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DÉPARTEMENT DE GÉOGRAPHIE
Option : GÉOMORPHOLOGIE
Mémoire de Master II
Sujet :
Troisième partie : Les stratégies de lutte contre la dégradation de la mangrove. ......... 101
Chapitre 3 : Impacts des stratégies sur la dynamique des vasières à mangrove. ................... 111
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Sigles et acronymes.
ADG : Aide au Développement Gembloux
AMP : Aire Marine Protégée
AMPC : Aire Marine Protégée Communautaire
ANA : Agence Nationale de l’Aquaculture
ANAMS : Agence Nationale de la Météorologie Sénégalaise
ANACIM : Agence Nationale de l’Aviation Civile et de la Météorologie
ANSD : Agence Nationale de Statistique et de Démographie
ASC : Association Sportive et Culturelle
B.P. : Before Present
BU : Bibliothèque Universitaire
CADL : Centre d’Appui au Développement Local
CSE : Centre de Suivi Écologique
C.R. : Commune Rurale
CRODT : Centre de Recherches Océanographiques de Dakar – Thiaroye
DEFCCS : Direction des Eaux, Forêts, Chasses et de la Conservation des Sols
FAO : Fond and Agriculture Organization
FIBA : Fondation Internationale du Banc d’Arguin
FIT : Front Inter Tropical
GIE : Groupement d’Intérêt Économique
GPS : Global Positioning System
GREP : Groupe Recherche Environnement et Presse
GLOMIS : Global Mangrove International Society
GRDR : Groupe de Recherche et de Réalisations pour le Développement Rural
IDEE Casamance : Intervenir pour le Développement Écologique et l’Environnement en
Casamance
IMAO : Initiative Mangrove en Afrique de l’Ouest
IRD : Institut de Recherche pour le Développement
IREF : Inspection Régionale des Eaux et Forêts
ISRA : Institut Sénégalais de Recherches Agricoles
ISS : Interviews Semi Structurés
MARP : Méthode Active de Recherche Participative
MEPN : Ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature
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OCB : Organisation Communautaire de Base
ONG : Organisation Non Gouvernementale
ONU : Organisation des Nations Unies
ORSTOM : Office de la Recherche Scientifique et Technique Outre-mer.
PADERCA : Projet d’Appui au Développement Rural en Casamance
PASEF : Projet d’Amélioration et de Valorisation des Services des Écosystèmes Forestiers au
Sénégal
PEPAM : Programme d’Assainissement et d’Eau Potable du Millénaire
PGIEM : Projet de Gestion Intégrée de la Mangrove de Tobor
pH : Potentiel Hydrogène
PIDAC : Projet Intérimaire pour le Développement Agricole de la Casamance
PLD : Plan Local de Développement
PLHA : Plan Local Hydraulique et Assainissement
PNAT : Plan National d’Aménagement du Territoire
PNDL : Programme National de Développement Local
PNUE : Programme des Nations Unies pour l’Environnement
PRCM : Partenariat Régional pour la Conservation de la zone côtière et Marine en Afrique de
l’Ouest
PRDI : Programme Rural de Développement Intégré
RAM : Réseau Africain pour la conservation de la Mangrove
RGPH : Recensement Général de la Population et de l’Habitat
SES : Situation Économique et Sociale
SRPS : Service Régional de la Prévision et de la Statistique
UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature
WAAME : West African Association for Marine Environnent (organisme d’appui à
l’exploitation et la préservation du milieu marin)
WI : Wetlands International
WRM : World Rainforest Movement
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Avant – propos.
Fruit de trois années de recherches et de documentation, entamé en Master 1 par un rapport de
recherche, ce mémoire aborde le thème de la « Dynamique des vasières à mangrove de
Ziguinchor à Ouonck ».
Le choix de notre sujet n’est pas fortuit. En effet, très active dans le domaine de la protection
de la nature, nous avons été formés par l’éminent écologiste et ancien Ministre de
l’Environnement et de la Protection de la Nature, puis Ministre de la Pêche, Monsieur Haϊdar
El Ali. C’est ce dernier qui nous a inspirés et qui nous a fait connaître et aimer cet écosystème
si particulier qu’est la mangrove. Déjà, en 2006, lors de la première campagne de reboisement
de palétuviers nommée, opération « plante ton arbre », nous avions participé à une collecte de
fonds visant à financer cette activité. Des années plus tard, lorsque nous nous sommes rendus
à Tobor, c’est avec une grande joie que nous avons constaté les résultats de cette action.
Malheureusement, nous nous sommes aussi aperçus que, malgré les nombreuses initiatives, la
mangrove de la Casamance, par endroits, se dégrade considérablement.
Expliquer les facteurs et les conséquences de cette dégradation, tirer sur la sonnette d’alarme
pour une meilleure prise en compte de cet écosystème dans les plans de Gestion et de
Conservation des Ressources Naturelles (GRCN), telles sont nos profondes motivations.
L’occasion nous est ainsi donnée de remercier toutes les personnes qui, grâce à leur soutien,
ont de près ou de loin contribué à la réalisation de cette entreprise.
Aux premiers rangs notre encadreur, Monsieur Guilgane Faye dont la disponibilité légendaire
est à saluer. Il n’a ménagé aucun effort pour lire et relire nos écrits et corriger nos moindres
erreurs. Le soutien et les prières de nos parents, nos sœurs et frères, nous ont accompagnés.
Nous remercions particulièrement nos promotionnaires qui nous ont aidés et guidés dans nos
travaux d’enquêtes : Mamadou Siradio Faye, Fatma Ndao, Cherif Sané ainsi que tous ceux
qui nous ont apportés soutien, conseils et orientations.
Remerciements à Monsieur Amadou Diop Sylla, président de la Fédération Sénégalaise de
Scrabble Francophone pour son précieux soutien, à Monsieur Pape Landing Sané et au
responsable des reboisements de la zone des Kalounayes, Monsieur Sané.
Mention particulière aux populations des villages de la zone des Kalounayes qui nous ont
réservé un accueil chaleureux, sans compter l’hospitalité inestimable de la famille Sané de
Tenghory.
Merci à tous.
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Introduction générale.
Les mangroves sont les écosystèmes marins les plus riches du monde en termes de
biodiversité. Elles se situent dans la zone intertidale des côtes basses des régions tropicales et
équatoriales. À l’échelle mondiale, elles sont présentes dans cent vingt quatre (124) pays et
couvrent selon la FAO (2009), « plus de 3,2 millions d’hectares ».
Selon ADG (2011), les mangroves couvrent une superficie de « 1,5 million d’hectares » sur le
littoral atlantique occidental. Celles du Sénégal appartiennent au groupe de l’Ouest, groupe
des mangroves les plus septentrionales de l’Afrique. Ces mangroves se particularisent par leur
pauvreté floristique et occupent une superficie de 115 000 hectares selon la FAO (2005).
Cette formation végétale colonise les zones deltaïques et estuariennes comme la Casamance.
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mangrove. Les premiers acteurs sont les populations qui ont décidé de prendre en main la
gestion de leur environnement. En second lieu, ce sont les structures étatiques, les ONG
comme Océanium, les institutions nationales et internationales comme la FAO, l’IRD,
l’UICN.
La Basse Casamance est un milieu estuarien riche et particulier d’où l’importance que
nous accordons à l’étude de ses unités morphologiques. Parmi ces unités, nous pouvons citer
les vasières à mangrove, les tannes, les cordons littoraux et les terrasses.
Les vasières à mangrove et les tannes sont les témoins des modifications sédimentologiques et
phytogéographiques les plus particulières ayant été notées en Basse Casamance.
Ces mutations portent essentiellement sur la réduction de la superficie des vasières à
mangrove, sur l’augmentation de la superficie occupée par les tannes, sur la pauvreté
floristique des espèces qui peuplent ces vasières à mangrove et sur la composition chimique
des sols avec un taux de salinité et d’acidité élevé.
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Synthèse bibliographique.
Les mangroves de la Basse Casamance et par extension celles du Sénégal ont fait l’objet de
plusieurs études du fait de leur importance et de leur particularité. En effet, outre les structures
étatiques qui ont fait des études poussées sur cet écosystème afin d’en montrer toute la
richesse et toute la diversité, des organismes internationaux comme la FAO et l’UICN ainsi
que des instituts de recherche comme l’IRD et des organismes non gouvernementaux, ont fait
des recherches approfondies sur cet écosystème.
Les effets de la sécheresse sur l’état et la distribution spatiale des mangroves, la pédogenèse
dans les sols de mangrove, l’inversion de dynamique des cours d’eau, les facteurs de la
formation de tannes sont autant de thèmes qui ont été étudiés. Nous analysons les apports et
les limites de ces différentes études dans les lignes qui suivent :
Du point de vue des études sur les mangroves et les tannes : Vieillefon J. publie en
1969 « La pédogenèse dans les mangroves tropicales, Un exemple de chronoséquence ».
L’auteur explique la genèse des tannes par le fait que « lorsqu'un certain équilibre est établi,
le développement des diverses espèces de la mangrove est commandé en premier lieu par le
régime hydrique, le régime de submersion des sols.
C'est ce même régime de submersion, passant d'une alternance biquotidienne d'inondation et
d'assèchement à une alternance seulement annuelle, qui est le principal responsable de la
formation des tannes ». Cette définition de l’auteur est intéressante, mais ne prend pas
largement en compte les autres facteurs de formation de tannes comme le décrit Lebigre
(1983).
Dans un article publié dans une revue de géographie à Madagascar en décembre 1983,
titré : « Les tannes, approche géographique », Jean Michel Lebigre décrit la « tannification »
sur la côte occidentale de Madagascar. Lebigre considère les tannes comme des éléments
fondamentaux de la dynamique littorale et les définit comme « les vastes surfaces nues que
l’on observe derrière certaines mangroves ou parfois même en leur sein sous forme de taches
plus claires… ». Les tannes sont d’après lui des formes de transition entre la mangrove et la
terre ferme. Sur la genèse des tannes, Lebigre insiste sur un certain nombre de facteurs parmi
lesquels nous pouvons citer : les actions des hommes, les facteurs climatiques, le rôle de la
sédimentation, les facteurs hydrologiques et le facteur pédologique.
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En 1999, Cormier-Salem M.C. dans « Les littoraux à mangrove, des régions fragiles ?
Éléments de réflexion à partir des conclusions du programme DUM », remet en cause la
fragilité des écosystèmes à mangrove en tentant de prouver au contraire leur robustesse.
L’auteur adopte alors trois approches : une discussion sur l’état de la mangrove, sur la
définition donnée aux mangroves et sur leur fragilité. Concernant l’état de la mangrove,
certains auteurs ou organismes font des estimations sur des données peu fiables parfois même
lacunaires voire partielles selon l’auteur. La définition même de la mangrove est remise en
question par l’auteur qui estime que « l'hétérogénéité des sources de données et la diversité
des définitions de la mangrove rendent malaisée toute évaluation de l'extension de la
mangrove ». Aussi la mangrove est souvent définie compte tenu de la formation végétale
seulement ou en y ajoutant les tannes et les espaces associés. C’est pourquoi selon elle « de la
définition retenue dépend l'évaluation de l'état de la mangrove, en quantité et en qualité ».
Elle estime que « les chercheurs relevant des sciences de la nature ou de la société ne
disposent pas de preuves de la dégradation irréversible des mangroves » et « que les
écosystèmes à mangroves ne sont pas fragiles, mais plutôt sensibles ou robustes ».
En 2007, la FAO élabore un dossier titré « The World’s mangroves 1985-2005 » grâce
à l’apport de plusieurs pays sur leurs données existantes concernant les mangroves. Ce
document publié par la FAO–forêt dresse ainsi le bilan des mangroves mondiales sur la
période allant de 1985 à 2005.
La FAO souligne un manque de données qui rend difficile toute planification et toute mesure
de conservation. Les estimations sur la superficie totale occupée par les mangroves durant la
période 1980-2000 varient, de 15,6 millions d’hectares en 1980 à entre 12 et 20 millions
d’hectares aujourd’hui. Au Sénégal la superficie de la mangrove est estimée à 127 702
hectares en 2000 contre 115 000 hectares en 2005. La dynamique est donc régressive.
La FAO souligne aussi les nombreux services rendus par l’écosystème mangrove et ne
manque pas de remarquer que malgré leur importance, les mangroves sont souvent sous-
estimées et perçues comme des milieux malsains. Ces mangroves sont dégradées à cause de la
surexploitation du bois et de la pollution. Toutefois la FAO constate que depuis quelque
temps, une prise de conscience se fait sur la valeur et sur l’utilité de cet écosystème.
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Il existe selon IDEE Casamance deux centres de diversité mangrovienne : le groupe de l’Est
avec quarante (40) espèces et le groupe de l’Ouest avec seulement huit (8) espèces. Les
mangroves du Sénégal appartiennent à ce dernier groupe et comptent essentiellement six (6)
principales espèces réparties en trois (3) familles : les Rhizophoracées, les Combrétacées et
les Verbénacées.
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Du point de vue hydrologique et climatique : en 1985, Barusseau J.P., Diop E.H.S. et
Saos J.L publient : « Évidence d'inversion de dynamiques dans les estuaires tropicaux,
conséquences géomorphologiques et sédimentologiques ». Il est intéressant de noter que dans
cette étude, les auteurs affirment que le fleuve Casamance a un régime normal d’estuaire avec
une décharge d’eau douce tout au long de l’année.
En 1989, Jusserand C., Pagès J. et Debenay J.P. publient : « Évolution du haut estuaire
de la Casamance (Sénégal) : vers un système évaporatoire marin. Données isotopiques sur les
eaux libres ». Les auteurs démontrent que du fait du fort taux de salinité qui augmente en
amont, de la longueur de la saison sèche et des conditions climatiques qui causent un déficit
pluviométrique marqué, l’estuaire fonctionne comme un système évaporatoire.
Le fait marquant ici est la nette opposition entre ces deux études. Barusseau et al. (1985)
affirment que la Casamance a un régime normal alors que Jusserand et al. (1989) prouvent le
contraire. En effet, de récentes études ont démontré que le régime hydrologique de la
Casamance est aujourd’hui modifié du fait du fort de taux de salinité. La Casamance est alors
devenue, à l’instar du Sine-Saloum, un bras de mer, un « estuaire inverse ».
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étude pour terminer par l’usage fait de ces sols. Après un bref aperçu sur les processus de la
pédogenèse, l’auteur distinguera quatre types de sols : les sols minéraux bruts, les sols peu
évolués, les sols halomorphes et les sols hydromorphes.
Du point de vue pédologique et biogéographique : ces études sont les plus répandues
et ont permis de mieux comprendre la zonation des sols et de la végétation.
En 1985, Boivin P. et Lebrusq J.Y. font des « Recommandations concernant
l’aménagement du domaine fluvio-marin en Basse Casamance –cas de la vallée de Koubalan–
». Ils recommandent de ne jamais exonder les sols de mangrove de sorte « à les maintenir en
conditions réductrices » car « une oxydation des sulfures entraîne en effet une forte
acidification des sols, considérée comme irréversible ». Concernant les tannes, les auteurs
considèrent qu’ils sont « non seulement inaptes à toute spéculation agricole, mais représentent
en outre un danger pour les zones voisines non salées ».
Les productions scientifiques sur les vasières à mangrove de la Basse Casamance sont
nombreuses et très riches en informations. Cependant, il serait intéressant d’axer les
recherches futures sur les tannes dans cet espace, car il est assez rare de trouver un ouvrage
qui traite entièrement de la question comme ce fut le cas pour Madagascar avec Lebigre
(1983).
Ainsi, de l’étude des causes de la « tannification » et de l’évaluation de son ampleur, se
dégageront de bonnes pistes pour la sauvegarde des vasières à mangrove.
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Problématique.
La problématique du recul des mangroves est un sujet d’actualité.
Écosystème dynamique, la mangrove occupe une frange importante sur les littoraux
tropicaux. En Afrique de l’Ouest, elle se trouve du Sénégal à la Sierra Leone. Au Sénégal, la
mangrove est présente : dans le delta et dans l’estuaire du fleuve Sénégal, dans la lagune de
Somone, dans la lagune de Mbodiène, à Joal Fadiouth, dans la lagune de Mballing, au niveau
du Delta et de l’estuaire du fleuve Saloum, en Gambie et en Casamance essentiellement.
Sur ces zones la mangrove n’occupe plus la même surface qu’avant la sécheresse des années
1970. En Basse Casamance plus particulièrement, la mangrove a perdu près de la moitié de
sa surface (IDEE Casamance, 2010).
Pourtant, la mangrove offre divers services. Du point de vue écologique, elle protège les
zones côtières et elle séquestre le carbone participant de ce fait à la diminution du
réchauffement planétaire. Du point de vue socio-économique, elle est le refuge de plusieurs
animaux terrestres et aquatiques, de mollusques et de poissons que les hommes exploitent à
travers plusieurs activités. Sur ses rebords au Sénégal, notamment en Basse Casamance se
pratique la riziculture. Son bois est aussi utilisé par les femmes rurales pour les besoins
domestiques.
