne ou moyenne à
haute, sont préférables. Il a été montré aussi que la phytomasse fourragère provenant
des Atriplex est particulièrement riche en matières azotées, mais pauvre en énergie.
Ce déficit énergétique peut être comblé par les fourrages herbacés. Il apparaît ainsi
qu'une association équilibrée entre arbustes et plantes herbacées est nécessaire pour
assurer une bonne alimentation du cheptel (Kinet et al., 1999). A titre d'exemple,
El Shaer (1999) a montré que l'utilisation d'un ensilage d'herbacées et d'arbustes
halophytiques (Salsola, Nitraria, Atriplex) dans la diète des moutons, réduit de 47.5 %
le coût de production de la viande par rapport aux diètes conventionnelles. Le
mouton consomme 0.7 Kg par jour de foin ou d'Atriplex undulata. Cette quantité
ingérée est de 1.6 Kg lorsque le mouton consomme un mélange formé de 50 % de
foin et de 50 % d'Atriplex undulata (Malcolm, 1996 b).
À partir des résultats d'analyse chimique, il est difficile d'évaluer la valeur
alimentaire du pâturage dans la mesure où ces résultats sont le plus souvent en
dehors des limites prises en compte pour l'établissement des équations de prévision
(Andrieu et Weiss, 1981). Toutefois, on peut donner des ordres de grandeur. Chez le
dactyle, les valeurs énergétiques et azotées varient de 0.80 à 1.20 Unités Fourragères
Lait (U.F.L) par kg de matière sèche et de 80 à 230 g de Matière Azotée Digestible
(M.A.D) par Kg de matière sèche sur la base de la gamme de variation de la
composition chimique. Ces résultats montrent une très bonne valeur alimentaire
(Duru, 1987).
Expérimentalement, la digestibilité est estimée par la disparition de la matière
organique in vitro (IVOMD: in vitro organic matter disappearance). Des échantillons de
feuillage de 45 halophytes ont été incubés pendant 48 heures dans un inoculum du
liquide tampon du rumen puis digérés dans un milieu acide en présence de pepsine
durant 48 heures (O'leary et al., 1985). Ces résultats montrent que le taux de
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 18

digestibilité est élevé pour les halophytes: 50.1 à 87.2 %. Dans les mêmes conditions
expérimentales, l'IVOMD est de 39 % pour la paille du blé (Kayouli, 1979), 64.3 %
pour la luzerne (O'leary et al., 1985), 30 à 35 % pour la paille du riz (Chenost, 1995), et
de 35 à 45 % pour Panicum Sp. (Chenost et Kayouli, 1997). Pour quelques halophytes,
ce paramètre augmente avec la salinité du milieu (O'leary et al., 1985), mais il est
réduit avec la sénescence des plantes, le degré de lignification et la proportion des
parois végétales (Chenost et Kayouli, 1997).

4.7. AMELIORATION DE LA VALEUR FOURRAGERE

Certaines halophytes ont une bonne valeur alimentaire, un taux élevé de


digestibilité et un goût apprécié par les animaux. Cependant, les potentialités
fourragères d'autres halophytes sont moins évidentes. Différentes alternatives sont
envisageables pour améliorer leur utilisation:
(i) La complémentation: il s'agit d'une méthode nutritionnelle qui consiste
d'abord à apporter les éléments nutritifs manquants dans les fourrages
pauvres (matières azotées, éléments minéraux, vitamines) permettant aux
micro-organismes du rumen de mieux les digérer: c'est la "complémentation
catalytique". Elle n'est pas, cependant, suffisante pour assurer une
production substantielle. Une deuxième complémentation dite
supplémentaire consiste à apporter les nutriments permettant de couvrir les
besoins d'une forte production. Cet apport devra être réaliste sur le plan non
seulement nutritionnel mais également socio-économique prenant en
considération la disponibilité, le coût, et la faisabilité technique.
(ii) Les autres méthodes sont d'ordre technologique. Ce sont des traitements
physico-chimiques ou biologiques permettant de modifier les propriétés des
parois rendant le fourrage plus accessible aux micro-organismes du rumen
et, par conséquent, plus ingestible et plus digestible. Suivant les productions
zootechniques attendues, il conviendra d'enrichir parfois ces fourrages traités
par des nutriments.
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 19

5. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL DES HALOPHYTES

Après leur absorption par les plantes, les ions peuvent être accumulés sur place,
dans les racines ou transportés jusqu'au xylème qui les amène vers les parties
aériennes. Dans ces dernières, les ions suivent le courant de transpiration jusqu'aux
feuilles mâtures, qui les absorbent et éventuellement les réexportent par le phloème
vers les autres organes. Parmi ces ions, Na+ représente un cas particulier de deux
points de vue. D'une part, il est susceptible d'être présent à de très fortes
concentrations dans la solution du sol (un sol jugé modérément salé, ou une eau
d'irrigation considérée moyennement saumâtre contiennent déjà 1.5 à 3.0 g.l-1 de
NaCl soit 25 à 50 mM). D'autre part, toutes les études électro-physiologiques
concordent pour appuyer l'existence d'une expulsion active du sodium
cytoplasmique sur le plasmalemme et aussi parfois sur le tonoplaste (Pennarun,
1980; Jeschke et Nassery, 1981).
Plusieurs études montrent qu'il est indispensable aussi bien pour les plantes que
pour les animaux, de protéger les enzymes cytosoliques contre Na+, en le
compartimentant dans la vacuole, ou en l'expulsant vers le milieu (Kramer, 1983).
Dans les feuilles de Citrus, le volume apoplasmique (espace libre) est très faible par
rapport au volume du symplasme, de l'ordre de 0.017 ml.g-1 de matière fraîche soit
1.7 % du volume cellulaire (Zid, 1983). Il est alors indispensable que dans ces
organes, une synchronisation exacte soit assurée entre l'arrivée de Na+ par le xylème,
son absorption et sa compartimentation vacuolaire par les cellules, et / ou sa
réexportation et sa sécrétion (Greenway et Munns, 1980).
Selon la destinée des ions Na+ absorbés, les halophytes adoptent deux stratégies
différentes pour tolérer le sel.

5.1. STRATEGIE OSMOTIQUE

Une caractéristique importante de la tolérance au sel est l'ajustement osmotique


qui a été mis en évidence chez de nombreuses espèces végétales (Dreyer et al., 1990).
Il se fait à travers l'accumulation des ions inorganiques et des solutés organiques
dans les cellules de la feuille (Shalhevet, 1993; Läuchli et al., 1994).
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5.1.1. Ajustement par les ions inorganiques

Depuis longtemps, il a été supposé que les ions inorganiques, en particulier Na+ et
Cl-, s'accumulent dans les vacuoles des halophytes (Flowers, 1985). Cette
accumulation du sel peut être bénéfique pour ces plantes comparativement aux
glycophytes puisqu'elle pourrait conduire à un abaissement du potentiel hydrique
des cellules, ce qui pourrait augmenter leur approvisionnement en eau et amoindrir
la transpiration. En effet, certaines halophytes peuvent maintenir une teneur en ions
relativement constante dans leurs feuilles, non seulement par rapport à la masse de
matière sèche mais aussi par rapport à la masse de matière fraîche pour une large
gamme de concentrations de sel dans le milieu. Par exemple, chez Suaeda nudiflora,
les teneurs foliaires en Na+ et en Cl- passent respectivement de 4 à 5 et de 6 à 6.5
mmol.g-1 de matière sèche lorsque la C.E. du milieu de culture passe de 10 à
40 mS.cm-1 (Joshi et Iyengar, 1987).
Chez les halophytes dicotylédones, le comportement "inclusif" est efficace parce
qu'il est associé à de fortes vitesses de croissance et une séquestration d'importantes
quantités d'ions inorganiques dans la vacuole (Sleimi et Abdelly, 2001). La plupart
des halophytes utilisent Na+ et Cl- pour l'ajustement osmotique. Toutefois, les
niveaux d'accumulation dépendent des espèces et des conditions environnementales.
Chez Salicornia rubra, la concentration en Na+ et Cl- passe de 700 à 2000 mM entre le
début et la fin de la saison de croissance (Harward et McNulty, 1965). Selon Ungar
(1991), la concentration en Na+ varie de 151 mM chez Puccinellia peisonis à 2470 mM
chez Salsola sclerantha. Celle de Cl- passe de 167 mM chez Sarcobatus vermiculatus à
2900 mM chez Atriplex turcomanica. Ainsi, la contribution de Na+ et de Cl- dans le
potentiel osmotique est de 63 % chez Limoniastrum monopetalum (Abd Elrahman,
1967) et peut atteindre 96 % chez Sonneratia alba (Chapman, 1976). Certaines
halophytes utilisent plutôt K+ et SO 4 2- pour l'ajustement osmotique. La concentration
en potassium varie de 40 mM chez Halimione portulacoides à 910 mM chez Atriplex
turcomanica (Ungar, 1991). Chez Lepidium integrifolium se développant dans son
biotope naturel (désert de l'Utah), la part des sulfates dans le potentiel osmotique est
de 35 % contre 30 % pour NaCl (Weber, 1995).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 21

Pour maintenir une concentration en sel constante, les halophytes diluent leurs
sucs cellulaires par la formation d'organes succulents. Ainsi, chez Sonneratia alba,
quand l'épaisseur des feuilles passe de 0.44 à 2.46 mm, le potentiel osmotique évolue
de -32.6 à -35.1 bars, les chlorures étant essentiellement responsables de cette
évolution puisqu'ils contribuent pour 71 à 96 % de ce potentiel, respectivement dans
les feuilles les plus minces et les feuilles les plus épaisses (Chapman, 1976). Dans les
feuilles jeunes ou âgées de Rhizophora mucronata, la concentration en Cl- est toujours
comprise entre 500 et 550 mM malgré l'arrivée constante de NaCl par le flux de sève
xylémique. Cette régulation de la chlorinité est obtenue grâce à une augmentation
régulière du volume des feuilles de 0.03 ml par ml (Atkinson et al., 1967). Il y a donc
un processus de dilution du sel au fur et à mesure de son arrivée dans les parties
aériennes (Chapman, 1976). Ce phénomène de succulence se rencontre aussi bien
chez les espèces des marais saumâtres (Triglochin maritimum, Aster tripolium, Glaux
maritima Cochlearia anglica) et des mangroves (Avicennia, Ceriops, Bruguiera) que chez
les espèces des sables littoraux (Salsola kali, Honckenya peploides, Cakile maritima), des
milieux continentaux salés (Zygophyllum album) ou des falaises (Binet, 1999).

5.1.2. Ajustement par les solutés organiques

Chez les halophytes, la turgescence est assurée par l'absorption des ions
inorganiques tels que Na+ et Cl-. Il a été rapporté que ces ions sont essentiellement
séquestrés dans les vacuoles puisque les différentes enzymes des halophytes ne
montrent pas une adaptation particulière aux concentrations élevées en électrolytes
(Munns et al., 1983). L'accumulation et la compartimentation des solutés organiques à
faible poids moléculaire, comme la proline et la glycine bétaïne, dans le cytoplasme
permet de maintenir un équilibre osmotique entre le cytoplasme et la vacuole (Wyn
Jones et Gorham, 1983). Cependant, les méthodes fiables manquent pour quantifier la
répartition des solutés organiques dans les différents compartiments cellulaires.

La proline
Beaucoup de plantes supérieures ont été signalées pour leur pouvoir d'accumuler
de la proline libre en réponse essentiellement à la sécheresse (Naidu et al., 1992) et à
la salinité (Ashraf, 1989; Madan et al., 1995; Haouala, 1999).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 22

Joshi et Iyengar (1987) ont mis en évidence chez Suaeda nudiflora Moq. une
corrélation positive entre la concentration en NaCl dans le milieu de culture et les
quantités de proline accumulées. En effet, les teneurs en proline augmentent de 196 à
293 µg.g-1 de matière sèche lorsque la conductivité électrique du milieu de culture
varie de 10 à 40 mS.cm-1. Ce comportement est observé aussi au niveau des racines et
des feuilles de Spartina alterniflora et de Spartina patens (Naidoo et al., 1992). Frankenia
thymifolia et Zygophyllum Sp. peuvent accumuler respectivement 140 et 45 mM de
proline par Kg de matière fraîche (Popp et Albert, 1995). De même, Cavalieri et
Huang (1979) montrent que la proline n'augmente significativement dans les tissus
de Limonium carolinianum, Spartina alterniflora et Salicornia virginica que lorsque la
salinité dépasse respectivement 250, 500 et 700 mM de NaCl. Cependant, chez
Atriplex spongiosa et Spartina townsendii, l'accumulation de proline n'augmente pas
avec la salinité du milieu (Storey et Wyn Jones, 1975).
Outre son rôle d'osmorégulation et de mise en réserve de l'azote, la proline
contribue à la conservation de l'intégrité des tissus des plantes soumises à divers
stress, en tant que protecteur hydrophobe des enzymes et des structures cellulaires
(LeRudulier et al., 1984; Madan et al., 1995). Les niveaux élevés de la proline, chez les
plantes stressées, s'expliquent par une stimulation des voies de sa biosynthèse et une
inhibition de sa dégradation. À titre d'exemple, il a été rapporté, chez Triticum
aestivum, que l'activité de la pyrroline 5-carboxylate réductase, enzyme impliquée
dans la biosynthèse de la proline, est significativement augmentée (Charest et Pan,
1990). Parallèlement, Madan et al. (1995) ont montré une inhibition de l'oxydase de la
proline, enzyme du catabolisme, chez Brassica juncea L. soumis au sel. Les travaux de
Ketchum et al. (1986) ont révélé, chez Distichlis spicata, que ce composé azoté est
localisé dans le cytoplasme où il pourrait développer un potentiel osmotique
équivalent à celui du milieu de culture et ce, sans gêner les activités enzymatiques
puisque, in vitro, des concentrations de proline de 600 mM ne sont pas montrées
inhibitrices des enzymes. Il a été montré, par exemple, que la proline stabilise l'une
des formes de la glutamine synthétase des feuilles de Triglochin maritimum (Ahmad et
al., 1982). Par ailleurs, la malate déshydrogénase, extraite des feuilles de Juncus
articulatus, est légèrement activée en présence de proline 2 M (Rozema, 1979).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 23

D'autres études ont déduit que la biosynthèse de cet acide aminé est régulée par sa
concentration tissulaire: un apport exogène de proline inhibe sa bioshynthèse. Il
semble qu'une fois synthétisée, la proline inhibe les enzymes responsables de sa
synthèse ou agit sur l'expression des gènes codant ces enzymes (Heyser et al., 1989).

La glycine bétaïne
L'augmentation de la salinité dans le milieu de culture des halophytes induit une
augmentation de la concentration des osmolytes compatibles telle que la glycine
bétaïne (Wyn Jones et al., 1984). Les Chenopodiaceae produisent la glycine bétaïne en
réponse aux stress hydrique et salin (Marcum et Murdoch, 1992). Une corrélation
positive entre l'accumulation de la glycine bétaïne et la concentration en sel a été
observée chez Spartina alterniflora (Otte et Morris, 1994), Sesuvium portulacastrum
(Venkatesalu et al., 1994 a), Atriplex semibaccata, A. halimus et A. griffithii (Koheil et al.,
1992; Khan et al., 1998). Chez Suaeda fruticosa, la teneur en glycine bétaïne augmente
significativement de 600 à 1200 mM.Kg-1 de matière sèche lorsque la salinité du
milieu passe de 0 à 600 mM NaCl. À partir de 800 mM NaCl, les teneurs en glycine
bétaïne demeurent stables (Khan et al., 1998). Des travaux récents ont montré que la
glycine bétaïne s'accumule particulièrement dans les feuilles jeunes de Spartina
alterniflora (Colmer et al., 1996) et d'Avicennia marina (Ashihara et al., 1997).
Cet osmoticum est produit essentiellement dans le cytoplasme (Wyn Jones, 1984).
Si la majorité de la glycine bétaïne est séquestrée dans le cytoplasme, qui représente
environ 10 % du volume cellulaire total, une concentration de 200 à 300 mM serait
suffisante pour assurer un équilibre osmotique entre le cytoplasme et la vacuole de
Sporobolus virginicus cultivé en présence de forte concentration saline (Marcum et
Murdoch, 1992). En plus de son rôle osmotique, la glycine bétaïne assure une
protection des cellules contre certaines voies de dégradation. À titre d'exemple, dans
des feuilles excisées de Suaeda macrocarpa, l'apport de 130 mM de NaCl dans le milieu
de flottaison crée l'apparition d'une forte activité ribonuléasique. Ce phénomène est
fortement réduit par un apport exogène de glycine bétaïne (Billard et al., 1986). En
1985, Rozema et al. ont montré, chez Salsola kali, que les effets délétères du sel
s'expriment rapidement lorsque cette halophyte est soumise à un régime limitant en
azote, très probablement en raison d'une inaptitude des plantes à synthétiser la
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 24

glycine bétaïne. Selon McDonnell et Wyn Jones (1988), la synthèse de cet


osmorégulateur se ferait à partir de la choline issue de la sérine chez les
Chenopodiaceae et des phospholipides chez les Poaceae.

Les sucres solubles


Parmi les composés compatibles susceptibles de s'accumuler dans les cellules sous
l'action du sel, les sucres solubles occupent une place distincte (Levigneron et al.,
1995; Bolarin et al., 1995). Le glucose, le fructose et les oligosaccharides, hydrolysés
par l'invertase, constituent les principaux osmoticums (Delane et al., 1982). Ces
glucides seraient impliqués en particulier dans le maintien de l'intégrité des
structures membranaires, chloroplastiques et mitochondriales (Hoekstra et al., 1991).
Ils interviennent également dans l'ajustement osmotique, mais d'une façon plus
efficace chez les monocotylédones que chez les dicotylédones. En effet, chez les
Poaceae et les Cyperaceae qui n'accumulent pas le sel, les concentrations en sucres
solubles peuvent atteindre 200 mM (Hammer, 1986). Chez Phragmites communis, près
de 50 % du potentiel osmotique sont dus au saccharose (Matoh et al., 1988).
Cependant, l'accumulation de sucre est déterminante dans la tolérance au sel de
certaines dicotylédones comme Beta vulgaris ssp. maritima (Koyro et Huchzermeyer,
1999) ou Chenopodium quinoa (Prado et al., 2000). Chez Sesuvium portulacastrum, les
teneurs foliaires en sucres totaux diminuent de 34 mg.g-1 MS en absence de sel à
23 mg.g-1 MS en présence de 600 mM NaCl (Venkatesalu et al., 1994 a). Au-delà de
cette dose, les teneurs en hydrates de carbones augmentent avec la salinité du milieu.
Cette diminution s'explique par une utilisation préférentielle des sucres pour la
synthèse de la proline ou de la glycine bétaïne (Venkatesalu et al., 1993). Les feuilles
de Spartina alterniflora, récoltées dans les marais salées de Californie, montrent des
teneurs élevées en saccharose et en glucose (Otte et Morris, 1994). Le premier assure
avec le sodium l'ajustement osmotique dans les feuilles adultes, alors que le second
intervient dans l'osmorégulation des feuilles jeunes (Colmer et al., 1996).
L'accumulation de sucres solubles peut être attribuée à une hydrolyse de l'amidon
(Zhang et Archbold, 1993) et / ou à l'inhibition de certaines des voies métaboliques
de sa synthèse (Imamul Huq, 1984).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 25

Di-methyl-sulfonio-propionate (DMSP)
Le DMSP est un composé compatible accumulé chez certaines angiospermes
tolérantes au sel (Malin et Kirst, 1997; McNeil et al., 1999). Du point de vue structure,
il est analogue aux bétaïnes et il joue le rôle d'un osmoprotecteur (Vianney et al.,
1998). Le DMSP diffère des bétaïnes par le fait qu'il contient du soufre à la place de
l'azote. En effet, chez les plantes accumulatrices de DMSP, il apparaît que la
substitution des bétaïnes par le DMSP se fait lorsque l'azote est rare (Colmer et al.,
1996; Cooper et Hanson, 1998). Chez Spartina alterniflora la biosynthèse du DMSP
semble être induite par le sel. Il s'accumule spécifiquement dans les feuilles (Dacey et
al., 1987). Cependant, les travaux de Otte et Morris (1994) sur Spartina alterniflora L.
suggèrent que les voies de la biosynthèse du DMSP s'expriment de manière
constitutive indépendamment de la salinité du milieu.
Spartina alterniflora synthétise le DMSP par la voie du S-méthyl-Methionine
(Fig. 1.1) qui donne en premier lieu le 3-DMSPamine en présence d'une enzyme,
appelée "S-méthyl-Methionine decarboxylase" (Kocsis et Hanson, 2000).

NH3+ NH3+

+ CH3 +
S COO- S COO-
L-Met L-SMM

- CO2 SMM décarboxylase

NH3+

+
S
DMSP-amine

- NH2 DMSP oxydase

COO- CHO
+ - 2H +
S S
BA dehydrogenase
DMSP DMSP-aldehyde

Figure 1.1. La voie de biosynthèse du DMSP chez Spartina alterniflora selon


Kocsis et Hanson (2000). Met: méthionine, SMM: Sulfure-méthyl-Methionine,
DMSP: di-methyl-sulfonio-propionate, BA: bétaïne aldehyde.
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 26

Selon ces auteurs, il existe aussi chez Spartina alterniflora une deuxième enzyme
appelée "di-methyl-sulfonio-propionate oxydase", qui intervient dans l'oxydation
catalytique du 3-DMSPamine pour donner le 3-DMSPaldéhyde. Enfin, la synthèse du
DMSP à partir de ce dernier composé se fait grâce à une enzyme commune à tous les
angiospermes appelée "bétaïne-aldehyde dehydrogenase" (Trossat et al., 1997;
Vojtěchová et al., 1997). La figure 1.1 schématise la voie de biosynthèse du di-methyl-
sulfonio-propionate.

Autres composés compatibles


Chez Honckenia peploides, l'accumulation du pinitol augmente avec la salinité du
milieu (Gorham et al., 1981). Chez Mesembyanthemum crystallinum, cet effet se
manifeste dans les chloroplastes (230 mM) et dans le cytosol (100 mM) pour
équilibrer le potentiel osmotique vacuolaire dû principalement à Na+ et Cl- (Paul et
Cockburn, 1989). La synthèse du pinitol est assurée par la myo-inositol-O-transferase,
protéine identifiée et isolée à partir des cellules de Mesembyanthemum crystallinum
(Vernon et Bohnert, 1992).
Un autre osmorégulateur non moins important a été identifié chez plusieurs
halophytes, il s'agit de l'acide oxalique qui intervient dans l'ajustement osmotique
chez Halimione portulacoides (Baumeister et Kloos, 1974). Il est également impliqué
dans l'équilibre de l'excès de Na+ par rapport à Cl-. En effet, une corrélation étroite
entre l'accumulation de Na+ et celle de l'acide oxalique a été observée. Chez l'Atriplex,
l'excès de cations accumulés par rapport à Cl- est en grande partie équilibré par
l'oxalate (Osmond, 1967).

5.2. STRATEGIE D'EVITEMENT

Vis-à-vis du sel, les halophytes doivent trouver un compromis entre accumulation


et exclusion du sel. L'accumulation du sel dans les cellules peut être bénéfique
puisqu'il en résulte un abaissement du potentiel hydrique des cellules permettant
leur ravitaillement en eau avec une diminution de la transpiration. Cependant, cette
accumulation peut gêner le fonctionnement normal du métabolisme, par exemple en
inhibant l'activité des enzymes. Inversement, l'exclusion du sel hors des cellules,
activerait la machinerie métabolique, mais rendrait difficile le maintien d'un bon
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 27

équilibre hydrique et ralentira ainsi le métabolisme. Cette deuxième stratégie est


adoptée par des plantes "exclusives" qui, bien que fréquentes dans les habitats salins,
excluent le sel de leurs tissus et maintiennent une faible vitesse de croissance (Wyn
Jones, 1981; Yeo et Flowers, 1983).
La sécrétion du sel permet à Spartina alterniflora de contrôler la concentration
saline de ses tissus, notamment dans les feuilles, surtout que cette plante ne possède
pas de mécanismes particuliers pour limiter l'entrée du sel au niveau des racines
(Sleimi et Abdelly, 2000; 2001). A titre d'exemple, Binet (1999) a montré, chez
Aegialitis, que la sève brute est relativement riche en NaCl, apportant aux feuilles des
quantités importantes de sel. Pourtant, au fur et à mesure qu'elles vieillissent, ces
organes s'appauvrissent en sel et ce, parce qu'une grande partie est éliminée par des
glandes sécrétrices dont l'activité permet le rejet de 5.8 mg de NaCl par feuille et par
jour. Des feuilles isolées d'Aegialitis annulata, de Plumbago auriculata et de Limonium
latifolium soumises à des solutions isotoniques (100 mM) de KI, KCl, NaCl, Na 2 SO 4 ,
MgCl 2 ou MgSO 4 sécrètent indifféremment les ions de ces différents milieux
(Faraday et Thomson, 1986). Les flux de sécrétion les plus élevés ont été observés
chez les Plumbaginaceae. Limonium latifolium rejette 0.29 à 0.86 mg de liquide / heure .
cm². En 24 heures, une feuille peut ainsi secréter une quantité de liquide égale à la
moitié de son poids (Arisz et al., 1955). Les feuilles d'Avicennia marina secrète 0.3
mmol de NaCl par jour et par g de MS ce qui représente 40 % des quantités
accumulées quotidiennement dans les feuilles (Waisel et al., 1986). Le volume du
liquide secrété croît avec la concentration saline du milieu extérieur chez Armeria
maritima (Baumeister et Ziffus, 1981) à condition que cette concentration externe ne
dépasse pas une certaine limite au-delà de laquelle la sécrétion diminue et perd de
son efficacité (Rozema, 1975). Cette sécrétion a lieu surtout pendant la nuit car
l'humidité et la rosée nocturne dissolvent les cristaux de sels déposés à l'entrée des
pores des glandes, assurant une pérennité de la sécrétion (Hansen et al., 1976).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 28

5.2.1. Appareils sécréteurs

Les glandes à sels


La sécrétion du sel chez les halophytes est assurée par des dispositifs spécifiques
appelés appareils sécréteurs. En effet, des différenciations épidermiques ou sous-
épidermiques de certaines plantes sont spécialisées dans la sécrétion des sels
minéraux et essentiellement du chlorure de sodium, ce sont les glandes à sels.
Gorham (1996) a mentionné leur existence chez les Plumbaginaceae, les Tamaricaceae,
les Poaceae, les Primulaceae, et les Frankeniaceae. Quoique de structure variée, ces
glandes montrent de nombreux caractères cytologiques communs dont un
cytoplasme dense, un grand noyau, de nombreuses mitochondries et des parois des
cellules sécrétrices riches en plasmodesmes. Chez Spartina townsendii, les glandes à
sel sont au nombre de 42 et 27 par cm², respectivement sur les faces supérieures et
inférieures des feuilles (Waisel, 1972). Chez Statice gmelini, il y a 722 glandes par cm²
sur la face supérieure des feuilles et 644 par cm² sur la face inférieure (Lüttge, 1971).
Le nombre de glandes à sels peut être plus élevé chez d'autres espèces. À titre
d'exemple, il est, en moyenne, de 2100 / cm² chez Avicennia marina et de 4800 / cm²
chez Aeluropus littoralis (Waisel, 1972).
Chez la plupart des Poaceae, la glande à sel a une structure bicellulaire: la cellule
basale et la cellule apicale. Néanmoins, une structure à une cellule unique a été
décrite chez Porteresia coarctata (Gorham, 1996). Les parois de ces cellules sont
souvent subérisées et cutinisées. Dans les glandes à deux cellules, il y a une variation
dans la forme, la taille et l'étendue de la cellule basale. La cellule apicale est en
contact direct uniquement avec la cellule basale et non avec les cellules de l'épiderme
(Oross et al., 1985). Levering et Thomson (1971) montrent que les glandes à sels de
Spartina foliosa sont formées de deux cellules dépourvues de pores bien différenciés
(Photo 1.1). Le transport des ions dans différentes glandes à sels peut s'effectuer aussi
bien par voie apoplasmique que par voie symplasmique (Campbell et al., 1974).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 29

Photo 1.1. La cellule apicale (à droite) et la cellule basale (à gauche) d'une


glande à sel de Spartina alterniflora d'après Levering et Thomson (1971). c:
compartiment de collection, cu: cuticule décollée, n: noyau, m: mitochondrie,
pm: membrane de séparation, w: paroi, wp: protubérance de la paroi.
Grossissement 6500 fois.

Les poils épidermiques sécréteurs


La protection des sites métaboliques sensibles du mésophylle contre le sel peut
aussi avoir lieu par des poils épidermiques spéciaux. Bien que de tels poils
fonctionnent seulement pour une période habituellement courte et leur capacité de
stockage est limitée, il a été signalé que leur rôle paraît assez important dans
l'élimination du sel à partir des organes aériens (Ungar, 1991).
L'accumulation de sel dans des vésicules est un comportement bien connu chez
plusieurs espèces semi-halophiles et halophiles de la famille des Chenopodiaceae
comme les Atriplex Sp. (Photo 1.2). Chez ces plantes, les poils à sels comprennent
deux cellules; une petite cellule pédicellaire et une grande cellule vésiculaire
(Mozafar et Goodin, 1970). Les feuilles de Halimione portulacoides sont recouvertes de
poils dont le diamètre de la cellule terminale vésiculaire peut atteindre 200 µm
(Baumeister et Kloos, 1974). La structure de la cellule pédicellaire montre de grandes
ressemblances à celle des glandes à sels. Elle est composée d'un cytoplasme dense et
riche en mitochondries, en reticulum endoplasmique et en petites vésicules.
Cependant, les poils à sels contiennent en plus des chloroplastes (Waisel, 1972). Les
cellules pédicellaires sont connectées aux cellules vésiculaires adjacentes par de
nombreux plasmodesmes. Avant de se dessécher, les poils sécréteurs accumulent de
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 30

grandes quantités de sodium pouvant atteindre 18 % de la matière sèche chez


Atriplex confertifolia (Breckle, 1974). L'efficacité d'une telle élimination de sels est
grande chez les Atriplex vivaces telles que Atriplex halimus (Smaoui, 1975) où
plusieurs générations de poils se succèdent, les poils jeunes refoulant vers l'extérieur
les poils âgés dont le pédicelle se rompt.

Photo 1.2. Cellule pédicellaire et cellule vésiculaire d'un trichome d'Atriplex


d'après Thomson (1975). v: vacuole, n: noyau. Grossissement 6700 fois.

Les épidermes sécréteurs


Chez Zostera capensis, dont les tiges feuillées sont constamment immergées dans
l'eau salée, des cellules épidermiques à parois externes épaisses limitent les feuilles et
présentent toutes les caractéristiques des cellules de transfert, réputées responsables
du transport à courte distance de diverses substances (Barnabas et al., 1977). La partie
externe de la paroi de ces cellules épidermiques de Zostera capensis est plus épaisse
que partout ailleurs. De plus sous la mince cuticule qui délimite ces cellules, on
observe des cavités ovoïdes ou arrondies contenant un matériel fibreux. Le contenu
de ces cavités pariétales serait rejeté par des micro-pores de la cuticule quand la
cellule atteint sa taille définitive (Barnabas et al., 1980).

5.2.2. Mécanisme de la sécrétion

Le mécanisme de la sécrétion a été décrit particulièrement dans le cas des glandes


à sels. Le mouvement du liquide de la cellule basale à la cellule apicale se fait à
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 31

travers les connections du plasmodesme entre les deux cellules. Une solution
enrichie en sel est stockée dans la chambre de collection entre la paroi de la cellule
apicale et la cuticule qui s'est décollée. Cette dernière s'étire en ramenant la solution
saline à la surface de la feuille via de petits espaces libres de la cuticule
(Gorham, 1996).
Les expériences conduites par Arisz et al. (1955) montrent que la sécrétion des
chlorures est légèrement stimulée aux faibles concentrations des divers inhibiteurs
utilisés (fluorure de sodium, arsénite et cyanure de potassium). Le carbonylcyanure3-
chlorophenylhydrazone (CCCP) inhibe fortement le processus de sécrétion chez
Aegialitis, et ceci après 2 heures de son application (Atkinson et al., 1967). Ainsi, le
mécanisme de la sécrétion semble être actif puisque les conditions anaérobiques
empêchent la sécrétion au niveau des feuilles de Limonium latifolium (Arisz et al.,
1955). L'étude des potentiels transmembranaires, du transit des ions radioactifs et de
la dynamique d'entrée et de sortie des ions dans des disques foliaires de Limonium
vulgare révèle que les ions entreraient dans la glande par la voie cytoplasmique donc
par influx passif (Hill et Hill, 1973). Les sels parvenus aux cellules sécrétrices grâce
aux plasmodesmes seraient activement rejetés dans l'espace libre de ces cellules
(efflux actif) avant de passer à l'extérieur comme le suggère l'étude des potentiels
électrochimiques des ions Na+, K+ et Cl- dans l'exsudat. Une ATPase activée par Cl- a
été mise en évidence dans ces tissus. Il apparaît ainsi que chaque glande possède une
véritable pompe qui concentre dans une première phase les sels avant de les refouler
dans le milieu extérieur.
Dans le cas des poils glanduleux d'Atriplex semibaccata (Campbell et al., 1974) et de
Tamarix aphylla (Campbell et Thomson, 1975), l'étude de la localisation de Cl- suggère
que les ions migrent vers les glandes en empruntant l'apoplasme ce qui suppose une
entrée dans les glandes à travers le plasmalemme donc un influx métabolique. La
sortie du liquide salé pourrait être purement passive comme dans le cas du Limonium
latifolium où l'accumulation des sels dans les glandes crée un afflux d'eau et
augmente la pression interne. La glande étant entourée d'un squelette cutinisé rigide,
ne pouvant donc se gonfler, le liquide qui s'y accumule sous pression sort par les
pores sécréteurs (Sutcliffe, 1962).
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 32

5.2.3. Exclusion racinaire

Les substances accumulées par les tissus aériens des plantes peuvent être
éventuellement amenées vers les racines via le phloème pour être excrétés dans le
milieu. Ce phénomène contribue fortement à la limitation de l'accumulation du sel au
niveau des racines de Spartina alterniflora (Bradley et Morris, 1991 a). D'autres études
ont mis en évidence l'excrétion racinaire du sel chez Avicennia marina (Waisel et al.,
1986) et Leptochloa fusca (Gorham, 1987). Ce mécanisme a été également démontré par
Von Willert (1969) qui a décrit les fluctuations des teneurs en Na+ et en Cl- chez
Salicornia europeae cultivée en milieu salé. La diminution régulière du contenu en sels
en début d'après-midi et durant la nuit en l'absence de lessivage externe des plantes,
suggère également l'exclusion du sel au niveau des racines de cette espèce. Les ions
Na+ et Cl- seront transportés des parties aériennes vers les racines, et seront
périodiquement libérés dans la rhizosphère. Chez Spartina alterniflora, l'exclusion
racinaire représente, au moins, 91 % de l'absorption théorique maximale et augmente
significativement avec la salinité du milieu de culture (Bradley et Morris, 1991 a). De
même, Waisel et al. (1986) ont montré qu'Avicennia marina est capable d'exclure, par
ses racines, 80 % des prélèvements totaux de sel. Chez Sporobolus fimbriatus,
l'exclusion représente 94 % des sels absorbés mais n'accuse aucune variation quand la
salinité du milieu augmente de 100 à 200 mmol (Wood et Gaff, 1989).

5.3. ALIMENTATION MINERALE DES HALOPHYTES

La nutrition minérale de la plante est déjà assez complexe lorsqu'elle a lieu dans
un environnement fertile et non salin. En présence de NaCl, l'activité des nutriments
est réduite en dépit de leurs fortes concentrations dans la solution du sol.
Généralement, Na+ et Cl- peuvent dépasser largement les concentrations des
éléments nutritifs ce qui crée un déséquilibre nutritionnel. Ce dernier peut également
résulter des effets de la salinité sur la disponibilité, l'absorption et la distribution des
nutriments dans la plante ou encore d'une augmentation des exigences de la plante.
La disponibilité des ions nutritifs dans la rhizosphère et leur absorption par les
plantes sont tributaires de l'activité de l'ion dans la solution du sol qui dépend du pH
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 33

et de la concentration, des interactions possible avec d'autres ions et des facteurs de


l'environnement.

5.3.1. Nutrition potassique

Le potassium est abondant dans la croûte terrestre, mais la majeure partie entre
dans la constitution des minéraux du sol et seule une fraction de 1 à 4 % du contenu
total en K+ est fixée au niveau des colloïdes et constitue la fraction échangeable
(Mengel et Kirkby, 1982 a). Au niveau des sols salés, Na+ se substitue à de nombreux
cations et en particulier à K+. Ce remplacement conduit à un appauvrissement
progressif du sol en K+ puisqu'une fois libéré dans la solution du sol, il peut être
facilement entraîné au cours du lessivage. Par ailleurs, les quantités prélevées par les
plantes deviennent difficiles à compenser par le complexe adsorbant du fait de sa
saturation en sodium. Outre son action sur la disponibilité de K+, NaCl limite son
absorption par les racines (Hajji, 1983; Soltani et al., 1990; Sleimi et al., 1999).
En général, la teneur des organes en K+ diminue en fonction de la salinité du
milieu chez de nombreuses halophytes telles que Spergularia marina (Cheeseman et
Wickens, 1986), Sarcocornia natalensis (Naidoo et Rughunanan, 1990), Atriplex prostrata
(Wang et al., 1997), Halosarcia pergranulata (Short et Colmer, 1999) et Suaeda fruticosa
(Sleimi et al., 1999). Cet effet est associé à une baisse de l'absorption de K+ et de son
transport vers les parties aériennes. Cependant, il existe de nombreuses exceptions à
cette règle générale. Par exemple, chez Cereus validus, l'addition quotidienne de
50 mM de NaCl dans le milieu extérieur et ce, jusqu'à une salinité globale de 600 mM,
fait passer la concentration de NaCl dans les racines de 7 à 100 mmol sans, toutefois,
affecter la teneur de K+. Dans les tiges feuillées de Cereus validus, Na+ passe de 8 à
17 mmol alors que K+ augmente de 16 à 60 mmol (Nobel et al., 1984). Chez Sesuvium
portulacastrum, la teneur foliaire en K+ augmente de 223 à 418 µmol.g-1 MS lorsque la
concentration du milieu passe de 0 à 600 mM NaCl (Venkatesalu et al., 1994 b). Au-
delà de cette concentration les teneurs foliaires en K+ diminuent pour atteindre 380
µmol.g-1 MS à 900 mM NaCl. La teneur en K+ dans les feuilles de jeunes plantes
d'Avicennia marina augmente avec la salinité du milieu (Ashihara et al., 1997).
Analysant la réponse de plusieurs halophytes au sel, Glenn et al. (1992) ont
remarqué que ces plantes diffèrent largement par les niveaux d'accumulation de Na+
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 34

et de K+ et par leur degré de tolérance au sel. Ils répartissent ces plantes en deux
groupes physiologiques, le premier dit "high-sodium physiotype" correspond aux
halophytes les plus tolérantes ou euhalophytes. Il est représenté essentiellement par
des Chenopodiaceae qui peuvent maintenir leur potentiel osmotique à des niveaux
plus bas que celui du milieu extérieur. Ces espèces sont capables de maintenir leur
potentiel osmotique à des niveaux plus bas que celui de la solution du sol grâce à
une capacité remarquable d'absorption et de séquestration de Na+ et de Cl- dans
leurs vacuoles. La contribution de K+ dans l'ajustement est d'une moindre
importance et ne dépasse guère les 4 % du potentiel osmotique chez Sarcocornia
natalensis cultivée en présence de 500 mM de NaCl (Naidoo et Rughunanan, 1990) et
4.4 à 9.2 % chez 10 autres euhalophytes se développant à 540 mM NaCl (Glenn et
O'leary, 1984). Ces plantes maintiennent des rapports K+ / Na+ inférieurs à 1 même
pour les plus faibles salinités du milieu. A titre d'exemples, chez Aster tripolium,
Plantago maritima et Spergularia media collectés dans leur biotope naturel, ce rapport
est respectivement de 0.128, 0.118 et 0.076 (Cheeseman et al., 1985). Chez d'autres
halophytes, il peut varier de 0.03 à 0.10 notamment en condition d'irrigation à l'eau
de mer (Glenn et al., 1992). Chez ce premier groupe d'halophytes, l'efficacité
d'utilisation de K+ augmente avec la salinité du milieu de culture traduisant une
forte capacité de substitution de K+ par Na+ (Cheeseman et Wickens, 1986). Ce cation
semble être réservé exclusivement pour le contrôle d'un nombre élevé d'enzymes
cytosoliques dont l'activité en dépend totalement ou partiellement (Koyro et
Huchzermeyer, 1997).
Le deuxième groupe physiologique appelé "low-sodium" ou "high potassium" est
représenté par les halophytes monocotylédones et les dicotylédones miohalophytes
caractérisées par une tolérance faible à moyenne ou par des potentialités limitées de
croissance en présence de fortes doses de sel (Glenn et al., 1992). Ces plantes
montrent des rapports K+ / Na+ de l'ordre de 2.0 quand elles se développent sur
l'eau non salée, et de 0.33 à 0.5 en présence de sel. Le potassium est fortement
impliqué dans l'ajustement osmotique, sa part varie de 16 à 46 % chez 14 halophytes
cultivées sur 540 mM de NaCl (Glenn, 1987). Chez Kosteletzkya virginica cultivée en
présence de 255 mM de NaCl, K+ représente 25 à 75 % de la charge cationique des
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 35

feuilles (Blits et Gallagher, 1990).En dépit de cette variabilité spécifique pour le


caractère accumulation K+ et Na+, les rapports K+ / Na+ dans les tissus sont
systématiquement plus élevés que ceux du milieu de culture. Ceci illustre
l'absorption sélective de K+ aux dépens de Na+ qui est universelle et constitue l'un
des mécanismes impliqués dans l'adaptation des végétaux à la salinité (Watad et al.,
1991). Chez Sarcocornia natalensis cultivée en présence de 500 mM NaCl (Naidoo et
Rughunanan, 1990) et Atriplex amnicola cultivée à 400 mM NaCl (Aslam et al., 1986),
le rapport K+ / Na+ est respectivement de 0.04 et de 0.08. Alors que dans le milieu de
culture, il est de 0.012 pour la première espèce et de 0.0012 pour la seconde.
Plusieurs données indiquent une compétition entre Na+ et K+ au niveau de
l'absorption suggérant que les systèmes de transport de ces deux cations sont
similaires (Niu et al., 1995). Deux systèmes sont impliqués dans l'absorption de K+.
Le système I a une grande affinité pour K+ (K m est de 10 à 30 µM) permettant
l'absorption de K+ aux faibles concentrations de ce cation. Il assurerait une
alimentation potassique de base, même en présence d'une forte salinité puisqu'il
n'est pas inhibé par Na+ (Rains et Epstein, 1967). Le système II contrôle l'absorption
de K+ à des concentrations externes en potassium élevées (de l'ordre du mM) et
présente une faible sélectivité K+ / Na+.

