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FICHE PRATIQUE DE SÉCURITÉ ED 121

Le grenaillage est un procédé


très répandu dans l’industrie
pour conférer un état de surfa-
ce particulier à différents types
de matériaux.
Ce procédé est à l’origine de
différents risques susceptibles
d’être graves pour les opéra-
teurs : blessures dues aux pro-
jections d’abrasifs, atteintes
auditives dues au bruit, patho-
logies provoquées par l’inhala-
tion de poussières…
Ces risques sont plus impor-
tants lors du grenaillage au jet
libre, où l’opérateur travaille à
l’intérieur de la cabine de gre-
naillage.
Après un rappel détaillé des
différents risques encourus,
cette fiche propose des pistes
de prévention et les valeurs li-
mites applicables pour certains
des composés chimiques en
Hall de grenaillage présence.
© INRS

Le grenaillage

Le grenaillage est un procédé industriel Les abrasifs peuvent être : • en fonderie, pour le dessablage et le
utilisé pour préparer, entretenir ou net- nettoyage des pièces ;
- de nature diverse (minérale, végétale,
toyer les surfaces de différents maté-
métallique…), • en sidérurgie, pour le décalaminage ;
riaux par projection d’abrasifs. L’opé-
ration s’effectue en cabine entièrement - de formes (rondes ou angulaires) et de • dans la construction métallique, pour
close soit manuellement (un opérateur dimensions variées, afin de répondre la préparation de surface avant peintu-
est situé à l’intérieur ou à l’extérieur) aux différentes applications. re ou métallisation ;
soit par un dispositif automatisé. Quant aux applications du grenaillage, • en grenaillage de précontrainte (ou
Il existe deux modes de projection elles sont nombreuses dans le domaine « shot peening ») pour l’amélioration
d’abrasif : le grenaillage par voie sèche du “nettoyage” et de la préparation de des propriétés mécaniques des métaux.
et le grenaillage par voie humide. pièces métalliques. On le retrouve entre
autres :
blessures, qui favorisent l’apparition métalliques (aluminium, magnésium,
Les risques d’allergies cutanées et la pénétration titane…).
Les risques sont importants pour l’opé- dans l’organisme de composés chi-
Ces poussières ont tendance à s’accu-
rateur et les personnes avoisinantes. miques des poussières.
muler en certains points de l’installa-
Parmi les poussières dangereuses, on tion. Une faible énergie suffit pour les
Le risque lié aux poussières peut notamment trouver : enflammer, donnant lieu à un feu cou-
Le grenaillage génère des poussières vant. Elles peuvent aussi provoquer une
n la silice cristalline, qui peut engendrer
qui proviennent soit des surfaces explosion lorsqu’elles sont sous la for-
une pneumoconiose particulièrement
métalliques traitées, soit du fractionne- me de nuage dans l’air, par exemple au
grave, la silicose, dont le caractère pro-
ment de l’abrasif. Ces poussières peu- moment de la mise en route de la venti-
fessionnel peut être reconnu au titre du
vent être composées : lation ou lors du décolmatage de filtres.
tableau de maladie professionnelle
- de la calamine qui recouvre l’acier n° 25 du régime général de la Sécurité
après laminage, sociale.

- de produits de corrosion des métaux, Ces poussières de silice peuvent prove-


nir du fractionnement de l’abrasif ou de Le risque de blessures
- des peintures anciennes, par projection
certaines pièces (notamment les pièces
- de la grenaille elle-même. de fonderie coulées dans des moules en La projection d’abrasif expose l’opéra-
sable). La teneur en silice des produits teur à des lésions de la peau et des
Elles peuvent pénétrer dans l’organis-
de grenaillage est limité par le décret yeux, notamment, en cas de défaut de
me, essentiellement par les voies respi-
n° 69-558 du 6 juin 1969. fonctionnement du dispositif d’arrêt du
ratoire et digestive.
n Le plomb peut aussi être rencontré, grenaillage.