Malgré cette grande richesse, la mangrove du Sénégal notamment celle de la Basse
Casamance, figure parmi les formations forestières mondiales les plus dégradées et connaît
une dynamique plutôt régressive.
Quels sont les différents facteurs de cette dynamique ?
D’une longueur de 728 Km, le littoral sénégalais est occupé dans sa partie méridionale
par l’estuaire de la Casamance et par celui du Saloum.
Celui de la Casamance se situe sur une zone de topographie basse avec des plaines qui ne
dépassent pas 50 m d’altitude. Il est parcouru par plusieurs chenaux de rivières appelés
bolongs. Soumise à un climat tropical contrasté, la Basse Casamance est la région la mieux
arrosée du pays avec des précipitations de plus de 1300 mm, réparties sur cinq (5) mois.
Cependant, malgré cet apport en eaux douces, les eaux marines pénètrent quotidiennement
dans l’estuaire à travers un cycle semi-diurne de marée. Aussi le taux de salinité dans
l’estuaire est très élevé et peut atteindre en amont 170 ‰ (IDEE Casamance, 2010).
De type sud soudanien côtier, ce climat est marqué par l’alternance d’une saison sèche qui
dure sept (7) mois et d’une saison humide qui dure cinq (5) mois.
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Pendant cette longue saison sèche, l’estuaire est soumis à une forte évaporation et à une
insolation moyenne de six (6) heures. La longueur de cette saison associée, à l’intrusion
permanente des eaux marines et à la remontée du sel des nappes par capillarité, est
responsable du fort taux de salinité des eaux et des sols.
Quels impacts cette hyper salinité peut avoir sur la dynamique des vasières à mangrove ?
Classés parmi les sols sulfatés acides par Vieillefon (1969), les sols des parties
supérieures des mangroves de la Basse Casamance ont un pH très bas et sont par conséquent
très acides. Cette acidité est en effet causée par la présence du sulfure de fer nommé la jarosite
qui apparaît suite à l’oxydation de la pyrite (Lebigre, 1983).
Cette hyper salinité combinée à l’hyperacidité des sols est-elle à l’origine du développement
et de l’extension des tannes en Basse Casamance ?
Milieux riches et très productifs, les vasières à mangrove sont des lieux convoités par
les populations riveraines qui y pratiquent plusieurs types d’activités économiques comme
l’extraction du sel, l’ostréiculture, la riziculture, la pisciculture, la pêche et la coupe de bois.
Aussi, il y a le développement fulgurant du tourisme qui, certes, est un facteur de
développement, mais nécessite des aménagements à proximité des zones de mangrove qui
sont connues pour leur caractère très attractif.
Ces activités économiques ont-elles occasionné la régression des mangroves entre Ziguinchor
et Ouonck ?
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Le rôle des fluctuations climatiques et des caractères hydro–pédologiques du milieu dans la
dynamique des vasières à mangrove est le centre de notre problématique.
Néanmoins, il ne faut pas négliger le rôle non moins important joué par les populations dans
la dynamique des vasières à mangroves. Il est alors important d’étudier l’ensemble des
facteurs qui influent sur la répartition spatiale de la mangrove en Basse Casamance afin
d’asseoir une bonne politique de gestion et de préservation de cet écosystème.
L’étude géomorphologique de l’évolution des vasières à mangrove se place ainsi dans un
contexte écologique de sauvegarde et de restauration de cet écosystème qui en Basse
Casamance joue un rôle important dans l’économie rurale.
Cependant, l’étude de la transformation des sols de mangrove en sols sulfatés acides donc des
processus de la « tannification » trouve sa place en géomorphologie dynamique en ce qu’elle
contribue à l’amélioration des connaissances sur les dynamiques des vasières à mangrove.
La diminution progressive des surfaces de mangrove et même sa disparition totale sur certains
bras du fleuve Casamance comme c’est le cas des villages situés le long du fleuve Casamance
nous force à poser la problématique de la gestion durable de cet écosystème.
Cela justifie ainsi le choix de notre sujet portant sur l’étude de la dynamique des vasières à
mangrove de Ziguinchor à Ouonck. Ce sujet est un prétexte pour attirer l’attention sur
l’importance écologique de la mangrove, sur son importance dans la survie des activités
rurales des populations de la Basse Casamance. Aussi nous démontrons que la mangrove n’a
pas connu des changements irréversibles et que les efforts combinés des populations, des
ONG et instituts ont abouti à une gestion durable des ressources de cet écosystème.
Cette étude s’est fait en suivant plusieurs objectifs.
Les objectifs.
L’objectif général est de connaître les facteurs et les manifestations de la dynamique des
vasières à mangrove entre Ziguinchor et Ouonck et d’évaluer les différentes stratégies
adoptées pour freiner la dégradation de cet écosystème.
De manière spécifique, il s’est agi :
D’expliquer les facteurs physiques influençant la dynamique des vasières à mangrove ;
De déterminer le rôle anthropique dans la dynamique de ces vasières à mangrove ;
De connaître les manifestations de la dynamique des vasières à mangrove ;
D’analyser l’impact des projets de restauration de la mangrove.
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Hypothèses de recherche.
Dans l’étude des différents éléments qui composent les écosystèmes mangroves, plusieurs
concepts et termes sont utilisés. Si certaines de ces notions sont simples à définir, d’autres par
contre sont polysémiques et parfois ambiguës. Il est alors important de revenir sur leur
définition afin de mieux cerner les contours de notre problématique de recherche. Parmi ces
notions, nous pouvons citer : le mot dynamique, une vasière et la mangrove.
Dynamique.
D’après le Larousse illustré 2011, le mot dynamique vient du grec dunamikos, de dunamis,
qui signifie puissance.
La dynamique est l’ensemble des forces en interaction et en opposition dans un phénomène
ou une structure d’après le Robert. Est qualifié de dynamique d’après le même dictionnaire,
un phénomène, un espace, un fait qui évolue par opposition à un fait qui est statique.
La dynamique d’un écosystème telle la mangrove ou d’une unité géomorphologique telle la
vasière s’entend dans le sens de l’évolution de cet écosystème ou de cette unité. Tous les
écosystèmes terrestres évoluent et connaissent donc des dynamiques particulières. Cette
dynamique peut revêtir plusieurs formes. Elle peut être évolutive, stagnante, régressive,
régénérative, etc. Étant des écosystèmes par essence dynamiques, les mangroves sont
affectées de plusieurs dynamiques. Ainsi, l’étude des dynamiques d’une mangrove passe
nécessairement par une étude de son extension passée et actuelle suivant une échelle
chronologique déterminée et par une étude des mutations survenues dans sa composition
floristique.
Dans le même sillage, l’étude des dynamiques d’une vasière fait nécessairement appel à la
morphogenèse et à la morphodynamique entre autres.
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L’étude des dynamiques d’une vasière à mangrove combine alors l’ensemble de ces aspects.
Elle inclut aussi les facteurs mêmes de cette dynamique et ses conséquences.
Cependant, comme tout examen d’un phénomène géographique, une approche systémique est
de mise, ce qui permet d’établir des relations entre les différents éléments de ce phénomène.
Vasière.
D’après la Convention de Ramsar : « Les zones humides sont des étendues de marais, de
fagnes, de tourbières ou d'eaux naturelles ou artificielles, permanentes ou temporaires, où
l'eau est stagnante ou courante, douce, saumâtre ou salée, y compris des étendues d'eau
marine dont la profondeur à marée basse n'excède pas six mètres». Cette définition inclut les
vasières comme étant des zones humides. La vasière est une zone d’accumulation marine ou
littorale couverte de vase et régulièrement soumise aux flux et reflux de la marée.
La vase appelée aussi « bri » est un « sédiment meuble à forte teneur en eau, riche en
particules de diamètre inférieur à quelques dizaines de micromètres, et contenant une faible
quantité d'éléments plus grossiers (terrigènes ou biogènes) » d’après le Larousse. Selon
Guilcher (1959) la vase est constituée d’éléments minéraux et organiques et sa courbe
granulométrique est très hétérométrique.
Les vasières possèdent deux parties : une zone nue appelée la slikke et une zone couverte de
végétation appelée le schorre.
La slikke vient du néerlandais slijk qui veut dire boue. Topographiquement elle correspond à
la partie la plus basse de la vasière qui est submergée lors des marées quotidiennes. Dans la
slikke, il n’y a pas de végétation.
Le schorre correspond à la partie élevée de la vasière qui abrite une végétation halo-résistante
répartie en étages. Le mot vient du Néerlandais schor qui signifie « un terrain d’alluvions » ou
un « pré-salé ». Le schorre n’est inondé que par les marées de vives-eaux. On l’appelle aussi
herbu, sansouïre ou engane en fonction des régions.
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La mangrove.
La diversité des sources d’information comme Internet, des bases de données comme celle de
la FAO et de l’IRD, les nombreuses publications scientifiques ainsi que la diversité des
définitions rendent difficile toute approche conceptuelle de la mangrove.
Selon Barusseau J.P et al. (1985), il existe deux définitions de la mangrove :
- Stricto sensu, la mangrove est une formation végétale ;
- Lato sensu, la mangrove est une formation végétale des zones humides tropicales
intégrant une formation arborée, l’estuaire, les tannes, la zone saumâtre et les vasières.
La définition retenue dépend alors du domaine d’étude en question et des orientations du
chercheur. Car pour le botaniste qui étudie les plantes, la mangrove n’est considérée que du
point de vue de sa composition floristique.
Pour le géomorphologue qui étudie les formes et types de reliefs ainsi que leur dynamique, la
mangrove est considérée du point de vue de ses unités morphologiques intégrant aussi bien les
sols, les tannes, les types de zones humides en question ainsi que les espèces végétales et leur
zonation.
C’est dans ce sens que Vieillefon (1974) définit la mangrove stricto sensu comme « une
formation végétale universellement répandue sur les littoraux intertropicaux, dont les
membres, les palétuviers, ont des formes et des adaptations très particulières ».
Lato sensu, « après avoir principalement concerné la végétation elle-même, le terme de
mangrove a été progressivement étendu à l'ensemble du milieu édaphique ou biologique ».
Même pris au sens large, « comment distinguer la mangrove des autres marais maritimes et
zones humides littorales sans palétuviers ? Quelles sont les limites de la mangrove en mer et à
terre ? Où commence-t-elle ? Où finit-elle ? » se demande Cormier – Salem (1994). Il se pose
ainsi une question de limites.
Les tannes se développent aux dépens de la mangrove qui recule. Faut-il considérer ces
espaces comme des unités morphologiques particulières ou faut-il simplement les inclure dans
la zonation des mangroves.
En effet, il n’est pas rare de constater que la majeure partie des définitions des mangroves ne
prennent en compte que ces aspects : la localisation géographique, les caractéristiques
physiques du milieu, le type de formation végétale et la composition floristique.
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Parmi ces définitions nous retenons les suivantes :
- Vieillefon (1969) : « Les mangroves sont des formations végétales arborées spécifiques
des régions littorales à climat équatorial ou tropical humides ; elles peuvent cependant
subsister à l’état de reliques en région plus sèche, tropicale sèche ou même semi-aride,
attestant là un changement climatique récent » ;
- Marius (1985) : « La mangrove est définie comme étant l’ensemble des formations
végétales, arborescentes ou buissonnantes, qui colonisent les atterrissements intertidaux
marins ou fluviaux des côtes tropicales » ;
- UICN (2010) : « La mangrove est une forêt amphibie des côtes tropicales et
subtropicales, faisant la transition entre la mer et le continent. Elle est caractérisée par
un sol vaseux au niveau des deltas, des rives des fleuves, des lagunes et des bords des
mers. C’est un milieu périodiquement soumis à l’inondation des eaux saumâtres des
marées. La végétation est en grande partie composée d’espèces ligneuses
sempervirentes, des genres Rhizophora et Avicennia, Laguncularia et Conocarpus ».
Ces définitions sont assez restrictives et déterminent les trois critères d’existence des
mangroves : un climat intertropical, une aire géographique particulière, une position
d’interface.
Mais faut-il restreindre la mangrove aux types d’arbres qui la colonisent et ne considérer
comme mangrove que les surfaces occupées par les palétuviers ? Ou bien faut–il prendre en
compte ces surfaces liées à la mangrove comme les tannes ?
En intégrant ces différents aspects la mangrove sera définie comme un écosystème qui se
localise au niveau des franges littorales des côtes basses, tropicales et équatoriales, chaudes et
humides, soumises aux fluctuations de la marée biquotidienne. Elle se caractérise par un
substrat vaseux ou sableux où se développent des plantes ligneuses halotolérantes comme les
palétuviers. Sous l’effet de facteurs climatiques et pédologiques, elle recule et des surfaces
appelées tannes se développent derrière elle.
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Méthodologie.
Notre méthodologie s’est basée essentiellement sur les observations de terrains, sur des
enquêtes quantitatives et qualitatives, sur des entretiens avec les acteurs concernés, sur
l’analyse et l’interprétation de cartes diachroniques et sur la synthèse des travaux antérieurs
relatifs à notre thème. L’approche choisie est donc la suivante :
- Revue documentaire ;
- Collecte de données quantitatives et qualitatives par des enquêtes et des entretiens ;
- Observations de terrains ;
- Traitement des données collectés ;
- Analyse et interprétation des résultats obtenus.
La revue documentaire.
Avant toute approche conceptuelle et méthodologique, nous avons passé en revue l’ensemble
des productions scientifiques relatives à notre sujet. Cela nous a en effet permis de mieux
nous familiariser avec les concepts de mangroves et de tannes et de comprendre les facteurs
de leurs dynamiques. Ainsi, les riches productions scientifiques nous ont été d’une grande
utilité. À ce titre nous avons consulté :
- Des ouvrages généraux traitant de la question avec notamment les productions des
chercheurs de l’IRD ;
- Des ouvrages spécifiques comme des PRDI, des PLHA, des SES publiés par l’ANSD,
des revues scientifiques, des périodiques, des rapports, etc. ;
- Des thèses et des mémoires produits par des chercheurs et des étudiants du département
de géographie et d’ailleurs ;
- Des bases de données comme celles de la FAO et de l’IRD ;
- Des sites Internet ont été consultés afin d’obtenir des données complémentaires ;
- Des visites à l'ANACIM pour la collecte des données climatiques ;
- Enfin, nous avons consulté plusieurs dictionnaires et encyclopédies : Encarta 2009,
Encyclopaedia Universalis 2011, 38 Dictionnaires, le Petit Larousse Illustré 2011, le
Grand Robert, le Littré et Systran pour la traduction des textes en anglais.
Ce travail s’est fait au niveau de la bibliothèque universitaire, de la bibliothèque du
département de géographie, sur des sites spécifiques et sur Internet.
20
Les observations de terrains.
Nous avons procédé à des études de terrain afin d’obtenir les paramètres physiques
nécessaires à la compréhension des phénomènes étudiés. Ce faisant, nous avons pris une
pirogue au niveau de l’ancien quai de Ziguinchor en partance de notre point de chute Ouonck.
Nous avons ainsi pu observer l’état de la mangrove le long de cet axe. Des points GPS ont été
relevés à certains endroits spécifiques où nous avons noté la présence d’un bolong, un village
ou des formations de mangrove en état de dégradation avancée. Au niveau des villages ciblés
par l’échantillonnage, des clichés nous permettant d’illustrer nos propos ont été pris.
Sur la base d’un questionnaire établi avec le logiciel Sphinx (cf .annexe2), nous avons, à
travers des entretiens semi-directifs et des focus group, recueilli les impressions et les
tentatives d’explication des populations sur la dynamique des vasières à mangrove.
Le questionnaire compte cinq (5) principales parties :
1. Identification de l’enquêté, de la communauté rurale et du village ;
2. Les activités économiques : ayant émis l’hypothèse que certaines activités économiques
d’exploitation des ressources de la mangrove contribuent largement à la dégradation de
l’écosystème, nous avons tenté de connaître de manière spécifique ces activités ;
3. Dégradation de l’environnement et des ressources naturelles : l’objectif est d’établir
une liste de contraintes auxquels sont confrontés les sols, la végétation, l’écosystème
mangrove et les populations ;
4. Les conséquences : nous avons voulu connaître les manifestations et les conséquences
sur le milieu et sur les activités des hommes de la dégradation des ressources naturelles ;
5. Les stratégies : c’est tenter de savoir quelles sont, face à la dégradation de la mangrove
et des sols, les stratégies de restauration et de sauvegarde que les populations ont
adoptées.
Ces questionnaires ont été administrés aux populations sur la base d’un choix circonspect de
sites et d’un échantillonnage au 1/3.
21
Choix des sites.
Notre étude porte sur la dynamique des vasières à mangrove de Ziguinchor en partant du pont
Émile Badiane à Ouonck. Sur cette vaste étendue se localisent les villages suivants : Tobor,
Boutoumol, Boundaw, Djilacoune, Coubalan, Dioubour, Niandane, Fintiock, Coubanao,
Hatioune, Tapilane, Babatte et Ouonck.
