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04/01/2021 Genre, publication scientifique et travail éditorial. L’exemple de la revue Annales.

Histoire, Sciences sociales

Tracés. Revue de Sciences


humaines
32/2017
Déplacer les frontières du travail
Dossier traduction

Genre, publication scientifique et


travail éditorial. L’exemple de la
revue Annales. Histoire, Sciences
sociales
Gender, academic publishing, and editorial work: the case of the journal Annales. Histoire, Sciences Sociales

É A
p. 193-212
https://doi.org/10.4000/traces.6914

Résumés
Français English
Cet article propose une réflexion historiographique et sociologique sur la place des femmes dans la
revue Annales, des années 1930 à nos jours. Il développe son analyse dans trois directions : la
publication de travaux écrits par des femmes dans la revue ; le rapport entre hommes et femmes au
sein du travail éditorial au sein même de la revue ; la place donnée par les Annales aux thématiques
liées à l’histoire des femmes et du genre. Il cherche finalement à montrer l’intérêt de la notion de
genre pour écrire une histoire intellectuelle et sociale de la production historique, et à s’interroger de
manière réflexive sur les enjeux scientifiques et politiques sous-jacents à cette démarche pour le
travail de la revue aujourd’hui.

This article presents a historiographical and sociological reflection on the place of women in the
journal Annales from the 1930s to the present. The analysis focuses on three aspects: the publication
of articles written by women in the journal; the relations between men and women in the context of
editorial work carried out at the journal itself; and the place accorded by the Annales to themes
relating to the history of women and gender. Ultimately, the article seeks to demonstrate the
importance of the notion of gender when it comes to writing the intellectual and social history of
historical research itself. It also proposes a reflexive interrogation of the underlying scientific and
political implications of this approach for the work of the journal today.
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Entrées d'index
Mots clés : femmes, genre, historiographie, annales, revue
Keywords : women, gender, historiography, annales, journal

Texte intégral
Je remercie beaucoup l’équipe de Tracés, en particulier Anaïs Albert et Christelle Rabier,
de sa sollicitation amicale et de ses observations très utiles, Bénédicte Girault, Didier Lett,
Mélanie Traversier, Silvia Sebastiani et Valérie Theis de leurs conseils, ainsi que toute la
rédaction des Annales, avec qui ce texte a été longuement discuté, même si j’en porte
l’entière responsabilité. Sur ces enjeux historiques, voir Rogers (éd., 2004).

1 En 1992, dans le prolongement du succès de l’entreprise éditoriale d’Histoire des


femmes dont elle avait codirigé l’année précédente le troisième volume avec Arlette Farge,
Natalie Zemon Davis publiait dans History Workshop un article intitulé « Women and the
world of the Annales » (Davis et Farge éd., 1991 ; Davis, 1992). Elle s’interrogeait sur la
place des femmes au sein des Annales durant la première décennie de leur existence et sur
leur participation au travail intellectuel au sein de la revue. Son point de départ était le
destin de Lucie Varga, qui venait d’être mis en lumière par un ouvrage de Peter Schöttler
(1991). Cette historienne autrichienne avait publié trois articles dans les Annales d’histoire
économique et sociale en 1936-1937. Elle avait eu une liaison avec Lucien Febvre, avant de
s’éloigner de la revue à la suite de leur rupture. Elle dut se cacher pendant la Seconde
Guerre mondiale du fait de ses origines juives et mourut de maladie à trente-six ans
à Toulouse, en 1941. La reconstitution des principales trajectoires féminines évoluant
autour de la revue conduisait l’historienne américaine à un portrait collectif en creux, celui
d’une fraternité masculine (« a sodality of French brothers ») qui ne laissait guère d’autre
place aux femmes que celles d’épouse et d’assistante scientifique de l’ombre. On ne compte
que trois femmes auteures dans la revue entre 1929 et 1947, une rareté qui s’observe
également dans les autres revues d’histoire française à la même époque et qui correspond
au quasi-monopole masculin dans le monde de la recherche et de l’enseignement
supérieur dans la France de l’entre-deux-guerres, même si la France avait participé dès les
années 1860 au mouvement en faveur de la mixité dans l’enseignement supérieur. Cette
situation française contraste à la même époque avec la situation universitaire d’autres pays
comme les États scandinaves, les plus engagés dans ce domaine (en Norvège, Kristine
Bonnevie est la première femme professeure d’université en 1912, un an avant l’obtention
du droit de vote féminin, en 1913), mais aussi le Royaume-Uni ou les États-Unis, dans un
contexte général où les droits civiques des femmes étaient dans l’ensemble mieux assurés,
même si la place croissante des femmes à l’université et le développement de leurs droits
ne sont pas toujours synchrones1. L’expérience américaine joue sans doute un rôle dans
l’attention portée par Natalie Zemon Davis à cette question, de même que la féminisation
plus précoce du champ de l’histoire française aux États-Unis2. L’historienne appartient à
une génération de chercheuses qui ont pu se sentir en porte-à-faux vis-à-vis de pratiques
françaises dont elles ont également pu observer la progressive transformation au cours de
leur propre carrière. Mais si l’on perçoit bien cette lente tendance générale qui a contribué
à la féminisation de l’université française entre la période étudiée par l’article de History
Workshop et le début du e siècle, cette évolution n’avait guère donné lieu à des études
spécifiques, qu’il s’agisse de recherches portant sur des institutions, des disciplines ou des
revues, jusqu’à ces dix dernières années, qui ont vu le développement de nouveaux travaux
dans cette direction3. C’est dans cette perspective qu’il faut situer le propos de cet article. Il
cherche à montrer dans quelle mesure la question du genre éclaire le travail intellectuel et
éditorial d’une revue comme les Annales durant les dernières décennies, à partir d’une
approche réflexive qui tentera, dans la mesure du possible, d’objectiver le fait qu’il
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représente un point de vue intérieur aux Annales, puisque j’en suis actuellement le
responsable et que les analyses présentées proviennent des données internes de la revue.
En s’interrogeant à l’aide des outils des sciences sociales sur l’évolution du rapport de
genre chez les signataires des articles publiés, puis sur la place relative des hommes et des
femmes dans le fonctionnement interne de la revue et, enfin, sur l’évolution
historiographique de l’étude des femmes et du genre (ce qui inclut la prise en compte, ou
non, par la revue des recherches qui concernent aussi les masculinités ou les
homosexualités) dans les Annales, on cherchera à montrer l’intérêt d’une histoire sociale
et intellectuelle du travail scientifique nourrie de la notion de genre (entendue comme
l’étude des différences et des différenciations socioculturelles entre sexes), témoignant de
l’articulation complexe de différents registres dont l’évolution générale n’est pas univoque.

