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SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

La sobriété énergétique,
une notion disruptive de plus en plus étudiée
Edouard Toulouse*

Mots-clés : sobriété énergétique, transition énergétique, consommation, environnement,


sociologie
Vélo, végétarisme, rejet de l’hyperconsumérisme, abandon de grands projets...
Face aux urgences environnementales, des stratégies et comportements allant
au-delà de la simple amélioration des technologies remettent en cause les
fondements de nos (sur)consommations de ressources. Le concept de sobriété,
notamment énergétique, suscite un intérêt croissant de la part des sciences
sociales et politiques. Qu’ont-elles à nous dire sur la place que la sobriété pourrait
prendre dans la transition énergétique ?

Le concept de sobriété énergétique n’est pas et la création en 2017 d’un réseau international
nouveau. Les principes de sobriété et frugalité sur la recherche et les politiques de sobriété1 a
ont été de tout temps portés par des penseurs, permis d’améliorer l’identification des travaux
notamment depuis l’avènement de la société de sur le sujet. Plusieurs dizaines de publications
consommation. On peut trouver un aperçu de se référant explicitement à la notion de sobrié-
ce riche historique dans un panorama récent té — souvent énergétique — sont désormais
sur la notion de sobriété publié par l’ADEME répertoriées [Toulouse et al., 2019].
[Cézard et al., 2019]. Sur un plan plus pratique,
l’association négaWatt, formée d’experts prati- Il convient d’ailleurs de noter que cette
ciens de l’énergie, propose depuis 2003 un scé- notion n’est pas spécifiquement française, des
nario de transition énergétique pour la France travaux (souvent méconnus dans notre pays)
basé sur le triptyque sobriété-efficacité-renou- creusent aussi la question dans les pays anglo-
velables, qui a aussi aidé à populariser la no- saxons (où l’on parle de « sufficiency »), en Alle-
tion de sobriété énergétique [négaWatt, 2018].* magne (« suffizienz »), et ailleurs dans le monde.

Pour autant, la sobriété a manqué pendant Le panorama général proposé ici couvre
longtemps d’une certaine assise scientifique, surtout les aspects sociologiques et politiques
car peu de travaux académiques lui étaient de la sobriété, moins ses dimensions écono-
consacrés. Certains aspects étaient certes ap- miques. L’exercice oblige à n’évoquer que
prochés dans le cadre des théories compor- très succinctement les nombreuses références
tementales (par exemple dans les champs du citées, ce qui ne permet pas de rendre compte
changement de comportement ou des modes de toute leur richesse.
de vie durables), mais sans une vision globale,
systémique et politique. Les choses évoluent,

* négaWatt (cf. biographies p. 80).

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SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

Définir la sobriété restructurer profondément tous les systèmes


sociétaux en considérant la sobriété [O’Neill et
La sobriété peut d’abord être vue comme al., 2018]3.
un idéal, celui d’une société dans laquelle
l’ensemble des citoyens pourraient satisfaire Autre interrogation  : comment faire la part
leurs besoins de base dans le respect des li- entre les services énergétiques indispen-
mites écologiques de la planète et sans épui- sables et ceux, plus superflus, dont on pour-
ser ses ressources au rythme effréné actuel. rait se passer  ? Cette question renvoie aux
La sobriété porte en elle une interrogation pro- réflexions sur les besoins et les désirs, qui
fonde sur l’impact et le fonctionnement de nos ont donné lieu à de nombreux travaux scien-
systèmes technico-économiques, à la fois dans tifiques en sciences humaines. Chercher une
leur dimension macroscopique (la société de réponse universelle et définitive est complexe,
consommation au sens large) et microscopique et il semble qu’à mesure du développement
(les modes de consommation individuels et de nos sociétés, la liste des besoins suppo-
leurs assises matérielle et énergétique). sés «  fondamentaux  » et des consommations
qu’on qualifie de «  socialement contraintes  »
Sachant que les limites écologiques plané- a tendance à s’accroître [Darby et al., 2018].
taires sont largement dépassées aujourd’hui, Il reste toutefois possible de réaliser des arbi-
notamment en raison des niveaux de consom- trages personnels et politiques, comme c’est le
mation d’énergie, il devient incontournable cas dans d’autres domaines où des dimensions
de s’interroger sur la nature et le niveau des éthiques interviennent. Thomas Princen, l’un
services énergétiques qui soutiennent la satis- des pères du concept de sobriété, considère
faction de nos besoins actuels et la plupart ainsi que « se contenter d’assez quand plus est
des activités humaines2 [Darby et al., 2018]. possible est à la fois intuitif et rationnel — sur
La sobriété énergétique s’entend ainsi égale- les plans personnel, collectif et écologique.
ment comme l’ensemble des stratégies collec- Et, sous contrainte écologique planétaire, c’est
tives et individuelles pour changer la nature éthique » [Princen, 2005].
des services énergétiques que nous consom-
mons et cesser ou réduire le recours à ceux Afin d’opérationnaliser un peu plus le
qui sont intrinsèquement les plus intensifs en concept de sobriété, l’association négaWatt ain-
énergie [Toulouse et al., 2017]. si que d’autres auteurs (notamment allemands)
ont proposé des catégorisations des actions de
Cette définition large soulève bien entendu sobriété selon leur nature. À quelques variantes
un ensemble de questionnements fondamen- près, les classifications incluent généralement :
taux. En premier lieu, les limites planétaires ne • La sobriété d’usage : elle consiste à ré-
sont pas toutes connues avec précision. Mais si duire la durée ou la fréquence des activités les
l’on s’en tient déjà au seul changement clima- plus intensives en énergie (par exemple, faire
tique, on sait qu’un Français a une empreinte moins de longs déplacements) ;
carbone annuelle de près de 12 tonnes d’équi- • La sobriété de substitution  : elle cor-
valent CO2 là où il faudrait se contenter de respond à satisfaire autant que possible un
moins de 2 [Dugast et al., 2019]. L’ampleur du besoin d’une manière différente en remplaçant
problème est donc sans équivoque. Une étude un service énergique intensif par un autre qui
qui se base sur différents indicateurs environ- l’est beaucoup moins (par exemple, rafraîchir
nementaux (émissions de carbone, extraction un bâtiment en été à l’aide de ventilateurs plu-
de matériaux, fourniture d’eau potable, etc.), tôt que de climatiseurs) ;
montre qu’actuellement aucun pays ne peut • La sobriété dimensionnelle  : il s’agit
se targuer de satisfaire les besoins fondamen- là de modérer certaines envies et d’ajuster au
taux de sa population avec une empreinte plus près la capacité du service consommé
écologique en ligne avec les limites plané- à son usage courant (par exemple, s’équiper
taires connues, et que pour ce faire il faudra d’un réfrigérateur de volume optimal pour ses