Sur ces treize (13) villages, nous en avons choisi cinq (5) en tenant compte de la proximité du
village par rapport à la vasière à mangrove. C’est sur la base de ce tri que nous avons
échantillonné la population à interroger.
Les cinq villages retenus sont les suivants : Tobor, Djilacoune, Fintiock, Tapilane et Ouonck.
L’échantillonnage.
Nous avons consulté les résultats de l’ANSD concernant le dernier recensement général de la
population effectué en 2002. Mais afin d’obtenir des données plus récentes, nous nous
sommes basés sur le SES de Ziguinchor publié par l’ANSD en 2011. Seulement, les données
sur les ménages et les populations des villages ciblés n’étant pas disponibles au niveau de ce
document, nous nous sommes finalement rabattus sur l’annuaire des villages du Sénégal
disponible sur le site du Programme National de Développement Local.
Les villages ciblés se situent dans le département de Bignona, dans l’Arrondissement de
Tenghory et dans divers CR (cf.tableau1).
La population de ces villages étant assez importantes nous avons échantillonné sur les
ménages en prenant le 1/3 pour chaque village :
Tableau 1 : Échantillonnage.
Communes Rurales Villages Populations Ménages Enquêtés
Niamone Tobor 6257 300 100
Coubalan Djilacoune 1100 135 45
Coubalan Fintiock 2340 164 55
Coubalan Tapilane 233 32 11
Ouonck Ouonck 1626 135 45
Total 5 11 556 766 256
22
La collecte de données qualitatives.
Notre étude portant sur des dynamiques passées et récentes, nous avons interprété les
changements de l’occupation du sol à travers des cartes diachroniques.
Nous avons utilisé Microsoft office Word pour la saisie et Excel pour le traitement des autres
données recueillies.
Problèmes rencontrés.
Les problèmes rencontrés ont été nombreux. L’indisponibilité d’images satellites multi dates
couvrant notre zone est le plus grand problème que nous avons rencontré. Aussi, l’absence de
données statistiques sur les superficies de mangroves dégradées, sur les terres rizicoles
perdues, sur les tannes ainsi que la rareté de documents traitant de manière spécifique la
dynamique de la « tannification » dans notre aire d’étude ont apporté quelques lacunes dans
notre documentation.
23
La méthodologie utilisée, les objectifs fixés et les hypothèses formulées nous permettent de
décliner les grandes lignes de notre mémoire.
Ainsi, dans la première partie, nous commençons par une présentation générale de l’aire
étudiée. Ainsi, après une étude du milieu physique, une présentation générale des aspects
humains et des activités économiques dans les deux premiers chapitres, nous montrons
l’importance de la mangrove et ses divers usages en Basse Casamance.
Ce chapitre est une transition vers la deuxième partie consacrée à l’étude de la dynamique des
vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck. Dans cette partie, nous déterminons d’abord les
facteurs de cette dynamique, ensuite nous décrivons ses manifestations pour finir par
démontrer ses impacts sur le plan écologique et anthropique.
La troisième partie est consacrée à l’analyse des différentes stratégies de sauvegarde ou de
restauration de la mangrove des zones étudiées. Pour se faire, nous présentons dans un
premier chapitre les stratégies dites traditionnelles et dans un second chapitre, les stratégies
dites modernes. Un troisième chapitre est alors consacré l’analyse proprement dite des
impacts de ces différentes stratégies.
24
Première partie :
Présentation du milieu.
Introduction.
Notre zone d’étude se situe en Basse Casamance, dans le département de Bignona, dans
l’Arrondissement de Tenghory et couvre les Communes Rurales de Niamone, de Coubalan et
de Ouonck.
Elle s’étend entre 12°35′29"N et 16°15′45"W en dessous du Pont Émile Badiane jusqu’à 12°
42′ 36″ N et 16° 03′ 20″ W au village de Ouonck qui constitue la limite de l’aire d’étude.
Dans cette première partie, nous faisons une présentation générale de la zone d’étude avec une
étude du milieu physique, du cadre humain et des aspects socio-économiques dans les deux
premiers chapitres. Le troisième chapitre est consacré à l’écologie et aux divers usages de la
mangrove casamançaise.
26
Carte 1 : Situation de l’aire d’étude.
27
Chapitre 1 : Le milieu physique.
Introduction.
Au sud du Sénégal, la région de Ziguinchor se particularise par un relief relativement plat, une
végétation luxuriante, des sols assez riches, un climat soudano guinéen, une pluviométrie très
forte -la plus élevée du pays- et un réseau hydrographique assez dense.
La Basse Casamance appartient du point de vue géologique au bassin sédimentaire sénégalo-
mauritanien et en constitue la partie méridionale. Le relief est relativement plat avec de bas
plateaux dont les altitudes ne dépassent pas 50 m.
28
Source : Saos et al., 1987
Figure 1 : Esquisse géomorphologique de la Casamance d’après Vieillefon (1974).
Le Secondaire est marqué par une importante série de transgressions marines qui ont favorisé
le dépôt de plusieurs types de sédiments. Durant le Trias se mettent en place des formations
lagunaires de type salifère.
Le socle cristallin qui atteint le maximum de son extension au Lutétien affleure à environ 300
Km de la mer. Au Crétacé, la sédimentation se poursuit avec des argiles qui se substituent
avec des grès fins et tendres.
29
Au cours du Maestrichtien se sont déposés les dépôts argilo-sableux à intercalations
carbonatées qui occuperont l'ensemble du bassin casamançais (Michel, 1973).
Le Tertiaire a connu d'importants bouleversements tectoniques car c’est au cours au cours du
Miocène « qu’intervient une importante phase tectonique cassante. Les réseaux de fractures
de direction principale N 50° et N 130° ainsi que N 80° et N 180° vont fortement conditionner
l’hydrographie » et « des sédiments argilo-sableux de 50 à 150 m de puissance se sont déposé
sur l’ensemble de la Basse Casamance » (Saos et al., 1987).
Le Continental Terminal, est un sédiment détritique composé de « grès argileux bariolés
interstratifiés de couches d’argiles » qui s’est mis en place après la régression qui a suivi le
Miocène. Son origine continentale d’après Vieillefon (1977), est plutôt considérée comme
marine par Flicteaux et al. (1974) d’après Saos et al. (1987).
Plusieurs études ont mis en évidence le rôle du Quaternaire récent dans l’évolution géologique
de la Casamance (Vieillefon 1974, Marius 1984).
Ayant permis la mise en place des formes actuelles, le Quaternaire récent est surtout marqué
par des oscillations du niveau marin et par des changements climatiques (Saos et al., 1987).
La transgression Nouakchottienne dont le maximum se situe vers 5 500 B.P., a déposé des
sédiments marins et les dépôts sableux vont former les terrasses actuelles.
Après le Nouakchottien un courant N-S de dérive littorale va fermer le Golfe de la Casamance
vers 3900 - 3500 B.P. par une série de cordons littoraux. Vers 3000 BP une grande lagune se
forme avec des sédiments vaseux qui permettront la mise en place de la mangrove.
Enfin vers 1500 BP, la Casamance prend une allure comparable à l’actuelle (Vieillefon,
1974).
Les tannes se sont mis en place à la faveur d’un climat sec « qui conduit à la dernière
transformation importante du paysage » (Saos et al., 1987).
Les vasières à mangrove vont continuer à coloniser la lagune et connaissent une période
importante d’extension jusqu’à une phase récente de péjoration climatique caractérisée par un
climat aride qui favorise l’extension des tannes et le recul des mangroves.
30
Source : Saos et al., 1987.
31
1.2 Les grands traits du relief.
Les cordons littoraux se localisent sur tout le littoral et sont parfois modelés en dunes vives.
Ces cordons se seraient formés vers 4 500 ans B.P. suite à la dérive littorale N-S qui apparaît
aux environs de 4 000 ans B.P. Ces cordons vont fermer le golfe de Casamance et vers 3 000
ans B.P., ils vont continuer de progresser jusqu’à la transformation du golfe en une grande
lagune où ont pu se développer les formations de mangrove (Marius et al., 1986). Il existe des
cordons littoraux récents et des cordons littoraux anciens. Les cordons récents sont orientés
N-S et S-N suivant les directions des houles du N-W et du S-N. Les cordons littoraux anciens
sont orientés NNW – SSE, et NE – SW (Pimmel, 1984).
Les bas-fonds correspondent aux zones inondables et comportent deux parties : une partie
avale soumise aux fluctuations de la marée et une partie amont « non maritime de sédiments
limono-sableux occupée par les rizières » (Malou et al., 1991). Dans la partie avale, on
retrouve les vasières qui sont colonisées par les palétuviers et les tannes. Ces derniers sont de
vastes espaces plats, salés, parfois dénudés à l’arrière des mangroves. La topographie
comporte deux secteurs : un tanne herbu inondé lors des marées de vives eaux et un tanne nu
toujours exondé. Les vallées « entaillent les plateaux par des milliers d’axes naturels de
drainage qui constituent le vaste bassin versant du Fleuve Casamance et de ses trois
principaux affluents, Diouloulou, Bignona et Soungroungrou sur la rive droite, Kamobeul et
plusieurs bolongs sur la rive gauche » (PADERCA, 2008).
32
1.2.3 Les terres de transition.
Elles correspondent aux versants et aux terrasses. La partie haute des versants comprend
d’après Pimmel (1984), l'ensemble « des sables rouges, colluvionnés en surface, surmontant
le niveau latéritique à cuirasse, lorsqu'il affleure ». Ces versants sont constitués de terrasses
marines dont « la plus basse (2 m) est occupée par les colluvions… » (Malou et al., 1991).
Les terrasses, qui constituent la partie basse des versants, sont mises en place par les diverses
transgressions marines survenues durant l’histoire géologique de la Casamance. Ces
transgressions, dont la plus importante est la Nouakchottienne, « ont entraîné le comblement
général de l’estuaire et des basses vallées et la construction de divers systèmes de terrasses
sableuses, fréquentes dans l’estuaire et ourlant parfois les plateaux du Continental Terminal »
d’après Vieillefon (1977). Pimmel (1984) les divise en deux ensembles :
- Les terrasses basses sableuses ou argileuses variant de 0,5 à 1 m ;
- Les terrasses sableuses qui comptent trois niveaux principaux :
La terrasse sableuse récente de 2 m généralement entourée de cordons sableux et
de mangrove ;
La terrasse sableuse de 2 à 5 m constituée de sables blancs ;
La terrasse supérieure 6 – 10 m, elle ourle généralement les plateaux du CT.
Les plateaux appartiennent au Continental Terminal à relief généralement plat ; les altitudes
sont inférieures à 40 m et diminuent progressivement du sud-est jusqu'à l’ouest pour atteindre
le niveau de la mer (PADERCA, 2008).
Ces bas plateaux « sont formés de buttes circulaires ou sinueuses ». Les terrains sont couverts
de dépôts continentaux avec « des sols sableux rouges plus ou moins indurés » (Malou et al.,
1991).
33
Carte 2 : Relief et Topographie de Ziguinchor à Ouonck.
34
1.3 Le climat.
Le climat de la Basse Casamance, de type sud soudanien côtier, est marqué par l’alternance de
deux saisons nettement tranchées. Les influences aérologiques confèrent à ce climat un
caractère pluvieux. La proximité avec l’océan, les caractères topographiques du milieu et la
situation même de la zone dans le pays sont autant de facteurs qui rendent assez particulier le
climat de la Basse Casamance.
La connaissance des caractéristiques de ce climat est essentielle et nous permet de mieux
comprendre les facteurs de la dynamique des vasières à mangrove de notre aire d’étude.
La Basse Casamance se situe dans la partie australe du Sénégal. Le climat du pays est de type
sud soudanien côtier caractérisé par l’alternance d’une saison sèche qui va de Novembre à
Mai et d'une saison pluvieuse allant de Juin à Octobre.
Du point de vue des précipitations, le pays est compris entre les isohyètes 300 et 1 500 mm.
La région de Ziguinchor fait partie de la Basse Casamance et est marquée par la circulation et
par l’alternance de plusieurs masses d’air.
La circulation atmosphérique générale se résume ainsi : au niveau des basses pressions
tropicales circulent les alizés qui sont des vents d’Est. La convergence des alizés dans la zone
équatoriale crée la ZIC (Zone Intertropicale de Convergence) qui se déplace annuellement
d’un hémisphère à l’autre. Sous l’effet de la force de Coriolis, l’alizé traverse l’équateur,
change de direction (SW) et devient la mousson. La convergence de l’alizé (NE) et de la
mousson (SW), crée un front appelé FIT ou Front Intertropical de Convergence qui est aussi
l’Équateur Météorologique.
La circulation atmosphérique est ainsi conditionnée par l’existence de trois centres d’actions :
- L’anticyclone des Açores situé dans l’Atlantique nord génère le flux d’alizé maritime
qui est responsable des précipitations occultes au niveau des zones côtières ;
- L’Anticyclone saharo-libyen génère l’alizé de direction NE appelé
l’Harmattan pendant l’hiver boréal;
- L’Anticyclone de Sainte-Hélène situé dans l’Atlantique sud génère pendant l’été
boréal des flux de mousson.
Théoriquement la Basse Casamance fait partie du domaine sud soudanien avec des
précipitations comprises entre 1 000 et 1 500 mm.
35
C’est le déplacement du FIT qui explique la zonation climatique du pays. Ce sont aussi « les
flux (alizés et mousson) et le front (F.I.T.) (qui) expliquent les variations climatiques spatiales
et saisonnières observées » (IMAO, 2009) dans tout le pays.
Les vents.
La circulation des masses d’air conditionne la vitesse et la direction des vents. Durant la
saison sèche, ce sont les vents d’Est qui dominent. L’arrivée du FIT fait prendre aux vents une
direction Ouest. Mais ce sont les vents d’Ouest qui dominent presque toute l’année comme
indiqué dans le tableau suivant.
Tableau 2 : Vitesses et directions annuelles des vents au sol à Ziguinchor entre 1981 et 2011.
Mois J F M A M J J A S O N D
Vent en m/s 1,6 1,8 1,9 2 2 1,9 1,5 1,4 1,3 1 1,1 1,4
Directions NE N W W W W W SW W W N NE
36
Les vents peuvent atteindre des vitesses maximales de 2m/s. Elles correspondent alors au
deuxième degré de l’échelle de Beaufort.
37
La lecture de la rose des vents permet de déterminer deux saisons éoliennes :
- La saison éolienne qui va de Novembre à Février : les vents sont de direction N-NE avec
une vitesse moyenne de 1,4 m/s ;
- La saison éolienne qui va de Mars à Octobre : les vents ont une direction Ouest avec une
vitesse moyenne de 1,5 m/s.
La variabilité interannuelle des vents montre des fluctuations assez importantes de leur
vitesse. Des fréquences assez élevées ont été observées durant les années 1990 et 1996 avec
respectivement 2,8 et 2,4 m/s. Ces années nuancent remarquablement avec 2005 où la vitesse
annuelle est 0,8 m/s. Outre ces extrêmes, une autre ligne de lecture se dessine : durant les
années 1980 les fréquences oscillent entre 1,1 et 1,5 m/s tandis que vers les années 1990-
2000, les fréquences sont assez élevées et varient entre 1,6 et 2,2 m/s comme illustré par le
graphique suivant.
2,5
Vitesses des vents en m/s
1,5 Fréquences
annuelles des
vents en m/s
1
0,5
0
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Années
38
La pluviométrie.
La Basse Casamance est la zone la mieux arrosée du pays avec des précipitations moyennes
annuelles pouvant atteindre 1500 mm. La saison des pluies appelée hivernage s’étale de juin à
octobre.
Les précipitations suivent un gradient de pluviosité allant du nord-est au sud-ouest selon
(Montoroi, 1996). Elles ont un régime unimodal avec un pic au mois d’août. Elles se
caractérisent surtout par leur variabilité inter mensuelle et interannuelle (cf.graphique ci-
dessous).
2000
1800
Pluviométrie annuelle en mm
1600
1400
1200
Pluviométrie
1000
annuelle
800
600
400
200
0
1990
2001
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Années
La moyenne de la série pluviométrique est de 1223 mm. La variabilité se traduit à travers des
années largement excédentaires et par des années largement déficitaires. Les manifestations et
les impacts de cette grande variabilité des précipitations sur la dynamique des vasières à
mangrove seront largement traités dans la deuxième partie de notre mémoire.
Les températures.
39
- Une saison fraîche (novembre à mars) qui subit l’influence des masses d’air boréales.
Durant cette période les températures moyennes mensuelles sont de l’ordre de 23-26°C ;
- Une saison chaude qui débute en mai avec l’installation de l’air austral chaud. Les
températures moyennes sont de l’ordre de 27-30°C (IMAO, 2009).