La publication scientifique
2 Un premier observatoire permet de saisir, à travers l’exemple des Annales, le rapport de
genre dans le travail de recherche en sciences sociales, celui de la publication des travaux
scientifiques. Un sondage, portant sur trois années successives au début de chaque
décennie, donne une première indication quantitative sur ce rapport au sein des textes
parus dans la revue, à l’exclusion des comptes rendus. Ces mesures sont bien sûr partielles
et nécessiteraient d’être précisées ; elles sont, par ailleurs, affectées par d’autres évolutions
qui peuvent introduire des biais, comme les transformations des formats éditoriaux, qui se
caractérisent principalement par la disparition au cours du temps d’une grande variété des
rubriques et de formats pour arriver à une relative standardisation des publications autour
de longs articles de recherche, ce qui n’était pas le cas dans les années 1930 à 1960.
3 Une tendance générale se dessine néanmoins. Entre 1930 et 1932, il n’y a pas d’article
signé par une femme dans les Annales, de même entre 1940 et 1942, quand la revue paraît
sous le titre d’Annales d’histoire sociale. Entre 1950 et 1952, on relève un peu moins de
3 % d’auteures des différents textes publiés, soit quatre en trois ans (sur cent trente-huit),
à une époque où la revue publiait quatre numéros par an. Entre 1960 et 1962, alors que le
rythme passe à six fascicules par an, le nombre d’auteures est de vingt-quatre sur deux
cent trente-cinq textes, soit un peu plus de 10 %. On enregistre ensuite une légère
progression : entre 1970 et 1972, on trouve 15 % de femmes (trente-quatre femmes sur un
total de deux cent vingt-quatre signatures) puis, entre 1980 et 1982, on se situe à 19 %
(trente-quatre sur cent soixante-dix-neuf). C’est alors que s’observe un phénomène de
plateau. En effet, ce pourcentage reste à peu près stable dans les vingt années qui suivent.
Entre 1990 et 1992, on trouve ainsi un peu moins de 20 % de signatures féminines (trente
sur cent cinquante-trois), tandis qu’entre 2000 et 2002, on est à 18,5 % (vingt-neuf sur
cent cinquante-six). Une nouvelle étape se déroule après le milieu des années 2000, ce qui
correspond à l’arrivée d’un nouveau directeur de la rédaction et au début d’un changement
de génération au sein du comité de rédaction4. Entre 2007 et 2011, le rapport est d’un tiers
de femmes pour deux tiers d’hommes (cent vingt-sept auteurs pour soixante-deux
auteures), et, de 2012 à 2015, on trouve 60 % d’hommes pour 40 % de femmes (quatre-
vingts hommes pour cinquante-deux femmes). Au-delà du constat d’une tendance au
rééquilibrage, il convient de rester prudent sur ce dernier état du rapport de genre, étant
donné le faible recul dont on dispose sur les données récentes, qui ne permettent pas de se
prononcer sur la linéarité de l’évolution, sur son irréversibilité, ni même sur une
éventuelle stabilisation. Une distinction entre articles et notes critiques soulignerait une
différence supplémentaire, les notes critiques étant, aujourd’hui encore, plus souvent
écrites par des hommes (qu’elles soient commandées ou soumises spontanément à la
rédaction), comme si ces derniers étaient considérés comme plus légitimes pour produire
un discours de second degré sur la production historiographique et scientifique.
Inversement, les comptes rendus, sans doute du fait de leur caractère ponctuel et de leur
moindre prestige symbolique, sont plus rapidement féminisés, comme le rappelle Natalie
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Zemon Davis qui évoque la part prise par Lucie Varga ou Simone Bloch dès les
années 1930.
4 Ces données doivent aussi être confrontées à celles concernant les articles examinés par
le comité de lecture, disponibles pour la période récente. Une telle analyse permet de
mettre en évidence une dissymétrie : la disproportion entre hommes et femmes est plus
forte au niveau des articles soumis qu’à celui des articles acceptés. Si l’on reprend les
années 2012 à 2015, alors que les hommes représentent 60 % des articles publiés, ils
constituent 73 % des articles discutés par le comité de rédaction. Cette disproportion
s’accroît encore si on considère uniquement les soumissions spontanées sans contact
préalable d’aucune sorte avec le comité de rédaction (interconnaissance, textes
commandés en vue de dossiers, intermédiaires pour faire parvenir le texte à la
rédaction, etc.), où les hommes représentent plus de 80 % des propositions d’articles. Tout
se passe donc comme si la soumission d’un article aux Annales était plus évidente pour les
hommes que pour les femmes, ces dernières compensant relativement le nombre moins
grand de soumissions par une acceptation plus forte en moyenne.
5 Le résultat final dans la publication est donc moins déséquilibré du point de vue du
genre, même s’il reste inégal et qu’il se cumule avec d’autres biais touchant les trajectoires
féminines déjà identifiés par les sociologues dans le monde universitaire, comme l’impact
des grossesses ou le partage inégal des tâches domestiques. Ce rééquilibrage ne
correspond pas à une action positive (affirmative action) de la part du comité de
rédaction, qui favoriserait les textes féminins durant ses délibérations : l’étude des
rapports extérieurs au comité sur les articles avant discussion dans le cadre du comité
(peer-reviewing), rapports qui ignorent le genre de l’auteur ou de l’auteure, témoigne
d’une même tendance à une évaluation plus favorable, toutes choses égales par ailleurs,
des textes écrits par des femmes. On peut noter que ce résultat significatif est convergent
avec les observations liées au rôle de l’anonymisation dans la lutte contre les
discriminations, même inconscientes, produites par les institutions (par exemple, le CV
anonyme pour l’accès aux entretiens d’embauche, les copies dans un certain nombre de
concours). Il faut également souligner le fait, grâce à la récente mise en ligne de données
comparables pour la période 2004-2016 par la revue anglaise Past and Present dans le
cadre d’une réflexion sur le biais de genre, que ce phénomène ne semble pas limité aux
Annales : on retrouve de même une soumission moindre des femmes et un taux
d’acceptation plus élevé5.
6 Dans le cas de la production scientifique telle que les Annales permettent de l’envisager,
cette situation de rééquilibrage pourrait être le résultat de deux phénomènes combinés.
D’une part, le fait que les articles commandés ou sollicités d’une manière ou d’une autre
par la revue, qui sont en moyenne mieux évalués par les rapporteurs anonymes extérieurs
que les soumissions spontanées, attestent un rapport de genre moins déséquilibré que ces
dernières. Par ces sollicitations et ces commandes, la rédaction aurait ainsi intégré le souci
de publier davantage de femmes tout en respectant les procédures et les exigences
intellectuelles de la revue. D’autre part, cette situation traduit également sans doute un
degré d’exigence, conscient ou inconscient, supérieur des femmes vis-à-vis de leur
production : à valeur scientifique égale, les femmes semblent proposer moins
spontanément un article à la revue, se considérant peut-être comme moins autorisées à le
faire – inversement, les hommes sont ultra-majoritaires dans les articles écartés en
première intention (desk rejection, selon le vocabulaire en usage chez les sociologues des
publications scientifiques). Ce fait notable semble du même ordre que la situation décrite
par Isabelle Backouche, Olivier Godechot et Delphine Naudier (2009) à propos des
candidatures féminines à l’École des hautes études en sciences sociales, dont la rareté
relative s’expliquerait entre autres par un degré d’autocensure relativement élevé chez les
femmes, amplifié par des règles de candidature faisant la part belle au capital social des
candidats, qui avantagent les hommes, a fortiori dans une institution dans laquelle les
hommes sont très largement majoritaires. En revanche, on notera que la corrélation entre
genre et âge montre que ces dernières années, les chercheurs et chercheuses les plus

