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Année académique 2022-2023

UCAO/UUA
Master 1, droit privé
T.D. DE DROIT DES INSTRUMENTS DE PAIEMENT
ET DE CREDIT

Chargé de cours : Dr YOLI BI


Confection de la fiche : Mme KOFFI
Sandrine

Fiche numéro … : Le défaut de paiement : le protêt faute de paiement

I- DISCUSSION EN SEANCE

1. Quel est l’intérêt de faire dresser le protêt faute de paiement ? Quelles


sont par ailleurs les personnes habilitées à dresser le protêt ?
2. Quels sont les délais légaux pour faire dresser le protêt faute de
paiement ?
3. A quelles conditions le créancier est-il dispensé de faire dresser le protêt
faute de paiement ?
4. Le protêt faute de paiement vaut il titre exécutoire ?

II- COMMENTAIRE D’ARRÊT


Vous êtes invités à faire la fiche d’arrêt de la décision suivante :
Cour d’appel de commerce d’Abidjan, 1e chambre, RG N° 205/2019 du
02/05/2019
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE
DU JEUDI 02 MAI 2019
La Cour d’Appel de Commerce d’Abidjan, en son audience publique ordinaire
du jeudi deux mai de l’an deux mil dix-neuf tenue au siège de ladite Cour, à
laquelle siégeaient :
Docteur KOMOIN François, Premier Président de la Cour d’Appel de Commerce
d’Abidjan ;
Madame RAMDÉ Assetou épouse OUATTARA et Messieurs TALL Yacouba,
NIAMKEY K. Paul et SILUÉ Daoda, Conseillers à la Cour, Membres ;
Avec l’assistance de Maître DOUHO Thémaubly Danielle épouse BAHI, Greffier
; A rendu l’arrêt dont la teneur suit dans la cause ;