Les températures moyennes annuelles présentent une faible variabilité interannuelle
(cf.graphique ci-dessous). Elles varient entre 27 et 28°C. Sur une période de trente ans (30
ans), c’est seulement durant les années 2005 et 2010 que l’on a enregistré des températures de
29°C (29,1 et 29,3°C respectivement).
40
35
30
25
20 T° maximales annuelles
15 T° moyennes annuelles
10 T° minimales annuelles
0
1984
1999
1981
1982
1983
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
La variabilité est surtout observée au niveau des maxima et des minima mensuels qui
présentent de grandes fluctuations dans le temps. Cependant, de manière globale, les
amplitudes sont faibles ce qui fait que les courbes évoluent dans le même sens.
L’humidité relative.
L’hygrométrie dépend de la pression de vapeur saturante dans l’air. Généralement elle est
élevée durant la saison des pluies où la nébulosité du ciel associée à la réduction de la durée
de l’insolation et du degré de l’évaporation favorise une humidité de l’air.
Les oscillations de la courbe ci-dessous démontrent la grande variabilité interannuelle de
l’humidité relative avec des déficits marqués surtout durant l’année 1988 (63 %)
40
75
Hygrométrie moyenne annuelle en %
60
45
Humidité
moyenne
30 annuelle
15
0
1986
1990
1981
1982
1983
1984
1985
1987
1988
1989
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Années
L’Évaporation.
L'évaporation intéresse les précipitations qui atteignent le sol durant la saison pluvieuse mais
aussi les plans d’eau comme les marigots et l’eau des nappes. Elle atteint des proportions plus
ou moins importantes dans l’année en fonction des saisons.
Principalement liée à la température, elle est en effet très importante durant la saison sèche où
les températures sont très élevées. Les minima sont enregistrés durant la saison pluvieuse. En
effet, durant cette saison, l’hygrométrie élevée favorise une baisse de l’évaporation. À cela
s’ajoute aussi la réduction de la durée de l’insolation.
Elle a connu des fluctuations interannuelles importantes se traduisant par de fortes
augmentations 1234 mm en 1993, 1223 mm en 1986 et par de fortes baisses 802 mm en 1994
et 820 mm en 2000.
Ce graphique des cumuls annuels, sur la période 1981 – 2011 permet de faire une analyse de
la variabilité interannuelle de l’évaporation.
41
1400
1000
800
600 Evaporation
annuelle
400
200
0
1982
1984
1981
1983
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Années
L’insolation.
L’insolation est importante et est liée à la situation du pays dans la zone tropicale. Au niveau
de Ziguinchor, l’absence d’une grande élévation du relief rend l’insolation particulièrement
importante. Sa durée est variable en fonction des mois et sur une période de trente (30 ans)
nous obtenons les valeurs moyennes matérialisées dans le graphique ci-dessous.
300
Insolation moyenne annuelle en heures
250
200
150
Insolation
100 moyenne
annuelle
50
0
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Années
La durée d’insolation moyenne maximale est de neuf heures (9h) par jour. Cette durée
s’enregistre durant la saison non pluvieuse. Durant la saison pluvieuse, du fait de la
nébulosité, la durée est réduite jusqu’à quatre heures (4h) par jour au mois d’août.
42
1.4. Les ressources hydriques.
Les ressources hydriques sont très importantes. À la faveur du climat de type soudano-
guinéen, les eaux pluviales sont très importantes. Elles forment avec les eaux fluviales du
fleuve Casamance et les réserves des aquifères, d’importantes quantités d’eaux douces. Les
eaux salées sont quant à elles apportées par les marées.
Le réseau hydrographique est dense et est principalement formé par les marigots du
fleuve Casamance ainsi que les différents bolongs et mares qui arrosent la zone d’étude.
Le marigot de Bignona.
Situé entre 12°36-0" N et 16°21-2" W, le marigot de Bignona, aussi connu sous le nom de la
rivière Jakubel « fait partie des trois principaux marigots de rive droite de la Basse
Casamance. C'est aussi le moins important. Son bassin versant couvre environ 800 Km² (…).
Le cours principal du marigot a une longueur de 88 Km dont 68 Km est soumis à l'influence
des marées (…) » (Aubrun et Marius, 1986). Il se localise dans la vallée de Bignona qui
découpe le plateau du CT.
Un réseau plus ou moins dense de petites rivières dissèquent le plateau du CT et arrosent les
villages situés entre Ziguinchor et Ouonck. Ces cours d’eau sont :
- Le marigot de Tobor situé entre 12°35-57 N et 16°15-55 W ;
- Les bolongs de Djilacoune, de Djiguinoum et de Coubalan ;
- Au niveau du village de Fintiock se localisent les marigots suivants :
Yeumekeye, Woutioutt, Bougone goly, Banèle, Guindory, Sitao, Djignarkoutt, Foniya,
Djisoff ébouk, Kakolack, Som, Simbilito;
- Au niveau du village de Tapilane, il y a : Fouguembedieuf, Mbérite, Ouroussou,
Tamang tamang, Djilcolédj djé, Koutiemba ;
- Au niveau du village de Ouonck nous avons : le bolong de Ouonck situé entre 12°41-
52 N et 16°01’46 W, Balibéry, Diémsory bolong, Simbolong, Kùdùgadùg et Kalipète.
43
Carte 3 : Réseau hydrographique.
44
1.4.2 Les eaux salées.
Elles sont apportées par les marées à travers un cycle semi-diurne. Le bief maritime de la
Casamance s’étend sur 217 Km sur le bras principal et sur 185 Km sur son affluent principal
le Soungrougrou (IMAO, 2009). Du fait de sa position latitudinale et de sa basse topographie,
l’estuaire de la Basse Casamance est aujourd’hui confronté à un problème de salinité. En
effet, les eaux marines pénètrent jusqu’à 200 Km de l’embouchure du fleuve et le taux de
salinité est estimé à 170‰ (IDEE Casamance, 2010).
1.4.3 Hydrogéologie.
45
Carte 4 : Agencement des sols de Ziguinchor à Ouonck.
46
Les sols ferrugineux et les sols ferrallitiques.
Ces gammes de sols se localisent partout le long de l’axe Ziguinchor – Ouonck notamment au
niveau des zones de topographie élevée où se localisent les palmeraies, et les forêts.
Leur évolution est marquée par l’excès d’eau. C’est la gamme de sols la plus répandue avec :
- Les sols hydromorphes à gley et à pseudo-gley très répandus entre Tobor et Ouonck.
Topographiquement ils se localisent au niveau des vasières à mangrove ;
- Les sols hydromorphes organiques localisés entre Tobor et Dioubour ;
- Les sols hydromorphes peu évolués localisés principalement à Djiguinoum, à
Boutolatte, à Boureck et à Tapilane.
Presque inexistants à Tobor, ils occupent de vastes surfaces entre Djilacoune et Ouonck et se
caractérisent par leur teneur assez élevée en sel. Lorsqu’ils se localisent au niveau des
tannes, ces sols sont sursalés, paras sulfatés à sulfatés acides ; lorsqu’ils se localisent au
niveau du littoral, ce sont des sols halomorphes salins hydromorphes.
La présence du sel est visible à la surface des tannes comme en attestent les clichés suivants :
Photo 1 A – B : Efflorescence saline sur les tannes.
Leur grande variété fait qu’ils sont très riches et propices à l’agriculture avec essentiellement
la culture du riz.
47
Les sols ferrallitiques de la Basse Casamance sont les meilleurs sols du pays. Les sols
halomorphes sont caractéristiques des mangroves et des tannes et se localisent le long du
fleuve Casamance et de ses affluents.
Les changements des conditions climatiques et édaphiques ont beaucoup impacté sur la
composition minéralogique et chimique de ces sols. C’est ainsi que l’on a pu détecter la
présence du fer à la surface de ces sols qui durant la saison sèche se desquament sous l’effet
de l’évaporation due aux fortes chaleurs. Devenus impropres à toute spéculation agricole,
certains de ces sols ont été abandonnés par les agriculteurs qui se sont rabattus sur les sols des
plateaux pour cultiver le riz (Posner, 1988).
1.6. La végétation.
De Ziguinchor à Ouonck, la végétation suit une zonation topographique (cf.carte 5).
La principale formation végétale est la forêt avec des forêts-galeries, des forêts claires
(humides et sèches) et des forêts classées. La forêt classée des Kalounayes, avec une
superficie de 15 150 ha, couvre les CR de Coubalan, de Niamone, de Ouonck et de Tenghory
(GTZ – PERACOD, 2008). Sur les secteurs topographiques assez élevés se localisent la
palmeraie et la rôneraie. Les espèces végétales ligneuses et agricoles comprennent plusieurs
essences dont les plus représentatives sont listées dans le tableau suivant :
48
Carte 5 : La végétation de Ziguinchor à Ouonck.
49
En dehors des forêts, les rizières sont des espaces étendus localement appelés « faros ».
À la suite des rizières, nous avons la mangrove à palétuviers qui a une zonation particulière.
Les palétuviers du secteur sont représentés par deux principales espèces :
- Les Rhizophoracées avec seulement Rhizophora racemosa ;
- Les Verbénacées avec Avicennia africana.
Comme en atteste l’image ci-dessous, ces deux espèces de palétuviers sont réparties selon un
gradient de submersion : sur les parties qui ne sont pas immergées en permanence se localise
Avicennia qui se développe derrière Rhizophora qui préfère les parties jamais exondées.
Avicennia
Rhizophora
La flore herbacée est assez riche. Les tannes herbus sont colonisés par Sesuvium
portulacastrum, plante localement appelée « egnalé » et qui est consommé comme aliment.
50
De manière générale, la végétation suit une zonation topographique. Le schéma suivant
montre l’agencement des formations végétales en fonction de la topographie ; nous nous
sommes inspirés de plusieurs sources pour le réaliser :
Conclusion partielle.
Les zones étudiées se situent en Basse Casamance qui a des particularités climatiques,
hydrographiques et topographiques notoires comparativement aux autres zones géographiques
du pays. La richesse des sols et de la végétation permet l’existence de plusieurs activités
économiques.
51
Chapitre 2 : Le cadre humain et les aspects socio-économiques.
Introduction.
Le Département de Ziguinchor.
La CR de Niamone.
52
La CR de Coubalan.
La CR de Ouonck.
2.1.1 Le peuplement
Casamance dérive du nom de Kasa mansa, roi du royaume Kassanké peuplé de Baïnouks qui
sont les premiers habitants de la région. Le Kasa par contre était un vaste ensemble politique
et géographique, sous la tutelle du Mansa (roi) de Brikama ou Birkama, Gana Sira Biaye.
Du fait de son inaccessibilité due en grande partie à la forêt dense, à l’absence de structures
propres au niveau des villages, l’histoire du peuplement de la Casamance est difficilement
connue. C’est d’ailleurs l’une des dernières régions du Sénégal à être colonisé par les
Français.
En Basse Casamance, les Diolas constituent l'écrasante majorité de la population. Les
Balantes sont au Sud-est de la Basse Casamance et débordent sur la Moyenne Casamance. Les
Baïnouks sont établis de part et d'autre du Soungrougrou. De récentes migrations ont introduit
en Basse Casamance les Manjaques, les Mancagnes, les Ouolofs, en provenance
respectivement de la Guinée-Bissau et du Nord du Sénégal. Les Mancagnes constituent la
plus ancienne migration. Ils seraient venus après la première guerre mondiale et se seraient
installés au Sud de Ziguinchor par la suite.
53
2.1.2 Données démographiques.
La population de la région de Ziguinchor est estimée à 713 440 habitants en 2010 avec un
taux d’accroissement de 2,7%. La densité de population est de 97,21 habitants au Km2
(ANSD, 2011). La population est composée de groupes ethniques très composites et est
essentiellement jeune et à majorité rurale. L’ethnie majoritaire est constituée par les diolas qui
représentent près de la moitié de la population (cf.graphique8). Les autres ethnies sont les
Mandingues, les Puular, les Manjacques, les Mancagnes, les Balantes, les Sérères, les
Ouolofs.
Les populations de la Région de Ziguinchor sont, dans leur écrasante majorité, fortement
croyantes. L'Islam est la religion la plus pratiquée avec 375 463 adeptes (74,48 %). Les
catholiques sont au nombre de 87 300 (17,32 %), les autres chrétiens 2 325 (0,46 %), les
animistes sont au nombre de 39 062 (7,75 %) (IDEE Casamance, 2010).
4% 3%
5% Diolas
3%
2% Mandingues
5% Puular
Manjacques
11% Mancagnes
58% Balantes
Oulofs
11%
Sérères
Autres
54
Source RGPH III-2002, ANSD 2011.
Graphique 9 : Pyramide des âges de la région de Ziguinchor.
La structure par âge permet de voir l’extrême jeunesse de la population d’où la forme de la
pyramide des âges qui a une base large caractéristique des pays en développement où la
jeunesse occupe plus de la moitié de la population.
La population est inégalement répartie entre les trois départements de la région. La densité
moyenne est de 97,21 habitants au km2. Ziguinchor avec 330 112 habitants et une densité de
289,82 habitants/Km2 est le pôle démographique le plus important de la région, suivi de
Bignona qui compte 318 478 habitants en 2010. La population du département d’Oussouye
est estimée à 64 850 habitants (ANSD, 2011).
350 000
300 000
250 000
200 000
Population en 2010
150 000
100 000
50 000
0 Population
Départements
55
Taux d'urbanisation
10%
15% Ziguinchor
Bignona
Oussouye
75%
Cette inégale répartition est due à la grande mobilité de la population ; mobilité causée surtout
par la situation d’insécurité qui sévit dans les zones rurales.
2.2.1 L’agriculture.
Riziculture
Sylviculture
Maraîchage
Arboriculture
56
Outre le riz (Oryza glaberrima), les cultures céréalières sont dominées par le sorgho
(Sorghum durra), le maïs (Zea mays), le mil (Panicum miliaceum). Les cultures commerciales
sont dominées par la culture de l'arachide (Arachis hypogaea), les cultures maraîchères et les
cultures fruitières. L’arboriculture est quant à elle dominée par les agrumes et les manguiers.
Le maraîchage se développe de plus en plus ces dernières décennies.
Parmi les problèmes rencontrés par les agriculteurs, il y a l’usage de matériaux rudimentaires,
le difficile accès aux semences, l’enclavement de la zone et la concurrence qui font que les
produits s’écoulent assez difficilement sur le marché, la perte de fertilité de certains sols, la
salinisation des terres, l’acidification, l’érosion et l’ensablement.
2.2.1 Élevage.
Tout comme pour l’agriculture, l’élevage bénéficie de conditions naturelles très favorables à
son développement grâce à des ressources en eau suffisantes et des terres de pâturage à perte
de vue.
L’élevage n’est pas une activité très pratiquée bien que la région ait d’après ANSD (2011) une
vocation agro-sylvo-pastorale. La vaine pâture est récurrente et le bétail souffre de plusieurs
maladies comme la trypanosomiase. Parmi les problèmes auxquels sont confrontés les
éleveurs, on note : les maladies du cheptel, le manque d’eau durant la saison sèche avec le
tarissement de certains marigots, les changements récents du milieu qui ont réduit les surfaces
de pâtures, etc.
2.2.3 La pêche.
La pêche est dans l’ensemble une activité importante en Basse Casamance qui bénéficie d’une
frange maritime de 86 Km, d’un large plateau continental, d’un fleuve long de 350 km. La
pêche maritime et la pêche fluviales sont les plus pratiquées. La pêche se fait aussi au niveau
des bolongs et emploie des techniques traditionnelles.
L’industrie est pour sa part peu développée parce que la Basse Casamance est de loin une
zone agricole et sylvicole.
Cependant, la région de Ziguinchor compte un secteur artisanal très dynamique, réparti en
trois sections : Art, Production et Service. L’activité artisanale se développe essentiellement
autour du village artisanal de Ziguinchor administré par la Chambre des métiers.
57
En dépit d’un ensemble de difficultés liées au manque d’équipements, à une formation
professionnelle déficiente et à une morosité du marché, le secteur essaye de jouer un rôle
d’entraînement dans l’économie régionale (ANSD, 2011).
La région de Ziguinchor joue un rôle important dans le commerce sénégalais. De par ses
nombreuses potentialités et de par sa position géographique, la région est « une plaque
tournante du commerce sous-régional » (ANSD, 2011).
Les produits agricoles, halieutiques et forestiers sont exportés vers Dakar mais aussi vers les
pays limitrophes que sont la Guinée Conakry, la Guinée-Bissau, la Gambie et la Mauritanie.
Le tourisme est très développé en Basse Casamance du fait que la zone est très attractive de
par ses nombreuses potentialités socioculturelles et naturelles. La douceur du climat, la beauté
de la mangrove, la richesse de la culture des diolas sont autant d’atouts qui font de la région
de Ziguinchor, une destination de rêve. Malgré la crise qui a secoué la région ces dernières
décennies, le secteur touristique reste toujours très dynamique.
