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Cartographie de l’utilisation des sols et de l’érosion hydrique dans le bassin


versant de l’Oued Lahdar (Prérif oriental-Maroc) : Utilisation des données de
la télédétection et du...

Article · December 2021


DOI: 10.13137/2282-572X/33429

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2 authors:

Zakariae Amhani Abdellatif Tribak


Sidi Mohamed Ben Abdellah University Sidi Mohamed Ben Abdellah University
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EUT EDIZIONI UNIVERSITÀ DI TRIESTE

Bollettino della ASSOCIAZIONE ITALIANA di CARTOGRAFIA 2021 (171), 4-20

ISSN 2282-572X (online) ISSN 0044-9733 (print) DOI: 10.13137/2282-572X/33429


http://www.openstarts.units.it/dspace/handle/10077/9933

Cartographie de l’utilisation des sols et de l’érosion hydrique dans le


bassin versant de l’Oued Lahdar (Prérif oriental-Maroc) : Utilisation des
données de la télédétection et du modèle RUSLE
Mapping of land use and hydric erosion in the wadi Lahdar catchment
(Eastern Prérif-Morocco): Use of remote sensing and RUSLE model

Zakariae Amhani, Abdellatif Tribak


Université Sidi Mohamed Ben Abdellah – Fes; zakariae.amhani@usmba.ac.ma, abellatif.tribak@usmba.ac.ma

Résumé Abstract

Le bassin versant de l’Oued Lahdar, situé dans le Prérif oriental (Ma- The wadi Lahdar basin, located in the eastern Prérif (Morocco), is a
roc), constitue un milieu vulnérable où l’érosion hydrique est à l’origi- vulnerable environment where water erosion constitute the source
ne d’énormes pertes en terres. L’objectif du présent travail est d’éva- of enormous soil losses. The objective of this work is to assess, on the
luer d’une part, les changements majeurs de l’occupation des sols et one hand, the major changes in land use and to highlight the cur-
de mettre en lumière les tendances actuelles d’évolutions et d’autre rent trends and, on the other hand, to estimate soil losses, and their
part, d’estimer les pertes en sols, ainsi que leurs distributions spatia- spatial distributions. We have thus, adopted a procedure which is es-
les. Nous avons, ainsi, adopté une procédure qui se base essentielle- sentially based on the analysis of remote sensing data for the the-
ment sur l’analyse des données de télédétection pour la cartographie matic mapping of land use, and by the use of geographic information
thématiques des occupations des sols, et par l’utilisation des systèmes systems in order to quantify hydrous erosion rates, using the empiri-
d’informations géographiques afin de quantifier et de spatialiser l’éro- cal soil loss model in its revised version (RUSLE). The spatio-temporal
sion hydrique, en utilisant le modèle empirique des pertes en sols sous evolution of the land use during the period 1994-2018 in the basin
sa version révisée (RUSLE). L’ évolution spatio-temporelle de l’occupa- reveals clearly, a considerable expansion of arboriculture (+51%) as-
tion et l’utilisation des sols pendant la période 1994-2018 au sein du sociated with a densification existing areas, a significant decrease in
bassin révèle nettement une expansion considérable de l’arboriculture cereal areas (-32%), and consequently a considerable extension of
(+51%) associée à une densification des zones existantes, une dimi- soils heavily stripped by erosion (badlands and wasteland) (+33%).
nution significative des espaces céréalières (-32%), et par conséquent The areas occupied by the forest environment (Forest/Reforestation)
une extension considérable des sols fortement décapée par l’érosion have undergone a significant increase of 10%. In addition, the aver-
(badlands et des terrains incultes) (+33%). Les surfaces occupées par le age soil loss per unit area is 31 t/ha/year, with a total of 2 328605 t/
milieu forestier (Forêt/Reboisement) ont subi un accroissement signifi- year for the entire basin. These rates reflect an intrinsic fragility of
catif de 10%. Par ailleurs, les pertes moyennes en sols par unité de sur- this environment which favors an acceleration of erosive processes.
face sont de 31 t/ha/an soit un total de 2 328605 t/an pour l’ensemble Erosion control actions are essential; they must be compatible with
du bassin. Ces chiffres traduisent une fragilité intrinsèque de ce milieu the physical and socio-economic conditions of this environment.
qui conditionne une accélération des processus érosifs. Des actions
d’aménagement et de lutte antiérosive s’imposent ; elles doivent être
compatibles avec les conditions physiques et socio-économiques de
cet environnement.

Mots clés: Keywords

Érosion, Quantification, Télédétection, RUSLE, Prérif – Maroc Erosion, Quantification, Remote sensing, RUSLE, Morocco - Prérif

