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BDSM
Les règles du jeu
Avant-propos
Regardez autour de vous les gens que vous côtoyez chaque jour, au travail
ou dans vos loisirs. Vous les rencontrez dans leur quotidien. Vous les jaugez
à partir d’un commentaire, d’un sourire, d’une discussion. Vous vous faites
vite une idée sur eux, sur le genre de vie qu’ils mènent. Eh bien, sauf cas
d’improbabilité statistique, vous pouvez compter qu’au moins une ou deux
personnes parmi ces connaissances qui forment votre entourage pratiquent
le BDSM… et il ne s’agit pas nécessairement de celles qui vous seraient
venues en tête en premier!
Le BDSM est un ensemble de jeux sexuels caractérisés par l’érotisation
de la douleur et de ce qu’on appellera dans ce livre l’échange de pouvoir.
Quand on parle de BDSM, les néophytes s’imaginent des fouets, du cuir et
des chaînes. C’est en effet l’image la plus répandue dans les médias et dans
les œuvres de fiction. Mais le BDSM va bien au-delà de ces accessoires. Il
est structuré autour d’une communauté d’adeptes dont les pratiques
calculées, négociées et consenties fondent l’univers érotique. Le BDSM est
donc beaucoup plus complexe et réfléchi qu’il n’y paraît. Et, bien entendu,
en raison de la réprobation sociale dont il est l’objet, bien peu d’adeptes
courront le risque de se dévoiler en corrigeant les idées reçues.
Durant mon année d’observation intensive, j’ai compilé les noms de scène
de toutes les personnes que j’ai rencontrées, dans la mesure du possible. J’ai
ensuite retrouvé leur profil sur FetLife et recueilli quelques informations sur
chacune d’entre elles: sexe, âge, rôle dans le BDSM, orientation sexuelle,
région de résidence. J’ai compilé ces données dans un programme
d’analyse, puis effectué quelques tests statistiques me permettant de dresser
un portrait de cet échantillon de la communauté. Ces données m’ont
essentiellement permis d’avoir un aperçu du type d’adeptes du BDSM qui
participent aux soirées.
Quand je me suis retrouvée face aux données en tout genre que j’avais
pu recueillir avec le temps, un constat a émergé. J’avais développé une
compréhension assez approfondie du «comment», mais très superficielle du
«pourquoi». Pourquoi les gens s’engagent-ils dans des relations BDSM?
Comment en arrivent-ils là? Découvrent-ils leur penchant par hasard, ou
est-il présent en eux depuis l’enfance? Ces questions sans réponses m’ont
amené à donner la parole directement aux adeptes. J’ai contacté
personnellement une quarantaine de personnes avec qui j’avais eu de bons
liens lors de ma période d’observation, et je leur ai posé cinq questions très
larges sur leur expérience du BDSM. Leurs réponses m’ont permis de
mieux comprendre leur expérience et leurs motivations. Des extraits sont
présentés à quelques endroits du présent ouvrage.
Instruire n’est pas enseigner. Les lecteurs intéressés pourront sans doute
trouver des trucs et des astuces dans ce livre, mais il n’est pas un guide qui
expliquerait comment intégrer le BDSM à sa vie, ou comment le pratiquer.
Il n’est pas, on l’aura compris, une condamnation du BDSM, mais il n’est
pas non plus une célébration de ses pratiques. En revanche, il n’aborde
jamais la question du sadisme sexuel dans un contexte non consensuel. J’ai
voulu exposer le BDSM sous toutes ses formes en partant d’un postulat de
neutralité, et l’absence de consentement, comme on le verra, n’est pas du
BDSM.
Évidemment, le BDSM étant un fait social, sa description est sujette à
une interprétation constante. Un même acte ou concept peut être défini
complètement différemment d’un adepte à l’autre, leurs expériences et
écoles de pensée modelant leur interprétation. Ainsi, je ne saurais prétendre
détenir la vérité sur le BDSM; mon interprétation des faits est basée sur
mon expérience d’observation dans la communauté montréalaise (ainsi que
sur différentes lectures). Il est donc possible que certaines personnes ne se
reconnaissent pas dans mes descriptions, mais mon objectif a été de tenter
de représenter la vision la plus consensuelle et généralisée du phénomène. Il
me paraît néanmoins important de souligner qu’il existe plusieurs sous-
cultures ou sous-communautés parallèles à la communauté BDSM
mainstream, par exemple les communautés cuir, fétichiste et queer, sans
compter les groupes axés sur des pratiques spécifiques. Évidemment, il
m’est impossible de représenter chacune d’entre elles. Ainsi, des variations
peuvent survenir entre les constats que je fais et le vécu d’adeptes que je
n’aurais pas rencontrés ou dont les pratiques n’auraient pas été
documentées dans les ouvrages à ma disposition.
Afin de respecter les us et coutumes de la communauté, le vocabulaire
du milieu ainsi que les façons d’écrire certains termes ont été conservés.
Ces précisions apportées, il ne me reste plus qu’à vous inviter à
découvrir ce monde méconnu, en laissant de côté ce que vous croyez en
savoir.
1
L’ABC DU BDSM
Sadomasochisme et littérature
On retrouve des représentations du sadomasochisme dans la littérature
libertine des XVIIIe et XIXe siècles. On reconnaîtra, réunis dans le mot, les
noms du «divin marquis» Donatien Alphonse François de Sade (1740-1814)
et de Leopold von Sacher-Masoch (1836-1895), mais d’autres écrivains les
ont précédés. Ce sont toutefois les auteurs de Justine ou Les malheurs de la
vertu et de La Vénus à la fourrure qui ont le plus marqué le milieu du
BDSM. Leurs œuvres sont utilisées encore aujourd’hui comme base de la
fantasmatique et des pratiques BDSM.
Sade est connu pour ses scènes littéraires extrêmement… sadiques et
violentes. Dès son jeune âge, il a été maintes fois accusé d’être un
profanateur de tombeaux (!) et un sodomite, charges qui le firent
régulièrement emprisonner. C’est pour se désennuyer qu’il a rédigé dans sa
geôle la majorité de son œuvre de littérateur et de philosophe. Celle-ci
dépeint un côté sombre de la nature humaine en mettant en scène la
violence sexuelle, la pédophilie, la torture et la souffrance dans un langage
fluide et poétique. Au cœur de l’érotisme sadien, il y a le spectacle de
l’infliction de la douleur. Justine (1787), pour ne prendre que ce titre en
exemple, relate les mésaventures d’une jeune héroïne qui, tout au long du
livre, ne s’évade de l’emprise d’un bourreau que pour se retrouver encore
plus maltraitée par un autre.
Un siècle plus tard, l’autrichien Sacher-Masoch a fait l’éloge de ce qu’on
connaît aujourd’hui comme étant le masochisme. Dans La Vénus à la
fourrure (1870), il représente la femme belle, puissante et castratrice, et
l’homme désireux de se faire torturer et humilier par elle. On découvre,
dans ses Choses vécues (1888), qu’il était lui-même un grand masochiste. Il
y décrit qu’à 10 ans, lui qui vouait à sa tante une admiration languissante fut
surpris par elle alors qu’il l’espionnait en train de tromper son mari:
«Comment! Tu étais caché? Tiens, voilà qui t’apprendra à faire l’espion!» Je m’efforçai en vain
d’expliquer ma présence et me justifier: en un clin d’œil elle m’eut étendu sur le tapis; puis, me
tenant par les cheveux de la main gauche, et me posant un genou sur les épaules, elle se mit à
me fouetter vigoureusement. Je serrai les dents de toutes mes forces; malgré tout, les larmes me
montèrent aux yeux. Mais, il faut bien le reconnaître, tout en me tordant sous les coups cruels de
la belle femme, j’éprouvais une sorte de jouissance.
Il est important de noter que la plupart des scènes décrites dans les
ouvrages des deux pères littéraires du sadomasochisme n’ont rien à voir
avec les pratiques du BDSM consentant, le seul qui fait l’objet de ce livre –
et le seul qui mérite de porter ce nom.
Sadisme et masochisme
comme perversions sexuelles
Plusieurs théories existent quant à l’identité de l’auteur originel des termes
«sadisme» et «masochisme». Toutefois, il est clair qu’ils ont été popularisés
par le psychiatre allemand Richard von Krafft-Ebing, qui a utilisé les
ouvrages de Sade et de Sacher-Masoch pour son étude des perversions
sexuelles. Dans Psychopathia sexualis (1886), il utilise le terme sadisme
pour décrire l’expérience de sensations sexuelles plaisantes provenant
d’actes de cruauté ou de punitions corporelles infligées sur soi ou sur autrui.
Il présente le masochisme comme étant le contraire du sadisme et le décrit
comme le désir d’être forcé, humilié, blessé ou abusé par autrui. Quelques
années plus tard, le sexologue Havelock Ellis (1859-1939) expliquera que le
sadisme et le masochisme sont en fait des états émotionnels
complémentaires, plutôt qu’opposés. Il avancera que le sadisme ne serait
pas une affaire de cruauté, mais que la douleur infligée serait avant tout une
source de plaisir sexuel.