Parmi les autres activités économiques, l’ostréiculture est très développée au niveau des zones
de mangrove et est essentiellement pratiquée par les femmes.
Outre cette cueillette d’huîtres, l’aménagement de bassins piscicoles autour des aires de
mangrove se fait de plus en plus.
L’extraction du sel nommée « saliculture » est aujourd’hui très développée.
Conclusion partielle.
Les activités économiques sont diverses et florissantes. L’agriculture occupe la première place
et est vivrière. L’exploitation des ressources halieutiques et forestières est favorisée par
l’existence dans certains villages de vastes étendues de mangroves.
Cet écosystème riche et productif offre divers services aux populations. Sa surexploitation a
ainsi conduit à sa dégradation.
58
Chapitre 3 : Écologie et usages de la mangrove de la Casamance.
Introduction.
La mangrove de la Casamance est située au niveau d’une zone qui bénéficie d’une très bonne
pluviométrie. Le climat est de type soudano guinéen à subguinéen avec de faibles amplitudes
thermiques. La température moyenne annuelle est de 27°C à Ziguinchor. Le réseau
hydrographique est composé essentiellement des eaux douces du fleuve Casamance avec ses
multiples bras. Elle a comme particularité essentielle sa situation au niveau d’un bras de mer
qui à l’instar du Sine-Saloum est devenu un « estuaire inverse » du fait du fort taux de salinité
pouvant atteindre en amont 170‰ selon (IDEE Casamance, 2010). Elle occupe une superficie
de 83 000 hectares. Le substrat est vaseux et les sols halomorphes et hydromorphes sont
caractéristiques des mangroves et des tannes.
Les palétuviers sont représentés par trois (3) principales espèces réparties en deux familles :
- Les Rhizophoracées : Rhizophora racemosa, Rhizophora mangle, Rhizophora harrisonii ;
- Les Verbénacées avec Avicennia africana.
Cette mangrove se caractérise par sa pauvreté floristique, mais a une très grande utilité pour
les populations locales.
La mangrove est un écosystème qui se particularise par son état de niche biologique. Outre
ses fonctions écologiques, elle offre de larges richesses naturelles et « possède donc une
valeur écologique, mais aussi scientifique, culturelle, éducative, touristique et socio-
économique » selon PASEF (2010). La mangrove assure ainsi diverses fonctions.
Les fonctions écologiques de la mangrove sont diverses. Lieu de reproduction, elle renferme
une faune très riche avec plusieurs espèces de poissons, de mollusques, de crustacés,
d’oiseaux etc. L’espèce de poisson caractéristique des mangroves est le périophtalme
59
(Periophthalmus). L’Eudocimus ruber ou l’ibis rouge et plusieurs espèces de crabes dont
l’Uca pugilator ou crabe violoniste peuplent la mangrove.
La mangrove joue aussi le rôle de frayère contre les vents et la houle et protège les côtes
contre les tsunamis et les ouragans car le système racinaire des palétuviers est tout à fait
efficace pour absorber l’énergie des vagues et pour freiner aussi l’érosion côtière.
Un autre rôle écologique important est la séquestration du carbone dans la vase qui participe
nettement à la lutte contre le réchauffement climatique.
Les zones de mangrove remplissent des fonctions économiques importantes qui très souvent
sont à la base même de leur dégradation. Parmi ces fonctions, PASEF (2010) cite « la
production de bois de chauffe et de service, de produits forestiers, de produits de cueillette, de
produits de la pharmacopée, etc. La mangrove sert aussi de lieu de production du riz.
Par ailleurs, les activités d’ostréiculture et de pisciculture y sont menées par les populations
avec l’appui des organismes de développement. La mangrove est aussi un lieu d’exploitation
de miel, un produit très apprécié par la population ».
À cause de la beauté de leur paysage, les mangroves sont des zones touristiques très prisées.
Les mangroves de la Casamance constituent, selon PASEF (2010), « un lieu de prédilection
des touristes qui, dans les pirogues ou bateaux de plaisance, sillonnent les bolongs en
compagnie des guides touristiques pour prendre des photos et se divertir durant leur séjour ».
Au Sénégal, l’importance de la mangrove dans la préservation de l’écosystème n’est plus à
démontrer, selon ADG (2011) et divers usages sont faits de cette mangrove.
60
- L’ostréiculture : c’est une activité importante. Les huîtres se fixant sur les racines des
palétuviers, les femmes les récoltent et les transforment pour les vendre dans les marchés
locaux.
- La conchyliculture : c’est une activité qui consiste à récupérer les coquillages qui se fixent
sur les racines des palétuviers.
- L’exploitation du sel : c’est une activité saisonnière qui s’est développée par la suite de la
salinisation excessive de certaines terres. Des marais salants sont aménagés et permettent
d’immobiliser une bonne partie de l’eau de mer. Cette eau est soumise à l’évaporation solaire
ou placée dans des réservoirs puis bouillie. À la fin des processus, du sel se précipite que les
femmes récupèrent pour vendre comme illustré par la photo suivante :
61
La mangrove est une zone écologique de haute importance qui assure des fonctions à la fois
écologiques, économiques et sociales. Elle est largement exploitée telle que schématisée dans
la figure suivante et des divers usages qui en sont faits dérive la majeure partie des facteurs de
sa dégradation, donc de sa dynamique régressive.
Figure 4 : Système d’usage multiples des ressources dans un terroir à mangroves de Basse
Casamance d’après PADERCA (2008).
Conclusion de la partie.
62
Deuxième partie :
Dynamique des vasières à
mangrove de Ziguinchor à
Ouonck.
Introduction.
Les mangroves sont largement exploitées dans la majeure partie des pays où elles existent et
elles offrent plusieurs services aux hommes.
« Knowledge of their current and past extent, condition and uses is essential for forest
managers and policy, and decision-makers » selon la FAO (2007) qui précise cependant que
« the planning of sustainable forest management at the local and national levels depends
largely on this information, and the lack of data on the status and distribution of mangroves
makes it difficult to prepare successful plans for their conservation ».
Ainsi, il est difficile d’avancer un chiffre traduisant la superficie réelle occupée par les
mangroves au Sénégal. Ces données étant lacunaires pour la plupart du temps, il se pose en
outre un problème de contours, c’est – à – dire si les tannes doivent être pris en compte
comme éléments de la toposéquence des écosystèmes mangroves telles que souligné par
plusieurs auteurs dont Cormier – Salem (1991).
Partout dans le pays, les mangroves se dégradent. Les vasières à mangrove de Ziguinchor à
Ouonck connaissent une dynamique régressive avec un taux de régression estimé à 0,8 %/an
selon IDEE Casamance (2010). Cette dynamique est due à la combinaison de plusieurs
facteurs. Cependant, ce sont les facteurs climatiques et anthropiques qui jouent un rôle
déterminant dans la dynamique des vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck.
Dans cette deuxième partie, nous déterminons dans un premier temps les différents facteurs
de la dynamique des vasières à mangrove, puis nous analysons la dynamique des différentes
séquences pour ensuite terminer par montrer les impacts de la dynamique des vasières à
mangrove dans l’espace étudié.
64
Chapitre 1 : Les facteurs de la dynamique des vasières à
mangrove de Ziguinchor à Ouonck.
Introduction.
La mangrove se situant sur l’axe fluvial Ziguinchor – Ouonck est affectée par plusieurs types
de dynamiques. Si par endroits comme à Tobor, elle régénère suite à des actions de
reboisement, dans d’autres endroits comme à Coubalan, à Ouonck et à Tapilane, elle régresse.
Tandis qu’à Djilacoune, elle est encore saine. Mais dans l’ensemble elle est dégradée du fait
de plusieurs ordres de facteurs que l’on peut diviser en deux groupes : les facteurs physiques
et les facteurs anthropiques.
Parmi ces facteurs naturels, le climat joue un rôle prépondérant et peut « être considéré
comme le facteur déterminant d'évolution des littoraux… » car « la péjoration climatique de
ces dernières décennies aurait induit une modification progressive et irréversible des
écosystèmes » Cormier-Salem (1994).
Les facteurs physiques ayant induit des changements parfois irréversibles des vasières à
mangrove sont de plusieurs types.
Le problème majeur est la baisse des précipitations. La variabilité inter annuelle et inter
mensuelle des précipitations a été mise en exergue par plusieurs auteurs dont : Pagès et al.
(1987), Dacosta (1989), Montoroi (1996), IDEE Casamance (2010) entre autres. Leurs études
portent sur la baisse de la pluviométrie constatée depuis les années 1960, la translation des
isohyètes et le rétrécissement de durée de la saison des pluies qui est passée de cinq (5) à
quatre (4) mois. En effet, Pagès et al. (1987) avaient constaté que « depuis près de 20 ans, la
sécheresse se manifeste par une réduction à la fois de la hauteur et de la durée des pluies. La
saison des pluies était centrée sur le mois d’août, et durait près de six (6) mois. Cette durée est
réduite à trois (3) mois environ ». Montoroi (1996) le confirme et estime que « sur la période
de référence 1951-1980 (d'après l'Organisation Mondiale de la Météorologie), la pluviosité est
de 1 399 mm et s'abaisse à 1140 mm sur la période 1971-1990 ».
65
Les graphiques ci-dessous nous permettent de faire une lecture approfondie de la variabilité
interannuelle des précipitations.
700
600
Ecarts à la moyenne de la série pluviométrique en
500
400
300
200
100
0 Ecarts à la
mm
-100 moyenne de
-200 la série
-300
-400
-500
-600
-700
1951
1970
1950
1952
1953
1954
1955
1956
1957
1958
1959
1960
1961
1962
1963
1964
1965
1966
1967
1968
1969
1971
1972
1973
1974
1975
1976
1977
1978
1979
1980
Années
800
Ecarts à la moyenne de la série pluviométrique en mm
700
600
500
400
300
200
100
Ecarts à la
0
moyenne de
-100 la série
-200
-300
-400
-500
-600
1989
1991
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1990
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Années
66
Ecarts à la moyenne de la série pluviométrique en mm Ecarts à la moyenne de la série pluviométrique en mm
100
200
300
400
500
-500
-400
-300
-200
-100
0
100
200
300
400
-600
-500
-400
-300
-200
-100
0
1981 1981
1982 1982
1983 9183
1984 1984
1985 1985
1986 1986
1987 1987
1988 1988
1989 1989
1990 1990
1991 1991
1992 1992
1993 1993
1994 1994
1995 1995
1996 1996
Années
1997 1997
1998
Années
1998
1999 1999
2000 2000
2001 2001
2002 2002
2003 2003
2004 2004
2005 2005
2006 2006
2007 2007
2008 2008
2009 2009
Graphique 15 : Écarts à la moyenne de la pluviométrie annuelle à Bignona.
2010 2010
moyenne
moyenne
Ecarts à la
67
de la série
Ecarts à la
de la série
La moyenne de la série 1950-1980 est de 1416 mm et la moyenne de la série 1981-2011 est de
1223 mm à Ziguinchor. La moyenne de la série 1981-2011 est de 1168 mm à Bignona et 1061
mm à Tenghory.
Pour Ziguinchor, la première baisse remarquable de la pluviométrie s’observe durant l’année
1968 avec un écart considérable à la moyenne (888 mm). Ensuite, durant les années 1972
(952 mm), 1977 (791 mm), 1980 (746 mm), 1982 (898 mm), 1983 (818 mm), 2002 (830
mm), 2004 (940 mm) et 2007 (670), des baisses considérables de la pluviométrie moyenne
annuelle ont été enregistrées. À partir de 1990 on constate un léger changement qui se traduit
par la hausse des précipitations. Un retour à la moyenne de la première série paraît quasi
impossible si l’on tient compte de la variabilité et de la péjoration climatique en cours.
Contrairement à Ziguinchor où l’on cumule des totaux assez élevés, les stations de Bignona et
de Tenghory se particularisent par une pluviométrie assez peu abondante. La variabilité
interannuelle des précipitations est plus marquée au niveau de Bignona avec plus d’années
déficitaires que d’années excédentaires et l’inverse s’observe à Tenghory. Les déficits sont
souvent assez remarquables comme durant l’année 1983 avec 612 mm à Bignona et l’année
1998 avec 682 mm à Tenghory.
De manière générale, l’irrégularité et la variabilité de la pluviométrie se traduisent par :
- Une succession d’années déficitaires qui débutent en 1968 jusqu’en 1990 avec des
écarts spectaculaires. Cela colle parfaitement avec la grande période de sécheresse qui
sévissait dans tout le Sahel durant la période 1970 – 1990 ;
- Plus d’une décennie marquée par l’alternance d’années déficitaires et d’années
excédentaires de 1991 à 2004 avec des écarts peu exceptionnels ;
- Une phase actuelle marquée par une hausse des précipitations marquant un retour
relatif à la normale entamée depuis 2005.
Deux années apparaissent exceptionnelles dans toutes les stations étudiées :
- L’année 1983 marquée par une pluviométrie très déficitaire : 818/1223 mm à
Ziguinchor, 612/1168 mm à Bignona et 805/1061 mm à Tenghory ;
- L’année 2008 marquée par une pluviométrie très excédentaire : 1520/1223 mm à
Ziguinchor, 1368/1168 mm à Bignona et 1504/1061 mm à Tenghory.
Cette grande variabilité de la pluviométrie s’est accompagnée d’une translation des isohyètes
telles que schématisée au niveau de la figure suivante :
68
Source : PANA, p15, (MEPN, 2006).
Figure 5 : Translation des isohyètes au Sénégal.
69
1.1.2 Les facteurs thermiques.
La salinisation
70
Cela pousse Marius (1979) à conclure que « tous les sols de mangrove du Sénégal subissent
une salinisation directe soit par les marées, soit par les nappes qui sont elles-mêmes
alimentées par les marées durant la saison sèche ». C’est ainsi que cette salinité peut dépasser
cinq (5) fois celle de l’eau de mer et peut même avoisiner 170 ‰ selon IDEE Casamance
(2010).
L’acidification.
Cette acidité croit des mangroves vers les tannes. Elle favorise la naissance des tannes qui
sont des zones nues ou couvertes d’une végétation halophyte qui se développent au détriment
des mangroves suite à une longue période sans immersion.
71
1.1.4 Les facteurs biogéographiques.
Les facteurs biogéographiques ne sont que des corollaires des facteurs climatiques et
anthropiques, mais ne manquent pas pour autant de jouer un rôle essentiel dans la dégradation
de la mangrove. En effet, la baisse des précipitations, l’avancée du front salé, la remontée du
sel des nappes par capillarité et l’hypersalinité et l’acidité des eaux et des sols sont
responsables de la déprédation du couvert végétal avec une forte mortalité des Rhizophora. En
conditions extrêmes, on assiste à une disparition totale des Rhizophora, des Avicennia et du
tapis herbacé. Par conséquent, le processus d’acidification s’accélère et aboutit à la
conversion des sols en tannes avec son lot de conséquences.
Le bois des palétuviers fait l’objet d’une exploitation qui date de plusieurs siècles. Ce bois est
utilisé essentiellement pour la cuisson d’aliments et pour la fabrication de maisons. Aussi les
palétuviers fournissent le tanin qui était exporté vers l’Asie et vers l’Europe ces dernières
décennies. Avec l’augmentation de la population, de fortes pressions ont été opérées sur les
ressources de la mangrove. Sa surexploitation a ainsi conduit à sa considérable dégradation.
72
2.1.2 La pêche.
Dans le souci d’accroître les captures et afin de pouvoir disposer de plus de surfaces et de
mouvements au sein de la mangrove, les pêcheurs n’hésitent pas à réaliser des coupes
abusives des branches et des rhizophores des palétuviers ; ce qui dégrade considérablement
l’écosystème.
Une baisse générale des captures est observée par les pêcheurs interrogés qui l’imputent à la
forte salinisation. La disparition de la pêche dans certaines zones comme à Hatioune s’est
faite consécutivement à la disparition de la mangrove.
Malgré la rareté des ressources halieutiques, la pêche demeure une activité importante au
niveau des zones où la mangrove est encore présente. Ainsi, des campements de pêcheurs sont
implantés au sein même de la mangrove en particulier à Tobor et alentours tel qu’illustré par
le cliché suivant :
2.1.3 L’ostréiculture.
L’ostréiculture concerne dans notre exposé uniquement les techniques de la cueillette des
huîtres. Il existe différentes techniques de cueillette des huîtres. La plus nuisible est celle qui
consiste couper les branches car « pour épargner leur force et leur temps, certaines femmes
coupent abusivement le bois des palétuviers » Cormier-Salem (1992).
Ainsi, la cueillette des huîtres favorise la coupe des rhizophores et des rameaux des
palétuviers, ce qui est très néfaste pour la survie des espèces d’autant plus que de rares
initiatives sont prises afin de replanter la mangrove.
73
Cependant, si jadis cette activité causait la dégradation de la mangrove, aujourd’hui, de
nouvelles techniques sont développées. En effet, des pirogues sont placées à l’intérieur des
marigots avec des dispositifs permettant aux huîtres et coquillages de s’y fixer. Cela épargne
les rhizophores des palétuviers et facilite la récolte de ces mollusques.