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jeunes publiés dans la revue sont davantage des femmes que des hommes. Ainsi,
entre 2012 et 2015, parmi les auteurs de moins de quarante ans au moment de la
publication, vingt-trois sont des femmes, dix-sept des hommes. Si on considère ceux de
moins de trente-cinq ans durant les quatre mêmes années, on trouve huit femmes pour
trois hommes. Cette tendance pourrait être liée à la combinaison entre la commande
volontariste d’articles à de jeunes docteures par la revue, l’évolution des pratiques
scientifiques féminines rendant les chercheuses plus disposées à soumettre des
contributions, et, enfin, la féminisation croissante de la population étudiante en histoire
et, plus largement, du travail intellectuel en sciences humaines.

L’organisation du travail éditorial


7 La part prise par les femmes dans le travail intellectuel accompli au sein des Annales
constitue un deuxième angle intéressant pour réfléchir aux rapports de genre dans le cadre
d’une revue d’histoire et de sciences sociales. Le comité de rédaction n’a longtemps
compté que des hommes. C’est en 1980 que, succédant à Jacques Revel, la première
femme, Lucette Valensi, est devenue, selon le titre en vigueur à l’époque, « secrétaire du
comité des Annales » (c’est-à-dire en charge de la coordination éditoriale de la revue,
fonction devenue « directeur de la rédaction » dans les années 1990). En 1986, lorsqu’elle
fut remplacée par Bernard Lepetit, elle intégra la direction collégiale de la revue. Elle y fut
rejointe en 1994 par Jocelyne Dakhlia. Une évolution de l’organisation éditoriale eut
ensuite lieu, à partir de la deuxième moitié des années 2000. En 2011, Lucette Valensi
rejoignait, avec d’autres anciens codirecteurs et des correspondants internationaux, le
comité scientifique nouvellement créé, dans lequel figuraient également trois autres
historiennes, et qui comptait donc alors quatre femmes pour dix hommes (aujourd’hui,
cinq pour dix). Entre-temps, en 2008, une autre historienne fit son entrée au comité de
rédaction, où elle siégea jusqu’en 2012. Entre 2011 et 2015, quatre chercheuses ont ensuite
rejoint le comité, dans un contexte où l’ensemble de l’équipe s’est beaucoup renouvelé,
avec également l’arrivée de quatre hommes. Trois moments paraissent ainsi se succéder :
une première époque, jusqu’en 1980, où la non-présence des femmes dans le comité ne
faisait pas question ; un deuxième temps, entre 1980 et la fin des années 2000, où les
premières femmes ont fait leur apparition au sein de la revue ; enfin un troisième moment,
depuis la fin des années 2000, où la féminisation du comité s’est accrue sur la base d’une
politique délibérée de renouvellement paritaire (le genre étant devenu dans le processus
de cooptation du comité un critère pertinent, parmi d’autres, comme la qualité des
productions scientifiques individuelles, le domaine de spécialité en termes d’aire
géographique, chronologique ou de discipline, l’expérience éditoriale, l’âge ou encore la
trajectoire socio-institutionnelle), même s’il reste encore une dissymétrie de genre, avec,
actuellement, quatre femmes pour dix hommes.
8 De ce point de vue, les Annales ressemblent aux autres revues d’histoire fondées entre la
fin du e siècle et la Seconde Guerre mondiale, qui sont restées longtemps des revues
d’hommes publiant des hommes, écrivant sur des sujets de recherche où la question même
des hommes ne se posait pas et sous-entendant donc un masculin « neutre » qui avait
vocation à couvrir l’ensemble du corps social, dans une université très majoritairement
masculine jusqu’aux années 1980 – même s’il serait intéressant de se livrer dans le détail à
une étude comparative. Il est parfois difficile de retracer cette histoire, faute de sources
internes aux revues, et on s’aperçoit en particulier que la présentation des organigrammes
dans les revues est elle-même longtemps très fluctuante, de même que le vocabulaire
désignant les tâches éditoriales. Si l’on considère par exemple la Revue historique, on
constate qu’elle ne mentionne pendant longtemps que les directeurs, qui sont des hommes
jusqu’en 1997. Lorsque les deux directeurs sont remplacés en 1998 par un homme et une
femme, la situation change. Un comité éditorial apparaît pour la première fois, formé
d’abord de trois hommes. En 2000, deux historiennes rejoignent ce comité, donnant lieu à
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un relatif équilibre. Dans le cas de la Revue d’histoire moderne et contemporaine, seuls


