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ARRET RMUA 838


En cause : La société CFAO MOTORS RDC SARL
C/ La société Centre Médical Diamant SARL
Par déclaration faite et actée au greffe de la Cour de céans en date du
13 Août 2021, Maître Gogo WETSHI KITENGE, avocat au barreau de
Kinshasa / MATETE et porteur d’une procuration spéciale du 12 Aout
2021 lui remise par la société CFAO MOTORS RDC SARL, ayant son siège
à Kinshasa, 8, Boulevard Congo-Japon, poursuites et diligences de
Monsieur Patrick Mathurin NGALANI PEUYEU, son gérant, a, pour mal
jugé, relevé appel de l’ordonnance MU1571 rendue par la juridiction
présidentielle du Tribunal de commerce de Kinshasa/Gombe le 06 Août
2021 dans la cause opposant cette dernière société à la société Centre
Médical Diamant Sarl ; ordonnance dont le dispositif est libellé comme
suit :
« La juridiction compétente ;
Statuant contradictoirement à l’égard de la société Centre Médical
Diamant Sarl et de la société CFAO MOTORS Sarl ;
Vu l’acte uniforme du 10 Avril 1998 portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution,
spécialement en ses articles 49, 156, 172 ;
Vu la loi organique n°13/011-3 du 11 Avril 2013 portant organisation,
fonctionnement et compétences des juridictions de l’ordre judiciaire ;
Vu la loi n°002/2001 du 03 Juillet 2001 portant création, organisation et
fonctionnement des tribunaux de commerce ;
Vu le code de procédure civile ;
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Dit recevable et fondée l’action mue par la société Centre Médical


Diamant Sarl ; en conséquence, condamne la société CFAO MOTORS
RDC Sarl, pour déclarations incomplètes et fausses au paiement des
causes de la saisie de la somme de 1.046.817,56 USD ;
La condamne également au paiement en franc congolais de la somme
de 5.000 USD (dollars américains cinq mille) à titre des dommages-
intérêts ;
Met les frais à sa charge ;
Dit exécutoire sur minute la présente décision, nonobstant appel ».
Maître Gogo WETSHI KITENGE a, au nom et pour le compte de la
société CFAO MOTORS RDC Sarl, introduit une requête réceptionnée au
secrétariat du Premier Président de la Cour de céans le 18 Août 2021,
tendant à obtenir les défenses à exécution de la décision sus rappelée
et l’autorisation d’assigner à bref délai, à cet effet la société Centre
Médical Diamant Sarl.
Forte de la permission du Premier Président de cette Cour, suivant
l’ordonnance n°690/2021 du 19 Août 2021, la requérante assigna cette
dernière société à comparaître à l’audience publique du 25 Août 2021
pour s’entendre statuer sur les mérites de sa requête.
A l’audience susvisée, à laquelle l’affaire fut appelée, plaidée et prise en
délibéré après l’avis du ministère public donné sur les bancs, les parties
comparurent représentées par leurs respectifs, la requérante
volontairement par Maître SHEBELE conjointement avec Maître Gogo
WETSHI KITENGE, et la défenderesse par Maîtres KAMWANYA et
ONYONS Gaby, tous avocats aux barreaux, le premier près la Cour de
cassation et du Conseil d’Etat, le second de Kinshasa/MATETE et les
deux derniers de Kinshasa/Gombe.
La procédure ainsi suivie est régulière.
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Introduite dans les forme et délai, la présente est recevable.


Explicitant son action, la requérante expose que la défenderesse a fait
procéder à la saisie des créances sur les avoirs de la société GRAS
SAVOYE RDC SA détenus par elle (la requérante); consécutivement à
cette saisie-attribution, la défenderesse l’assigna sous RMU 1571 par
devant la juridiction présidentielle du Tribunal de commerce de
Kinshasa/ Gombe en paiement des causes de la saisie.
La juridiction saisie rendit sa décision en l’assortissant de la clause
exécutoire sur minute nonobstant appel.
Elle affirme que l’article 49 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures
simplifiées de recouvrement et voies d’exécution qui pose le principe
du caractère non suspensif du délai de l’appel et de l’exercice de ce
recours sous réserve de la décision contraire du juge de l’exécution,
n’interdit en rien l’exercice d’une procédure de défenses à exécution
prévue par la loi nationale.
Elle renchérit en soutenant que l’article 172 du même Acte Uniforme
prévoit que le délai pour faire appel ainsi que la déclaration d’appel
sont suspensifs d’exécution sauf décision contraire spécialement
motivée de la juridiction compétente.
Elle prétend que la juridiction compétente saisie n’a pas donné les
motifs qui l’ont conduit à assortir son ordonnance de la clause
d’exécution sur minute nonobstant appel ; qu’en outre, ladite
juridiction dit exécutoire toute la décision sans distinguer les causes de
la saisie, le principal des dommages-intérêts.
Elle demande à la Cour de dire fondée sa requête et lui accorder les
défenses sollicitées.
A titre de réplique, la défenderesse souligne que l’article 172 de l’Acte
Uniforme précité qu’aurait violé la juridiction compétente, ne cadre pas
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avec la présente action ; car il s’agit en l’espèce d’une difficulté