Malgré ces nouvelles techniques, l’ostréiculture ne subsiste que dans les zones où la
mangrove est encore en très bon état comme à Tobor et à Djilacoune. Dans les autres zones,
elle fait partie des souvenirs des jeunes femmes qui racontent comment auparavant leurs
mamans affrontaient la chaleur, la boue et les racines des palétuviers pour arracher les huîtres.
2.1.4 La pisciculture.
C’est une activité économique très importante, mais qui nécessite l’aménagement de bassins
piscicoles autour des mangroves. Ces bassins sont définis par Cormier-Salem
(1992) comme « des aménagements hydrauliques gagnés sur la mangrove, situés en aval des
rizières ». La pisciculture se développe de plus en plus, notamment à Tobor, à Coubalan à
Dioubour et à Djilacoune, zones où nous avons noté l’aménagement de plusieurs bassins
piscicoles. Dans ces zones, la mangrove est encore en bon état suite à des reboisements. Mais
dans les parties où la mangrove est très dégradée cette activité ne se pratique guère.
Des bassins d’une longueur 30 m, d’une largeur 20 m et d’une profondeur de 1 m sont
aménagés soit à proximité des mangroves comme c’est le cas à Tobor et à Djilacoune, soit à
l’intérieur même de la mangrove comme c’est le cas à Dioubour et à Coubalan.
74
Photo 8 A – B : Bassins piscicoles aménagés dans la mangrove.
A : à Dioubour B : à Coubalan
2.1.5 La conchyliculture.
Tout comme l’ostréiculture, la conchyliculture pousse les ramasseurs à couper les rhizophores
des palétuviers pour arracher les coquillages. Cela favorise ainsi le défrichement à grande
échelle de la mangrove participant par là à sa très grande dégradation voire à sa disparition.
C’est aussi une activité qui a totalement disparu dans certains secteurs comme à Coubalan, à
Tapilane, à Fintiock et à Ouonck.
Parallèlement, elle est pratiquée dans des secteurs comme à Tobor et à Djilacoune comme en
attestent les monticules de coquillages trouvés sur ces sites.
75
2.1.6 Les ouvrages inadaptés.
Afin de lutter contre la salinisation des rizières, des drains, des digues, des diguettes et des
barrages anti-sel ont été érigés.
Une digue est « une levée de terre étanche constituée de plusieurs couches compactées. Elle
est réalisée en travers d’une vallée ou encore le long d’un cours d’eau sous forme de ceinture
pour protéger et isoler une surface rizicultivable. Ainsi, d’une manière générale, la digue a
trois (3) fonctions principales à savoir : empêcher les intrusions marines, contrôler le niveau
des eaux en amont et assurer une récolte de riz en favorisant préalablement le dessalement des
terres "contaminées", créer des voies de communication pour désenclaver les villages ».
Par contre « le barrage anti-sel est composé de digues dans lesquelles sont placés un ou
plusieurs ouvrages permettant la régulation de la lame d’eau »
(http://diasporabignona.net/l%27agriculture.html). Ces digues n’ont pas souvent répondu à
leurs fonctions et ont causé des dégâts irréversibles sur les milieux dans lesquels elles ont été
érigées. Nous pouvons citer par exemple le projet de développement de la riziculture de
mangrove réalisé par la société hollandaise International Land Consultant (ILACO). Ce
projet « consistait à l’aménagement des vallées de terres salées ou saumâtres par la
construction de petits barrage-écluses sur les marigots de Bignona, de Kamobeul, de
Soungrougrou et du fleuve Casamance » et des « des aménagements, de moindre importance
ont été également réalisés dans les vallées de Baïla, de Bignona, de Tobor ».
Pour se faire, « le projet procéda à l’abattage systématique des palétuviers sur plusieurs
centaines voire des milliers d’hectares de mangrove sur lesquels des canaux de drainage
destinés à adapter les sols à la riziculture intensive ont été confectionnés » (PADERCA,
2008).
Modifiant le fonctionnement hydrologique des cours d'eau, ces ouvrages ont favorisé une
exondation des terres qui à la longue ont connu des changements sédimentologiques graves.
L’oxydation de la pyrite a favorisé la formation de la jarosite qui a abaissé le pH des sols.
Devenus alors acides, ces sols se sont peu à peu transformés en tannes et sont ainsi devenus
inaptes à toute spéculation agricole.
76
Facteurs naturels Facteurs anthropiques
Dégradation de la mangrove
Conclusion partielle.
77
Chapitre 2 : Dynamique des vasières à mangrove.
Introduction.
Une vasière est une zone humide estuarienne dont le substrat est formé par la vase.
Lorsqu’elle est colonisée par une végétation de palétuviers, on l’appelle vasière à mangrove.
Les vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck sont marquées par une dynamique
régressive se traduisant par un recul accentué dans certaines zones des aires de mangrove au
détriment de tannes qui colonisent les vastes espaces jadis occupés par les mangroves
(Lebigre, 1983).
78
Carte 6: Occupation du sol de Ziguinchor à Ouonck en 1986.
79
1.1.1 Présentation de la carte d’occupation du sol en 1986.
Les classes d’occupation du sol représentées sur la carte sont : l’eau permanente, la mangrove,
le sol, les tannes, les vasières à mangrove et la végétation continentale. Elles couvrent une
superficie totale de 76390,05 ha.
En matière de superficie occupée, en 1986, la végétation continentale prédomine avec 41,1%.
Les vasières à mangrove couvrent des superficies non négligeables (15,9 %) et s’étendent
essentiellement de Ziguinchor à Koubalan.
Les tannes sont bien représentés surtout de Koubalan à Ouonck et leur superficie (19, 7%) est
supérieure à celle du sol qui couvre 13,6%.
Le réseau hydrographique du fleuve Casamance formant les eaux permanentes est assez dense
mais ne couvre que 9,6% de la superficie totale.
La classe mangrove est faiblement représentée (0,1 %).
80
Carte 7: Occupation du sol de Ziguinchor à Ouonck en 1999.
81
1.1.2 Présentation de la carte d’occupation du sol en 1999.
En 1999, les mêmes classes que 1986 sont représentées : l’eau permanente, la mangrove, le
sol, les tannes, les vasières à mangrove et la végétation continentale pour une superficie totale
de 76276,3 ha. Il n’y a donc ni apparition, ni disparition de classes.
La végétation continentale occupe encore de larges superficies (40,6 %), mais est par endroits
remplacée par des tannes.
Les vasières à mangrove enregistrent une expansion fulgurante (23,2 %) et s’étendent jusqu’à
Ouonck. Elles remplacent en quelques endroits des surfaces jadis occupées par des tannes.
Le tanne subit des transformations importantes et ne couvre que 4,2% de la superficie totale.
Quasi-absente, en 1986, la mangrove s’implante progressivement de Tobor à Djilacoune et
couvre 0,8%.
Les sols couvrent de plus larges superficies soit 20,4 %.
Le réseau hydrographique s’étale et se densifie.
82
1.1.3 Analyse de l’évolution de l’occupation du sol entre 1986 et 1999.
L’indisponibilité des images satellites pour la période qui vient après 1999 nous contraint de
limiter notre analyse aux deux dates disponibles (1986 et 1999).
Entre ces deux périodes, l’évolution de la superficie occupée par les différentes classes
représentées est matérialisée au niveau du tableau ci-dessous.
La Basse Casamance est bien pourvue en végétation naturelle même si certaines de ses
formations comme la forêt-galerie, la savane arbustive, la savane arborée et la mangrove sont
fortement dégradées.
La dynamique de la mangrove a suivi les différentes phases des fluctuations climatiques
(cf.supra 69). Nous avons en effet identifié trois (3) phases : une phase de régression entre
1970 et 1980 correspondant aux années à pluviométrie déficitaire due à la sécheresse ; une
phase d’alternance entre régression et régénération entre 1980 et 2004 et enfin une phase
actuelle caractérisée par une régénération assistée de la mangrove dans certains endroits et par
une intensification de la « tannification » dans d’autres.
Entre 1896 et 1999 plusieurs changements sont intervenus au niveau des classes d’occupation
du sol de Ziguinchor à Ouonck.
Au niveau de la végétation continentale, les changements sont assez faibles.
Les tannes ont enregistré de larges extensions entre ces deux dates et ont une dynamique
progressive.
83
La dynamique de la mangrove est aussi progressive, car si elle n’occupait que 0,1 % de la
superficie totale en 1986, en 1999 elle occupe 0,7 % soit une progression de 0,7%. Mais sa
superficie est encore faible et les facteurs climatiques expliquent en grande partie cet état de
fait.
Les changements importants sont survenus au niveau des sols qui ont été soit transformés en
tannes en 1999, soir colonisés par la végétation continentale ou utilisé pour la riziculture et les
cultures pluviales.
Si les eaux permanentes ont augmenté de volume en 1999, cela est imputable à l’amélioration
des conditions climatiques notamment avec l’augmentation de la pluviométrie qui était très
déficitaire durant les années 1970.
35000
30000
Superficies en hectare
25000
20000
15000
Superficies en ha (1986)
10000 Superficies en ha (1999)
5000
En raison de l’absence des données cartographiques, nous complétons notre analyse avec les
résultats des enquêtes ménages, les observations de terrains, les statistiques fournies dans les
différentes études portant sur les mangroves de la Basse Casamance.
Nous analysons plus spécifiquement les changements intervenus au niveau des vasières à
mangrove et des tannes.
84
2.1 Dynamique de la séquence vasière à mangrove – tanne.
La sécheresse des années 1970 a eu des impacts négatifs sur la distribution spatiale des
mangroves et la littérature est assez riche en informations concernant la composition
floristique des vasières à mangroves.
Vieillefon (1969) estimait qu’un seul type de séquence caractérise les mangroves de
Casamance qu’il décrivait ainsi :
- une bande étroite de Rhizophora racemosa (2 à 5 m) faisant souvent défaut sur les
rives concaves et plus épaisse sur les rives convexes ;
- une bande très large de Rhizophora mangle (30 à 50 m), plus petits que Rhizophora r;
- une bande généralement étroite (5 à 10 m) d'Avicennia africana sur un tapis herbacé
de Sesuvium portulacastrum faisant limite avec le tanne vif, le tanne herbacé à
Héléocharis.
Cette séquence est modifiée car comme le précise Marius (1984) et (1985), la végétation est
aujourd’hui marquée par une diminution de la bande de Rhizophora et de celle de l'association
Rhizophora – Avicennia puisque 70 à 80 % des Rhizophora ont disparu depuis 1969, ce qui
entraîne une modification dans la distribution de la végétation.
Avec Lucas (1985), ils réaffirment que « les palétuviers n’ont pas résisté à cette hypersalure,
et on ne les observe plus que sous forme d’une frange étroite en bordure des marigots; suit
une bande assez large avec des troncs de palétuviers morts, c’est la « mangrove décadente »
(...) ».
Le Brusq (1985) confirme et affirme que « sur le marigot de Koubalan, le Rhizophora ne
forme plus qu'un mince rideau en arrière duquel on trouve des Avicennias de grande taille et
en amont du marigot, le Rhizophora est remplacé par l'Avicennia. La mangrove à Avicennia
fait place à un tapis herbacé composé de Sesuvium portulacastrum (…) ».
Aujourd’hui toutes ces séquences décrites ont pratiquement disparu et font place, en fonction
des villages à :
- une séquence où domine une étroite bande de Rhizophora racemosa et d’Avicennia
africana avec à leurs arrières de larges étendues de tannes vifs. Cas des villages de
Tobor, et de Coubalan;
- une séquence où domine un large bande de repousses de Rhizophora racemosa avec à
leurs arrières de larges étendues de tannes vifs. Cas du village de Dioubour;
85
- une séquence où domine une bande généralement assez large d'Avicennia africana sur
un tapis herbacé de Sesuvium portulacastrum faisant limite avec de vastes surfaces de
tannes vifs. Cas du village de Ouonck.
Plusieurs statistiques ont été fournies par diverses sources sur l’étendue passée et actuelle des
mangroves.
La FAO (2005) a fait une évaluation des ressources forestières mondiales et plus précisément
des mangroves du Sénégal. Synthétiquement, à l’échelle nationale, entre 1980 et 2005, la
mangrove a perdu 14 % de sa superficie, en passant de 169 000 à 115 000 ha.
Après une interprétation de la carte d’occupation du sol à Ziguinchor entre 1986 et 2010,
IMAO (2009) décrit « en 1985, les deux classes de mangrove représentaient 34,45 % dont
21,5 % de mangrove non dégradée. Ce fut le temps des magnifiques Rizophora et Avicennia,
période à laquelle les populations locales profitaient pleinement des services écosystémiques
86
de la mangrove. (…) Lorsque l’on compare les classes d’occupation du sol de 1985 à celles de
2010, il est aisé de noter des changements qui ne sont pas positifs ».
Lorsque nous avons demandé aux populations d’estimer sur une fourchette de 5 à plus de 30
hectares la superficie de mangrove perdue, nous avons obtenu les statistiques suivantes :
200
180
160
Nombre d'estimations
140
120
100 Superficies de
mangrove perdues
80
60
40
20
0
5ha 10ha 30ha plus
Sur 256 personnes interrogées, cent soixante quatorze (174) estiment à plus de 30 hectares la
superficie de mangrove perdue dans leur village. Ces réponses concordent avec les
observations des scientifiques qui ont étudié ces milieux et avec les rares données statistiques
que nous avons obtenu.
Il existe donc une hétérogénéité des sources de données sur l’étendue de la mangrove de la
Basse Casamance. Ainsi, il est difficile d’estimer la superficie réelle occupée par les vasières
à mangroves. Mais en faisant à appel à la plus ancienne forme d’acquisition d’informations en
géographie, à l’empirisme, il suffit juste d’observer le milieu pour se rendre compte qu’il est
fortement dégradé. D’ailleurs, toutes les tendances montrent une baisse progressive de la
superficie des mangroves donc une dynamique plutôt régressive telle que démontrée d’ailleurs
par les cartes d’occupation du sol de Ziguinchor à Ouonck.
Quand les vasières à mangroves reculent, elles laissent place à des espaces vides qui sous
l’influence de facteurs hydro pédologiques vont se transformer petit à petit en tannes.
La transformation des tannes suit une chronologie qui intègre un second ordre de dynamique :
celle de la « tannification ».
87
3.1 Dynamique de la « tannification » et impacts sur la morphologie des
vasières à mangrove.
La « tannification » est le processus par lequel les sols potentiellement sulfatés acides se
transforment en sols sulfatés acides caractérisés par une hyperacidité et par une hypersalinité.
C’est aussi le processus de transformation des tannes herbus en tannes vifs suite à une
transformation sédimentologique des sols.
La « tannification » se produit lorsque les sols potentiellement sulfatés acides passent de
l’alternance d’une submersion biquotidienne à une submersion annuelle. À la faveur des
températures élevées en saison sèche, une partie de la végétation disparaît. La mise à nu de
des sols les expose à une forte évaporation qui fait baisser le niveau piézométrique de la
nappe en même que se produit une remontée des sels par capillarité. De plus, l’oxydation de
la halite et de la pyrite produit la jarosite qui á son tour abaisse considérablement le pH des
sols.
L’hyperacidité et l’hypersalinité sont ainsi les principales caractéristiques des tannes.
Les tannes sont d’après Vieillefon (1975), « des étendues sans végétations situées à l’arrière
des mangroves, qui ne sont plus atteintes par la submersion quotidienne, sauf aux très grandes
marées, mais subissent une alternance annuelle d’inondation et d’assèchement, que favorise le
climat tropical alterné… ».
Ces vastes espaces nus ou couverts d’une végétation halophyte qui se développent à l’arrière
des mangroves sont des témoins des « modifications sédimentologiques, hydrologiques et
pédologiques » survenues au niveau des écosystèmes à mangrove (Lebigre, 1983).
Les tannes se rattachent au grand ensemble des milieux sur salés comme les sebkhas mais s'en
individualisent par ce lien obligatoire avec les marais maritimes et avec la mangrove et se
développent toujours aux dépens de cette dernière dans la partie supérieure de l'estran,
soumise aux hautes mers de vive eau et aux marées exceptionnelles (Lebigre, 1983).
Formes de transition entre la mangrove et la terre ferme, les tannes font partie de la zonation
de l’estran dans les vasières même s’ils possèdent leur propre zonation.
Ils peuvent avoir deux aspects : un tanne nu et un tanne herbu.
Même si les auteurs s’accordent sur sa définition, il n’existe pas selon (Lebigre, 1983) une
terminologie exacte pour le mot tanne. Aussi souligne-t-il plusieurs termes utilisés dans
différentes langues pour le nommer.
88
Tableau 9 : Terminologies relatives aux tannes d’après J.M. Lebigre, 1983.