des hommes figurent dans la direction éditoriale jusqu’en 1991. En 1992 apparaît pour la
première fois un secrétariat de rédaction composé de trois hommes et d’une femme.
En 2001, la rédaction compte dix membres, dont deux femmes. Alors que l’une d’elles
devient rédactrice en chef, la rédaction passe en 2007 à treize membres, dont quatre
femmes (aujourd’hui, quinze membres, dont quatre femmes). Dans le cas de ces revues
anciennes comparables aux Annales, il subsiste donc une dissymétrie de genre qui montre
une grande différence avec les revues créées dans les années 1980-1990, comme
Médiévales (1982), Vingtième siècle. Revue d’histoire (1984) ou Genèses (1990), fondées
dès l’origine sur un rapport de genre plus équilibré et sur l’héritage des combats féministes
des années 1970, et qui ont même souvent donné une place plus importante aux femmes,
proportionnellement, que celle qu’elles occupaient alors à l’université.
9 Cette évolution générale vers la féminisation des comités de rédaction des revues,
également marquée par les relations que ces dernières entretiennent avec les organismes
de financement de la recherche, dont certains comme le CNRS ont intégré la question du
genre dans ses directives de politique générale, peut être mise en regard de l’évolution du
secrétariat de rédaction, c’est-à-dire des personnes effectuant concrètement les tâches
matérielles et éditoriales de fabrication de la revue. Il ne s’agit pas de mettre ces deux
aspects sur le même plan, au contraire, car le comité, à la différence du secrétariat de
rédaction, est un espace de pouvoir intellectuel et, parfois, de rapports de forces, dont la
composition est un enjeu de divers points de vue, dont celui du genre. En revanche, cette
dénivellation existant dans l’organisation du travail éditorial entre comité de rédaction et
secrétariat de rédaction n’en est pas moins susceptible d’une analyse en termes de genre.
Cette dimension est peu aisée à reconstituer en détail dans notre cas, faute d’un véritable
fonds d’archives lié aux Annales. À l’origine, le travail de secrétariat de rédaction, au sens
le plus concret, était principalement effectué par Paul Leuilliot, comme en témoigne
largement la correspondance de Marc Bloch et de Lucien Febvre, tout d’abord en lien
direct avec l’éditeur Armand Colin puis, lorsque la revue prend son indépendance, avec le
soutien matériel d’Henriette Psichari (1884-1972), en charge d’un autre projet de Lucien
Febvre, l’Encyclopédie. Dans l’après-guerre, la correction de copie est confiée à Marianne
Mahn-Lot (1913-2005), chartiste, fille de l’historien Ferdinand Lot, veuve de Jean-
Berthold Mahn et elle-même historienne spécialiste de Bartolomé de Las Casas et des
Indiens d’Amérique au e siècle, avant qu’Yvette Trabut prenne en charge le secrétariat
de la rédaction, ce qui correspond à un moment important dans l’histoire de la
féminisation des métiers éditoriaux dans l’édition scientifique française et de la
professionnalisation de ces derniers. Cette activité, à la différence du travail féminin
généralement non rémunéré des années 1930 (ou parfois rémunéré indirectement, si on
prend en compte le rôle d’Henriette Psichari qui travaille pour l’Encyclopédie), correspond
bien à un travail salarié au sein de la rédaction, même s’il n’est pas mentionné dans l’ours
(l’organigramme) figurant dans la revue avant les années 1970. En 1973, pour la première
fois, Marianne Mahn-Lot figure aux côtés de Paul Leuilliot. En 1975, Yvette Trabut
apparaît à son tour, rejointe ensuite par d’autres collaboratrices formant l’équipe
rédactionnelle de la revue. Cette évolution de l’ours, rendant visible un travail éditorial et
technique majoritairement féminin, reflète une transformation plus générale à l’œuvre
dans le monde des revues savantes. L’équipe des Annales a ensuite continué de se
transformer au fil du temps mais n’a compté, avant le début des années 2010, que deux
hommes, des doctorants travaillant ponctuellement pour le secrétariat de rédaction. La
féminisation est en effet devenue dominante dès lors que le travail de secrétariat de
rédaction, après Paul Leuilliot, a connu une première étape de professionnalisation,
correspondant à l’existence de postes spécifiques – une deuxième étape étant franchie, au
début des années 2000, avec l’émergence de formations universitaires dédiées au
secrétariat d’édition et de rédaction. La division sexuée du travail dans l’édition
universitaire perdure aujourd’hui au niveau des secrétariats de rédaction : le décompte
rapide des dizaines de candidatures reçues lors de vacances de postes à la rédaction des

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Annales montre que les hommes constituent moins de 10 % des postulants. Depuis 2012,
deux hommes ont occupé successivement pendant un certain temps l’un des trois postes
de secrétaire de rédaction (deux postes pour l’édition française, un pour l’édition anglaise),
aux côtés de deux femmes. Dans le même temps, la fonction de secrétaire de rédaction
s’est elle-même notablement transformée. La préparation de la copie, la correction des
épreuves et la gestion des comptes rendus, qui représentaient quasiment la totalité du
travail accompli jusqu’au début des années 2010, n’en constitue plus qu’une partie
aujourd’hui. Le développement des responsabilités du secrétariat de rédaction dans les
domaines de la gestion financière, de la coordination de l’édition bilingue français-anglais,
de la formation et de l’encadrement de stagiaires, de la stratégie commerciale de diffusion
de la revue ou de la politique de communication scientifique à travers le site Internet, les
débats ou d’autres opérations organisées par les Annales, a profondément modifié
l’organisation du travail dans le sens d’une intégration fonctionnelle plus grande entre
direction, comité de rédaction et secrétariat de rédaction, ce qui traduit également le fait
que, depuis quelques années, l’ensemble des secrétaires de rédaction participent aux
réunions mensuelles du comité et sont consultés régulièrement sur les décisions affectant
le travail éditorial.
10 D’autres points pourraient encore être pris en considération en lien avec cette
perspective éditoriale, par exemple celui des règles de féminisation de la langue française
appliquées au sein de la revue. Il s’agit d’un sujet complexe, sur lequel les pratiques
éditoriales du monde universitaire ne sont pas stabilisées. Il a fait son apparition dans la
revue au début des années 2010, à la suite d’une nouvelle sensibilité du comité de
rédaction, renouvelé d’un point de vue générationnel, et d’un certain nombre d’échanges
entre la rédaction et des auteures à propos des usages typographiques de la revue. Le
comité de rédaction des Annales n’a pas encore souhaité fixer de manière définitive une
ligne dans ce domaine, même si les pratiques éditoriales ont évolué dans le sens d’une
liberté plus grande donnée aux chercheurs et aux chercheuses qui publient dans la revue.
Cela revient, en particulier, à utiliser les graphies « auteur » et « auteure » (ou « autrice »,
forme en réalité plus correcte) et, plus largement, à appliquer la féminisation des
professions et de nombreux autres termes avec régularité, en particulier lorsqu’il s’agissait
de refléter l’identité subjective des auteurs et des acteurs historiques. C’est sur la question
du neutre en français ou des groupes comportant des hommes et des femmes que les
difficultés sont souvent les plus grandes, ce qui est sans doute encore accentué par une
culture politique française où l’universalité d’un masculin neutre tient une place centrale.
La rédaction privilégie, là aussi dans la mesure du possible, l’emploi de termes épicènes
qui permettent de neutraliser, dans tous les sens du terme, certaines difficultés, en
substituant, par exemple, « personnalités politiques » à « hommes politiques », ou,
parfois, en effectuant le dédoublement du substantif ou du pronom (« historiens et
historiennes », « celles et ceux »…). D’autres points sont considérés avec attention et sont
susceptibles d’évolution avec les règles de la grammaire, comme des accords de proximité
ou de majorité avec le féminin. En revanche, la revue n’a pour le moment pas fait le choix
des graphies épicènes, utilisant des points, des tirets ou des majuscules marquant le
féminin. Dans beaucoup de textes scientifiques et parascientifiques où cette graphie a été
introduite, son application n’est pas systématique, étant plus souvent employée pour
désigner les contemporains (à commencer par la communauté à qui s’adresse le texte,
« historien-ne-s » ou « historien.ne.s ») que pour qualifier les acteurs historiques, souvent
reconduits aux normes classiques du neutre masculin. Cette distinction pose évidemment
un problème de statut des individus au sein d’un même régime textuel, mais la résoudre
par une application systématique, qui serait vraiment cohérente et légitime, créerait
d’autres obstacles, en particulier celui de la lisibilité de textes au sein desquels les signes
diacritiques se multiplieraient.
11 La question du genre soulève une pluralité de problèmes complexes qu’il est impossible
de considérer comme homogènes. Une revue est un lieu de diffusion du travail scientifique
des chercheurs et des chercheuses, ce qui renvoie à une articulation globale du rapport de