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La sobriété énergétique,
une notion disruptive de plus en plus étudiée

Domaine Exemple de sobriété Exemple d’efficacité


Remplacer l’usage de la voiture par le Remplacer un véhicule thermique clas-
Mobilité
vélo sique par un hybride

Mieux optimiser les bâtiments pour Chauffer et climatiser les bâtiments


Bâtiment
réduire la surface par habitant / usager avec des appareils performants

Utiliser le plus possible la lumière


Éclairage Choisir des ampoules LED
naturelle

Utiliser un sèche-linge de bonne classe


Tâches ménagères Sécher son linge sur un étendoir
énergie

Limiter la production de données et les Stocker les données dans un data cen-
Communication
besoins en stockage d’une entreprise ter à efficacité élevée

Alimentation Réduire sa consommation de viande Cuisiner avec un four performant

Tableau 1. Exemples de sobriété et d’efficacité énergétiques dans différents domaines

besoins quotidiens, plutôt qu’un grand frigo potentiel à explorer, qui est encore peu ana-
américain clinquant qui sera rarement rempli) ; lysé [Bocken et al., 2016].
• La sobriété collaborative : elle a pour
objectif de partager le plus possible les ser- Pour finir sur les aspects terminologiques,
vices énergétiques afin d’en réduire le volume on entend parfois également la notion de
total (par exemple l’autopartage). « sobriété carbone ». Consistant à appliquer les
principes de la sobriété aux activités émet-
Il est utile de noter ici que la sobriété trices de CO2, elle recoupe souvent la sobriété
souffre d’un biais courant qui consisterait à énergétique mais pas toujours, puisque les fac-
la restreindre à la sphère des comportements teurs d’émission varient selon le type d’éner-
et choix individuels. En réalité, la sobriété est gie utilisée et que des services peu émetteurs
une notion qui peut être pensée et appliquée en carbone peuvent se révéler très intensifs en
à tous les niveaux économiques et sociétaux énergie (par exemple une mobilité hydrogène
(même si les rythmes de changement, les in- à partir de renouvelables avec un faible rende-
vestissements nécessaires et les cobénéfices ment global).
varient selon les cas). Dans l’aménagement du
territoire par exemple, une manière différente
Distinguer la sobriété de l’efficacité
d’organiser les villes pour réduire les distances
à parcourir, ou encore la mise en place d’alter-
Certains auteurs ont une acceptation large
natives à de grands projets d’aménagement à
de la notion d’efficacité énergétique comme
forte empreinte énergétique totale (aéroports,
tout ce qui peut réduire la demande d’énergie,
autoroutes…) peuvent entrer dans le champ
et à ce titre peuvent revendiquer de couvrir
d’une sobriété que l’association négaWatt qua-
d’ores et déjà le champ de la sobriété à travers
lifie de structurelle. Dans le privé, les entre-
la notion « d’efficacité appliquée aux comporte-
prises peuvent repenser leurs activités et leur
ments » (cf. par exemple [AEE, 2013]). Toutefois,
façon de fournir des services pour appliquer
c’est une vision assez réductrice de la sobriété,
et inciter à la sobriété ; il y a là un énorme
et elle n’est pas largement partagée.