Pénétration par voie respiratoire notamment dans les poussières de cer-


taines peintures.
Les plus grosses particules inhalées se
retrouvent au niveau des voies respira- Il peut être la cause du saturnisme, pou-
toires supérieures et peuvent être élimi- vant être reconnu comme maladie pro- Le risque lié à l’exposition
nées par le réflexe de la toux. fessionnelle au titre du tableau n° 1 du au bruit
Cependant, une partie passe alors par la régime général de la Sécurité sociale. Le niveau sonore à l’intérieur d’une
voie digestive. n Les poussières d’oxyde de fer peuvent cabine de grenaillage dépasse généra-
Les particules les plus fines peuvent provoquer une fibrose pulmonaire irré- lement 90 dB(A). L’exposition prolongée
pénétrer jusqu’aux alvéoles pulmo- versible appelée sidérose pouvant être à de tels niveaux sonores entraîne à
naires et s’y accumuler, ce qui peut reconnue comme maladie profession- long terme une diminution des capaci-
entraîner des pathologies respiratoires, nelle au titre du tableau n° 44 du régi- tés auditives pouvant déboucher sur
même si ces poussières ne présentent me général de la Sécurité sociale. des surdités. Les atteintes auditives pro-
pas de toxicité spécifique. voquées par le bruit peuvent être recon-
n D’autres composés, bien que plus
nues comme maladies professionnelles
Certaines substances dangereuses pour rarement rencontrés (chrome, nickel,
au titre du tableau n° 42 du régime
la santé peuvent pénétrer dans l’orga- cadmium…), possèdent une toxicité
général de la Sécurité sociale.
nisme par l’intermédiaire des poumons propre et peuvent aussi présenter des
et de la circulation sanguine. risques pour la santé de l’opérateur. Les troubles de l’audition dus à l’exposi-
Même considérées comme sans effets tion au bruit sur le lieu de travail sont
spécifiques, les poussières accumulées une des plus courantes de toutes les
Pénétration par voie digestive
dans les poumons en quantité impor- maladies professionnelles.
Les poussières sont absorbées principa- tante, peuvent provoquer des patholo-
lement par l’intermédiaire des mains gies de surcharges pulmonaires.
sales, en mangeant, en buvant, en
fumant. Elles peuvent par la suite
Le risque explosion-incendie Le risque de blessures
contaminer l’organisme en fonction de
(formation d’atmosphères ex- dues à la manutention
leurs propriétés, notamment de leur
plosives)
solubilité dans le milieu acide de l’esto- La manutention de pièces lourdes, telles
mac. Toutes les poussières combustibles que les pièces destinées à être traitées,
peuvent entraîner des risques d’incen- peut entraîner des problèmes dorsaux,
Pénétration par contact cutané die ou d’explosion. C’est le cas des pous- répertoriés au tableau n° 98 des mala-
sières végétales (noyaux de fruits…), dies professionnelles du régime général
Les contacts avec la grenaille abrasive synthétiques (peintures, caoutchouc…),
sont à l’origine d’usures de la peau et de de la sécurité sociale.

2 Fiche pratique de sécurité ED 121


Le risque de chute
LA RÉGLEMENTATION
Ce risque est essentiellement celui de
chutes de plain-pied qui peuvent en Décret n° 69-558 du 6 juin 1969 concernant les mesures de particulières de protection
particulier être dues à de la grenaille des travailleurs applicables aux travaux de décapage, de dépolissage ou de dessablage
(ronde…) répandue au sol. Des chutes au jet.
de hauteur lors de réglages ou de répa-
rations en partie haute des installations Arrêté du 30 juin 1997 relatif aux prescriptions générales applicables aux Installations
Classées pour la Protection de l'Environnement soumises à déclaration sous la rubrique
sont également possibles. n° 2575 : "Abrasives sur un matériau quelconque pour gravure, dépolissage, décapage,
grainage".