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genre et des pratiques scientifiques qui y sont liées dans l’espace académique en même
temps qu’à la position de la revue dans ce même espace. Mais elle est aussi un lieu de
travail intellectuel et éditorial, ce qui refait jouer de manière différente la question du
rapport de genre dans le monde universitaire, en l’actualisant en fonction d’un héritage
historique propre à l’institution qu’est une revue et en l’incarnant dans une série de
trajectoires individuelles qui, pour être genrées, n’en ont pas moins d’autres
caractéristiques sociohistoriques déterminantes. Dès lors, il est normal que ces deux
trames ne coïncident que partiellement. C’est même l’un des intérêts de la démarche,
consistant à ne pas considérer le genre comme une seule et même question, mais comme
un outil pour pratiquer de manière différenciée une histoire sociale et intellectuelle, en
l’occurrence du travail scientifique. En ce sens, on pourrait dire que si la notion de genre
permet d’affiner les approches des chercheurs en sciences sociales, ce n’est pas en créant
un nouveau récit cohérent et linéaire, mais plutôt en contribuant à montrer, au contraire,
la complexité et la diversité des mondes sociaux, comme le monde de la recherche,
parcouru par des lignes de failles et des formes de tension ou de négociation dont le genre
n’est qu’un aspect.

Les orientations historiographiques


12 On peut encore approfondir l’analyse par l’ajout d’une troisième trame narrative, en
s’interrogeant cette fois sur les choix historiographiques de la revue par rapport aux
recherches sur les femmes et sur le genre dans les sciences sociales, y compris en
cherchant à les distinguer l’une de l’autre, dans la mesure où la superposition de l’histoire
des femmes et de celle du genre est souvent un obstacle intellectuel à la saisie du problème
historiographique posé. Ce nouvel angle d’approche introduit directement à une question
restée jusqu’alors dans l’ombre, celle de l’espace international de la recherche dans lequel
s’inscrit la question du genre, dominé par la construction à la fois politique et intellectuelle
de la thématique aux États-Unis à partir des années 1960. Cet espace international joue un
rôle dans la définition des politiques éditoriales des revues et des pratiques scientifiques
collectives, et de ce point de vue, le modèle américain, plus sensible à la question posée par
le genre et plus porté à des politiques d’action positive en faveur des femmes, a été un
point de repère – à la fois modèle et repoussoir – dans la construction du rapport de genre
dans le monde académique français. À ce titre, l’histoire d’une revue comme les Annales
ne peut pas être isolée de cette structuration générale de l’espace académique
international, en particulier étatsunien, et de ses standards.
13 De la sorte, l’analyse de la publication de travaux de recherche consacrés à cette
thématique dans la revue montre une histoire un peu différente de celle écrite à partir de
la féminisation des personnes publiées ou de la présence de femmes au sein du comité de
rédaction. La thématique, aujourd’hui souvent désignée sous l’étiquette ambiguë à
certains égards d’« histoire des femmes et du genre », a commencé à être clairement
identifiée en France dans le cours des années 1970, souvent en lien avec des engagements
militants, avant de connaître dans les deux décennies suivantes une certaine
reconnaissance à travers des entreprises éditoriales ou des revues comme la revue Clio,
fondée en 1995, ou Genre et Histoire, revue en ligne liée à l’association Mnémosyne6,
même si on peut considérer que, par rapport au monde nord-américain, les études de
genre ne se sont pas encore complètement institutionnalisées dans le paysage universitaire
français.
14 L’étude des articles publiés dans les Annales semble correspondre à cette évolution
générale et à ses limites. On relève ainsi en 1970 un premier article consacré au rapport
entre masculin et féminin, « Espace masculin, espace féminin en communauté
provençale », écrit par Lucienne A. Roubin (1970). La présence de la thématique,
longtemps épisodique, est surtout manifestée par des réalisations éditoriales visibles sous
la forme de dossiers spéciaux à partir des années 1980, après quelques textes isolés,
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04/01/2021 Genre, publication scientifique et travail éditorial. L’exemple de la revue Annales. Histoire, Sciences sociales

comme la contribution de Jacques Léonard au numéro sur la médecine de 1977, intitulée