4
Z. AMHANI, A. TRIBAK Cartographie de l’utilisation des sols et de l’érosion hydrique

1. Introduction dans la région, explique pour une bonne part, la grande


variabilité des processus érosifs qui tendent à se géné-
Cette proportion du Prérif oriental, à l’instar des autres raliser sur la plupart des versants.
secteurs de la chaine rifaine, connaît à l’heure actuelle Le bassin de l’Oued Lahdar, localisé dans le Prérif
une dynamique érosive très active qui touche presque au Nord-Ouest de Taza (Fig. 1), est soumis à une dyna-
la totalité des versants. Elle résulte de l’interaction de mique érosive intense dont les termes sont très variés.
différents paramètres relevant des conditions phy- Les pertes de terres sont énormes et alarmantes. Les
siques et des interventions anthropiques. La structure données de la télédétection nous ont permis de suivre
géologique, dominé par les nappes de charriages, est l’évolution de l’occupation des sols ayant pour but la
très complexe. Elle marque la région par une diversité compréhension de la distribution spatiale de l’érosion
des formations lithologiques marquées par la prédomi- en fonction de la nature d’occupation et d’utilisation
nance de matériaux tendres, essentiellement marneux. des terres. Le modèle empirique RUSLE nous a permis
La plupart des terrains, dénudés en quasi-totalité, sont d’évaluer le taux d’érosion sur l’ensemble de la zone
exposés directement à l’action des événements pluvio- étudiée, en fonction de la distribution de l’agressivité
métriques agressifs. La forte pression humaine sur le des pluies, l’érodabilité des sols, la topographie, l’utili-
milieu, à laquelle sont liées les différentes modalités de sation des terres et les pratiques de gestion des cultures.
l’utilisation de l’espace et leurs organisations spatiales

Figure 1 - Situation géographique et hypsométrie du bassin versant de l’Oued Lahdar

Source: Elaboration par les auteurs

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2. Susceptibilité du milieu aux risques unités bien différentes (Fig. 2). Au Nord, le domaine
d’érosion interne est constitué en majorité par des terrains alloch-
tones à matériel résistant (Nappe de Bouhadoud, unités
Le bassin versant de l’Oued Lahdar est façonné dans le de type J.En Niher) avec quelques terrains autochtones
Pré-rif oriental au nord-est du Maroc, sur une superfi- marneux ou schisto-gréseux. Au sud, dominent les ter-
cie d’environ 611,5 km2. Morphologiquement, les par- rains marneux autochtones de la nappe Prérifaine qui
ties amont du bassin montrent des crêtes montagneuses sont en partie couverts par des terrains allochtones ap-
dont l’altitude atteint 1700 m, les pentes y sont fortes et partenant au système d’Ouezzane (Leblanc, 1975). Une
dépassent 25% (Fig. 4). Vers le Sud dominent des basses mosaïque lithologique vue l’affleurement de plusieurs
montagnes ainsi que des collines offrant un relief aéré unités dominées par de matériaux tendres, essentielle-
et des pentes moins accusées. L’exutoire du bassin de ment marno-calcaires et marno-gréseuses tertiaires, au
l’Oued Lahdar est à 385 m. De point de vue géologique, sein d’une structure tourmentée, constitue un facteur
le bassin appartient à la chaine rifaine et se caractérise important qui conditionne une évolution rapide et dé-
par deux domaines structuraux qui se partagent par des sordonnée des versants (Tribak el al., 2017).

Figure 2 - Coupe géologique des unités structurales dans le Prérif oriental

Source: Suter, 1980

Les sols qui caractérisent cette région appartiennent aux neuses ou limono-argileuses, les rend plus instables et
classes des sols minéraux superficiels et squelettiques, fortement sensibles aux phénomènes pluviométriques
des classes des sols peu évolués d’érosion sur les fortes agressifs.
pentes, des vertisols et des sols calcimagnésiques dans Le climat de la région est marqué par de forts
les zones moins accidentées, et des sols d’apport alluvial contrastes saisonniers et des irrégularités très nettes des
qui se développent sur les terrasses bordant les cours précipitations. Les moyennes annuelles oscillent entre
d’eau (Tribak, 2000; Tribak et al., 2017). Les différents 590 mm pour la station de Taza (1970-2018) et 690
types de sols dans le bassin de l’Oued Lahdar montrent, mm pour la station de Taineste (1970-2018). Néanmoins
de manière globale, des comportements favorables aux les pluies sont généralement brutales et se concentrent
processus érosifs, bien que ces derniers varient de na- en quelques jours de la saison humide. L’étude statis-
ture, d’intensité et de degré d’activité d’un sol à l’autre. tique par catégorie de précipitations journalières enre-
Ils sont caractérisés par une faible teneur en matière gistrée dans la station de Taza, sur la période 1979-
organique ainsi que la prédominance de textures limo- 2018 montre que cette région est parfois soumise à des

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hauteurs maximales journalières, dépassant parfois le ment une augmentation des fréquences concernant les
seuil de 80 mm, et qui sont souvent à l’origine de dy- averses situées entre 35 et 70 mm. Elles correspondent
namiques hydrologiques au pouvoir érosif particulier ainsi à des fréquences de 0,2 à 0,8 et des périodes de
(Tribak, 2000; Tribak et al., 2017). Ces extrêmes quoti- retour allant de 2 à 5 ans. Les hauteurs situées entre 70
diens peuvent atteindre des records très significatifs sur mm et 80 mm sont assez fréquentes avec une récurrence
le plan morphogénétique. Des exemples très illustratifs de l’ordre de 10 ans. Quant aux valeurs médianes qui
peuvent être mentionnés : 87 mm le 30 novembre 2010 dépassent le seuil de 80 mm par jour, elles restent peu
(41% du module mensuel), 88 mm le 19 décembre 2009 fréquentes; leur période de retour dépasse généralement
(30% du module mensuel) et 113 mm le 14 mars 2004 20 ans (Tribak et al., 2012).
(61,7% du module mensuel). Ainsi, l’analyse fréquen-
tielle des hauteurs maximales journalière montre nette-