Il semble que ce soit Sigmund Freud qui ait combiné pour la première
fois les concepts de sadisme et de masochisme dans le terme
«sadomasochisme» en argumentant que les deux concepts sont présents à la
fois chez l’individu. Cette combinaison a indéniablement engendré une
meilleure compréhension du phénomène et a propulsé une identification des
adeptes à la sous-culture du sadomasochisme.
Le sadomasochisme médiatisé
Depuis la deuxième moitié du XXe siècle, plusieurs grandes études sur la
sexualité (Kinsey, Masters et Johnson, Janus et Janus, etc.) ont permis de
dépeindre le sadomasochisme non pas comme une perversion sexuelle rare,
mais plutôt comme une pratique sexuelle relativement répandue dans la
population. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, ou
DSM-V, qui est l’ouvrage de référence en Amérique du Nord pour
catégoriser et traiter les troubles mentaux, définit maintenant le sadisme et
le masochisme sexuels comme des paraphilies, ou pratiques sexuelles
anormales, lorsque ces pratiques sont à l’origine de souffrances
cliniquement significatives ou d’un dysfonctionnement interpersonnel ou
social. Les pratiques sadomasochistes consenties et ludiques seraient donc
écartées, depuis quelques années seulement, de la loupe psychiatrique.
Le sadomasochisme a longtemps été perçu et vécu comme une
perversion secrète et mystérieuse. Pour rencontrer des personnes
intéressées, il fallait être introduit dans un cercle d’initiés. La médiatisation
des sociétés modernes et, plus récemment, l’apparition d’Internet ont fait en
sorte que le sadomasochisme est beaucoup plus visible, même pour ceux
qui ne tiennent pas à en savoir plus sur le sujet. Même si elles sont parfois
mal représentées, les pratiques BDSM se retrouvent de plus en plus dans les
émissions télévisées, au grand écran, dans la pornographie et dans les
vidéoclips. Dans les dernières années, la trilogie Cinquante nuances de
Grey de E. L. James a suscité l’intérêt de millions de personnes non initiées
aux pratiques de nature BDSM – malgré la grogne des adeptes, qui
soutiennent que les pratiques dépeintes dans les romans en question ne sont
pas du tout représentatives de leur réalité.
Ainsi, depuis les premières apparitions des pratiques BDSM dans les
médias populaires, l’intérêt envers le BDSM comme activité ludique est allé
grandissant; malgré la persistance de la stigmatisation, les adeptes
«s’assument» de plus en plus, et les communautés BDSM sont de plus en
plus visibles.
Il est naturel d’être intrigué par ceux qui investissent temps et argent dans
des pratiques aussi marginales et mal perçues socialement que celles du
BDSM. Car ne l’oublions pas, si la grande majorité des adeptes ne rendent
pas publique leur adhésion à la communauté, c’est parce qu’ils ont
beaucoup à y perdre: leur emploi, l’affection de leurs amis ou de leur
famille, voire la garde de leurs enfants. Qui sont donc ces gens qui osent
vivre une passion qui peut leur nuire?
La scène de Montréal
Au-delà des études, qui sont donc ceux qui, par centaines, se retrouvent
dans les soirées BDSM? D’un auteur à l’autre, les descriptions des adeptes
varient, ce qui laisse croire qu’il y aurait des différences d’une communauté
(ou d’une scène) à l’autre. Dans le cadre de la recherche effectuée pour mon
mémoire, j’ai rencontré beaucoup de personnes qui ne me semblaient pas
toujours correspondre aux descriptions que j’avais lues. C’est pourquoi j’ai
compilé les informations disponibles sur le profil en ligne de 272 adeptes
rencontrés durant mon année d’observation afin de mieux illustrer leurs
caractéristiques. Il faut noter que la description qui va suivre est un aperçu
d’une portion visible d’une communauté, effectué à un moment, dans un
lieu et dans un cadre précis. En outre, elle ne tient pas compte des adeptes
qui ne pratiquent pas le BDSM en communauté.
On trouve des gens de tous les âges dans la communauté montréalaise.
La personne la plus jeune que j’ai rencontrée avait 20 ans et la plus âgée, 82
ans. La moyenne d’âge des participants était de 39 ans et la majorité avaient
entre 28 et 50 ans. Comparativement à d’autres études qui rapportent un
nombre beaucoup plus élevé d’hommes que de femmes, la proportion dans
la communauté montréalaise est presque d’un pour un: 51% des adeptes se
présentaient comme des hommes, 45%, comme des femmes, et 4% se
présentaient comme appartenant à un autre genre (travesti, transsexuel ou
fluidité de genre). Huit sur dix disaient résider dans la grande région de
Montréal, 15% vivaient ailleurs au Québec et 4% venaient de l’extérieur de
la province pour fréquenter les soirées montréalaises.
À peu près la moitié des adeptes se décrivaient comme étant
hétérosexuels, soit 70% des hommes, mais seulement 22% des femmes. La
proportion de personnes s’identifiant à une forme d’homosexualité restait
toutefois faible: seules 3% des femmes se disaient lesbiennes, et aucun
homme gai n’a été rencontré. La communauté BDSM gaie organise des
soirées spécifiques et se mélange assez rarement avec la communauté dite
mainstream. Néanmoins, 27% des femmes et 21% des hommes se
considéraient d’orientation hétéroflexible, c’est-à-dire principalement
hétérosexuels, mais pouvant à l’occasion avoir des contacts sexuels avec
des personnes du même sexe. Finalement, l’orientation bisexuelle était
revendiquée par le quart de l’échantillon: 38% des femmes et 6% des
hommes.
La proportion quasi égale d’hommes et de femmes suggère que les
adeptes vont plus fréquemment dans les soirées montréalaises en couple, ce
qui fait en sorte qu’il y a moins d’hommes seuls, contrairement aux autres
communautés décrites dans les ouvrages sur le sujet. Plusieurs font le
voyage de loin, notamment de Québec ou de l’Ontario, pour se rendre aux
soirées. Malgré la faible représentativité de la communauté en matière
d’homosexualité, le taux d’identification à des orientations sexuelles qu’on
peut définir comme alternatives au binôme hétérosexuel-homosexuel est
sans conteste plus élevé que dans la population générale. Cela suggère une
grande flexibilité dans l’attirance sexuelle des adeptes, particulièrement
chez les femmes.
LES MOTIVATIONS
Le questionnement devant l’inconnu est normal, mais force est de constater
que le BDSM est bien plus intrigant que bien d’autres loisirs extrêmes.
Qu’est-ce qui pousse donc les gens à se tourner vers cette forme de
sexualité? Quand on les interroge, les adeptes font ressortir des motivations
de plusieurs ordres, dont les plus saillantes sont le plaisir, le sentiment
d’être connecté à son partenaire, le fait d’échapper au quotidien, et parfois
l’expression irrépressible de leur identité.
Le plaisir
La question du plaisir est centrale; après tout, c’est l’objectif même du
BDSM. Toutefois, quand les adeptes font référence à cette notion, leur
définition est assez éloignée de celle qu’on utilise quand on parle de sexe
«vanille» – c’est-à-dire de sexe non-BDSM. Le plaisir dans les jeux BDSM
se vit à plusieurs niveaux.
Le BDSM étant axé sur la sexualité, le plaisir érotique et sexuel est
central dans les motivations des participants. Toutefois, il n’est pas
seulement question ici d’excitation sexuelle ou d’orgasme. Les jeux BDSM
comptent parmi les rares pratiques sexuelles à ne pas être entièrement
génitalisées: ils ne sont pas exclusivement, ni même principalement,
concentrés sur les organes génitaux. L’excitation est généralement diffusée
dans l’entièreté du corps et du psychisme; elle est physique, mentale,
émotionnelle et, pour certains, spirituelle. Selon certains participants, une
excitation sexuelle aussi répandue engendrerait des orgasmes – car il y en a
– beaucoup plus intenses que lorsque la stimulation n’est que génitale. De
plus, les outils et les techniques de jeu utilisés dans le BDSM permettent
d’aiguiser les sens. Le fait d’être attaché, d’avoir les yeux bandés ou de
donner le contrôle de soi à l’autre engendrerait, chez le joueur, le sentiment
d’avoir la liberté de vivre des sensations «pures» parce que dénuées de
contraintes normatives. Le corps deviendrait plus alerte et l’esprit, plus
ouvert.
En somme, l’individu trouverait l’espace physique et mental nécessaire
pour vivre la stimulation de ses sens à son niveau le plus intense. Beaucoup
de joueurs expliquent qu’après avoir goûté au sexe BDSM, le sexe vanille
était devenu un peu fade. Plusieurs joueurs ont néanmoins aussi une
sexualité vanille, souvent plus importante en fréquence que leurs rapports
BDSM, qui nécessitent plus de temps et d’organisation. Il reste que selon
les joueurs les plus aguerris, rien ne peut se comparer à la sexualité BDSM
en termes d’intensité du plaisir érotique et sexuel.