« Femmes, religion et médecine » (Léonard, 1977), le compte rendu en 1982 du Bulletin de
l’Institut d’histoire du temps présent « Histoire orale et histoire des femmes », par Anne-
Marie Thiesse (1984) ou l’article de Jacques Dalarun sur « Robert d’Arbrissel et les
femmes » en 1984 (Dalarun, 1984). Un premier petit dossier a été consacré au rapport
entre masculin et féminin en 1982, avec des contributions de Luisa Accati Levi et Annette
B. Weiner (Annales ESC, 1982). Un deuxième dossier a été consacré à l’histoire des
femmes en 1986, accompagnant le mouvement historiographique à l’œuvre en France et
proposant en particulier un long essai historiographique collectif, signé par Michelle
Perrot, Arlette Farge, Cécile Dauphin, Christiane Klapisch-Zuber, Rose-Marie Lagrave,
Geneviève Fraisse, Pauline Schmitt-Pantel, Yannick Ripa, Pierrette Pézerat et Danièle
Voldman (Perrot et al., 1986), cette dernière donnant en 2015 dans Genre et Histoire un
intéressant récit rétrospectif des conditions d’élaboration de ce texte, issu d’un groupe
entièrement composé par des femmes et dédié de manière pionnière à la question de
l’histoire des femmes (Voldman, 2014-2015). Il a été suivi, en 1993, d’un troisième dossier
intitulé « Histoire des femmes, histoire sociale », où figurent cette fois des auteurs
hommes et qui introduit en particulier la distinction entre histoire des femmes et histoire
du genre, réunissant des textes de Claude Mossé, Roger Chartier, Jacques Rancière et
Gianna Pomata, accompagné d’un important ensemble de recensions sur la thématique
(Annales ESC, 1993). Un dernier dossier, consacré à l’histoire des femmes au Japon, est
publié en 1999, avec des textes d’Haruko Wakita et d’Anne Walthall, et un nouvel
ensemble de recensions (Annales HSS, 1999). Les Annales paraissent ainsi avoir été
relativement attentives à l’actualité historiographique dans le domaine de l’histoire des
femmes entre les années 1970 et les années 1990.
15 En revanche, l’articulation avec la question générale du genre et ses différentes
déclinaisons a été longue à se dessiner dans la revue et reste marginale aujourd’hui, ce qui
se traduit par le petit nombre d’articles publiés posant explicitement des interrogations
liées à ce concept durant les années 2000, même s’ils ne sont pas tout à fait absents,
comme le montre le texte de Jocelyne Dakhlia « Homoérotismes et trames
historiographiques du monde islamique », paru en 2007 (Dakhlia, 2007). La place
occupée en France par l’histoire des femmes, bien intégrée à une histoire sociale de large
rayon, a pu, à certains égards, être un obstacle à l’essor des études de genre. Mais surtout,
ces dernières déplaçaient les problématiques sur des terrains moins familiers aux
chercheurs français, alors qu’elles trouvaient aux États-Unis une réception bien plus
favorable, tant du point de vue méthodologique – dans la lancée des travaux théoriques
issus de Foucault, des subaltern studies et d’une proximité avec le linguistic turn – que du
point de vue politique, dans l’héritage d’une tradition de luttes pour les droits civiques au
sein de laquelle la question LGBT devenait centrale. De ce point de vue, il importe de
souligner que les espaces académiques nationaux ne sont pas homologues : la question du
genre dans sa thématisation nord-américaine, si elle a eu une influence décisive sur les
pratiques professionnelles internationales comme sur l’écriture de l’histoire, ne peut pas
faire l’objet d’une simple transposition française. C’est d’autant plus vrai qu’elle prend tout
son sens dans un triptyque où elle figure aux côtés de la notion de classe et surtout de celle
de race, un dispositif largement refusé par l’espace académique français, même si les
Annales ont consacré par exemple un dossier aux rapports entre histoire sociale et
identités raciales en 2009. Construire une interprétation historiographique reposant,
comme on le fait parfois, sur l’idée d’« avancées » et de « retards » respectifs sur telle ou
telle thématique ne reflète pas l’histoire sociale et intellectuelle complexe des pratiques
historiographiques. Pour autant, il faut prendre acte du fait que les Annales montrent une
distinction claire entre histoire des femmes et histoire du genre, et entre la conjoncture
des années 1980-1990, assez ouverte à la première thématique, et celle des années 2000,
où la seconde est plutôt absente, de même que ses prolongements dans le domaine de
l’étude des homosexualités, de la masculinité ou des études queer.

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16 Il faut noter également l’importance prise par les historiennes dans l’affirmation de ces
thématiques. Il est certes difficile de corréler, dans la durée, le genre à des thématiques
historiographiques données. Le dossier consacré par la revue à la discussion du livre de
Thomas Piketty, Le Capital au e siècle, en 2015 est masculin à une exception près,
tandis que le numéro spécial sur le quotidien du communisme en 2013 ne compte qu’un
homme. Cela pourrait indiquer que l’histoire de la vie quotidienne serait un domaine
d’étude plus féminisé, tandis que la macroéconomie serait plus masculine. Cela reflète
sans doute une tendance profonde à une hiérarchisation genrée des sujets de recherche,
mais il faudrait une étude beaucoup plus poussée pour en donner une véritable analyse.
En effet, du point de vue éditorial, on pourra faire valoir que le numéro sur le
communisme devait comporter plus d’hommes, dont les textes ne sont finalement pas
parvenus ou n’ont pas été acceptés par le comité, tandis que la masculinité du dossier sur
Piketty provient probablement davantage du phénomène évoqué plus haut à propos des
notes critiques, d’une prise de parole métascientifique et d’une position de commentaire
plus fréquemment masculines, que d’un effet thématique lié à l’économie. Cependant, les
textes publiés sur l’histoire des femmes dans les années 1970-1990, puis touchant à
l’histoire du genre, plus récemment, montrent une surreprésentation très nette des
femmes, ce qui est significatif.
17 C’est d’ailleurs ce dont témoigne encore, en 2012, le premier dossier consacré par la
revue à la question spécifique du genre, intitulé « Les régimes de genre dans les sociétés
occidentales de l’Antiquité au e siècle », avec la participation de Didier Lett, Violaine
Sébillotte Cuchet, Elke Hartmann, Gabriela Signori et Sylvie Steinberg, accompagné d’un
ensemble de comptes rendus « Genre » (Annales HSS, 2012). Lors du débat à la
Bibliothèque nationale de France qui a suivi la publication du numéro, et qui a été le
premier débat du cycle « Les Annales en débat », Sylvie Steinberg est également revenue
avec un regard critique sur les choix historiographiques opérés par la revue concernant la
question du genre, longtemps ignorée7. On peut se demander dans quelle mesure cette
mise à l’écart n’a pas été en partie le résultat d’une perception de la notion de genre
comme contradictoire avec l’histoire sociale renouvelée que la revue tentait de construire
depuis le « tournant critique » de 1989. De ce point de vue, l’introduction du dossier
de 2012 par Didier Lett (Annales HSS, 2012, p. 563-572) est particulièrement intéressante,
dans la mesure où elle reprend l’histoire de la notion en cherchant à articuler l’histoire du
genre aux interrogations redéfinissant les contours de l’histoire sociale dans le domaine de
la construction des catégories, dans celui de la prise en compte des acteurs et de l’analyse
de l’action, ou encore dans celui des régimes d’historicité. C’est sans doute ainsi que
s’exprime de la manière la plus claire ce que peut être aujourd’hui la perspective d’une
revue comme les Annales sur un objet comme le genre – ce qui nécessite au préalable de
ne pas s’en détourner, mais de la réinvestir d’un projet historiographique spécifique. C’est
aussi une manière de rappeler que l’histoire du genre n’est pas la seule manière de faire de
l’histoire des femmes, et inversement. C’est enfin une façon de souligner que la diversité
des approches en termes de genre est très grande, que c’est même l’un des intérêts de la
notion, par rapport à l’histoire des femmes, et que la diversité de ceux et celles qui utilisent
l’outil de genre n’est pas moins grande : non seulement il n’y a pas que des femmes qui
travaillent sur les femmes, des hommes sur les hommes ou les gays, lesbiennes, bi- et
trans- qui travaillent sur les LGBT, mais de plus les études de genre s’intègrent dans
l’analyse d’objets historiographiques infiniment variés – comme une revue d’histoire.