ENTRE :
LA SOCIÉTÉ X, Société à Responsabilité Limitée, (…)
Appelante,
Représentée et concluant par son conseil, (…) ;
D’UNE PART ;
ET ;
1°- LA SOCIÉTÉ Y, Société à Responsabilité Limitée (…) ;
2°- MAÎTRE CISSÉ …, huissier de justice (…),
3°- MAÎTRE MONDON …, Commissaire-priseur (…),
Intimés,
(…)
D’AUTRE PART ;
Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier en quoi que ce soit
aux droits et intérêts respectifs des parties en cause, mais au contraire et sous
les plus expresses réserves des faits et de droit ; La juridiction présidentielle du
Tribunal de Commerce d’Abidjan statuant en la cause en matière d’urgence a
rendu le 07 mars 2019 une ordonnance de référé N° 0453/19 qui a débouté la
société X de son action en mainlevée de saisie-vente de ses meubles corporels ;
Par exploit du 15 mars 2019 de Maître A, huissier de justice à Odienné, la
société X a interjeté appel de l’ordonnance sus énoncée et a par le même
exploit assigné la société Y Sarl, (…) à comparaître par-devant la Cour de ce
siège pour s’entendre infirmer l’ordonnance querellée en toutes ses
dispositions ; (…) Advenue cette audience, la Cour a vidé son délibéré en
rendant l’arrêt suivant :
LA COUR
Vu les pièces du dossier ;
Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par exploit d’huissier en date du 15 mars 2019, comportant ajournement au 28
mars 2019, la société X, (…), a relevé appel de l’ordonnance RG N°0453/2019
rendue le 07 mars 2019 par la juridiction présidentielle du Tribunal de
commerce d'Abidjan, laquelle, en la cause, a déclaré mal fondée sa demande
en mainlevée d’une saisie vente pratiquée sur ses biens meubles corporels le
26 avril 2018 ; Au soutien de son appel, elle expose qu’en vertu de deux
chèques DIAMOND BANK N°8617845 et 8617847 par elle émis à l’ordre de la
société Y les 09 et 13 mars 2017 et revenus impayés, cette société a fait
pratiquer une saisie conservatoire sur ses biens meubles corporels le 28
décembre 2017 ; Elle ajoute que les 13 et 22 mars 2018, le Greffier en chef du
Tribunal de commerce d'Abidjan a délivré à celle-ci deux récépissés de protêt
faute de paiement, puis des formules exécutoires ; Elle précise que muni
desdits documents, la société Y a converti la saisie conservatoire pratiquée en
une saisie vente par acte daté du 26 avril 2018 ; Poursuivant, elle indique que
par exploit du 17 janvier 2019, ladite société a procédé à la vérification et à
l’enlèvement des biens saisis et lui a fait sommation d’avoir à assister à la vente
; Elle fait savoir que contestant cette saisie, elle a fait servir assignation à la
société Y d’avoir à comparaître devant le juge de l’exécution du tribunal de
commerce d’Abidjan à l’effet d’en obtenir la mainlevée ; Toutefois, vidant sa
saisine, celui-ci a rendu la décision dont appel ; Elle fait grief au premier juge
d’avoir statué de la sorte alors que d’une part, la saisie en cause a été
pratiquée sans titre exécutoire et d’autre part, le recours du porteur du chèque
est prescrit ; Relativement au défaut de titre exécutoire allégué, elle explique
que le récépissé de protêt faute de paiement en vertu duquel la saisie
conservatoire a été convertie en une saisie-vente a été dressé par le Greffier en
chef du tribunal de commerce d’Abidjan, ce, en violation de l’article 102 du
Règlement N° 015/2002/CM/UEMOA relatif aux systèmes de paiement dans les
États membres de l'UEMOA du 19 septembre 2002 prévoyant que le protêt
doit être fait par un notaire, un huissier ou par toute personne ou institution
dûment habilitée ; Selon elle, un tel récépissé ne vaut pas titre exécutoire, de
sorte que la conversion de la saisie viole l’article 88 de l’acte uniforme portant
organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d’exécution exigeant que l’acte de conversion comporte le titre exécutoire en
vertu duquel la saisie est pratiquée ; Relativement à la prescription du recours
de la société Y, elle soutient que l'article 109 du Règlement UEMOA susvisé
prévoit que les recours du porteur contre les endosseurs, le tireur se
prescrivent par six (6) mois à partir de l’expiration du délai de présentation ; 5
Elle en déduit que les chèques revenus impayés ayant été libellés les 09 et 13
mars 2017, les délais de présentation prévus par l'article 81 du Règlement
UEMOA commençaient à courir les 17 et 20 mars 2017, de sorte que la société
Y avait jusqu'au 17 et 20 septembre 2017 pour exercer son recours contre elle ;
Pour toutes ces raisons, elle sollicite l’infirmation de l’ordonnance querellée et
que statuant à nouveau, la Cour d’Appel de céans : - constate que la conversion
de la saisie conservatoire de biens meubles en cause a été pratiquée sans titre
exécutoire ; - constate également que le recours de la société Y est prescrit ; -
ordonne par voie de conséquence la mainlevée de la saisie conservatoire
convertie en saisie-vente ; - condamne la société Y aux dépens ; En réplique, la
société Y fait valoir que contrairement aux prétentions de la société X, ce n’est
pas le Greffier en Chef du Tribunal de Commerce d’Abidjan qui a dressé les
protêts faute de paiement en cause, mais plutôt Maître CISSÉ …, Huissier de
Justice ; Elle précise que la conversion de la saisie conservatoire de biens