Figure 3 - Répartition des formations lithologiques dans le bassin Figure 4 - Répartition des classes de pentes dans le bassin versant
versant de l’oued Lahdar de l’Oued Lahdar

Source: Cartes géologiques de Taineste et Bab El Mrouj 1/50000 Source: Cartes topographiques de Taineste et Bab El Mrouj 1/50000

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Les données relatives de l’évolution démographiques, les parcours/Incultes occupent 76,9 km2 (12,6%), l’ar-
révèlent une phase intense de dépeuplement atteignent boriculture représente 125 km2 (20,4%), tandis que les
l’ensemble de la région. L’analyse des chiffres au niveau forêts n’occupent que 101,6 ha (soit 16,6%). On résume
des douars appartiennent au bassin de l’Oued Lahdar, donc, que 83,4% de la superficie total du bassin consti-
montre nettement une grande diminution significative tuent une cible de premier ordre pour les activités quo-
de la population, ou le taux d’évolution globale est de tidiennes de la population, et y sont fortement exposés
l’ordre de -30,90% entre 1994 et 2014. Cette tendance aux effets morphogéniques des événements pluviomé-
démographique actuelle donne le portrait d’un bassin triques exceptionnelles, alors que les 16,6% restants
en dépeuplement et d’abandon continu des terres. Ce- (Massifs forestiers) sont des sites plus ou moins protégés
pendant, la densité humaine reste toujours impression- contre ce fléau. Mais, en réalité, ces massifs forestiers
nante en 2014, elles dépassent le seuil de 70 h/km² dans ne représentent que des maigres formations naturelles,
le périmètre du bassin de l’Oued Lahdar (Fig. 5). et qui sont limitées spatialement dans le secteur Nord et
Du point de vue de l’occupation et utilisation des Nord-ouest du bassin. Il s’agit de formations très claires
sols, les données actuelle pour l’ensemble du bassin de et dégradées, souvent de type matorral, maquis ou erme
l’Oued Lahdar montrent que les cultures annuelles ac- renforcées localement par des reboisements de résineux
caparent 308 km2 (soit 50,4% de la superficie totale), (Tribak, 2000).

Figure 5 – Carte des taux


d’évolutions et nombre de
population par douar dans
le bassin versant de l’Oued
Lahdar

Source: Analyse des


données de populations des
années 1994,2004 et 2014

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3. Méthodologie Maroc). En outre, des corrections atmosphériques et ra-


diométriques ont été réalisées pour la mise en forme
L’objectif principal de cette étude, est d’analyser l’évolu- des données par l’amélioration de la qualité visuelle des
tion et le changement de l’occupation du sol et la quan- images, la diminution de la confusion et l’augmenta-
tification de l’érosion hydrique dans le bassin versant tion de la séparabilité entre les déférentes classes thé-
de l’Oued Lahdar. L’approche méthodologique adoptée matiques en vue de la photo-interprétation. A partir des
repose principalement sur la collecte, le traitement et opérations précédentes, nous avons effectué une ana-
l’analyse spatiale des données concernant les para- lyse diachronique de l’occupation des sols, les images
mètres de l’environnement physique ainsi que l’utilisa- raster résultantes de la classification supervisée sont
tion des sols. Dans un premier lieu nous avons recueilli converties sous la forme vectorielle à l’aide d’un logi-
des données topographiques (déclivité et longueurs de ciel SIG, cette technique de vectorisation a permis non
pentes) depuis un modèle numérique du terrain (MNT), seulement d’élaborer des cartes mais, aussi d’estimer de
des données pluviométriques disponibles (pluies an- manière automatique les superficies et les taux d’évo-
nuelles et mensuelles) et des données pédologiques (ca- lution des différentes classes thématiques. Les thèmes
ractéristiques physico-chimiques des principaux types sont définis en fonction des caractéristiques du sol, de
de sols) à partir des cartes pédologiques de la zone la végétation et de l’utilisation agricole des parcelles de
concernée. Dans un deuxième lieu nous avons procédé références observées sur le terrain (Tribak et al., 2015).
à l’extraction des informations qualitatives et quantita-
tive d’occupation des sols grâce à une analyse détaillée
des images satellitaires. Un ensemble de traitements des 3.2 Modélisation spatial de l’érosion du sol
différentes tables d’informations effectuées par les logi-
ciels Arc-Gis 10.5 et Erdas Imagine 16,5 (numérisation Modèle RUSLE : La tâche de la quantification de l’éro-
de toutes les couches d’informations et télédétection), sion hydrique est effectuée par le modèle RUSLE (Re-
nous a permis d’exécuter des opérations d’analyse spa- nard et al., 1991; Bonn, 1998) intégré dans le logiciel
tiale et de modélisation des processus d’érosion, afin de Arc Gis 10.3. L’intégration dans un environnement SIG,
synthétiser et d’interpréter les résultats obtenus. la plupart des facteurs figurant dans ce modèle empi-
rique (Fig. 6) nous a permis d’une part, d’élaborer des
cartes des pertes en sol et d’autre part, d’évaluer les
3.1 Utilisation des images satellitaires pour la taux annuels moyens a l’échelle du bassin versant, ainsi
cartographie de l’occupation du sol qu’en fonction des types d’occupations des sols (Tribak
et al., 2017).
L’étude du retraçage de l’évolution spatio-temporelle de Selon les paramètres de ce modèle, le taux des pertes
l’occupation des sols dans le secteur concerné à été effec- en sol (A en t/ha/an) est une fonction multiplicative des
tuée à partir de la classification thématique des images cinq facteurs qui contrôlent l’érosion hydrique : l’érosi-
satellitaires Landsat-5 TM et Landsat-8 OLI (entre 1994 vité des pluies (R), érodibilité des sols (K), le facteur topo-
et 2018) d’une résolution 30 m en mode multi-spec- graphie (LS), le couvert végétal et les pratiques culturales
trales, ces dernières sont prises en saison sèche pour (C) ainsi que et les pratiques de gestion antiérosives (P).
ne pas comparer des images de saisons différentes, ce Ce modèle s’exprime comme suite: A = R. K. SL.C.P
qui pourrait donner lieu à des résultats non compa- La valeur de l’indice R utilisée pour le bas-
rables. Le traitement et l’analyse des produits acquis sin de l’Oued Lahdar a été basée sur la formule de
ont été mis en pratique sous les logiciels de traitement (Rango, Arnoldus, 1987) et dérivée en utilisant les
d’images Erdas Imagine et Arc Gis 10.3. En premier lieu, données pluviométriques disponibles dans les stations
ces images ont été géo-référencées, en utilisant la pro- météorologiques de Taineste, Had Msila, Bab Ehoub et
jection conique conforme de Lambert selon le système Taza pour une période de 48 ans (1970-2018).
de référence géodésique de Merchich (Système Nord du