On peut voir en outre chez les participants une réaction physique très
intense durant et après une scène BDSM. Cette réaction est plus souvent
présente chez le soumis, mais elle peut apparaître chez le Dominant,
généralement dans une situation où ce dernier se sent très «connecté» aux
émotions du soumis. Un afflux d’hormones envahit le corps du joueur: on y
trouve sans doute de l’adrénaline, sécrétée en réponse à la stimulation
physique ou à la «peur» de l’inconnu (l’anticipation crée une forme
d’excitation, le soumis ne sachant pas ce qui va lui arriver, ni quand), et des
endorphines, sécrétées en réponse à l’excitation sexuelle, à la douleur
érotique ou à l’orgasme. Quoi qu’il en soit, le cocktail hormonal est si
intense que plusieurs joueurs comparent le BDSM à une drogue. Ce high
naturel, qui doit être comparable à ce que ressentent les habitués des sports
extrêmes, ne se retrouve pas vraiment ailleurs dans la sexualité; quand ils
expliquent ce qu’ils ressentent lors d’une séance, les adeptes parlent
d’euphorie, d’extase voire de transcendance. Certains comparent en effet
cet état à celui que procure la méditation. Cette réaction physique très
addictive est sans doute ce qui rend la douleur érotique aussi attirante pour
la plupart des joueurs.
Au-delà des seuls sens, une scène BDSM est généralement circonscrite
dans le cadre plus large de la relation entre les partenaires. Leurs désirs et
les fantasmes les plus profonds sont partagés, puis mis en scène. Ainsi, le
rapport BDSM n’a pas pour seule fin l’orgasme ou la jouissance, mais
l’accomplissement d’un fantasme, l’abandon, le dépassement de soi, la
gratification, etc. Ces buts ne sont pas atteints aussi facilement qu’on
pourrait le croire. Par exemple, en Ds, un laisser-aller exceptionnel est
nécessaire de la part du soumis pour permettre au Dominant de prendre
entièrement le contrôle. Le mélange entre le lâcher prise, le plaisir sexuel
intense et la connexion avec le partenaire entraîne chez les joueurs un
relâchement émotionnel et psychique qui est suivi d’un sentiment de
légèreté, de bien-être et de plénitude. Une séance intense peut même parfois
susciter des larmes chez le soumis, tant ce sentiment de relâchement et de
paix intérieure le submerge.
Certains joueurs disent utiliser les pratiques BDSM pour atteindre des
buts thérapeutiques assez classiques, comme un travail sur leurs peurs ou
inconforts. Le jeu pourrait aussi, semble-t-il, être une source de «croissance
personnelle et spirituelle» en permettant aux joueurs de se découvrir, de
s’explorer, de se voir sous une autre lumière.
On comprend donc que le plaisir engendré par le BDSM s’exprime à
plusieurs niveaux. Son intensité est variable, selon le partenaire, le
déroulement de la séance et le moment. Chose certaine, il est une
motivation centrale pour les adeptes.
Pour moi, le BDSM est une autre manière, beaucoup plus longue et intense d’avoir des relations
sexuelles. J’adore cette intensité, la panoplie de sensations, l’effet psychologique, le détachement
du quotidien, l’excitation, et l’endorphine que me procure une séance à saveur BDSM.
Homme, 26 ans, switch
Je pratique le BDSM pour l’effet enivrant et excitant que m’apporte le fait d’avoir le contrôle sur
la personne consentante devant moi.
Homme, 50 ans, Dominant
J’adore la dimension d’être le professeur, le mentor, celui qui entraîne les petites à mieux servir
et plaire. J’aime le cheminement émotif et cérébral que je dois faire avec la personne soumise
pour l’aider à s’abandonner et évoluer.
Homme, 51 ans, Maître
Une évasion
Le BDSM est pour beaucoup d’adeptes une manière de s’extraire de leur
train-train quotidien. Le temps d’une scène, on entre dans un rôle en
mettant de côté les règles qui nous dictent ordinairement comment agir. Le
but unique est d’avoir du plaisir, de jouer, littéralement. Le BDSM, quand il
est pratiqué dans les règles de l’art, permet aux adeptes d’exprimer des
facettes de leur personnalité qui ne peuvent pas l’être dans le monde social
ordinaire, de dire qui ils sont et ce qu’ils veulent, et d’agir comme ils le
veulent. Certains joueurs avancent que les êtres humains ont tous un côté
sombre, et qu’ils aiment tous jouer avec le pouvoir et le contrôle; le BDSM
offre un contexte sûr et bien circonscrit où l’on peut jongler avec ces
aspects peu explorés de qui nous sommes.
Dans ma vie vanille, j’ai beaucoup de responsabilités. Je suis celle qui domine à tous les niveaux,
que ce soit au travail, avec les enfants ou à la maison. Pour moi, le jeu permet de lâcher les
rênes. De ne plus avoir à me poser de questions. Je me remets entièrement aux mains de la
personne en qui j’ai confiance. Je lâche prise, je m’abandonne et je savoure les sensations qui me
sont données. J’adore franchir les limites que la société et mon rôle m’imposent dans la vie de
tous les jours. Mettre des talons dignes des filles de la rue Sainte-Catherine, porter un corset, des
jupes trop courtes et des stay-ups… c’est un bon départ. Je me permets, dans ces moments, de
braver tous les interdits.
Femme, 36 ans, soumise
Imaginez-vous manger du gruau nature jour après jour. Un jour, vous goûtez à une pizza couverte
d’ingrédients que vous adorez. Vous en remangerez sûrement de temps en temps, puisque vous
avez aimé. Le gruau, c’est le quotidien. Le travail, le sommeil, la télé… La pizza, c’est le BDSM,
avec ses sensations et ses plaisirs hors de l’ordinaire.
Homme, 26 ans, switch
Le BDSM m’amène un équilibre personnel et calme mes ardeurs, qui ne sont pas considérées
comme «standard» par la société. C’est ma porte de sortie pour ventiler. Mon besoin de contrôle,
de domination, et mon trip de sadisme, je peux les vivre de manière saine et contrôlée avec une
personne qui a accepté ces penchants et qui a des besoins qui comblent les miens.
Femme, 35 ans, Maîtresse
Choix ou identité?
La place qu’occupe le BDSM dans la vie des adeptes est variable. Certains
joueurs le considèrent comme un loisir qui ne les définit pas au plus
profond d’eux-mêmes. Selon eux, ce plus à leur vie sexuelle pourrait
facilement être mis de côté s’ils le décidaient. Ces joueurs vont avoir
tendance à chercher des partenaires qui apprécient le BDSM, sans que ce
soit nécessairement un critère décisif. Ils seront heureux d’initier un
nouveau partenaire au monde du BDSM, si ce dernier est intéressé. C’est
souvent ainsi qu’ils auront eux-mêmes découvert cet univers.
Je ne suis pas fétichiste et je peux vivre sans BDSM. Le BDSM est le chocolat de ma vie sexuelle.
Je peux m’en passer, mais c’est tellement bon…
Femme, 60 ans, Dominante
J’ai rencontré un gars qui m’a parlé d’entrée de jeu du BDSM. Je n’en avais jamais entendu
parler et je n’avais même jamais eu de fantasme du genre. Par contre, j’avais depuis longtemps
envie de mettre un peu de piquant dans ma vie sexuelle et de sortir de ma zone de confort. J’avais
envie d’être une autre, de temps en temps.
Femme, 36 ans, soumise
J’ai toujours averti mes compagnes que s’il n’y avait pas au moins 50% de BDSM dans notre
relation, il n’y aurait plus de couple. Ça m’a coûté quelques cœurs brisés, mais aujourd’hui, je
suis heureux d’avoir finalement trouvé ma femme, ma soumise.
Homme, 50 ans, Dominant
J’ai découvert mon attirance pour le BDSM dans ma petite enfance. Je ne faisais pas du BDSM
proprement dit, de manière consciente et saine, mais mes premières expériences remontent à ce
temps-là.
Femme, 37 ans, Maîtresse
C’est une facette de moi qui m’habite, qui me définit en partie et qui fait qui je suis.
Femme, 41 ans, en évolution
Soumettre, battre, avilir, humilier une femme, ça m’a toujours attiré. C’est viscéral, c’est en moi.
Homme, 44 ans, Dominant
LES RÔLES
Le BDSM est une mise en scène érotique où, à de très rares exceptions près,
chaque partenaire tient un rôle précis, associé à des attentes et à des
responsabilités prédéterminées. En adoptant un rôle, l’adepte signale à ses
partenaires la position qu’il va adopter dans le jeu, ainsi que la manière dont
il agira.
Il y a à peine vingt ans, on ne trouvait sur la scène SM que les rôles du
Dominant et du soumis. L’arrivée d’Internet, la plus grande visibilité
médiatique des pratiques et l’élargissement de la communauté SM au
BDSM ont engendré une diversification des rôles. Aujourd’hui, on en
dénombre une vingtaine, dont la définition peut varier selon les
communautés. La section qui va suivre présente les rôles les plus répandus
en les divisant en quatre grandes catégories: domination, soumission, rôles
versatiles et rôles qui ne sont pas associés à un échange de pouvoir.