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Bien souvent, l’efficacité est plutôt entendue tient dans la persistance de forces majeures
comme l’amélioration technique d’un service générant plutôt de « l’ébriété énergétique » que
énergétique sans que soit interrogés le fonde- de la sobriété. Les publications consacrées au
ment et le niveau de consommation de ce der- sujet recensent ainsi [Toulouse et al., 2019] :
nier. Le Tableau  1 fournit quelques exemples • Le paradigme social dominant dans
de démarcation entre sobriété et efficacité. nos sociétés, qui véhicule et entretient des
valeurs telles que le matérialisme, le consumé-
Il est vrai que la frontière n’est pas toujours risme, l’individualisme, la puissance, etc. ;
parfaitement fixée, car elle dépend de la ma- • La plupart des modèles économiques
nière dont on interprète une même action4. et de développement actuels, qui bien souvent
Les deux approches relèvent toutefois de conduisent au surdimensionnement et à l’in-
conceptions assez différenciées quant à la citation au « toujours plus » ; en témoigne par
manière de réduire la demande en énergie, et exemple le déploiement à marche forcée de
peuvent être vues comme complémentaires. la 5G, qui suscite des interrogations quant à sa
contradiction avec une logique de sobriété5 ;
Pour certains auteurs toutefois, l’efficacité • Les contextes sociotechniques et déci-
peut devenir dans son principe probléma- sions d’aménagement passées qui enferment
tique lorsqu’elle se contente de renforcer et les usagers dans certains choix de services
perpétuer aveuglément les modèles actuels énergétiques limités ;
de consommation de services énergétiques • Certaines normes sociales dominantes
[Shove, 2018]. De nombreux travaux ont été (par exemple sur le confort « moderne ») ;
par exemple consacrés aux effets rebond, que • La résistance au changement dans les
nous ne rappellerons pas ici mais qui tendent pratiques quotidiennes ;
à légitimer la nécessité de ne pas s’en tenir à la • Le manque de visibilité et de tangibi-
seule efficacité technique pour espérer aboutir lité de l’impact énergétique de nos choix à tous
à des réductions drastiques de consommation niveaux.
d’énergie : « pour être opérante, l’efficacité doit
impérativement être couplée à la sobriété éner- En allant à l’encontre de paradigmes et
gétique » [Labo de l’ESS, 2018]. normes encore largement dominants, la so-
briété revêt ainsi une dimension disruptive,
L’association négaWatt quant à elle consi- voire subversive. Ce caractère subversif peut
dère la sobriété et l’efficacité comme complé- d’ailleurs être considéré bienvenu, en ce qu’il
mentaires, mais avec des logiques de priorité permet de remettre en question «  certaines
différentes (interroger d’abord les services éner- pseudo-évidences de notre relation à l’éner-
gétiques avant de se demander comment les gie » [Villalba et al., 2018]. Mais il peut égale-
optimiser techniquement) [négaWatt, 2018]. ment expliquer pourquoi la sobriété fait l’objet
de préconceptions idéologiques et réactions
émotionnelles parfois fortes contraignant
Freins et limites
son appropriation chez certaines personnes
aux comportements de sobriété [Dufournet et al., 2019].

La sobriété peut mobiliser de nombreux Les promoteurs du concept se voient régu-


champs de la connaissance (sociologie, psy- lièrement reprocher la connotation potentielle-
chologie, économie, philosophie, sciences ment négative du terme. « Sobriété » évoquerait
politiques, etc.). Une question récurrente sur des notions de contraintes, de limites, de re-
laquelle se penchent les chercheurs est de noncement, voire d’appauvrissement. La forme
comprendre pourquoi, alors que l’urgence des de sobriété imposée vécue par les populations
contraintes environnementales est de plus en en situation de précarité énergétique peut être
plus reconnue, les tendances à la sobriété ne se vue comme un repoussoir à l’idée de sobriété
sont pas largement répandues. Une explication [Lejeune, 2018]. Ceci montre que la réflexion

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une notion disruptive de plus en plus étudiée

sur la sobriété doit prendre en compte les Par où et comment la sobriété


questions d’inégalités sociales et les variations pourrait-elle s’installer ?
importantes de niveaux de consommation
entre ceux qui peinent à accéder à des services La sobriété fait encore l’objet d’une certaine
énergétiques de base et ceux qui se permettent ambivalence. D’un côté, les paradigmes domi-
des comportements d’ébriété énergétique os- nants précédemment cités paraissent encore
tentatoires (nombreux voyages lointains, véhi- très prégnants. De l’autre, on peut identifier
cules très puissants, etc.). des signaux faibles suggérant qu’elle progresse
dans les esprits. Si l’on en croit par exemple les
Une autre question intéressante est celle des enquêtes d’opinion, une majorité de Français
limites aux comportements de sobriété. Plu- considère que limiter le réchauffement clima-
sieurs chercheurs se sont demandés jusqu’où tique nécessitera des changements importants
on peut réduire les consommations d’énergie, de modes de vie, bien plus que le seul recours
ou émissions de CO2 (par exemple [Druckman à des progrès techniques [ADEME, 2019].
et al., 2010]). Au niveau individuel, même pour
les personnes les plus volontaires, il n’est pas En outre, si les appels explicites à la sobriété
toujours facile de mettre ses actes en adéqua- pour des motifs écologiques sont restés long-
tion totale avec les principes de sobriété. Des temps relativement marginaux, on peut noter
études sur des individus engagés montrent que une inflexion. En témoignent plusieurs tri-
la sensation de vivre dans un « trop plein » de bunes publiées récemment : près d’un millier
consommation semble assez répandue chez de scientifiques de toutes disciplines affirmant
eux [Gorge et al., 2015]. Toutefois, lorsque que « nos modes de vie doivent évoluer vers
ceux-ci envisagent des changements de modes plus de frugalité » et s’éloigner du « consumé-
de vie assez radicaux, ils peuvent créer des risme débridé » actuellement promu6, ou en-
risques perçus de marginalisation sociale core l’appel « Nous ne prendrons plus l’avion »7
(comme par exemple se passer totalement de inspiré par le mouvement suédois Flyskam
voiture ou limiter drastiquement son usage des (« Honte de prendre l’avion  »). Sans oublier
technologies de communication). En effet, la l’inflation d’ouvrages et études sur le sujet.
réaction de l’entourage joue souvent un rôle En résumé, « de nombreuses prises de position
important chez les personnes qui s’engagent critiques conduisent à voir dans le mode de vie
volontairement dans des pratiques plus sobres. dominant un enjeu central dans le débat sur la
Des considérations socioculturelles internes et transition écologique » [Maresca, 2017].
externes, liées aux imaginaires sociaux domi-
nants, forment ainsi un « plancher de verre » sur Dans la pratique, cette ambivalence se tra-
lequel peuvent encore buter les velléités de duit par des tendances assez contradictoires :
sobriété les plus engagées [Cherrier et al, 2015]. • Dans la mobilité, on constate à la fois
une progression de l’usage du vélo dans de
Il n’en reste pas moins qu’une marge de nombreuses villes, mais aussi un succès inédit
manœuvre importante existe avant d’atteindre des véhicules SUV très consommateurs ;
ce type de limites, comme en atteste la variabi- • Quelques grands projets embléma-
lité importante des niveaux de consommation tiques à forte empreinte énergétique ont été
d’énergie entre ménages, entre entreprises ou abandonnés (l’aéroport Notre-Dame-des-
autres organisations. Landes, le complexe EuropaCity…), mais de
nombreux autres aménagements routiers ou
autoroutiers sont toujours d’actualité ;
• Les taux d’équipement en ordina-
teurs et téléviseurs ont tendance à diminuer
depuis quelques années, ce qui n’empêche
pas une explosion des flux de données sur les
smartphones ;