Arrêté du 11 juillet 1977 (Code du Travail) fixant la liste des travaux nécessitant une sur-
veillance médicale spéciale.
Le risque lié à la maintenance
des installations
Les personnels intervenant en mainte-
nance sont exposés aux risques liés aux ainsi que de leur caractère dangereux. (rejet de l’air épuré à l’intérieur des
équipements et aux poussières et sub- Ils doivent aussi être formés à l’utilisa- locaux) et évite de renvoyer une partie
stances chimiques présentes. Leurs tion des équipements de protection des poussières, notamment les plus
expositions peuvent souvent être plus collective et individuelle mis à leur dis- fines, dans le local.
importantes que celles des opérateurs position.
de production du fait qu’ils doivent Pour des motifs d’économie d’énergie,
intervenir au cœur des équipements Les risques liés à la maintenance des le recyclage de l’air peut être toléré sous
(système de recyclage de la grenaille ou installations doivent être pris en comp- certaines conditions (dispositions de la
d’épuration de l’air par exemple). te aussi bien pour le personnel de l’en- circulaire du 8 mai 1985 et de la note
treprise que pour celui d’entreprises technique du 5 novembre 1990). Les ins-
extérieures. La maintenance préventive tallations doivent être entretenues et
permet d’éviter la survenue de pannes nettoyées, leur fonctionnement ainsi
et les interventions en urgence, situa- que leur étanchéité doivent être véri-
tions pour lesquelles les risques sont fiées périodiquement.
LES MOYENS plus difficiles à maîtriser.
DE PRÉVENTION Il est recommandé d’équiper les
cabines de grenaillage d’un hublot per-
L’organisation mettant de contrôler le travail au cours
de sa réalisation. La porte doit être
Dans un premier temps, il convient La prévention collective munie d’un dispositif « anti-panique »
d’évaluer les risques professionnels ainsi que d’un voyant de signalisation
pour chaque poste de travail. Les enceintes de grenaillage doivent
indiquant que la cabine est occupée.
être adaptées à la dimension des pièces
Cette évaluation consiste à identifier et et assurer l’isolement du traitement. Les cabines doivent être construites en
à hiérarchiser les risques auxquels sont Ces cabines de projection doivent être matériaux incombustibles ou difficile-
soumis les salariés d’un établissement, équipées d’un système de ventilation ment inflammables et munies d’un sys-
en vue de mettre en place des actions (100 à 180 vol./h) afin d’éliminer les tème de récupération des poussières et
de prévention pertinentes. Elle consti- poussières au fur et à mesure de leur de déchets dans le but de réduire le
tue l’étape initiale d’une organisation production, d’assainir rapidement l’at- risque « incendie / formation d’atmo-
de la santé et de la sécurité dans l’en- mosphère après l’arrêt du grenaillage et sphères explosives ».
treprise. de garantir une visibilité suffisante. Le respect des VME* (voir tableau page
Des actions préventives pourront À une extraction d’air empoussiéré doit suivante) protège l’opérateur des
ensuite être mises en œuvre, notam- correspondre une introduction d’air risques d’intoxication ainsi que du
ment au niveau de la formation des propre équivalente. Après dépoussiéra-
opérateurs sur les risques, les moyens ge dans des systèmes appropriés
de protection collective et, en dernier (filtres à manches, à cartouches fil-
lieu, les équipements de protection trantes ou cyclones), l’air pollué doit
individuelle. être rejeté à l’extérieur des locaux, y
Les opérateurs doivent notamment compris pour les cabines de petite taille * VME : Valeurs limites de moyenne d’exposition mesu-
rées ou estimées sur la durée de 8 heures. Elles sont des-
être informés des produits chimiques où l’opérateur est à l’extérieur. Cette tinées à protéger les travailleurs des effets à terme.
utilisés ou générés lors du grenaillage, solution est préférable au recyclage