18 Ainsi, on voit tout l’intérêt de la notion de genre pour étudier le travail intellectuel et
éditorial accompli dans une revue comme les Annales et pour saisir ses mutations au cours
de près d’un siècle d’histoire. Cependant, l’histoire qui s’esquisse n’est ni linéaire, ni
univoque : elle montre, au contraire, la complexité des mécanismes à l’œuvre de manière
différenciée selon qu’on considère la publication, l’édition ou l’historiographie, par

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exemple. Reste néanmoins un aspect majeur qui émerge de cette analyse, une
prédominance masculine évoluant sous l’effet d’une féminisation progressive, somme
toute récente, réelle mais incomplète, autant des auteurs d’articles que des membres du
comité de rédaction. Un premier moment d’évolution du rapport de genre s’est déroulé
dans les années 1970-1980, dans un contexte social et politique où la question des droits
des femmes avait été centrale, lorsque la première femme entre au comité et que les
premiers dossiers sur l’histoire des femmes sont publiés. L’évolution a été ensuite plus
contrastée, puisqu’on observe un palier dans la féminisation des auteurs de la revue,
autour de 20 % entre les années 1980 et les années 2000, à un moment où on constate
aussi le recul de la place des femmes à l’EHESS (entre 1990 et 2000, de 23 % à 18 %),
l’institution dont dépend la revue et qui abrite plus de la moitié des membres de son
comité de rédaction. Puis les transformations survenues depuis une dizaine d’années
semblent marquer un nouveau seuil du point de vue du rapport de genre, qu’il s’agisse du
comité, des auteurs ou, plus généralement, du degré de conscience de la question – ce qui
correspond assez largement aux rythmes ou aux « vagues » de l’histoire récente du
mouvement féministe et à la politisation de la « cause des femmes » dans l’espace social et
politique, ainsi qu’à l’émergence, au sein de la revue, d’une génération plus sensible à la
question du genre. Depuis la fin des années 2000, la proportion d’auteures publiées dans
les Annales se rapproche de la proportion nationale de femmes dans l’enseignement
supérieur et la recherche en sciences sociales (43 % tous corps confondus, contre 36 % si
l’on prend en compte l’ensemble des disciplines, mais avec une forte dissymétrie entre un
rang A encore masculin pour les trois quarts et un rang B paritaire)8 – ce qui est en partie
un effet d’optique, puisqu’évidemment, un nombre important de chercheuses et de
chercheurs publiant dans les Annales est étranger. Mais si le décalage entre les hommes et
les femmes dans les soumissions d’articles témoigne que l’ancienneté, la centralité et le
capital symbolique des Annales dans le champ des revues en histoire et sciences sociales
peuvent toujours avoir des effets genrés, le rééquilibrage partiel au niveau des articles
sélectionnés montre que ces effets peuvent être contrebalancés dans une certaine mesure
par les procédures scientifiques d’examen des textes.
19 Un écart subsiste néanmoins, fruit tout à la fois de la sociologie du milieu de la
recherche en sciences sociales et de biais hérités, qu’ils soient historiques, institutionnels
ou symboliques. Ce constat rappelle que la transformation observée dans la période
récente ne peut pas être considérée comme une évolution « naturelle » vers la
féminisation des métiers de la recherche en sciences sociales – ce dont témoigne aussi, par
exemple, la stagnation de la situation des femmes dans les universités américaines depuis
les années 1980 du point de vue du rang et du salaire. Cette évolution, on l’a vu, n’est pas
non plus linéaire. Il importe de distinguer non seulement des rythmes, mais des logiques
sociales et intellectuelles diverses, à l’œuvre dans des moments distincts. Les années 1970-
1980, qui marquent un premier temps fort de cette histoire, correspondent à un moment
où se rencontrent une féminisation encore limitée des métiers intellectuels et un
militantisme sociopolitique intense. Les années 2000-2010, autre temps fort, relèvent
d’une logique qu’il faudrait explorer davantage, mais qui est sans doute différente. Le
militantisme, entendu dans un sens général, semble y tenir moins de place que
l’affirmation d’enjeux et de revendications professionnels spécifiques comme la parité,
dans des métiers dont la féminisation s’est nettement accrue en un temps assez court,
comme la politique ou la recherche. L’évolution récente, qu’il serait intéressant de
comparer avec d’autres situations nationales9, est ainsi à la fois le résultat d’une
transformation récente des rapports de genre à l’échelle de l’ensemble du métier, voire de
la société, et celui d’une action délibérée, dès lors que la question du genre est considérée
comme un enjeu légitime dans une politique éditoriale au sein d’une revue.
20 Reste pour finir à éclairer les fondements de cette légitimité. En effet, ce n’est pas parce
que l’importance accordée à la question du genre semble aujourd’hui faire relatif
consensus dans le monde universitaire que sa justification théorique ne doit pas être
l’objet d’une réflexion particulière dans le cadre des pratiques scientifiques. À cet égard,