Outre cette diversité de terminologies, les tannes apparaissent comme des espaces superflus
dont les caractéristiques posent problème.
Mais en résumé le tanne est d’une manière générale une forme « plate (plus ou moins
déprimée), et se définit en fonction d'un gradient de salinité, commandé plus ou moins
directement par la marée : donc la dynamique tidale. Lorsque la marée n'est pas à priori le
moteur, c'est le climat par les processus évaporatoires qui affectent les nappes d'eau en
asséchant la surface du sol et souvent la présence de croûtes de sel, qui interdisent la présence
de toute végétation » (Thiam, 1986).
Le développement et l’évolution des tannes sont donc principalement commandés par les
facteurs hydrologiques et climatiques.
Avec un changement des conditions climatiques et une légère augmentation de la
pluviométrie, les sols de certains tannes se dessalent ce qui permet l’installation d’une
végétation halophyte genre Sessuvium et Philoxérus.
Mais ce schéma a été rarement observé en Basse Casamance et la dynamique de la
tannification s’est surtout traduite par un étalement des tannes nus au détriment des tannes
herbus.
Tout comme les mangroves, il n’existe pas de statistiques officielles sur l’étendue des tannes
et la littérature à ce niveau est pauvre en informations.
Sadio (1991) estime à 400 000 ha la superficie des tannes du Sénégal. Concernant la
dynamique de la « tannification », il estime qu’ « environ 70 à 80 % de la superficie occupée
89
par la mangrove s'est transformée en tannes sursalés entre 1969 et 1980 (…) » et dans la
vallée de Koubalan, « la superficie de la mangrove n'était plus que de 16 % en 1985, contre 34
% en 1969 ».
Grâce à l’imagerie satellitaire et à la télédétection spatiale, Moreau (1991) a pu faire une
étude cartographique de la mangrove de Tobor. En résumé elle décrit : « ... Nous voyons en
1987 que les Avicennia en voie de tannification en 1969 sont transformés en tanne vif en
1987, le tanne vif de 1969 s'est donc agrandi, les Avicennia décadents de 1969 sont
transformés en tanne vif inondé en 1987 et les Rhizophora en tanne inondé. Tous les
palétuviers vivants en 1969 n'existent plus en 1987 ». Ainsi 6,6 Km2 d’Avicennia ont disparu
en 20 ans à Tobor.
Les chefs de ménage interrogés affirment avoir plus de 30 hectares de tannes dans leur village
(cf.graphique suivant).
200
180
160
Nombre d'estimations
140
120
100 Superficies
occupée par
80 les tannes
60
40
20
0
5ha 20ha 30ha plus
La « tannification » a des impacts sur la morphologie des vasières notamment sur la texture
des sols. Ainsi, nous avons dénoté une grande variété de tannes entre Ziguinchor et Ouonck.
Du fait des conditions hydro – pédologiques et climatiques, les tannes herbus disparaissent et
laissent place à une large gamme de tannes nus comme le montrent les images suivantes :
90
Photo 10 : Textures des tannes entre Ziguinchor et Ouonck.
91
Conclusion partielle.
Les vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck ont une dynamique régressive se traduisant
par un recul des aires de mangrove au détriment des tannes. Ce recul des mangroves est causé
par une liste non exhaustive de facteurs dont les plus déterminants sont les facteurs
climatiques auxquels sont associés les facteurs anthropiques. En effet, il a été démontré que
les fluctuations climatiques (pluviométrie, vents, températures, insolation, hygrométrie, etc.)
ont joué un rôle important dans la dynamique régressive des formations de mangrove. Les
populations locales, à travers diverses pressions exercées sur le milieu ont participé également
à sa dégradation.
Cette dégradation est visible sur le paysage par les décombres de palétuviers ou par les tannes.
Elle est aussi lisible à travers l’analyse de cartes diachroniques qui démontrent des
changements importants intervenus dans l’occupation du sol de Ziguinchor à Ouonck entre
1986 et 1999. Elle est aussi ressentie, nous l’aborderons dans le chapitre suivant, par les
populations puisqu’elles ont abandonné une bonne partie de leurs activités économiques suite
à la disparition de la mangrove.
La littérature est riche en ouvrages traitant des conséquences de la sécheresse des années 1970
sur la distribution spatiale des mangroves, mais est assez pauvres en statistiques et en
informations sur la dynamique de la « tannification », phénomène pourtant très visible et
persistant sur les milieux étudiés.
La dynamique régressive des vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck a des
conséquences importantes tant sur le plan écologique que sur le plan anthropique.
92
Chapitre 3 : Impacts de la dynamique des vasières à mangrove.
Introduction.
La dynamique régressive des vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck a des impacts peu
positifs sur le plan écologique et sur le plan socio-économique. Malgré cette forte dégradation
du milieu, les populations ont su tirer profit de ces nouveaux espaces gagnés après la
régression de la mangrove même si les tannes sont encore inexploitables.
Sur le plan écologique, la dynamique régressive de la mangrove se lit à travers la mort des
essences de palétuviers, la diminution de la densité floristique, l’apparition et l’extension des
tannes, la baisse du peuplement aquatique, la disparition de l’avifaune et de l’ichtyofaune.
Les impacts sur la végétation sont les témoins les plus vivants de la dynamique régressive des
vasières à mangrove. Ces impacts sont : la baisse de la densité des peuplements végétaux de la
mangrove, le recul de la diversité floristique, la mortalité des essences, la baisse de la
productivité des mangroves. La mortalité des essences causée essentiellement par
l’hypersalinité est impressionnante et se traduit par les décombres de palétuviers qui ornent le
paysage tel un cimetière marin.
93
Le recul de la diversité floristique est la responsable de la forte mortalité des Rhizophora qui
sont remplacés par l’association Avicennia – Sessuvium, espèces très résistantes au sel.
Dans les zones très affectées par l’hypersalinité et par l’hyperacidité, la végétation est
remplacée par les tannes nus.
La mangrove renferme une faune, une avifaune et une ichtyofaune très riches en espèces.
Dans plusieurs villages visités, les populations témoignent de la disparition de plusieurs
espèces animales dont les Crochodylus (crocodiles) et les Hippopotamus amphibius
(Hippopotames amphibies) mais aussi de la raréfaction des poissons, de la baisse des captures
et de la disparition de certaines activités économiques comme la conchyliculture, la
crevetticulture et l’ostréiculture.
94
La disparition des espèces peut provoquer un réel déséquilibre de l’écosystème car « les
animaux sauvages sont les éléments stabilisateurs du milieu concourant à travers la
dissémination des graines et l’augmentation de leur pouvoir germinatif. Ils assurent aussi un
contrôle de certaines espèces végétales envahissantes par une valorisation optimale de la
production primaire » (IMAO, 2009).
La destruction des sols se répercute au niveau de l’agriculture par une baisse des rendements
des cultures et par une augmentation des coûts de production. Cela favorise l’appauvrissement
des populations et la surexploitation des ressources forestières qui deviennent à leur tour
menacée de diminution voire de disparition.
95
2.1 Sur le plan socio-économique.
Sur le plan social et économique, la régression de la mangrove se traduit par la diminution des
rendements des terres arables, l’appauvrissement des populations et la disparition des autres
activités économiques.
96
Photo 15 A et B : Déboisement de la rôneraie et ravinement des sols à Coubanao.
97
À Fintiock, les populations affirment avoir été contraintes de délaisser la majeure partie de
leurs activités comme la pêche et la cueillette des huîtres et demandent l’appui des autorités
étatiques ou des ONG afin de sauver leurs rizières qui subissent l’ensablement et la
pénétration des eaux de ruissellement et afin de reboiser la mangrove qui est très dégradée.
Un chef de ménage interrogé affirme : « J’ai peur pour l’avenir de mes enfants. J’ai perdu une
bonne partie de mes terres à cause du sel. Depuis ma naissance, je n’ai jamais acheté du riz.
Imaginez une personne qui n’a jamais acheté du riz, imaginez lorsque cette personne soit
contrainte de le faire ? Je ne connais même pas le prix du riz ! ». La situation est ainsi
alarmante.
En outre, l’exploitation des ressources forestières n’apporte pas assez de devises aux
villageois qui doivent par ailleurs chercher d’autres moyens de subsistance. C’est ainsi que se
développent de plus en plus le maraîchage et la menuiserie qui, malheureusement, utilise les
ressources forestières.
La dimension sociale de la dynamique des vasières à mangrove doit être analysée sous deux
angles : quelles sont les activités anthropiques qui contribuent à la dégradation des mangroves
et quelles sont les conséquences de la dégradation des mangroves sur les activités
anthropiques ?
Il est admis que la diminution de la superficie occupée par les vasières à mangrove est due à
une combinaison de facteurs à la fois naturels et anthropiques. Il a été mis en évidence le rôle
prépondérant des facteurs climatiques sur la destruction des aires de mangrove.
Cependant, les sociétés humaines qui peuplent les aires de mangrove exercent des pressions
sur le milieu qui, à la longue, induisent des changements irréversibles. Ces sociétés, à travers
leurs activités économiques, ont largement participé à la dégénérescence de cet écosystème.
D’un autre angle, la destruction même de ces aires de mangroves a eu des impacts importants
sur les activités économiques des populations riveraines des zones de mangroves. L’activité la
plus touchée est la riziculture.
Malgré ces contraintes, les populations ont su tirer profit de la dégradation de ces aires. En
effet, la précipitation des sels au niveau des tannes crée une activité génératrice de revenus : la
culture du sel appelée « saliculture » (IDEE Casamance, 2010) et plusieurs bassins piscicoles
sont aménagés dans les aires jadis occupées par les palétuviers.
98
En somme deux interprétations peuvent être faite, de la dimension sociale des vasières à
mangrove. La première concerne le rôle joué par les sociétés humaines dans la dégradation
des aires de mangrove et la seconde concerne les conséquences de la dégradation de ces aires
sur les activités des sociétés humaines.
Dans les deux cas, le rôle joué par les populations est important et aujourd’hui une prise de
conscience est faite sur l’urgence et la nécessité de limiter les dégâts.
De manière schématique, les conséquences de la dynamique des vasières à mangrove de
Ziguinchor à Ouonck se résument dans le schéma suivant :
Destruction de la palmeraie
99
Conclusion de la partie.
100
Troisième partie :
Les stratégies de lutte contre
la dégradation de la
mangrove.
Introduction.
102
Chapitre 1 : Les stratégies traditionnelles.
Introduction.
Ce sont des actions de replantation des mangroves. Elles consistent à récupérer les propagules
de mangroves et à les semer dans les zones nues. Ces reboisements occupent désormais une
place importante dans le calendrier des villageois qui sont souvent aidés par les organismes
non étatiques.
« Aménager une forêt, c’est décider de ce que l’on veut en faire, compte tenu de ce que l’on
peut y faire et en déduire ce que l’on doit y faire » (ADG, 2011). Les reboisements de la
mangrove s’inscrivent dans le cadre général de l’aménagement des forêts obéissent à
plusieurs impératifs :
1- Tout d’abord il faut savoir pourquoi la mangrove a été dégradée et pourquoi la
régénération naturelle au niveau de la zone n’a plus été possible ;
2- Il faut connaître les caractères édaphiques et climatologiques du milieu ;
3- La zone à reboiser doit être impérativement immergée à chaque marée haute, y compris
lors des petites marées en saison sèche. Pour s’en assurer, il faut délimiter la zone de
reboisement en fin de saison sèche, quand le coefficient de marée est au plus bas.
L’action même du reboisement se déroule en plusieurs phases.
La première consiste à récolter les propagules de Rhizophora dans des sites où la mangrove
est encore saine.
La deuxième phase consiste à faire le tri des propagules afin d’éliminer les mauvaises
La phase suivante est celle du repiquage des propagules (cf.photo 17).
Océanium (2010) recommande de planter 5 000 plants à l’hectare soit 1 palétuvier tous les
1 m sur 2 m.
103
Après cette opération, il est impératif d’asseoir des plans de suivi afin de contrôler la
croissance des palétuviers.
Au total, 849 000 propagules de palétuviers ont été plantées à Babatte, à Fintiock, à Coubalan,
à Coubanao, à Hatioune, à Tobor et à Niandane avec l’appui de l’Océanium (cf.infra 112,
tableau 7).
A B
104
2.1 Les ouvrages et techniques pour protéger les rizières.
Pour protéger les rizières plusieurs techniques sont employées par les paysans diolas. Ainsi,
afin de dessaler les rizières, les paysans épandent dans les rizières de feuilles de manguiers
(Mangifera indica) et des gousses de néré (Parkia biglobosa).
Il existe deux sortes de digues : les digues anti-sel et les digues de retenue.
La construction de digues anti-sel est une réponse aux énormes problèmes écologiques
auxquels sont confrontées les populations de la Basse Casamance. Ainsi, en 1984, en
collaboration avec les villageois, le PIDAC a supervisé un programme de construction de
digues anti-sel. La construction de ces digues répond à plusieurs objectifs :
- dessaler les terres et protéger les rizières ;
- désenclaver les villages en saison sèche ;
- freiner l’intrusion des eaux marines ;
- protéger les sols contre l’acidification en saison sèche.
Dans la plupart des cas, ces digues se sont révélées inefficaces et n’ont pu freiner la salinité
croissante ainsi que l’intrusion des eaux marines. Elles ne servent plus qu’à assurer la liaison
entre les villages.
Pour retenir les eaux pluviales, faire de la riziculture irriguée et pour lutter contre le sel, la
construction des digues de retenue a été effectuée dans certaines zones. Il existe une digue de
retenue et plusieurs diguettes et digues anti – sel selon les villages.
105
2.1.2 Les billons.
Le billon est un exhaussement de terre fait en le labourant. Le billonnage est une technique
qui favorise : « l’amélioration du dessalement du sol, la protection des plants contre l’acidité
et la salinité remontante du sol, la lutte efficace contre les mauvaises herbes enfouies au
moment de la confection des billons et la protection des plants de l’inondation au moment des
repiquages » (GRDR, 2008).
Les billons sont placés dans les rizières et au liseré des rizières et des tannes.
Les stratégies traditionnelles développées pour freiner la salinité, récupérer sinon protéger les
terres arables et faire régénérer la mangrove sont multiples. Cependant, ces actions sont
essentiellement tournées vers la protection de la survie de la riziculture parfois au détriment
des mangroves comme en atteste la conception de grands barrages anti-sel à Guidel et a
Affiniam qui s’est accompagnée de défrichements intensifs de la mangrove.
Ces stratégies traditionnelles se cumulent aux stratégies modernes ce qui permet de voir à
quel point la sauvegarde de la mangrove est un fait d’actualité.
106
Chapitre 2 : Les stratégies modernes.
Introduction.
Ces stratégies regroupent l’ensemble des accords signés, des techniques élaborées, des
programmes et des projets mis en œuvre afin de protéger ou de restaurer la mangrove.
Ce sont des stratégies développées généralement par les structures étatiques ou par les
organismes internationaux et aussi par certains organismes non gouvernementaux.
Face à la dégradation et à la disparition de certaines zones humides, plusieurs pays ont adopté
la charte de la convention de Ramsar en 1975. Ce traité intergouvernemental a comme
mission de conserver les zones humides. En signant le traité, le gouvernement du Sénégal
s’est engagé à assurer la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides qu’il a
inscrites sur la liste des zones humides d’importance internationale. La mangrove de la
Casamance fait partie intégrante de la liste des zones humides du Sénégal.
À l’instar de plusieurs autres pays, le Sénégal possède des lois et règlements limitant les
usages des produits forestiers. Cependant le cas de la mangrove est problématique d’autant
plus qu’il y un flou qui demeure dans son statut. Fait-elle partie du domaine marin ou du
domaine terrestre ? Pour lever cette équivoque, des conventions ont été signées entre les états
afin de prendre en charge la question.
C’est ainsi que le Sénégal a ratifié la Charte régionale pour la conservation des mangroves.
Cette charte est cosignée avec La Mauritanie, la Gambie, la Guinée-Bissau, la République de
Guinée et la Sierra Leone en 2010 pour la conservation et l’utilisation durable des mangroves.
107
2.1 Les initiatives et projets.
2.1.1 Le PGIEM.
108
3.1 Les actions des ONG.
3.1.2 Océanium.
Océanium est une association de protection de l’environnement basée à Dakar et dirigée par
Haïdar El Ali. Océanium a initié une vaste campagne de reboisement des mangroves en
Casamance depuis Septembre 2006 avec l’opération « plante ton arbre ! ». La première
opération a été menée à Tobor avec 65 000 propagules de Rhizophora qui ont été plantées.
Océanium a obtenu des résultats très satisfaisants durant ses campagnes de reboisement car
plus de cinq (5) millions de palétuviers ont été plantés entre 2010 et 2012 et les résultats
commencent à être visibles sur le paysage. Au niveau de la zone des Kalounayes, plusieurs
villages ont pu bénéficier de ces reboisements.
Ce tableau ci-dessous permet d’estimer la quantité de propagules repiquées.