5.3.2. Nutrition calcique

Le calcium joue un rôle nutritionnel et physiologique vital pour la plante. Au


niveau cellulaire, Ca2+ est impliqué dans le maintien d'un gradient de pH entre le
cytoplasme et la vacuole, qui est indispensable au maintien de l'activité de l'antiport
Na+ / H+ responsable de la séquestration vacuolaire de Na+ (Koyro et al., 1997). Ca2+
intervient également dans la régulation de plusieurs processus métaboliques par le
biais du complexe Ca2+-Calmoduline (Colmer et al., 1994; Koyro et al., 1999). Il est
particulièrement impliqué dans les processus de conservation de l'intégrité
structurale et fonctionnelle des bio-membranes (Hanson, 1984). Au niveau des
parois, il neutralise les acides pectiques et contribue à la rigidité des tissus, contrôle le
transport et les échanges ioniques ainsi que l'activité des enzymes pariétales. Pour
ces raisons, la substitution de Ca2+ par d'autres cations au niveau des sites
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 36

extracellulaires inhibe significativement ces fonctions et affecte le développement


racinaire.
En dépit de l'abondance des données relatives à la nutrition calcique, le rôle de
Ca2+ dans l'adaptation des plantes à la salinité demeure incomplètement élucidé.
Ainsi, l'apport externe de Ca2+ améliore la tolérance au sel par un mécanisme
inconnu préservant une sélectivité K+ / Na+ (Zhong et Läuchli, 1994). D'autres
données suggèrent que Ca2+ réduit l'accumulation de Na+ et améliore le
comportement des plantes en inhibant les systèmes d'absorption à faible affinité
pour K+ à travers lesquels se produit l'influx de Na+ (Schroeder et al., 1994).
La concentration cytosolique en Ca2+ est généralement maintenue à des niveaux
faibles, de 100 à 200 nM, et toute augmentation de ce paramètre sous l'effet de
facteurs environnementaux comme la salinité génère, par une cascade de réactions,
un état de stress (Lynch et al., 1989). Ainsi, l'adaptation des plantes aux contraintes
environnementales semble dépendre de leur aptitude à ramener Ca2+ à son niveau
d'équilibre. Certains mécanismes semblent contribuer dans la diminution de la taille
du pool interne en Ca2+. Il s'agit principalement d'un efflux de Ca2+ contrôlé par une
ATPase localisée au niveau du plasmalemme et des endomembranes et d'un antiport
Ca2+ / H+ situé au niveau du tonoplaste. Des gènes codant les ATPases calciques ont
été clonés dans les cellules du tabac et de la tomate (Perez-Prat et al., 1992, 1994;
Wimmers et al., 1992). En réponse au stress salin, le niveau des transcrits de ce gène
est augmenté confirmant le rôle de ces ATPases dans le rétablissement de la
concentration cytosolique en Ca2+ chez les plantes soumises à NaCl (Niu et al., 1995).
L'absorption du calcium à partir des sols salins est réduite en raison de
l'interaction avec Na+ et de l'augmentation de la concentration ionique globale qui
réduit l'activité de Ca2+ (Grattan et Grieve, 1992). Ainsi, il a été remarqué depuis
longtemps que les plantes exposées aux actions marines sont pauvres en Ca2+.
L'altération de la nutrition calcique par le sel a été démontrée aussi bien chez des
glycophytes que des halophytes. La diminution des teneurs tissulaires en Ca2+ a été
observée chez plusieurs halophytes cultivées en présence de sel, telles que Avicennia
marina (Clough, 1984), Suaeda fruticosa (Sleimi et al., 1999), Sesuvium portulacastrum
(Messedi et al., 2001 a) avec parfois l'apparition de symptômes de déficience calcique
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 37

(Maas et Grieve, 1987). Un comportement inverse est, cependant, observé chez


d'autres halophytes. Chez Sesuvium portulacastrum, la salinité du milieu de culture
(600 mM NaCl), conduit à l'augmentation significative de la teneur en Ca2+, aussi
bien dans les parties aériennes que dans les racines (Venkatesalu et al., 1994 b). De
même, Broome et al. (1995) ont observé chez Spartina patens, une corrélation positive
entre l'accumulation de Ca2+ dans les tissus et l'accroissement de la salinité du milieu
de culture.
Les trois composantes impliquées dans la nutrition calcique en milieu salé
semblent affectées: l'absorption de Ca2+ par les poils absorbants, son transport radial
depuis les sites d'absorption jusqu'aux vaisseaux du xylème puis sa translocation
vers les parties aériennes.
L'absorption de Ca2+ est passive. Certaines études suggèrent qu'elle se produise
au niveau de deux types de sites: les premiers exprimant une faible affinité à Ca2+ et
n'assurent une alimentation calcique des plantes qu'en l'absence de sel en raison de
leur forte sensibilité à cette contrainte environnementale, les seconds ont une grande
affinité pour Ca2+ et sont occupés par ce cation même en présence de fortes doses de
sel (Le Saos, 1974). Na+ peut inhiber le transport radial de Ca2+ en saturant les sites
d'échanges cationiques au niveau de l'apoplasme (Lynch et Läuchli, 1985). Cramer et
al. (1985, 1987) démontrent que la réponse primaire des racines du cotonnier au
stress salin consiste en un déplacement du Ca2+ fixé aux membranes par Na+
conduisant à une augmentation de la perméabilité et à une perte de la sélectivité
K+ / Na+. Ce phénomène, qui s'exprime particulièrement à des salinités élevées,
conduit à une forte accumulation de Na+ et de Cl- chez le sorgho (Zhong et Läuchli,
1994). La migration de Ca2+ vers les parties aériennes se fait, en partie, par échange
d'ions de site en site le long des acides uroniques sur les parois des vaisseaux
(Armstrong et Kirkby, 1979). Ainsi la limitation de l'approvisionnement des parties
aériennes en Ca2+ pourrait résulter d'un déplacement de Ca2+ par Na+ dans le xylème
et / ou d'une limitation par NaCl du flux de sève brute. L'aptitude des plantes à
assurer une alimentation adéquate de leurs parties aériennes en Ca2+ est souvent
considérée comme un caractère de tolérance au sel. Analysant le comportement
nutritionnel de 6 espèces de Brassica à croissance rapide cultivées en condition
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 38

d'irrigation à l'eau de mer, He et Cramer (1992) montrent une corrélation positive


entre l'accumulation de Ca2+ dans les feuilles et la tolérance au sel.

5.3.3. Nutrition azotée

Disponibilité de l'azote dans les milieux salins


L'azote disponible pour les plantes est essentiellement le produit de la
minéralisation de la matière organique du sol. Dans les régions arides et semi-arides,
le climat sec et chaud associé souvent à une salinité du sol inhibe les processus de la
minéralisation par des mécanismes qui demeurent incomplètement élucidés.
Certains travaux ont montré que le sel affecte davantage la nitrification que
l'ammonification (Doddema et al., 1986; McClung et Frankenberger, 1987). Les
mécanismes de l'inhibition de la nitrification ne sont pas identifiés mais ils devraient
impliquer des effets directs ou indirect des ions chlorures sur l'activité microbienne
(Rosenberg et al., 1986). Par ailleurs, la saturation du complexe argilo-humique par
Na+ dans les sols salés provoque sa dispersion et son appauvrissement en oxygène
conduisant ainsi à une inhibition de la nitrification (Mengel et Kirkby, 1982 b). Il
apparaît ainsi que, dans les sols halomorphes, la faible disponibilité de l'azote
constitue le facteur le plus limitant de la croissance des plantes qui seraient
contraintes d'utiliser l'azote ammoniacal à la place de l'azote nitrique. Sur milieux
ammoniacaux, NaCl et Na 2 SO 4 exercent des effets différents sur la plante d'orge. En
présence de NaCl, l'excès de cations observé dans les feuilles est équilibré en majorité
par Cl-. Par contre, en présence de Na 2 SO 4 , le déséquilibre au profit des anions
minéraux (sulfates) est tel qu'il nécessite une forte synthèse de cations organiques
(Soltani et al., 1993). Ainsi, plusieurs études ont montré que la fertilisation azotée des
sols salés améliore la croissance aussi bien des glycophytes que des halophytes. A
titre d'exemples, l'apport d'azote améliore la croissance et le rendement du haricot
(Wagenet et al., 1983), du concombre (Martinez et Cerda, 1989) et du melon (Feigin,
1990). De même, la croissance et la capacité de survie en condition d'irrigation à l'eau
de mer sont améliorées chez Spergularia Sp. (Okusanya et Ungar, 1984) et Plantago
maritima, par un apport d'azote nitrique (Skeffington et Jeffrey, 1985). Chez de jeunes
plants d'Avicennia marina, l'amélioration de la croissance est plutôt obtenue par un
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 39

apport d'azote ammoniacal (Naidoo, 1987). En effet, ces plantes utilisent


essentiellement NH 4 + en condition d'anaérobie. Cependant, aussi bien pour ces
glycophytes que ces halophytes, l'effet bénéfique de l'apport d'azote n'apparaît que
dans des conditions de salinité modérée. Ces résultats sont en accord avec beaucoup
d'autres études stipulant qu'en condition de salinité sévère, l'apport d'azote diminue
la tolérance des plantes au sel probablement en raison d'une accumulation toxique
de NO 3 -.

Effet du sel sur le prélèvement de l'azote


Plusieurs études, conduites dans des conditions relativement contrôlées (salle de
culture, serre), ont montré que l'absorption de Cl- et son accumulation sont
accompagnées d'une diminution de la concentration des parties aériennes en NO 3 -.
De tels résultats ont été obtenus chez des glycophytes comme l'orge (Klobus et al.,
1988; Soltani et al., 1990), le cotonnier (Silberbush et Ben-Asher, 1987), la tomate et le
melon (Feigin et al., 1987). Aslam et al. (1984) ont observé que l'inhibition de
l'absorption de NO 3 - est plus accentuée en présence de Cl- que de SO 4 2-. Cependant,
ces diminutions dramatiques du NO 3 - foliaires sont associées soit à une
augmentation de la teneur en proline, en glycine betaine, ou en protéines totales
solubles, soit au maintien du niveau global des acides aminés (Gorham et al., 1986).
Ces auteurs concluent ainsi que le sel ne soumet pas les plantes à une déficience
azotée. Dans le même contexte, Munns et Termaat (1986) pensent qu'en dépit d'une
forte limitation de l'approvisionnement des plantes en azote sur milieu salé, ce
nutriment ne limiterait pas la croissance. Chez des halophytes comme Atriplex
triangularis, Atriplex spongiosa, Atriplex vesicaria et Suaeda maritima le sel n'affecte ni
l'absorption du NO 3 - par les racines, ni son exportation vers les parties aériennes,
même si le rapport Cl- / NO 3 - dépasse 100 (Osmond et al., 1980). Ces halophytes
seraient dotées d'un système d'absorption très efficace leur assurant une
alimentation azotée convenable dans un milieu riche en Cl-. Cependant, chez Spartina
alterniflora, l'absorption de NH 4 + est tributaire de la salinité du milieu de culture.
Dans une gamme de salinité comprise entre 3 et 32 g.l-1, NaCl n'affecte pas de
manière significative les paramètres de la cinétique d'absorption de NH 4 + (Smart et
Barko, 1980 ). Par contre, l'absorption de NH 4 + est complètement bloquée au bout de
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 40

48 h de culture en présence de 50 g.l-1. Ce résultat est expliqué par une compétition


entre NH 4 + et Na+ au niveau des sites d'absorption (Bradley et Morris, 1991 b).
Les mécanismes d'absorption de l'azote minéral, et particulièrement NO 3 -, ont fait
l'objet de plusieurs études. Des données récentes révèlent que l'absorption de NO 3 -,
chez la tomate, est réalisée par deux systèmes indépendants (Cárdenas-Navarro et
al., 1999). Le premier, présentant une forte affinité pour NO 3 -, est nommé "High
Affinity Transport System" (HATS). Il contrôle l'absorption de NO 3 - dans une gamme
de concentrations légèrement supérieures à quelques µM. Le second système, appelé
"Low Affinity transport System" (LATS), contrôle l'absorption de NO 3 - dans une
gamme de concentrations comprises entre 0.5 et 1 mM (Peuke et Kaiser, 1996).
La nature des effets du sel sur les systèmes d'absorption du NO 3 - a été aussi
abordée dans certaines études. Peuke et Jeschke (1999) ont observé une inhibition
immédiate de l'absorption du nitrate sous l'effet de plusieurs sels: NaCl, KCl, CaCl 2
ou Na 2 SO 4 . L'absence d'effet spécifique de ces sels a conduit les auteurs à penser que
l'inhibition de l'absorption du NO 3 - est largement due à un effet osmotique plutôt
qu'à un effet ionique. Cette hypothèse a été par la suite vérifiée en analysant l'effet
des osmoticums organiques sur l'absorption du NO 3 -. Pour une même osmolarité,
l'absorption du nitrate est inhibée dans les mêmes proportions sous l'effet de la
bétaïne, du sorbitol ou des sels minéraux (Peuke et Jeschke, 1999). Dans ce contexte,
il a été rapporté que le polyéthylène glycol diminue l'absorption et la réduction du
nitrate chez le ray-grass (Ourry et al., 1992) et le blé (Larsson, 1992). Alors que, dans
les mêmes conditions expérimentales, NaCl n'affecte pas le flux de NO 3 -,
probablement en raison d'une osmorégulation assurée par l'accumulation de Cl-
(Ourry et al., 1992).
Une forte inhibition de l'absorption des nitrates sous l'effet de Cl- ou de SO 4 2- a été
également signalée chez l'orge par Aslam et al. (1984). Néanmoins, les auteurs ont
remarqué que cette inhibition dépend plus de la nature de l'ion que de sa
concentration dans le milieu. Ainsi, l'inhibition de l'absorption de NO 3 - en présence
de sulfates est plus sévère qu'en présence de chlorures (Soltani et al., 1993). Un effet
protecteur de Ca2+ a été observé chez des plantes d'orge soumises au stress salin
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 41

(Ward et al., 1986), mais n'a pas pu être mis en évidence par Peuke et Jeschke (1999)
chez la même plante.
Dans une gamme de concentrations basses en NO 3 -, l'analyse des caractéristiques
cinétiques des systèmes d'absorption du nitrate a montré que l'inhibition de
l'absorption de cet anion engendrée par le sel n'est pas de type compétitif. En effet,
dans ces conditions, c'est le système à forte affinité (HATS) qui contribue pour une
large part à l'absorption du nitrate. D'ailleurs, plusieurs données excluent une
fixation de Cl- sur le site d'absorption et son transport par ce système. Pour ces
raisons, les sels minéraux ou organiques inhibent de la même manière (par des effets
osmotiques) ce système d'absorption. Dans une gamme de concentrations élevées en
NO 3 -, l'inhibition de l'absorption de cet anion par le sel serait plutôt de type
compétitif. En effet, certaines données suggèrent que le système à faible affinité
(LATS) transporte Cl-. L'inhibition du LATS par Cl- est observée à partir de 60 mM
NaCl ou à des concentrations élevées en NO 3 - (Peuke et Jeschke, 1999).
L'effet de la salinité sur les paramètres cinétiques de l'absorption du nitrate chez le
blé a fait également l'objet de certaines études (Botella et al., 1994). D'après ces
données, l'absorption de NO 3 - en condition contrôlée serait assurée par un seul
système. La salinité réduirait le coefficient d'affinité (K m ) et / ou la vitesse maximale
(V max ) de ce système. D'après Hawkins et Lewis (1993), l'absorption du nitrate
n'implique pas une compétition entre cet anion et Cl- pour les sites d'absorption.

Effet du sel sur l'assimilation et le métabolisme de l'azote


Outre ses effets sur l'absorption de NO 3 -, le sel affecte l'assimilation et le
métabolisme azoté. Ces effets semblent s'exprimer davantage chez les glycophytes
que chez les halophytes. Chez des plantules d'orge âgées d'une semaine, l'absorption
et l'assimilation du nitrate sont affectées à des concentrations salines comprises entre
100 et 200 mM indépendamment de la nature du sel utilisé, NaCl, KCl, Na 2 SO 4 ou
K 2 SO 4 (Aslam et al., 1984). Cependant, le premier paramètre est nettement plus
affecté que le second. D'autres études ont montré que l'incorporation de l'azote
minéral marqué dans les protéines est également affectée chez l'orge soumise à des
concentrations excessives de sel (Helal et Mengel, 1979). Chez la même plante, il a été
démontré que NaCl diminue plus l'activité de la nitrate réductase in vitro qu'in vivo
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 42

(Aslam et al., 1984). Ce résultat est expliqué par la compartimentation de Na+ dans la
vacuole et la nitrate réductase dans le cytoplasme, permettant ainsi une bonne
activité réductrice chez les plantes soumises au stress salin. Chez le haricot et le
cotonnier cultivés pendant plusieurs semaines en présence de sel, la diminution de
l'activité de la nitrate réductase est attribuée à une limitation de cette enzyme par son
substrat réductible NO 3 - (Gouia, 1990).
Chez les halophytes, la réponse au sel de la nitrate réductase semble dépendre du
degré de tolérance des plantes et de la salinité du milieu de culture. À titre
d'exemple, chez Suaeda macrocarpa et Suaeda flexilis, NaCl stimule l'activité de la
nitrate réductase quand sa concentration dans le milieu externe passe de 17 à
128 mM, dose optimale pour la croissance. Cette stimulation est plus prononcée chez
Suaeda macrocarpa que chez Suaeda flexilis, la première étant plus halophile que la
seconde. Ce résultat est expliqué par une amélioration de l'assimilation du CO 2 , la
disponibilité des squelettes carbonés et par la synthèse protéique (Boucaud, 1972).
Néanmoins, il a été rapporté, chez les deux halophytes, que la teneur des parties
aériennes en azote protéique diminue à forte dose de sel (390 mM), probablement en
raison de l'activation de certaines protéases. En effet, il a été remarqué que la leucine
aminopeptidase exprime une forte activité chez les plantes de Spartina alterniflora
cultivées en présence d'une gamme de salinité ne dépassant pas 500 mM NaCl. Le
comportement inverse a été observé chez Spartina patens (Gettys et al., 1980). Ces
différences vont de pair avec la sensibilité au sel de ces deux espèces, la première
étant plus tolérante que la seconde. Il apparaît ainsi que l'activation de cette protéase
confère aux plantes l'aptitude à accumuler plus d'acides aminés libres utilisés dans
l'ajustement osmotique. L'aminopeptidase présente une tolérance particulière à
NaCl: in vitro l'activité n'est réduite que de 30 % en présence de 3000 mM de NaCl.
Ceci est en relation avec la localisation de cette enzyme dans la vacuole,
compartiment cellulaire certainement le plus riche en sel (Gettys et al., 1980).

5.3.4. Nutrition phosphatée

L'interaction entre la salinité et la nutrition phosphatée des plantes est peut être
plus complexe que celle entre la salinité et l'azote. L'interaction est fortement
dépendante des espèces végétales (ou cultivars), du stade de développement de la
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 43

plante, de la nature et du niveau de la salinité et de la concentration de H 2 PO 4 - dans


le substrat (Grattan et Grieve, 1992).
Dans plusieurs cas, la salinité diminue les teneurs tissulaires en H 2 PO 4 - (Sharpley
et al., 1992). Cependant, le sel n'agit pas sur les teneurs en phosphore de quelques
halophytes. À titre d'exemple, les teneurs cytoplasmiques et vacuolaires en
phosphore de Spartina townsendii ne sont pas affectées par NaCl. Ce résultat suggère
que le métabolisme phosphaté de cette plante est insensible au stress salin (Koyro et
Stelzer, 1988). D'autre part, certaines données indiquent que la salinité peut
augmenter les exigences en phosphore de quelques halophytes. En effet, sur le
littoral de la Caroline du nord, la production de Spartina alterniflora est positivement
corrélée avec les concentrations en phosphore dans le sol et dans les plantes (Broome
et al., 1975). L'analyse du contenu ionique des cellules rhizodermiques de Puccinellia
peisonis montre une augmentation des concentrations cytoplasmiques et vacuolaires
en phosphore en présence de NaCl (Koyro et Stelzer, 1988). Les teneurs en phosphore
des feuilles, des tiges et des racines de Sesuvium portulacastrum dépendent de la
salinité du milieu de culture. Elles varient de 0.3 à 0.6 mg.g-1 de matière sèche
(Venkatesalu et al., 1994 b). Bien que ces teneurs soient particulièrement faibles, elles
sont significativement augmentées sous l'effet du sel essentiellement au niveau des
feuilles. Cette accumulation du phosphore dans les parties aériennes est contrôlée
vraisemblablement au niveau de la racine (Grattan et Maas, 1985) et dépend du
rapport des quantités sel / H 2 PO 4 - absorbées par les racines (Roberts et al., 1984).
Dans une revue bibliographique, Champagnol (1979) a montré que l'addition de P
augmente la croissance et le rendement de 34 cultures parmi les 37 examinées.
Cependant, l'addition de H 2 PO 4 - n'augmente pas nécessairement la tolérance au sel
des cultures. Des études conduites sur le maïs, la betterave à sucre, l'orge et le blé
montrent que l'addition de P peut diminuer la tolérance au sel des plantes,
particulièrement en condition de salinité sévère (Champagnol, 1979). L'effet
bénéfique de l'apport de H 2 PO 4 - n'apparaît qu'en condition de salinité faible à
modérée (Bernstein et al., 1974). Cependant, la réaction de certaines halophytes n'est
pas conforme à ce modèle. En effet, Okusanya et Fawole (1985) montrent que le
H 2 PO 4 - stimule la croissance de Lavatera arborea, beaucoup plus sur eau de mer
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 44

diluée à 40 ou à 50 % que sur milieu non salin. Cet effet est dû, en partie, à
l'augmentation du rapport PA / R par la salinité. Lorsqu'on n'enrichit pas le milieu
par H 2 PO 4 -, la salinité réduit la croissance des plantes. Cependant, quand 0.05 à 0.25
mM de H 2 PO 4 - sont additionnées au milieu de culture, la salinité augmente
effectivement la croissance des plantes. Par conséquent, l'addition de H 2 PO 4 -
améliore la tolérance au sel de Lavatera arborea.
Il se pourrait donc que chez certaines halophytes, tout comme certaines algues, il
existe un mécanisme d'absorption de P activé par Na+. Mais un tel mécanisme n'a pas
pu être mis en évidence chez Cakile maritima, Cochlearia anglica et Plantago maritima
(Ullrich-Eberius et Yingehol, 1974). Il a été suggéré qu'en plus d'autres éléments
essentiels, l'absorption de H 2 PO 4 - est due à un processus métabolique actif (Bieleski
et Ferguson, 1983). Ceci est en accord avec les résultats de Venkatesalu et Chellappan
(1993) selon lesquels une plus grande accumulation de H 2 PO 4 - est liée à des
processus métaboliques comme la photosynthèse. Champagnol (1979) conclut qu'il
est peu probable que les ions Cl- et H 2 PO 4 - entrent en compétition au niveau des sites
d'absorption de la plante. Cependant, Papadopoulos et Rendig (1983) concluent que
Cl- pourrait supprimer l'absorption de H 2 PO 4 - et son accumulation au niveau des
parties aériennes de la tomate. Zhukovskaya (1973) montre que Cl- comme SO 4 2-
réduisent l'absorption de H 2 PO 4 - chez l'orge et le tournesol. Dans d'autres cas, la
réduction des teneurs en H 2 PO 4 - chez les plantes par la salinité peut résulter de la
réduction de l'activité de cet anion dans la solution du sol (Awad et al., 1990).

6. CONCLUSION

Cette analyse bibliographique fait ressortir les intérêts appliqués multiples des
halophytes. D'ailleurs, plusieurs parcelles expérimentales ont été installées en Italie,
en Allemagne, aux Émirats Arabes Unies et dans d'autres pays du monde dans
l'objectif d'étudier le comportement des halophytes dans des conditions naturelles et
notamment pour démontrer que les halophytes irriguées à l'eau de mer à différentes
concentrations peuvent transformer les terres marginales en zones productives. Les
études sont actuellement orientées vers l'optimisation des méthodologies de culture,
d'irrigation et surtout de contrôle de la salinité du milieu.
Chapitre I. REVUE BIBLIOGRAPHIQUE.......................................................................................................................... 45

Les intérêts appliqués de ces plantes sont également évidents. En effet, plusieurs
mécanismes impliqués dans la tolérance au sel ont été identifiés chez des halophytes.
Il s'agit principalement des caractéristiques biochimiques et moléculaires des
antiports Na+ / H+ qui sont responsables de la compartimentation vacuolaire de Na+.
Ils ont été identifiés chez des halophytes comme Atriplex nummularia, Atriplex gmelini,
Beta vulgaris et Mesembryanthemum cristallinum. L'identification de ces critères de
tolérances suggère la possibilité de leur transfert aux plantes cultivées pour
améliorer leur tolérance. Des gènes codant des protéines impliquées dans la synthèse
des osmoticums ont été déjà transférés à plusieurs plantes cultivées.
CHAPITRE II

MATERIEL ET METHODES

1. MATERIEL VEGETAL

1.1. SUAEDA FRUTICOSA

Les plantes appartenant au genre Suaeda (Chenopodiaceae) présentent des rameaux


non articulés et nombreux, portant des feuilles alternes, développées, très épaisses et
charnues. Les fleurs sont apétales se présentant par 1 à 5 à l'aisselle des feuilles
supérieures. Elles sont bisexuées portant chacune, au-dessous du calice, 2 ou 3
petites bractées membraneuses. Les sépales, réunis entre eux à la base, s'accroissent
après la floraison et tout le calice ressemble alors à un fruit charnu. Il y a 5 étamines
libres entre elles. Le pistil est surmonté par 3 à 5 stigmates ovales et aigus. Le fruit,
entouré par le calice charnu, est aplati, membraneux et non soudé au calice. La
graine renferme une plantule enroulée en une spirale aplatie. Le genre Suaeda
comporte 40 espèces (Bonnier, 1934).
Suaeda fruticosa (L.) Forsk. var. Longifolia (Koch) Fenzl. appelée en arabe "Souida",
en français "Soude buissonnante" et en anglais "Sea-Blite". C'est un sous arbrisseau,
de taille variable de 0.30 à 1 mètre, ayant un aspect glauque ou rougeâtre et formant
un buisson très rameux (photo 2.1 A et B). Il pousse sur les rocailles et les vases
salées du littoral de la Méditerranée, de l'océan Atlantique et de la Manche, où ses
fleurs verdâtres se développent depuis le mois de mai jusqu'au mois de novembre.
Les feuilles les plus grandes, de 10 mm de longueur, ont une forme sub-cylindrique
et vont en s'atténuant vers leur base. Les fleurs hermaphrodites sont disposées en
épis de cymes triflores feuillés allongés, placées par 1 à 3 à l'aisselle des feuilles
florales qui les dépassent beaucoup. Ces feuilles florales sont plus courtes que les
feuilles ordinaires environ de moitié, et souvent un peu recourbées. Ce sous-
arbrisseau vivace est toujours en feuilles par suite du mode de renouvellement des
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................47

rameaux. Il est à tiges blanchâtres, arrondies, striées dans leur longueur et dressées.
Les racines sont ligneuses (Bonnier, 1934; Pottier-Alapetite, 1979).
En Tunisie, Suaeda fruticosa croît sur les terrains riches en sel et ne s'élève pas sur
les montagnes. Elle est assez fréquente dans les étages bioclimatiques sub-humide,
semi-arides et arides. On la rencontre sur le littoral de la Méditerranée et dans les
dépressions continentales salées telles que sebkhas (Soliman, Enfidha, Kalbia, Sidi
El Héni, El Melah, Bibène, Tader, etc).

Photo 2.1. Aspect général des plantes de Suaeda fruticosa. A: Touffes de Suaeda
fruticosa dans son biotope naturel (sebkha de Soliman). B: morphologie d'un
rameau fructifère.

1.2. SPARTINA ALTERNIFLORA

L'origine du mot Spartina est le mot grec "Σπαρτζον" ou "spartion". Les tiges de
cette plante sont raides et effilées comme celles du Genêt. Dans ce genre, les épillets
aplatis par le côté n'ont qu'une fleur bisexuée à 3 étamines. Les glumelles sont un
peu inégales, la glumelle supérieure est pliée en long et plus longue que la glumelle
inférieure en carène sur le dos, entière ou échancrée au sommet. Les glumes sont
carénées, appliquées contre les glumelles et très inégales. La glume supérieure est
plus longue que l'inférieure. L'ovaire porte un long style et 2 stigmates. Le fruit est
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................48

oblong, aplati par le côté. Ce sont des plantes herbacées à feuilles enroulées, parfois
plates. Les tiges raides sont à épillets imbriqués sur 2 rangs en épis allongés et
dressés, lesquels sont espacés en une sorte de grappe terminale. On a décrit 6 espèces
de ce genre. Spartina alterniflora Loisel est une Poaceae appelée en français "Spartine à
fleurs" et en anglais "Spart-grass" ou aussi "Smooth cordgrass". Cette plante montre
des fleurs verdâtres à jaunâtres pendant les mois de juin, juillet et août. Elle peut
avoir de 30 à 75 cm de hauteur et croît dans la vase et les endroits marécageux (photo
2.2 A et B). Les feuilles, dont la ligule est remplacée par des poils, sont étroites, en
gouttière en dessus, souvent enroulées par la sécheresse, longues, effilées et raides.
La feuille supérieure dépasse l'inflorescence formée de 3 à 7 épis dressés, longs de 6 à
9 cm. Les épillets, d'environ 8 mm de longueur, sont tournés d'un même côté et
disposés sur 2 rangs assez lâches. Les glumes sont aiguës, munies de cils très courts
sur la carène et la glume supérieure, qui dépasse un peu les glumelles, est plus
longue que la glume inférieure environ de moitié. Les glumelles sont un peu obtuses,
la glumelle inférieure est légèrement plus courte que la glumelle supérieure et
presque lisse sur le dos. C'est une plante vivace, à tiges raides et dressées, portées
par un rhizome (Bonnier, 1934; Bonnier et De Layens, 1975).

Photo 2.2. Aspect général des plantes de Spartina alterniflora dans son biotope
naturel, dépression marécageuse aux USA, (A) et morphologie d'une
inflorescence (B).
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................49

Spartina alterniflora ne s'élève pas dans les montagnes et se rencontre en France, en


Espagne, en Angleterre et surtout en Amérique du Nord. Elle a été récemment
introduite dans les Émirats Arabes Unis et d'autres pays du golfe arabe.

2. MULTIPLICATION DES PLANTES

2.1. SUAEDA FRUTICOSA

Les plantes de Suaeda fruticosa, provenant de la sebkha de Soliman, ont été


entretenues à l'Institut National de Recherche Scientifique et Technologique
(I.N.R.S.T.) dans des grands bacs de culture (1 / 0.85 / 1 m) remplis avec un sol
prélevé sur son biotope naturel. Les jeunes plants, utilisés dans nos expériences, sont
obtenus par bouturage: des fragments de tiges feuillées de 5 cm de long sont
prélevés sur une même plante mère, désinfectées par trempage dans une solution
saturée d'hypochlorite de calcium pendant 5 mn, et rincées abondamment à l'eau
distillée. Elles sont ensuite mises à enraciner soit sur une solution nutritive aérée
(Hewitt, 1966) soit sur du sable inerte irrigué avec cette même solution. Au bout d'un
mois, la majorité des boutures (95 %) développent un nouveau système racinaire
adventif.

2.2. SPARTINA ALTERNIFLORA

Les semences de cette plante nous ont été fournies par le Coordinateur Général de
L'Action Concertée "Sustainable halophyte utilisation in the Mediterranean and
subtropical dry regions" en décembre 1996. La germination a lieu à l'obscurité et à
25 °C sur du papier filtre imbibé à l'eau distillée. Le taux de germination ne dépasse
guère 15 %. Néanmoins, nous avons remarqué que des séjours répétés au froid (4 °C
durant 48 heures) précédant la mise en germination améliorent nettement ce taux, de
50 % environ. Au bout de 15 jours, les jeunes plantules (coléoptile + radicule) sont
repiquées dans des pots en argile contenant du sable inerte puis dans des grands
bacs de culture (1 / 0.85 / 1 m) remplis avec un sol prélevé dans la sebkha de
Soliman (photo 2.3).
Les irrigations sont réalisées avec l'eau de robinet, à raison de trois fois par
semaine, jusqu'à l'obtention de plantes adultes régénérant de nouvelles pousses au
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................50

niveau de leurs rhizomes. Les plantes ainsi obtenues (20 individus environ) ont servi
de plantes mères pour toutes les cultures conduites sur cette espèce.

Photo 2.3. Multiplication de Spartina alterniflora sur sol prélevé dans la sebkha
de Soliman. Âges des plantes = 150 jours.

Les unités feuillées de rhizome prélevées, ayant 5 à 10 cm de long, sont mises à


enraciner directement dans des pots en plastique remplis de sable inerte,
préalablement lavé à l'acide chlorhydrique et rincé abondamment à l'eau pour
éliminer toute trace de chlorure. Les irrigations ont été réalisées avec une solution
nutritive (Hewitt, 1966). Généralement, l'enracinement a lieu au bout de 45 jours.

3. CONDUITE DES CULTURES

Deux types d'expériences sont réalisés sur des plants issus de bouturage: les unes
sur milieu liquide (aquiculture stricte), les autres sur support solide (sable inerte).

3.1. AQUACULTURE STRICTE

Les plantes de Suaeda fruticosa obtenues selon les techniques décrites


précédemment ont été cultivées soit sur solution nutritive soit sur eau de mer.
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................51

3.1.1. Culture sur solution nutritive

Après enracinement des boutures, les jeunes plants ont été repiqués
individuellement dans des pots en plastique de 750 ml contenant le milieu nutritif de
base préparé d'après la formule de Hewitt (1966). Il contient également du fer et les
principaux oligo-éléments sous forme de mélange de sels. Les milieux de culture
sont continuellement aérés à l'aide de capillaires en plastique reliés à des pompes
d'aquarium donnant le même débit d'air dans tous les pots.

3.1.2. Culture sur eau de mer

Dans une autre série d'expériences, les plantes sont cultivées sur eau de mer, plus
ou moins diluée et enrichie ou non en sels minéraux, prélevée de la méditerranée
près de la zone touristique de Soliman.

3.2. CULTURE SUR SABLE

Les cultures de Spartina alterniflora sont conduites, sous serre vitrée, souvent à la
fin du printemps et au début de l'été. Des observations préliminaires nous ont
montré que cette période de l'année est la plus favorable pour la croissance de cette
plante. Les irrigations sont faites avec la solution nutritive de Hewitt (1966) préparée
dans l'eau de ville de la région de Soliman. Le volume apporté à chaque irrigation
(200 ml) est suffisant pour provoquer un léger écoulement.
Dans une autre série d'expériences, les plantes sont irriguées à l'eau de mer, plus
ou moins diluée et enrichie ou non en sels minéraux, prélevée de la mer
méditerranéenne près de la zone touristique de Soliman.

3.3. SUIVI DES CULTURES

L'aspect morphologique des plantes a fait l'objet d'observations régulières depuis


le début des cultures jusqu'à la récolte finale. Il a été en particulier tenu compte de la
formation de nouveaux organes et de l'apparition des symptômes de toxicité. Les
observations visuelles sont appuyées par des photographies prises à différents stades
de développement.
Pour les cultures hydroponiques, le renouvellement des solutions nutritives est
effectué au rythme d'une fois par semaine afin de maintenir leurs concentrations
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................52

ioniques à un niveau constant. Pour les cultures sur sable, conduites sous serre
vitrée, le rythme d'irrigation est tributaire des conditions climatiques. En général,
deux à trois irrigations par semaine jusqu'à écoulement de l'eau sont suffisantes en
printemps, alors qu'il en faut une par jour en été.
Des changements des milieux de cultures ou des irrigations jusqu'à l'écoulement
de la solution ont été également effectués 24 heures avant chaque récolte.

3.4. MESURE DE LA PRODUCTION DE BIOMASSE

Deux récoltes sont souvent effectuées pour les différentes cultures, la première
(récolte initiale) au début et la seconde (récolte finale) à la fin de la période de
traitement. À chaque récolte, les plantes sont séparées en parties aériennes et en
racines dans le cas de Suaeda fruticosa; et en rhizomes feuillés et en racines dans celui
de Spartina alterniflora. Les racines sont rincées successivement dans trois bains d'eau
distillée glacée, puis épongées avec du papier filtre. Les parties aériennes de Spartina
alterniflora sont aussi lavées dans trois bains successifs d'eau distillée froide pour
éliminer les cristaux de sel sécrétés par les feuilles. Les différents organes sont
rapidement mis dans des sachets en papier aluminium préalablement tarés puis
pesés avant et après dessiccation à 60 °C pendant 7 jours. Les masses de matières
fraîche et sèche sont déterminées à l'aide d'une balance de précision Mettler type
AE100 au 1 / 10 de mg.

3.5. SURFACE FOLIAIRE

La surface foliaire est déterminée à l'aide d'un planimètre (Area Meter) type LI-
3000A, LI-COR. Seules les feuilles de Spartina alterniflora ont fait l'objet de ces
mesures dans l'objectif de ramener les quantités sécrétées de sel à la surface foliaire.

3.6. DETERMINATION DE LA TENEUR EN EAU

La teneur en eau est déterminée par la différence entre la matière fraîche et la


matière sèche, ramenée à cette dernière. Elle s'exprime en ml.g-1 MS:
H 2 O = (MF – MS) / MS
MF: masse de la matière fraîche.
MS: masse de la matière sèche.
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................53

4. TECHNIQUES D'ANALYSE DES PLANTES

4.1. CATIONS

Les dosages sont faits après réduction des organes en poudre fine au moyen d'un
broyeur à billes (type Dangoumeau). Les échantillons sont minéralisés dans des
flacons contenant des volumes variables (selon les expériences) d'acide nitrique
(0.5 %) pendant une semaine, à la température ambiante du laboratoire.
Les cations K+, Ca2+ et Na+ sont dosés directement sur les minéralisats ou après
dilution, en émission de flamme au moyen d'un spectrophotomètre type Corning.
Sous l'effet de la température relativement élevée de la flamme, un certain nombre
d'atomes passent à l'état excité (d'énergie E h ). Lorsqu'ils reviennent spontanément à
un niveau énergétique plus bas (d'énergie E b ), l'énergie restituée E h – E b se retrouve
sous forme d'une radiation électromagnétique de fréquence ν transportant l'énergie
hν telle que:
ν = (E h – E b ) / h
avec
h: constante de Planck = 6,63 * 10-34 J.s

Ces cations (K+, Ca2+ et Na+) ont été également dosés en absorption atomique à
l'aide d'un spectrophotomètre d'absorption atomique (type Philips TYE-INICAM PI,
9000). Le principe de cette technique repose sur la propriété fondamentale qu'ont les
atomes à l'état stable de pouvoir absorber les mêmes radiations que celles qu'ils
émettent lorsqu'ils passent de l'état excité à l'état fondamental (loi de Bohr).
L'absorption d'une radiation lumineuse de longueur d'onde λ par un atome n'est
possible que si la différence d'énergie entre le niveau initial E b et le niveau E h , après
absorption, correspond à un quantum (ou photon) d'énergie émise par cette
radiation, soit:
E h – E b = hν = hc /λ ou λ = hc / (E h – E b )
avec
λ: longueur d'onde caractéristique de l'élément
h: constante de Planck
c: célérité de la lumière dans le vide
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................54

Les concentrations des échantillons sont déterminées par rapport à une gamme
étalon dont la limite supérieure est de 30 µg.ml-1 pour Na+ et Ca2+, et de 10 µg.ml-1
pour K+.
Quant à l'ion magnésium (Mg2+), il est dosé en absorption atomique (type Philips
TYE-INICAM PI, 9000) en présence de chlorure de lanthane (5 g.l-1) pour corriger les
éventuelles interférences avec les autres cations (Pinta, 1971). Le point supérieur de
la gamme étalon est de 1 µg.ml-1.

4.2. CHLORURE

Cl- est dosé sur les mêmes extraits nitriques, en présence d'un tampon acétique et
de gélatine, à l'aide d'un chloridomètre digital (type Haake Büchler) selon le principe
de titration coulométrique avec détection de fin de réaction potentiométrique. Une
électrode d'argent libère des ions d'Ag+ qui seront précipités en chlorure d'argent
dans la solution à doser. Les ions Ag+ libérés seront énumérés par un compteur
digital. Des aliquotes de 10 µl d'une solution étalon à 100 méq.l-1 sont utilisés pour
l'étalonnage de l'appareil.