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SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

• La consommation de viande baisse en « l’imagination sociale tant des philosophes que


France depuis dix ans, mais on facilite l’impor- des artistes et autres chercheurs, décisive pour
tation de viande de pays très lointains (avec une induire la conversion vers une société sobre et
empreinte énergétique totale potentiellement désirable » [Bourg et al., 2010]. Toutefois, face
plus forte) par le biais d’accords commerciaux. aux urgences écologiques pressantes, peut-on
se contenter d’espérer et attendre l’avènement
On pourrait multiplier les exemples de ce d’une nouvelle société, qui peut prendre un
type. Il est intéressant de constater que les évo- temps potentiellement long ?
lutions allant dans le sens de la sobriété ne
paraissent pas uniquement motivées par des D’autres chercheurs se penchent donc sur
facteurs purement économiques (par exemple des manières plus pragmatiques, progressives
des économies financières). De nombreux et diversifiées de diffuser les pratiques de so-
autres facteurs liés à des cobénéfices peuvent briété, parfois même sans qu’elles soient moti-
intervenir, tels qu’un sentiment de meilleure vées et vécues comme telles. Une étude sur
maîtrise de sa vie, l’amélioration de la santé, des personnes engagées dans des pratiques de
une recherche de lien social, une plus grande sobriété révèle que si celle-ci est effectivement
résilience, la promotion d’emplois locaux, le souvent vue comme un idéal (et une reprise de
bien-être animal, la préservation de la biodi- contrôle sur sa vie), elle est rarement appliquée
versité, etc. À ce titre, les études en sciences instantanément et systématiquement. En réalité,
humaines portant sur des sujets engagés dans chaque changement de pratique peut entraîner
la sobriété apportent des éclairages sur leurs des négociations et fait l’objet de compromis,
motivations (par exemple [Gorge et al., 2015]) ; en fonction notamment de conceptions per-
d’autres constatent qu’un argument comme la sonnelles et de celles de son entourage [Gorge
santé est un facteur motivant pour les actions et al., 2015]. La sobriété apparaît ainsi comme
de sobriété, notamment dans la mobilité et un cheminement non linéaire et graduel. Tout
l’alimentation [Sköld et al., 2018]. un champ des sciences humaines et sociales
s’intéresse aux conditions de changement des
Face à ces signaux encore contradictoires, se comportements et des pratiques, qui peut être
pose la question de la diffusion de la sobriété mobilisé. Pour une introduction à ces diffé-
dans les normes sociales et son développe- rentes théories et aux approches préconisées,
ment potentiellement plus systématique. On on peut consulter une excellente synthèse réa-
peut distinguer deux champs de réflexion chez lisée par l’ADEME [Martin et al, 2016].
les auteurs abordant le sujet.
Traditionnellement consacrées à des éco-
Certains estiment que la sobriété ne peut gestes plutôt légers ou relevant de l’efficacité
se contenter d’être simplement un élan indi- énergétique, de plus en plus d’études essayent
viduel, potentiellement éthique ou spirituel, désormais de mieux comprendre comment
mais doit être posée comme une valeur car- sont appréhendées des ruptures de comporte-
dinale de l’organisation de nos sociétés, donc ments plus « radicales » : par exemple, chauffer
à dimension politique [Villalba et al., 2018]. les espaces à des températures sensiblement
La sobriété devrait être vue comme est un prin- plus basses qu’actuellement ou diviser par deux
cipe de réorganisation sociale propre à devenir le nombre de cycles de lave-linge [Sahakian et
aussi prévalent que l’efficacité qui s’est impo- al., 2019]. D’autres travaux évaluent les préfé-
sée à tous les niveaux [Princen, 2005], voire rences pour différents styles de vie incluant de
comme une des valeurs fondamentales des la sobriété, ce qui permet d’identifier les pistes
sociétés libérales que sont la liberté et la jus- les plus prometteuses à court et moyen termes.
tice sociale [Muller et al., 2016], pour influencer Un projet de recherche a par exemple analysé
ainsi tous les paradigmes et normes domi- comment des panels de ménages de quatre
nants. Un tel objectif ambitieux nécessiterait de États européens (dont la France) réagissent
mobiliser l’ensemble de la société, y compris lorsqu’on leur soumet des choix de mesures