109
3.1.3 Le GRDR.
Conclusion partielle.
Les stratégies développées pour la restauration de la mangrove sont multi acteurs et variées.
Des projets aux campagnes de reboisement, tout est mis en œuvre afin de revitaliser sinon de
protéger cet écosystème très sensible.
Si quelques-unes de ces actions se sont parfois soldées par des défaites comme la construction
des digues anti-sel, aujourd’hui, avec l’implication des organismes et structures, une nette
amélioration s’observe sur les paysages.
Les résultats des actions combinées de ces différents acteurs sont étudiés dans le chapitre
suivant et se reflètent d’ores et déjà sur le paysage à travers la régénération de la mangrove là
où cela est possible.
Cependant il est aisé de constater que certaines campagnes de reboisement se sont soldées par
des défaites.
110
Chapitre 3 : Impacts des stratégies sur la dynamique des vasières
à mangrove.
Introduction.
Afin de restaurer la mangrove, de protéger les rizières ou de lutter contre leur salinisation,
différentes opérations ont été menées. Étudier leurs impacts, c’est tenter de voir quelles sont
leurs répercussions tant sur l’environnement que sur les activités économiques des
populations. Plusieurs indicateurs permettent de ce fait de juger de la pertinence des méthodes
adoptées.
Les actions les plus significatives menées afin de freiner la dégradation de la mangrove sont
les campagnes de reboisement. Plusieurs villages ont bénéficié de l’appui de l’Océanium afin
de reboiser la mangrove : Dioubour, Fintiock, Hatioune, Coubanao, Coubalan, Niandane,
Babatte. Tobor est le premier village où s’est déroulé la phase-test de la campagne « plante
ton arbre ! ». Afin de jauger le résultat de cette campagne sur l’environnement nous nous
referons aux clichés suivants pris entre Septembre 2006 et Septembre 2014.
111
Photo 22 : État de la mangrove reboisée à Tobor en Septembre 2014.
De manière générale, les campagnes de reboisement ont permis de restaurer une bonne partie
des terres jadis occupées par la mangrove et dégradées par la combinaison de facteurs naturels
et anthropiques. Cependant si des données existent sur le nombre de propagules repiquées, il
n’existe pas de statistiques sur le nombre d’hectares reboisés.
112
Étant donné que dans les villages de l’aire d’étude, c’est Océanium le principal initiateur des
campagnes de reboisement, en tenant compte de sa recommandation c’est-à-dire de planter 5
000 plants a l’hectare, nous pouvons approximativement estimer le nombre d’hectares
replantés en nous basant sur les données du tableau 11. Nous adoptons la formule suivante : 1
Ha = 5 000 propagules. En divisant le nombre de propagules repiquées par 5 000, pour la
campagne 2008, nous obtenons les statistiques matérialisées dans le graphique suivant :
45
40 41,6
35
Superficies reboisées en ha
30
25
26
20 23,4
19,6
15 17
15,2 Superficies
10
10 10
reboisées
5 7
0
Villages
En somme les campagnes de reboisement ont permis de restaurer la mangrove dans les
endroits où ces tentatives ont abouti. Dans d’autres endroits les efforts ont été vains.
Si les projets de reboisement ont connu dans certains villages comme Tobor, Ouonck et
Coubalan de francs succès, ailleurs comme à Dioubour et à Hatioune, ces tentatives se sont
soldées par des échecs. En effet, après les campagnes de reboisement, aucun suivi n’a été fait
et les propagules repiquées n’ont pas germé. Les populations interrogées imputent cet échec à
la forte salinité qui ne permet pas la régénération de la mangrove.
Aussi ces populations ne disposent pas d’outils nécessaires pour protéger les surfaces
reboisées ni les connaissances de base sur les palétuviers. En outre, les conditions climatiques
et hydrologiques du milieu rendent difficile la survie des reboisements.
Par conséquent, la dynamique la plus vive dans ces milieux est celle de la « tannification ».
113
Le cliché suivant illustre amplement cet échec des reboisements.
Conscientes du fait que les Rhizophoras ont du mal à s’adapter à leur milieu, les populations
du village de Hatioune et même de Ouonck déclarent avoir sollicité l’Océanium afin d’avoir
les connaissances nécessaires pour la mise en place de pépinières d’Avicennia, espèce halo
résistante. Océanium a en effet implanté des pépinières d’Avicennia au niveau du village de
Tobor.
Ainsi, les reboisements futurs devraient être faits avec cette espèce même si l’obtention de ses
graines n’est pas aussi facile que le ramassage ou la récolte des propagules de Rhizophora.
Les impacts positifs et négatifs des stratégies de lutte contre la dégradation des mangroves se
traduisent aussi sur le plan socio-économique.
114
2.1 Sur le plan socio-économique.
Sur le plan social et économique, les différentes stratégies adoptées afin de protéger les terres
arables, de lutter contre la salinisation des sols et la dégradation de la mangrove ont eu des
impacts différents en fonction du village considéré.
Comme étudiée dans les parties précédentes, la « tannification » a une dynamique assez vive,
car là où les actions de reboisement ont échoué, le processus de « tannification » s’est
accéléré. Là où les stratégies n’ont pas permis de récupérer les terres perdues, le milieu s’est
amplement dégradé. C’est ainsi qu’à Djiguinoum, la majeure partie des terres de riziculture a
été perdue suite à l’intrusion jusque dans la palmeraie des eaux pluviales associées à celles du
bolong.
Cette destruction des rizières et de la palmeraie n’est pas sans conséquences tant sur le plan
social qu’écologique avec notamment le ravinement des sols, l’érosion hydrique, la pénurie
alimentaire qui aboutissent à l’appauvrissement de la population.
115
Photo 26 : Intrusion des eaux dans la palmeraie de Djiguinoum.
Conclusion de la partie.
116
Conclusion générale.
La Basse Casamance où se situe notre aire d’étude se caractérise par un relief
relativement plat, un réseau hydrographique dense formé par les multiples bolongs du fleuve
Casamance. De type sud soudanien côtier, son climat est caractérisé par des fortes fluctuations
pluviométriques, hygrométriques durant ces dernières décennies. Les sols sont très riches la
végétation, assez luxuriante, est formée par la forêt classée des Kalounayes mais aussi par des
formations de mangroves dégradées par endroits.
Ces mangroves sont des écosystèmes riches et très productifs qui sont largement
exploités par les populations. Ces dernières y pratiquent divers types d’activités et y tirent une
bonne partie de leurs ressources de subsistance et leurs ressources économiques.
Les conséquences les plus visibles en surface ont été l’extension des tannes sur les
mangroves. L’étalement des tannes a annihilé toute possibilité de culture sur les sols des
mangroves. Ainsi la riziculture traditionnelle de bas-fonds s’est confinée aux sols de plateaux.
Mais la dynamique des vasières à mangrove ne possède pas seulement une dimension
physique, elle possède aussi une dimension sociale. Cette dimension sociale se traduit par
l’impact des activités humaines d’exploitation des mangroves que sont la pêche, la coupe de
bois, l’ostréiculture, la conchyliculture entre autres. Ces activités ont induit parfois des
changements irréversibles des milieux, accentués par les mauvaises conditions climatiques.
Toutefois une seconde analyse peut être faite de cette dimension sociale et intègre dans ce cas,
les conséquences même de la dégradation des mangroves sur les activités humaines.
117
En somme, la mangrove entre Ziguinchor et Ouonck est en état de régression.
Mais, il faut cependant relativiser car tous les secteurs ne sont pas affectés par la même
dynamique. En effet, cette dynamique diffère en fonction du village considéré. Si à Tobor sur
la rive droite, à Ouonck et à Coubalan elle régénère suite aux actions de reboisement, à
Hatioune elle est régressive.
La mangrove est un cadre de vie unique, qu’il importe dans l’intérêt de ses populations
de protéger et de gérer respectueusement (ADG, 2011).
Ainsi la problématique de la sauvegarde et de la restauration est devenue un sérieux problème
écologique qui a fini par intéresser un bon nombre de couches de la société.
Les premiers intéressés ont été notamment les chercheurs qui ont joué un rôle pionnier dans la
connaissance des facteurs et des conséquences de la dégradation des aires de mangrove dans
toute la Basse Casamance. Leurs études ont par la suite intéressé bon nombre d’ONG et de
structures étatiques qui ont conscientisé les populations locales sur l’urgence et la nécessité de
restaurer ou de sauvegarder leur écosystème.
Dans cette logique des actions sont entreprises pour redynamiser, sauvegarder ou restaurer
l’écosystème mangrove.
Ces actions ont d’abord été entreprises par les populations locales qui ayant constaté que
leur milieu se dégrade de façon alarmante, ont pris les devants pour limiter sinon arrêter les
dégâts. C’est dans de contexte que plusieurs initiatives de construction de digues anti-sel, de
reboisement de la mangrove et de protection des terres de cultures sont nées. Par la suite ou de
façon simultanée, les structures étatiques, les organismes internationaux et les organismes non
gouvernementaux sont venus aux chevets des populations afin de mettre leur expertise ou
leurs fonds dans cette dynamique.
À partir de ce moment, toutes les dynamiques ont changé pour ne laisser place qu’aux seules
actions de protection de l’environnement, des écosystèmes et des ressources naturelles.
118
Bibliographie.
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.................................................................................................................................................. 36
Tableau 8 : Données brutes sur la superficie des mangroves en Basse Casamance. ............... 86
Tableau 9 : Terminologies relatives aux tannes d’après J.M. Lebigre, 1983. .......................... 89
Tableau 10 : Quantité de propagules repiquées dans quelques villages des Kalounayes. ..... 109
Figure 4 : Système d’usage multiples des ressources dans un terroir à mangroves de Basse
Casamance d’après PADERCA (2008).................................................................................... 62
127
Liste des photos.
128
Annexe.
Annexe 1 : Guide d’entretien semi – directif.
129
Annexe 2 : Questionnaire d’enquête ménages.
130
131
Table de matières.
Sommaire. .................................................................................................................................. 2
Sigles et acronymes. ................................................................................................................... 3
Avant – propos. .......................................................................................................................... 5
Introduction générale. ................................................................................................................. 6
Synthèse bibliographique. .......................................................................................................... 8
Problématique........................................................................................................................... 13
Méthodologie. .......................................................................................................................... 20
Première partie : Présentation du milieu. ............................................................................ 25
Chapitre 1 : Le milieu physique. .......................................................................................... 28
1.1 Le contexte géologique. ........................................................................................... 28
1.1.1 Les formations du Secondaire et Tertiaire. ...................................................... 29
1.1.2 Les formations du Quartenaire. ........................................................................ 30
1.2 Les grands traits du relief. ........................................................................................ 32
1.2.1 Les cordons littoraux. ....................................................................................... 32
1.2.2 Les bas – fonds. ................................................................................................ 32
1.2.3 Les terres de transition. .................................................................................... 33
1.2.4 Les plateaux...................................................................................................... 33
1.3 Le climat. .................................................................................................................. 35
1.3.1 Facteurs généraux du climat. ............................................................................ 35
1.3.2 Les éléments du climat. .................................................................................... 36
1.4. Les ressources hydriques. ..................................................................................... 43
1.4.1 Le réseau hydrographique. ............................................................................... 43
1.4.2 Les eaux salées. ................................................................................................ 45
1.4.3 Hydrogéologie. ................................................................................................. 45
1.5. Les sols. ................................................................................................................ 45
1.6. La végétation. ....................................................................................................... 48
Chapitre 2 : Le cadre humain et les aspects socio-économiques. ........................................ 52
2.6. Aspects humains ................................................................................................... 53
2.1.1 Le peuplement .................................................................................................. 53
2.1.2 Données démographiques. ............................................................................... 54
2.1.3 Structure de la population. ............................................................................... 54
132
2.1.4 Répartition de la population. ............................................................................ 55
2.2 Aspects économiques. .............................................................................................. 56
2.2.1 L’agriculture. .................................................................................................... 56
2.2.1 Élevage. ............................................................................................................ 57
2.2.3 La pêche. .......................................................................................................... 57
2.2.4 L’industrie et l’artisanat. .................................................................................. 57
2.2.5 Le commerce et le tourisme. ............................................................................ 58
Chapitre 3 : Écologie et usages de la mangrove de la Casamance. ...................................... 59
3.1 Écologie de la mangrove Casamançaise. ................................................................. 59
3.2 L’utilité de la mangrove. .......................................................................................... 59
3.2.1 Les fonctions écologiques. ............................................................................... 59
3.2.2 Les fonctions socio-économiques. ................................................................... 60
3.3 Les divers types d’utilisation de la mangrove en Casamance. ................................. 60
Deuxième partie : Dynamique des vasières à mangrove de Ziguinchor à Ouonck. ......... 63
Chapitre 1 : Les facteurs de la dynamique des vasières à mangrove de Ziguinchor à
Ouonck. ................................................................................................................................ 65
1.1 Les facteurs physiques. ............................................................................................ 65
1.1.1 Les facteurs climatiques. .................................................................................. 65
1.1.2 Les facteurs thermiques. ................................................................................... 70
1.1.3 Les facteurs pédologiques. ............................................................................... 70
1.1.4 Les facteurs biogéographiques. ........................................................................ 72
2.1 Les facteurs anthropiques. ........................................................................................ 72
2.1.1 L’exploitation du bois des palétuviers. ............................................................ 72
2.1.2 La pêche. .......................................................................................................... 73
2.1.3 L’ostréiculture. ................................................................................................. 73
2.1.4 La pisciculture. ................................................................................................. 74
2.1.5 La conchyliculture. ........................................................................................... 75
2.1.6 Les ouvrages inadaptés. .................................................................................... 76
Chapitre 2 : Dynamique des vasières à mangrove. .............................................................. 78
1.1 Étude de la dynamique des vasières à mangrove par analyse de cartes
diachroniques. .................................................................................................................. 78
1.1.1 Présentation de la carte d’occupation du sol en 1986. ..................................... 80
1.1.2 Présentation de la carte d’occupation du sol en 1999. ..................................... 82
133
1.1.3 Analyse de l’évolution de l’occupation du sol entre 1986 et 1999. ................. 83
2.1 Dynamique de la séquence vasière à mangrove – tanne. ......................................... 85
3.1 Dynamique de la « tannification » et impacts sur la morphologie des vasières à
mangrove. ......................................................................................................................... 88
Chapitre 3 : Impacts de la dynamique des vasières à mangrove. ......................................... 93
1.1 Sur le plan écologique. ............................................................................................. 93
1.1.1 Les impacts sur la végétation. .......................................................................... 93
1.1.2 Les impacts sur la faune. .................................................................................. 94
1.1.3 Les impacts sur le plan pédologique. ............................................................... 95
2.1 Sur le plan socio-économique. ................................................................................. 96
2.1.1 Les impacts sur l’agriculture. ........................................................................... 96
2.1 L’appauvrissement des populations. .................................................................... 97
3.1 La dimension sociale de la dynamique des vasières à mangrove............................. 98
Troisième partie : Les stratégies de lutte contre la dégradation de la mangrove. ......... 101
Chapitre 1 : Les stratégies traditionnelles. ......................................................................... 103
1.1 Les reboisements. ................................................................................................... 103
2.1 Les ouvrages et techniques pour protéger les rizières. ........................................... 105
2.1.1 Les digues. ...................................................................................................... 105
2.1.2 Les billons. ..................................................................................................... 106
Chapitre 2 : Les stratégies modernes. ................................................................................. 107
1.1 Les accords et conventions. .................................................................................... 107
1.1.1 La Convention de Ramsar. ............................................................................. 107
1.1.2 La Charte régionale pour la conservation des mangroves. ............................. 107
2.1 Les initiatives et projets. ......................................................................................... 108
2.1.1 Le PGIEM. ..................................................................................................... 108
3.1 Les actions des ONG. ............................................................................................. 109
3.1.1 Les organismes spécialisés de l’ONU. ........................................................... 109
3.1.2 Océanium. ...................................................................................................... 109
3.1.3 Le GRDR........................................................................................................ 110
Chapitre 3 : Impacts des stratégies sur la dynamique des vasières à mangrove. ............... 111
1.1 Les impacts sur le plan écologique......................................................................... 111
1.1.1 Les impacts positifs. ....................................................................................... 111
1.1.2 Les impacts négatifs. ...................................................................................... 113
134
2.1 Sur le plan socio-économique. ............................................................................... 115
2.1.1 Les impacts positifs. ....................................................................................... 115
2.1.2 Les impacts négatifs. ...................................................................................... 115
Conclusion générale. .............................................................................................................. 117
Bibliographie. ......................................................................................................................... 119
Liste des graphiques. .............................................................................................................. 126
Liste des cartes. ...................................................................................................................... 126
Liste des tableaux. .................................................................................................................. 127
Liste des figures. .................................................................................................................... 127
Liste des photos. ..................................................................................................................... 128
Annexe. .................................................................................................................................. 129
Table de matières. .................................................................................................................. 132
135