4.3. AZOTE

Les différentes fractions azotées sont déterminées selon la méthode de Kjeldahl:


l'azote réduit est extrait de la matière végétale sèche par minéralisation en présence
de H 2 SO 4 (36 N) et du catalyseur au sélénium (Se + CuSO 4 + K 2 SO 4 ) dans un rapport
(1 / 4 / 16). À la fin de la minéralisation, l'azote organique se trouve entièrement
transformé en azote minéral sous forme de sulfate d'ammonium. Les ions NH 4 +
formés sont déplacés par un excès de NaOH (10 N) sous forme d'ammoniac. Ce
dernier est piégé dans l'acide borique à 4 %, puis titré par une solution d'acide
sulfurique (N / 100).
L'azote total est dosé de la même façon que l'azote réduit après réduction de
l'azote nitrique en ammonium. Avant la minéralisation, la matière végétale sèche a
été incubée durant une nuit en présence de H 2 SO 4 36 N, une pincée de zinc en
poudre et 5 gouttes d'acide phenol-sulfurique.
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................55

4.4. PHOSPHORE

Les phosphates sont dosés sur les mêmes extraits préalablement décolorés par le
charbon végétal selon la technique de Fleury et Leclerc (1943). Le dosage a été
effectué au moyen d'un spectrocolorimètre UV-Visible (type Sherwood,
Spectrophotometer 259). La concentration de l'échantillon est déterminée en se
référant à des étalons préparés et dosés dans les mêmes conditions que l'échantillon
végétal (Fig. 2.1).

Y = 80,258 X + 0,10077

40
Phosphore, µg . ml -1

30

20

10

r = 0,999
0 0,2 0,4 0,6
Densité optique

Figure 2.1. Courbe d'étalonnage pour le dosage de Pi selon la méthode


colorimétrique. Variations de la concentration des solutions étalons en
phosphore en fonction de la densité optique.

4.5. GLUCIDES

Le dosage des sucres solubles est fait selon la méthode de Savouré (1980).
L'extraction est réalisée sur 25 mg de poudre végétale en présence de 10 ml d'éthanol
à 80 %.
Le dosage de l'amidon est effectué sur le culot de centrifugation obtenu lors de
l'extraction des sucres solubles. L'hydrolyse de ce carbohydrate est réalisée à l'aide de
l'acide perchlorique 35 %.
Les principales étapes de ces deux méthodes sont schématisées dans la figure 2.2.
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................56

25 mg de matière sèche + 2 x 5 ml d'éthanol à 80 %

Chauffer en agitant dans un bain-marie à 70 °C pendant 30 mn


(précipiter l'amidon)

Laisser refroidir

Centrifuger à 3000 tours / mn pendant 30 mn

Recueillir le surnageant Culot contenant l'amidon est repris dans l'éthanol


contenant les sucres solubles 80 % à 70 °C pendant 5 mn puis centrifuger

Surnageant rejeté Culot repris


2.5 ml de l'extrait + 5 ml de la
solution d'anthrone sulfurique
(à 0 °C) Répéter l'étape précédente 5 fois de suite
pour éliminer toute réaction à l'anthrone

Chauffer à 100 °C pendant 10 mn Culot +1.5 ml d'acide


perchlorique à 35 %

Agiter à froid pendant


Refroidir immédiatement 15 mn puis centrifuger
(à 0 °C)

Rehydrolyse du culot à froid


pendant 30 mn puis centrifuger

Recueillir le surnageant 1 Recueillir le surnageant 2

S 1 + S 2 à ajuster à 5 ml
Lire la DO à 640 nm
avec de l'eau distillée

Figure 2.2. Schéma des principales étapes de l'extraction et du dosage des


sucres solubles et de l'amidon.

Le dosage des ces deux composés glucidiques a été effectué à l'anthrone au moyen
d'un spectrocolorimètre UV-Visible (type Sherwood, Spectrophotometer 259) à
640 nm. La gamme d'étalonnage des sucres solubles et de l'amidon est établie avec
du glucose pur dilué respectivement dans de l'éthanol à 80 % et dans l'acide
perchlorique à 21 % (Fig. 2.3).
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................57

Y = 154,77 X + 3,7717

90

Glucose, µg . ml -1
60

30

r = 0,997
0 0,2 0,4 0,6 0,8

Densité optique

Figure 2.3. Courbe d'étalonnage ayant servi aux dosages des sucres solubles.
Elle est obtenue à partir de solutions de glucose de concentrations croissantes.

5. TECHNIQUES D'ANALYSE DES MILIEUX DE CULTURES

5.1. SOLUTIONS NUTRITIVES

Les solutions nutritives utilisées dans nos cultures sont régulièrement contrôlées.
Les mesures de la conductivité électrique permettent d'estimer les teneurs globales
en sels dissous et les teneurs en NaCl dans les milieux de culture. Elles sont faites à
l'aide d'un conductimètre digital, type Metrohm 660. Les valeurs sont exprimées en

mS.cm-1 à 25°C. Selon Epstein (1983) et Rhoades et al. (1988) 1 mS.cm-1 correspond
-1 -1
approximativement à une concentration de 0,7 g.l de sels minéraux et à 0,6 g.l de
NaCl. Le tableau 2.1, élaboré par Koyro et Lieth (1999), donne les correspondances
entre plusieurs modes d'expression de la salinité.
Le pH des solutions nutritives est mesuré au moyen d'un pH-mètre digital
(Metrohm, 632).

Les dosages de K+, Ca2+, Mg2+, Na+, et Cl- des solutions sont faits en milieu
nitrique selon les méthodes décrites pour les plantes.
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................58

Tableau 2.1. Modes d'expression de la salinité (Koyro et Lieth, 1999).

g/l % ppm mS / cm méq / l


1 0.1 1.000 1.818 17.11
2 0.2 2.000 3.636 34.22
3 0.3 3.000 5.455 51.33
4 0.4 4.000 7.273 68.45
5 0.5 5.000 9.091 85.56
6 0.6 6.000 10.909 102.67
7 0.7 7.000 12.727 119.78
8 0.8 8.000 14.546 136.89
9 0.9 9.000 16.364 154.00
10 1.0 10.000 18.182 171.12
15 1.5 15.000 24.274 256.67
20 2.0 20.000 30.606 342.23
25 2.5 25.000 36.634 427.79
30 3.0 30.000 42.356 513.35
35 3.5 35.000 47.774 598.90
40 4.0 40.000 52.887 684.46
45 4.5 45.000 57.696 770.02
50 5.0 50.000 62.199 855.58
55 5.5 55.000 66.398 941.14
60 6.0 60.000 70.292 1026.69
65 6.5 65.000 73.881 1112.25
70 7.0 70.000 77.165 1197.81
75 7.5 75.000 80.145 1283.37

5.2. EAU DE MER

Le milieu marin contient dans une très large gamme de concentrations, les sels les
plus solubles de la croûte terrestre (en particulier le chlorure de sodium), mais aussi
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................59

des quantités variables de presque tous ses constituants que souvent seule une
analyse très fine permet de détecter.
Après prélèvement, le stockage des échantillons est possible en cas d'élimination
des matières en suspension pour éviter la fixation des éléments à l'état de traces sur
les particules solides ou la mise en solution des éléments fixés sur ces particules. La
conservation des échantillons est réalisée à une température de 4 °C.
La détermination du pH et de la conductivité électrique a été réalisée directement
sur les échantillons de l'eau de mer. Le dosage des cations majeurs tels que K+, Na+,
Ca2+ et Mg2+ a été fait sur des échantillons dilués dans l'acide nitrique 0.5 %.
Les méthodes directes de dosage des nitrates par colorimétrie dans l'eau de mer se
heurtent à deux difficultés:
(i) Un manque de sensibilité.
(ii) Des interactions sévères dues à la matrice chlorure de sodium. De ce fait,
il est préférable d'utiliser des méthodes faisant appel à une réduction des
nitrates en ammoniaque tel que la technique de Kjeldahl.
Le phosphore présent dans l'eau de mer à l'état soluble ou particulaire existe sous
plusieurs formes. Analytiquement, c'est l'ion orthophosphorique qui est déterminé.
En ce qui concerne les éléments à l'état de traces, il était nécessaire d'effectuer une
concentration par cocristallisation, coprécipitation ou extraction liquide-liquide,
avant de les dissoudre de nouveau. Le dosage a été fait en absorption atomique (type
Philips TYE-INICAM PI, 9000) pour le fer et par torche à plasma (type Philips:
Source unit PV8490 ICP, Spectrometer interface PV8666, HV supply PV8492) pour le
cadmium, le plomb, le cuivre, le zinc, le manganèse et le bore.

6. PARAMETRES D'ANALYSE DES RESULTATS

6.1. CROISSANCE MOYENNE RELATIVE (CMR)

La quantité de matière sèche produite au cours d'un traitement donné dépend de


la taille initiale des plantes et de leur activité de croissance au cours de cette période.
La croissance moyenne relative est la production de matière sèche par unité de
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................60

temps et par unité de biomasse. Elle est exprimée en J-1 et calculée selon la formule
suivante (Hunt, 1990):
CMR = ΔMS / MS moy * Δt
ΔMS = MS f - MS i
MS moy = ΔMS / Ln MS f - Ln MS i
MS f : masse de matière sèche (de la plante entière ou de l'organe) à la
récolte finale. Elle est exprimée en mg.
MS i : masse de matière sèche (de la plante entière ou de l'organe) à la
récolte initiale. Elle est exprimée en mg.
Δt: = t f – t i = durée du traitement en jours
Il en résulte que
CMR = (LnMS f – LnMS i ) / (t f –t i )

6.2. INDICE DE SENSIBILITE (IS)

Il est obtenu en ramenant l'écart entre la production de matière sèche des plantes
cultivées en présence de NaCl et celle des plantes témoins à cette dernière, selon la
formule suivante (Slama, 1986; Lachâal, 1998):
IS = 100 * (ΔMS NaCl – ΔMS témoin ) / ΔMS témoin
ΔMS NaCl : production de matière sèche sur milieu salé.
ΔMS témoin : production de matière sèche sur milieu témoin.

6.3. SURFACE FOLIAIRE MASSIQUE (SFM)

Il correspond à la surface foliaire associée à 1 gramme de matière sèche. La SFM


est exprimée en cm².g-1 MS.
SFM = {(Sf i / MS i ) + (SF f / MS f )} / 2
MS: masse de la matière sèche exprimé en g
SF f : surface foliaire à la récolte finale, exprimée en cm².
SF i : surface foliaire à la récolte initiale, exprimée en cm².

6.4. ASSIMILATION NETTE PAR UNITE DE SURFACE FOLIAIRE (ANSF)

Ce paramètre donne la production de matière sèche par unité de surface et par


unité de temps. Il est exprimé en g.cm-2.jour-1, et calculé selon la formule suivante
(Abdelly et al., 1995):
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................61

ANSF = ΔMS / SF moy * Δt


avec
ΔMS = MS f - MS i .
MS f : masse de MS des feuilles à la récolte finale, exprimée en mg.
MS i : masse de MS des feuilles à la récolte initiale, exprimée en mg.
SF moy = ΔSF / Ln SF f - Ln SF i .
SF f : surface des feuilles à la récolte finale, exprimée en cm².
SF i : surface des feuilles à la récolte initiale, exprimée en cm².
Δt: = t f – ti = durée du traitement en jours.

6.5. EFFICACITE D'ABSORPTION (EA)

L'efficacité d'absorption est obtenue en ramenant la quantité totale du nutriment


absorbé par la plante entière (µmol) à la masse moyenne de matière sèche de son
système racinaire (mg). Ce paramètre est exprimé en µmol.g-1 et calculé selon la
formule suivante:
EA = (Q f – Q i ) / MS moy
Q f : quantité de nutriment à la récolte finale.
Q i : quantité de nutriment à la récolte initiale.
MS moy : MS moyenne des racines = (MS f - MS i ) / (LnMS f – LnMS i ).
MS f : masse de MS des racines à la récolte finale, exprimée en mg.
MS i : masse de MS des racines à la récolte initiale, exprimée en mg.

6.6. EFFICACITE D'UTILISATION (EU)

L'efficacité d'utilisation représente la biomasse produite par unité de nutriment


absorbé (Makmur et al., 1978). Ce paramètre peut être estimé soit au niveau de la
plante entière soit au niveau des différents organes:
EU = (MS f – MS i ) / (Q f – Q i )
EU = mg de matière sèche / µmol de nutriment
avec
MS f : masse de matière sèche (de la plante entière ou de l'organe) à la
récolte finale, exprimée en mg.
MSi: masse de matière sèche (de la plante entière ou de l'organe) à la
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................62

récolte initiale, exprimée en mg.


Qf: quantité de nutriment mesurée à la récolte finale dans la plante entière
ou dans l'organe. Elle est donnée en µéq.
Qi: quantité de nutriment mesurée à la récolte initiale dans la plante
entière ou dans l'organe. Elle est donnée en µéq.

6.7. SELECTIVITE K+ / Na+

Les plantes absorbent puis transportent dans leurs parties aériennes une certaine
quantité de potassium indispensable à la croissance. Étant donné l'excès du sodium
par rapport au potassium dans le milieu, les plantes doivent maintenir une sélectivité
K+ / Na+ au niveau de leur système d'absorption, de transport et d'accumulation. La
sélectivité est alors définie par:
S K+ / Na+ = S 1 / S 2
S1 = ΔQK / (ΔQK + ΔQNa)
S 2 = [K+] / ([K+] + [Na+])
ΔQ: quantité de l'élément accumulé dans la partie de la plante au cours de
la période du traitement.
[---]: concentration de l'élément dans le milieu de culture.

6.8. VITESSE D'ABSORPTION DES NUTRIMENTS (J)

La vitesse d'absorption représente pour chaque nutriment, le flux à partir du


milieu de culture vers la plante, rapporté à la masse moyenne de matière sèche
racinnaire et à la durée du traitement. Elle est calculée selon la formule suivante
(Pitman, 1988; Reimann, 1992):
J = ΔQ / MS moy * Δt
avec
ΔQ: quantité du nutriment accumulé dans la plante au cours de la période
du traitement.
MS moy = ΔMS / Ln MS f - Ln MS i
MS f : masse de MS racinaire à la récolte finale, exprimée en mg.
MS i : masse de MS racinaire à la récolte initiale, exprimée en mg.
Δt: = t f – t i = durée du traitement en jours.
Chapitre II. MATERIEL ET METHODES ................................................................................................................63

6.9. ANALYSES STATISTIQUES

Les moyennes des biomasses, du statut hydrique et des teneurs ioniques sont
déterminées généralement sur 10 répétitions. Les intervalles de confiance (IC) sont
calculés au seuil de 5 % selon la formule:
IC = (t x S) / √n
avec,
n: nombre d'échantillons.
S: écart-type.
t: valeur du t de Student pour un degré de liberté égale à (n – 1).
Les corrélations sont déterminées sur la base des valeurs individuelles ou les
moyennes. Leur seuil de signification sont comparés à une "Table des valeurs
critiques du coefficient de corrélation" (Dagnelie, 1986). Les coefficients de
corrélation "r" sont suivis de:
NS: corrélation non significative
*: corrélation significative (p = 0.05).
**: corrélation hautement significative (p = 0.01).
***: corrélation très hautement significative (p = 0.001).
CHAPITRE III

PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL


CHEZ Suaeda fruticosa

RESUME

La réponse au sel a été étudiée en hydroponie stricte chez des plants de Suaeda
fruticosa issus de boutures. Après une phase de prétraitement d'un mois, les plantes
sont soumises à plusieurs concentrations de NaCl: 0, 300, 400 et 800 mM. Les récoltes
ont été effectuées au bout de 46 jours de traitement. Les mesures ont porté sur la
croissance et le contenu des tissus en eau, Na+, Cl-, K+, Ca2+, Mg2+, Pi et en Nréd.
La croissance des plantes (production de biomasse et croissance moyenne relative)
est tributaire de la salinité du milieu de culture. Elle est maximale à des doses de sel
comprises entre 0 et 300 mM et diminue significativement par la suite.
Les fortes productions de matière sèche sont associées à:
(i) Une alimentation hydrique convenable.
(ii) Une forte accumulation de Na+ et de Cl-.
(iii) Une amélioration de l'efficacité d'utilisation des cations (K+, Ca2+ et
Mg2+).
(iv) Une diminution de l'efficacité d'absorption de ces cations.
(v) Une sélectivité d'absorption de K+, Ca2+ et Mg2+ aux dépens de Na+.
Ces résultats traduisent l'aptitude de Suaeda fruticosa à utiliser Na+ (et Cl-) pour
l'ajustement osmotique et à préserver les autres ions pour les fonctions les plus
spécifiques compensant ainsi la diminution de la performance de leur système
d'absorption.
La restriction de la croissance, observée particulièrement à 800 mM NaCl, semble
être liée à des effets toxiques du sel: accumulation cytoplasmique de Na+ et de Cl-,
inhibition de l'absorption d'eau et perte du pouvoir de dilution du sel par l'eau
(succulence) et par la matière sèche.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 65

1. INTRODUCTION

L'exploration de plusieurs zones salées de notre pays nous a montré que Suaeda
fruticosa, Chenopodiaceae pérenne très fréquente dans les étages bioclimatiques
subhumide, semi-aride et aride, est très appréciée par le bétail: dromadaires, caprins
et ovins (Le Houérou, 1996). Ses potentialités fourragères ont été soulignées dans
plusieurs travaux (Malcolm, 1996 a; El Shaer, 1997; Sleimi et al., 1999; Sleimi et
Abdelly, 2001). Les pousses de cette halophyte sont particulièrement riches en azote
et en protéines brutes (12 %). Les teneurs en fibres, cellulose, cendre et en silice de
Suaeda fruticosa sont respectivement 30, 22, 14 et 5 % (Bayoumi et al., 1990). Ses
parties aériennes ont été souvent utilisées dans la diète animale sans conduire à des
problèmes de toxicité (El Shaer, 1999). Néanmoins, sa contribution dans la
production primaire des écosystèmes halophiles demeure limitée particulièrement
en condition de faible pluviométrie (Abdelly, 1997).
Le présent chapitre sera consacré à l'étude de la réponse de Suaeda fruticosa au sel
dans des conditions contrôlées de culture dans l'objectif de déterminer sa limite de
tolérance à cette contrainte environnementale et d'identifier les traits physiologiques
qui sont à la base de sa performance en zones salées.

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL

Les jeunes plants de Suaeda fruticosa sont obtenus par bouturage selon les
techniques décrites dans le paragraphe 2.1. du chapitre "Matériels et Méthodes". Les
jeunes boutures sont cultivées individuellement dans des pots de 750 ml remplis de
la solution nutritive de base préparée d'après la formule de Hewitt (1966). Cette
solution contient également du fer sous forme de complexe EDTA-K-Fe
(Jacobson, 1951) et les principaux oligo-éléments sous forme de mélange de sels:
MnCl 2 ; CuSO 4 , 5H 2 O; ZnSO 4 , 7H 2 O; Mo 7 O 24 (NH 4 ) 6 , 4H 2 O et H 3 BO 3 (Arnon et

Hoagland, 1940). Le tableau 3.1 donne la composition de la solution nutritive en


éléments majeurs, en fer et en oligo-éléments. Au terme d'une période de
prétraitement, une récolte initiale est réalisée, puis les plantules sont réparties en
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 66

quatre lots homogène, de 10 individus chacun, cultivés sur milieu nutritif


additionnée de 0, 300, 400 et 800 mM NaCl (Fig. 3.1).

Tableau 3.1. Composition de la solution nutritive en éléments majeurs, en fer


et en oligo-éléments (Hewitt, 1966). C.E. = 2.7 mS.cm-1; pH = 7.3.

Concentrations

Sulfate Mg 1.50

Mono-K 1.60
Phosphates
Macro-éléments Bi-K 0.30
(mM) K 3.00
Nitrates Ca 3.50
NH 4 2.00

Fe 3.00

Mn 0.50

Cu 0.04
Oligo-éléments (ppm)
Zn 0.05

B 0.50

Mo 0.02

Les cultures sont conduites sous serre vitrée: photopériode de 13 à 14 heures,


température et humidité relative moyennes sont respectivement de 25 ± 5°C, 60 ± 5 %
le jour, et 12 ± 5°C, 90 ± 5 % la nuit. Les solutions nutritives sont renouvelées
régulièrement toutes les semaines. Elles sont continuellement aérées à l'aide de
capillaires en plastique reliés à des pompes d'aquarium donnant le même débit d'air
dans tous les pots.
Au bout de 46 jours de traitement, les plantes sont récoltées (récolte finale), elles
sont séparées en parties aériennes et en racines. Ces dernières sont rincées dans trois
bains successifs d'eau distillée froide puis essorées et séchées avec du papier filtre.
Les différents organes sont rapidement mis dans des sachets de papier aluminium
préalablement tarés puis pesés avant et après dessiccation à 60 °C pendant une
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 67

semaine. La teneur en eau des tissus et le statut ionique (K+, Ca2+, Mg2+, Na+, Pi, N et
Cl-) ont été déterminés en début et en fin des traitements.

Témoin (NaCl, 0 mM)


3

NaCl, 300 mM
3

T/5
1 2

NaCl, 400 mM
3

NaCl, 800 mM
3

Prétraitement Traitements

0 24 70
Jours
Figure 3.1. Protocole expérimental.
T / 5: solution nutritive de base diluée 5 fois.
1. Bouturage: Des pousses feuillées prélevées sur des plantes mères sont mises
à enraciner sur milieu nutritif dilué 5 fois.
2. Récolte de départ, repiquage des plantules enracinées et début du
traitement salin 0, 300, 400 et 800 mM NaCl.
3. Récolte finale: les plantes sont séparées en parties aériennes et en racines.

3. RESULTATS

3.1. ASPECT DES PLANTES

Au bout de 46 jours de traitement, le sel affecte le développement et la croissance


des plantes (photo 3.1). Les effets sont tributaires de la salinité de la solution
nutritive. On doit noter en premier lieu que les fortes potentialités de croissance sont
exprimées à 0 et à 300 mM NaCl. Néanmoins, les plantes cultivées en l'absence du sel
montrent des rameaux et des feuilles étiolées. À 300 mM NaCl, les plantes
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 68

deviennent rabougries et les feuilles sont courtes et charnues particulièrement dans


les parties basales des rameaux. À 400 mM NaCl, la ramification des plantes est
amoindrie et la succulence est accentuée. À 800 mM NaCl, la croissance et le
développement sont sévèrement affectés. On note même un brunissement des
feuilles rappelant le comportement des plantes soumises à des déficiences
nutritionnelles ou à une forte hydromorphie du sol. Ce brunissement évolue vers un
dessèchement des feuilles puis des rameaux. D'ailleurs, 40 % des plantes sont
totalement desséchées au terme de 46 jours de culture en présence de 800 mM NaCl.
En résumé, nos observations morphologiques montrent que Suaeda fruticosa maintient
une bonne activité de croissance jusqu'à 400 mM NaCl.

Photo 3.1. Suaeda fruticosa après 46 jours de traitement. La culture est réalisée
en aquaculture stricte. Les solutions nutritives sont additionnées de
différentes doses de NaCl: 0, 300, 400 et 800 mM.

3.2. CROISSANCE PONDERALE

Les variations des masses de matière sèche à la récolte finale en fonction de la


salinité de la solution nutritive sont représentées dans la figure 3.2. Suaeda fruticosa
est capable de produire de la matière sèche pour toutes les doses utilisées de NaCl.
Cette production est maximale pour les doses comprises entre 0 et 300 mM et
minimale à 800 mM NaCl: la masse initiale de matière sèche est multipliée 80 à 90
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 69

fois dans la première gamme de salinité et uniquement 3 fois à 800 mM NaCl. La


matière sèche des parties aériennes représente une part importante de la biomasse
totale de la plante: 78% chez les plantes témoins et 84 à 88 % chez les cultures
conduites en présence de sel. Cette augmentation de la part des parties aériennes
dans l'allocation de la matière sèche en présence de sel se traduit par une diminution
du rapport de matière sèche R / PA qui varie de 0.29 chez les plantes témoins à 0.14
en présence de NaCl, 800 mM (chiffres portés sur l'histogramme de la figure 3.2).

Figure 3.2. Variations de la production de matière sèche (MS) des parties


aériennes et des racines de Suaeda fruticosa avec la salinité du milieu de
culture. Les chiffres portés sur l'histogramme indiquent les rapports de MS
R / PA. TD: témoin départ (début des traitements) Moyennes de 10 répétitions
(6 répétitions pour 800 mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Pour une meilleure illustration des effets du sel sur les différentes parties la
plante, nous avons déterminé l'indice de sensibilité (IS). Ce paramètre correspond à
la baisse de production de la matière sèche en présence de sel, par rapport à la
production sur milieu témoin, 0 mM de NaCl (Tab. 3.2). Les valeurs de IS sont
toujours plus négatives dans les racines que dans les parties aériennes indiquant une
sensibilité particulière des premiers organes. Le comportement des parties aériennes
qui traduit le mieux celui de la plante entière démontre le caractère halophile de cette
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 70

plante à 300 mM NaCl, IS étant positif et traduisant une stimulation de la croissance


par rapport aux cultures conduites en absence de sel. La quantité de matière sèche
mesurée à la récolte finale dépend de la vigueur initiale des plantes, de la durée des
traitements et de la vitesse de croissance durant les traitements.

Tableau 3.2. Variations de l'Indice de sensibilité des parties aériennes, des


racines et de la plante entière en fonction de la salinité du milieu de culture.
Ce paramètre a été calculé à partir des productions de MS pendant la durée du
traitement selon la formule suivante:
IS = 100 * (ΔMS NaCl - ΔMS Témoin ) / ΔMS Témoin .
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM).

NaCl, mM
-------------------------------------------------------------------
300 400 800

Parties aériennes 16.5 - 50.2 - 96.1


Racines - 23.6 - 65.6 - 97.6
Plantes entières 7.5 - 53.7 - 96.4

Pour mieux évaluer l'effet du sel sur l'activité de croissance, nous avons déterminé
la croissance moyenne relative qui exprime la production de matière sèche par unité
de temps et par unité de biomasse (Tab. 3.3).

Tableau 3.3. Variations de la Croissance Moyenne Relative de la plante entière


en fonction de la salinité du milieu de culture. Elle a été calculée à partir des
productions de MS pendant la durée du traitement selon la formule suivante:
CMR = (LnMS f – LnMS i ) / (t f –t i )
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM). Intervalles de
confiance au seuil de 5 % (les valeurs suivies de la même lettre ne sont pas
significativement différentes).

NaCl, mM
--------------------------------------------------------------
0 300 400 800

Plantes entières 0.0993 a 0.0962 ab 0.0828 b 0.0280 c


± 0.0066 ± 0.0091 ± 0.0067 ± 0.0105
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 71

L'examen de ce tableau montre que la CMR ne diminue de manière significative,


par rapport au témoin, que pour les doses supérieures à 300 mM. Néanmoins, l'effet
dépressif du sel apparaît moins clairement sur l'activité de la croissance estimée par
la CMR que sur la masse de matière sèche (Fig. 3.2). À titre d'exemple, le sel (400 mM
NaCl) réduit de 50 % la masse de matière sèche de Suaeda fruticosa et uniquement de
18 % sa CMR. Cette atténuation des variations de la croissance moyenne relative
résulte du principe de ce paramètre qui exprime l'activité de croissance par unité de
temps et de biomasse, alors que la matière sèche finale intègre la vigueur initiale des
plantes et la vitesse de croissance sur toute la durée de l'expérience.
En résumé, Suaeda fruticosa produit sensiblement les mêmes quantités de matière sèche à
0 et 300 mM NaCl. Certains paramètres (MS des parties aériennes) semblent même indiquer
une stimulation de la croissance à 300 mM. Le caractère halophile de cette plante
s'exprimerait à des doses inférieures à 300 mM. La résistance de cette espèce est conservée à
800 mM: à cette dose excessive de sel, la plante survit et croît. Indépendamment de la salinité
du milieu, les parties aériennes sont plus tolérantes au sel que les racines.

3.3. HYDRATATION DES TISSUS

L'apport de sel (300 et 400 mM) dans la solution nutritive conduit à une nette
amélioration de l'hydratation des parties aériennes (Fig. 3.3). En effet, nous avons
noté une succulence de ces organes à ces doses de sel. A 800 mM NaCl, la teneur en
eau diminue mais demeure voisine de celle des plantes témoins. Dans les racines,
l'hydratation accuse des variations de plus faible amplitude. Ce n'est qu'à 800 mM
NaCl qu'on note une légère baisse de la teneur en eau. Compte tenu des difficultés
inhérentes à la mesure de la surface foliaire chez Suaeda fruticosa, il nous a été
impossible d'évaluer l'indice de succulence suivant la formule proposée par Passera
et Albuzio (1978):
I S (ml H 2 O.cm-²) = (MF - MS) / S
Avec, MF: masse de matière fraîche (g), MS: masse de matière sèche (g) et
S: surface foliaire (cm²)
Néanmoins, les variations du contenu des parties aériennes en eau permettent de
décrire parfaitement le phénomène de succulence induit par le sel.
Globalement, le sel ne semble pas perturber l'alimentation hydrique de Suaeda fruticosa.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 72

Figure 3.3. Effet du sel sur la teneur en eau des parties aériennes et des racines
de Suaeda fruticosa à la récolte finale. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions
pour 800 mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

3.4. COMPOSITION MINERALE DES TISSUS

3.4.1. Sodium et chlorure

La culture des plantes en présence du sel conduit à une accumulation de Na+ et de


Cl- dans les tissus (Fig. 3.4).
L'examen de ce dernier graphe montre que:
(i) L'accumulation de Na+ et de Cl- dans les parties aériennes dépasse
nettement celle des racines.
(ii) Les teneurs en Na+ et en Cl- augmentent de manière régulière avec la
salinité du milieu de culture.
(iii) La charge tissulaire en NaCl représente 24 à 54 % de la matière sèche
dans les parties aériennes contre 7 à 11 % seulement dans les racines.
(iv) L'accumulation de Na+ dépasse celle de Cl-, surtout dans les parties
aériennes.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 73

Sodium Parties aériennes


10,0
Chlorures Racines

mmol . g –1 MS
7,5

5,0

2,5

0
Témoin 300 400 800
NaCl, mM
Figure 3.4. Variations des teneurs en sodium et en chlorures, à la récolte finale,
des parties aériennes et des racines de Suaeda fruticosa en fonction de la salinité
du milieu de culture. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM).
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Pour expliquer l'ensemble de ces résultats, nous avons déterminé certains


paramètres impliqués dans l'accumulation de Na+ tels que la production de
biomasse, la répartition, le prélèvement et la vitesse d'absorption de Na+ (Tab. 3.4).
On doit d'abord souligner que la part des parties aériennes dans l'allocation de Na+
est en moyenne de 96 % et dépasse nettement leur contribution dans la matière sèche
de la plante entière. Ceci explique les teneurs particulièrement élevées de ces organes
en sel. Par ailleurs, la forte accumulation de Na+ observée chez les plantes cultivées à
800 mM NaCl n'est associée ni à des prélèvements totaux excessivement élevés de
Na+ (cf. Q Na+), ni à une perte du contrôle de l'absorption de ce cation (cf. stabilité
des vitesses d'absorption: J Na+ ), ni encore à une augmentation de la part des parties
aériennes dans l'allocation de Na+ en fonction de la salinité du milieu de culture (Na+
PA en % Na+ PE). L'ensemble de ces données montre que la teneur élevée en Na+
dans les parties aériennes, particulièrement à 800 mM NaCl, résulte d'une forte
limitation de la croissance de ces organes (probablement induite par des facteurs
autres que Na+ et Cl-) plutôt que d'un envahissement de la plante par Na+.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 74

Tableau 3.4. Production de biomasse, prélèvement et répartition de Na+ chez


Suaeda fruticosa en fonction de la salinité du milieu de culture.
MS PE: matière sèche de la plante entière exprimée en g.
Q Na+: prélèvements totaux de Na+ exprimés en µmol.plante-1.
Na+ PA (% Na+ PE): la part des parties aériennes dans l'allocation de Na+
exprimée en % des prélèvements totaux de Na+.
J Na+ : vitesse d'absorption de Na+ exprimée en µmol.mg-1 MS racines.jour-1.
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM). Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

NaCl, mM
-------------------------------------------------------------------
0 300 400 800

MS PE 3.90 3.64 1.83 0.18


± 0.77 ± 1.11 ± 0.43 ± 0.09

Q Na+ 507.4 17051.3 9928.7 1668.0


± 62.6 ± 5361.6 ± 2180.7 ± 580.3

Na+ PA (% Na+ PE) 90.5 96.4 96.2 96.8

J Na+ 0.049 3.054 2.998 2.639


± 0.007 ± 0.293 ± 0.336 ± 0.439

3.4.2. Potassium, Calcium et Magnésium

La culture des plantes en présence de sel conduit à un appauvrissement des


organes en K+. Cet effet s'exprime davantage dans les parties aériennes que dans les
racines (Fig. 3.5). Le sel diminue les teneurs en Ca2+ dans les parties aériennes, mais il
est sans effet dans les racines. L'accumulation de Mg2+ dans les parties aériennes est
indépendante des traitements salins. Dans les racines les teneurs accusent une forte
diminution à partir de 400 mM NaCl. Cependant, les niveaux atteints demeurent du
même ordre de grandeur que ceux des parties aériennes.
Pour une meilleure caractérisation du comportement nutritionnel de Sueada
fruticosa en présence de sel certains paramètres impliqués dans la nutrition calcique,
potassique ou magnésienne sont déterminés (Tab. 3.5).
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 75

Figure 3.5. Variations des teneurs en K+, Ca2+ et Mg2+, à la récolte finale, dans
les parties aériennes et les racines de Suaeda fruticosa en fonction de la salinité
du milieu de culture. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM).
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 76

Tableau 3.5. Prélèvement et répartition des nutriments en fonction de la


salinité du milieu de culture.
J MR : flux de nutriments du milieu vers les racines. Il est déterminé par la
différence entre les quantités accumulées à la récolte finale et celles estimées
en début des traitements. Il est exprimé en µmol.plante-1.
IS: indice de sensibilité de la nutrition minérale. Il est estimé par la baisse de la
consommation chez les plantes soumises au sel par rapport aux plantes
témoins.
Nutriments PA (en % du J MR ): part des parties aériennes dans la répartition
des nutriments en pour cent de la consommation totale.
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM).

NaCl, mM
---------------------------------------------------------------------------
0 300 400 800

J MR
K+ 10464 2656 1112 4
Ca2+ 1736 788 366 37
Mg2+ 3651 2706 588 52

Nutriments PA (en % du J MR )
K+ 89.5 82.0 75.9 80.9
Ca2+ 89.6 86.6 86.1 91.9
Mg 2+ 34.1 36.0 80.8 81.5

IS Parties aériennes
K+ -73.3 -90.6 -99.6
Ca2+ -49.5 -79.1 -96.9
Mg2+ -9.8 -60.5 -94.8

IS Racines
K+ -52.6 -75.8 -99.2
Ca2+ -32.5 -71.0 -97.7
Mg2+ -15.9 -95.0 -99.5

IS Plantes entières
K+ -71.2 -89.1 -99.6
Ca2+ -47.7 -78.3 -97.0
Mg2+ -13.8 -83.3 -97.9

L'examen de ce tableau fait ressortir les points suivants:


(i) Les modifications des teneurs en K+, Ca2+ ou Mg2+ sont systématiquement
associées à une baisse des prélèvements de ces cations sous l'effet du sel. Cet
effet dépressif s'exprime davantage pour K+ que pour les deux cations
divalents Ca2+ et Mg2+.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 77

(ii) Les nutritions potassique, calcique ou magnésienne sont plus sensibles


au sel que la croissance de la plante entière: les indices de sensibilité estimés
sur la base du prélèvement de ces nutriments par la plante (Tab. 3.5) sont
plus négatifs que ceux calculés sur la base de la croissance (Tab. 3.2). L'écart
entre les deux types d'indice diminue avec la salinité du milieu de culture. À
800 mM NaCl, les deux types d'indices présentent les mêmes valeurs, ce qui
suggère une forte interdépendance de la croissance et du prélèvement de ces
cations.
(iii) Les nutritions potassique et calcique sont moins affectées dans les
racines que dans les parties aériennes notamment à 300 et 400 mM NaCl, ce
qui explique la diminution de la part de ces derniers organes en Ca2+ et en
K+. Néanmoins, la performance des racines n'est pas maintenue à 800 mM
NaCl.
(iv) La nutrition magnésienne des parties aériennes est moins sensible à la
salinité que celles des racines, ce qui montre une translocation préférentielle
de ce cation vers les parties aériennes des plantes soumises au sel (cf.
augmentation de la part des organes en Mg2+).
En résumé, le sel réduit les prélèvements de K+, Ca2+ et Mg2+. Il modifie également leur
répartition entre les parties aériennes et les racines. Les premiers organes sont
particulièrement affectés au niveau de la nutrition potassique et calcique. Néanmoins, ils sont
privilégiés dans l'allocation de Mg2+.

3.4.3. Azote

La fraction d'azote mesurée dans cette étude correspond à l'azote réduit (Nréd.),
qui représente la fraction dominante de ce nutriment dans les tissus végétaux,
dépassant généralement 90 % de l'azote total. Le sel provoque une forte diminution
de l'azote réduit dans les parties aériennes à 800 mM NaCl (Fig. 3.6). Aux doses plus
faibles, son effet n'est pas significatif. L'accumulation de Nréd. dans les racines
semble également peu modifiée dans une gamme de concentrations saline comprise
entre 0 et 400 mM. Le statut azoté des racines n'a pas pu être déterminé à 800 mM
NaCl à cause de la forte réduction de la croissance de ces organes à cette dose de sel.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 78

Figure 3.6. Variations des teneurs en azote réduit des parties aériennes et des
racines de Suaeda fruticosa en fonction de la salinité du milieu de culture.
Compte tenu de la croissance fortement limitée des racines des plantes
soumises à 800 mM NaCl, il nous a été difficile d'y doser l'azote réduit.
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM). Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

L'assimilation de l'azote est plus affectée par le sel que la croissance. En effet,
l'indice de sensibilité (IS N ) estimé sur la base de l'assimilation de l'azote (Tab. 3.6) est
plus bas que celui correspondant à la croissance (Tab. 3.2).

Tableau 3.6. Indice de sensibilité de l'azote réduit de la plante entière. Il


correspond à la baisse de l'assimilation de l'azote par les plantes soumises au
sel par rapport aux plantes témoins. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions
pour 800 mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

NaCl, mM
-----------------------------------------------------
300 400 800

IS N -11.2 -59.8 -98.4


± 7.7 ± 9.6 ± 0.7

3.4.4. Phosphore

La fraction de phosphore mesurée dans cette étude correspond à la fraction


inorganique (Pi). La teneur des tissus en Pi diminue avec la salinité du milieu de
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 79

culture (Fig. 3.7). Cet effet dépressif se manifeste davantage dans les racines que
dans les parties aériennes. La diminution de l'accumulation de Pi, qui constitue une
forme de réserve du phosphore, suggère que l'incorporation de Pi dans les composés
organiques dépasse son absorption par les racines. Cette situation traduirait une
diminution du prélèvement de Pi particulièrement chez les plantes soumises à des
doses élevées de sel, 800 mM NaCl.

Figure 3.7. Variations des teneurs en phosphore inorganique des parties aériennes
et des racines de Suaeda fruticosa en fonction de la salinité du milieu de culture.
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM). Intervalles de confiance au
seuil de 5 %.

3.5. ACCUMULATION DES SUCRES SOLUBLES

Les sucres solubles (saccharose, glucose et fructose) sont préférentiellement


alloués aux zones de croissance active où ils contribuent à l'ajustement osmotique
notamment aux stades précoces de développement (Prado et al., 2000). Dans l'objectif
de déterminer la part des sucres solubles dans l'ajustement osmotique chez Suaeda
fruticosa, nous avons dosé ces carbohydrates dans les parties aériennes et les racines
(Fig. 3.8).
Dans les deux types d'organes, les teneurs les plus faibles sont retrouvées chez les
plantes cultivées en présence de 300 mM NaCl. Ce résultat est lié à une diminution
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 80

des quantités accumulées de sucres solubles et non à une stimulation de la


production de matière sèche.
À 400 mM NaCl, les teneurs en sucres solubles des parties aériennes sont voisines
de celles du témoin, alors que la croissance est diminuée de moitié. Ceci suggère que
le sel diminue la synthèse des carbohydrates solubles ou stimule leur utilisation.
A 800 mM NaCl, la croissance est beaucoup plus inhibée par le sel que les
quantités de sucres solubles ce qui conduit à une augmentation des teneurs.

Figure 3.8. Variations des teneurs en sucres solubles (exprimée en glucose) des
parties aériennes et des racines de Suaeda fruticosa en fonction de la salinité du
milieu de culture. Les chiffres portés sur l'histogramme correspondent aux
quantités moyennes des sucres solubles (mg.plante-1). Compte tenu de la
croissance fortement limitée des racines des plantes soumises à 800 mM NaCl,
il nous a été difficile d'y doser les sucres solubles. Moyennes de 10 répétitions
(6 répétitions pour 800 mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

4. DISCUSSION

4.1. LIMITE DE TOLERANCE AU SEL

Cette étude a porté sur quelques aspects physiologiques de la réponse au sel d'une
halophyte locale, Sueada fruticosa. Les résultats montrent que la croissance optimale
de cette espèce se produit en absence ou en présence de 300 mM NaCl. À cette dose
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 81

de sel, la croissance des parties aériennes est légèrement stimulée. Des travaux
conduits sur d'autres espèces de Suaeda, ont démontré le caractère halophile de ce
genre, c'est à dire l'exigence physiologique en sel pour l'expression de ses
potentialités maximales de croissance. À titre d'exemple, la production maximale de
biomasse est obtenue à des salinités comprises entre 10 et 20 g.l-1 NaCl chez Suaeda
maritima (Yeo et Flowers, 1980; Clipson et al., 1985) et Suaeda flexilis (Binet, 1999). Le
caractère halophile chez d'autres Suaeda est encore plus prononcé: S. macrocarpa est
par exemple incapable de survivre en absence de sel (Boucaud, 1972).
Les résultats d'une 2ème culture, conduite dans des conditions contrôlées,
confirment parfaitement le caractère halophile de Suaeda fruticosa. En effet, la
croissance de cette espèce est significativement stimulée par le sel: les plantes
cultivées en présence de 100 mM NaCl produisent 120 % de biomasse de leurs
homologues complètement privés de sel. Par ailleurs, nos résultats montrent que les
doses excessives de sel (800 mM NaCl) réduisent fortement la croissance de cette
halophyte sans conduire à des symptômes de toxicité ou de nécrose. Cette aptitude à
résister à des salinités sévères permet à Suaeda fruticosa de survivre en dépit des
fortes variations spatiales et temporelles de la salinité dans les écosystèmes
halophiles. Dans la caractérisation des halophytes, deux niveaux de salinité sont
généralement pris en compte, le premier associé à une stimulation de la croissance et
le second correspondant à une capacité de survie. A titre d'exemple, chez Sesuvium
portulacastrum et Batis maritima (Messedi et al., 2001 b et c), l'halophilie s'exprime à
400 mM NaCl alors que la résistance s'étend jusqu'à 1000 mM NaCl.