1. Notons ici encore que le terme est employé dans son acception courante sur la scène BDSM, et
non pas au sens psychanalytique ou psychiatrique. Cette remarque vaut aussi pour les rôles
masochiste et fétichiste, évoqués plus loin.
3
LE JEU
Le ligotage
Le ligotage a pour objectif de restreindre physiquement les mouvements du
soumis. Il peut se faire debout, au sol, sur un meuble ou même en
suspension. On peut emballer le corps, restreindre un ou plusieurs membres
ou encore attacher le soumis à un objet ou à une autre personne. Le ligotage
peut être délicat et fondamentalement esthétique, tout comme il peut être
lourd, complexe et très limitant. Il peut être sexualisé en étant concentré sur
les organes génitaux, où la tension, la friction ou un jeu de balance peut
causer l’excitation (par exemple, si le soumis relâche sa posture, la corde
enserre plus fort ses organes génitaux). Le ligotage peut être intégré à une
scène complexe comportant d’autres jeux, par exemple dans le cadre d’une
séance d’humiliation, d’exhibition ou de jeux de douleur érotique, mais
constitue souvent une pratique en soi, prisée pour le sentiment de restriction
qu’elle engendre, que certains trouvent enivrant. Il est fréquemment couplé
à des jeux de discipline où le soumis se retrouve face à des instructions
paradoxales, comme maintenir la posture demandée dans une situation
d’humiliation, d’inconfort physique ou encore, de stimulation sexuelle. On
peut diviser les pratiques de ligotage en trois catégories: bondage japonais,
bondage Western et, de manière plus générale, restriction des mouvements.
Le bondage japonais (shibari ou kinbaku) est une technique de ligotage
basée sur l’hojōjutsu, un art martial qui existe depuis des siècles et
consistait à l’origine à capturer et à transporter un prisonnier. Dans le
bondage japonais, le corps est enveloppé de cordes de manière à restreindre
le mouvement, mais aussi à dessiner des formes, qui sont souvent
agrémentées de rosettes décoratives. Aucun nœud n’est employé pour
former les figures; le seul contact des cordes permet de créer des arrêts à
l’aide de boucles (des loops). Des cordes de fibres naturelles (chanvre, jute)
sont utilisées parce qu’elles sont suffisamment flexibles pour ne pas limiter
les figures, mais suffisamment rugueuses pour rester en place. Les cordes
en fibres naturelles ont aussi une odeur et une texture particulières, que
beaucoup érotisent. D’ordinaire, le bondage japonais ne s’improvise pas; les
joueurs suivent des formations, consultent des ouvrages ou sont
accompagnés par un mentor qui excelle dans cette pratique.
Les possibilités du bondage japonais sont vastes. Il peut être décoratif,
c’est-à-dire ne pas restreindre le mouvement, mais simplement parer le
corps de cordes, comme un corset ou une brassière: même si les gestes du
soumis ne sont pas physiquement limités, la sensation de contrainte reste
présente. Le bondage peut aussi être légèrement restrictif, avec seulement
certains membres ligotés, les avant-bras au torse ou les bras derrière le dos,
par exemple. Il peut être très limitatif, avec une restriction totale ou quasi
totale des mouvements du corps: on ligote par exemple les mollets aux
cuisses, ou les cheveux aux pieds. Le bondage peut enfin être réalisé en
suspension. Cette dernière technique nécessite des matériaux spéciaux et
une formation avancée. Une fois le corps complètement ligoté, la personne
peut être bercée délicatement, forcée dans certaines positions, stimulée
sexuellement, «torturée», ou encore, laissée à elle-même, selon l’effet
escompté. Les grands adeptes de bondage, souvent appelés rope bunnies,
considèrent la pratique comme étant complète et satisfaisante en soi, et ne
ressentent pas nécessairement le besoin de l’assortir d’autres jeux ou
stimulations.
Dans le bondage japonais, le processus de ligotage est au moins aussi
important que le résultat final. La pratique est considérée comme méditative
et spirituelle par certains, un peu comme le serait une séance de yoga. Pour
la personne ligotée, c’est une expérience de captivité sensuelle, un moment
où elle ne peut qu’accepter son état d’impuissance et de vulnérabilité. Cet
état de captivité se traduit souvent par un lâcher-prise total, l’abandon de
tout contrôle, le sentiment d’être complètement pris en charge par l’autre et
d’être en sécurité dans ses cordes. L’immobilisation peut être un moment
profond de soumission, de sérénité, ou de connexion à soi-même ou à
l’autre. Certains y trouvent aussi un relâchement de toute la tension
physique, émotionnelle et érotique accumulée. Dans la suspension, où le
corps ligoté du soumis ne touche pas le sol, le rapport à la gravité est
complètement altéré, la personne a l’impression de flotter, ce qui peut créer
un effet de relaxation presque hypnotique.
Le style Western est le pendant occidental du bondage japonais. Il utilise
des cordes de différentes textures et couleurs (coton, nylon, polypropylène)
ainsi qu’un système de nœuds restrictifs ou décoratifs pour maintenir en
place le ligotage. Si n’importe quel type de corde peut en principe être
utilisé, celle-ci ne doit être ni trop mince (afin d’éviter de couper la
circulation) ni trop rugueuse (pour ne pas écorcher la peau) ni trop lisse
(pour maintenir les nœuds en place). Pour peu que ces recommandations
soient suivies, le bondage Western, qui s’apprend plus rapidement que le
bondage japonais, se prête bien à l’improvisation. Il sert plus fréquemment
que son cousin dans le cadre d’une scène plus large, par exemple pour
attacher les pieds du soumis aux barreaux d’un lit. Il peut aussi constituer le
cœur d’une scène, mais l’aspect spirituel et méditatif est plus présent dans
la pratique du bondage japonais.
De façon plus générale, la restriction des mouvements peut recourir à
une diversité d’objets autres que la corde. L’utilisation d’un matériau
particulier, par exemple le cuir, peut correspondre à un fétiche du joueur.
Des menottes en cuir ou en métal (et même les menottes en fourrure du sex-
shop du coin) peuvent être mises aux poignets et aux chevilles. Certains
bracelets à attache ont le même effet. Des barres d’écartement de différentes
longueurs peuvent aussi être employées pour forcer une distance entre les
pieds ou les mains du soumis. Il s’agit généralement d’un bâton de bois
recouvert de cuir dont les extrémités comportent des attaches. Certains
harnais de cuir et parfois de métal sont également conçus pour la restriction
des mouvements. Il en existe pour la tête, les bras, les jambes, le torse et les
organes génitaux masculins. Une camisole de force peut également servir.
Nombre d’objets et de matières, rares ou courants, peuvent servir à
maintenir le corps dans la position désirée: chaînes, rubans, foulards, bas de
nylon, cravates, ceintures, bandes élastiques, sex sling, pellicule plastique,
attaches autobloquantes, soie dentaire… L’imagination et la sécurité des
joueurs sont les seules limites à leur créativité.
La restriction mentale
La restriction du corps peut aussi s’opérer mentalement, que ce soit de
façon verbale ou écrite. Le jeu consiste alors à imposer une posture au
soumis, qu’il devra la maintenir même si aucun objet ne l’empêche de
bouger. Par exemple, le Dominant peut demander au soumis d’écarter les
jambes et de les garder immobiles alors qu’il le stimule avec un vibrateur.
La restriction mentale peut aussi viser les actions du soumis, par exemple
exiger de lui qu’il ne regarde pas quelque chose ou quelqu’un, qu’il ne parle
pas, qu’il ne dorme pas, qu’il n’aille pas à la salle de bains. Elle peut servir
à l’humiliation ou à l’exhibition, à mettre à l’épreuve la volonté du soumis,
à l’agacer ou à instaurer une dominance.
La privation sensorielle
La privation sensorielle consiste à confisquer au soumis l’usage d’un ou de
plusieurs sens. Son attention se reporte alors sur ses sens restants: la
perception des textures, des odeurs, des sons, du contact avec la peau, etc.,
s’en trouve exacerbée. La privation sensorielle augmente le mystère d’une
scène, ce qui permet d’accroître la tension érotique et l’anticipation chez le
soumis. Certains l’utilisent aussi pour se dissocier du monde environnant et
se concentrer sur leurs propres sensations ou émotions.
Pour ce faire, de nombreux outils peuvent être employés. Un bandeau
sur les yeux du soumis l’empêche souvent de voir ce qui se passe autour de
lui, ce qui fait en sorte qu’il ne peut pas savoir quel outil est utilisé, ou
encore qui le touche. Des bouchons d’oreilles ou des écouteurs isolent le
soumis des bruits environnants lors d’une séance ou l’empêchent de
reconnaître au son le prochain outil qui sera utilisé dans le jeu.
Bien entendu, la parole n’est pas un sens mais une faculté; il n’empêche
que certains adeptes trouvent une stimulation dans le fait d’en être privés.
On a alors recours à un bâillon, qu’il s’agisse d’un gag ball (une boule
maintenue dans la bouche par une lanière), d’une muselière, d’un mors,
d’une bande autocollante, ou de tout autre tissu ou objet à même
d’empêcher le soumis de parler. Certains bâillons permettent en outre
d’attacher divers d’objets, comme un plateau, un cendrier ou un jouet
sexuel.