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La sobriété énergétique,
une notion disruptive de plus en plus étudiée

Zoom sur une étude explorant les préférences pour des styles de vie sobres

Dans une étude suisse utilisant la méthode d’analyse conjointe [Moser et al., 2015],
150 participants ont été confrontés à une liste de modes de vie combinant des ni-
veaux différents de distance domicile-travail, modes de transport disponibles, types
de destination de vacances, taille de logement, température intérieure et consomma-
tion de viande. Chaque participant a reçu une liste contenant 10 combinaisons tirées
au hasard par rapport aux 729 possibles et présentées sous une forme narrative pour
les rendre plus concrètes. Il leur a été demandé de classer ces modes de vie par ordre
de préférence.

L’étude montre ainsi que des modes de vie incluant des distances plus réduites,
l’usage du vélo et des transports en commun, et une modération sur le chauffage
sont susceptibles d’être attractifs pour un large public, tandis que les options com-
portant un régime végétarien strict et une réduction des surfaces des logements le
sont beaucoup moins.

volontaires pour baisser leurs émissions à à maîtriser la demande d’énergie et favoriser


2030, puis lorsqu’on leur demande ce qu’ils l’efficacité et la sobriété énergétiques. » Toute-
accepteraient s’ils étaient contraints politique- fois, force est de constater que le contenu de
ment d’aller plus loin et réduire leur empreinte cette loi est bien peu explicite sur la manière
de moitié [Sköld et al., 2018]. Une autre étude d’y parvenir. Plus généralement, on compte
est présentée dans l’encadré ci-dessus. encore très peu de politiques publiques for-
mulées spécifiquement pour promouvoir la
sobriété. Les quelques exemples nationaux qui
Concevoir des politiques de sobriété
viennent à l’esprit sont :
• L’extinction obligatoire des en-
De nombreux travaux amènent à penser
seignes et vitrines lumineuses la nuit (Décret
que la sobriété peut difficilement être mise en
n° 2012-118) ;
pratique de manière systémique sans transfor-
• Le bonus-malus sur les véhicules à
mation des contextes sociotechniques et éco-
la vente, basé sur les émissions de CO2 ab-
nomiques dans lesquels s’inscrivent les choix
solues et donc tendant à pénaliser plutôt les
de services énergétiques (cf. par exemple
modèles thermiques gros et lourds les plus
[Sköld et al., 2018]). «  La transformation du
consommateurs ;
mode de vie passe par des révolutions struc-
• Des politiques locales dans certaines
turelles avant d’être entraînée spontanément
communes visant à favoriser l’usage du vélo et
par les pratiques » [Maresca, 2017]. Cela pose la
des transports en commun ;
question du rôle des politiques publiques.
• Des campagnes et outils de communi-
cation sur les éco-gestes encourageant certains
Le concept de sobriété a longtemps fait l’ob-
comportements plus sobres.
jet d’une certaine forme de rejet par le monde
politique [Dufournet et al., 2019]. On se sou-
Concevoir des politiques de sobriété qui ne
vient de la fameuse phrase de George Bush
soient pas perçues comme trop attentatoires
senior en 1992  : « The American way of life is
aux libertés individuelles, avec suffisamment de
not up for negotiations. Period. ». Les mentali-
pédagogie et d’anticipation, n’est pas forcément
tés ont changé depuis, comme le montre la loi
simple, même pour des décideurs convaincus
française de 2015 sur la transition énergétique
de leur nécessité. Une des explications tient à
qui précise que « l’État […] veille en particulier

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SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

Niveau Exemples de politiques et mesures


Taxation énergie/carbone
Macroéconomique Systèmes généralisés de bonus-malus en fonction de la consommation d’énergie
Tarification progressive de l’énergie
Quotas individuels de carbone
Microéconomique Incitations économiques sur les comportements sobres (partage d’espaces et
de véhicules, mobilité douce…)
Interdiction/limitation de la publicité pour les services et produits les plus
énergivores
Communication & Campagnes de communication incitant à la sobriété
éducation Changements dans les prescriptions et recommandations comportementales
Étiquetage environnemental basé sur l’impact réel (et pas seulement sur l’effi-
cacité énergétique)
Obligation d’espaces de partage et de modularité des espaces dans la
construction
Fixation de niveaux de consommation d’énergie maximaux pour les services
Réglementations et produits (idéalement à un niveau mondial ou au moins continental, comme
c’est le cas dans l’Union européenne)
Obligation de fournir les services et produits réglés par défaut sur le mode le
plus sobre
Moratoire sur les projets d’aménagement à forte empreinte énergétique
Aménagement Remplacement de l’étalement urbain et des formes d’aménagement énergivores
local par d’autres approches
Choix d’infrastructures favorisant la mobilité sobre
Codes des marchés publics favorisant la sobriété
Exemplarité Plans de sobriété dans les pratiques et projets de l’État
Repas végétariens dans la restauration collective