4.2. NATURE DES EFFETS DU SEL

Nous avons remarqué que la croissance de Suaeda fruticosa est significativement


affectée à partir de 400 mM NaCl. Par ailleurs, on sait que le sel réduit la croissance
des plantes par trois types d'effets:
(i) Les premiers, dits osmotiques, conduisent à une restriction de
l'alimentation hydrique des plantes en raison de l'abaissement du potentiel
osmotique du milieu de culture.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 82

(ii) Les seconds, de nature toxique, se manifestent lorsque Na+ et Cl- sont
accumulés dans le cytoplasme et / ou dans l'apoplasme conduisant à un
blocage du métabolisme et une déshydratation cellulaire.
(iii) Les derniers effets sont de type nutritionnel et se traduisent par une
limitation de l'approvisionnement des plantes en cations et anions
indispensables.
Nous essayerons, dans ce qui suit, d'identifier la nature des effets du sel chez
Suaeda fruticosa.

4.2.1. Effets osmotiques du sel

Nous avons mis en évidence une accumulation préférentielle de Na+ et de Cl- dans
les parties aériennes de Suaeda fruticosa. Ce comportement traduirait une aptitude de
cette halophyte à compartimenter Na+ et Cl- dans les vacuoles et à les utiliser pour
l'ajustement osmotique. Pour vérifier la validité de cette hypothèse, nous avons
comparé la teneur en eau des parties aériennes, leur concentration ionique globale
(estimée par {2 x (Na+ + K+) / teneur en eau}) et la concentration ionique globale du
milieu de culture (Fig. 3.9).
Cette figure montre, qu'indépendamment de la salinité du milieu de culture, la
concentration ionique globale des tissus dépasse celle de la solution nutritive. Suaeda
fruticosa est donc capable de maintenir une hypertonie par rapport à son milieu de
culture. Cependant, cet hyper-ajustement qui serait assuré exclusivement par K+
chez les plantes témoins et principalement par Na+ chez les plantes soumises au sel,
est associé à une amélioration de l'hydratation des tissus chez les plantes cultivées en
présence de 300 et 400 mM NaCl. Ces résultats suggèrent que, dans des conditions
de salinité modérée, la plante utilise Na+ (et très probablement Cl-) pour l'ajustement
osmotique.
Par comparaison aux traitements précédents, on note une forte augmentation de
la concentration ionique globale des tissus associée à une baisse de la teneur en eau
chez les plantes soumises à 800 mM NaCl. Ceci suggère une défaillance des systèmes
de compartimentation.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 83

Figure 3.9. Comparaison de la concentration ionique des parties aériennes et


des racines de Suaeda fruticosa à celle du milieu de culture. La concentration
ionique des organes est estimée par le rapport {2 x (Na+ + K+) / teneur en eau},
avec (Na+ + K+) teneur globale. Les chiffres portés sur l'histogramme
correspondent aux teneurs moyennes en eau. Moyennes de 10 répétitions (6
répétitions pour 800 mM).

L'accumulation vacuolaire de Na+ et de Cl- devrait être équilibrée par une


stimulation de la synthèse des composées compatibles au niveau du cytoplasme
(Khan et al., 1998). Nos résultats montrent que les teneurs des tissus en sucres
solubles n'augmentent que légèrement même aux doses excessives de sel. Pour
vérifier si ces carbohydrates jouent un rôle dans l'équilibre osmotique entre le
cytoplasme et la vacuole, nous avons comparé la concentration ionique globale des
PA (estimée par 2 x (Na+ + K+) / teneur en eau), à celle des sucres solubles dans le
cytoplasme (Fig. 3.10). Cette dernière est obtenue en ramenant la teneur en sucres
solubles (exprimée en glucose) à celles de l'eau et en supposant que le cytoplasme
représente 5 % du volume cellulaire total (Fernandez-Ballester et al., 1998).
La figure 3.10 montre un écart important entre les deux paramètres indiquant une
faible contribution des sucres solubles dans le maintien de l'équilibre osmotique
entre la vacuole et le cytoplasme. Ces résultats sont en accord avec plusieurs autres
travaux indiquant que l'ajustement osmotique est assuré principalement par des
solutés inorganiques chez des plantes inclusives (Yang et al., 1990). Par ailleurs, et
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 84

contrairement aux halophytes monocotylédones qui utilisent les sucres solubles, les
Chenopodiaceae accumulent préférentiellement la glycine bétaïne dans le
compartiment cytoplasmique (Storey et al., 1977). Cependant, cette aptitude semble
dépendre de la salinité du milieu de culture. À titre d'exemple, Khan et al. (1998) ont
obtenu une stimulation de la synthèse de cet osmoticum dans une gamme de
concentration comprise entre 200 et 800 mM NaCl. À 1000 mM, l'accumulation de
glycine bétaïne est significativement diminuée.

Concentration ionique globale


Sucres solubles
4,0
Concentration, M

3,0

2,0

1,0

0
Témoin 300 400 800
NaCl, mM
Figure 3.10. Comparaison entre la concentration ionique globale et la
concentration cytoplasmique des sucres solubles des parties aériennes de
Suaeda fruticosa. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM).

Le comportement de Suaeda fruticosa est conforme à celui d'autres halophytes


dicotylédones qui sont capables, dans une gamme de salinité comprise dans leur
domaine de tolérance, de maintenir un potentiel osmotique foliaire largement plus
négatif que celui du milieu de culture grâce à l'accumulation de Na+ et de Cl-
(Clipson et al., 1985). Plusieurs études, basées principalement sur l'analyse
compartimentale, ont montré que le sel est essentiellement localisé dans la vacuole
(Harvey et al., 1981; Gorham et Wyn Jones, 1983). Par ailleurs, le tonoplaste semble
jouer un rôle crucial dans le maintien de cette compartimentation. En effet, chez
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 85

Suaeda maritima, Yeo (1981) a montré que Na+ est séquestré dans la vacuole et
s'échange difficilement à travers le tonoplaste, contrairement à K+. Cette propriété se
manifeste davantage dans les cellules foliaires que celles des racines. Nos résultats
suggèrent que dans des conditions de forte salinité (800 mM NaCl), les systèmes
impliqués dans la compartimentation vacuolaire de Na+ semblent perdre de leur
efficacité conduisant à une accumulation apoplasmique de ce cation et une perte de
l'eau cellulaire. D'ailleurs, le dessèchement de 40 % des plantes à cette dose de sel
pourrait résulter l'effet osmotique du sel.

4.2.2. Effets toxiques du sel

La figure 3.11 A met en relation la croissance de la plante entière avec la teneur


des parties aériennes en sodium.

Figure 3.11. Relation entre la croissance de la plante entière et la teneur des


parties aériennes en sodium (A) et en chlorures (B) chez Suaeda fruticosa.
Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800 mM).

On voit que les cultures conduites sur milieu à 300 mM NaCl produisent
nettement plus de matière sèche que leurs homologues cultivés à 400 mM NaCl;
avec, cependant, les niveaux d'accumulation de Na+ similaires chez les deux types de
cultures (cf. Fig. 3.4). Ceci indique que la réduction de la croissance observée à 400
mM ne peut pas résulter de l'accumulation foliaire de Na+. Il apparaît ainsi que dans
une gamme de concentration saline n'excédant pas 400 mM, les effets toxiques de
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 86

Na+ sont très peu probables chez Suaeda fruticosa. Chez les plantes cultivées à 800
mM NaCl, les faibles niveaux de croissance sont associés à une forte teneur des
parties aériennes en Na+.
Le même résultat est obtenu quand on analyse les variations de la croissance de la
plante entière avec la charge des parties aériennes en Cl- (Fig. 3.11 B). Comme la forte
accumulation de Na+ (et de Cl-) chez les plantes soumises à 800 mM est associée à
une réduction importante de la croissance et à un dessèchement de 40 % des plantes,
on pourrait diagnostiquer un effet toxique du sel dans ce cas.
L'effet toxique du sel, résultant d'une défaillance des systèmes de
compartimentation, s'exerce sur plusieurs fonctions dont principalement la
photosynthèse qui la voie de la production de biomasse (Downton, 1977). Chez les
glycophytes en C 3 , la salinité réduit la photosynthèse en provoquant la fermeture
des stomates (Hasson et al., 1983), en diminuant le pool de la Ribulose 1-5-
biphosphate carboxylase (Seemann et Sharkey, 1986) et son activité (Miteva et al.,
1992; Haouala, 1999), en induisant un feed-back négatif sur le métabolisme carboné
comme conséquence de la réduction de la croissance (Seemann et Critchley, 1985) et
probablement en combinant tous ces facteurs (Cramer et al., 1990). Chez de jeunes
plants d'une halophyte monocotylédone (Sporobolus virginicus, Poaceae), l'assimilation
du dioxyde de carbone dépend de la salinité du milieu de culture (Naidoo et al.,
1995). En condition de salinité modérée (0 à 100 mM), l'assimilation de CO 2
augmente probablement en raison d'une amélioration du statut hydrique des parties
aériennes ayant pour conséquence une augmentation de la conductance des stomates
et de la concentration interne du CO 2 . Aux fortes doses de sel (400 mM NaCl), la
capacité photosynthétique intrinsèque est réduite par une limitation des échanges
gazeux et une diminution de l'efficience quantique estimée par la fluorescence
chlorophyllienne. Chez Aster tripolium, l'augmentation de la concentration foliaire en
sel conduit à une fermeture des stomates (Perera et al., 1994). Les données relatives à
cette plante montrent que lorsque sa capacité à compartimenter Na+ dans les
vacuoles est dépassée, la concentration apoplasmique de Na+ augmente autour des
cellules de garde conduisant à une fermeture partielle des stomates, une réduction
de la transpiration ayant pour conséquence une amélioration de l'efficacité
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 87

d'utilisation de l'eau et une restriction du flux xylémique de sel vers les feuilles.
D'autres données montrent que la capacité photosynthétique des halophytes est
fortement tributaire de leur aptitude à compartimenter Na+ et Cl-. Analysant la
distribution de Cl- dans les cellules de Salicornia pacifica var. utahensis, Hess et al.
(1975) ont mis en évidence deux niveaux de compartimentation de cet anion dans les
organes photosynthétiques de cette halophyte, le premier est intercellulaire et le
second est intracellulaire: d'une part, Cl- est beaucoup plus abondant dans les
cellules épidermiques que dans les cellules palissadiques, d'autre part, dans ces
cellules, Cl- est présent dans les compartiments cytoplasmique et vacuolaire alors
qu'il est très peu représenté dans les chloroplastes.
Chez Suaeda fruticosa, il est possible que ses faibles potentialités de croissance à
800 mM NaCl soient dues à une forte réduction de la photosynthèse induite par
l'accumulation de Na+ et de Cl- dans des compartiments cellulaires autres que la
vacuole.

4.2.3. Effets nutritionnels du sel

Nous avons déduit, d'après le tableau 3.4, que le sel réduit le prélèvement de K+,
Ca2+ et Mg2+ et modifie leur répartition entre les organes. L'objectif de ce paragraphe
serait d'identifier les paramètres impliqués dans ces perturbations nutritionnelles.
Nous avons estimé, pour chacun des nutriments, la sélectivité d'absorption et les
efficacités d'absorption et d'utilisation.

Sélectivité d'absorption
Le rapport K+ / Na+ est toujours plus élevé dans les racines que dans les parties
aériennes (Tab. 3.7). Ce résultat s'explique par le fait que ces derniers organes
accumulent plus de Na+ et moins de K+. Le sel réduit systématiquement ce
paramètre dans les deux types d'organes. Cependant, le rapport est 3 à 8 fois plus
élevé dans les tissus que dans le milieu de culture. Ceci traduit une absorption et une
accumulation sélectives de K+ par rapport à Na+. Comparées à d'autres travaux, le
rapport Na+ / K+, dans les parties aériennes et les racines de Spergularia marina, varie
respectivement de 0.01 et 0.05 en absence du sel à 1.1 et 2.1 en présence d'une eau de
mer diluée à 40 % (Cheeseman et al., 1985).
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 88

La même analyse conduite avec Ca2+ et Mg2+ montrent que Suaeda fruticosa
conserve également une absorption sélective de ces cations en dépit de l'abondance
de NaCl dans le milieu de culture. La sélectivité vis-à-vis des cations (K+, Ca2+ et
Mg2+) est fortement affectée à 800 mM NaCl. Cette rupture du barrage sélectif
conduit à un envahissement des tissus par Na+.

Tableau 3.7. Comparaison des rapports K+ / Na+, Ca2+ / Na+ et Mg2+ / Na+
dans les parties aériennes et les racines de Suaeda fruticosa à ceux du milieu de
culture. Ces rapports sont déterminés sur la base des concentrations de ces
nutriments dans les tissus. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour 800
mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

NaCl, mM
-------------------------------------------------------------------
0 300 400 800

K+ / Na+ (milieu) 0.0193 0.0145 0.0073


K+ / Na+ (PA) 20.324 0.145 0.092 0.023
± 2.401 ± 0.030 ± 0.012 ± 0.007
K+ / Na+ (R) 24.714 0.821 0.750 0.152
± 5.015 ± 0.161 ± 0.107 ± 0.036

Ca2+ / Na+ (milieu) 0.023 0.018 0.009


Ca2+ / Na+ (PA) 3.389 0.043 0.035 0.035
± 0.452 ± 0.005 ± 0.003 ± 0.009
Ca2+ / Na+ (R) 4.014 0.177 0.145 0.096
± 0.545 ± 0.021 ± 0.031 ± 0.024

Mg2+ / Na+ (milieu) 0.010 0.008 0.004


Mg2+ / Na+ (PA) 2.681 0.058 0.051 0.044
± 0.508 ± 0.008 ± 0.007 ± 0.011
Mg2+ / Na+ (R) 53.751 2.921 0.321 0.333
± 10.465 ± 0.656 ± 0.097 ± 0.086

(K+ + Ca2+ + Mg2+) / Na+ (R)


78.516 3.919 1.210 0.606

Efficacité d'absorption des nutriments


L'efficacité d'absorption d'un nutriment est déterminée en ramenant les quantités
de ce nutriment prélevées par la plante entière à la masse moyenne de son système
racinaire. La figure 3.12 montre que, sur milieu exempt de sel, l'efficacité
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 89

d'absorption de K+ était nettement plus élevée que celle des autres cations bivalents.
Cependant, l'absorption de K+ diminue de manière régulière avec la salinité du
milieu de culture pour s'annuler complètement chez les plantes soumises à 800 mM
NaCl. Ce résultat suggère que NaCl affecte particulièrement les systèmes
d'absorption de K+. Nous avons vu dans l'analyse bibliographique que l'absorption
de K+ est réalisée par deux systèmes, le premier doté d'une grande affinité pour K+
assurerait une alimentation potassique de base même en présence de forte salinité
alors que le second contrôle l'absorption de K+ à des concentrations externes élevées
en potassium et présente une plus grande sensibilité à Na+ comparativement au
premier système. Nos résultats suggèrent que pour une salinité aussi élevée que 800
mM NaCl, les deux systèmes sont complètement bloqués, et il est possible que
certaines plantes ont tendance à perdre K+ dans le milieu de culture.

80
Potassium
Calcium
60 Magnésium
Efficacité d’absorption,
méq . g –1 MS racines

40

20

Témoin 300 400 800


NaCl, mM
Figure 3.12. Variations de l'efficacité d'absorption des éléments (K+, Ca2+ et
Mg2+) chez Suaeda fruticosa en fonction de la salinité du milieu de culture. Ce
paramètre est déterminé en ramenant les prélèvements totaux à la masse
moyenne du système racinaire. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions pour
800 mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Suaeda fruticosa conserve une capacité très limitée à prélever Ca2+ et de Mg2+ à 800
mM NaCl. Néanmoins, l'absorption de ces deux cations n'est affectée de manière
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 90

significative par le sel qu'à partir de 400 mM NaCl: la baisse de l'efficacité


d'absorption, par rapport au témoin, est de 52 et 64 % respectivement pour Ca2+ et
Mg2+. Comme cette diminution est similaire à celle de la croissance (- 53 %), on peut
conclure que la croissance des plantes en milieu salé est plus dépendante de leur
alimentation en cations bivalents que monovalents.

Figure 3.13. Relation entre la croissance de la plante entière et la


consommation des cations chez Suaeda fruticosa.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 91

D'ailleurs, la figure 3.13, qui met en relation la croissance de la plante entière avec
les prélèvements des éléments minéraux, montre que le coefficient de corrélation est
nettement plus élevé pour Mg2+ et Ca2+ que pour K+. Toutefois, les corrélations sont
très hautement significatives pour les trois nutriments.

Efficacité d'utilisation des nutriments


L'efficacité d'utilisation d'un nutriment correspond à la quantité de matière sèche
produite par unité de nutriment consommée. En milieu témoin, l'efficacité
d'utilisation du potassium pour la croissance est plus faible que celle des autres
nutriments (Fig. 3.14).

Racines Potassium
Calcium
Efficacité d'utilisation, g MS . méq –1 Nutriments

Magnésium
Azote

0
Parties aériennes

0
Témoin 300 400 800
NaCl, mM
Figure 3.14. Variations de l'efficacité d'utilisation des nutriments (K+, Ca2+,
Mg2+ et N) pour la croissance des racines et des parties aériennes chez Suaeda
fruticosa en fonction de la salinité du milieu de culture. Ce paramètre est
estimé en ramenant la MS produite par les organes aux quantités de
nutriments qui leur sont allouées. Moyennes de 10 répétitions (6 répétitions
pour 800 mM). Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 92

Ce résultat est lié au fait qu'en condition non limitante en potassium, la majeure
partie du nutriment est accumulée dans la vacuole pour maintenir le potentiel
osmotique et la turgescence cellulaire. De ce fait, elle n'est pas directement impliquée
dans la production de matière sèche. L'apport de sel au milieu de culture conduit à
une augmentation de l'efficacité d'utilisation de K+ et de Ca2+ et à un degré nettement
moindre, de Mg2+. Cette propriété s'exprime davantage dans les parties aériennes
que dans les racines. Par contre, le sel ne semble pas modifier significativement
l'efficacité d'utilisation de l'azote. Toutefois, nos résultats montrent que l'assimilation
de l'azote (Tab. 3.6) est plus sensible au NaCl que la croissance (Tab.3.2). Cette
situation résulterait d'une diminution de l'absorption des nitrates liée à
l'antagonisme Cl- / NO 3 - ou encore à une diminution de la disponibilité des
squelettes carbonés destinés à l'incorporation de l'azote réduit. En effet, il a été
montré que l'inhibition de la photosynthèse chez les plantes soumises au sel, d'une
part, et l'augmentation de leur respiration de maintien, d'autre part, conduit à une
diminution des squelettes carbonés ayant pour conséquence une inhibition de la
réduction de NO 3 - ainsi que de son absorption par les racines (Gale et Zeroni, 1985;
Bouma et De Visser, 1993).
L'amélioration de l'efficience d'utilisation de K+ traduit la capacité des plantes à
utiliser Na+ essentiellement pour l'ajustement osmotique et à réserver K+ pour les
fonctions qui exigent spécifiquement ce cation, comme le maintien d'un
environnement ionique convenable pour le déroulement des processus métaboliques
au niveau du cytoplasme (Harvey et al., 1981; Flowers et Läuchli, 1983). Elle pourrait
également résulter d'une capacité des plantes à remobiliser ce cation à partir des
organes sénescents vers les organes jeunes en pleine activité de croissance (Hommels
et al., 1989). En accord avec les travaux de Clarkson et Hanson (1980), nos résultats
suggèrent qu'au moins dans la gamme de concentration saline comprise entre 0 et
400 mM NaCl, le sodium tissulaire est utilisé dans l'ajustement osmotique à la place
de K+). L'économie d'utilisation de K+ a été observé aussi bien chez des glycophytes
comme la lentille (Lachâal, 1992) et les espèces spontanées de Medicago (Abdelly et
al., 1996) que des halophytes telles que Spergularia marina (Cheeseman et Wickens,
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 93

1986), Atriplex gmelini (Matoh et al., 1987) ou encore Halosarcia pergranulata subp.
pergranulata (Short et Colmer, 1999).
Ca2+ entre dans la constitution des parois et contribue au maintien de l'intégrité
des membranes cellulaires. La présence de sel dans le milieu de culture réduit son
transport vers les parties aériennes. En effet, les racines sont agressées en
permanence par du sel, ainsi le blocage du calcium au niveau des racines justifie son
rôle protecteur. Cependant, cette restriction du transport de Ca2+ vers les organes
photosynthétiques ne semble pas nuire au bon développement de Suaeda fruticosa
cultivée sur des salinités n'excédant pas 400 mM NaCl. Ce comportement décrit par
Caines et Shennan (1999) traduit l'aptitude de cette espèce à conserver son activité de
croissance avec des teneurs faibles en Ca2+.

5. CONCLUSION

Le présent chapitre a porté sur quelques aspects physiologiques de la réponse au


sel de Suaeda fruticosa. Nos résultats montrent que la croissance optimale de cette
espèce locale se manifeste sur une gamme étendue de salinité; les valeurs de sa CMR
rappellent celles des plantes annuelles ou des plantes pérennes à croissance rapide.
Dans des conditions de culture contrôlées, le sel ne semble pas perturber sa nutrition
azotée. Les teneurs en azote réduit de ses parties aériennes sont très voisines de 3
mmol.g-1 MS (soit environ 4.2 % de MS). Ce résultat, qui traduit une capacité de cette
plante à prélever et à réduire l'azote minéral malgré l'abondance de NaCl dans le
milieu de culture et dans les tissus, est en accord avec d'autres études mettant en
évidence la richesse particulière des parties aériennes de cette plante en azote
(Bayoumi et al., 1990; Zhao, 1991).
L'effet dépressif du sel sur la croissance ne s'installe qu'à partir de 400 mM NaCl.
L'analyse des interactions entre le statut nutritionnel et l'activité de croissance
montre que:
(i) L'effet osmotique du sel est très peu prononcé, l'aptitude de cette plante à
accumuler Na+, Cl- et probablement des composés compatibles, autres que
les sucres solubles, lui permet de maintenir une hypertonie par rapport à son
milieu de culture.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 94

(ii) L'effet toxique du sel ne s'installe que dans des conditions de salinité
sévère (800 mM NaCl). À des salinités plus faibles, la compartimentation
efficace de Na+ d'une part et l'enrichissement des parties aériennes en eau
d'autre part (succulence) protègent les parties vitales de la plante contre les
effets délétères de Na+ et de Cl-.
(iii) La réduction de la croissance observée à partir de 400 mM résulterait
très probablement d'une diminution de la performance des systèmes
d'absorption de K+, Ca2+ et Mg2+. Néanmoins, cet effet est en partie
compensé par une utilisation plus économique de ces nutriments pour la
croissance.
(iv) La rupture du barrage sélectif de l'absorption des cations aux dépens de
Na+ ne se produit qu'à 800 mM NaCl.
En résumé, la tolérance au sel de Suaeda fruticosa repose sur une croissance rapide
et une forte aptitude à transporter le sel vers les parties aériennes et à le
compartimenter dans les vacuoles, condition favorable pour maintenir l'hypertonie
des cellules et entretenir leur alimentation hydrique. Comme elle est basée sur la
capacité de la plante à ajuster le potentiel osmotique de ses cellules à celui du milieu,
cette stratégie est dite osmotique (Fig. 3.15).
Chez Suaeda fruticosa, la stratégie osmotique est basée sur une forte capacité
d'absorption racinaire des éléments minéraux pour soutenir une croissance rapide.
Ceci est conforme au comportement de la plante dans son biotope naturel. En effet,
la croissance végétative de cette Chenopodiaceae pérenne est limitée à 5 mois de
l'année (mars-juillet). Cette période est caractérisé par une meilleure disponibilité des
éléments minéraux dans la solution des sols halomorphes.
Chapitre III. PHYSIOLOGIE DE LA REPONSE AU SEL CHEZ Suaeda fruticosa ........................................................ 95

Vacuole
3
Cellules Na+
foliaires

Cytoplasme
Na+
Phloème

Xylème
2

Cellules
racinaires

Na +

MILIEU
1
K + , Na + , Cl -, Ca 2+ NO 3 -, ...
Figure 3.15. Représentation schématique des principales composantes de la
stratégie osmotique adoptée par les halophytes dicotylédones (comme Suaeda
fruticosa). (1) forte capacité d'absorption racinaires, (2) allocation préférentielle
de Na+ aux parties aériennes (prédominance de la conduction ascendante de
Na+ sur la conduction descendante) et (3) compartimentation vacuolaire de
Na+.
CHAPITRE IV

STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina


alterniflora ET COMPARAISON AVEC Suaeda fruticosa

RESUME

Les aspects physiologiques de la réponse au sel sont analysés chez Spartina


alterniflora, halophyte monocotylédone à potentialité fourragère. Après enracinement
des unités feuillées prélevées sur des rhizomes de plantes mères, les plantules sont
cultivées individuellement et irriguées avec une solution nutritive additionnée de
différentes doses de NaCl, 0, 100, 300, 400 et 800 mM. Les résultats montrent que
Spartina alterniflora est une halophyte facultative capable de conserver une bonne
activité de croissance jusqu'à 300 mM NaCl et une aptitude à résister au sel jusqu'à
800 mM NaCl.
L'analyse des relations entre la croissance et le statut ionique montre que les
teneurs maximales en sodium et en chlorures sont atteintes à partir de 300 mM NaCl
et ne dépassent guère 1.5 mmol.g-1 MS. Le sel conduit à un appauvrissement
considérable des tissus en potassium (utilisé en priorité pour l'ajustement osmotique)
et induit une biosynthèse accrue des sucres solubles. Nos résultats suggèrent que ces
carbohydrates seraient capables d'équilibrer le potentiel osmotique du cytoplasme
avec celui de la vacuole. Néanmoins, l'hydratation des tissus est affectée par NaCl.
La forte réduction de croissance observée à partir de 400 mM est liée à des effets
nutritionnels qui consistent en une réduction de la sélectivité et de l'efficacité des
systèmes d'absorption compensée partiellement par l'amélioration de l'efficacité de
l'utilisation des nutriments (K+, Ca2+, Mg2+ et N).
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora ................................................ 97

1. INTRODUCTION

Spartina alterniflora, plante pérenne appartenant à la famille des Poaceae, domine


dans les marais salins et les régions côtières de l'Est des États Unis d'Amérique. Dans
ces régions, cette plante est fauchée plusieurs fois par an, ses organes végétatifs
aériens sont séchés et servent de foin pour l'alimentation du bétail. Sa production
annuelle de matière sèche est fortement tributaire de la salinité et de l'hydromorphie
du milieu ainsi que de la disponibilité des nutriments minéraux; elle varie de 15 à 48
tonnes par hectare (Schubauer et Hopkinson, 1984; Turner, 1993). A titre d'exemple,
des plantes fourragères conventionnelles comme la luzerne (Martiniello, 1998) et le
ray-grass d'Italie (Binet, 1999) produisent respectivement 10 et 22 tonnes en condition
d'irrigation à l'eau douce. Compte tenu de l'intérêt fourrager qu'elle présente, cette
plante a été retenue par les partenaires impliqués dans l'Action Concertée
"Sustainable halophyte utilisation in the Mediterranean and subtropical dry regions".
Cependant, son introduction dans de nouvelles aires nécessite, au préalable, sa
caractérisation physiologique et écologique. En effet, les données actuellement
disponibles se rapportent particulièrement à son comportement dans son biotope
naturel d'origine (Pezeshki et DeLaune, 1993; Seliskar, 1995; Pezeshki et DeLaune,
1997).
Le présent chapitre traite les réponses physiologiques au sel de cette Poaceae native
des biotopes caractérisés par des variations importantes de la salinité et de
l'hydromorphie. Les mécanismes de son adaptation à la salinité seront analysés et
comparés à ceux de Suaeda fruticosa.

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL

Les jeunes plants de Spartina alterniflora ont été obtenus par bouturage: des unités
feuillées de rhizome, de 5 à 10 cm de long, prélevées sur des plantes mères sont mises
à enraciner individuellement dans des pots en plastique remplis de sable inerte
préalablement lavé. Les plantules enracinées (au bout de 1 mois environ) sont
irriguées 3 fois par semaines (toutes les 48 heures): les deux premières irrigations
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora ................................................ 98

sont réalisées à l'eau de ville, la troisième avec la solution nutritive (Hewitt, 1966)
préparée dans l'eau de ville de la région de Soliman. Cette solution nutritive contient
également du fer sous forme de complexe EDTA-K-Fe (Jacobson, 1951) et les
principaux oligo-éléments sous forme de mélange de sels: MnCl 2 ; CuSO 4 , 5H 2 O;

ZnSO 4 , 7H 2 O; Mo 7 O 24 (NH 4 ) 6 , 4H 2 O et H 3 BO 3 (Arnon et Hoagland, 1940). La

composition en éléments majeurs, en fer et en oligo-éléments est donnée par le


tableau 4.1. Le volume apporté à chaque irrigation (200 ml) est suffisant pour
provoquer un léger écoulement.

Tableau 4.1. Composition de la solution d'irrigation en éléments majeurs, en


fer et en oligo-éléments. C.E. = 3.6 mS.cm-1; pH = 7.8.

Concentrations
Sulfate Mg 3.375
Mono-K 1.600
Phosphates
Bi-K 0.300
Macro-éléments
K 5.850
(mM)
Nitrates Ca 8.000
NH 4 2.125
Chlorure Na 10.20
Fe 3.00
Mn 0.50
Cu 0.04
Oligo-éléments (ppm)
Zn 0.05
B 0.50
Mo 0.02

Les cultures sont conduites, sous serre vitrée, souvent à la fin du printemps et au
début de l'été. Des observations préliminaires nous ont montré que cette période de
l'année est la plus favorable pour la croissance de cette plante. La photopériode est de
13 à 14 heures. La température et l'humidité relative moyenne sont respectivement 30
± 5 °C, 50 ± 5 % le jour, et 20 ± 5 °C, 75 ± 5 % la nuit.
Après une phase de prétraitement de 57 jours, une première récolte est réalisée
puis les pots sont répartis en 5 lots homogènes de 10 plantes chacun. Les irrigations
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora ................................................ 99

sont alors réalisées avec la solution nutritive additionnée de différentes doses de sel:
0, 100, 300, 400 et 800 mM NaCl. Au bout de 100 jours de traitements, les plantes sont
séparées en rhizomes feuillés d'une part et en racines d'autre part (récolte finale).
Pour une raison de commodité, l'ensemble des feuilles et du rhizome sera qualifié de
parties aériennes. Le protocole expérimental est schématisé dans la figure 4.1.

Témoin (NaCl, 10 mM)


3

NaCl, 100 mM
3

Témoin NaCl, 300 mM


1 2 3

NaCl, 400 mM
3

NaCl, 800 mM
3

Prétraitement Traitements
0 57 157
Jours
Figure 4.1. Protocole expérimental.
Témoin: solution nutritive de base préparée dans l'eau de ville.
1. Bouturage: Des unités feuillées prélevées sur les rhizomes des plantes mères
sont mises à enraciner sur sable inerte irrigué par la solution nutritive.
2. Récolte de départ et début du traitement: 0, 100, 300, 400 et 800 mM NaCl.
3. Récolte finale: les plantes sont séparées en rhizomes feuillés et en racines.

3. RESULTATS

3.1. ASPECT DES PLANTES

La photo 4.1 illustre l'aspect des plantes de Spartina alterniflora au bout de 100 jours
de traitement. On doit noter au départ qu'en dépit du volume relativement limité des
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 100

pots de culture, la plante est capable de développer de nombreuses unités feuillées


sur le même rhizome. En effet, seule une unité feuillée est mise en culture par pot au
début de l'expérience. Cette aptitude à la multiplication et à la production de matière
sèche dépend de la salinité des solutions d'irrigation. La production optimale de
biomasse semblent se manifester sur milieux légèrement à modérément salés (10 et
100 mM NaCl). L'expansion des feuilles ainsi que leurs nombres sont sévèrement
affectés à partir de 400 mM NaCl. Néanmoins, cette réduction de la croissance ne
semble pas être associée à l'apparition de symptômes spécifiques de la toxicité au sel
(chlorose et / ou nécrose). La chlorose qui affecte les feuilles les plus âgées ne serait
pas liée à NaCl puisqu'elle apparaît même chez les plantes témoins. D'autre part,
nous n'avons enregistré aucun dessèchement même aux doses excessives de NaCl.
Dans ces conditions de salinité sévère, le taux de mortalité s'élève à 40 % chez Suaeda
fruticosa, et pour une durée de traitement moins prolongée (46 jours).

Photo 4.1. Spartina alterniflora après 100 jours de traitement. La culture est
réalisée sur sable inerte. Les irrigations sont faites par la solution nutritive
additionnée de différentes doses de NaCl: 0, 100, 300, 400 et 800 mM.

3.2. CROISSANCE PONDERALE

Au niveau de la plante entière, les quantités de matière sèche déterminées à la


récolte finale représentent 560, 638, 385, 294 et 137 % de la matière sèche initiale
respectivement à 0, 100, 300, 400 et 800 mM NaCl. Il apparaît ainsi que Spartina
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 101

alterniflora est capable de maintenir une activité de croissance pour toutes les
concentrations salines utilisées, et que la présence d'une dose modérée de sel (100
mM) semble indispensable pour l'expression des potentialités maximales de
croissance de cette plante (Fig. 4.2).

Figure 4.2. Production de matière sèche (MS) des parties aériennes et des
racines de Spartina alterniflora avant (TD) et après le traitement salin. Les
chiffres portés sur l'histogramme indiquent les rapports de matière sèche
R / PA. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Ce comportement est également bien illustré quand on examine les valeurs de


l'indice de sensibilité des différents organes ou de la plante entière (Tab. 4.2). Les
valeurs de ce paramètre sont positives à 100 mM NaCl indiquant une stimulation de
la croissance par rapport aux plantes témoins. Aux doses supérieures, la production
de matière sèche diminue aussi bien dans les parties aériennes que dans les racines.
L'effet dépressif du sel est légèrement plus prononcé dans les premiers que les
seconds organes. Toutefois, la contribution des parties aériennes dans la biomasse
produite par la plante entière demeure en moyenne de 85 %, indépendamment de la
salinité des solutions d'irrigation.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 102

Tableau 4.2. Variations de l'indice de sensibilité des parties aériennes, des


racines et de la plante entière avec la salinité. Ce paramètre a été calculé à
partir des productions de matière sèche pendant la durée du traitement.
Moyennes de 10 répétitions.

NaCl, mM
-------------------------------------------------------------------
100 300 400 800

Parties aériennes 15.8 - 39.4 - 56.6 - 92.3


Racines 23.8 - 30.7 - 39.8 - 90.0
Plantes entières 16.9 - 38.2 - 54.2 - 92.0

Par comparaison à Suaeda fruticosa qui produit 2 à 4 g MS.plante-1 (cf. Fig. 3.2),
Spartina alterniflora montre une production de biomasse nettement plus importante, 5
à 10 g MS.plante-1. Cependant, on ne peut pas en déduire une meilleure croissance
chez la seconde espèce puisque la durée des traitements et la vigueur des plantes lors
de l'application du sel sont différentes. Pour ces raisons, nous avons choisi de
comparer les deux espèces sur la base de la croissance moyenne relative (Tab. 4.3).

Tableau 4.3. Variations de la croissance moyenne relative de la plante entière


en fonction de la salinité des solutions d'irrigation chez Spartina alterniflora et
Suaeda fruticosa. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil
de 5 %.

Spartina alterniflora Suaeda fruticosa

Témoin 0.0162 0.0993


± 0.0030 ± 0.0066
NaCl, 100 mM 0.0174
± 0.0030
NaCl, 300 mM 0.0133 0.0962
± 0.0020 ± 0.0091
NaCl, 400 mM 0.0099 0.0828
± 0.0020 ± 0.0067
NaCl, 800 mM 0.0034 0.0280
± 0.0010 ± 0.0105
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 103

Les valeurs de la CMR discriminent clairement les deux halophytes.


Indépendamment de la salinité du milieu de culture, ce paramètre est en moyenne 5
fois plus élevé chez Suaeda fruticosa que chez Spartina alterniflora. L'effet dépressif du
sel sur la CMR s'exprime chez les deux halophytes à partir de 400 mM NaCl et
s'accentue à 800 mM.
L'examen des variations de l'indice de sensibilité (IS) estimé sur la base de la
croissance moyenne relative (CMR) montre qu'entre 300 et 800 mM de NaCl, la CMR
de Spartina alterniflora a été significativement plus affectée par le sel que celle de
Suaeda fruticosa indiquant une meilleure aptitude à tolérer le sel chez la seconde
espèce (Fig. 4.3).

20
Suaeda fruticosa
Spartina alterniflora
0
ISCMR, plantes entières

-20

-40

-60

-80

-100
100 300 400 800
NaCl, mM
Figure 4.3. Variations de l'indice de sensibilité de la plante entière en fonction
de la salinité des solutions d'irrigation chez Spartina alterniflora et Suaeda
fruticosa. IS est estimé sur la base de la croissance moyenne relative. Moyennes
de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Les variations de la masse de matière sèche de la plante entière, exprimées en pour


cent de celle des plantes témoins chez les deux halophytes (Tab. 4.4), montre une
bonne tolérance au sel de Suaeda fruticosa et à degré moindre de Spartina alterniflora
qui expriment des niveaux de production de matière sèche voisins de leurs
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 104

potentialités maximales de croissance jusqu'à 300 mM NaCl. Deux différences


spécifiques sont mises en évidence:
(i) Suaeda fruticosa manifeste une meilleure tolérance à NaCl que Spartina
alterniflora en condition de concentrations en sel relativement modérées (100
à 300 mM NaCl).
(ii) Spartina alterniflora semble maintenir une meilleure aptitude à produire
de la matière sèche en condition de salinité sévère (400 et 800 mM).

Tableau 4.4. Variations de la masse de MS de la plante entière, exprimée en %


de celle des plantes témoins, en fonction de la salinité des solutions
d'irrigation chez Spartina alterniflora et Suaeda fruticosa. Moyennes de 10
répétitions. La variation de MS en % du témoin à 100 mM NaCl chez Sueada
fruticosa a été déterminée sur une expérience isolée.

Spartina alterniflora Suaeda fruticosa

NaCl, 100 mM 114 % 119 %


NaCl, 300 mM 69 % 93 %
NaCl, 400 mM 56 % 47 %
NaCl, 800 mM 25 % 5%

En somme, l'utilisation de certains paramètres d'analyse de la croissance (CMR, MS en %


du témoin et IS) montre une bonne tolérance au sel chez les deux halophytes. L'espèce locale
se distingue par des potentialités élevées de croissance en l'absence comme en présence de sel
et par une meilleure aptitude à conserver ces potentialités, notamment dans une gamme de
concentration saline ne dépassant pas 400 mM.

3.3. HYDRATATION DES TISSUS

Comparées à d'autres cultures conduites au laboratoire, Spartina alterniflora montre


des niveaux d'hydratation relativement bas aussi bien dans ses parties aériennes que
chez ses racines (Fig.4.4). Ceci peut s'expliquer soit par le fait que la récolte ait porté
sur des plantes relativement âgées (5 mois) ou bien par la perte d'eau sous forme de
gouttelettes chargées en sel lors de la sécrétion. Les teneurs les plus élevées en eau
sont retrouvés dans les parties aériennes et les racines des plantes témoins et celles
cultivées en présence de 100 mM NaCl. Aux doses supérieures, les teneurs en eau
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 105

diminuent significativement dans les deux types d'organes. À 800 mM NaCl, elles ne
représentent qu'environ 50 % de leur valeur maximale.

Figure 4.4. Effet du sel sur la teneur en eau des parties aériennes et des racines
de Spartina alterniflora à la récolte finale. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Le sel affecte davantage l'alimentation hydrique de Spartina alterniflora que celle de


Suaeda fruticosa. En effet, nous avons vu, chez cette dernière espèce, que NaCl
améliore l'hydratation des tissus conduisant à une succulence des feuilles qui
constitue l'une des bases de la tolérance au sel de Suaeda fruticosa. L'absence de ce
pouvoir de dilution du sel par l'eau chez Spartina alterniflora, suggère que cette espèce
adopte d'autres mécanismes pour tolérer le sel.

3.4. COMPOSITION MINERALE DES TISSUS

Les plantes de Spartina alterniflora sécrètent du sel par leurs parties aériennes.
Cette particularité sera analysée ultérieurement (chapitre V). Les sels accumulés à la
surface des feuilles ont été éliminés par trois lavages successifs des organes dans de
l'eau distillée pré- refroidie. Les analyses ont donc porté dans ce chapitre sur les
éléments accumulés à l'intérieur des tissus.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 106

3.4.1. Sodium et chlorure

Les plantes cultivées en présence de sel accumulent Na+ et Cl- dans leurs parties
aériennes et leurs racines (Fig. 4.5). Néanmoins, les niveaux d'accumulation sont
relativement faibles et ne dépassent guère 1.2 et 2 mmol.g-1 MS respectivement pour
Na+ et Cl-. Alors que dans les parties aériennes de Suaeda fruticosa, les teneurs de ces
deux ions augmentent régulièrement avec la salinité du milieu de culture pouvant
atteindre 10 mmol.g-1 MS (Fig. 3.4). Cependant, Spartina alterniflora accumule plus de
Cl- et de Na+ dans ses racines que dans ses parties aériennes, contrairement aux
halophytes inclusives, comme Suaeda fruticosa, ou aux glycophytes tolérantes.
Indépendamment des organes, la teneur en Cl- dépasse toujours celle de Na+.