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Tableau 1 – Les valeurs de l’indice R dans le bassin de l’oued Lahdar

Stations Pluie moyenne annuelle (mm) L’indice R


Taineste 691 80,4
Had Msila 679 86,7
Bab Choub 588 73,5
Taza 592 73,0
Moyenne 78,4

Source: Elaboration par les auteurs

D’après le tableau 1, les valeurs de l’indice R du bassin Le rif occidental dans son bassin de l’Oued Arbaa Aya-
de l’Oued Lahdar varient de 73 jusqu’à 86,7. Les valeurs cha présente des valeurs élevées de 110 à 124 (Ouallali
les plus élevées sont enregistrées au Nord-ouest alors et al., 2016). Alors que (El Hafidi, Akdim, 2018) ont
que les valeurs les plus faibles sont enregistrées à l’aval trouvé des valeurs faibles dans le bassin de l’Oued Isly
vers le Sud-est du bassin versant de l’Oued Lahdar. Ces (hautes plateaux du Maroc oriental) varient de 44 à 56.
valeurs sont relativement élevées par rapport à celle en- La valeur K a été calculée à l’aide du nomogramme
registrée dans le bassin de l’Oued Tleta (Prérif oriental) de Wischmeier et par sa formule, et en exploitant les
où (Tribak et al., 2009) donnent une valeur de 56. En résultats des analyses physico-chimiques issus des tra-
revanche, elles sont très faibles par rapport à ceux trou- vaux de (Tribak, 2000) dans la zone étudiés. Les résul-
vées dans le bassin de l’Oued Sahla (Rif Centrale) où tats sont résumés dans le tableau ci-dessous.
(Sadiki et al., 2009) indiquent des valeurs de 162 à 190.

Tableau 2 – Les valeurs du facteur K et calasse d’érodibilité par type des sols

Facteur K Superficie
Type du sol Classe d’érodibilité
métrique t/ha (km )
2
(%)
Lithosols 0,32 Moyenne 16,72 2,7
Sol peu évolué 0,44 Forte 140,38 23
régosolique
Sol peu évolué 0,39 Forte 34,59 5,7
d’apport alluvial
Sol peu évolué 0,27 Moyenne 13,90 2,3
d’apport colluvial
Vertisols 0,36 Forte 62,95 10,3
Sol calcimagnésiques 0,25 Moyenne 292,28 47,8
Sol fersialitique 0,46 Très forte 50,20 8,2

Source: Elaboration par les auteurs

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Les valeurs du facteur K figurent dans le tableau 2, si- sur le terrain, nous permet d’établir des cartes d’occupa-
tuées entre 0,25 et 0,46, montrent que 47,2% des sols tion des sols, et par conséquent, des cartes synthétiques
sont classés fortement érodables selon le système de du facteur C. Les valeurs attribuées aux différents types
classification de (Manrique, 1988), et elles révèlent, une d’occupation des sols dans le bassin versant de l’Oued
nette fragilité des sols et leur forte sensibilité aux pro- Lahdar se situent entre 0.08 et 0.75 (Tableau 3).
cessus érosifs dans le bassin de l’Oued Lahdar.
Le facteur LS a été calculé à partir de la combinai-
son de gradient (S) et longueur (L) de pente par l’utili- Tableau 3 – Les valeurs du facteur C par type d’occupation des sols
sation des systèmes d’informations géographiques. De
nombreuse formules permettent l’estimation de ce para- Type d’occupation du sol Facteur C
mètre topographique à partir du modèle numérique de Forêt/Reboisement 0,11
terrain (MNT), les plus utilisés celles de (Wischmeier, Arboriculture 0,25
Smith, 1976) et de (Mitasova et al., 1996). Dans notre Céréaliculture 0,26
bassin de l’Oued Lahdar nous avons utilisé la dernière
Terrains Incultes 0,75
formule, en raison que la plupart des études récentes
sur la quantification de l’érosion hydrique par le modèle Source: Elaboration par les auteurs
RUSLE utilisent cette équation (Ouallali et al., 2016).
La valeur du facteur C utilisée est basée sur les don-
nées du tableau descriptif de (Wischmeier, Smith, 1976) Le facteur P varie de 1 pour les zones sans conservation
qui permet d’évaluer ce facteur à partir des cartes d’occu- à 0,1 pour les terres fortement aménagées (Roose, 2008).
pation et d’utilisation des sols, ainsi qu’à partir des résul- Les aménagements antiérosifs dans la zone d’étude
tats d’études antérieures concernant certains bassins du restent réduits et très limités spatialement, elles ne dé-
Rif (Sadiki et al., 2004; Naimi et al., 2005; Tribak et al., passent pas 5% de la surface total du bassin de l’Oued
2009; Abahrour, 2009; Tribak et al., 2015; Tribak et al., Lahdar. A cet effet, une valeur de 1 a été arbitrairement
2021). L’exploitation des données de télédétection par le attribuée à l’ensemble de la zone étudiée.
traitement d’images satellites et des vérifications directes