d’exécution et non d’une contestation ; elle affirme que les dispositions
de l’article 49 al 3 de ce même Acte Uniforme prévoit que le délai
comme l’exercice de cette voie de recours n’ont pas un caractère
suspensif, sauf décision contraire spécialement motivée de juge saisi ;
selon elle, celui-ci, en application de cette disposition, n’est pas tenu de
motiver une clause d’exécution provisoire qui est de plein droit, selon la
volonté du législateur communautaire.
Enfin, elle argue qu’en l’espèce, ce ne sont pas les dispositions des
articles 21 et 76 du code de procédure civile qui doivent s’appliquer
mais plutôt de l’article 49 al 3 susmentionné.
S’agissant des dommages-intérêts qui seraient visés par la clause
exécutoire, elle relève que l’article 156 de l’Acte Uniforme relatif aux
procédures simplifiées de recouvrement et voies d’exécution prévoit la
condamnation du tiers saisi aux causes de la saisie et aux dommages-
intérêts ; que, selon elle, en matière d’exécution provisoire, c’est le
principal, donc en l’espèce les causes de la saisie, qui est exécutoire sur
minute nonobstant appel mais non l’accessoire, les dommages-
intérêts ; à son entendement, il va de soi que l’exécution provisoire ne
concerne pas les dommages-intérêts.
Selon la Cour, il ressort de la lecture de l’ordonnance attaquée que la
juridiction présidentielle qui l’a rendue s’est fondée, aux fins de
l’assortir de la clause exécutoire sur minute nonobstant tout appel, sur
l’article 172 de l’Acte Uniforme sus rappelé qui dispose : « La décision
de la juridiction tranchant la contestation est susceptible d’appel dans
les quinze jours de sa notification. Le délai pour faire appel ainsi que la
déclaration d’appel sont suspensifs d’exécution sauf décision contraire
spécialement motivée de la juridiction compétente ».
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La Cour, empruntant l’enseignement de la doctrine, relève que cette


disposition traite spécifiquement des modalités de l’appel exercé
contre la décision de la juridiction tranchant une contestation entre le
débiteur saisi et le créancier saisissant, laquelle s’entend des seuls
incidents relatifs à la saisie et non point de tous les incidents
indifféremment, dont la saisie pourrait être l’occasion, ce qui explique
que le tiers saisi, dans le cadre ainsi circonscrit, ne soit qu’appelé à
l’instance de ladite contestation ( Note sous l’article 172 de l’Acte
Uniforme organisant les procédures simplifiées de recouvrement et
voies d’exécution, in OHADA, code pratique, Traité, Actes Uniformes et
Règlements annotés, Ed. Francis LEFEBVRE, p. 962).
La Cour opine que le juge, après avoir reconnu que l’espèce lui soumis
relevait de dispositions de l’article 156 de l’Acte Uniforme précité qui
vise la responsabilité du tiers saisi pour les causes de saisie, n’aurait pas
dû, pour insérer la clause exécutoire dans son ordonnance, appliquer
l’article 172 du même texte régissant les contestations nées entre le
débiteur saisi et le créancier saisissant. En se comportant de la sorte, la
juridiction compétente a erronément motivé sa décision ; pareille
motivation est équipollente au défaut de motivation.
La doctrine enseigne qu’en cas de défaut ou insuffisance de motivation
voire de motivation erronée accordant l’exécution provisoire
nonobstant tout recours, le juge d’appel doit, se fondant sur les articles
21 al 1 de la constitution de la République Démocratique du Congo et
23 du code de procédure civile qui prescrivent que tout jugement doit
être motivé, accorder les défenses à exécution sollicitées (Augustin
KOMBE KALALA, De l’exécution provisoire et des défenses à exécuter,
exposé présenté au séminaire des avocats du barreau de Bandundu, du
16 au 26 Juin 2014, in Recueil des arrêts en matière civile, commerciale,
sociale et fiscale de la Cour d’appel de Bandundu, 2011-2014, pp. 398-
411).
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Surabondamment, la Cour constate que la clause exécutoire vise


indistinctement les causes de saisie et les dommages-intérêts ; elle
estime que la juridiction compétente n’aurait pas dû étendre ladite
clause aux dommages-intérêts, car fixés selon l’appréciation.
Eu égard à ce qui précède, la Cour dira fondée la requête sous examen ;
par conséquent, accordera les défenses à exécution sollicitées et mettra
les frais à charge de la défenderesse.
C’est pourquoi ;
La Cour ;
Statuant publiquement et contradictoirement à l’égard de toutes les
parties ;
Le Ministère public entendu en son avis ;
Dit recevable et fondée la présente requête ;
Accorde, en conséquence, les défenses à exécution sollicitées ;
Met les frais de la présente instance à charge de la défenderesse, la
société Centre Médical Diamant Sarl.
Ainsi arrêté et prononcé par la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe à son
audience publique du / / 2021 à laquelle ont siégé les
Magistrats Fidèle KIBALA AKIDI, Président, Mesdames Helene
KAMBADJA et Stella NIMA WANGA, Conseillères en présence du
Ministère public représenté par
avec l’assistance de Greffier du siège.

Le Greffier Les Conseillères Le Président de chambre

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