meubles corporels en saisie-vente a été faite en vertu des formules exécutoires
dûment délivrées par le Greffier en Chef du Tribunal de Commerce d’Abidjan,
après la remise des deux protêts ; Elle estime donc que ces deux formules
exécutoires constituent bel et bien des titres exécutoires, conformément aux
articles 123 du Règlement n° 15/2002/CM/UEMOA précité et 259 du code de
procédure civile, commerciale et administrative ; Relativement à la prescription
alléguée par l’appelante, elle relève que selon l’article 109 du Règlement
susvisé, en cas de déchéance ou de prescription, il subsiste une action contre le
tireur qui n’a pas fait provision ou les autres obligés qui se seraient enrichis
indûment ; Elle en déduit que les deux chèques émis par l’appelante étant
revenus impayés pour défaut de provision, nonobstant la prescription, son
action contre celle-ci subsiste ; Aussi, conclut-elle à la confirmation de
l’ordonnance querellée et à la condamnation de l’appelante aux dépens de
l’instance (…) ;
SUR CE
En la forme
Sur le caractère de la décision
Considérant que la société Y a conclu ; Qu’il y a lieu de statuer
contradictoirement ;
Sur la recevabilité de l’appel
Considérant que l’appel de la société X a été interjeté dans les forme et délai
légaux ; Qu’il convient de le déclarer recevable ;
Au fond
Sur le bien-fondé de l’appel
Sur le moyen tiré du défaut de titre exécutoire
Considérant que la société X fait grief au premier juge d’avoir rejeté sa
demande de mainlevée de la saisie pratiquée, alors qu’en violation de l’article
88 de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de
recouvrement et des voies d’exécution, la société Y a procédé à la conversion
de la saisie conservatoire en une saisie-vente sans titre exécutoire ; Qu’elle
explique que le récépissé de protêt faute de paiement délivré par le Greffier en
chef du tribunal de commerce d’Abidjan ne vaut pas titre exécutoire au sens de
l’article 102 du Règlement N° 015/2002/CM/UEMOA ; 7 Considérant que la
société Y conclu quant à elle à la confirmation de l’ordonnance querellée au
motif que les deux protêts en cause ont plutôt été dressés par Maître CISSE Yao
Jules, Huissier de Justice, et la conversion de la saisie conservatoire de biens
meubles corporels en saisie vente a été faite en vertu des formules exécutoires
dûment délivrées par le Greffier en Chef du Tribunal de Commerce d’Abidjan,
après la remise effective des deux protêts ; de sorte qu’elle disposait d’un titre
exécutoire, conformément aux articles 123 du Règlement n°
15/2002/CM/UEMOA précité et 259 du code de procédure civile, commerciale
et administrative ; Considérant qu’aux termes de l’article 88 de l’acte uniforme
susvisé, « Muni d'un titre exécutoire constatant l'existence de sa créance, le
créancier signifie au débiteur un acte de conversion en saisie-vente qui
contient, à peine de nullité : 1) les noms, prénoms et domiciles du saisi et du
saisissant ou, s'il s'agit de personnes morales, leurs forme, dénomination et
siège social ; 2) la référence au procès-verbal de saisie conservatoire ; 3) la
copie du titre exécutoire sauf si celui-ci a déjà été communiqué lors de la
signification du procès-verbal de saisie, auquel cas il est seulement mentionné ;
4) le décompte distinct des sommes à payer en principal, frais et intérêts échus,
ainsi que l'indication du taux des intérêts ; 5) un commandement d'avoir à
payer cette somme, faute de quoi il sera procédé à la vente des biens saisis ; 6)
l'indication, en caractères très apparents, que le débiteur dispose d'un délai
d'un mois pour procéder à la vente amiable des valeurs saisies dans les
conditions prescrites par les articles 115 à 119 ci-dessous ; 7) la reproduction
des articles 115 à 119 ci-dessous » ; Qu’il s’en infère que pour procéder à la
conversion d’une saisie conservatoire de biens meubles corporels en une
saisie-vente, le créancier doit obtenir au préalable un titre 8 exécutoire qui
constate l’existence de sa créance ; Considérant que l’article 123 du Règlement
N° 15/2002/CM/UEMOA relatif aux systèmes de paiement dans les États
membres de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)
dispose que : « À défaut de paiement du chèque dans le délai de trente (30)
jours à compter de la première présentation ou de la constitution de la
provision dans le même délai, le tiré délivre un certificat de non-paiement au
porteur du chèque dans les conditions déterminées par arrêté conjoint du
Ministre chargé des Finances et du Ministre chargé de la Justice. Cette
délivrance sera faite, sans frais, par l'intermédiaire du banquier du porteur. La
notification effective ou la signification du certificat de non-paiement au tireur
par ministère d'huissier vaut commandement de payer. Le notaire, l'huissier de
justice ou la personne ou l’institution habilitée qui n'a pas reçu justification du
paiement du montant du chèque et des frais dans un délai de dix (10) jours à
compter de la réception de la notification ou de la signification constate le non-
paiement. L'acte dressé est ensuite remis par le notaire, l'huissier de justice ou
la personne ou l’institution habilitée au Greffier du Tribunal compétent qui
délivre, sans autre acte de procédure et sans frais, un titre exécutoire qui