Figure 6 - Méthodologie de
la modélisation de l’érosion
hydrique par le modèle
RUSLE

Source: Reanard et al., 1997

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4. Résultats et Discussion culture, le recul des terres céréalières, l’extension des


terrains incultes et des badlands et l’augmentation de
la superficie réservée au milieu forestier. En outre, la
4.1 Évolution de l’occupation et l’utilisation des sols cartographie et l’étude de l’évolution spatio-temporelle
de l’occupation et l’utilisation des sols pendant la pé-
L’analyse des résultats dérivés de la télédétection ont riode 1994-2018 dans le bassin révèle nettement une
permis d’acquérir des informations qualitatives et quan- expansion considérable de l’arboriculture (+51,14%)
titatives sur l’occupation et l’utilisation des sols en 1994 associée à une densification des zones existantes puis
et 2018, et de retracer leur évolution pour une période une expansion spatiale de cette catégorie, une diminu-
relativement longue de 24 ans. En premier lieu, cette tion significative des espaces céréalières (-32,24%), et
analyse ont permis de déterminer quatre classes théma- par conséquent une extension considérable des sols for-
tiques d’occupation et d’utilisation des sols : terrains in- tement décapée et déblayés par l’érosion (badlands et
cultes, céréaliculture, arboriculture et forêt/reboisement des terrains incultes) (+33,25%). Les surfaces occupées
(Tableau 4). En deuxième lieu, elle a mis en évidence par le milieu forestier (Forêt/Reboisement) ont subi un
les tendances globale de l’évolution de l’occupation et accroissement significatif de 10,38% ; La superficie a
l’utilisation des sols dans le bassin versant de l’Oued progressé de 91,05 km2 en 1994 à 101,59 km2 en 2018
Lahdar ; soit l’accroissement de la densité de l’arbori- (Tableau 4).

Tableau 4 - Evolution spatio-temporelle de l’utilisation des sols pendant la période 1994-2018 dans le bassin de l’Oued Lahdar

Année 1994 Année 2018 Évolution 2000-2018


Type d’occupation du sol
Superficie km2 (%) Superficie km2 (%) (%)
Forêt/Reboisement 91,05 14,9% 101,6 16,6% 10,38
Arboriculture 61,07 10,0% 125,0 20,4% 51,14
Céréaliculture 407,30 66,6% 308,0 50,4% -32,24
Terrains Incultes 52,07 8,5% 76,9 12,6% 32,25
Total 611,5 100% 611,5 100%  

Source: Analyse des images satellitaires de landsat 5 et landsat 8 OLI

Figure 7 - Extrait des 2


images satellitaires de
landsat 5 et landsat 8 OLI
montrent l’augmentation
des périmètres de
reboisements (renforcement
d’un matorral dégradée par
des reboisements de pin
d’Alep et d’eucalyptus) dans
la partie Nord-est du bassin
versant de l’Oued Lahdar

Source: Analyse des images


satellitaires de landsat 5 et
landsat 8 OLI

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Figure 8 - Carte d’occupation des sols dans le bassin de l’Oued Figure 9 - Carte d’occupation des sols dans le bassin de l’Oued
Lahdar année/1994 Lahdar année/2018

Source: Analyse de l’image satellitaire de Landsat 5TM Source: Analyse de l’image satellitaire de Landsat 8 OLI

La région d’étude est caractérisée par le manque total situation de pauvreté de quitter leurs terres et migrer
d’une économie diversifiée, en plus, des conditions cli- vers les villes voisines, et cela a donc mis en évidence le
matiques défavorables (succession de longue période fait que l’expansion significative des terrains abandon-
de sécheresse) pour la stabilité de la population. Cette nés est liée étroitement au processus de dépeuplement
situation a poussé un grand nombre de population en rural dans ce territoire rifain.