ED 121 Fiche pratique de sécurité 3


risque d’incendie-explosion, les limites Valeurs limites la lance d’une poignée dite “homme
inférieures d’explosivité pour les pous- de moyenne d’exposition mort”, qui entraîne l’arrêt automatique
pour quelques composés
sières combustibles étant largement de la projection en cas de relâchement.
supérieures. Composés VME
Quand les mesures de protection col-
D’autres mesures de prévention peu- 3 lective contre le bruit ne permettent
Poussières totales 10 mg/m
vent être prises pour lutter contre le pas d’atteindre un niveau sonore satis-
risque d’incendie-explosion, notam- Poussières alvéolaires 5 mg/m3 faisant, les protections individuelles
ment en ce qui concerne la ventilation s’imposent. Elles ont pour but de dimi-
des cabines de grenaillage. Il est recom- Quartz 0,1 mg/m3 * nuer le niveau sonore de façon à l’abais-
mandé de la renforcer lorsqu’on effec- ser à moins de 85 dB(A). Pour être effi-
Cristobalite 0,05 mg/m3 *
tue des opérations de grenaillage don- caces, ces protections doivent être
nant lieu à la formation de poussières Tridymite 0,05 mg/m3 * portées pendant toute la phase de gre-
combustibles. naillage et dans les zones signalées à
3
Plomb et composés 0,1 mg/m intensité sonore élevée.
Les concentrations importantes en
du plomb (en plomb métal)
poussières dans les systèmes d’épura-
tion de l’air peuvent être à l’origine * en poussières alvéolaires
d’explosions. La mise en place d’un
évent d’explosion sur le dépoussiéreur
En présence de poussières alvéolaires HYGIÈNE
peut alors être envisagée en fonction
contenant une ou plusieurs formes de ET SURVEILLANCE
silice cristalline et d’autres poussières MÉDICALE
de la taille de ce dernier. non silicogènes, la condition suivante
doit être respectée :
Enfin, si un feu couvant se déclare, il
faut manipuler l’extincteur avec pré- Cns/5 + Cq/0,1 + Cc/0,05 + Ct/0,05 < 1 Afin d’éviter toute contamination par la
cautions car le souffle de ce dernier Cns, Cq, Cc et Ct étant les concentrations voie digestive, une bonne hygiène cor-
pourrait entraîner la propagation du respectives en poussières alvéolaires non porelle est indispensable. Il est recom-
feu. Dans la mesure du possible, il est silicogènes, quartz, cristobalite et tridy- mandé de se laver les mains et le visage
mite en mg/m3.
conseillé d’étouffer le feu à l’aide de avant les repas et de se doucher avant
sable ou d’une serpillière humide. de quitter le lieu de travail. Il est égale-
ment important de ne pas manger, boi-
La lutte contre le bruit est aussi à n une cagoule alimentée en air tempé-
re, fumer ou mâcher de la gomme pen-
prendre en compte. Les mesures à
mettre en œuvre sont d’abord de rédui- ré (165 l/min minimum soit 10 m3/h), dant le travail.
re le bruit à la source en choisissant les n des gants spéciaux, Les locaux doivent être maintenus
équipements les moins bruyants puis propres afin d’éviter les risques dus aux
n des chaussures de sécurité (répondant
d’encoffrer et d’isoler les installations fuites de poussières ou de grenailles
aux critères de la norme NF S 73-010),
les plus bruyantes. responsables de chutes et glissades
n une combinaison en toile épaisse (grenailles rondes roulant sous les
avec serrage au cou, aux poignets et pieds) ainsi que de risques pour les
aux chevilles. yeux.
ÉQUIPEMENTS Selon le type d’abrasif utilisé, un tablier L’exposition à des poussières contenant
DE PROTECTION de cuir peut s’avérer nécessaire. Cet des substances dangereuses pour la
INDIVIDUELLE équipement doit être étanche pour évi- santé comme la silice cristalline, le
ter les infiltrations de poussières. Il doit plomb, le cadmium … nécessite une sur-
Dans le cas du grenaillage manuel (à jet aussi être entretenu régulièrement, car veillance médicale spéciale.
libre), le code du travail impose à l’opé- il est exposé à une usure relativement
rateur, l’utilisation d’un équipement de rapide par la grenaille. Lorsqu’il est trop
protection individuel complet compre- usé, le renouvellement s’impose. Pour •
Auteur : Antoine Mercier, Bruno Courtois Secré-
nant : éviter les risques de lésions dues à la
graphies : Yves Cousson/INRS.

tariat de rédaction : Christine Larcher Photo-

grenaille, il est recommandé d’équiper

Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles
• • • •
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4 Fiche pratique de sécurité ED 121 paru dans Travail & Sécurité, décembre 2004 © INRS

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