permet de procéder à toutes voies d'exécution dans un délai maximum de huit
(08) jours. En tout état de cause, tous les frais de saisie et d'exécution avancés
par le porteur de même que tous les autres frais occasionnés par le rejet d'un
chèque sans provision, sont à la charge du tireur auprès duquel ils peuvent être
récupérés. » ; Qu’il résulte de ces dispositions qu’après remise du protêt faute
de paiement dressé par un huissier de justice, un notaire ou la personne ou
l’institution habilitée, le Greffier du tribunal compétent délivre un titre
exécutoire en vertu duquel une exécution forcée peut être entreprise ;
Considérant qu’en l’espèce, il est constant ainsi qu’il ressort de l’examen des
pièces produites au dossier, notamment les protêts faute de paiement, les
récépissés de remise de protêt faute de paiement et les formules exécutoires
que contrairement aux prétentions de la société X, ces protêts ont bel et bien
été dressés par Maître CISSÉ…, Huissier de Justice à Abidjan et ont été par la
suite remis au Greffier en Chef du Tribunal de commerce d’Abidjan qui a délivré
lesdites formules exécutoires ; Que ces formules exécutoires ayant été
délivrées conformément aux dispositions de l’article 123 du Règlement UEMOA
susvisé, elles constituent donc des titres exécutoires ; Qu’ainsi, c’est à bon droit
que le premier juge a rejeté ce moyen tiré du défaut de titre exécutoire,
comme inopérant ; Qu’il convient dès lors de confirmer l’ordonnance querellée
sur ce point ;
Sur le moyen tiré de la prescription du recours du porteur du chèque
Considérant que la société X reproche également au premier juge d’avoir
déclaré régulière la saisie en cause, alors que l’action en recouvrement de la
société Y était prescrite au regard des dispositions de l’article 109 du
Règlement N° 15/2002/CM/UEMOA relatif aux systèmes de paiements dans les
États membres de l’UEMOA du 19 Septembre 2002 ; Considérant que cet
article dispose que : « Les actions en recours du porteur contre les endosseurs,
le tireur et les autres obligés se prescrivent par six (6) mois à partir de
l'expiration du délai de présentation. Les actions en recours des divers obligés
au paiement d'un chèque les uns contre les autres se prescrivent par six (6)
mois à partir du jour où l'obligé a remboursé le chèque ou du jour où il a été
lui-même actionné. Toutefois, en cas de déchéance ou de prescription, il
subsiste une action contre le tireur qui n'a pas fait provision ou les autres
obligés qui se seraient enrichis indûment. L'action du porteur du chèque contre
le tiré se prescrit par trois ans à partir de l'expiration du délai de présentation
visé à l'article 81 du présent Règlement » ; Qu’il en résulte que les recours du
porteur contre les endosseurs, le tireur et les autres obligés du chèque se
prescrivent par six (6) mois à partir de l'expiration du délai de présentation ;
Que toutefois, en cas de déchéance ou de prescription, l’action contre le tireur
qui n'a pas fait provision subsiste ; cette provision devant exister du reste au
moment de la création du chèque ; Considérant en outre qu’aux termes de
l’article 81 du Règlement n° 15 de l’UEMOA, « Le chèque émis et payable dans
un État membre de l’UEMOA doit être présenté au paiement dans le délai de
huit (8) jours si le paiement doit s'effectuer au lieu d'émission, et, dans les
autres cas, dans le délai de vingt (20) jours... » ; Considérant qu’en l’espèce, les
chèques DIAMOND BANK N° 8617845 et N° 8617847 ayant été émis
respectivement les 09 et 13 mars 2017, ceux-ci devaient être présentés au
paiement au plus tard les 17 et 21 mars 2017 ; Qu’il s’ensuit que les protêts
faute de paiement établis le 29 janvier 2018, l’ont été plus de six (06) mois
après l’expiration du délai de présentation ; Considérant toutefois que
conformément à l’article 109 alinéa 3 du Règlement n° 15 de l’UEMOA susvisé,
en dépit de cette prescription, la société Y disposait toujours d’un recours
contre le tireur qu’est l’appelante pour obtenir paiement des sommes d’argent
ayant fait l’objet des chèques DIAMOND BANK N° 8617845 et N° 8617847
revenus impayés, ceux-ci étant revenus impayés pour défaut de provision,
prouvant en l’espèce que la société Y, le tireur des chèques, n’a pas fait
provision ; Que partant, c’est à juste titre que le premier juge a rejeté ce moyen
tiré de la prescription du recours de la société Y ; Qu’il convient également de
confirmer l’ordonnance querellée sur ce point ;
Sur les dépens
Considérant que la société X succombe ; Qu’il convient de mettre à sa charge
les dépens de l’instance, (…) ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ; Déclare
recevable l’appel de la société X interjeté contre l’ordonnance RG N°
0453/2019 rendue le 07 mars 2019 par la juridiction présidentielle du Tribunal
de Commerce d'Abidjan ; L’y dit cependant mal fondée ; L’en déboute ;
Confirme l’ordonnance querellée en toutes ses dispositions ; La condamne aux
dépens de l’instance, distraits au profit de Maître KONAN N’dri Marie-Ange,
Avocat aux offres de droit ; Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour,
mois et an que dessus.
ET ONT SIGNÉ LE PREMIER PRÉSIDENT ET LE GREFFIER./.

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