Figure 10 - Evolution des


superficies céréalières et
des terrains incultes en
rapport avec l’évolution
démographique dans le
périmètre du bassin de
l’Oued Lahdar

Source: Elaboration par


les auteurs

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La figure 10 illustre bien ce propos, la diminution des de fonctionnement d’un réseaux dense de griffures, et
terres céréalières et bien corrélée avec le dépeuplement constituent le théâtre d’une forte activité de ruisselle-
rural au sein du bassin de l’Oued Lahdar (Le nombre ment avec des coefficients très élevées et représentent,
total de population des douars appartenant au bassin par conséquent, une source importante de la production
selon les recensements généraux de la population au d’énormes quantités de sédiments (Tribak, 2000; Tribak
Maroc 1994, 2004, 2014). Par ailleurs, on note une aug- et al., 2015). Ce qui témoigne bien la sévérité de cette
mentation remarquable des terrains abandonnés au dé- situation alarmante.
triment de la céréaliculture avec un coefficient de déter-
mination R2= 0,94.
Les phénomènes de migrations touchent la plupart 4.2 Evaluation et cartographie des pertes en sols :
de douars de la zone d’étude influencent négativement
sur les ressources humaines nécessaires pour le travail Les cartes synthétiques des pertes en sol, élaborés à l’aide
et l’entretien de la terre. L’exode massif de la catégorie d’un système d’information géographique à travers la
active qui est considérée comme un facteur principal superposition multiplicative des différents facteurs (R, K,
de la durabilité productive des terres, conduisant à un LS, C et P) de l’équation universelle de perte en sols de
manque flagrant de la main d’œuvre, ce qui conduit Wischmeier révisée (RUSLE), montrent à la fois l’ampleur
à une réduction importante des aires agricoles, voire des pertes en terres dans l’ensemble de la zone étudiée
a l’abandon total des terres cultivables. L’abandon des ainsi que les secteurs critiques exposées potentiellement
terres, peut être considéré sans doute comme un indica- aux effets néfastes de l’érosion (Fig. 12 et Fig. 13). Les
teur qui exprime l’impuissance des paysans d’exploiter résultats obtenus, montrent que la perte moyenne pon-
et de travailler la totalité de leurs terres, ainsi que, la dé- dérée par unité de surface est de 31 t/ha/an soit un total
térioration et l’appauvrissement des parcelles devenues de 2 328605 t/an pour l’ensemble du bassin de l’Oued
stériles ou peu productives et incapables de répondre Lahdar. Ces chiffres témoignent que la dégradation des
aux besoins de la population, dont certaines sont lais- terres dans ce coin du Prérif est en situation critique, et
sées en jachère périodique pour le pâturage et d’autres montrent, par conséquent, que les pertes en terre enregis-
retournent complètement en friche (Tribak, 2000). trées annuellement son impressionnantes, elles dépassent
Les observations de terrain et les résultats des me- nettement dans la majorité le seuil de tolérance. Cette
sures effectuées sur ces terrains abandonnés montrent situation alarmante reste fortement conditionnée par
une faible capacité d’infiltration, exacerbée par l’effet l’extension considérable des sols peu évolués d’érosion
du piétinement (tassement des troupeaux), une capa- et des régosols issus du matériel marneux fortement sen-
cité de stockage d’humidité du sol très limité (< 10 cm sibles aux phénomènes pluviométriques agressifs, ainsi
de profondeur), un faible taux de couverture le long qu’à des pentes fortes escarpées, dénudées et intensément
de l’année et une réaction très rapide aux phénomènes exploitées par les pratiques culturales de la population. À
pluviométriques intenses. Ces résultats montrent que les titre de comparaison les pertes moyennes sont estimées
taux d’infiltration sur les terrains abandonnés (incultes) dans le bassin de l’Oued Tleta dans le Prérif oriental à
restent généralement inférieurs à 48 mm/h le long de 61 t/ha/an (Tribak et al., 2009). Ce même auteur en 2015
l’année, ceci explique bien les forts taux de ruisselle- et en 2021 a trouvé une valeur moyenne de l’ordre de
ment sur ces terrains qui peuvent enregistrer des valeurs 78 t/ha/an pour le bassin de l’Oued Tarmast (Tribak et
supérieures à 33%. L’absence de tout travail du sol, par- al., 2015) et 43 t/ha/an pour le bassin de l’Oued Ourtza
ticulièrement le labour qui présente une aptitude à l’in- (Tribak et al., 2021). Le bassin de l’Oued Nakhla dans le
filtration importante par l’ouverture de la surface des Rif occidental perd en moyenne 65 t/ha/an à l’échelle du
sols, le cassement et la suppression des croutes superfi- champ (Naimi et al., 2005). Dans le bassin de l’Oued Bous-
cielles, l’augmentation de la rugosité de surface et le re- souab (Rif oriental), les pertes sont de l’ordre de 55 t/ha/
tardement de déclenchement du ruissellement, fait que an (Sadiki et al., 2004). Ce même auteur en 2009 a éva-
les parcelles abandonnées deviennent un endroit spécial luée une moyenne de l’ordre de 22 t/ha/an dans le bassin