Sodium Parties aériennes


Chlorure Racines

2,5

2,0
mmol . g –1 MS

1,5

1,0

0,5

0
Témoin 100 300 400 800
NaCl, mM
Figure 4.5. Variations des teneurs en sodium et en chlorures, à la récolte finale,
dans les parties aériennes et les racines de Spartina alterniflora en fonction de la
salinité des solutions d'irrigation. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

Ce comportement annonce une exclusion de Na+ par cette plante. Par ailleurs,
l'examen des variations des teneurs en Na+ et de Cl- avec la salinité du milieu de
culture montre que les teneurs maximales sont atteintes chez les plantes cultivées à
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 107

300 mM NaCl. Au-delà de cette dose, l'augmentation de la salinité de la solution


d'irrigation ne conduit pas à une accumulation supplémentaire de Na+ et de Cl- dans
les tissus. Ces résultats suggèrent que Spartina alterniflora est capable de survivre et
croître sur milieux fortement salins en adoptant une stratégie d'évitement impliquant
la sécrétion de ces ions toxiques par les parties aériennes et probablement leur
exclusion à travers les racines. Ce comportement pourrait traduire une incapacité de
cette halophyte à séquestrer Na+ et Cl- dans les vacuoles.
En vue d'identifier les caractéristiques qui sont à la base des différences entre
Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora au niveau de la répartition de Na+, nous avons
déterminé deux paramètres: l'absorption et la répartition apparentes de Na+ entre les
parties aériennes et les racines (Tab. 4.5). Les paramètres ne tiennent pas compte des
quantités de Na+ sécrétées par les feuilles.

Tableau 4.5. Variations de la vitesse d'absorption de Na+ et de la répartition et


chez Spartina alterniflora en fonction de la salinité des solutions d'irrigation.
Na+ PA (% Na+ PE): la part des parties aériennes dans l'allocation de Na+
exprimée en % des prélèvements totaux de Na+.
J Na+ : vitesse d'absorption exprimée en µmol Na+.mg-1 MS racines.jour-1.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

NaCl, mM
-----------------------------------------------------------------
0 100 300 400 800

Na+ PA (% Na+ PE) 79.8 83.1 80.9 77.9 83.3

J Na+ 0.045 0.137 0.165 0.140 0.120


± 0.017 ± 0.032 ± 0.019 ± 0.035 ± 0.016

L'examen de ce tableau montre que:


(i) La part des parties aériennes dans l'allocation de Na+ est en moyenne de
80 %. Cette valeur est inférieure à celle rencontrée chez Suaeda fruticosa qui
est de l'ordre de 95 % (cf. Tab. 3.4). Il apparaît ainsi qu'outre sa forte aptitude
à sécréter Na+ et Cl- par ses feuilles (et probablement à exclure ces ions par
ses racines), Spartina alterniflora exprimerait un autre mécanisme de
protection de ses organes photosynthétiques contre NaCl et qui consiste à
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 108

retenir une fraction non négligeable de ces ions au niveau de son système
racinaire.
(ii) La vitesse d'absorption de Na+ est en moyenne 20 à 25 fois plus faible que
celle de Suaeda fruticosa. Cependant, il serait important de noter que les
valeurs de la vitesse d'absorption chez Spartina alterniflora sont sous estimées
puisque seules les quantités de Na+ accumulées dans les organes sont prises
en considération. Par ailleurs, Bradley et Morris (1991 a) ont montré, chez la
même espèce, que les quantités de sel éliminées par sécrétion foliaire et
exclusion racinaire représentent en moyenne 95 % des prélèvements totaux.
Dans ces conditions, on doit multiplier d'un facteur 20 la vitesse d'absorption
de Na+. En apportant ces corrections, J Na+ devient du même ordre de
grandeur chez les deux halophytes. Il apparaît, ainsi, que les faibles teneurs
en Na+ dans les parties aériennes de Spartina alterniflora ne résultent pas
d'une plus forte aptitude de cette espèce à contrôler l'absorption de Na+ par
les racines.

3.4.2. Potassium, Calcium et Magnésium

Les teneurs des parties aériennes en K+, en Ca2+ et en Mg2+ diminuent


régulièrement avec la salinité de la solution d'irrigation (Fig. 4.6). Cependant, cet
effet dépressif du sel s'exprime davantage pour K+ que pour Ca2+ et Mg2+. Dans les
racines, seules les teneurs en K+ et en Ca2+ accusent une légère baisse alors que
l'accumulation de Mg2+ semble indépendante de la salinité du milieu.
Pour une meilleure caractérisation des effets du sel sur l'alimentation potassique,
calcique ou magnésienne de Spartina alterniflora, nous avons déterminé l'absorption,
la répartition de ces cations entre les différentes parties de la plante et les indices de
sensibilité de la nutrition cationique (Tab. 4.6).
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 109

Figure 4.6. Variations des teneurs en K+, Ca2+ et Mg2+, à la récolte finale, dans
les parties aériennes et les racines de Spartina alterniflora en fonction de la
salinité des solutions d'irrigation. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 110

Tableau 4.6. Prélèvement et répartition des nutriments en fonction de la


salinité des solutions d'irrigation.
J MR (µmol.plante-1): flux de nutriments du milieu vers les racines. Pour chacun
des nutriments, ce paramètre est déterminé par la différence entre les quantités
accumulées à la récolte finale et celles estimées en début des traitements.
IS: indice de sensibilité de la nutrition minérale. Pour chacun des nutriments,
il est estimé par la baisse de la consommation chez les plantes soumises au sel
par rapport aux plantes témoins.
Nutriments PA (en % du J MR ): part des parties aériennes dans la répartition
des nutriments en pour cent de la consommation totale.
Moyennes de 10 répétitions.

NaCl, mM
----------------------------------------------------------------------------
Témoin 100 300 400 800

J MR
K+ 77245 6464 2464 1461 - 171
Ca2+ 2341 1713 754 526 104
Mg2+ 1727 1409 565 304 14

Nutriments PA (en % du J MR )
K+ 89 86 83 80 85
Ca2+ 86 88 86 83 83
Mg 2+ 81 74 70 67 71

IS Parties aériennes
K+ - 16 - 64 - 76 - 92
Ca2+ - 24 - 62 - 72 - 88
Mg2+ - 22 - 67 - 79 - 91

IS racines
K+ -6 - 33 - 42 - 87
Ca2+ - 26 - 61 - 65 - 84
Mg2+ 12 - 27 - 49 - 81

IS Plante entière
K+ - 15 - 61 - 72 - 91
Ca2+ - 25 - 62 - 71 - 88
Mg2+ - 17 - 61 - 74 - 90

La lecture de ce tableau permet les remarques suivantes:


(i) Les modifications des teneurs en K+, Ca2+ ou Mg 2+ que nous venons de
décrire sont systématiquement associées à une baisse des prélèvements de
ces cations sous l'effet du sel. À l'exception des plantes cultivées sur 800 mM
NaCl qui ont tendance à perdre K+ dans le milieu de culture (J MR est négatif),
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 111

l'effet dépressif du sel s'exprime de la même manière pour K+ que pour les
deux cations divalents Ca2+ et Mg2+.
(ii) Les nutritions potassique, calcique ou magnésienne sont plus sensibles au
sel que la croissance de la plante entière. Les indices de sensibilité estimés sur
la base du prélèvement de ces nutriments par la plante sont plus négatifs que
ceux calculés sur la base de la croissance. Ce résultat explique les
diminutions des teneurs observées particulièrement dans les parties
aériennes suggérant une dilution des nutriments par la croissance.
(iii) Au niveau de la plante entière, le prélèvement des trois cations est
affecté de la même manière. Cependant, les indices relatifs à l'allocation de
K+ et de Mg2+ sont plus négatifs dans les parties aériennes que dans les
racines. Ce résultat indique une allocation préférentielle de K+ et de Mg2+ aux
racines chez les plantes cultivées en présence de sel. D'ailleurs, on remarque
une diminution de la part des parties aériennes en K+ et particulièrement en
Mg2+ chez ces plantes. Pour le calcium, ce phénomène n'apparaît que pour
les fortes doses de sel, 400 et 800 mM.
À la lumière de ces résultats, il apparaît que le sel réduit le prélèvement de K+, de
Ca2+ et de Mg2+. Le transport de ces nutriments (particulièrement K+ et Mg2+) vers les
parties aériennes semble également être affecté. Globalement, ce comportement
rappelle celui de Suaeda fruticosa (cf. Tab. 3.5). Néanmoins, cette halophyte
dicotylédone se distingue par:
(i) Des teneurs élevées en K+, Ca2+ et Mg2+ particulièrement en l'absence du
sel.
(ii) Une plus grande sensibilité de sa nutrition potassique, indépendamment
de la concentration saline dans le milieu de culture.
(iii) Une plus forte restriction de son alimentation en cation divalent (Ca2+ et
Mg2+) pour les fortes doses de NaCl (400 et 800 mM).
(iv) Une plus grande aptitude à transporter Mg2+ vers les parties aériennes en
condition de salinité sévère (400 et 800 mM NaCl).
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 112

3.4.3. Azote

Indépendamment de la salinité du milieu de culture, la teneur en azote réduit des


parties aériennes et des racines est en moyenne de 2 mmol.g-1 MS (Fig. 4.7) ce qui
correspond approximativement à 3 % de MS. Ce résultat indique que cette plante
peut produire une matière sèche riche en Nréd. (et probablement en protéines)
quand l'azote n'est pas limitant dans le milieu de culture. La présence de sel ne
semble pas conduire à des variations significatives de la teneur en Nréd. aussi bien
dans les racines que dans les parties aériennes.

Figure 4.7. Variations des teneurs en Nréd. des parties aériennes et des racines
de Spartina alterniflora en fonction de la salinité des solutions d'irrigation.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

D'ailleurs, les indices de sensibilité de la croissance (Tab. 4.2) et de l'assimilation


de l'azote (Tab. 4.7) sont du même ordre de grandeur aux salinités intermédiaires
(300 et 400 mM NaCl). Aux salinités extrêmes, l'assimilation de l'azote est moins
sensible au sel que la croissance: elle est moins stimulée à 100 mM et moins affectée à
800 mM. L'ensemble des résultats suggère une relation directe entre la production de
biomasse et l'assimilation de l'azote.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 113

Tableau 4.7. Variation de l'indice de sensibilité de l'azote réduit des parties


aériennes, des racines et de la plante entière. Il correspond à la baisse de
l'assimilation de l'azote par les plantes soumises à NaCl par rapport aux
plantes témoins. Moyennes de 10 répétitions.

NaCl, mM
-------------------------------------------------------------------
100 300 400 800

Parties aériennes 4 - 35 - 50 - 76
Racines 6 - 41 - 46 - 78
Plantes entières 4 - 36 - 49 - 76

L'aptitude de cette plante à prélever NO 3 - en dépit de l'abondance de Cl- dans le


milieu de culture, d'une part, et sa capacité de protéger ses tissus contre
l'accumulation excessive de Na+ et de Cl-, d'autre part, lui permettraient de maintenir
les pools métaboliques (cytoplasmiques) et vacuolaires de NO 3 - à des niveaux non
limitants pour l'activité de la nitrate réductase.
La comparaison du statut azoté de Spartina alterniflora à celui de Suaeda fruticosa
montre que la première espèce accumule relativement moins d'azote dans ses tissus.
Cependant, elle se distingue par une plus grande aptitude à maintenir les niveaux
d'accumulation de ce nutriment en présence de sel. En effet, nous avons noté que
l'absorption et l'assimilation d'azote sont plus affectées chez Suaeda fruticosa
particulièrement en condition de salinité élevée (400 et 800 mM NaCl).

3.4.4. Phosphore

À part une légère baisse de la teneur dans les racines des plantes cultivées à
400 mM NaCl, le phosphore inorganique (Pi) n'accuse pas de modifications
significatives sous l'effet du sel (Fig. 4.8). Le maintien de Pi à des niveaux constants
suggère un équilibre entre l'absorption de ce nutriment et son utilisation pour la
croissance chez Spartina alterniflora. Cette capacité de maintenir une alimentation
phosphatée équilibrée en présence de sel est moins évidente chez Suaeda fruticosa.
Chez cette dernière, qui est plus riche en Pi accumulé préférentiellement dans ses
racines, on a observé une diminution significative de la teneur en Pi dans ses parties
aériennes et dans ses racines particulièrement à 800 mM NaCl.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 114

Figure 4.8. Variations des teneurs en Pi des parties aériennes et des racines de
Spartina alterniflora en fonction de la salinité des solutions d'irrigation.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

3.4.5. Accumulation des sucres solubles

Figure 4.9. Variations des teneurs en sucres solubles des parties aériennes et
des racines de Spartina alterniflora en fonction de la salinité des solutions
d'irrigation. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de
5 %.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 115

La figure 4.9 montre que la teneur des tissus en sucres solubles augmente
régulièrement avec la salinité des solutions d'irrigation. Cette propriété apparaît
d'une manière spectaculaire dans les parties aériennes: les teneurs sont au moins 5
fois plus élevées chez les plantes soumises à 800 mM NaCl que leurs homologues
cultivés en absence de sel.

4. DISCUSSION

4.1. HALOPHILIE ET RESISTANCE AU SEL

Ce chapitre a porté sur quelques aspects physiologiques de la réponse au sel chez


Spartina alterniflora. La croissance de cette plante est tributaire de la salinité de la
solution d'irrigation. Les potentialités maximales de croissance sont exprimées à 10 et
à 100 mM NaCl, quoique les productions de matière sèche sont légèrement plus
élevées en présence qu'en absence de sel. Pour les doses dépassant 100 mM, la
croissance est significativement affectée particulièrement à 400 et à 800 mM NaCl. Ce
comportement suggère que Spartina alterniflora ne manifeste pas une exigence
physiologique vis-à-vis du sel mais elle est plutôt capable de conserver ses capacités
intrinsèques de croissance à des doses de sel relativement modérées. Elle présente
davantage les caractéristiques d'une halophyte facultative que d'une plante
halophile. Nos résultats sont parfaitement en accord avec d'autres études (Parrondo
et al., 1978; Coleman, 1990) selon lesquelles Spartina alterniflora maintient une bonne
de croissance dans une gamme de concentrations allant de 0 à 20 g.l-1 NaCl.
La Croissance Moyenne Relative, exprimant la production de matière sèche par
unité de biomasse et par unité de temps, est mieux indiquée pour la comparaison
inter et intraspécifique des potentialités de croissance des plantes puisqu'elle a
l'avantage d'éliminer les différences liées à la vigueur initiale des plantes et / ou à la
durée des traitements (Hunt, 1990). Nous avons vu que ce paramètre varie de 0.0034
à 0.017 jour-1 en fonction de la salinité de la solution d'irrigation. Chez des halophytes
pérennes cultivées dans des conditions de salinité optimale, la CMR varie de 0.03 à
0.14 jour-1 respectivement chez Halosarcia pergranulata et Atriplex halimus (Gale et al.,
1970). Chez Spartina anglica, la CMR est de 0.050 et 0.020 jour-1 respectivement à 150
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 116

et 450 mM NaCl (Rozema et Van Diggelen, 1991). Des résultats comparables sont
observés chez Puccinellia maritima. Cependant, chez Aster tripolium et Elymus
pycnantus, halophytes moins tolérantes au sel, la CMR est de l'ordre de 0.09 jour-1 à
150 mM NaCl mais diminue à 0.01 jour-1 à 450 mM NaCl (Rozema et Van Diggelen,
1991). Comparées à ces halophytes, Spartina alterniflora montre une plus faible activité
de croissance en condition optimale de salinité. Néanmoins, elle se distingue par une
meilleure aptitude à conserver ses potentialités de croissance en condition de salinité
sévère.

4.2. EFFET DU SEL SUR L'EXPANSION FOLIAIRE ET LA CAPACITE PHOTOSYNTHETIQUE

L'aptitude des plantes à croître en milieu salin est fortement tributaire de leur
capacité à maintenir la turgescence de leurs parties aériennes et l'expansion de leurs
organes photosynthétiques. Ainsi, il a été démontré dans plusieurs études que
l'activité de croissance dépend davantage de la surface foliaire que de la capacité
photosynthétique intrinsèque. De ce fait, certaines études attribuent la réduction de
la croissance par le sel à une diminution de l'expansion des feuilles plutôt qu'à une
baisse de leur activité photosynthétique (estimée par l'ANSF), aussi bien chez des
glycophytes (Curtis et Läuchli, 1986) que chez des halophytes (Shennan et al., 1987).
Dans une étude comparative de la tolérance au sel d'une plante fourragère (Beta
vulgaris ssp. vulgaris) et son ancêtre Beta vulgaris spp. maritima, la CMR diminue de 20
à 30 % quand la salinité du milieu de culture atteint 400 mM NaCl (Rozema et Van
Diggelen, 1991). Dans ces conditions de culture, la surface foliaire massique (SFM =
surface foliaire / matière sèche), diminue d'environ 35 % chez les deux espèces alors
que l'assimilation nette par unité de surface foliaire n'est pas affectée. La réduction de
la SFM est associée à une diminution marquée de la surface foliaire et à une
augmentation de la succulence des feuilles. Plusieurs autres études démontrent que
la réduction de la croissance par le stress salin est liée à une réduction de l'élongation
foliaire à travers des effets osmotiques diminuant la turgescence des cellules et
l'expansion des tissus (Papp et al., 1983; Rawson et al., 1988; Thiel et al., 1988; Rozema,
1991). Pour rechercher le paramètre le plus impliqué dans la réduction de croissance
de Spartina alterniflora en milieu salé, nous avons mis en relation la croissance
moyenne relative des plantes avec la surface de leurs feuilles (Fig. 4.10 A) ou avec
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 117

l'assimilation nette par unité de surface foliaire (ANSF) (Fig. 4.10 B). Ce paramètre
permet d'évaluer, selon Hunt (1990), la performance photosynthétique des feuilles.
On voit que la CMR est fortement corrélée (p = 0.001) à l'expansion de la feuille ainsi
qu'à l'assimilation nette par unité de surface foliaire. Les plantes soumises aux fortes
doses salines présentent les surfaces foliaires les plus basses ainsi que les capacités
assimilatrices les plus limitées.

Figure 4.10. Relation entre la Croissance Moyenne Relative (CMR) et la surface


foliaire exprimée en cm² (A) ou l'assimilation nette par unité de surface foliaire
(ANSF) exprimée en mg MS . cm-2 . J-1 (B) chez Spartina alterniflora. Moyennes de 10
répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Nos résultats suggèrent que la réduction de la CMR, due à NaCl, n'est pas liée
uniquement à une diminution de l'élongation foliaire, comme le montrent les études
présentées en début de ce paragraphe, mais également à une inhibition de l'activité
photosynthétique des feuilles. Akita et Cabuslay (1990) ont montré que les réductions
de la CMR en condition de salinité sont attribuables aux diminutions de l'ANSF et de
la SFM, sans quantifier les contributions de chacun des deux paramètres. Comparant
les réponses physiologiques au sel de quatre halophytes (Aster tripolium, Spartina
anglica, Puccinellia maritima et Elymus pycnanthus), Rozema et Van Diggelen (1991) ont
observé une réduction de la croissance et de la photosynthèse nette à des salinités
comprises entre 300 et 450 mM chez les trois premières espèces et uniquement à
150 mM chez la dernière. Néanmoins, l'inhibition de la photosynthèse nette par la
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 118

salinité n'est pas la cause principale de la réduction de la croissance observée chez les
quatre halophytes. Par contre, chez l'orge, la baisse de la CMR est due
principalement à une forte réduction de l'ANSF (Cramer et al., 1990). L'ANSF
implique deux processus physiologiques: la photosynthèse et la respiration. La
diminution de l'ANSF peut être attribuée à une diminution de la photosynthèse
et / ou à une augmentation de la respiration de maintenance. En effet, la survie sur
milieu salé implique plusieurs processus consommateurs d'énergie. À titre
d'exemple, Schwarz et Gale (1983) ont montré qu'en présence de sel, les valeurs de la
respiration de maintenance sont multipliées par un facteur de 3 chez une glycophyte
(Xanthium strumarium).
En résumé, nos résultats montrent que le sel restreint la production de biomasse chez
Spartina alterniflora par des effets osmotiques limitant l'élongation foliaire et réduisant la
surface assimilatrice, et par des effets toxiques affectant les performances photosynthétiques de
la surface foliaire résiduelle. Ce type d'effet du sel est bien illustré par une corrélation
négative et très hautement significative entre la teneur foliaire en Na+ et la croissance de la
plante entière (Fig. 4.11).

r = 0,952 ***
100 mM
10,0
MS, g . plante -1

7,0
300 mM
400 mM

4,0

800 mM

1,0
0,8 1,0 1,2 1,4
Na+, mmol . g –1 MS parties aériennes

Figure 4.11. Relation entre la croissance de la plante entière (g MS) et la teneur


en Na+ des parties aériennes (mmol.g-1 MS) chez Spartina alterniflora.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 119

4.3. EFFETS OSMOTIQUE ET TOXIQUE DU SEL

La croissance de Spartina alterniflora n'est significativement affectée qu'à partir de


300 mM NaCl. Nous discuterons dans ce qui suit les causes probables de cette
restriction de la production de biomasse.
Dans la figure 4.12, nous avons représenté les variations de la concentration
ionique dans les parties aériennes et les racines en fonction de la concentration
globale du milieu. On remarque qu'indépendamment de la salinité du milieu de
culture, Spartina alterniflora est capable de maintenir une hypertonie aussi bien dans
ses parties aériennes que dans ses racines.

Figure 4.12. Comparaison de la concentration ionique des parties aériennes et


des racines de Spartina alterniflora à celle des solutions d'irrigation. La
concentration ionique des parties aériennes et des racines est estimée par le
rapport {2 x (Na+ + K+) / teneur en eau}, où (Na+ + K+) est la teneur globale en
Na+ et en K+. Les chiffres portés sur l'histogramme correspondent aux teneurs
moyennes en eau. Moyennes de 10 répétitions.

Néanmoins, cet hyper-ajustement n'est associé à un niveau d'hydratation proche


de celui des plantes témoins que chez les cultures conduites à 100 et à 300 mM NaCl.
Au-delà de ces doses, l'écart entre les concentrations des tissus et du milieu
augmente avec la salinité, alors que l'hydratation des tissus diminue. Ces résultats
suggèrent qu'en condition de salinité sévère, une partie des ions accumulés dans les
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 120

tissus n'est pas compartimentée dans les vacuoles conduisant à une perte d'eau
cellulaire. Ce comportement est confirmé davantage sur la figure 4.13 qui met en
relation l'hydratation des parties aériennes avec leur contenu ionique. Il apparaît des
corrélations très hautement significatives entre la teneur en eau et celle de K+
(Fig. 4.13 A) et de Na+ (Fig. 4.13 B). En effet, les parties aériennes les plus riches en
eau sont celles qui présentent les plus fortes teneurs en K+ et les charges les plus
faibles en Na+, et inversement.

Figure 4.13. Relations entre la teneur moyenne en eau et les teneurs en K+ (A)
ou en Na+ (B) dans les parties aériennes de Spartina alterniflora. Moyennes de
10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Ces résultats suggèrent que Spartina alterniflora utilise préférentiellement K+ pour


l'ajustement osmotique. En dépit de son accumulation limitée dans les parties
aériennes, Na+ serait localisé plus dans l'apoplasme que dans la vacuole. Ainsi, toute
augmentation de son niveau d'accumulation est concomitante d'une déshydratation
des tissus. L'ensemble de ces données montre que la réduction significative de la
croissance observée chez les plantes cultivées sur des doses dépassant 100 mM NaCl
est associée à une limitation de l'alimentation hydrique des parties aériennes,
résultant d'une restriction de la nutrition potassique et d'une incapacité de la plante à
compartimenter Na+ dans les vacuoles des cellules foliaires et l'utiliser à la place de
K+ pour l'ajustement osmotique.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 121

Outre les solutés inorganiques, l'osmorégulation peut être assurée par les
carbohydrates solubles particulièrement chez des Poaceae soumises au stress salin
(Premachandra et al., 1992; Kameli et Lösel, 1995). À titre d'exemple, il a été montré
que le glucose et le saccharose jouent le rôle d'osmoticum respectivement dans les
feuilles jeunes et âgées de Spartina alterniflora (Colmer et al., 1996).
Nos résultats ont montré une forte accumulation des sucres solubles dans les
parties aériennes de Spartina alterniflora cultivée en présence de sel. Pour vérifier si
ces composés sont impliqués dans l'osmorégulation, nous avons comparé la
concentration ionique globale à celles des sucres solubles (Fig. 4.14), en supposant
que Na+ et K+ sont exclusivement séquestrés dans les vacuoles alors que les
carbohydrates solubles sont accumulés dans le cytoplasme (Lachâal et al., 1995).

Sucres solubles
Concentration ionique globale
4,0
Concentration, M

3,0

2,0

1,0

0
Témoin 100 300 400 800
NaCl, mM

Figure 4.14. Comparaison de la concentration ionique des parties aériennes de


Spartina alterniflora à celle des sucres solubles. La concentration ionique est
estimée par le rapport {2 x (Na+ + K+) / teneur en eau}. Les carbohydrates
solubles sont accumulés dans le cytoplasme qui représente 5 % du
volume cellulaire total. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance
au seuil de 5 %.

À des doses de NaCl ne dépassant pas 100 mM, la concentration cytoplasmique en


sucres solubles et celle des ions sont du même ordre de grandeur indiquant que
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 122

l'équilibre osmotique entre le cytoplasme et la vacuole est assuré, en grande partie,


par ces solutés organiques. Dans des conditions de salinité plus sévère, la
concentration en carbohydrates solubles devient supérieure à celle des ions. L'écart
entre les deux paramètres s'accentue avec la salinité des solutions d'irrigation et
atteint son maximum à 800 mM NaCl. Cette surcharge en sucres solubles peut
s'expliquer par:
(i) Une restriction de la croissance ayant pour conséquence une faible
utilisation des carbohydrates solubles (Turner et al., 1978).
(ii) Une diminution de l'activité des enzymes impliquées dans la biosynthèse
de l'amidon (Libal-Weksler et al., 1994)
(iii) Une dégradation de l'amidon (Fernandez-Ballester et al., 1998).
(iv) Une remobilisation des sucres solubles vers les feuilles (Daie et Wyse,
1985).
Nos résultats sont en accord avec plusieurs autres travaux montrant que
l'accumulation de sucres solubles constitue un critère d'adaptation à la salinité de
plusieurs halophytes (Colmer et al., 1996). La corrélation positive, entre
l'accumulation des carbohydrates solubles dans les tissus des parties aériennes et la
salinité des solutions d'irrigation, suggère une contribution de ces solutés organiques
dans l'osmorégulation. Nous avons précédemment noté, que chez Suaeda fruticosa, ce
rôle est assuré principalement par des solutés inorganiques.

4.4. EFFETS NUTRITIONNELS DU SEL

L'analyse du statut nutritionnel des organes de Spartina alterniflora nous a montré


que le sel réduit le prélèvement de K+, de Ca2+ et de Mg2+. Le transport de ces
nutriments (particulièrement K+ et Mg2+) vers les parties aériennes semble également
affecté. Le paragraphe suivant sera consacré à l'examen des certains paramètres
impliqués dans la nutrition de cette plante.

4.4.1. Sélectivité d'absorption

Ce paramètre est estimé en comparant les valeurs des rapports K+ / Na+,


Ca2+ / Na+ et Mg2+ / Na+ dans les tissus des plantes à celles des solutions d'irrigation
(Tab. 4.8).
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 123

Tableau 4.8. Comparaison des rapports K+ / Na+, Ca2+ / Na+ et Mg2+ / Na+
dans les parties aériennes et les racines de Spartina alterniflora à ceux des
solutions d'irrigation. Ces rapports sont déterminés sur la base des
concentrations de ces nutriments dans les tissus. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5%.

NaCl, mM
--------------------------------------------------------------------
Témoin 100 300 400 800

K+ / Na+ (milieu) 0.574 0.053 0.019 0.015 0.007


K+ / Na+ (PA) 4.805 0.944 0.484 0.475 0.270
± 0.998 ± 0.087 ± 0.052 ± 0.091 ± 0.039
K+ / Na+ (R) 2.416 0.744 0.412 0.415 0.274
± 0.455 ± 0.110 ± 0.037 ± 0.072 ± 0.054

Ca2+ / Na+ (milieu) 1.569 0.145 0.052 0.039 0.020


Ca2+ / Na+ (PA) 1.225 0.257 0.149 0.133 0.112
± 0.202 ± 0.057 ± 0.032 ± 0.025 ± 0.025
Ca2+ / Na+ (R) 0.763 0.175 0.106 0.101 0.133
± 0.092 ± 0.033 ± 0.020 ± 0.016 ± 0.028

Mg2+ / Na+ (milieu) 0.662 0.061 0.022 0.016 0.008


Mg2+ / Na+ (PA) 0.888 0.184 0.091 0.077 0.061
± 0.139 ± 0.028 ± 0.008 ± 0.010 ± 0.007
Mg2+ / Na+ (R) 0.843 0.317 0.175 0.137 0.142
± 0.154 ± 0.046 ± 0.031 ± 0.018 ± 0.017
(K+ + Ca2+ + Mg2+) / Na+ (R)
4.022 1.236 0.694 0.653 0.548

Les principaux points qui ressortent de ce tableau sont les suivants:


(i) Le sel réduit fortement le rapport K+ / Na+ dans les tissus de Spartina
alterniflora. Néanmoins, il demeure 4 à 40 fois plus élevé que celui du milieu.
Ceci illustre une absorption et une accumulation sélective de K+ aux dépens
de Na+.
(ii) Les valeurs du rapport K+ / Na+ sont nettement plus élevées dans les
parties aériennes que dans les racines chez les plantes témoins, et à un degré
moindre celles soumises à 100 mM NaCl, elles deviennent par la suite du
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 124

même ordre de grandeur dans les deux types d'organes. La nutrition


potassique est plus affectée dans les parties aériennes que dans les racines.
(iii) L'absorption sélective de Ca2+ et de Mg2+ est également conservée en
dépit de l'abondance de Na+ dans le milieu de culture.
(iv) Chez les plantes cultivées en présence de sel, le rapport Mg2+ / Na+ est
nettement plus élevé dans les racines que dans les parties aériennes, ce qui
indique une limitation de la nutrition des organes photosynthétiques en
Mg2+.
En résumé, les données suggèrent que les systèmes d'absorption perdent de leur sélectivité
vis-à-vis des cations indispensables. En outre, le transport de ces nutriments vers les parties
aériennes et particulièrement celui de Mg2+ est réduit. La rupture de la barrière sélective en
faveur des cations (K+, Ca2+, Mg2+) est observée à partir de 300 mM NaCl. Ce phénomène ne
se produit qu'à 800 mM NaCl chez Suaeda fruticosa (cf. Tab. 3.7).

4.4.2. Efficacité d'absorption des nutriments

Pour chacun des nutriments, l'efficacité d'absorption est déterminée en ramenant


les prélèvements totaux à la masse moyenne du système racinaire (Fig. 4.15).

Potassium
35 Calcium
Magnésium
Efficacité d’absorption
méq . g –1 MS racines

Azote réduit

25

15

-5
Témoin 100 300 400 800
NaCl, mM

Figure 4.15. Variations de l'efficacité d'absorption des éléments (K+, Ca2+, Mg2+
et N) chez Spartina alterniflora en fonction de la salinité des solutions
d'irrigation. Ce paramètre est déterminé en ramenant les prélèvements totaux
à la masse moyenne du système racinaire. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 125

Les valeurs de l'efficacité d'absorption de l'azote sont sous-estimées puisque seule


la fraction azote réduit est prise en compte dans ce calcul. Indépendamment des
traitements, l'efficacité d'absorption de l'azote et du potassium dépasse nettement
celle des cations bivalents, Ca2+ et Mg2+. L'apport de sel dans le milieu de culture
réduit l'efficacité d'absorption du potassium, du calcium, du magnésium et de
l'azote. Néanmoins, cet effet dépressif n'apparaît de manière significative qu'à partir
de 300 mM essentiellement pour K+ et NO 3 -. A 800 mM NaCl, les plantes utilisent
essentiellement les réserves initiales accumulées lors de la phase de prétraitement
(Mg2+ et Ca2+) et semblent même perdre dans le milieu de culture une partie de leur
contenu en potassium.

Figure 4.16. Effet du sel sur le flux (J MR ) et l'efficacité d'absorption de K+, Ca2+,
Mg2+ et N chez Spartina alterniflora. Les résultats sont exprimés en % du
témoin. Moyennes de 10 répétitions.

La comparaison des prélèvements totaux des nutriments avec l'efficacité de leur


absorption (les paramètres sont exprimés en % de ceux des plantes témoins) montre,
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 126

qu'à 100 mM NaCl, les valeurs relatives des prélèvements totaux (J MR ) dépassent
celles de l'efficacité d'absorption et ceci pour tous les ions étudiés (Fig. 4.16). Ce
résultat s'explique par le fait qu'à cette salinité, la diminution des prélèvements liée à
la baisse de la performance des systèmes racinaires est, en partie, compensée par une
stimulation de la croissance des racines. Nous avons vu en début de ce chapitre
(Tab. 4.2) qu'une dose de 100 mM NaCl stimule davantage la croissance des racines
que celle des parties aériennes. Pour les autres doses de sel, les prélèvements totaux
sont ramenés à des niveaux généralement plus bas que ceux de l'efficacité
d'absorption indiquant que la diminution des prélèvements des éléments résulte à la
fois d'une baisse de la performance des systèmes d'absorption et d'une diminution de
la croissance des racines.

4.4.3. Efficacité d'utilisation des éléments minéraux

12,0 12,0
MS, g . plante -1

100 mM 100 mM
9,0 9,0
Témoin Témoin
6,0 6,0
300 mM 300 mM
400 mM 400 mM
3,0 3,0
800 mM 800 mM
r = 0.946 *** r = 0.907 ***
0 0
3,0 6,0 9,0 12,0 0 0,5 1,0 1,5
K+, mmol . plante -1 Ca2+, mmol . plante -1

12,0 12,0
MS, g . plante -1

100 mM 100 mM
Témoin 9,0
9,0
Témoin
6,0 6,0
300 mM 300 mM
400 mM 400 mM
3,0 3,0

800 mM r = 0.936 *** 800 mM r = 0.994 ***


0 0
0,5 1,0 1,5 0 5,0 10,0 15,0 20,0
Mg2+, mmol . plante -1 Nréd., mmol . plante -1

Figure 4.17. Relation entre la production de matière sèche (MS) de la plante


entière (g.plante-1) et la consommation des nutriments (K+, Ca2+, Mg2+ et N),
exprimée en mmol.plante-1, chez Spartina alterniflora. Moyennes de 10
répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 127

L'examen de la figure 4.17 montre une relation stricte (p = 0.001) entre la


production de matière sèche et le prélèvement des nutriments (K+, Ca2+, Mg2+ et N).
Cette proportionnalité suggère deux hypothèses:
(i) La croissance des plantes est strictement déterminée par le prélèvement
des nutriments.
(ii) Le prélèvement des éléments est une conséquence de la croissance qui est
déterminée par d'autres paramètres.
L'examen de la figure 4.18 montre que la teneur des parties aériennes en
nutriments est corrélée à la croissance. Cette corrélation est significative pour Ca2+ et
N, et hautement significative pour K+ et Mg2+.

12,0 12,0
100 mM 100 mM
Témoin Témoin
MS, g . plante -1

9,0 9,0

300 mM 300 mM
6,0 6,0
400 mM 400 mM

3,0 800 mM 800 mM 3,0

r = 0.815 ** r = 0.731 *
0
0 0,3 0,6 0,9 1,2 0 0,05 0,10 0,15
K+, mmol . g –1 MS Ca2+, mmol . g –1 MS
12,0 12,0
100 mM 100 mM
Témoin
MS, g . plante -1

9,0 9,0
Témoin
300 mM 300 mM
6,0 6,0
400 mM
400 mM
3,0 800 mM 3,0
800 mM
r = 0.797 ** r = 0.644 *
0 0
0,05 0,10 0,15 0,4 0,8 1,2 1,6 2,0
Mg2+, mmol . g –1 MS Nréd., mmol . g –1 MS

Figure 4.18. Relation entre la production de matière sèche (MS) de la plante


entière (g.plante-1) et les teneurs des parties aériennes en nutriments (K+, Ca2+,
Mg2+ et N), exprimée en mmol.g-1 MS, chez Spartina alterniflora. Moyennes de
10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 128

Ce résultat plaide en faveur de la première hypothèse: l'aptitude des plantes à


croître est strictement déterminée par leur capacité d'assurer un approvisionnement
adéquat de leurs parties aériennes en ces cations. Concernant l'azote, on voit que les
parties aériennes présentent la même teneur en azote réduit (de l'ordre de
2000 µmol.g-1 MS) pour des niveaux différents de croissance. La relation entre les
quantités d'azote utilisées et les quantités de matière sèche produites (Fig. 4.17)
suggère que le prélèvement de l'azote est strictement déterminé par la croissance qui
dépend plutôt de l'alimentation cationique.
La restriction de l'alimentation minérale induite par le sel semble en partie
compensée par une utilisation économique des éléments (Fig. 4.19). Cette
caractéristique est essentiellement une propriété des parties aériennes. Elle concerne
davantage les cations bivalents que K+. L'efficacité d'utilisation de l'azote est
sensiblement la même chez les plantes témoins ou celles soumises au sel.

15 Potassium
Calcium
Magnésium
g MS . méq –1 Nutriments
Efficacité d’utilisation,

Azote réduit

10

0
Témoin 100 300 400 800
NaCl, mM

Figure 4.19. Variations de l'efficacité d'utilisation des nutriments (K+, Ca2+,


Mg2+ et N) pour la croissance des parties aériennes chez Spartina alterniflora en
fonction de la salinité des solutions d'irrigation. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

L'ensemble des données relatives au comportement nutritionnel de Spartina


alterniflora (sélectivité et efficacité d'absorption, utilisation des nutriments) montre
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 129

clairement que le sel soumet les plantes à des effets nutritionnels se traduisant
essentiellement par une limitation du prélèvement de K+, Ca2+ et Mg2+ partiellement
compensée par une utilisation parcimonieuse des éléments. Nos résultats sont en
accord avec ceux de Bradley et Morris (1991 a) qui ont mis en évidence une inhibition
de l'absorption du potassium en raison d'une compétition entre K+ et Na+ pour les
sites d'absorption et d'une perte de l'intégrité des membranes cellulaires. De même
Parrondo et al. (1981) ont montré que chez Spartina alterniflora et Distichlis spicata,
l'absorption du Rubidium (voie d'absorption similaire à celle de K+) est affectée par
NaCl, CaCl 2 et MgCl 2 . La vitesse d'absorption du Rb est réduite dès la plus faible
dose de NaCl, 10 mM et s'accentue pour les plus fortes doses de sel. Néanmoins,
l'absorption du Rb est rétablie par addition de Ca2+ (2 mM) et non par Mg2+ bien qu'il
soit fourni à une concentration 10 fois plus importante que Ca2+. Cette étude montre
clairement que l'absorption de K+ dépend de l'aptitude des plantes à conserver
l'intégrité de leurs membranes, Mg2+ ne peut pas se substituer à Ca2+ pour cette
fonction.
Nos résultats suggèrent également une baisse des prélèvements de l'azote minéral
et de son assimilation. L'azote a été apporté dans notre milieu de culture sous formes
nitrique et ammoniacale. L'antagonisme Cl- / NO 3 - pourrait contribuer à la
restriction de l'alimentation azotée. Néanmoins, il a été rapporté chez plusieurs
halophytes comme Atriplex triangularis, Atriplex spongiosa, Atriplex vesicaria et Suaeda
maritima que le sel n'affecte ni l'absorption du NO 3 - par les racines, ni son exportation
vers les parties aériennes, même si le rapport Cl- / NO 3 - dépasse 100 (Osmond et al.,
1980). Ces halophytes seraient dotées d'un système d'absorption très efficace leur
assurant une alimentation azotée convenable dans un milieu riche en Cl-. D'autres
études ont montré qu'en condition de forte salinité, l'absorption de NH 4 + chez
Spartina alterniflora est réduite en raison d'une compétition NH 4 + / Na+ pour les
mêmes sites d'absorption (Bradley et Morris, 1991 b).
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 130

5. CONCLUSION

Spartina alterniflora présente davantage les caractéristiques d'une halophyte


facultative que d'une halophyte obligatoire. Cependant, elle conserve une bonne
activité de production de matière sèche jusqu'à 300 mM NaCl (60 % des potentialités
maximales de croissance contre 93 % chez Suaeda fruticosa). Aux fortes doses de sel
(400 et 800 mM NaCl), la croissance est significativement plus affectée chez Spartina
alterniflora que chez Suaeda fruticosa (cf. IS CMR , Fig. 4.3). Trois composantes sont
impliquées dans cette restriction de croissance:
(i) Des effets osmotiques: réduction de l'alimentation hydrique liée à une
limitation de l'absorption et du transport de K+ vers les parties aériennes; ce
cation étant spécifiquement impliqué dans l'ajustement osmotique. Ce type
d'effet conduit également à une forte réduction de la surface foliaire. Bien
que le sel conduise à une accumulation de sucres solubles dans les parties
aériennes de Spartina alterniflora, l'effet osmotique du sel s'exprime davantage
chez cette espèce par comparaison à Suaeda fruticosa.
(ii) Des effets toxiques liés à l'accumulation de Na+: les organes
photosynthétiques de cette espèce semblent particulièrement sensibles à Na+.
En effet, bien qu'il soit faiblement accumulé dans les feuilles, la capacité
photosynthétique intrinsèque de ces organes est significativement affectée.
L'effet toxique du sel n'est perceptible chez Suaeda fruticosa qu'à 800 mM
NaCl.
(iii) Des effets nutritionnels: la présence de sel réduit principalement le
prélèvement et le transport des cations K+, Ca2+ et Mg2+ vers les parties
aériennes. Globalement, les différences spécifiques sont peu perceptibles au
niveau nutritionnel.
Suaeda fruticosa adopte une stratégie osmotique pour tolérer le sel, basée
essentiellement sur une croissance rapide, une compartimentation efficace de Na+ et
de Cl- dans les vacuoles et une alimentation hydrique convenable conduisant à une
succulence des feuilles.
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 131

Spartina alterniflora se distingue par:


(i) Une croissance lente.
(ii) Une grande aptitude à protéger ses organes photosynthétiques contre
une accumulation excessive de NaCl par une sécrétion efficace de Na+ et de
Cl- comme le suggère la présence des cristaux de sel observé à la surface des
feuilles.
(iii) Une meilleure aptitude à retenir Na+ au niveau des racines et
probablement son exclusion.
(iv) Une utilisation des sucres solubles pour l'ajustement osmotique.
Toutes ces caractéristiques dénotent d'une incapacité de Spartina alterniflora à
compartimenter le sel dans ses cellules. Sa tolérance repose donc sur sa capacité
d'éviter l'accumulation intra-cellulaire de Na+ et de Cl-: c'est la stratégie d'évitement
(Fig. 4.20).
Chapitre IV. STRATEGIE DE LA TOLERANCE AU SEL CHEZ Spartina alterniflora .............................................. 132

Cellules
foliaires Vacuole

Na+
Cytoplasme Sécrétion
Na+ 3
Na+
Phloème

Xylème
4 2

Cellules
racinaires

Na+ MILIEU
Exclusion
K+, Ca2+, Na+, 1
NO3-, Cl-…
Figure 4.20. Représentation schématique de la stratégie d'évitement adoptée
par Spartina alterniflora. (1) absorption des ions, (2) transport ascendant des
ions, (3) sécrétion de Na+ et de Cl- et (4) transport descendant de Na+.
CHAPITRE V

SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina


alterniflora: IMPORTANCE ET IMPLICATION DANS LA
TOLERANCE AU SEL

RESUME

Les résultats du chapitre précédent montrent que Spartina alterniflora est capable
de maintenir l'accumulation de Na+ et de Cl- à des niveaux relativement bas dans une
gamme étendue de salinité du milieu de culture. Cette caractéristique serait basée
principalement sur la sécrétion foliaire de Na+ et de Cl-. La présente étude a pour
objectif de déterminer la nature et les quantités de sel sécrétées.
Des plantes de Spartina alterniflora, obtenues par bouturage, sont cultivées sur du
sable inerte et irriguées avec une solution nutritive additionnée de différentes doses
de NaCl: 100, 300 et 400 mM. Au bout de 10 jours de traitement, cinq récoltes ont été
régulièrement effectuées tous les 2 jours. Les récoltes ont porté sur des feuilles âgées
et d'autres en pleine activité de croissance. Les ions sécrétés toutes les 48 heures, sont
dissous dans l'eau distillée puis dosés et ramenés à la surface foliaire ou à la masse
de matière sèche correspondante.
Nos résultats montrent que Na+ et Cl- sont les principaux ions sécrétés. La
sécrétion augmente régulièrement avec la salinité des solutions d'irrigation. À
400 mM NaCl, elle s'exprime davantage dans les feuilles supérieures que les feuilles
inférieures. Les quantités de sel sécrétées représentent 60 % des prélèvements de sel
opérés durant les traitements. L'étude met en évidence l'importance de la stratégie
d'évitement pour la protection des tissus contre l'accumulation excessive des ions
Na+ et Cl-.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 134

1. INTRODUCTION

Nous avons vu dans le chapitre précédent que les niveaux d'accumulation de Na+
et de Cl- dans les tissus de Spartina alterniflora demeurent relativement bas en dépit
de l'abondance du sel dans le milieu de culture. Par ailleurs, nous avons remarqué
que cette espèce présente des cristaux de sel à la surface de ses feuilles quand les
cultures sont conduites en présence de NaCl (Photo 5.1). Ces données suggèrent que
Spartina alterniflora protège ses tissus contre l'accumulation excessive de Na+ et de Cl-
en les sécrétant par ses organes photosynthétiques. Le présent chapitre est consacré à
l'estimation de la sécrétion foliaire du sel et à l'étude de ses variations en fonction de
la salinité du milieu de culture, de l'âge des feuilles et de la nature du fragment
foliaire. Le caractère sélectif de la sécrétion sera évalué en comparant la sécrétion
foliaire de Na+ et de Cl- à celle de K+et de Ca2+.