Tableau 2. Exemples de politiques et mesures de sobriété


Source : basé notamment sur [Toulouse et al., 2019]

la modestie des mesures prises jusqu’à mainte- de la sobriété énergétique au niveau européen.
nant et au manque de visibilité des travaux et Dans ce cadre, différents experts et chercheurs
débats dans ce domaine. Il existe pourtant un ont été mobilisés pour préparer des docu-
nombre croissant de publications analysant et ments de travail concernant différents secteurs
proposant des idées de politiques et mesures, (le bâtiment, les appareils, la mobilité, etc.).
qui ne visent pas nécessairement à imposer la On y trouve des analyses détaillées sur les po-
sobriété de manière coercitive, mais à l’encou- tentiels de sobriété dans chacun de ces secteurs
rager et créer des conditions rendant son appli- et sur les politiques et mesures envisageables.
cation plus facile et plus désirable. Des exemples de politiques en place dans
différents États sont fournis8. On en retiendra
Sans être exhaustif, quelques exemples en notamment que s’il existe encore peu de poli-
sont fournis dans le Tableau 2. tiques de sobriété affichées comme telles, cer-
taines expériences (notamment en Allemagne
Un projet lancé depuis 2017 par l’eceee et Suisse) peuvent être inspirantes.
(European Council for an Energy Efficient Eco-
nomy) a pour objectif d’accroître la visibilité

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La sobriété énergétique,
une notion disruptive de plus en plus étudiée

Certains chercheurs considèrent que — Le défi de la modélisation


au-delà de politiques couvrant le champ de
l’énergie — il est surtout important de mieux Les stratégies et visions politiques énergé-
comprendre et changer toutes les autres poli- tiques s’appuient souvent sur des scénarios
tiques existantes qui influencent la demande en destinés à leur apporter robustesse et légiti-
services énergétiques. Ce champ de recherche mation. Ils permettent aussi d’en explorer et
naissant sur les « politiques énergétiques invi- discuter les impacts (par exemple sur l’écono-
sibles » s’intéresse par exemple à la manière mie, l’emploi, etc.). Il est particulièrement frap-
dont les politiques éducatives ou de santé et pant de constater que la sobriété a été pendant
leurs évolutions contribuent à la demande longtemps un angle mort de la plupart des
d’énergie [Royston et al., 2018]. scénarios officiels. « Si la question des modes
de vie et de leur sobriété est centrale depuis
longtemps dans la pensée écologique, le ren-
forcement de cette dimension dans les cadres
de représentation des travaux de prospective
environnementale est lui relativement nou-
veau » [Saujot et al., 2020]. Au cours des débats
sur l’énergie qui ont jalonné la vie politique
française, on a de fait vu très peu de scénarios

Figure 1. Répartition de la sobriété, de l’efficacité et des énergies renouvelables


dans le scénario négaWatt 2017-2050
Source : association négaWatt, 2018

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SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

intégrant de telles hypothèses. Ailleurs, la situa- production des industries les plus intensives
tion est d’ailleurs similaire [Samadi et al., 2017]. en énergie ;
• Enfin, les « excès » de consommation de
Pourtant, un scénario de transition éner- viande se résorbent et le gaspillage alimentaire
gétique tel que celui proposé par l’associa- diminue fortement d’ici 2050.
tion négaWatt pour la France, qui se base sur
des hypothèses de sobriété précises et réflé- Les documents ne précisent pas toujours
chies (analysées au niveau de chaque service comment ces hypothèses ont été traduites dans
énergétique), montre un potentiel significatif. la modélisation, ni ce qu’elles représentent au
La sobriété y représente 40 % des économies final dans les volumes d’économies d’énergie
d’énergie primaire jugées atteignables d’ici 2050 escomptés d’ici 2050. En tout état de cause,
(le reste relevant de l’efficacité). En termes de elles ne sont pas introduites de manière prio-
consommation d’énergie finale, la part monte ritaire et systémique dans l’exercice de scéna-
même à 60 % [négaWatt, 2018]. risation et sont clairement en-deçà de celles
proposées par l’association négaWatt (qui en-
La méthodologie d’élaboration des hypo- visage par exemple d’ici 2050 une modération
thèses de sobriété de ce scénario ne peut être sur la taille et l’usage de plusieurs équipements
détaillée ici faute de place, mais une intro- résidentiels et tertiaires, une réduction de 16 %
duction sur le sujet est disponible dans une des distances parcourues par personne, des ef-
brochure disponible sur le site internet de l’as- forts importants de recyclage et d’allongement
sociation [Association négaWatt, 2018]. de la durée de vie des produits, ou encore une
réduction de 40 à 50  % de la consommation
Si l’on se penche maintenant sur le tout moyenne de viande par habitant).
dernier scénario officiel disponible en France,
celui de 2019 qui appuie la Stratégie nationale La difficulté principale que pose la sobriété
bas carbone, on remarque des inflexions no- dans de tels exercices prospectifs est de parve-
tables par rapport au passé. On y trouve ainsi nir à des hypothèses qui soient robustes et pas
(pour la première fois) la mention d’une « solli- simplement normatives (c’est-à-dire représen-
citation équilibrée des leviers de sobriété » pour tant ce que l’on souhaiterait idéalement qu’il se
atteindre la neutralité carbone en 2050 [DGEC, passe). Une bonne appréciation et modélisa-
2020] : tion des chaînes de causalité intervenant dans
• Dans les bâtiments, il y est surtout les évolutions de comportements, des effets
question de quelques changements de com- rebond et des impacts des politiques publiques
portements volontaires (par exemple la baisse sont nécessaires. Les changements de modes
de la température de chauffage) ; de vie et d’organisation sociétale sont souvent
• Dans les transports, le scénario évoque les parents pauvres des modules de modélisa-
l’encouragement du report modal, du covoitu- tion énergétique [Saujot et al., 2020].
rage et du télétravail ainsi que la limitation de
l’étalement urbain, avec un trafic de voyageurs Un certain nombre de travaux méthodo-
qui augmente tout de même de plus de 25 % logiques commence à creuser cet aspect afin
entre 2015 et 2050. De même, le fret croît en- d’améliorer la situation [Saujot et al., 2020].
core de 40 % sur la même période (mais moins, Au niveau français, le Shift Project a élaboré
faut-il croire, que dans un scénario purement des guides méthodologiques pour les scéna-
tendanciel) ; ristes comprenant un volet sur la modélisation
• Les Français sont supposés consom- des changements de modes de vie. Il recom-
mer des produits de plus en plus durables et mande notamment d’intégrer pleinement les
nécessitant moins d’énergie à produire (sans sciences sociales dans la production de visions
que l’on sache précisément comment), tou- énergétiques futures et d’appuyer plus systé-
tefois il n’est pas prévu de réduction de la matiquement les hypothèses d’évolution de
modes de vie sur des narrations [Shift Project,