La cagoule est un autre outil qui permet entre autres la privation
sensorielle (elle peut aussi servir à l’humiliation ou simplement à cacher
l’identité d’un participant). Les cagoules peuvent être légères et ne pas
cacher le visage, ne comporter que des perforations pour permettre la
respiration (ou aucunes si elles sont faites de spandex), ou encore être
renforcées au niveau des yeux, des oreilles et de la bouche afin de créer une
réelle déconnexion du monde environnant. Certaines comportent aussi des
pièces amovibles, par exemple un bandeau ou un bâillon.
La restriction sexuelle
La restriction sexuelle consiste à empêcher le soumis d’avoir des activités
sexuelles ou d’atteindre l’orgasme. Les adeptes de cette pratique ont
différentes motivations. Le Dominant peut l’imposer au soumis comme une
punition, comme une forme particulière de contrôle (si le soumis a droit à
l’orgasme quand il le désire, qui a réellement le contrôle?) ou simplement
pour affirmer sa dominance. La pratique peut être d’autant plus prisée par le
soumis que l’orgasme peut être d’une intensité rehaussée après une période
de restriction.
Les joueurs utilisent différentes méthodes ou règlements adaptés à leur
type de jeu et à la durée désirée de la restriction. Celle-ci peut être
simplement dictée, c’est-à-dire que le dominant exige du soumis qu’il ne se
masturbe pas ou n’ait pas de relations sexuelles pendant un temps
déterminé. Il est aussi possible d’utiliser cette restriction pour tester la
volonté du soumis. Par exemple, ce dernier pourrait être exposé ou être
forcé à s’exposer à des stimuli (vidéos ou textes érotiques, masturbation,
rapports sexuels). Certains adeptes utiliseront une ceinture de chasteté,
antique dispositif couvrant les organes génitaux, pour assurer le contrôle
complet du dominant sur la sexualité du soumis. Disponible pour les
hommes et pour les femmes, elle est généralement faite de métal ou de cuir
et est souvent verrouillée à l’aide d’un cadenas dont seul le Dominant a la
clé.
La restriction complète
La restriction complète immobilise totalement le soumis. Cette pratique
permettrait, selon ses adeptes, de s’évader dans un état de méditation, de
bien-être, de déconnexion. Le corps du soumis est complètement emballé,
empêchant tout mouvement. Deux techniques de restriction complète sont
répandues: la momification et le vacuum bed.
La momification consiste à envelopper le corps du soumis de matériaux
divers de manière à l’empêcher de bouger. Les joueurs utiliseront de la
pellicule plastique, du ruban adhésif, des bandes de tissu ou de latex, des
bandages ou un sleepsack, sac de latex, de cuir ou de spandex spécialement
conçu pour cette fin. Le soumis est généralement couvert des pieds jusqu’au
cou, mais les joueurs plus avancés peuvent également momifier la tête en
prenant soin de laisser une ouverture au niveau de la bouche ou du nez, à
moins de laisser un tuyau sortir de la bouche. Il est également possible de
momifier le soumis avec un objet, ou à une autre personne, ou encore dans
une position particulière qui peut être humiliante.
Le vacuum bed est une grande enveloppe dans laquelle le soumis se
glisse avant que l’air en soit complètement aspiré. Il est généralement
constitué de deux draps de latex scellés et maintenus par un cadre rigide. Le
soumis se place entre les draps, la tête à l’extérieur ou la bouche vis-à-vis
d’une ouverture, puis on évacue l’air à l’aide d’un aspirateur. La personne
est alors complètement immobilisée, son corps parfaitement moulé entre les
draps de latex. Elle ne peut pas bouger et ne peut pas non plus voir ou
entendre si la tête est incluse dans le dispositif; elle est ainsi exhibée,
touchée ou simplement laissée à elle-même.
LES JEUX DE DOMINATION-SOUMISSION
Le pouvoir a toujours été érotisé. Les jeux BDSM exploitent le mystère qui
l’entoure, cette distance entre celui qui le détient et celui qui est en position
d’infériorité, cette possibilité donnée au premier de manipuler l’autre,
parfois littéralement, en lui ôtant tout contrôle. Cette dynamique
fondamentale de la sexualité est alors ritualisée et devient une source de
connexion sexuelle et émotionnelle intense.
Les jeux de domination-soumission, ou jeux de Ds, mettent en scène la
différence de pouvoir entre Dominants et soumis. Ils expriment ce rapport
et le renforcent à travers des gestes ponctuels ou récurrents, imbriqués ou
non dans des scènes ou des scénarios plus complexes. La différence de
pouvoir est la fondation de la relation Dominant-soumis. C’est une
dynamique qui se discute, qui s’entretient et qui est encadrée par des
règlements et des ententes négociées par toutes les parties. La
communication et la confiance sont omniprésentes et bilatérales; il est aussi
important pour le soumis d’avoir confiance dans le Dominant que l’inverse.
La révélation de soi serait également cruciale pour une relation Ds
épanouie. Le rapport de pouvoir peut s’instaurer seulement lors du jeu,
comme il peut être une constante dans la relation. L’outil le plus
communément utilisé dans les jeux de Ds est l’imagination; chacun invente
les siens, à l’image de ses désirs et fantasmes.
Le rapport de Ds est l’occasion pour les partenaires de flirter avec les
interdits, les tabous du pouvoir. Pour celui qui domine, le plaisir est dans le
fait d’avoir le contrôle, de faire subir, d’imposer, de laisser languir, de
surprendre, d’humilier le soumis ou de se faire servir par lui. Certains
aiment également éduquer et guider leur soumis et ressentent de la fierté à
le voir évoluer dans son rôle. Pour celui qui se soumet, le plaisir réside dans
le fait de lâcher prise, de s’offrir à l’autre, d’obéir aux ordres, de plaire, de
subir, d’être utilisé, d’être humilié, de servir. À travers le rapport de Ds et le
pouvoir conféré au Dominant, des blocages dans l’atteinte du plaisir (par
exemple, la difficulté à assumer certains fantasmes) peuvent disparaître.
C’est qu’alors le soumis se concentre sur les attentes de son rôle, il réfléchit
moins à la moralité, à l’acceptabilité sociale des pratiques ou à ses
inhibitions, et peut donc expérimenter et se laisser aller complètement.
Le rapport de Ds est investi différemment selon les joueurs. Chez
certains, le rapport peut être ponctuel, c’est-à-dire que les partenaires de jeu
décideront qui sera le Dominant et qui sera le soumis dans le cadre d’une
scène ou d’une soirée. Il peut aussi être circonscrit dans le temps, comme
être présent lors du jeu seulement ou de moments prédéterminés (par
exemple, durant tout un weekend). Le rapport de Ds peut également être
ancré constamment dans la dynamique de la relation, c’est-à-dire qu’il y
aura toujours l’expression d’une différence de pouvoir entre les partenaires,
que ceux-ci soient dans une scène ou non. Parfois, le rapport de Ds est
officialisé par la remise d’un collier au soumis, qui souligne le moment où
le Dominant accepte officiellement de prendre en charge le soumis. Le
collier de soumission est fréquemment offert après une période de probation
où les partenaires apprennent à se connaître et testent leur dynamique. Il est
parfois remis à la suite d’une série d’épreuves devant être réussies par le
soumis à la satisfaction du Dominant, ou dans le cadre d’un évènement
particulier, parfois appelé la cérémonie de remise du collier.
Le rapport de Ds peut être jumelé avec la discipline, un entraînement qui
prétend former le soumis de telle sorte qu’il agisse précisément comme le
Dominant le désire et qui se traduit par l’instauration de règles strictes et
d’un système de récompense et de punition. Il peut s’agir de développer
certains marqueurs de la soumission appréciés par le Dominant (par
exemple, le vouvoiement), comme il peut s’agir d’aptitudes très précises
(agir comme un animal, faire office de meuble, porter des corsets très
serrés). Si ce qui est attendu du soumis est oublié par lui ou est
insatisfaisant pour le Dominant, ce dernier se réserve le droit de le punir.
Évidemment, si l’erreur est accidentelle ou si le soumis est débutant, la
punition sera légère. Un Dominant, en outre, ne peut en aucun cas punir un
soumis pour avoir arrêté une séance pour des raisons de sécurité ou de
limites.
Les punitions les plus sévères sont d’abord approuvées par le soumis.
Par exemple, en début de relation, il pourra dire qu’il n’apprécie pas une
certaine pratique, mais qu’il accepte tout de même de la vivre comme
punition. Le Dominant ne peut donc imposer des pratiques refusées par le
soumis sous prétexte de le punir. La punition est néanmoins, par définition,
une action ou une pratique qui n’est pas appréciée par le soumis (sinon, ça
serait une récompense!). Elle est souvent suivie d’une demande de pardon
du soumis au dominant.
À l’inverse, les jeux de servitude peuvent aussi inclure des récompenses,
qui permettent de renforcer le comportement désiré et de souligner l’effort
du soumis.