Photo 5.1. Dépôt de cristaux de sel à la surface des feuilles de


Spartina alterniflora cultivée en présence de NaCl.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 135

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL

Des plantes de Spartina alterniflora, obtenues par bouturage selon les techniques
décrites précédemment (cf. chapitre II, § 2.2) sont cultivées pendant 1 mois sur du
sable inerte, et irriguées avec la solution nutritive de base (phase de prétraitement).
Par la suite, elles sont irriguées avec cette même solution additionnée de différentes
doses de sel: 100, 300 et 400 mM NaCl. Au bout de 10 jours de traitement, cinq
récoltes de feuilles ont été régulièrement effectuées sur 15 plantes à raison d'une
récolte (3 plantes) tous les deux jours (Fig. 5.1).

NaCl, 100 mM
3 4 5 6 7

NaCl, 300 mM
Prétraitement
1 2 3 4 5 6 7

NaCl, 400 mM
3 4 5 6 7

0 30 40 42 44 46 48
Jours
Figure 5.1. Protocole expérimental de mesure de la sécrétion de Na+ et de Cl-.
1. Prétraitement.
2. Répartition des plantes en trois lots et début des traitements.
3, 4, 5, 6 et 7. Récoltes des feuilles à raison de quatre feuilles par plante et par
traitement.

48 heures avant chaque récolte, les feuilles sont préalablement lavées à l'eau
distillée. À chaque récolte, quatre feuilles sont prélevées par plante et par traitement,
deux dans la partie inférieure de la plante correspondant à des feuilles adultes, et les
deux autres au niveau la partie supérieure correspondant à des feuilles jeunes en
pleine activité de croissance. Chaque feuille récoltée est séparée en deux parties (une
partie apicale et une partie basale) qui sont rincées deux fois à l'eau distillée à 0 °C
(2 x 10 ml). L'eau de lavage, 20 ml par échantillon, est conservée au réfrigérateur
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 136

jusqu'au jour du dosage. Les segments foliaires sont par la suite épongés dans du
papier filtre puis leur surface est déterminée au moyen d'un planimètre (Area Meter,
type LI-3000A, LI-COR). La masse de matière fraîche et de matière sèche (au bout
d'une semaine de dessiccation à 60 °C) est déterminée. La figure 5.2 schématise la
méthodologie adoptée.

Lavage préalable des feuilles:


48 heures avant les récoltes.

Récoltes par plante:


* 2 feuilles adultes Séparation des
parties apicales et
* 2 feuilles jeunes. des parties basales Lavage des
des feuilles. fragments foliaires
dans l’eau distillée.

Dosage de Na+, Cl-, Détermination de la Dosage de Na+, Cl-, K+ et


K+ et Ca2+ dans l’eau surface des différents Ca2+ dans les différents
de lavage: sécrétion fragments foliaires fragments foliaires

Figure 5.2. Méthodologie des récoltes et d'estimation de la sécrétion foliaire des ions.

La sécrétion est estimée en ramenant les quantités des ions dosés dans l'eau de
lavage à la masse de matière fraîche ou sèche ou encore à la surface foliaire
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 137

correspondante. L'accumulation des ions à l'intérieur des tissus est déterminée après
extraction des ions à partir des segments de feuilles séchés.

3. RESULTATS

3.1. EFFET DE LA SALINITE DU MILIEU DE CULTURE SUR LA SECRETION FOLIAIRE DE

Na+ ET DE Cl-

Figure 5.3. Variations de la vitesse de sécrétion foliaire de Na+ et de Cl- chez


Spartina alterniflora en fonction de la salinité du milieu de culture en µmol.g-1
MS.jour-1 (A) ou en µmol.cm-2.jour-1 (B) Moyennes de 20 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 138

Dans ce paragraphe, nous analysons les effets de la salinité du milieu de culture


sur la sécrétion foliaire de Na+ et de Cl-. Les variations de ce paramètre, liées à l'âge
et à la nature des fragments foliaires, seront traités ultérieurement. Au cours de
chaque prélèvement, les quantités de Na+ et de Cl- mesurées dans les différents
extraits sont donc additionnées puis ramenées soit à la matière sèche des feuilles
(Fig. 5.3 A) ou à leur surface (Fig. 5.3 B). Indépendamment du mode d'expression des
résultats et pour une concentration saline donnée, la vitesse de sécrétion est
sensiblement la même pour Na+ et Cl-. Elle augmente de manière substantielle avec
la salinité du milieu de culture. Ainsi la vitesse de sécrétion est environ trois fois plus
importante à 400 qu'à 100 mM NaCl.
Dans la figure 5.4 sont représentées les variations des sécrétions quotidiennes de
Na+ et de Cl- (µmol.plante-1) et celles des contenus foliaires (µmol.plante-1) en ces
ions en fonction de la salinité du milieu. On voit, d'abord, que les contenus des
feuilles en Na+ dépassent ceux en Cl-. Ce résultat ne serait pas lié à une sécrétion
préférentielle de Cl- par rapport à Na+, nous venons de voir que les ions sont sécrétés
avec la même vitesse. Les contenus d'une feuille en Na+ ou en Cl- semblent
indépendants de la salinité du milieu de culture au moins pour les doses inférieures
à 400 mM NaCl. Au-delà de cette dose, le contenu des feuilles en Na+ ou en Cl-
accuse une légère augmentation en raison d'une certaine surcharge en ces ions.
Néanmoins, les teneurs atteintes demeurent relativement basse par rapport à celles
observées chez des glycophytes tolérantes ou des halophytes (cf. chapitre IV). Ceci
traduit l'aptitude de Spartina alterniflora à contrôler le contenu de ses feuilles en Na+
et en Cl-. Les quantités de Na+ et de Cl- sécrétées quotidiennement augmentent
régulièrement avec la salinité du milieu de culture et représentent une fraction
notable des quantités accumulées durant le traitement: 3 à 28 % pour Na+ et 15 à 37
% pour Cl-. Le maintien des teneurs foliaires en Na+ et en Cl- à des niveaux
relativement bas d'une part, et l'augmentation de la sécrétion en fonction de la
salinité du milieu de culture d'autre part, indiquent que la sécrétion confère à la
plante une aptitude à se décharger régulièrement de l'excès de Na+ et Cl- et
d'épargner ses tissus photosynthétiques des accumulations toxiques.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 139

Figure 5.4. Variations de la sécrétion de Na+ et de Cl- (µmol.plante-1.jour-1) en


fonction des contenus (µmol.plante-1) et des teneurs ioniques (µmol.g-1 MS)
des feuilles. Les chiffres portés sur l'histogramme correspondent aux teneurs
ioniques (µmol.g-1 MS). Moyennes de 20 répétitions. Intervalles de confiance
au seuil de 5 %.

3.2. EFFET DE L'AGE DES FEUILLES SUR LA SECRETION DE Na+ ET DE Cl-

La sécrétion de Na+ ramenée à l'unité de surface foliaire et à l'unité de temps


augmente régulièrement avec la salinité du milieu de culture (Fig. 5.5). Cette
particularité apparaît aussi bien dans les feuilles adultes que les feuilles jeunes en
pleine activité de croissance. À l'exception d'une légère augmentation de la vitesse de
sécrétion de Na+ dans les feuilles jeunes par rapport aux feuilles adultes chez les
plantes soumises à 400 mM, l'âge des organes photosynthétiques ne semble pas
affecter ce paramètre. La sécrétion de Cl- subit des variations sensiblement similaires
à celles de Na+ en fonction de la salinité du milieu de culture et l'âge des feuilles.
Aux différentes salinités, les teneurs en Na+ et en Cl- sont relativement plus élevées
dans les feuilles adultes que dans les feuilles jeunes. Elles augmentent régulièrement
avec la salinité du milieu de culture. Néanmoins, l'amplitude de leur variation est
nettement plus faible que celle de la sécrétion. Ce résultat illustre l'importance de la
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 140

sécrétion dans le contrôle de l'accumulation de Na+ et de Cl- dans les tissus foliaires
de Spartina alterniflora.

Figure 5.5. Variations de la vitesse de sécrétion (µmol.cm-2.jour-1) de Na+ et de


Cl- en fonction de l'âge des feuilles et de la salinité des solutions d'irrigation.
Les chiffres portés sur l'histogramme correspondent aux teneurs ioniques
(µmol.g-1 MS). Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil
de 5 %.

Bien que, les teneurs en Na+ et Cl- soient plus élevées dans les feuilles adultes que
dans les feuilles jeunes, les quantités moyennes de Na+ et Cl- (µmol.plante-1) sont
légèrement plus importantes dans les secondes que dans les premières à 300 et à
400 mM NaCl (Fig. 5.6). Ce résultat est lié à une masse de matière sèche plus élevée
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 141

au niveau des feuilles supérieures. Les quantités sécrétées quotidiennement


augmentent avec la salinité des solutions d'irrigation et à un degré moindre avec les
quantités des ions accumulées dans les feuilles. Les quantités sécrétées par les
feuilles jeunes ne dépassent de manière significative celles des feuilles adultes qu'à
400 mM NaCl. Nous avons vu, en effet, que la vitesse de sécrétion est plus élevée
dans les premiers que les seconds types d'organes.

Figure 5.6. Importance de la sécrétion de Na+ et de Cl- (µmol.plante-1.jour-1)


par rapport aux contenus foliaires en ces ions (µmol.plante-1) en fonction de
l'âge des feuilles et de la salinité des solutions d'irrigation. Moyennes de 10
répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 142

3.3. HOMOGENEITE DE LA SECRETION FOLIAIRE DE Na+ ET DE Cl-

Nous venons de voir que, globalement, la sécrétion se fait avec la même vitesse
aussi bien dans les feuilles jeunes que dans les feuilles adultes. Cependant, les
différentes parties d'une feuille ne semblent pas contribuer avec la même efficience à
la sécrétion du sel. En effet, l'abondance des cristaux de sel dans les régions basales
par comparaison aux régions apicales suggère une sécrétion de sel plus importante
dans les premières que dans les secondes parties des feuilles. Pour vérifier la validité
de cette hypothèse, les feuilles prélevées à chaque récolte ont été réparties en deux
lots correspondant respectivement à leurs fragments basaux et apicaux. Les
variations de la sécrétion de Na+ et de Cl-, par ces deux lots de fragments foliaires,
sont représentées dans la figure 5.7. Cette dernière montre clairement que la salinité
du milieu de culture conduit à une augmentation de la sécrétion de Na+ et de Cl-
dans les fragments foliaires prélevés sur des feuilles âgées ou des feuilles jeunes.
Il apparaît également, qu'indépendamment de la salinité du milieu de culture, la
vitesse de sécrétion est nettement plus importante dans les parties basales que dans
les parties apicales des feuilles. Cet écart de la vitesse de sécrétion s'accentue avec la
salinité du milieu de culture. Comme les feuilles de Spartina alterniflora sont érigées,
on pourrait penser que les gouttelettes sécrétées par les parties supérieures des
feuilles s'écoulent vers les parties basales ayant pour conséquence un dépôt de sel
plus important conduisant à une surestimation de la sécrétion dans ces régions
foliaires. Cependant, les feuilles de cette halophyte étant velues, les gouttelettes
sécrétées auraient plutôt tendance à s'accrocher au niveau des poils favorisant ainsi
l'accumulation des cristaux de sel au niveau de leurs sites de sécrétion.
Par ailleurs, les teneurs en Na+ et en Cl- sont environ 1.5 fois plus importantes
dans les parties basales ( plus âgées, Camefort, 1972) que dans les parties apicales,
indépendamment de la concentration saline du milieu de culture. Cette
compartimentation intra-foliaire appuie l'idée d'une sécrétion plus prononcée de ces
ions au niveau du fragment basal de la feuille.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 143

Figure 5.7. Répartition de la sécrétion au niveau des feuilles de Spartina


alterniflora: variations de la vitesse de sécrétion (µmol.cm-2.jour-1) en fonction
de la position des fragments foliaires et de la salinité des solutions
d'irrigation. Les chiffres portés sur l'histogramme correspondent aux teneurs
ioniques (µmol.g-1 MS). Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance
au seuil de 5 %.

La plus grande aptitude des plantes à sécréter le sel par les parties basales des
feuilles par rapport aux parties apicales s'expliquerait par une différence au niveau
de la densité des glandes sécrétrices et / ou de la vascularisation. La plus grande
taille des nervures dans les régions basales des feuilles conduirait à un important
flux xylémique et une surcharge plus importante des tissus en sel induisant à son
tour une plus forte sécrétion. Une étude structurale, à différents niveaux de la feuille,
apporterait des éléments de réponses à ces questions. La concentration de la sève
xylémique en Na+ et en Cl- serait plus faible dans les parties apicales que dans les
parties basales en raison d'un dessalement progressif de la sève. La récolte de sève à
différentes régions foliaires permettrait de vérifier la validité de cette hypothèse.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 144

3.4. IMPORTANCE DE LA SECRETION PAR RAPPORT AUX PRELEVEMENTS TOTAUX DE

SEL

Nous avons vu dans le chapitre IV et ce chapitre que l'amplitude de variation des


teneurs des tissus en Na+ et en Cl- est faible par rapport à celle de la salinité des
solutions d'irrigation, traduisant l'efficacité de la sécrétion dans la protection des
tissus contre une accumulation excessive de sel. Dans le présent paragraphe, nous
avons estimé l'importance de la sécrétion foliaire par rapport aux prélèvements
totaux de Na+ durant le traitement. Ce dernier paramètre correspond à la somme des
quantités de sel mesurées à la récolte finale et celles sécrétées au cours de la période
de traitement. Les sécrétions de sel sont obtenues en multipliant la vitesse de
sécrétion (µmol.g-1 MS feuilles.jour-1) par la durée des traitements et la masse
moyenne de matière sèche des feuilles. La figure 5.8 montre que les quantités de Na+
et de Cl-, sécrétées par les feuilles, dépassent toujours l'accumulation des ces ions
dans les différentes parties de la plante.

Figure 5.8. Parts respectives de la sécrétion foliaire et de l'accumulation de


Na+ et de Cl- au niveau de la plante entière. La sécrétion foliaire est
déterminée en multipliant la vitesse de la sécrétion par la durée du traitement
et par la masse moyenne de MS des feuilles.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 145

Indépendamment de la salinité du milieu de culture, la sécrétion représente en


moyenne 60 % des prélèvements de sel opérés par la plante. Il faut noter, cependant,
que dans les prélèvements totaux, nous n'avons pas tenu compte des quantités de
sels qui seraient absorbées puis exclues par les racines.

3.5. SELECTIVITE DE LA SECRETION

Le caractère sélectif de la sécrétion est étudié en comparant les rapports Na+ / K+


(Tab. 5.1) et Na+ / Ca2+ (Tab. 5.2) déterminés sur les quantités de sel sécrétées par
unité de masse et de temps à ceux calculés sur la base des teneurs foliaires en ces
ions.

Tableau 5.1. Variations du rapport Na+ / K+ en fonction de la salinité du


milieu de culture. Ces rapports sont déterminés sur la base des quantités
sécrétées par unité de masse foliaire et par unité de temps (Sécrétion) ou sur la
base des teneurs ioniques foliaires (Accumulation). F: feuille, S: supérieure, I:
inférieure, A: partie apicale, B: partie basale. Moyennes de 10 répétitions
(20 répétitions pour la feuille entière).

NaCl, mM
--------------------------------------------------------------
100 300 400

Sécrétion
Na+ / K+ (feuille entière) 29.1 82.8 103.5

Na+ / K+ (F.S.A.) 25.7 80.7 113.2


Na+ / K+ (F.S.B.) 27.5 91.0 111.7
Na+ / K+ (F.I.A.) 24.6 68.7 131.0
Na+ / K+ (F.I.B.) 36.9 90.1 104.6

Accumulation
Na+ / K+ (feuille entière) 1.8 3.7 4.8

Na+ / K+ (F.S.A.) 1.7 3.3 3.2


Na+ / K+ (F.S.B.) 1.5 3.8 4.3
Na+ / K+ (F.I.A.) 3.7 5.2 6.3
Na+ / K+ (F.I.B.) 1.9 3.5 5.7
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 146

Tableau 5.2. Variations du rapport Na+ / Ca2+ en fonction de la salinité du


milieu de culture. Ces rapports sont déterminés sur la base des quantités
sécrétées par unité de masse foliaire et par unité de temps (Sécrétion) ou sur la
base des teneurs ioniques foliaires (Accumulation). F: feuille, S: supérieure, I:
inférieure, A: partie apicale, B: partie basale.

NaCl, mM
--------------------------------------------------------------
100 300 400

Sécrétion
Na+ / Ca2+ (feuille entière) 47.3 140.0
202.0

Na+ / Ca2+ (F.S.A.) 23.5 77.6 112.6


Na+ / Ca2+ (F.S.B.) 70.2 178.6 345.0
Na+ / Ca2+ (F.I.A.) 12.2 92.9 77.6
Na+ / Ca2+ (F.I.B.) 55.2 164.7 196.1

Accumulation
Na+ / Ca2+ (feuille entière) 4.2 8.6 9.8

Na+ / Ca2+ (F.S.A.) 4.8 9.1 10.2


Na+ / Ca2+ (F.S.B.) 5.1 11.1 13.7
Na+ / Ca2+ (F.I.A.) 3.3 6.6 6.4
Na+ / Ca2+ (F.I.B.) 3.4 6.2 7.5

Au niveau de la feuille entière et abstraction faite à son âge, les valeurs du rapport
Na+ / K+ sont nettement plus faibles quand elles sont estimées sur la base des
teneurs tissulaires (accumulation) que sur la base des quantités sécrétées. L'écart
entre les deux types de rapport est nettement plus prononcé à 300 et 400 qu'à 100
mM NaCl. Ces résultats suggèrent une sécrétion sélective de Na+ aux dépens de K+
et une aptitude des plantes à mieux exprimer cette caractéristique en condition de
salinité sévère qu'en condition modérée. Le même résultat est retrouvé pour Ca2+.
Néanmoins, les valeurs des rapports Na+ / Ca2+ sont plus élevées que celles de
Na+ / K+ aussi bien au niveau de l'accumulation que de la sécrétion. Outre, une plus
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 147

faible accumulation de Ca2+ par rapport à K+ dans les feuilles, ce résultat montre
également que la part qui revient à Ca2+ dans la sécrétion est plus faible que celle de
K+. Au niveau des fragments foliaires, les rapports de sécrétion Na+ / K+ et
Na+ / Ca2+ sont généralement plus élevés dans les parties basales que les parties
apicales des feuilles indépendamment de leur âge. Ce résultat serait lié à une
sécrétion en faveur de Na+ au niveau des fragments basaux des feuilles. Nous avons
vu précédemment que la vitesse de sécrétion de Na+ est particulièrement élevée dans
ces régions des feuilles.

En résumé, la sécrétion est plus sélective en faveur de Na+ que de K+ et de Ca2+. Cette
propriété s'exprime davantage dans les parties basales que les fragments apicaux des feuilles.
La figure 5.9, qui représente les parts respectives des différents cations dans la sécrétion
journalière par unité de matière sèche ou par unité de surface foliaire, illustre parfaitement la
sélectivité de sécrétion de Na+ aux dépens de K+ et particulièrement de Ca2+.

Figure 5.9. Variations des parts respectives des cations Na+, K+ et Ca2+ dans la
sécrétion en rapport avec la salinité de la solution d'irrigation.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 148

4. DISCUSSION

4.1. CONTRIBUTION DE LA SECRETION DANS LE CONTROLE DE L'ACCUMULATION

IONIQUE

Le présent chapitre s'est fixé comme objectif d'estimer la sécrétion foliaire de sel et
d'étudier ses variations en fonction de l'âge des et la position des fragments de
feuilles. Nos résultats montrent que Spartina alterniflora peut sécréter
quotidiennement 3 à 28 % de Na+ des quantités accumulées durant un traitement de
10 à 20 jours. Ce résultat qui illustre l'importance de ce phénomène dans
l'élimination du sel parvenant aux organes photosynthétiques, a été observé chez
d'autres halophytes. À titre d'exemple, les feuilles d'Avicennia marina sécrètent 0.302
mmol de NaCl par jour et par gramme de matière sèche ce qui représente 40 % des
quantités accumulées quotidiennement dans ses feuilles (Waisel et al., 1986). Nos
résultats montrent également que les feuilles sécrètent en moyenne 60 % des
prélèvements totaux de sel. Étudiant la sécrétion chez quatre Poaceae (Spartina anglica,
Limonium vulgare, Armeria maritima et Glaux maritima), Rozema et al. (1981) ont
rapporté que la première espèce, originaire des habitats les plus salins, montre la
sécrétion la plus importante de Na+; 60 % environ des quantités de sel absorbées sont
sécrétées. Cette caractéristique lui confère une plus grande aptitude à maintenir une
concentration interne stable en sodium. Chez Limonium vulgare, Glaux maritima et
Armeria maritima, la sécrétion représente respectivement 33, 20 et 4 % seulement des
prélèvements de sel.
Les parts respectives de l'exclusion racinaire et de la sécrétion foliaire dans le
contrôle de l'accumulation interne de sel ont été déterminées chez Spartina alterniflora
en condition de culture sur eau de mer (Bradley et Morris, 1991 a). D'un point de vue
quantitatif, les quantités de sel éliminées représentent 91 à 97 % de l'absorption
théorique maximale. La sécrétion assure, approximativement, l'élimination de 50 %
des quantités de sel absorbées. Dans cette étude, les teneurs des ions examinés (K+,
Ca2+, Mg2+, SO 4 2- et Cl-) ne varient pas avec la salinité du milieu de culture.
Néanmoins, Na+ est au moins deux fois plus abondant dans les tissus à 40 qu'à
10 g.l-1 de sel.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 149

D'autres données illustrent l'efficacité de la sécrétion dans la protection des tissus


contre l'accumulation excessive de sel. Les feuilles des espèces de mangroves
sécrètent une solution plus concentrée que l'eau de mer (Scholander et al., 1962). La
concentration de la solution sécrétée à partir des disques foliaires de Limonium
latifolium est encore plus élevée que celle du milieu (Arisz et al., 1955). Chez
Aeluropus littoralis, la concentration de la solution de sécrétion est nettement plus
élevée que celle du milieu extérieur, dans une gamme de salinité comprise entre 200
et 400 mM NaCl, et inversement pour les plus fortes doses de sel (500 à 600 mM
NaCl). Ainsi, la sécrétion ne serait impliquée dans le contrôle de l'accumulation
tissulaire de Na+ qu'en condition de salinité modérée (Pollak et Waisel, 1979).
Le contenu en Na+ des feuilles sécrétrices est divisé en deux fractions principales
(Pollak et Waisel, 1979):
(i) La première, correspondant au sodium accumulé dans l'apoplasme et /
ou dans le symplasme, est rapidement sécrétée.
(ii) La seconde fraction n'est que légèrement disponible pour la sécrétion
puisqu'elle correspond à Na+ séquestré principalement dans les vacuoles ou
les organites cytoplasmiques.
L'importance de la sécrétion foliaire chez Spartina alterniflora suggère que cette
Poaceae accumule Na+ particulièrement dans le symplasme et / ou l'apoplasme.

4.2. SELECTIVITE DE LA SECRETION

Outre l'importance de la sécrétion par rapport aux prélèvements totaux de Na+ (et
de Cl-), nos résultats ont mis en évidence une caractéristique importante de la
sécrétion qui est la sélectivité en faveur de Na+ aux dépens de K+, et notamment de
Ca2+. Plusieurs travaux ont souligné l'intérêt de cette sécrétion sélective pour la
protection des tissus contre des déséquilibres nutritionnels. La sécrétion sélective a
été observée chez plusieurs espèces. Chez Tamarix aphylla, les cations sont sécrétés
selon un ordre décroissant de priorité: Na+ > Ca2+ > K+ (Waisel, 1961). Chez la même
espèce, Berry (1970) démontre que la sécrétion des cations divalents est plus
importante que celle des cations monovalents. La sélectivité de Na+ par rapport à K+
est retrouvée encore chez Glaux maritima (Rozema et Riphagen, 1977) et Aeluropus
littoralis (Pollak et Waisel, 1979).
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 150

Bien que, des travaux très anciens aient démontré que NaCl est le principal sel
sécrété par Spartina alterniflora (Klugh, 1909; in Bradley et Morris, 1991 a), des études
plus récentes ont rapporté que la sécrétion peut porter sur d'autres ions majeurs
quand les cultures sont conduites sur l'eau de mer (McGovern et al., 1979). Selon ces
derniers auteurs, le rapport Na+ / K+ (mole / mole) des sels sécrétés chez Spartina
alterniflora cultivée sur eau de mer est d'environ 32 (contre 45 pour l'eau de mer). Ce
résultat traduit une certaine sécrétion sélective en faveur de K+. Par ailleurs, dans
une étude conduite sur la même plante, le rapport de sécrétion Na+ / K+ varie 11 à 29
quand la salinité du milieu de culture augmente de 10 à 40 g.l-1 (Bradley et Morris,
1991 a). Dans les mêmes conditions expérimentales, le rapport Na+ / K+ dans le flux
xylémique augmente de manière linéaire de 10.22 à 17.11. L'analyse de ces données
montre que dans une gamme de salinité allant de 10 à 30 g.l-1, la sécrétion de Na+
évolue de 40 à 59 % des prélèvements totaux alors que celle de K+ n'augmente que de
26 à 30 %. Cependant, la situation est inversée dans des conditions de salinité plus
sévères. En effet, à 40 g.l-1, 62 % de K+ et 48 % de Na+ prélevés sont sécrétés. La
sécrétion relativement élevée de Na+ par rapport à celle de K+, observée pour des
salinités comprises entre 10 et 30 g.l-1, doit contribuer au maintien des concentrations
en Na+ à un niveau relativement bas à l'intérieur des tissus. La diminution brusque
du rapport Na+ / K+ à des salinités supérieures à 30 g.l-1 est interprétée comme une
défaillance du mécanisme sélectif conduisant à une sécrétion plus importante de K+
ou résultant d'une augmentation de la fuite des sels à partir des feuilles sénescentes
(Bradley et Morris, 1991 a).
Chez Aeluropus littoralis, la distribution des ions à l'intérieur des feuilles peut
expliquer la sélectivité des mécanismes de sécrétion en faveur du sodium par
rapport au potassium. Le contenu en K+ des feuilles de cette espèce est généralement
élevé: seule une faible fraction de ce cation est sécrétée, même lorsque le mécanisme
de sécrétion est activé par l'addition de sel. Ce résultat suggère une plus grande
affinité des systèmes de sécrétion vis-à-vis de Na+ associée à une faible affinité de la
vacuole et des organites cellulaires pour ce cation. L'équilibre entre la sécrétion et
l'accumulation de K+ n'est déplacé vers la sécrétion que suite à un
approvisionnement substantiel des feuilles en K+ conduisant à son accumulation
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 151

dans l'apoplasme et le symplasme (Pollak et Waisel, 1979). Bien que la sécrétion de


K+ puisse prendre place dans de telles conditions, l'affinité des systèmes de sécrétion
pour K+ (exprimé par le coefficient de sélectivité ou par la sécrétion relative) est plus
faible que celle pour Na+. Ainsi, la composition ionique du liquide sécrété n'est pas
déterminée uniquement par les systèmes sécréteurs comme les glandes à sel, mais
aussi par la capacité d'autres systèmes foliaires d'accumuler et de retenir les ions. La
tendance des feuilles à retenir des niveaux élevés de potassium est impropre aux
halophytes monocotylédones (Albert et Kinzel, 1973). Cette caractéristique semble
obligatoire pour maintenir un équilibre nutritionnel.

4.3. VARIATIONS DE LA SECRETION

Nos résultats (Fig. 5.10) montrent que la sécrétion est positivement corrélée (p =
0.05 et 0.001 respectivement pour les feuilles jeunes et adultes) avec la charge
tissulaire en Na+ et la salinité du milieu de culture (100 à 400 mM NaCl). Chez
Aeluropus littoralis, la sécrétion est fortement affectée à 600 mM NaCl (Pollak et
Waisel, 1979). Cet effet semble lié essentiellement à un déficit hydrique engendré par
la composante osmotique du sel. Le même résultat est observé lorsque la plante est
cultivée dans une atmosphère sèche. La sensibilité de la sécrétion du sel en condition
de stress hydrique suggère que Aeluropus littoralis nécessite un approvisionnement
adéquat en eau pour contrôler sa concentration interne en sel et se maintenir dans
des habitats salins. La forte exigence pour l'eau semble constituer une caractéristique
des halophytes sécrétrices, dont la plupart sont des hydrohalophytes typiques
comme Limonium, Aeluropus, Spartina, Tamarix, Cressa, Avicennia, Aegialitis). Le genre
Reaumuria semble constituer une exception à cette règle puisqu'il comporte des
xérohalophytes sécrétrices du sel (Pollak et Waisel, 1979).
Lors des différentes cultures de Spartina alterniflora, nous avons remarqué que les
cristaux de sel apparaissent à la surface des feuilles au milieu de journée, lorsqure la
température atteint un maximum. Les cultures de cette plante sont généralement
conduites en fin de printemps et en été (la croissance est fortement limitée en hiver).
Le dépôt de sel est précédé par l'apparition de nombreuses gouttelettes depuis le
début de la journée. Ceci reflète une capacité sécrétrice nocturne de Spartina
alterniflora. Les données relatives aux variations journalières de la sécrétion sont très
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 152

rares. Néanmoins, une étude conduite sur Aeluropus littoralis a montré que
l'éclairement accroît de manière significative la sécrétion foliaire (Pollak et Waisel,
1979). Ce résultat traduit une action directe de ce paramètre sur le mécanisme
sécrétoire. La lumière augmenterait la vitesse de transport du sel vers les parties
aériennes à travers une stimulation du flux transpiratoire. Néanmoins, cette étude a
mis en évidence que cette caractéristique permet aux feuilles de vider leur contenu
en sel accumulé le jour d'avant. Les feuilles débutent ainsi la matinée avec un faible
contenu en sel avant qu'une nouvelle charge ne se produise par le courant
transpiratoire. La sécrétion nocturne présente des avantages puisqu'elle se produit
dans des conditions caractérisées par une forte humidité de l'air et un stress
hydrique moins limitant.

Feuilles adultes

400 mM
45

300 mM
30
Na+ secrété, µmol . jour -1

100 mM
15

r = 0,994 ***
0
Feuilles jeunes 400 mM
80

60

40 300 mM

20 100 mM

r = 0,884 *
0 0,4 0,8 1,2 1,6
Na+, mmol . g-1 MS

Figure 5.10. Relation entre la sécrétion foliaire de Na+ et l'accumulation de ce


cation au niveau des feuilles. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.
Chapitre V. SECRETION DU SEL PAR LES FEUILLES DE Spartina alterniflora ..................................................... 153

5. CONCLUSION

En résumé, nos résultats montrent que la sécrétion contribue efficacement dans la


protection des feuilles de Spartina alterniflora contre l'accumulation excessive de Na+
et de Cl-, puisqu'elle peut s'élever jusqu'à 60 % des prélèvements totaux de sel.
Compte tenu de son caractère fortement sélectif (Na+ et Cl- sont pratiquement les
seuls ions sécrétés), la sécrétion ne conduit pas à des déséquilibres nutritionnels dans
les tissus.
CHAPITRE VI

CROISSANCE ET COMPORTEMENT NUTRITIONNEL DE


Suaeda fruticosa ET DE Spartina alterniflora CULTIVEES
SUR L'EAU DE MER

RESUME

La production de biomasse et le prélèvement des nutriments sont évalués chez


Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora cultivées sur eau de mer complète ou diluée à
50 % et additionnée ou non d'une solution nutritive de base. Les cultures sont
conduites en aquaculture stricte pour la première espèce, et sur sable inerte irrigué
avec les différentes solutions nutritives pour la seconde. Deux récoltes sont
effectuées, au début et à la fin des traitements. Les mesures ont porté sur la
croissance pondérale des plantes, l'hydratation des tissus et leurs contenus en N, Pi,
K+, Ca2+ et Mg2+. La composition de l'eau de mer en macro et oligo-éléments est
également déterminée. Les résultats montrent que la croissance optimale des deux
halophytes est obtenue lorsqu'elles sont irriguées à l'eau de mer diluée deux fois et
additionnée d'une solution nutritive. L'analyse des relations entre la production de
biomasse et les teneurs des nutriments dans les parties aériennes suggère que l'azote
et le phosphore limitent la croissance des plantes en condition de culture sur eau de
mer complète ou diluée.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................155

1. INTRODUCTION

Nous avons vu dans les trois chapitres précédents que Suaeda fruticosa et Spartina
alterniflora expriment de fortes potentialités de croissance à des concentrations en
NaCl voisines de 2 % (300 mM NaCl), ce qui correspond environ à la salinité de l'eau
de mer diluée deux fois. Par ailleurs, ces deux halophytes sont capables de produire
une matière sèche relativement riche en azote (3 à 4 % de MS) en dépit de
l'abondance du sel dans le milieu de culture. Ceci dénote d'une forte sélectivité pour
NO3- aux dépens de Cl-. Ces résultats suggèrent la possibilité de l'introduction de ces
deux halophytes fourragères dans les zones fortement salées pour y augmenter la
production de biomasse et améliorer la valeur pastorale. Cependant, la productivité
de ces espèces serait fortement tributaire de l'irrigation puisque la plupart de nos
régions salées sont arides. Compte tenu de la raréfaction de l'eau douce dans ces
régions, le recours à l'utilisation de l'eau de mer pourrait constituer une approche
prometteuse. En effet, nos côtes marines s'étendent sur plus de 1300 Km avec des sols
en majorité sablonneux se prêtant à une irrigation par les eaux non conventionnelles.
À l'échelle mondiale, l'irrigation à l'eau de mer pourrait résoudre à la fois les pénuries
d'eau et de terre: 43 % de la surface des terres émergées sont aride ou semi-aride, et
environ 15 % des déserts salés ou semi-salés seraient cultivables avec une irrigation à
l'eau de mer, soit 130 millions d'hectares de nouvelles terres agricoles (Glenn et al.,
1998).
Le présent chapitre, inscrit dans le cadre de cette approche, a pour objectif
d'évaluer la production de biomasse de ces deux halophytes en condition d'irrigation
à l'eau de mer et d'analyser leur statut minéral en vue de diagnostiquer les limitations
nutritionnelles dans ces conditions de culture.

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL

De jeunes plants enracinés de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora sont


obtenus par bouturage selon les techniques décrites précédemment (cf. chapitre II §
2.1 et § 2.2). Après une période de prétraitement de 30 ou 40 jours (respectivement
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................156

pour S. fruticosa et S. alterniflora), les plantules de chaque espèce sont réparties en cinq
lots de 10 plantes chacun. Deux lots sont cultivés sur l'eau de mer complète ou diluée
deux fois et ceci en aquaculture stricte pour S. fruticosa ou apportées en irrigation
pour S. alterniflora. Deux autres lots sont également cultivés sur eau de mer diluée ou
non, mais enrichies en nutriments minéraux selon la formule de Hewitt (1966). Le
dernier lot de plantes, cultivé sur solution nutritive de base préparée dans l'eau
distillée pour S. fruticosa et dans l'eau de ville pour S. alterniflora, est utilisé comme
témoin. La composition de ces différents milieux de culture en macro et micro-
éléments est présentée dans le tableau 6.1.

Tableau 6.1. Composition en macro et oligo-éléments de la solution nutritive


de base (T), de l'eau de ville et de l'eau de mer. La dilution de l'eau de mer est
réalisée dans l'eau distillée (Suaeda fruticosa) ou dans l'eau de ville (Spartina
alterniflora). L'enrichissement en nutriments, de l'eau de mer complète ou
diluée, est fait selon la solution nutritive de base (T).

T Eau de ville Eau de mer


SO 4 2- 1.50 1.88 36.46
PO 4 2- 1.90 0.28 0.01
NO 3 - 8.50 0.38 0.05
Cl- ----- 10.20 578.23
Macro-éléments
Mg2+ 1.50 1.88 45.27
(mM)
Ca2+ 3.50 4.50 27.50
K+ 5.20 2.85 14.83
NH 4 + 2.00 0.13 ------
Na+ ----- 10.20 530.24
Fe 3.00 ----- 0.97
Mn 0.50 ----- 0.08
Cu 0.04 ----- 1.10
Zn 0.05 ----- 0.05
Oligo-éléments B 0.50 ----- 4.88
(ppm) Mo 0.02 ----- -----
As ----- ----- 8.13
Pb ----- ----- 0.50
Cd ----- ----- 0.18
Co ----- ----- 0.69
C.E. (mS.cm-1) 2.7 0.9 46.2
Résidu sec (g.l-1) ----- 0.65 43.62
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................157

La culture de Suaeda fruticosa est conduite dans des pots de 750 ml, alors que
Spartina alterniflora est cultivée dans des pots en argile remplis de sable inerte irrigué
régulièrement avec les solutions nutritives. Les expériences sont conduites dans une
serre vitrée sous un éclairement naturel. La température et l'humidité relative
moyennes sont respectivement de 25 ± 5°C, 65 ± 5 % le jour, et 16 ± 5°C, 85 ± 5 % la
nuit. Deux récoltes sont effectuées, la première au début du traitement (récolte de
départ) et la seconde au bout 46 et 64 jours de traitement respectivement pour Suaeda
fruticosa et Spartina alterniflora (récolte finale). La figure 6.1 schématise le protocole
expérimental adopté.

Témoin
3

Eau de mer / 2
3

Témoin Eau de mer


1 2 3

Eau de mer / 2 + T
3

Eau de mer + T
3

Prétraitement Traitements
Suaeda fruticosa
0 30 76
Spartina alterniflora
0 40 104
Jours

Figure 6.1. Protocole expérimental.


T: solution nutritive de base préparée dans l'eau distillée pour Suaeda fruticosa
et dans l'eau de ville pour Spartina alterniflora.
1. Bouturage: des pousses feuillées prélevées sur des plantes mères sont mises
à enraciner sur milieu témoin.
2. Récolte de départ, repiquage des plantules enracinées et début du
traitement.
3. Récolte finale: les plantes sont séparées en parties aériennes et en racines.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................158

Aux récoltes, les plantes sont séparées en parties aériennes et en racines. Ces
dernières sont rincées dans trois bains successifs d'eau distillée froide puis essorées et
séchées. Les cristaux de sel accumulés à la surface des feuilles de Spartina alterniflora
sont éliminés au cours des lavages successifs des parties aériennes. Ainsi, les ions Na+
et Cl- dosés correspondent uniquement aux accumulations dans les organes.