30 La Revue de l’Énergie n° 649 – mars-avril 2020


La sobriété énergétique,
une notion disruptive de plus en plus étudiée

2019]. Une autre étude (allemande) estime que champs à explorer et renforcer. Si on constate
la question de la sobriété devrait être systé- un intérêt grandissant pour la sobriété et une
matiquement incluse dans toute réflexion éner- multiplication des appels à la prendre en
gétique prospective. Les modèles devraient considération, elle nécessiterait sans doute une
permettre d’intégrer des hypothèses de sobrié- exposition beaucoup plus forte dans le débat
té, et celles-ci gagneraient à être mieux ados- public pour espérer être traduite de manière
sées à des résultats de travaux scientifiques. En cohérente et systématique dans les politiques,
outre, les limites et difficultés de production de normes sociales et pratiques.
ces hypothèses devraient être bien précisées
[Förster et al., 2018].
RÉFÉRENCES
Au-delà de la mécanique de scénarisation, la
manière dont les hypothèses et potentiels de ADEME, « Représentations sociales du changement clima-
sobriété sont présentés peut jouer un rôle non tique – 20e vague », 2019.
négligeable sur leur réception et appréciation. AEE (Agence Européenne de l’Environnement), “Achieving
Ainsi, le concept de sobriété peut être mieux energy efficiency through behaviour change: what does it
compris s’il est introduit comme une réflexion take?”, 2013.
en amont sur les besoins et services énergé- Association négaWatt, « La sobriété énergétique – Pour une
tiques, plutôt que sous la forme d’une « variable société plus juste et plus durable », 2018.
d’ajustement » ajoutée à la fin pour tenter de Bocken Nancy, Short Samuel, “Towards a sufficiency-driv-
boucler sur l’objectif d’un scénario. En outre, en business model: Experiences and opportunities”, Envi-
il existe différentes manières d’éviter que les ronmental Innovation and Societal Transitions, 2016.
potentiels de sobriété soient perçus comme
Bourg Dominique, Papaux Alain, « Vers une société sobre
trop abstraits, abrupts, ou normalisants [Du-
et désirable », PUF, 2010.
fournet et al., 2019 ; Saujot et al., 2020].
Cézard Florian, Mourad Marie, « Panorama sur la notion de
sobriété – définitions, mises en œuvre, enjeux », rapport
Conclusion pour l’ADEME, 2019.
Cherrier Hélène, Szuba Mathilde, Özçaglar-Toulouse Nil,
La sobriété, en tant qu’approche pour (ré) “Barriers to downward carbon emission: Exploring sustain-
inventer des modes de vie et organisations able consumption in the face of the glass floor”, Journal of
sociétales compatibles avec les limites écolo- Marketing Management, 2015.
giques, a longtemps été ignorée et sujette à Darby Sarah, Fawcett Tina, “Energy sufficiency: an intro-
des préjugés. Sa mise en œuvre soulève certes duction”, rapport pour l’eceee, 2018.
des questionnements importants de plusieurs
DGEC (Direction Générale de l’Énergie et du Climat), « Syn-
ordres, mais un corpus scientifique internatio-
thèse du scénario de référence de la stratégie française
nal de plus en plus riche devient disponible
pour l’énergie et le climat », 2020.
pour les éclairer.
Druckman Angela, Jackson Tim, “The bare necessities:
How much household carbon do we really need?”, Eco-
On peut se demander s’il est possible d’at-
logical Economics, 2010.
teindre les objectifs forts et pressants de neu-
tralité carbone à l’échelle planétaire sans la Dufournet Charline, Toulouse Edouard, Marignac Yves,
perspective de la sobriété énergétique et sans Förster Hannah, “Energy sufficiency: how to win the argu-
mettre en place des politiques publiques, des ment on potentials?”, Actes de la conférence eceee Summer
nouveaux modèles économiques et des pra- Study, 2019.
tiques idoines. Dugast César, Soyeux Alexia, « Faire sa part ? Pouvoir et
responsabilité des individus, des entreprises et de l’État
La France est plutôt en bonne position dans face à l’urgence climatique », rapport de Carbone 4, 2019.
la production de connaissances et de travaux
sur le sujet, mais il existe encore de nombreux