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s’il est clair que cette question engage une politique de la recherche cohérente, il importe
aussi de distinguer politique et recherche. Sur le plan politique, l’attention au genre relève
d’un souci d’égalité entre les hommes et les femmes qui traverse l’ensemble de la société
contemporaine, bien au-delà du monde universitaire. Même si certains la dénoncent
parfois comme relevant du « politiquement correct », cette attention se justifie pour des
raisons qui relèvent d’une conception de la vie en société selon laquelle, parmi les
différentes formes d’inégalités, celles produites par la différence de genre sont plus
importantes ou, comme on le dit parfois, plus « universelles » (ce qui renvoie au fait que
les femmes ne sont pas une « minorité », même si on les inscrit souvent dans ce cadre
d’analyse), plus inacceptables et aussi, peut-être, plus susceptibles de solution rapide par
les institutions que d’autres formes d’inégalités. Cependant, comme le montrent les
critiques théoriques adressées aux différentes formes de quotas, la mise en œuvre concrète
d’une politique visant l’équité en termes de genre n’a rien d’évident – et ne tient pas
forcément à l’application d’une formule unique dans tous les pays et dans tous les champs
de la vie sociale. C’est encore plus vrai sur le plan scientifique, où le présupposé du
jugement des travaux de recherche repose sur l’idée d’une forme de neutralité de la science
à l’égard des caractéristiques individuelles des auteurs. Dès lors, la prise en compte de la
question du genre pourrait sembler relever d’une bonne volonté politique parfois
potentiellement contradictoire avec une évaluation de la qualité, qui pourrait se vouloir
relativement indifférente au facteur de genre, au risque de produire des biais dans la
représentation. En réalité, les observations faites à partir de l’exemple des Annales et
synthétisées ici conduisent à une autre lecture du problème. Il n’y a pas forcément besoin
d’introduire des quotas ou de soutenir prioritairement des articles écrits par des femmes
pour parvenir à un rapport de genre plus équilibré. Ce que nous avons pu mettre en
évidence dans la soumission, l’évaluation et la publication d’articles écrits par des femmes
montre que le problème devient plutôt celui de savoir comment essayer de réduire en
amont les effets de l’environnement institutionnel et de l’autocensure, de manière à ce que
les chercheuses qui n’auraient peut-être pas proposé d’articles à la revue se sentent
fondées à le faire, et en aient le temps et les moyens matériels. Cela dépasse évidemment le
cadre de l’action d’une revue, comme celui de cet article : la capacité d’action des femmes
et la représentation de leur place dans le monde de la recherche à leurs propres yeux sont
aussi liées à l’ouverture de chantiers sur les conditions du travail intellectuel au féminin,
qu’il s’agisse des procédures de recrutement, de la division sexuée du travail collectif, de
l’existence de crèches ou de dispositifs de remplacement en cas de congé maternité. Plus
largement encore, il faut rappeler que la féminisation, surtout envisagée sous son angle
quantitatif, comme cela a été le cas pour l’essentiel dans cet article, n’est qu’un aspect de
rapports de genre bien plus complexes, en particulier du point de vue de l’articulation
entre expériences individuelles, histoire de la discipline et dispositifs de pouvoir.
21 Dans le cas des Annales, la principale forme de contribution à la modification des
équilibres de genre au sein du travail intellectuel est d’essayer de procéder par l’exemple :
publier les meilleurs textes que nous recevons en y soulignant la part des chercheuses
comme nous le faisons dans cet article et en sollicitant délibérément ces dernières ;
travailler à donner aux femmes une place équivalente aux hommes dans le cadre du
comité de rédaction ; réfléchir à l’importance théorique et pratique de la notion de genre
dans l’outillage intellectuel des sciences sociales. Ces choix relèvent autant, voire plus, de
la science que de la politique, car il s’agit d’abord d’encourager la production de sciences
historiques et sociales pluralistes d’un point de vue sociologique. En effet, ce pluralisme
est au fondement même de la qualité intellectuelle recherchée par la revue et repose sur la
prise en compte explicite et réflexive d’un certain nombre de différences sociales, au sens
de Didier Lett, existant chez les chercheurs et les chercheuses. Le genre y occupe, on l’a
dit, une place particulière, mais il ne faut pas négliger l’origine sociale et géographique des
personnes, leur âge, leur discipline, leur terrain de recherche, leur parcours professionnel
depuis le début de leur carrière ou encore leur institution de rattachement et leurs
conditions matérielles d’exercice. Ces différences constituent des éléments déterminants

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du travail scientifique. Leur maîtrise réflexive par une institution comme une revue
scientifique est un enjeu essentiel pour l’épistémologie autant que pour la politique des
sciences sociales : c’est d’abord à ce titre que les Annales tentent, dans leur pratique
quotidienne, de s’y confronter de leur mieux.

Bibliographie
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https://genrehistoire.revues.org/2074], consulté le 7 janvier 2017.

Notes
1 Sur ces enjeux historiques, voir Rogers (éd., 2004)
2 Voir par exemple Lambert et Schofield (éd., 2004, chap. 2 et 3).
3 Voir Rogers et Molinier (éd., 2016) qui évoque l’essor des recherches à ce sujet depuis dix ans et
la commande de rapports consacrés à la parité, comme celui du Sénat [en ligne], [URL :
http://www.senat.fr/notice-rapport/2012/r12-655-notice.html]. Voir le billet d’Academia qui
présente ce rapport [en ligne], [URL : https://academia.hypotheses.org/1130] consulté le 07 janvier
2017.
https://journals.openedition.org/traces/6914 13/14
04/01/2021 Genre, publication scientifique et travail éditorial. L’exemple de la revue Annales. Histoire, Sciences sociales
4 Antoine Lilti prend la direction de la rédaction à la fin de l’année 2006. Il me propose d’entrer à
la rédaction en 2007, puis de nouveaux membres participent au comité à partir de 2008. Je prends
sa suite à la tête de la revue à la fin de l’année 2011, tandis que le renouvellement des membres du
comité se poursuit, voir plus loin à ce sujet.
5 « Gender Bias Past and Present » [en ligne], [URL : http://pastandpresent.org.uk/gender-bias-
past-present], consulté le 7 janvier 2017.
6 Revue [en ligne], [URL : https://genrehistoire.revues.org/], consulté le 7 janvier 2017.
7 Voir [en ligne], [URL : http://www.canal-
u.tv/video/ehess/regime_de_genre_dans_les_societes_occidentales_de_l_antiquite_au_xviie_siecle.12917],
consulté le 15 novembre 2016.
8 Voir le rapport de 2016 Enseignement supérieur et recherche. Vers l’égalité homme-femme ?
Chiffres-clés [en ligne], [URL : http://www.enseignementsup-
recherche.gouv.fr/cid106655/enseignement-superieur-et-recherche-vers-l-egalite-femmes-
hommes-chiffres-cles-parution-2016.html], consulté le 15 novembre 2016. Voir aussi le rapport du
Sénat À la recherche d'un nouvel équilibre hommes-femmes dans l'enseignement supérieur et la
recherche [en ligne], [URL : http://www.senat.fr/notice-rapport/2012/r12-655-notice.html] et le
billet d’Academia qui présente ce rapport [en ligne], [URL : https://academia.hypotheses.org/1130]
consulté le 07 janvier 2017.
9 Voir par exemple, Rogers et Molinier (éd., 2016) évoqué à la note 3 et les données mises en ligne
de la revue Past and Present citées plus haut, les très intéressantes données concernant la
féminisation des publications et de l’histoire comme discipline dans ses divers aspects (postes,
sociétés savantes, récompenses…) pour le cas de l’Australie, qui est marqué par une présence bien
plus forte des femmes [en ligne], [URL : http://theconversation.com/how-women-historians-
smashed-the-glass-ceiling-66778] consulté le 15 novembre 2016.

Pour citer cet article


Référence électronique
Étienne Anheim, « Genre, publication scientifique et travail éditorial. L’exemple de la revue Annales.
Histoire, Sciences sociales », Tracés. Revue de Sciences humaines [En ligne], 32 | 2017, mis en
ligne le 18 mai 2017, consulté le 05 janvier 2021. URL : http://journals.openedition.org/traces/6914 ;
DOI : https://doi.org/10.4000/traces.6914

Cet article est cité par


Albert, Anaïs. Rabier, Christelle. Goldblum, Sonia. Kreplak, Yaël. Lavergne, Cécile.
Tangy, Lucie. (2018) Tracés à l’épreuve de la parité. Entretien croisé avec Sonia
Goldblum, Yaël Kreplak, Cécile Lavergne et Lucy Tangy. Tracés. DOI:
10.4000/traces.9274

Auteur
Étienne Anheim
Centre de recherches historiques, EHESS

Articles du même auteur


Le Moyen Âge et les boucles du temps. Entretien avec Étienne Anheim [Texte intégral]
Paru dans Tracés. Revue de Sciences humaines, 36 | 2019

Droits d’auteur

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