3. RESULTATS

3.1. ASPECT DES PLANTES

Les photos 6.1 et 6.2 illustrent l'aspect des plantes au terme de 46 jours de
traitement chez Suaeda fruticosa et 65 jours chez Spartina alterniflora.

Photo 6.1. Suaeda fruticosa après 46 jours de traitement. La culture est réalisée
en aquaculture stricte sur solution nutritive de base, eau de mer / 2, eau de
mer, eau de mer / 2 enrichie en nutriments et eau de mer additionnée de
nutriments minéraux.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................159

Photo 6.2. Spartina alterniflora après 64 jours de traitement. La culture est


réalisée sur sable inerte irrigué avec la solution nutritive de base, l'eau de
mer / 2, l'eau de mer, l'eau de mer / 2 enrichie en nutriments et l'eau de mer
additionnée de nutriments minéraux.

La croissance et le développement des plantes sont fortement tributaires du degré


de dilution de l'eau de mer et de son enrichissement en éléments nutritifs. En
l'absence d'apport de nutriments minéraux, la croissance des deux halophytes est
meilleure sur eau de mer diluée deux fois que sur eau de mer complète. Les deux
halophytes manifestent des symptômes morphologiques (chlorose et brunissement
des feuilles) qui seraient liées plus à des perturbations nutritionnelles qu'à des effets
toxiques du sel. En effet, l'enrichissement de l'eau de mer, complète ou diluée, en
nutriments minéraux conduit à la disparition de ces symptômes. Cependant, ce
résultat ne pourrait pas indiquer que la salinité de l'eau de mer est sans effet sur la
croissance. En effet, en condition d'apport de nutriments, les plantes expriment une
croissance nettement plus importante sur eau de mer diluée 2 fois que sur eau de mer
complète.
En résumé, les observations morphologiques montrent que les plus fortes croissance sont
obtenues sur eau de mer diluée deux fois et enrichie en éléments minéraux. Ce résultat
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................160

suggère que l'eau de mer limite la croissance et le développement des deux halophytes par la
salinité et par la faible disponibilité des nutriments minéraux.

3.2. CROISSANCE DES PLANTES

Figure 6.2. Variations de la production de matière sèche (MS) chez Suaeda


fruticosa et Spartina alterniflora en fonction de la dilution de l'eau de mer et de
son enrichissement avec des nutriments minéraux. Cultures conduites dans
une serre vitrée sous éclairement naturel. TD: témoin départ, Témoin: plante
cultivée sur solution nutritive complète, E: eau de mer complète, E/2: eau de
mer diluée deux fois, E + T ou E/2 + T: eau de mer complète ou diluée deux
fois additionnée d'une solution nutritive. Les chiffres portés sur l'histogramme
correspondent au rapport de matière sèche R / PA. Moyennes de 10
répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

La figure 6.2 montre qu'indépendamment des traitements, S. alterniflora produit


nettement plus de matière sèche que S. fruticosa. Ce résultat est lié au fait qu'au début
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................161

des traitements, les plantules de S. alterniflora sont plus vigoureuses que celles de S.
fruticosa et que la durée de traitement est nettement plus longue pour la première que
pour la seconde halophyte. La croissance moyenne relative, qui élimine les
différences liées à ces deux paramètres, est par contre, nettement plus élevée chez S.
fruticosa que S. alterniflora (Tab. 6.2).

Tableau 6.2. Variations de la croissance moyenne relative (CMR) de la plante


entière, chez les deux halophytes, en fonction de la dilution de l'eau de mer et
de son enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.

Traitements
_____________________________________________
T E/2 E E/2+T E+T

S. fruticosa 0.099 0.052 0.033 0.101 0.048

S. alterniflora 0.045 0.034 0.025 0.042 0.032

Chez les deux halophytes, les niveaux les plus bas de production de matière sèche
et de la CMR sont obtenus en condition de culture sur eau de mer complète ou diluée
deux fois. Dans ce dernier cas, S. fruticosa et S. alterniflora expriment, respectivement,
53 et 75 % de leur CMR maximale. Ce résultat ne peut pas être expliqué uniquement
par l'effet inhibiteur de la salinité sur la croissance. En effet, nous avons vu
précédemment que S. fruticosa et S. alterniflora manifestent respectivement 97 et 82 %
de leur CMR maximale à 300 mM NaCl (même niveau de salinité que l'eau de mer
diluée deux fois). La faible disponibilité en certains nutriments minéraux constitue
un facteur plus limitant de la croissance que la salinité. D'ailleurs, l'enrichissement de
l'eau de mer en nutriments améliore nettement la production de biomasse et la CMR.
Chez les plantes cultivées sur 50 % eau de mer enrichie en nutriments, la vitesse de
croissance atteint 93 à 100 % de celle des plantes témoins respectivement chez S.
alterniflora et S. fruticosa. Quoique moins prononcée, l'amélioration de la croissance
est également observée chez les plantes irriguées à l'eau de mer complète enrichie en
nutriments par rapport à leurs homologues cultivés sur eau de mer complète. Les
variations du rapport de matière sèche R / PA chez Spartina alterniflora confirme ces
limitations nutritionnelles imposées par l'eau de mer. En effet, le rapport R / PA
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................162

atteint les valeurs les plus élevées chez les plantes irriguées à l'eau de mer diluée ou
non en l'absence d'apport supplémentaire de nutriments. Il est ramené à des niveaux
proches de ceux des plantes témoins en enrichissant l'eau de mer complète ou diluée
par une solution nutritive.
En bilan, les deux halophytes tolèrent l'eau de mer diluée deux fois mais elles exigent un
apport supplémentaire de nutriments pour exprimer leurs potentialités maximales de
croissance.

3.3. HYDRATATION DES TISSUS

Chez les deux halophytes et indépendamment de la nature des tissus, les teneurs
les plus élevées en eau sont retrouvées chez les plantes cultivées sur solution
nutritive ou sur eau de mer diluée deux fois et enrichie en nutriments. Globalement,
les variations des teneurs en eau rappellent celles de la croissance pondérale
(Tab. 6.3).

Tableau 6.3. Variations de l'hydratation des tissus ( ml H 2 O.g-1 MS) des deux
halophytes en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son enrichissement
en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.

Traitements
_____________________________________________
T E/2 E E/2+T E+T

Parties aériennes
S. fruticosa 6.4 4.1 5.1 6.9 6.9
S. alterniflora 4.5 2.6 2.5 3.4 3.0

Racines
S. fruticosa 8.8 5.5 5.2 8.2 6.3
S. alterniflora 7.0 5.5 5.7 7.1 7.3
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................163

3.4. STATUT IONIQUE DES TISSUS

3.4.1. Sodium et chlorure

Figure 6.3. Variations de l'accumulation de Na+ dans les parties aériennes et


les racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la
dilution de l'eau de mer et de son enrichissement en nutriments minéraux.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

La figure 6.3 montre que Na+ est préférentiellement accumulé dans les parties
aériennes que dans les racines des deux halophytes. Cette caractéristique s'exprime
davantage chez S. fruticosa que chez S. alterniflora: les niveaux d'accumulation
atteignent 7 mmol.g-1 MS chez la première espèce contre 1.5 à 2 mmol.g-1 MS chez la
seconde. Ce résultat est conforme au caractère inclusif de S. fruticosa décrit
précédemment (cf. chapitre III). Chez cette Chenopodiaceae, les teneurs en Na+ des
parties aériennes dépendent du niveau de dilution de l'eau de mer et de la croissance
des plantes: elles sont élevées chez les plantes cultivées sur eau de mer complète ou
diluée à 50 % et accusent une diminution significative, notamment en apportant des
nutriments dans l'eau de mer diluée deux fois. Ce résultat qui s'explique par une
dilution de Na+ par la matière sèche, montre que non seulement l'apport d'éléments
minéraux améliore la croissance des plantes, mais conduit aussi à la production
d'une phytomasse aérienne relativement pauvre en sel. Globalement, le même
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................164

comportement est observé chez Spartina alterniflora avec, cependant, des variations de
très faible amplitude.
Généralement, les teneurs des parties aériennes et des racines en Cl- montrent des
variations similaires à celles de Na+ chez les deux halophytes (Fig. 6.4). Néanmoins,
les niveaux d'accumulation de Cl- demeurent nettement plus bas que ceux de Na+
chez les plantes de Suaeda fruticosa soumises à l'eau de mer diluée deux fois mais non
enrichies en éléments minéraux. De même, cet anion est accumulé à des niveaux
nettement plus bas que ceux de Na+ chez les plantes cultivées sur l'eau de mer diluée
et additionnée de solution nutritive. Ces résultats suggèrent que l'antagonisme
Na+ / cations indispensables est plus accentué que celui qui se produit entre Cl- et les
anions. Chez Spartina alterniflora, les niveaux d'accumulation de Cl- (nettement plus
faibles que ceux observés chez Sueada fruticosa) sont toujours plus élevés que ceux de
Na+. Ce comportement conforme aux observations précédentes, indique une
sécrétion foliaire (et probablement une exclusion racinaire) portant plus sur Na+ que
sur Cl-.

Figure 6.4. Variations de l'accumulation de Cl- dans les parties aériennes et les
racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la dilution
de l'eau de mer et de son enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes
de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................165

3.4.2. Azote réduit

Cultivées sur eau de mer complète ou diluée à 50 %, les plantes montrent les
teneurs les plus faibles en azote réduit dans les parties aériennes de S. fruticosa
(Fig. 6.5). Le statut azoté des racines n'a pas pu être déterminé dans ces conditions de
culture en raison d'une croissance très limitée de ces organes. Ce résultat ne peut pas

s'expliquer évidemment par l'effet inhibiteur de Cl sur l'assimilation de NO 3 -. Nous


-

avons précédemment vu que les teneurs en azote réduit dépassent toujours


2 mmol.g-1 MS, indépendamment de la salinité du milieu de culture (cf. chapitre III
§ 4.6). Par ailleurs, l'apport de nutriments minéraux dans l'eau de mer complète ou
diluée stimule la croissance (Fig. 6.2) et conduit également à une amélioration nette
du statut azoté des parties aériennes essentiellement chez les plantes cultivées sur
eau de mer diluée 50 % (Fig. 6.5). Ce résultat suggère que l'eau de mer (complète ou
diluée deux fois) limite la croissance de S. fruticosa par le biais de son contenu en
azote.

Figure 6.5. Variations de la teneur en azote réduit dans les parties aériennes et
les racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la
dilution de l'eau de mer et de son enrichissement en nutriments minéraux. Les
niveaux d'accumulation de Nréd. n'ont pas été déterminés dans les racines de
Suaeda fruticosa cultivée sur eau de mer complète ou diluée en raison d'une
croissance très limitée de ces organes. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles
de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................166

Les teneurs en azote de S. alterniflora ne varient pas de façon significative d'un


traitement à l'autre aussi bien dans les parties aériennes que dans les racines. Elles
sont en moyenne de 2 mmol.g-1 MS. Cette proportionnalité entre la production de
biomasse et l'assimilation de l'azote suggère deux hypothèses:
(i) la croissance est strictement limitée par l'azote.
(ii) NO 3 - est suffisamment disponible dans le milieu de culture, son
absorption et sa réduction étant déterminées par la croissance.
La deuxième hypothèse serait moins plausible compte tenu de la pauvreté de l'eau
de mer en azote et des interactions antagonistes probables entre Cl-, et à un degré
moindre SO 4 2-, avec NO 3 -.
Il apparaît ainsi que l'azote peut limiter la croissance des plantes en condition de culture
sur l'eau de mer.

3.4.3. Phosphore inorganique

Figure 6.6. Variations de l'accumulation du phosphore inorganique (Pi) dans


les parties aériennes et les racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora
en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son enrichissement en
nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au
seuil de 5 %.

Les tissus de S. fruticosa montrent des niveaux variable en Pi (Fig. 6.6). Comme Pi
correspond à la fraction non utilisée dans la croissance et que cette dernière est
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................167

fortement limitée dans ces conditions de culture, on peut déduire une faible
disponibilité du phosphore assimilable dans l'eau de mer. L'apport de la solution
nutritive dans l'eau de mer diluée deux fois augmente significativement la teneur des
parties aériennes en Pi la ramenant au même niveau que celui des plantes cultivées
sur solution de base exempte de sel. Comme les productions de matière sèche sont
similaires dans ces deux traitements, on déduit que le prélèvement de Pi n'a pas été
affecté par la présence de sel dans le milieu de culture. Le comportement des plantes
cultivées sur l'eau de mer complète additionnée de la solution nutritive appuie cette
hypothèse. En effet, chez ces cultures, la croissance semble limitée par le sel alors que
l'alimentation phosphatée n'est pas perturbée ayant pour conséquence un
enrichissement spectaculaire des tissus en Pi notamment dans les racines.
Chez S. alterniflora, les variations de Pi dans les tissus sont peu perceptibles.

3.4.4. Potassium

Figure 6.7. Variations de l'accumulation de K+ dans les parties aériennes et les


racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la dilution
de l'eau de mer et de son enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes
de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Chez S. fruticosa, les teneurs les plus faibles en K+ sont observées chez les plantes
cultivées sur eau de mer diluée ou non (Fig. 6.7). L'addition d'une solution nutritive
dans ces conditions de culture ne ramène pas l'accumulation de K+ au même niveau
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................168

que celui des plantes témoins. Ce résultat indique qu'en dépit de son abondance dans
le milieu, le potassium n'est pas prélevé à la même vitesse aux deux niveaux de
salinité de l'eau de mer. L'antagonisme Na+ / K+ qui serait plus prononcé sur eau de
mer complète que diluée réduit le prélèvement de ce cation. Chez Spartina alterniflora,
les teneurs ne varient pas de manière significative d'un traitement à un autre aussi
bien dans les racines que dans les parties aériennes. Comme la concentration de l'eau
de mer en K+ est de 14.8 mM (Tab. 6.1), ce résultat pourrait indiquer
qu'indépendamment des traitements, le prélèvement de ce cation est déterminé par
la croissance, elle-même contrôlée par d'autres nutriments.

3.4.5. Calcium

Les variations des teneurs en Ca2+ sont également de plus grande amplitude chez
S. fruticosa que chez S. alterniflora (Fig. 6.8). Chez la première espèce, les niveaux les
plus bas en Ca2+ sont associés aux potentialités les plus élevées de la croissance
(culture conduite sur solution nutritive ou sur eau de mer diluée et enrichie par la
solution nutritive) et inversement. Ceci indique que pour tous les traitements, Ca2+
n'est pas limitant pour la croissance. Ainsi, toute réduction de production de
biomasse conduit à un enrichissement des tissus en ce cation.

Figure 6.8. Variations de l'accumulation de Ca2+ dans les parties aériennes et


les racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la
dilution de l'eau de mer et de son enrichissement en nutriments minéraux.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................169

Chez S. alterniflora, les niveaux d'accumulation de Ca2+ sont légèrement plus bas
chez les plantes cultivées sur eau de mer, indépendamment de sa dilution et de son
enrichissement en nutriments minéraux par rapport aux plantes témoins. Comme la
croissance est systématiquement plus faible dans les premiers traitements on déduit
qu'en dépit de son abondance dans le milieu de culture, le prélèvement de Ca2+ est
relativement perturbé par la salinité de l'eau de mer.

3.4.6. Magnésium

Mg2+ est particulièrement accumulé dans les racines de S. fruticosa (Fig. 6.9). Chez
cette halophyte, l'apport de solution nutritive dans l'eau de mer diluée deux fois ou
non diluée conduit à des niveaux d'accumulation de Mg2+ très voisins de ceux des
plantes témoins. Comme l'eau de mer diluée deux fois et enrichie en solution
nutritive conduit également à la croissance la plus élevée, on déduit que la salinité de
l'eau de mer ne perturbe pas le prélèvement de Mg2+. La forte accumulation de Mg2+
chez les plantes cultivées exclusivement sur eau de mer est en faveur de cette
hypothèse: le prélèvement de Mg2+ étant moins affecté que la croissance, ceci conduit
à un enrichissement des tissus en Mg2+. Chez S. alterniflora, les variations des teneurs
en Mg2+ sont de faible amplitude.

Figure 6.9. Variations de l'accumulation de Mg2+ dans les parties aériennes et


les racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la
dilution de l'eau de mer et de son enrichissement en nutriments minéraux.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................170

4. DISCUSSION

4.1. PRODUCTION DE BIOMASSE SUR EAU DE MER

La présente étude nous a montré qu'en condition nutritionnelle non limitante


(apport de la solution nutritive dans l'eau de mer), Spartina alterniflora et Suaeda
fruticosa sont capables d'exprimer une bonne activité de croissance (respectivement
93 et 100 % de leurs potentialités maximales) lorsqu'elles sont cultivées sur eau de
mer diluée 2 fois, ayant une salinité de l'ordre de 275 mM NaCl (Tab. 6.1).
Globalement, ce résultat confirme nos observations ultérieures (Chapitre III et IV): les
deux halophytes ne voient leur croissance significativement affectée par NaCl qu'à
des concentrations dépassant 300 mM.
Le comportement des halophytes en condition d'irrigation à l'eau de mer a fait
l'objet de plusieurs études. À titre d'exemple, Pasternak et al. (1985) ont montré que
chez Atriplex nummularia, le rendement en phytomasse est fortement tributaire du
degré de dilution de l'eau de mer: il est de 2.89 kg de matière sèche par plante chez
les cultures irriguées à l'eau de mer diluée 4 fois (25 % eau de mer), et uniquement de
1.43 kg MS.plante-1 à 100 % d'eau de mer. Le contenu de la biomasse en cendres
minérales est élevé; il varie de 25 à 40 % de MS, en fonction des traitements et de la
saison. Le contenu en protéines brutes est de 15 à 21 % MS. Cependant, cette forte
productivité est soutenue par un rythme fréquent d'irrigation permettant d'éviter le
stress hydrique au niveau des plantes et l'accumulation de sel dans la rhizosphère.
De même, les plantes sont convenablement approvisionnées en nutriments: les
apports quotidiens de N, P, et K sont respectivement de 3500, 500 et 500 g par
hectare. Des oligo-éléments sont aussi fournis quotidiennement selon la formule de
Hoagland diluée deux fois. Des résultats similaires ont été obtenus par plusieurs
auteurs (Downton, 1982; Joshi et Mali, 1996). La croissance maximale d'Avicennia
marina est observée à l'eau de mer diluée à 40 ou 50 % lorsque l'azote est apporté sous
formes nitrique (11.14 mM) et ammoniacale (1.71 mM), le phosphore étant apporté à
0.16 mM. Cependant, pour la même disponibilité de nutriments, Rhizophora stylosa
manifeste son halophilie sur eau de mer diluée au 1 / 4 (Clough, 1984). Les résultats
de deux ans de travaux conduits sur 78 halophytes, ont montré que la plupart des
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................171

espèces testées se développent mieux sur eau de mer complète que sur eau de mer
diluée à 15 %. Un fertilisant complet "Sheffer 538" est apporté ramenant la
concentration de l'eau d'irrigation à 100 ppm d'azote (Pasternak et Nerd, 1996).
L'ensemble de ces données montre que l'irrigation à l'eau de mer diluée mais enrichie en
nutriments peut conduire à une bonne production de biomasse. Nos résultats, qui montrent
de fortes potentialités de croissance chez S. alterniflora et S. fruticosa en condition
d'irrigation à l'eau de mer diluée deux fois et enrichie en macro-nutriments selon la formule
de Hewitt (1966) et en oligo-éléments selon Arnon et Hoagland (1940), sont parfaitement
conformes à ces données.

4.2. CROISSANCE, HYDRATATION ET STATUT NUTRITIONNEL DES TISSUS

En condition de culture sur eau de mer complète ou diluée non enrichie en


nutriments, les deux halophytes expriment une croissance faible. Diverses
composantes peuvent être impliquées dans cette restriction de la croissance:
(i) La toxicité du NaCl ou son effet inhibiteur sur le processus de production
de matière sèche.
(ii) La perturbation de la nutrition hydrique.
(iii) La faible disponibilité des éléments nutritifs dans l'eau de mer liée à sa
pauvreté en nutriments ou à l'antagonisme Na+ / cations et Cl- / anions.
Compte tenu:
(i) Des fortes productions de matière sèche obtenues chez les plantes
cultivées sur eau de mer diluée deux fois et enrichie en nutriments.
(ii) De l'amélioration de la croissance des plantes cultivées eau de mer
complète par simple apport de la solution nutritive.
(iii) De l'absence de symptômes morphologiques de toxicité NaCl chez les
plantes cultivées sur eau de mer complète ou diluée (les symptômes décrits
sont plutôt liés à des déficiences minérales).
(iv) Des données relatives à la limite de tolérance des deux halophytes
(chapitres III et IV)
On déduit que la salinité ne constitue pas un facteur limitant la croissance en
condition de culture sur eau de mer diluée deux fois. Cependant, comme l'apport de
la solution nutritive améliore davantage la croissance des plantes irriguées à l'eau de
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................172

mer diluée que celles soumises à l'eau de mer complète, on déduit que la salinité de
devient un facteur limitant de la croissance en l'absence de dilution.
Outre les variations de la croissance en fonction de la dilution de l'eau de mer et
de son enrichissement par les nutriments, nous avons noté des modifications de
l'hydratation des tissus. Ces dernières rappellent parfaitement celles de la croissance
pondérale. Il s'ensuit que la restriction de l'alimentation hydrique limiterait la
croissance des plantes lorsqu'elles sont cultivées sur eau de mer. Nous avons observé
dans le chapitre III une succulence des parties aériennes de Suaeda fruticosa cultivées
à 100 et à 300 mM NaCl. Dans la présente étude, les teneurs des parties aériennes des
cultures conduites sur eau de mer diluée deux fois (275 mM NaCl), sont
significativement plus faibles que celles des plantes témoins. Par contre,
l'enrichissement de l'eau de mer diluée en nutriments ramène l'hydratation des tissus
à un niveau supérieur que celui des plantes témoins. Il apparaît, ainsi, que pour un
même niveau de salinité, la succulence ne s'exprime qu'en condition d'une
disponibilité adéquate en nutriments. Ce résultat pourrait s'expliquer par le fait que
l'eau de mer diluée ou non ne peut pas couvrir les besoins de la succulence. Cette
dernière correspond à la mise en place de tissus formés de grandes cellules à paroi
mince et à large contenu vacuolaire (Binet, 1999). La déshydratation des tissus a été
observée chez des plantes soumises à des déficiences nutritionnelles (Kats et al., 1986;
Bouraoui, 1995). Elle indiquerait que la restriction de l'approvisionnement des
plantes en certains nutriments réduit leur capacité d'ajuster le potentiel osmotique de
leurs cellules ayant pour conséquence une inhibition de leur alimentation hydrique.
Ces résultats suggèrent qu'en dépit de leur capacité d'utiliser le sel pour l'ajustement
osmotique (cas de Suaeda fruticosa), ces deux halophytes exigent d'autres nutriments
pour ajuster le potentiel osmotique. Nous avons observé dans le chapitre IV que
S. alterniflora utilise en priorité K+ pour cette fonction.
Les relations entre les biomasses des plantes et le contenu de leurs parties
aériennes en azote réduit, en phosphore, en potassium, en calcium et en magnésium
sont représentées dans les figures 6.10 à 6.14. Chez S. fruticosa, on note une
corrélation très hautement significative entre la croissance de la plante entière et la
teneur des parties aériennes en azote (Fig. 6.10). Chez cette halophyte, les cultures
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................173

sur eau de mer diluée ou non présentent les niveaux les plus bas de croissance et
d'accumulation de l'azote réduit. L'apport de la solution nutritive dans l'eau de mer
augmente fortement la croissance et les teneurs en azote. Il en ressort que l'azote
constitue un nutriment limitant dans l'eau de mer diluée deux fois. Le comportement
des plantes cultivées sur eau de mer complète ne contredit pas cette hypothèse, la
croissance étant fortement limitée par le sel dans ces conditions de culture; il en
résulte un enrichissement des tissus en azote. Chez S. alterniflora, on note une même
teneur des parties aériennes pour des niveaux très différents de croissance. Ce
résultat s'explique essentiellement par le fait que chez cette plante la croissance est
strictement déterminée par le prélèvement et l'assimilation de l'azote. Ces deux
processus sont fortement limités par la faible disponibilité de l'azote (cf. Tab. 6.1)
chez les plantes cultivées sur eau de mer complète ou diluée, mais non enrichie en
solution nutritive, et probablement par les interactions entre Cl- et NO 3 - chez les
plantes cultivées sur eau de mer complète et additionnée de solution nutritive.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

20,0
4,5 Témoin
E/2+T
MS, g . plante -1

E/2+T
Témoin 15,0

3,0

10,0
E/2

1,5 E+T
5,0
E
E/2 E+T
r = 0.885 *** r = 0.781 **
0 E 0
1,0 2,0 3,0 1,8 2,0
Nréd., mmol . g -1 MS parties aériennes

Figure 6.10. Relation entre la production de matière sèche (MS) et


l'accumulation de l'azote réduit dans les parties aériennes de Suaeda fruticosa et
de Spartina alterniflora, en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son
enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................174

Les mêmes comportements sont retrouvés quand on examine les relations entre la
croissance des plantes et l'accumulation de Pi dans les parties aériennes des deux
halophytes (Fig. 6.11).

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

20,0
4,5 Témoin
E/2+T
MS, g . plante -1

E/2+T
Témoin 15,0

3,0
10,0
E/2
E+T
1,5
E 5,0
E/2 E+T
E r = 0.750 *
r = 0.798 ** 0
0 0,1 0,2 0,3 0,12 0,15 0,18

Pi, mmol . g -1 MS parties aériennes

Figure 6.11. Relation entre la production de matière sèche (MS) et


l'accumulation de Pi dans les parties aériennes de Suaeda fruticosa et de
Spartina alterniflora, en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son
enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Cette analyse suggère que pour les deux halophytes, l'azote et le phosphore limitent la
croissance de S. fruticosa et de S. alterniflora en condition d'irrigation à l'eau de mer.
Chez S. alterniflora une corrélation positive et très hautement significative entre la
production de biomasse et l'accumulation de K+ dans les parties aériennes est
observée (Fig. 6.12). Cette relation stricte indique que les faibles productions de
biomasse sur eau de mer complète ou diluée est liée à une incapacité des plantes à
assurer une alimentation adéquate des parties aériennes en K+. Ceci ne pourrait pas
traduire, cependant, une pauvreté de l'eau de mer en K+. D'ailleurs, le tableau 6.1
montre que la concentration de l'eau de mer en K+ est de 14.83 mM; les solutions
nutritives de base en contiennent en moyenne que 8 mM. Il apparaît ainsi que K+ est
présent à des doses convenables dans l'eau de mer. Cependant, son prélèvement par
S. alterniflora peut être limité par Na+. Cette compétition est forte sur eau de mer
complète ce qui conduit à des niveaux d'accumulation bas en dépit de la croissance
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................175

fortement amoindrie. L'antagonisme devient moins prononcé sur eau de mer diluée
et / ou additionnée de solution nutritive conduisant à une amélioration de la
croissance et de la teneur en K+.
L'antagonisme Na+ / K+ est bien illustré chez S. fruticosa. Les plantes témoins
produisent pratiquement la même quantité de biomasse que les plantes cultivées sur
eau de mer diluée deux fois et enrichie en nutriments. Les teneurs en K+ chez ces
dernières ne représentent que le tiers de celle des plantes témoins. Pourtant, leur
milieu contient nettement plus de K+ que celui des plantes témoins (12.6 contre
5.2 mM). A la lumière de ces données, il apparaît que K+ peut limiter la croissance
des deux halophytes notamment en condition de salinité sévère (eau de mer non
diluée). Ce caractère limitant s'exprimerait plus chez les plantes incapables d'utiliser
Na+ pour l'ajustement osmotique (cas de S. alterniflora).

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

20,0
4,5 E/2+T Témoin
MS, g . plante -1

Témoin
E/2+T
15,0

3,0

E/2 10,0

1,5
E+T
5,0
E
E+T
E/2 r = 0.714 * r = 0.949 ***
E 0
0 1,0 2,0 3,0 0,6 0,9 1,2

K+, mmol . g -1 MS parties aériennes

Figure 6.12. Relation entre la production de matière sèche (MS) et


l'accumulation de K+ dans les parties aériennes de Suaeda fruticosa et de
Spartina alterniflora en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son
enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

L'analyse des relations entre la croissance de la plante entière et les teneurs en


cations bivalents chez S. fruticosa, montre des corrélations inverses significative et
hautement significative respectivement pour Ca2+ et Mg2+ (Fig. 6.13 et 6.14): les
plantes ayant les teneurs les plus basses en ces cations expriment les croissances les
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................176

plus élevées et inversement. Ce comportement indique que sur eau de mer complète
ou diluée la croissance est plus limitée que le prélèvement de Mg2+ ou de Ca2+
conduisant à un enrichissement des tissus en ces cations.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

20,0
4,5 Témoin
E/2+T
Témoin
MS, g . plante -1

E/2+T
15,0

3,0

E/2 10,0

E+T
1,5
5,0
E
E+T E/2
r = 0.834 ** E r = 0.673 *
0
0 0,15 0,30 0,10 0,20
Ca2+, mmol . g -1 MS parties aériennes

Figure 6.13. Relation entre la production de matière sèche (MS) et


l'accumulation de Ca2+ dans les parties aériennes de Suaeda fruticosa et de
Spartina alterniflora en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son
enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Chez S. alterniflora, une relation positive significative existe entre la croissance et


les teneurs des parties aériennes en Ca2+, alors qu'elle n'est pas significative pour
Mg2+. Ceci montre que la croissance des plantes est tributaire de leur aptitude à
assurer une alimentation des parties aériennes en Ca2+. Cependant, l'examen du
tableau 6.1 montre que la concentration de l'eau de mer en Ca2+ dépasse nettement
celle des solutions nutritives couramment utilisées. Ces résultats suggèrent que Ca2+
ne limite pas la croissance des plantes sur eau de mer.
Chapitre VI. CROISSANCE ET COMPORTEMENT SUR EAU DE MER ..............................................................177

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

20,0
4,5 Témoin
E/2+T
MS, g . plante -1

Témoin 15,0
E/2+T
3,0

E/2 10,0

E+T
1,5
5,0
E
E/2 E+T r = 0.924 ***
E r = 0.504 NS
0
0 0,20 0,25 0,175 0,200
Mg2+, mmol . g -1 MS parties aériennes

Figure 6.14. Relation entre la production de matière sèche (MS) et


l'accumulation de Mg2+ dans les parties aériennes de Suaeda fruticosa et de
Spartina alterniflora en fonction de la dilution de l'eau de mer et de son
enrichissement en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions.
Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

5. CONCLUSION

La croissance des plantes sur eau de mer complète ou diluée est fortement limitée.
Le dosage des macro et des oligo-éléments dans l'eau de mer et l'analyse des
relations entre la production de biomasse et les teneurs des tissus en nutriments
suggèrent que l'azote et le phosphore peuvent sévèrement limiter la croissance des
plantes en condition d'irrigation à l'eau de mer. La validité de cette hypothèse sera
vérifiée dans le chapitre suivant.
CHAPITRE VII

RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANT LA


CROISSANCE DE Suaeda fruticosa ET Spartina alterniflora
EN CONDITIONS DE CULTURE SUR EAU DE MER

RESUME

La présente étude a pour objectif d'identifier les nutriments susceptibles de limiter


la croissance de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en condition d'irrigation à
l'eau de mer. Après enracinement des boutures, les plantules sont réparties en 5 lots
homogènes. Les trois premiers lots de plantes sont cultivés sur eau de mer diluée
deux fois et enrichie en azote ou en phosphore ou en ces deux nutriments. Les deux
autres lots sont des témoins cultivés soit sur eau de mer diluée deux fois, soit sur
50 % eau de mer additionnée d'une solution nutritive complète. Au bout de 49 et 70
jours de traitement (respectivement pour Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora), les
plantes sont récoltées. Les mesures ont porté sur la croissance pondérale et le
contenu des tissus en eau, en azote, en phosphore, en sucres solubles et en amidon.
Les résultats montrent que, comparativement aux plantes cultivées sur eau de mer
en l'absence d'apport supplémentaire de nutriments, l'addition de N ou de P stimule
significativement la croissance des plantes. Cependant, ces effets s'expriment
davantage pour le premier que le second nutriment. Par ailleurs, l'apport simultané
de N et de P ramène la production de matière sèche à un niveau égale ou supérieur à
celui des plantes recevant une solution nutritive complète dans leur milieu.
L'ensemble des résultats montre que l'azote et à un degré moindre le phosphore sont
les seuls nutriments susceptibles de limiter la croissance de Spartina alterniflora et de
Suaeda fruticosa en condition de culture sur eau de mer. L'hypothèse émise au
chapitre précédent relative au caractère limitant de l'eau de mer est ainsi confirmée.
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................179

1. INTRODUCTION

Les résultats du chapitre précédent nous ont montré que Spartina alterniflora et
Suaeda fruticosa sont capables d'exprimer une bonne activité de croissance en
condition d'irrigation à l'eau de mer diluée deux fois lorsque cette dernière est
enrichie avec une solution nutritive. Les analyses des relations entre la croissance des
plantes et les quantités de nutriments ou leur niveau d'accumulation dans les
organes photosynthétiques suggèrent que l'azote et le phosphore seraient les
nutriments qui limitent la production de biomasse chez les plantes cultivées sur eau
de mer. Le présent chapitre se propose de vérifier la validité de cette hypothèse.

2. PROTOCOLE EXPERIMENTAL

Les jeunes plants de Spartina alterniflora et de Suaeda fruticosa sont obtenus par
bouturage selon les techniques décrites précédemment. Après une phase de
prétraitement de 30 ou 40 jours (respectivement pour S. fruticosa et S. alterniflora), les
plantules de chaque espèce sont réparties en 5 lots homogènes de 10 plantes chacun.
Trois lots de plantes sont cultivés sur l'eau de mer diluée deux fois et ceci en
aquaculture stricte pour Suaeda fruticosa ou apportée en irrigation pour Spartina
alterniflora. Cette eau est enrichie soit en azote (14 mM, apporté sous forme de
NH 4 NO 3 ) ou en phosphore (2 mM, apporté sous forme de KH 2 PO 4 ) ou encore ou en
ces deux nutriments selon les traitements. Les deux autres lots de plantes sont des
témoins: les plantes sont soit cultivées sur eau de mer diluée deux fois en l'absence
de tout apport supplémentaire de nutriments ou en présence de 50 % eau de mer
enrichie de la solution nutritive complète selon la formule de Hewitt (1966). La
composition de ces différents milieux de culture en macro et micro-éléments est
présentée dans le tableau 7.1.
Les cultures sont conduites sous serre vitrée. Deux récoltes sont effectuées, la
première au début des traitements et la seconde est effectuée quand les effets des
traitements apparaissent clairement: au bout de 49 jours pour Suaeda fruticosa et 70
jours pour Spartina alterniflora. Les mesures ont porté sur la production de matière
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................180

sèche et les contenus des tissus en eau, en azote, en phosphore, en sucres solubles et
en amidon. Le protocole expérimental est schématisé dans la figure 7.1.

Tableau 7.1. Composition en macro et oligo-éléments de l'eau de mer diluée


deux fois dans l'eau distillée (Suaeda fruticosa) ou dans l'eau de ville (Spartina
alterniflora). L'enrichissement de l'eau de mer / 2 est réalisé avec une solution
nutritive de base (T), ou 14 mM de N, ou 2 mM de P, ou 14 mM de N et 2 mM
de P.

50 % eau de mer 50 % eau de mer


T
Suaeda Spartina
SO 4 2- 1.50 18.23 19.17

PO 4 2- 1.90 0.00 0.14


NO 3 - 8.50 0.03 0.22
Macro- Cl- ----- 289.12 294.22
éléments Mg2+ 1.50 22.64 23.58
(mM) Ca2+ 3.50 13.75 16.00
K+ 5.20 7.42 8.85
NH 4 + 2.00 0.00 0.07
Na+ ----- 265.12 270.22

Fe 3.00 0.49 0.49

Mn 0.50 0.04 0.04

Cu 0.04 0.55 0.55


Zn 0.05 0.03 0.03
Oligo- B 0.50 2.44 2.44
éléments Mo 0.02 ----- -----
(ppm) As ----- 4.07 4.07
Pb ----- 0.25 0.25
Cd ----- 0.09 0.09
Co ----- 0.35 0.35
Ni ----- 0.09 0.09
C.E. (mS.cm-1) 2.7 23.3 24.2
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................181

Eau de mer / 2
3

Eau de mer / 2 + P
3

Témoin Eau de mer / 2 + N


1 2 3

Eau de mer / 2 + P + N
3

Eau de mer / 2 + T
3

Prétraitement Traitements
Suaeda fruticosa
0 30 79
Spartina alterniflora
0 40 110
Jours
Figure 7.1. Protocole expérimental.
T: Macro et oligo-éléments additionnés. N: azote (14 mM). P: phosphore
(2 mM).
1. Bouturage: Des pousses feuillées prélevées sur des plantes mères sont mises
à enraciner sur milieu témoin.
2. Récolte de départ, repiquage des plantules enracinées et début du
traitement.
3. Récolte finale: les plantes sont séparées en parties aériennes et en racines.

3. RESULTATS

3.1. ASPECT DES PLANTES

Les photos 7.1 et 7.2 illustrent l'aspect des plantes en fin de traitement. Les plantes
cultivées directement ou irriguées à l'eau de mer diluée deux fois en l'absence
d'apport supplémentaire de nutriments ont un développement réduit avec une
chlorose affectant spécifiquement les feuilles âgées. Sans atteindre le niveau de
croissance des plantes témoins cultivées sur eau de mer diluée deux fois et enrichie
en solution nutritive complète, les plantes ayant reçu uniquement l'azote dans leur
milieu manifestent une bonne activité de croissance en l'absence de chlorose.
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................182

Photo 7.1. Suaeda fruticosa après 49 jours de traitement. La culture est réalisée
en aquaculture stricte sur eau de mer / 2 et eau de mer / 2 enrichie en T
(nutriments), N, P, ou N + P (de gauche à droite).

Photo 7.2. Spartina alterniflora après 70 jours de traitement. La culture est


réalisée sur sable inerte irrigué par sur eau de mer / 2 et eau de mer / 2
enrichie en T (nutriments), P, N, ou N + P (de gauche à droite).

L'apport du phosphore seul ne conduit ni à une forte stimulation de la croissance


des plantes par rapport à leurs homologues privés de tout apport supplémentaire de
nutriments ni encore à la disparition des symptômes chlorotiques. Ces observations
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................183

suggèrent que l'azote et un degré nettement moindre le phosphore, limitent la


croissance des plantes en condition de culture sur eau de mer. D'ailleurs, l'apport
simultané des deux nutriments ramène la croissance des plantes à un niveau
dépassant même celui des plantes recevant la solution nutritive complète.

3.2. CROISSANCE PONDERALE

Les variations de la croissance pondérale sont conformes aux observations


morphologiques (Fig. 7.2). Chez les deux halophytes, les masses les plus faibles de la
matière sèche sont mesurées chez les plantes cultivées sur l'eau de mer non enrichie
en nutriments. Néanmoins, il serait important de noter que même dans ces
conditions de culture, les plantes expriment une certaine capacité de production de
biomasse. Les poids de matière sèche des plantes privées de tout apport
supplémentaire de nutriments sont nettement plus élevés à la récolte finale qu'à la
récolte initiale. Cette propriété apparaît particulièrement chez Spartina alterniflora.
Pour ce qui est des autres traitements, on voit clairement que l'apport unique de
l'azote ramène la production de biomasse à des niveaux très proches de ceux des
plantes témoins cultivées sur une solution nutritive complète préparée dans 50 % eau
de mer. Cette caractéristique apparaît d'une manière moins évidente chez Suaeda
fruticosa que chez Spartina alterniflora. Ceci suggère qu'un second nutriment, autre
que l'azote, limite la croissance de la première espèce. D'ailleurs, l'apport de
phosphore améliore significativement la croissance de Suaeda fruticosa et n'a pas
d'effet significatif chez Spartina alterniflora.
Globalement, l'amélioration de la croissance induite par l'enrichissement de l'eau
de mer en nutriments est nettement plus prononcée avec l'azote qu'avec le
phosphore. Chez les deux halophytes, l'apport simultané de ces deux éléments
conduit à une production de matière sèche similaire à celle mesurée chez les plantes
recevant la solution nutritive complète dans leur milieu. Ces données montrent que
la croissance des plantes sur eau de mer est limitée principalement par l'azote et à un
degré nettement moindre par le phosphore. Ce dernier ne semble devenir limitant
que lorsque la limitation azotée est levée, ce qui explique la plus forte production de
matière sèche chez les plantes recevant N et P par comparaison à leurs homologues
approvisionnés uniquement en azote.
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................184

Figure 7.2. Variations de la production de matière sèche (MS) de Suaeda


fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la nature des nutriments
apportés dans l'eau de mer diluée deux fois. TD: témoin départ; O: eau de
mer / 2; +P, +N, +P+N, et +T: 50 % eau de mer enrichie respectivement par
2 mM de P, 14 mM de N, 2 mM de P + 14 mM de N et une solution nutritive
complète. Les chiffres portés sur l'histogramme indiquent les rapports de
matière sèche R / PA. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au
seuil de 5 %.

La figure 7.2 montre qu'indépendamment des traitements, Spartina alterniflora


produit nettement plus de matière sèche que Suaeda fruticosa. Ce résultat est lié à une
meilleure vigueur initiale des plantes et à une durée de traitement plus importante
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................185

chez la première que la seconde espèce. En effet, l'examen de la CMR (Tab. 7.2)
montre une meilleure activité de croissance chez Suaeda fruticosa que chez Spartina
alterniflora. L'analyse des variations de ce paramètre conduit au même résultat
concernant les nutriments susceptibles de limiter la croissance sur eau de mer diluée
deux fois.