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de l’Oued Sahla (Sadiki et al., 2009). La comparaison des cative des terres incultes et les badlands sur des pentes
résultats obtenus avec des études réalisées à l’échelle du pentus peu protégés où la production d’énormes quan-
bassin méditerranéen montre la fiabilité relative du mo- tités de sédiments déversés chaque année dans les col-
dèle appliqué. En effet, (Kaci et al., 2017), montre que les lecteurs principaux. Par contre les pertes inférieures à
pertes moyennes en sols sur des terrains fragiles du ter- 7 t/ha/an n’occupent que 58,5 km2 (9,6%) de la surface
ritoire Algérien (bassin de l’Oued Rhiou) atteignent 25 t/ totale (Tableau 5), en raison de la surface réduite des
ha/an. Le bassin de l’Oued Barbara en Tunisie septentrio- terrains incultes et des badlands et l’extension consi-
nale perd en moyenne 36 t/ha/an selon (Saoudi, 2011). dérable de l’arboriculture et des périmètres reboisés qui
A l’échelle du bassin versant du Mhaydssé située dans la gagnent du terrain sur la plupart des versants, surtout
plaine de BéKaa-Liban, la moyenne en perte de terre est dans la partie Nord et Nord-Ouest du bassin (Fig. 11).
évaluée à 46 t/ha/an (El Hage et al., 2018). L’application La carte des classes des pertes en sols moyennes an-
du modèle RUSLE dans le bassin de la rivière Tusciano de nuelle témoigne d’une grande fragilité de la partie est
la province de Salerne au sud-ouest de l’Italie a donné 57 et nord-est du bassin taillée dans les formations mar-
t/ha/an en moyenne (Zampoli, 2007), quant au sud-est de neuses, essentiellement dans les marno-calcaires et les
l’Espagne, l’application de l’USLE dans différents sous- marnes gréseuses miocènes où les valeurs supérieures à
bassins de la rivière Segura a entraîné des taux d’érosion 32 t/ha/an sont dominantes. Ces dernières concernent
élevés entre 30,2 et 80,4 t/ha/an en moyenne (Bermúdez, environ 34,5% de la superficie totale du bassin. Dans
2003; García-Ruiz, 2010). ce secteur les badlands sont considérablement déve-
En termes de répartition, la spatialisation des pertes loppés et permettent une production excessive de sédi-
en sols dans le bassin de l’Oued Lahdar en 2018 montre ments. Par ailleurs, les faibles pertes dominent surtout à
clairement que les pertes en sols supérieure à 32 t/ha/ l’amont du bassin, plus particulièrement dans les parties
an sont prédominantes occupant 210,4 km2 (34,5%) de Nord, Nord-Ouest et centrale où un matorral à base de
la superficie totale de la zone d’étude. Ce scénario très chênes verts renforcé par des reboisements à base de
grave est fort probablement lié à la propagation signifi- résineux couvre ces secteurs.

Figure 11 – Types
d’occupation des sols
dans le bassin versant de
l’Oued Lahdar : a) Matorral
dégradé renforcé par des
reboisements à base de
résineux; b) l’importance
de l’arboriculture et la
plantation par l’olivier et
l'amandier sur les pentes
pentues; c) le labour
extensive sur les marnes
miocènes (pentes >25%);
d) Badlands sur les marnes
miocènes, leur évolution
rapide par des processus
physico-chimiques permet
une production importante
de sédiments

Source: Elaboration par les


auteurs

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Figure 12 - Carte des pertes en sol établie par le modèle RUSLE Figure 13 - Carte des pertes en sol établie par le modèle RUSLE
pour l’année 1994 (t/ha/an) dans bassin versant de l’oued Lahdar pour l’année 2018 (t/ha/an) dans bassin versant de l’oued Lahdar

Source: Elaboration par les auteurs Source: Elaboration par les auteurs

Tableau 5 - Evolution des volumes des pertes en sol dans le bassin versant de l’Oued Lahdar entre les années 1994 et 2018

Classe des pertes Année 1994 Année 2018 Évolution 2000-2018


Superficie km 2
(%) Superficie km 2
(%) (%)
< 7 t/ha/an 60,60 9,9 58,56 9,6 -3,48
7 - 20 t/ha/an 204,64 33,5 189,98 31,1 -7,72
20 - 32 t/ha/an 155,36 25,4 151,56 24,8 -2,51
> 32 t/ha/an 190,90 31,2 210,40 34,5 +9,27
Total 611,50 100 611,50 100  

Source: Elaboration par les auteurs

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D’après le tableau 6 qui illustre la distribution spatio- gistrée dans les friches et les badlands. Ces derniers cor-
temporelle des pertes en terres en fonction des occu- respondent essentiellement à des sols très fréquents sur
pations des sols en 1994 et 2018, révèle nettement que des roches marneuses tendres ou le stade de l’érosion
les terrains incultes sont les zones les plus critiques en est très avancé, tel le cas des régosols et des sols peu
matière des pertes en sols, ils constituent une source évolués d’érosion faiblement protégés et situés sur des
principale de la production de sédiments dans le bassin sites, à fortes pentes qui dépassent souvent les 25 %. Les
de l’Oued Lahdar et ils restent toujours le premier four- terrains consacrés aux cultures annuelles et à l’arbori-
nisseur, avec des quantités impressionnantes 84,10 t/h/ culture sont également fortement décapés et érodés par
an en l’année 1994 et 89,11 t/h/an en l’année 2018. En l’érosion, ils produisent des quantités importantes de
outre, il montre que les pertes moyennes oscillent entre sédiments, avec des pertes moyennes annuelles respec-
8,55 t/ha/an comme valeur minimale évaluée dans les tives de 30,43 t/ha et 19,82 t/ha/an.
forêts et 89,11 t/ha/an comme valeur maximale enre-

Tableau 6 - Evolution des pertes en sols selon les types d’occupation du sol dans le bassin versant de l’Oued Lahdar (1994 et 2018)

Année 1994 Année 2018


Type d’occupation du sol Superficie km2 Superficie (%) Perte en sol Superficie Superficie Perte en sol
t/ha/an km2 (%) t/ha/an