La Revue de l’Énergie n° 649 – mars-avril 2020 31


SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE

Förster Hannah, Zell Ziegler Carina, Eichhorn Daniel, Shift Project, “Lifestyles and consumption behaviors in en-
“Energy efficiency first; sufficiency next?”, Actes de la con- ergy transition scenarios – Technical file #5 Information
férence eceee Summer Study, 2019. and recommendations for scenario producers”, 2019.
Gorge Hélène, Herbert Maud, Özçaglar-Toulouse Nil, Shove Elizabeth, “What is wrong with energy efficiency?”,
Robert Isabelle, “What Do We Really Need? Questioning Building Research & Information, 2018.
Consumption Through Sufficiency”, Journal of Macromar- Sköld Bore, Baltruszewicz Marta, Aall Carlo, Andersson
keting, 2015. Camilla, Herrmann Alina, Amelung Dorothee, Barbier Ca-
Labo de l’ESS (Économie Sociale et Solidaire), « Sobriété rine, Nilsson Maria, Bruyère Sébastien, Sauerborn Rainer,
énergétique », 2018. “Household Preferences to Reduce Their Greenhouse Gas
Lejeune Caroline, « Face à l’épreuve de la sobriété imposée. Footprint: A Comparative Study from Four European Cit-
Capabilités, reconnaissance, et participation au Forum per- ies”, Sustainability, 2018.
manent de l’insertion », in [Villalba et al., 2018]. Toulouse E., Sahakian M., Bohnenberger K., Lorek S.,
Maresca Bruno, « Mode de vie : de quoi parle-t-on ? Peut-on Leuser L., Bierwirth A., “Energy sufficiency: how can re-
le transformer ? », La Pensée Écologique 2017/1, 2017. search better help and inform policy-making?”, Actes de la
Martin Solange, Gaspard Albane, « Changer les comporte- conférence eceee Summer Study, 2019.
ments, faire évoluer les pratiques sociales vers plus de du- Toulouse E., Le Dû M., Gorge H., Semal L., “Stimulating
rabilité – L’apport des sciences humaines et sociales pour energy sufficiency: barriers and opportunities”, Actes de la
comprendre et agir », ADEME, 2016. conférence eceee Summer Study, 2017.
Moser Corinne, Rösch Andreas, Stauffacher Michael, Villalba Bruno, Semal Luc, « Sobriété énergétique  : con-
“Exploring societal preferences for energy sufficiency mea- traintes matérielles, équité sociale et perspectives institu-
sures in Switzerland”, Front. Energy Res., 2015. tionnelles », Éditions Quae, 2018.
Muller Adrian, Huppenbauer Markus, “Sufficiency, Liberal
Societies and Environmental Policy in the Face of Planetary NOTES
Boundaries”, GAIA – Ecological Perspectives for Science
and Society, 2016.
1. Réseau ENOUGH  : https://www.researchgate.net/proj-
O’Neill Daniel W., Fanning Andrew L., Lamb William F.,
ect/ENOUGH-International-network-for-sufficiency-re-
Steinberger Julia K., “A good life for all within planetary
search-policy
boundaries”, Nature Sustainability, 2018.
2. Par « services énergétiques », on entend l’ensemble des
Princen Thomas, “The Logic of Sufficiency”, MIT Press,
services rendus par le biais d’un équipement ou d’une in-
2005.
frastructure requérant de l’énergie.
Royston Sarah, Selby Jan, Shove Elizabeth, “Invisible ener-
3. La place manque ici pour détailler la méthodologie de
gy policies: A new agenda for energy demand reduction”,
cette étude, mais celle-ci est décrite précisément dans la
Energy Policy, 2018.
publication en référence.
Sahakian Marlyne, Naef Patrick, Jensen Charlotte, Goggins
4. Par exemple, se déplacer à vélo plutôt qu’en voiture
Gary, Fahy Frances, “Challenging conventions towards en-
peut être vu comme une modification substantielle du
ergy sufficiency: ruptures in laundry and heating routines
type de service énergétique consommé, ou éventuellement
in Europe”, Actes de la conférence eceee Summer Study,
comme une forme très poussée d’efficacité énergétique sur
2019.
le « véhicule ».
Samadi Sascha, Gröne Marie-Christine, Schneidewind Uwe,
5. Cf. la tribune « La 5G est-elle vraiment utile ? » d’Hugues
Luhmann Hans-Jochen, Venjakob Johannes, Best Benja-
Ferreboeuf et Jean-Marc Jancovici, Le Monde, 9  janvier
min, “Sufficiency in energy scenario studies: Taking the
2020.
potential benefits of lifestyle changes into account”, Tech-
6. L’appel de 1 000 scientifiques : « Face à la crise écologique,
nological Forecasting & Social Change, 2017.
la rébellion est nécessaire », Le Monde, 20 février 2020.
Saujot Mathieu, Waisman Henri, « Mieux représenter les
7. Tribune « Nous ne prendrons plus l’avion ! », Libération,
modes de vie dans les prospectives énergie-climat », Étude
11 février 2019.
N°02/20 IDDRI, 2020.
8. https://www.energysufficiency.org/

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