Quelques exemples de punitions: Ignorer le soumis; l’humilier
publiquement (par exemple, lui demander de mettre en ligne un texte
décrivant sa faute); lui enlever un privilège (exiger qu’il s’asseye sur le sol
toute la journée); lui faire subir quelque chose qu’il n’aime pas (lui donner
cinq coups de canne); lui faire faire quelque chose qu’il n’aime pas (des
tâches ménagères).
Quelques exemples de récompenses: Libérer le soumis de certaines
tâches qui sont normalement obligatoires; incorporer d’autres joueurs à une
scène (si le soumis l’apprécie); lui offrir de faire une pratique qu’il aime; lui
accorder un droit qu’il n’a pas normalement.
Les jeux de domination-soumission sont innombrables, mais peuvent
être divisés en trois catégories: les jeux de servitude, les jeux d’humiliation
et les jeux de rôles.
La servitude
Les jeux de servitude sont souvent des pratiques récurrentes installées dans
la relation Ds. Elles servent à démontrer l’engagement du soumis ainsi qu’à
entretenir la différence de pouvoir. En d’autres mots, ces jeux confrontent le
soumis à son état de soumission et renforcent le pouvoir du Dominant. Les
jeux de servitude sont acceptés par les deux parties, même s’ils peuvent être
astreignants dans la vie du soumis – malgré le fait que les pratiques soient
négociées, il est important de comprendre que le Dominant n’est pas là pour
plaire au soumis. Le fait de servir le Dominant est entre autres un moyen
pour le soumis de lui démontrer de la reconnaissance pour le temps et
l’énergie qu’il lui accorde.
Les nombreux jeux de servitude répondent aux désirs et besoins
érotiques des joueurs. Ils s’apparentent en fait à des tâches à effectuer, et
ont pour but d’assurer que le Dominant soit heureux, comblé et fier de son
soumis. Leur forme et leur fréquence varieront selon l’intérêt des joueurs
pour l’établissement d’un protocole strict. On qualifie en effet de «joueur
protocolaire» celui qui met en place beaucoup de jeux de servitude dans son
rapport de Ds. Les trois formes principales d’expression des jeux de
servitude sont le service, l’obéissance et la prévenance.
Le service est une expression de respect, de soumission, de dévotion et
d’amour. Lorsqu’il est dans son rôle, le soumis exprime sa dévotion par une
série de rituels qui ont été instaurés dans la relation. Les rituels doivent être
pratiqués à tout moment où le soumis est dans son rôle et varient selon le
bon plaisir du Dominant.
Voici une liste non exhaustive de rituels de service, qui peuvent être
effectués à la demande du Dominant, ou bien à des moments préétablis. On
remarque qu’ils sont de nature, de durée et de fréquence très variées:
L’humiliation
Les jeux d’humiliation sont des pratiques lors desquelles des tourments
psychologiques ritualisés et bien circonscrits sont infligés au soumis. Ils ont
comme objectif principal de créer un sentiment d’abaissement, de
dégradation ou de honte chez le soumis, souvent mêlé à de l’excitation
sexuelle chez les joueurs qui l’érotisent.
Il peut être difficile de comprendre comment quelqu’un peut tirer du
plaisir du fait d’être humilié. La distance émotionnelle et psychologique
entre celui qui rabaisse et l’humilié semble être une source de désir et de
tension érotique. De plus, le sentiment d’être humilié engendre un rush
hormonal qui ressemble à la réponse combat-fuite, où ici combattre
correspond à continuer de subir, alors que fuir consisterait à arrêter le jeu.
C’est l’oscillation entre le sentiment de honte et la charge érotique de la
situation qui rend la pratique attirante pour les joueurs. Certains d’entre eux
cependant ne ressentiront pas la tension érotique durant l’acte humiliant,
mais plutôt après, en repensant à ce qu’ils ont fait et en rejouant le scénario
dans leur tête.
À moins d’avoir convenu d’une séance punitive, un Dominant
n’humiliera pas un soumis qui n’érotise pas ce sentiment, car l’humiliation
peut être dommageable pour l’estime de soi et traumatisante si elle n’est pas
désirée. Les jeux doivent être constructifs et ne doivent pas affecter
l’intégrité physique, psychologique et émotionnelle de la personne qui les
subit. Comme souvent, le type d’humiliation et son intensité seront du
ressort du soumis: ses limites, ses fantasmes, son niveau d’orgueil, sa
sensibilité mènent le bal. Il s’agit souvent de «forcer» le soumis à vivre une
chose qu’il aimerait vivre si la société et ses propres inhibitions ne l’en
empêchaient pas. L’humiliation peut aussi tester la dévotion du soumis et,
bien entendu, servir au plaisir du Dominant. Elle se situe sur un continuum
qui va de la honte légère à la dégradation extrême.
En fait, tous les jeux BDSM peuvent servir à humilier. Les jeux
d’humiliation correspondent à ce que le joueur considère comme étant
humiliant pour lui, cette notion pouvant varier d’une personne à l’autre,
voire chez une même personne avec le temps et selon les expériences. Par
exemple, recevoir une fessée couché sur les genoux du Dominant peut être
considéré comme très humiliant par certains, alors que c’est plutôt une
pratique intime et empreinte de tendresse pour d’autres. Dans le même
ordre d’idée, une pratique peut être considérée comme acceptable
lorsqu’elle se déroule en privé, mais devenir humiliante dans une soirée
publique. Certains jeux restent toutefois plus fréquemment associés à
l’humiliation. On peut les classer grossièrement en trois catégories:
l’humiliation physique, l’humiliation mentale et l’humiliation sexuelle.
L’humiliation physique utilise le corps du soumis pour susciter chez lui
un sentiment d’abaissement, de dégradation ou de honte. On aura
notamment recours à la laisse, qui, attachée au cou du soumis, permet au
Dominant de le mener à sa guise. Cette pratique implique fréquemment que
le soumis se déplace à quatre pattes, suivant au sol le Dominant, comme un
chien. L’isolation du soumis est aussi utilisée à des fins d’humiliation, par
exemple en le mettant en cage ou en le confinant seul dans un coin de la
pièce.
Certains actes dégradants peuvent être faits de façon indépendante ou
pendant d’autres jeux. Par exemple, le Dominant peut gifler le soumis, lui
tirer les cheveux, lui cracher dessus ou le bousculer.
Les jeux d’urologie et de scatologie qui consistent à uriner ou à déféquer
sur le corps ou le visage du soumis comportent presque toujours un élément
de dégradation. On peut également demander au soumis d’uriner ou de
déféquer dans un pot ou dans ses vêtements devant le Dominant. Certains
adeptes des jeux de scatologie ont également recours aux lavements, qui
consistent à injecter du liquide dans l’anus pour provoquer la défécation ou
nettoyer les parois anales. Dans le même ordre d’idée, un Dominant
pourrait demander à sa soumise de lui montrer son sang menstruel.
Le jeu médical est utilisé pour examiner et exposer le soumis. Dans ce
jeu, un examen est fait afin de scruter le soumis à la loupe, par exemple
prendre sa température rectale ou inspecter ses organes génitaux à l’aide
d’un spéculum. Certains objets peuvent également être insérés dans l’urètre,
le vagin ou l’anus, tels des sondes (cylindres de différentes grosseurs
permettant de dilater ou d’explorer les orifices) ou des cathéters (tubes de
plastique flexibles qui servent normalement à retirer l’urine de la vessie).
Les vêtements peuvent également être un moyen d’humiliation physique
du soumis, par exemple l’exigence qu’il porte un accoutrement absurde ou
extrêmement sexualisé. La féminisation, par exemple, consiste à vêtir un
homme soumis d’habits traditionnellement féminins (bas résilles, porte-
jarretelles, sous-vêtements féminins, talons hauts). C’est le fait d’être
imposés par le Dominant qui leur confère un caractère humiliant (s’ils
étaient choisis par le soumis pour leur caractère érotique, cela relèverait
plutôt du travestisme).
L’humiliation mentale a aussi pour but de susciter un sentiment
d’abaissement, de dégradation ou de honte chez le soumis, mais cette fois
en influençant défavorablement sa perception de lui-même. L’humiliation
verbale consiste à insulter le soumis ou à le traiter de noms dégradants, par
exemple salaud ou salope, cochon ou cochonne, pervers ou perverse. Si
l’objectification consiste à traiter le soumis comme un objet, la
dépersonnalisation consiste à le traiter comme s’il n’avait aucune émotion,
aucune valeur. Dans ces jeux, le soumis peut être ignoré, abusé ou utilisé
pour satisfaire les besoins des autres (par exemple, le Dominant peut
ignorer le soumis pendant de longues minutes alors que celui-ci lui présente
un verre d’eau).
L’exhibition consiste à exposer le soumis dans une position ou un état
considéré comme dégradant. Elle peut être pratiquée en privé, mais devient
beaucoup plus intense en présence d’autres individus. Évidemment, une
certaine retenue est nécessaire dans les lieux publics, mais les soirées de jeu
se prêtent bien à l’exercice. Celui-ci peut être strictement physique; par
exemple, on demandera à une soumise de se pencher, la jupe relevée, et de
rester ainsi pendant que les joueurs l’observent et commentent ses fesses.