Forêt/Reboisement 91,05 14,89 10,24 101,59 16,61 8,55


Arboriculture 61,07 9,99 24,52 125,00 20,44 19,82
Céréaliculture 407,30 66,61 36,71 308,00 50,37 30,43
Terrains Incultes 52,07 8,52 84,10 76,86 12,57 89,11

Source: Elaboration par les auteurs

Le rôle des activités humaines et des modes d’occupa- stade très avancé soit à des versants rocheux ou des
tion des sols constitue un élément important expliquant cônes rocailleux (Tribak, 2000). Cette catégorie est ca-
l’accélération ou la réduction des phénomènes érosifs ractérisée par la concentration des pertes > 20 t/ha/an,
et de leur répartition spatiale (Tribak et al., 2017). La ou elles occupent 37% dans la classe 20-32 et 55% dans
figure 14 qui illustrent la concentration des volumes la classe des pertes supérieure 32 t/ha/an. Ceci explique
des pertes par type d’occupation des sols montre clai- bien l’évolution importante de la classe supérieure à 32
rement que les terrains destinés aux cultures annuelles t/ha/an (Tableau 5). L’analyse de la distribution spatiale
sont potentiellement très fragiles vis à vis des proces- des pertes en fonction de l’occupation des sols (Fig. 14),
sus érosifs, ils demeurent pendant une bonne partie de montrent également que la classe des pertes (20-32 t/
l’année exposés directement aux agents météoriques. ha/an) se concentre relativement sur l’arboriculture et
Elles intéressent toutes les classes des pertes en sol, la forêts/reboisement, avec des taux respectifs de 30%
avec 61% pour la classe <7 t/ha/an, 34% pour la classe et 32%. Ceci est fort probablement lié à l’existence d’un
7-20, 33% pour la classe 20-32 et de 33% ou les pertes matorral très dégradée et d’une arboriculture des zones
dépassent 32 t/ha/an. Les terres incultes regroupent les marginales situées sur des sols peu évoluée et des pentes
terrains réservés aux parcours, correspondant à des por- très fortes dépassant souvent 25%.
tions de versants inutilisables dans l’agriculture, elles
englobent des terrains franchement stériles qui corres-
pondent soit à des badlands où l’érosion a atteint un

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Figure 14 - Concentration
des pertes en sols (t/ha/
an) par type d'occupation
des sols

Source: Elaboration par les


auteurs

Par ailleurs, on note que 62% de la classe des pertes souligner que la production de ces quantités de pertes
7-20 t/ha/an correspond nettement, au niveau des oc- varie énormément d’un secteur à l’autre, de sorte qu’une
cupations des sols, aux forêt/reboisement très dense opposition plus ou moins nette sépare la zone sud de la
tout d’abord et ensuite aux terrains destinés à l’arbo- zone nord. Les secteurs hautement affectées par le risque
riculture sur l’ensemble de la zone d’étude. Cette situa- d’érosion correspondant particulièrement aux terrains
tion explique bien la diminution de la surface occupée incultes extensibles en pente (terres abandonnés et Bad-
par cette classe. Cependant, les faibles pertes <7 t/ha/an lands) où dominent des régosols et des sols peu évolués
dans le bassin de l’Oued Lahdar, correspondant essen- d’érosion développés sur des marnes miocènes. Les bad-
tiellement à des terrains boisés ou des terrains en faible lands constituent la principale source d’énormes quanti-
pente où dominent des cultures annuelles associées gé- tés de sédiments dans la zone d’étude. L’extension de la
néralement à l’arboriculture. surface des terres incultes et des badlands s’explique par
l’abandon de certains secteurs, qui constitue un phéno-
mène récent lié au processus de dépeuplement rural dans
5. Conclusion ce territoire rifain. Par ailleurs, l’extension spatiale de
l’arboriculture, qui profite grandement de l’espace sur la
L’étude diachronique et la cartographie de l’occupation majorité des terrains, reste un moyen important de lutte
du sol à partir des données de télédétection d’une part, contre le risque de l’érosion surtout sur certains versants
et l’évaluation quantitative de l’érosion hydrique dans fortement pentus de l’Oued Lahdar. Cette augmentation
le bassin de l’Oued Lahdar par le modèle RUSEL d’autre importante de l’arboriculture s’explique par la fréquence
part, illustrent une grande fragilité environnementale de des projets d’implantations intense d’oliviers pour le dé-
ce milieu. L’intensité de l’érosion hydrique dans ce bassin veloppement du secteur agricole dans la région. Ils ont
est expliquée par la prédominance des terrains marneux, été présentés comme une technique de lutte contre l’éro-
la concentration des pluies extrêmes et la surexploitation sion et la valorisation des terres agricoles et une aide
des terres combinée à la déforestation des pentes raides. à la sédentarisation et la fixation des populations dans
Les pertes de sols énormes enregistrées chaque année les zones de montagne. En outre, la fréquence du pro-
montrent ainsi, une combinaison de facteurs naturels cessus de reboisement, qui est en tendance d’augmenta-
et anthropiques. Elles reflètent l’importance de l’érosion tion marquante, constituent un régulateur important du
accélérée dans le bassin et la contribution des différents régime érosif en particulier dans le secteur nord et nord
facteurs précédemment analysés. Néanmoins, il reste à Ouest du bassin de l’Oued Lahdar.

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