Tableau 7.2. Variations de la croissance moyenne relative (CMR) de Suaeda


fruticosa et de Spartina alterniflora cultivées sur 50 % eau de mer enrichie ou
non en nutriments minéraux. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

O 0.0340 ± 0.0072 0.0254 ± 0.0110


+P 0.0506 ± 0.0077 0.0248 ± 0.0107
+N 0.0698 ± 0.0140 0.0310 ± 0.0102
+ N+P 0.0819 ± 0.0084 0.0361 ± 0.0102
+T 0.0841 ± 0.0065 0.0320 ± 0.0095

Les valeurs du rapport de matière sèche R / PA sont généralement plus élevées


chez les plantes cultivées sur 50 % eau de mer non enrichie en nutriments (Fig. 7.2).
Ce développement préférentiel des racines confirme le caractère limitant de l'eau de
mer. Chez Suaeda fruticosa, l'apport de N ou de P ou de N et P diminue
systématiquement ce rapport, le ramenant à un niveau proche de celui des plantes
recevant tous les nutriments dans leur milieu. Chez Spartina alterniflora, l'apport de P
n'a aucun effet sur les modifications de la répartition de la matière sèche entre les
parties aériennes et les racines. Ces modifications semblent induites principalement
par l'azote.

3.3. HYDRATATION DES TISSUS

Chez les deux halophytes et indépendamment de la nature des organes (parties


aériennes ou racines), l'apport de nutriments conduit, dans tous les cas, à une
augmentation de la teneur en eau (Tab. 7.3). Cet effet qui s'exprime davantage dans
les racines que dans les parties aériennes, semble être induit particulièrement par
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................186

l'azote. La faible hydratation des plantes cultivées sur eau de mer diluée deux fois et
non enrichie en nutriments a été également observée dans les expériences
précédentes (cf. chapitre VI). Elle suggère qu'en condition de limitation nutritionnelle
(eau de mer), les plantes ajustent leur alimentation hydrique de façon à maintenir des
niveaux adéquats de la concentration en nutriments dans leurs tissus. D'autre part,
une différence très nette des teneurs en eau des parties aériennes en faveur de
S. fruticosa a été observée. Ceci pourrait s'expliquer par une succulence des feuilles de
S. fruticosa et une sécrétion de gouttelettes d'eau très chargées en NaCl chez
S. alterniflora.

Tableau 7.3. Variations de la teneur en eau dans les parties aériennes et les
racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction de la nature des
nutriments apportés dans l'eau de mer diluée deux fois. Moyennes de 10
répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora


PA R PA R
O 4.4 ± 0.4 5.1 ± 0.2 2.7 ± 0.6 5.6 ± 0.7
+P 5.2 ± 0.4 5.5 ± 0.5 2.8 ± 0.2 6.7 ± 1.1
+N 5.4 ± 0.5 7.6 ± 1.8 2.9 ± 0.2 7.8 ± 0.9
+ N+P 5.9 ± 0.6 7.5 ± 1.0 2.9 ± 0.2 7.3 ± 1.1
+T 5.6 ± 0.4 8.3 ± 1.2 3.4 ± 0.2 7.7 ± 0.7

3.4. STATUT AZOTE

Les racines et les parties aériennes des deux halophytes se développant sur l'eau
de mer diluée deux fois ont les teneurs les plus basses en azote total (Fig. 7.3). Cette
situation ne résulte pas évidemment d'une dilution de l'azote par la matière sèche.
Nous venons de voir que les plantes cultivées dans ces conditions manifestent les
plus faibles potentialités de croissance. L'apport de P n'améliore pas de manière
significative la teneur des tissus en azote. Cependant, comme la croissance des
plantes a été légèrement augmentée dans ce traitement, on déduit que l'apport de P
améliore l'utilisation des ressources azotées disponibles à faible quantité dans l'eau
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................187

de mer diluée deux fois. L'apport de N ou de N et P ou encore de la solution nutritive


complète conduit à un enrichissement des tissus en azote aussi bien dans les racines
que dans les parties aériennes, en dépit de la forte amélioration de la croissance. Ce
résultat montre que lorsque l'azote devient disponible dans l'eau de mer, les plantes
l'absorbent et l'utilisent pour la croissance. Les faibles teneurs en azote, chez les
plantes cultivées sur 50 % eau de mer, sont donc liées à un manque de ce nutriment
dans l'eau de mer.

Figure 7.3. Variations des teneurs en azote total (Nréd. + NO 3 -) des parties
aériennes et des racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction
de la disponibilité des nutriments dans l'eau de mer diluée deux fois.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

3.5. PHOSPHORE

Les plantes cultivées sur l'eau de mer diluée deux fois et additionnée uniquement
de phosphore présentent les teneurs les plus élevées en Pi (Fig. 7.4). Comme ces
plantes expriment de faibles potentialités de croissance, on déduit que le phosphore
apporté dans l'eau de mer / 2 a été utilisé principalement pour l'enrichissement des
tissus. Par ailleurs, l'apport de l'azote seul conduit à une forte stimulation de la
croissance avec des niveaux d'accumulation de Pi identiques (cas de Suaeda fruticosa)
ou dépassant (cas de Spartina alterniflora) ceux des plantes cultivées sur 50 % eau de
mer non enrichie en nutriments. L'apport de N et P ou de la solution nutritive
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................188

complète a conduit à des niveaux de croissance similaires (cas de Spartina alterniflora)


ou dépassant légèrement (cas de Suaeda fruticosa) ceux des plantes recevant
uniquement de l'azote dans leur milieu. Comme les teneurs en Pi ont été fortement
augmentées, on déduit que le phosphore apporté dans le milieu de culture des
plantes recevant également de l'azote a été utilisé plus pour l'enrichissement des
tissus que pour la production de biomasse.
En résumé, les variations des teneurs en Pi confirment le caractère peu limitant du
phosphore dans l'eau de mer.

Figure 7.4. Variations des teneurs en phosphore inorganique des parties


aériennes et des racines de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora en fonction
de la disponibilité des nutriments dans l'eau de mer diluée deux fois.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

4. DISCUSSION

La présente étude confirme l'aptitude de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora à


exprimer leurs potentialités maximales de croissance (comme en témoignent les
valeurs élevées de leur croissance moyenne relative) en condition de culture sur eau
de mer diluée deux fois. Cependant, cette propriété dépend de l'enrichissement de
cette eau de mer en azote et à un degré nettement moindre en phosphore. Ces
résultats indiquent une forte disponibilité des autres macro et micro-nutriments dans
l'eau de mer. Nos résultats sont, en effet, en accord avec des données montrant que
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................189

l'eau de mer contient à des doses convenables 11 à 13 éléments indispensables pour


la croissance et le développement des plantes (Shay, 1990). Les travaux de Joshi et
Mali (1996) sur Avicennia marina et de Pasternak et al. (1985) sur Atriplex numularia,
ont montré que l'apport de l'azote à l'eau de mer est indispensable pour une forte
production de biomasse. Plusieurs résultats acquis dans notre étude confirment le
caractère limitant de l'azote et un degré nettement moindre du phosphore dans l'eau
de mer.

Suaeda fruticosa
MS parties aériennes, g . plantes -1

Spartina alterniflora 30,0


5,0

E/2 + N + P E/2 + T E/2 + N + P


4,0

20,0
3,0 E/2 + T
E/2 + N
E/2
E/2 + N
2,0
E/2 + P 10,0

1,0
E/2 + P
E/2 r = 0,994 *** r = 0,981 ***
0
0 5 10 15 10 20 30 40 50

Ntotal des parties aériennes, mmol . plantes -1

Figure 7.5. Relation entre la production de matière sèche (MS) des parties
aériennes et les quantités d'azote total qui leur sont allouées chez Suaeda
fruticosa et Spartina alterniflora en fonction de la disponibilité des nutriments
dans l'eau de mer diluée deux fois. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

La figure 7.5 (croissance des parties aériennes en fonction des quantités d'azote)
montre une corrélation très hautement significative entre la production de biomasse
au niveau des parties aériennes et les quantités d'azote assimilées. Cette propriété,
qui s'exprime chez les deux halophytes, montre que la croissance est strictement
déterminée par le prélèvement d'azote. Ainsi, les plantes cultivées sur 50 % eau de
mer non enrichie en nutriments ou additionnée uniquement de phosphore
présentent les niveaux les plus bas de croissance et d'assimilation de l'azote. Des
corrélations significative (S. alterniflora) et très hautement significative (S. fruticosa)
sont également retrouvée entre les quantités de Pi et la croissance des parties
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................190

aériennes (Fig. 7.6). Cependant, une analyse détaillée du comportement de cette


plante montre 3 types de comportements. Le premier concerne les plantes cultivées
sur 50 % eau de mer additionnée d'azote et de phosphore ou d'une solution nutritive
complète.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora


MS parties aériennes, g . plantes -1

5,0
30,0
E/2 + T E/2 +
4,0 N+P E/2 + N + P

3,0 E/2 + N E/2 + T 20,0

E/2 + N E/2
2,0 E/2 + P
10,0

1,0 E/2 + P

E/2 r = 0,945 *** r = 0,653 *


0
0 0,25 0,50 0,75 1,0 1,0 2,0 3,0 4,0 5,0

Pi des parties aériennes, mmol . plantes -1

Figure 7.6. Relation entre la production de matière sèche (MS)des parties


aériennes et leur contenu en phosphore inorganique chez Suaeda fruticosa et
Spartina alterniflora en fonction de la nature des éléments minéraux apportés
dans l'eau de mer diluée deux fois. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

Ces plantes produisent le maximum de matière sèche avec les quantités les plus
élevées en Pi, qui constitue une fraction de réserve non incorporé aux composés
organiques. Il semble que lorsque le phosphore est apporté à des doses convenables,
Suaeda fruticosa exprime une forte absorption de ce nutriment couvrant ainsi les
besoins d'une croissance rapide et permettant une mise en réserve de ce nutriment.
Le deuxième comportement concerne les plantes cultivées sur 50 % eau de mer
additionnée de N ou de P. Les deux types de plantes présentent les mêmes quantités
de Pi avec des potentialités de croissance nettement plus élevées chez les premières
que chez les secondes. Ce résultat indique qu'en condition non limitante en azote la
plante semble utiliser le phosphore en priorité pour la croissance ayant pour
conséquence une dilution de Pi par la matière sèche. Nous avons vu précédemment
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................191

que les teneurs en Pi sont nettement plus faibles chez les plantes recevant l'azote que
leurs homologues cultivés sur 50 % eau de mer enrichie en phosphore.
Le troisième type de comportement est retrouvé chez les plantes témoins cultivées
sur eau de mer diluée deux fois. Ces dernières prélèvent le moins de phosphore et
manifestent les niveaux les plus bas de croissance. Comme le phosphore disponible
dans l'eau de mer est suffisant pour soutenir une bonne activité de croissance (cf.
Fig. 7.2, traitement: + N) on déduit qu'en condition limitante en azote la plante ne
met pas en réserve Pi en dépit de sa présence dans le milieu. D'ailleurs, les teneurs en
Pi sont les plus faibles chez ces plantes (cf. Fig. 7.4). Ces résultats suggèrent que
l'absorption de P est fortement amoindrie en l'absence d'azote.
La relation entre la croissance des parties aériennes et les quantités accumulées de
Pi est moins évidente chez Spartina alterniflora. L'amplitude des variations des
quantités en Pi est plus grande que celle de la croissance, traduisant une aptitude de
cette halophyte à croître avec des teneurs différentes en Pi.
La figure 7.7 montre que la fraction nitrique est nettement plus représentée dans les
parties aériennes des plantes témoins que celles recevant un ou plusieurs nutriments
dans leur milieu. Ce résultat montre qu'en l'absence d'apport supplémentaire de
nutriments, les plantes mettent en réserve une fraction de l'azote prélevé dans l'eau
de mer diluée deux fois. Ce résultat ne pourrait pas s'expliquer par un effet
inhibiteur de la salinité de l'eau de mer sur la réduction du NO 3 - car plusieurs
données suggèrent que l'assimilation de NO 3 - ne serait pas perturbée dans ces
conditions de salinité modérée (Aslam et al., 1984; Soltani et al., 1993). La
compartimentation de Na+ dans la vacuole et la nitrate réductase dans le cytoplasme,
permet une bonne activité réductrice chez les plantes soumises au stress salin (Wyn
Jones, 1981).
Compte tenu, de la concentration très faible de l'eau de mer en formes assimilables
d'azote (les deux fractions ammoniacale et nitrique ne dépassent guère 100 µM) et de
la forte stimulation de la croissance obtenue en apportant uniquement de l'azote dans
l'eau de mer, il est permis de conclure que l'azote est un nutriment limitant la
croissance des plantes. Cependant, la forte proportion de NO 3 - chez des plantes
cultivées exclusivement sur l'eau de mer diluée deux fois soulève une contradiction.
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................192

Figure 7.7. Variations des proportions d'azote réduit et des nitrates dans les
parties aériennes chez Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora en fonction de la
disponibilité des nutriments dans l'eau de mer diluée deux fois. Moyennes de
10 répétitions.

Comment explique -t-on une mise en réserve de l'azote sous forme de NO 3 - alors
que le milieu de culture en est très pauvre?
Ce résultat suggère qu'il y a un ou plusieurs autres facteurs qui seraient également
impliqués dans la réduction de la croissance. L'examen des variations des teneurs des
tissus en sucres solubles et en amidon (Fig. 7.8) montre que les plantes cultivées en
l'absence de tout apport supplémentaire de nutriments présentent les teneurs les plus
élevées en ces composés. L'amélioration de la croissance obtenue par addition d'un
ou plusieurs nutriments est associée à une diminution des teneurs en sucres solubles
et en amidon dans les parties aériennes. Ces résultats suggèrent que l'activité
photosynthétique des plantes témoins, privées d'apport supplémentaire de
nutriments, fournit plus d'assimilats que les besoins de la croissance. Les capacités
photosynthétiques ne semblent pas donc être affectées en condition de culture sur
l'eau de mer diluée à 50 %.
L'accumulation relativement plus importante de NO 3 - chez les plantes résulterait
d'une faible production de squelettes carbonés qui servent à la fixation du NH 4 +,
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................193

produit de la réduction du NO 3 - (Heller et al., 2000). En effet, les niveaux bas


d'accumulation tissulaire de Pi favoriserait la voie respiratoire alternative,
caractérisée par une faible production d'ATP et des acides cétoniques (Ribet et
Drevon, 1995).

Figure 7.8. Variations des teneurs des parties aériennes en sucres solubles
(exprimés en glucose) et en amidon chez Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora
en fonction de la disponibilité des nutriments dans l'eau de mer diluée deux
fois. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

D'ailleurs, l'examen des variations de l'efficacité d'utilisation de l'azote (Tab. 7.4)


montre que ce paramètre est légèrement plus élevé chez les plantes recevant
uniquement du phosphore dans leur milieu par rapport aux plantes témoins
cultivées sur eau de mer diluée deux fois. L'apport de P dans le milieu de culture
conduirait à l'accumulation de ce nutriment dans les tissus, condition plus favorable
pour la biosynthèse des composés utilisant simultanément le phosphore et l'azote
réduit ce qui explique la diminution de la fraction nitrique chez ces plantes
(Theodorou et Plaxton, 1993). L'apport de l'azote ou de l'azote et du phosphore ou
encore d'une solution nutritive complète permet de soutenir la croissance et de
reconstituer les réserves azotées ce qui explique la diminution de l'efficacité
d'utilisation de l'azote par la suite.
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................194

Tableau 7.4. Variations de l'efficacité d'utilisation de l'azote total chez Suaeda


fruticosa et Spartina alterniflora en fonction de la disponibilité des nutriments
dans l'eau de mer diluée deux fois. Ce paramètre est exprimé en g MS.mM-1
azote total. O: eau de mer diluée deux fois, +P, +N, +P+N, et +T: 50 % eau de
mer enrichie respectivement par 2 mM de P, 14 mM de N, 2 mM de P + 14 mM
de N et la solution nutritive de base. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles
de confiance au seuil de 5 %.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

O 1.047 ± 0.081 0.960 ± 0.067


+P 1.121 ± 0.046 1.088 ± 0.126
+N 0.392± 0.043 0.634 ± 0.033
+ N+P 0.393 ± 0.032 0.638 ± 0.034
+T 0.363 ± 0.018 0.604 ± 0.052

L'apport de P améliore également la performance des systèmes d'absorption de


l'azote (Tab. 7.5).

Tableau 7.5. Variations de l'efficacité d'absorption de l'azote total (mM azote


total.g MS-1 racinaire) chez Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora en fonction de
la nature des nutriments minéraux apportés dans l'eau de mer diluée deux
fois. Ce paramètre est déterminé en ramenant les prélèvements totaux d'azote
à la masse moyenne des systèmes racinaires. O: eau de mer diluée deux fois,
+P, +N, +P+N, et +T: 50 % eau de mer enrichie respectivement par 2 mM de P,
14 mM de N, 2 mM de P + 14 mM de N et la solution nutritive de base.
Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

O 7.0 ± 0.6 10.5 ± 1.2


+P 10.6 ± 1.3 9.38 ± 1.1
+N 50.7 ± 9.2 23.2 ± 2.2
+ N+P 71.1 ± 8.9 24.4 ± 1.5
+T 75.2 ± 8.5 23.5 ± 1.0
Chapitre VII. RECHERCHE DES NUTRIMENTS LIMITANTS ............................................................................195

Cet effet apparaît particulièrement quand ces systèmes ne sont plus limités par
leur substrat (apport de l'azote ou de N et P ou de la solution nutritive complète).
Nos résultats montrent également que les efficacités d'absorption d'azote sont
nettement plus élevées chez S. fruticosa que chez S. alterniflora. Cet écart s'expliquerait
par:
(i) Une plus forte vitesse de croissance chez Suaeda fruticosa ayant pour
conséquence une plus grande exigence nutritionnelle.
(ii) Une différence d'âges des racines: ces organes sont plus âgés chez
Spartina alterniflora et serait moins équipés en systèmes de transport.
(iii) Une meilleure disponibilité de l'azote pour S. fruticosa (cultivée en
aquaculture) que pour S. alterniflora (cultivée sur sable inerte).

5. CONCLUSION

En résumé, notre analyse montre que l'azote est le principal élément limitant dans
l'eau de mer. Cette limitation est liée à la pauvreté de l'eau de mer en formes
assimilables d'azote d'une part, et à l'absorption et l'utilisation limitée de l'azote,
d'autre part. Ces deux dernières fonctions semblent dépendre du niveau
d'accumulation de Pi dans les tissus, lui-même contrôlé par la disponibilité de l'azote.
Pour ces raisons, l'apport de l'azote minéral dans l'eau de mer permet de lever la
limitation azotée et de favoriser l'absorption de Pi, ce qui explique les fortes
potentialités de croissance obtenues uniquement par l'apport de l'azote. Cependant,
le phosphore disponible dans l'eau de mer ne permet pas de soutenir une croissance
maximale, les niveaux de production de matière sèche sont ainsi plus importants par
l'apport simultané de N et P que par l'apport unique de N. L'azote et le phosphore
sont les seuls éléments minéraux limitants dans l'eau de mer: la croissance des
plantes recevant une solution nutritive complète, n'est pas significativement
différente de celle des plantes recevant uniquement de l'azote et du phosphore.
CHAPITRE VIII

CONCLUSIONS GENERALES

1. INTRODUCTION

La présente étude a porté sur certains traits physiologiques de deux halophytes à


potentialités fourragères, Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora. La première est une
Chenopodiaceae fréquente dans les étages bioclimatiques subhumide, semi-aride et
aride, et la seconde originaire des Etats Unis d'Amérique, est une Poaceae
recommandée pour la production de foin. Les expérimentations ont été axées sur
quatre composantes principales:
(i) La détermination de la limite de tolérance au sel des deux halophytes
retenues.
(ii) L'identification des mécanismes physiologiques qui sont à la base de leur
aptitude à tolérer le sel et les autres contraintes qu'il induit.
(iii) L'évaluation de leur aptitude à croître et à prélever les nutriments
minéraux en condition d'irrigation avec une source hydrique non
conventionnelle, l'eau de mer.
(iv) L'identification des nutriments susceptibles de limiter leur croissance en
condition d'irrigation à l'eau de mer.
Les résultats obtenus montrent que la tolérance au sel des deux halophytes
implique deux stratégies différentes intégrant chacune plusieurs mécanismes
physiologiques. La première, dite osmotique, est caractéristique de Suaeda fruticosa.
Elle repose sur l'aptitude de cette halophyte à utiliser Na+ et Cl- pour l'ajustement
osmotique et à contrôler les niveaux d'accumulation des ions salins dans les tissus
par une forte production de biomasse et une stimulation de l'alimentation hydrique
(succulence). La seconde, caractéristique de Spartina alterniflora, repose sur la capacité
des plantes à sécréter par les feuilles (et probablement à exclure par les racines) la
majeure partie des quantités de sel absorbées permettant aux plantes de maintenir
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................197

des niveaux relativement bas en Na+ et en Cl- en dépit de leur abondance dans le
milieu de culture.
Les caractéristiques de ces stratégies et leur implication dans la tolérance ainsi que
le comportement des deux halophytes sur eau de mer (complète ou diluée et enrichie
ou non en nutriments) ont été précédemment analysés (chapitres III à VII). Dans le
présent chapitre, nous nous appuyons sur les données acquises pour discuter la
possibilité de culture de ces deux halophytes à l'eau de mer dans les zones côtières
afin d'y produire du fourrage. Cette voie d'utilisation prendra en considération
plusieurs aspects comme l'aptitude de ces halophytes à se maintenir dans les
biotopes salins et à exprimer de fortes potentialités de croissance, la composition
minérale et organique de la phytomasse produite et sa conformité avec les exigences
nutritionnelles du bétail.

2. ADAPTATION DES DEUX HALOPHYTES AUX CONDITIONS


EXTREMES DU MILIEU

L'étude du comportement de deux halophytes dans une gamme étendue de


salinité (0 à 800 mM), nous a montré que Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora
manifestent leur production maximale de biomasse jusqu'à 300 mM NaCl. Au-delà
de cette dose, une activité de croissance est maintenue mais elle est fortement limitée.
Néanmoins, les plantes sont capables de survivre à 800 mM NaCl. Cette
caractéristique, qui s'exprime plus clairement chez Spartina alterniflora que chez
Suaeda fruticosa, suggère que les deux halophytes peuvent coloniser les sols
halomorphes, dont la C.E. peut atteindre 80 mS.cm-1 à 25 °C, et tolérer les variations
temporelles et / ou spatiales de leur salinité, caractéristiques de ces habitats
(Abdelly, 1997). Par ailleurs, le maintien de ces plantes dépendra d'un système de
propagation efficace assurant une pérennité de ces deux plantes dans leur milieu. Les
cultures que nous avons conduites dans des conditions relativement contrôlées
montrent que Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora sont capables de produire des
semences même en présence de fortes doses de sel. Cependant, la contribution de la
voie sexuée au maintien des deux halophytes dans leurs biotopes salins serait
modeste pour plusieurs raisons:
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................198

(i) A titre d'exemple, la germination des graines de Spartina alterniflora exige


des séjours répétés au froid (4 °C) et ne dépasse guère 50 % des graines
mûres.
(ii) La présence de sel dans le milieu réduirait la capacité germinative des
graines; il est bien établi que la germination est sensible au sel aussi bien chez
des glycophytes que chez des halophytes (Ungar, 1982).
(iii) Au stade post-germinatif, la faible vigueur des plantules les rend
vulnérables face aux stress du biotope.
(iv) La production de semences serait limitée; en effet, les rameaux fructifères
non lignifiées (cas de Suaeda fruticosa) sont préférés par le bétail par
comparaison aux autres parties de la plante.
Cependant, ces obstacles à la reproduction par voie sexuée sont surmontés par
une multiplication végétative très efficace chez les deux halophytes. En effet, après
leur installation dans le milieu, les plantules de Spartina alterniflora développent un
rhizome produisant de manière continue des unités feuillées vigoureuses régénérant
ainsi de nouvelles plantes. Un tapis végétal dense peut être ainsi obtenu au bout d'un
temps relativement court.

Photo 8.1. Aspect végétatif de Spartina alterniflora issues de 20 plantules


cultivées dans des bacs en plastique (1 / 0.85 / 1 m) remplis de sol prélevé
dans la sebkha de Soliman. Les plantes sont âgées de 470 jours. Trois
irrigations par semaine sont effectuées, deux avec l'eau de ville et une avec
l'eau de ville additionnée de 20 g.l-1 NaCl.
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................199

La photo 8.1 illustrant l'état de la végétation au bout de 15 mois de culture de 20


plantules issues de semis, traduit cette forte aptitude de Spartina alterniflora à
coloniser son biotope. Par ailleurs, les coupes répétées (3 fois par an) ne semblent pas
affecter les potentialités de multiplication et de croissance de cette Poaceae.
Pour ce qui est de l'espèce locale, Suaeda fruticosa, les nouvelles plantules sont
issues d'un bouturage naturel des rameaux lignifiées. Des essais conduits au
laboratoire nous ont montré un taux élevé de l'enracinement des boutures. D'ailleurs,
dans son milieu naturel, cette Chenopodiaceae se développe en touffes isolées
(Photo 8.2) et les premières pousses prennent généralement naissance en fin de
printemps sur des rameaux lignifiés (Photo 8.3). Cette plante se prête également bien
aux coupes.
L'ensemble de ces données suggère que ces deux halophytes sont dotées d'une forte
aptitude à se maintenir dans les zones salées grâce à leur capacité de survie dans une gamme
très étendue de salinité, leur système efficace de multiplication végétative et leur résistance au
pâturage (qui a été simulé par des coupes).

Photo 8.2. Aspect végétatif d'une touffe de Suaeda fruticosa au début de son
développement dans son biotope naturel de la sebkha de Soliman.
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................200

Photo 8.3. Aspect végétatif d'une touffe de Suaeda fruticosa dans son biotope
naturel montrant la repousse des rameaux verts sur des rameaux lignifiés.

3. POTENTIALITES DE CROISSANCE EN MILIEU SALE

Une caractéristique importante qu'il faut considérer dans l'évaluation des


potentialités fourragères des plantes est leur aptitude à produire la matière sèche.
Cette dernière a été estimée par la croissance moyenne relative (CMR) et par la
production photosynthétique (PP) (Tab. 8.1). Il apparaît clairement que Suaeda
fruticosa et à un degré moindre Spartina alterniflora conservent leurs potentialités
maximales de croissance à 300 mM NaCl ou sur eau de mer diluée deux fois enrichie
en azote et en phosphore. La CMR de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora est
nettement plus faible que celle des espèces d'Atriplex (la CMR atteint 0.14 chez
A. halimus, Gale et al., 1970). Cependant, la CMR de Suaeda fruticosa est du même
ordre de grandeur que celle de Spergularia marina (CMR = 0.11 j-1 après 17 jours de
traitement; Cheeseman et Wickens, 1986). Spartina alterniflora présente aussi une
CMR du même ordre de grandeur que celle de Halosarcia pergranulata subsp.
pergranulata (CMR = 0.03 j-1 après 83 jours de traitement; Short et Colmer, 1999) ou de
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................201

Spartina anglica et de Puccinellia maritima (CMR comprise entre 0.020 et 0.050 j-1 après
43 jours de traitement; Rozema et Van Diggelen, 1991).

Tableau 8.1. Variations de la croissance moyenne relative (CMR) et de la


production photosynthétique (PP) en fonction de la nature des milieux de
culture. Le premier paramètre est obtenu en ramenant la production de
biomasse à la durée des traitements et à la masse moyenne de la plante
entière, alors que pour le second, la production de la plante entière est
ramenée à l'unité de temps et de biomasse des seules feuilles. Les deux
paramètres sont exprimés en jour-1. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de
confiance au seuil de 5 %.

NaCl (mM) Eau de mer / 2


_________________________ _________________________

0 300 0 +N+P

Suaeda fruticosa
CMR 0.099 0.096 0.035 0.082
± 0.006 ± 0.009 ± 0.007 ± 0.008

PP 0.183 0.167 0.070 0.147


± 0.011 ± 0.015 ± 0.011 ± 0.011

Spartina alterniflora
CMR 0.016 0.013 0.025 0.036
± 0.005 ± 0.005 ± 0.011 ± 0.010

PP 0.044 0.036 0.063 0.092


± 0.011 ± 0.010 ± 0.023 ± 0.013

La faible valeur de la CMR, notamment chez Spartina alterniflora, est en grande


partie compensée par une multiplication végétative rapide. En effet, la production
annuelle de biomasse de cette halophyte cultivée aux U.S.A. varie selon les régions.
Elle est de 21 et 48 tonnes de matière sèche par hectare respectivement en Virginia
(Blum, 1993) et en Georgia (Schubauer et Hopkinson, 1984). Des cultures conduites
dans des pots de 0.85 m3 nous ont permis de constater que Spartina alterniflora
produit en une seule coupe environ 7500 kg de matière sèche par hectare. Comme la
saison de croissance active de cette espèce s'étend, sous nos conditions climatiques,
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................202

du mois de mars au mois d'octobre, il est possible d'effectuer au moins deux coupes
ce qui assurera une production primaire de 15 tonnes de matière sèche par hectare et
par an. Des estimations similaires montrent que Suaeda fruticosa produit au moins
4500 kg de matière sèche par hectare. Ces rendements sont comparables à ceux des
cultures fourragères conventionnelles irriguées à l'eau douce comme la luzerne
(10 tonnes / ha . an; Martiniello, 1998), la fléole, le dactyle et la fétuque élevée (7 à 13
tonnes / ha . an; Gillet, 1980) et le trèfle (8 tonnes /ha . an; Bublot et Hallet, 1981).
L'analyse de plusieurs données (cf. chapitre I) montre que le rendement en matière
sèche des halophytes les plus productives varie de 8 à 17 tonnes /ha . an.
Nos résultats sont donc en accord avec ceux de la littérature et montrent que nos deux
halophytes sont dotées de fortes potentialités de croissance et peuvent assurer un rendement
convenable en biomasse. Néanmoins, ils suggèrent que cette propriété dépende d'une
disponibilité adéquate de nutriments et d'eau et d'une salinité ne dépassant pas 300 mM
NaCl.

4. COMPOSITION DE LA PHYTOMASSE EN NUTRIMENTS

Nous venons de voir que les deux halophytes produisent une phytomasse
importante. Dans l'objectif de vérifier si sa composition est conforme aux exigences
nutritionnelles du bétail, nous avons comparé dans le tableau 8.2 la composition
minérale des parties aériennes des deux halophytes à celle du fourrage exigé par le
bétail.
Les résultats montrent clairement que les contenus des tissus des deux halophytes
en K+, en Mg2+ et en phosphore dépassent nettement les exigences nutritionnelles du
bétail. Les teneurs des parties aériennes de Suaeda fruticosa en Ca2+ est parfaitement
conforme aux exigences du bétail. Néanmoins, les teneurs des tissus de Spartina
alterniflora en Ca2+ ne couvrent pas toujours les besoins du bétail. Ceci pourrait se
produire chez les plantes soumises aux fortes salinités, qui affectent significativement
l'absorption et le transport de Ca2+ vers les parties aériennes conduisant ainsi à la
production d'une biomasse pauvre en ce cation. Par ailleurs, la teneur en matière
azotée totale (MAT) est nettement plus élevée chez S. fruticosa que chez S. alterniflora.
Néanmoins, la fraction azotée digestible (MAD) est sensiblement identique chez les
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................203

deux halophytes, et couvre parfaitement les exigences nutritionnelles des ovins.


D'après Glenn et O'leary (1984) et Bayoumi et al. (1990), les protéines représentent en
moyenne 15 % de la matière sèche chez plusieurs halophytes. À la lumière de ces
données, S. fruticosa et S. alterniflora peuvent produire annuellement 1.5 tonnes de
protéines pour une biomasse moyenne de 10 tonnes . ha-1. Ces estimations montrent
que le rendement quantitatif et qualitatif, de nos deux halophytes, est sensiblement le
même que celui de la luzerne irriguée à l'eau douce (Glenn et al., 1996).

Tableau 8.2. Comparaison de la composition minérale de la biomasse aérienne


produite par Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora avec les exigences
nutritionnelles du bétail. Les données relatives à la composition minérale de
deux halophytes correspondent aux teneurs extrêmes tirées des chapitres
précédents, celles des exigences nutritionnelles du bétail proviennent des
études de Gillet (1980); Kearl (1982) et Gueguen et al. (1988). MAD: matière
azotée digestible. MAT: matière azotée totale.
MAD = (α MAT) / 100 (Chenost et Kayouli, 1997)
α: coefficient de digestibilité de la matière azotée. Il dépend du taux de
cellulose par rapport à la matière sèche des plantes. D'après El Shaer (1997),
les parties aériennes de Suaeda fruticosa contiennent en moyenne 31 % de
cellulose ce qui correspond à une valeur de α = 52.4.
Chez Spartina alterniflora (Poaceae pauvre en cellulose), le MAD s'obtient en
retranchant 4.5 du pourcentage de MAT (Gillet, 1980). En effet, les déchets
contiennent toujours une quantité de matière azotée correspondant à environ
4.5 % de la matière sèche ingérée, lorsque les animaux consomment une diète
constituée exclusivement de Poaceae.

Composition des parties Composition exigée (mg.g-1


aériennes (mg.g-1 MS) MS) par
Suaeda Spartina Ovins Bovins Caprins
fruticosa alterniflora
K+ 29.9 – 122.9 21.3 – 43.9 6.0 – 8.0

Na+ 3.6 – 123.6 6.4 – 27.1 0.5 – 1.0

Mg2+ 3.8 – 5.0 1.3 – 2.6 1.0 – 1.2

Ca2+ 4.7 – 10.4 3.4 – 6.0 6.0 – 9.0 5.5 – 10.0 6.0 – 8.5

P 5.0 – 6.7 3.7 – 4.2 3.0 – 4.0 3.5 – 5.0 3.5

MAT 215 - 311 161 – 182 140 - 160

MAD 113 - 163 116 - 137 100 - 125


Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................204

5. CHARGE DES PARTIES AERIENNES EN NaCl

La charge des parties aériennes en Na+ et en Cl- constitue l'inconvénient majeur de


la phytomasse produite par les halophytes. En se référant aux cultures conduites sur
solution nutritive complète additionnée de 300 mM NaCl (Tab. 8.3), on voit que la
teneur des parties aériennes en Na+ et en Cl- est 3 à 4 fois plus importante chez
Suaeda fruticosa que chez Spartina alterniflora bien que la durée des traitements salins
soit deux fois plus longue chez la seconde (100 jours) que chez la première espèce
(46 jours). Ainsi, le taux de NaCl atteint 24 % de la matière sèche chez Suaeda fruticosa
contre 7.7 % seulement chez Spartina alterniflora. Il apparaît ainsi que la phytomasse
produite par cette dernière espèce est particulièrement pauvre en sel par
comparaison à d'autres halophytes (O'leary et al., 1985; Pasternak et Nerd, 1996) et
même certaines glycophytes (Soltani et al., 1990). Néanmoins, les parties aériennes de
cette Poaceae doivent être lavées à l'eau douce pour éliminer les cristaux de sel
sécrétés et accumulés à la surface des feuilles. D'ailleurs, cette technique est utilisée
pour certaines espèces d'Atriplex qui sécrètent également le sel (O'leary et al., 1985).
Ces données montrent ainsi que la charge des tissus en sel ne constitue pas une
contrainte pour la consommation de cette plante par le bétail. La forte teneur des
parties aériennes de Suaeda fruticosa en sel peut limiter sa consommation à l'état sec
par les animaux. Cependant, la phytomasse produite par cette Chenopodiaceae peut
être mélangée avec d'autres ingrédients de la diète animale comme les grains d'orge
ou la betterave fourragère qui assurent tous les deux un apport énergétique
supplémentaire (El Shaer, 1997). Des essais conduits sur des chèvres ont montré que
lorsque les parties aériennes d'Atriplex lentiformis et Atriplex barclayana irrigués à l'eau
de mer constituent 25 % de la diète totale, l'acceptabilité, la consommation et la
digestibilité sont significativement améliorées (Wiley et al., 1982). Analysant les
résultats de plusieurs études portant sur l'utilisation des halophytes pour
l'alimentation du bétail, Malcolm (1996 b) conclut que les halophytes inclusives
peuvent constituer un fourrage valable lorsqu'elles sont fournies en mélanges avec
d'autres ingrédients, particulièrement des résidus de céréales riches en énergie.
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................205

Tableau 8.3. Teneurs, concentrations et taux en Na+ et en Cl- dans les parties
aériennes de Suaeda fruticosa et de Spartina alterniflora cultivées sur solution
nutritive complète additionnée de 300 mM NaCl. Les concentrations réelles en
Na+ et en Cl- sont obtenues en divisant les teneurs ioniques par celle de l'eau.
Des concentrations virtuelles sont également estimées en supposant que (i)
S. fruticosa ne dilue pas les ions par le phénomène de succulence: les teneurs
en ions des plantes cultivées à 300 mM NaCl sont ramenées à la teneur en eau
des plantes témoins; (ii) S. alterniflora ne sécrète pas Na+ et Cl- par les feuilles:
les quantités des ions accumulés dans les tissus sont additionnées aux
quantités sécrétées puis ramenées à la masse des feuilles puis à leur teneur en
eau. Moyennes de 10 répétitions. Intervalles de confiance au seuil de 5 %.

Espèces
______________________________________________________________

Suaeda fruticosa Spartina alterniflora

Paramètres
Na+, mmol.g-1 MS 5.4 ± 0.3 1.2 ± 0.2
Cl-, mmol.g-1 MS 3.2 ± 0.4 1.4 ± 0.2
NaCl, % MS 23.7 ± 2.2 7.7 ± 0.8

H 2 O, ml.g-1 MS 8.3 ± 0.5 3.5 ± 0.4


Na+, mM 654.2 ± 52.2 343.0 ± 42.3
Cl-, mM 390.3 ± 43.5 411.2 ± 59.8

Concentrations en l'absence de succulence (Suaeda fruticosa) et de sécrétion


foliaire (Spartina alterniflora).

Na+, mM 840.3 ± 49.9 4430 ± 750.4


Cl-, mM 499.4 ± 56.5 4448 ± 752.6

L'utilisation des rameaux de Suaeda fruticosa à l'état frais constitue une autre
alternative pour contourner les difficultés liées à la charge des tissus en sel. En effet,
en comparant les deux halophytes sur la base des concentrations (Tab. 8.3), on voit
que les différences spécifiques deviennent moins spectaculaires: les concentrations
des tissus des deux plantes en Cl- sont identiques, celles de Na+ sont à peine deux
fois plus élevées chez S. fruticosa que chez S. alterniflora. Cette atténuation des
différences résulte d'une forte aptitude de la première espèce à assurer une
alimentation hydrique convenable de ses tissus et à diluer les fortes quantités de sel
Chapitre VIII. CONCLUSIONS GENERALES........................................................................................................206

absorbées. Pour mieux illustrer cette propriété, nous avons déterminé les
concentrations de Na+ et de Cl- en supposant que l'alimentation hydrique n'est pas
stimulée par la présence de sel dans le milieu de culture (absence du phénomène de
succulence).
Les données du tableau 8.3 montrent que la succulence réduit de 25 % la
concentration des tissus en Na+ et en Cl-. Ce facteur n'est pas négligeable pour une
halophyte inclusive. Néanmoins, la succulence semble moins performante au niveau
du contrôle de l'accumulation du sel dans les tissus. En effet, chez Spartina alterniflora,
la concentration réelle en Na+ et en Cl- est au moins 10 fois plus faible que celle qui
existerait en l'absence de sécrétion foliaire.

En bilan, Spartina alterniflora produit une phytomasse pauvre en Na+ et en Cl- et pouvant
être consommée à l'état frais ou à l'état sec puisque la sécrétion foliaire contribue de manière
efficace au dessalement des tissus. La succulence réduit la concentration des tissus de Suaeda
fruticosa en sel et favorise sa consommation à l'état frais. Cependant, la biomasse de cette
espèce peut constituer avec d'autres ingrédients pauvres en sel une diète équilibrée pour la
consommation du bétail.
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RESUME

La réponse au sel a été analysée chez deux halophytes à potentialités


fourragères, Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora. Les mesures ont porté sur la
croissance, la nutrition minérale, l'accumulation de sucres solubles et le statut
hydrique. Les résultats montrent que la première espèce est une halophyte
obligatoire alors que la seconde est facultative. Néanmoins, les deux plantes
conservent leur capacité intrinsèque de croissance jusqu'à 300 mM NaCl en adoptant
deux stratégies différentes. Suaeda fruticosa associe une croissance rapide à une forte
aptitude à utiliser Na+ (et Cl-) pour l'ajustement osmotique ayant pour conséquence
une alimentation hydrique convenable et une amélioration de l'efficacité d'utilisation
des cations: c'est la stratégie osmotique. Spartina alterniflora contrôle l'accumulation
toxique de Na+ (et de Cl-) dans ses feuilles par une sécrétion sélective de ces ions aux
dépens de K+ et de Ca2+; et elle utilise les carbohydrates solubles pour maintenir
l'hypertonie de ses tissus. Cette stratégie d'évitement semble particulièrement
efficace en condition de salinité sévère, 800 mM NaCl.

Dans l'objectif d'améliorer la production fourragère dans les régions arides et


semi-arides où les ressources en eau douce sont limitées, les potentialités de
croissance et de prélèvement des nutriments en condition d'irrigation à l'eau de mer,
complète ou diluée de moitié, sont évaluées. La croissance optimale des deux
halophytes est obtenue lorsque les plantes sont irriguées à l'eau de mer diluée deux
fois et enrichie en azote et en phosphore. Ces deux éléments minéraux sont les seuls
nutriments limitants dans l'eau de mer.

L'ensemble des données suggère que Suaeda fruticosa et Spartina alterniflora


présentent les qualités requises pour se maintenir dans les écosystèmes halomorphes.
La grande capacité de se multiplier par voie végétative et de produire une biomasse
ayant une composition minérale et protéique répondant aux exigences
nutritionnelles du bétail, confèrent à ces deux halophytes une forte aptitude à
améliorer la productivité et la valeur pastorale des zones marginales.

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