L’exhibition peut aussi être psychologique: on peut par exemple demander
au soumis d’exposer à tous qu’il est un pervers en le faisant se promener
avec une pancarte qui l’indique ou en lui ordonnant de le dire à tous les
Dominants qu’il croise.
L’humiliation mentale peut aussi consister à forcer le soumis à dire
certaines choses. La supplication le force à implorer le Dominant pour avoir
ce qu’il désire. L’interrogation implique quant à elle de soutirer de
l’information ou un secret au soumis. Cette pratique peut être mélangée
avec de la torture ou de la restriction afin de recréer un contexte
d’interrogatoire réaliste. Dans ce jeu, le soumis résiste le plus longtemps
possible, ce qui force le Dominant à être d’autant plus persistant et inventif.
Le contrôle mental (ou mindfuck) vise à déstabiliser, à manipuler ou à
créer intentionnellement de la confusion dans l’esprit du soumis afin de
causer chez lui de l’excitation, de l’anticipation ou de la peur. Il s’agit de
jouer avec la conscience du soumis, en lui faisant croire que quelque chose
se passe (alors qu’il ne se passe rien), ce qui suscite de vives émotions et un
rush d’adrénaline. Le but de la pratique est de contrôler l’état mental du
soumis dans une perspective érotique. Un Dominant pourra, par exemple,
faire croire au soumis qu’il le vendra au plus offrant à la prochaine soirée de
jeu s’il n’est pas satisfait de sa dévotion pendant la semaine qui précède. Le
soumis sera dans un état d’agitation et de stress intense au courant de la
semaine et portera une grande attention à tous ses gestes, pour le plus grand
plaisir du Dominant. Comme souvent en BDSM, l’anticipation, l’inconnu,
est la clé d’une scène de contrôle mental réussie. Évidemment, ce type de
jeu peut être dangereux et il est important pour tous les partenaires de bien
connaître leurs limites. Le stress vécu par le soumis devrait être excitant, et
non accaparant.
L’humiliation sexuelle utilise la sexualité ou les organes génitaux pour
induire un sentiment d’abaissement chez le soumis. La nudité complète ou
partielle est un moyen d’humilier, de gêner ou encore d’intimider le soumis
et de lui rappeler son état de soumission. Elle peut être imposée en privé,
par exemple en lui demandant de se dévêtir en regardant le Dominant dans
les yeux, ou encore dans les soirées de jeu, par exemple en lui demandant
d’assister à une soirée vêtu uniquement d’un string.
Des jouets sexuels peuvent également servir à contrôler ou à maintenir
l’excitation sexuelle du soumis en contexte d’humiliation. Un plug peut être
inséré dans l’anus. Un vibrateur peut être mis dans le vagin ou la culotte
d’une soumise, certains vibrateurs pouvant même être contrôlés à distance.
Un cock ring (anneau serré porté à la base du pénis) peut être utilisé pour
prolonger l’érection et augmenter la sensibilité génitale du soumis. Il existe
également une diversité de «cages à pénis», permettant de garder le membre
en place en guise d’humiliation ou pour le tourmenter.
L’exhibition peut également être pratiquée dans une optique sexuelle. Le
Dominant peut demander au soumis de se masturber ou encore d’effectuer
une danse érotique devant lui ou devant d’autres joueurs. Il peut lui
demander d’écarter ses organes génitaux ou d’exhiber son plug. Le ligotage
peut également accroître l’humiliation lorsque la position forcée par les
cordes exhibe les organes génitaux (par exemple, les cuisses écartées
attachées aux avant-bras) ou les met en valeur (par exemple, le ligotage des
seins ou des parties génitales). Le soumis pourrait également être amené à
dévoiler des informations intimes sur sa sexualité, par exemple en racontant
un fantasme ou en avisant le Dominant chaque fois qu’il se masturbe en
privé.
L’humiliation peut également s’inscrire dans les pratiques sexuelles, par
exemple éjaculer sur le visage du soumis, ou encore lui demander de lécher
son éjaculat. L’insertion de plusieurs doigts ou du poing (fisting) dans le
vagin ou l’anus peut également être considérée comme humiliante par
certains joueurs. Une Dominante pourra porter le strap-on (un godemiché
attaché à la taille ou inséré dans le vagin) et pénétrer le soumis dans l’anus.
Le milking consiste à évacuer le sperme sans orgasme par la masturbation
de la prostate de l’homme soumis, ce qui crée ainsi une frustration et un
désir sexuels grandissants.
La sexualité peut être contrôlée par le Dominant. Comme toujours,
l’humiliation qui en résulte est une affaire de perception. Le Dominant peut
interdire d’avoir un orgasme au soumis qui lui en demande la permission. Il
peut également laisser le soumis approcher de l’orgasme, puis le priver de
toute stimulation. Le Dominant peut forcer le soumis à se masturber, même
après avoir eu un orgasme, ce qui peut causer de l’inconfort chez certains
(ou de multiples orgasmes chez d’autres). Finalement, le Dominant peut
imposer au soumis des pratiques ou des partenaires sexuels.
Les jeux de rôles
Les jeux de rôles accentuent encore la différence de pouvoir entre
Dominant et soumis en ajoutant des personnages dans leurs scénarios.
Ainsi, en plus d’être dans une dynamique Ds, les partenaires occuperont des
rôles scénarisés. Ceux-ci peuvent être issus de leurs fantasmes, ou encore
provenir d’un film ou d’un livre.
Le jeu de genre (gender play) utilise des attributs généralement associés
au sexe opposé pour altérer l’état physique ou psychologique de l’autre.
Ainsi, un homme pourra revêtir des vêtements féminins, porter des souliers
à talons et se maquiller, tandis qu’une femme pourra porter un complet et
une fausse moustache. Il peut aussi s’agir d’estomper la frontière entre les
genres et de ne s’identifier à aucun.
Le jeu de régression (age play) consiste à incarner un personnage d’un
âge différent du sien, le soumis étant généralement celui qui régresse en âge
dans le scénario. Le jeu d’adolescentilisme permet d’incarner le rôle d’un
adolescent. Le scénario pourra être, par exemple, celui d’une jeune
adolescente initiée à la sexualité par un homme plus âgé, ou encore punie
pour avoir eu des contacts sexuels avec une amie. Le jeu d’infantilisation
consiste quant à lui à incarner le rôle d’un enfant; le soumis pourra, par
exemple, recevoir une fessée de sa gardienne pour avoir désobéi. Le jeu de
régression peut aller jusqu’à un très jeune âge, comme dans l’Adult baby
diaper lover (ABDL), où le soumis porte une couche, boit au biberon et
dort dans un lit à barreaux. Certains adeptes désireront être allaités par des
femmes dont le corps permet le processus de lactation. Il faut être bien
clair: le jeu de régression ne se joue qu’entre adultes consentants; il ne
s’agit pas ici d’érotiser les enfants, mais plutôt d’érotiser le fait d’être traité
ou de traiter l’autre comme un enfant.
Dans le jeu de rôle animal (pet play), le soumis incarne un animal de son
choix et le Dominant, le propriétaire de l’animal. Ce jeu de rôle peut être
très léger et ludique, comme il peut être un véritable style de vie. Par
exemple, un soumis peut décider d’incarner un chien (puppy play) pour la
soirée seulement, mais il peut aussi posséder ce rôle dans la relation Ds et
toujours agir en chien aux côtés du Dominant (manger par terre dans un bol,
être en laisse, dormir au pied du lit, etc.). Des accessoires sont fréquemment
utilisés pour contribuer au réalisme de la scène: oreilles, pattes, museau,
plug anal avec queue d’animal, bol pour boire ou manger, cage, coussin,
etc. Le chien et le chat sont les animaux les plus fréquemment incarnés,
mais tous les animaux peuvent être personnifiés d’une façon ou d’une autre.
Le jeu de poney (pony play) est aussi un jeu de rôle animal fréquent, où
le Dominant monte le soumis comme un cheval, ou se fait tirer dans un
carrosse par le soumis, qui est dirigé à l’aide d’un mors. Certains adeptes
s’investiront dans un entraînement plus rigoureux et recréeront le scénario à
la perfection: le soumis, habillé de la tête aux pieds en poney (sabots aux
mains, œillères, mors à la bouche, plume sur la tête), dos droit et bras
repliés, doit respecter à la lettre les indications du Dominant, qui lui donne
des ordres à travers divers sons (par exemple, le claquement sec de deux
coups de cravache signifient «au trot!»). C’est un jeu d’une extrême
complexité, mais d’une élégance époustouflante lorsque maîtrisé à la
perfection.
Dans le jeu de pouvoir, divers scénarios impliquant un rapport de
pouvoir entre les personnages constituent la trame de fond de la scène.
Souvent, les joueurs se déguiseront pour incarner le personnage de façon
plus réaliste. N’importe quel rapport de pouvoir peut être mis en scène,
selon les préférences érotiques: patron et secrétaire, enseignante et élève,
policier et suspect, infirmière et patient, client et prostituée, etc.
Le jeu de simulation met en scène une situation ou le non consentement
du soumis est simulé, par exemple un kidnapping, un viol, de
l’esclavagisme. Dans ce jeu, le soumis joue le rôle de la victime à qui on
impose des pratiques extrêmes. Ce genre de jeu peut paraître profondément
dérangeant vu d’un œil extérieur, mais il est scénarisé à l’avance et,
évidemment, souhaité par les parties. Les adeptes ne désirent pas réellement
se faire kidnapper ou violer dans la vraie vie, mais ils apprécient les
émotions qui viennent avec l’illusion de forcer quelqu’un ou d’être forcé.
Tous les paramètres sont contrôlés pour que le tout se déroule de façon
sécuritaire. Parfois, le soumis, conscient que le Dominant prépare un
scénario, ne saura pas quand, ni où aura lieu la scène. Les joueurs auront
toujours déterminé à l’avance un mot ou un signe de sécurité qui force
l’arrêt immédiat du jeu.
Le jeu de terreur (terror game) consiste à provoquer le soumis avec un
objet potentiellement létal dans le cadre d’une scène ou d’un rapport sexuel.
Il peut s’agir d’un couteau (knife play), d’une paire de ciseaux, d’une lame
de rasoir, d’un scalpel, d’une machette (blade play) ou d’une arme à feu non
chargée (gun play). L’objectif est de générer un sentiment de peur intense
chez le soumis. L’objet peut être utilisé pour le menacer, pour déchirer ses
vêtements ou encore pour effleurer sa peau.
Le combat érotique est un jeu dans lequel deux individus luttent jusqu’à
ce qu’un vainqueur ressorte. Il y a de nombreuses façons de déterminer le
vainqueur et de pénaliser le perdant. Souvent pratiqué entre personnes de
même sexe, ce jeu n’a pas lieu dans le cadre habituel d’une relation de Ds,
mais apparaît chez les joueurs qui veulent exprimer leur instinct animal
(communément appelé primal). Dans le cadre de cette dynamique, les rôles
tombent et les partenaires deviennent des égaux. Le combat érotique est un
défi intéressant pour le Dominant, qui désire garder son statut, et pour le
soumis, qui ressent l’envie de le défier. Les joueurs sont généralement
habillés très légèrement et peuvent même être nus. Pendant le jeu, ils
peuvent se faire des attouchements, ce qui peut accroître l’excitation
sexuelle, ou encore la motivation à battre l’adversaire chez celui qui s’est
fait toucher. Le combat peut générer de la douleur, ce qui peut être
appréciable en soi pour les joueurs masochistes. Pour marquer le rapport
dominant-dominé, le perdant peut être forcé à admettre la domination du
vainqueur. Il peut aussi être soumis à de l’humiliation, à une fessée ou à une
pratique sexuelle qui plaira au gagnant.
La percussion
On regroupe dans les jeux de percussion (ou de flagellation) les pratiques
qui consistent à administrer un ou plusieurs coups sur le corps d’une
personne. Le contact entre l’instrument et la peau crée des sensations
différentes. Un engourdissement sera causé par un instrument lourd dont
l’impact dépasse la surface de la peau et touche les muscles plus en
profondeur. Cette sensation est un peu similaire à celle produite par
certaines techniques de massage qui relâchent les muscles. Les joueurs qui
n’apprécient pas la douleur préfèrent généralement ce type de percussion
aux autres. Une sensation de choc est quant à elle causée par le contact avec
un instrument plat. Le choc est ressenti à l’endroit du contact, mais diffuse
des ondes dans tout le corps. Finalement, la sensation de pincement est
causée par un objet léger, petit ou très mince qui atteint la peau à grande
vitesse. Le pincement est localisé, avec un délai de quelques secondes entre
le contact sur la peau et la réaction du système nerveux. Les instruments qui
causent un pincement provoquent souvent des rushs d’adrénaline.
Généralement, la percussion est administrée sur les fesses, les cuisses, le
dos, les seins, les parties génitales ou sous les pieds, chaque zone ayant ses
caractéristiques propres en termes de douleur produite (le mot étant toujours
utilisé dans le sens large que lui donne le BDSM). Différents instruments
sont utilisés et un même instrument peut, selon l’usage qu’on en fait, créer
une diversité de sensations. Les instruments de percussion les plus
classiques vont être présentés ici, mais on peut s’en procurer bien d’autres
dans les boutiques spécialisées, auprès d’artisans locaux, et même en
trouver dans un tiroir de cuisine…
Le martinet (flogger) est un instrument constitué de plusieurs lanières
rattachées à un manche, une boucle, un gant ou simplement à une boule qui
se tient dans la main. Les lanières peuvent être en cuir, en suède, en
plastique, en vinyle, en caoutchouc, en corde, en rotin, en fourrure ou
encore en métal, chaque matériau offrant des sensations différentes. Il existe
des centaines de types de martinets, les plus fréquemment utilisés étant en
cuir. Un martinet comportant un grand nombre de lanières ou constitué de
languettes épaisses ou larges qui atterrissent sur la peau avec lourdeur
procure une sensation d’engourdissement. Un martinet dont les lanières
sont tressées, étroites ou peu nombreuses, avec des extrémités coupées en
angle ou nouées, ou encore un martinet fait de matériaux durs procure
plutôt une sensation de pincement. La force appliquée et le geste
influencent aussi la sensation: le martinet peut simplement effleurer la peau
comme il peut l’atteindre très vivement. Les coups de martinet sont
fréquemment donnés en rythme, ce qui semble aider le soumis à entrer dans
une sorte de transe.
Le corps flexible du fouet, en cuir tressé, est attaché à une poignée et
s’étire sur plusieurs mètres, en s’affinant. Son extrémité est souvent dotée
d’une ou de plusieurs fines lanières de cuir. Le fouet émet un claquement
sonore caractéristique et procure une sensation intense de pincement, qui
peut ressembler à celle d’une brûlure ou d’une coupure. Il laisse souvent
des marques sur la peau, qui peuvent nécessiter plusieurs jours avant de
disparaître. Les variantes dans l’épaisseur, la longueur et la manipulation du
fouet influent sur les sensations; ainsi, plus le fouet est long et la vitesse
élevée, plus la douleur sera grande. Maîtriser le fouet nécessite beaucoup de
pratique, les risques de blessures étant élevés tant pour le soumis que pour
le Dominant.
La cravache est une baguette rigide au bout de laquelle est fixée une
petite languette de cuir. C’est celle-ci qui doit entrer en contact avec la peau
et jamais la baguette. La cravache crée une sensation de pincement en
raison de sa petite surface de contact, la longueur de la baguette permettant
une grande accélération avant l’impact. Plus la languette est étroite et plus
la baguette est longue, plus le pincement est intense. Certaines cravaches
ont une languette de forme décorative, par exemple une main ou un cœur.
La canne est une baguette cylindrique rigide d’environ 60 cm de long,
rattachée ou non à une poignée. Elle est le plus souvent faite en bambou, en
rotin ou en plastique; plus elle est mince, plus la sensation est intense. Le
bout de la canne peut être utilisé pour tapoter la peau, mais un coup sec et
rapide qui utilise la longueur de la canne créera une sensation très intense.
La petite surface et la rigidité de la canne causent un pincement au point de
contact. Deux à trois secondes plus tard, les adeptes rapportent une
impression de «vibration» du coup dans le corps. L’afflux d’hormones qui y
est associé créerait parfois un high de quelques dizaines de secondes.
La palette est un outil rigide qui ressemble à une très petite pagaie. Faite
de bois, de cuir ou de plastique, elle a toujours une section plate rattachée à
une poignée. Cette surface est généralement ovale ou rectangulaire et peut
être agrémentée de perforations, de pics, de fourrure ou même de mots en
caractères surélevés qui marquent la peau. Avec sa surface plate, la palette
offre une lourde sensation de choc.
Le slapper est souvent constitué d’une languette de cuir repliée sur elle-
même et rattachée à une poignée. La languette étant double, le coup produit
un craquement sonore, d’où son nom. Contrairement à la palette, qui est
rigide, le contact du slapper sur la peau cause une sensation de pincement.
Le dragon tail est un long triangle de cuir, de suède ou de caoutchouc
fixé à une poignée. La «queue de dragon» pointue, très souple, mesure
généralement plus de 30 cm, ce qui donne de la vélocité à la percussion. Au
contact, l’instrument crée une forte sensation de pincement; sa surface étant
fine, le dragon tail peut laisser de longues marques sur la peau.
La main peut être utilisée pour administrer la fessée; on la positionne
différemment selon la sensation désirée. L’impact d’une main
complètement ouverte ou du bout des doigts crée une sensation de
pincement aux points de contact, tandis que celui d’une main légèrement
arrondie ou refermée en poing créera plutôt une sensation de choc et de
lourdeur. Les sensations varient aussi selon la direction de la fessée, le fait
de retirer ou non la main après le coup, la partie de la main utilisée (la
paume, les doigts, le revers de la main), le délai entre chaque coup, le fait
de porter des gants (généralement en cuir ou latex) et, bien entendu, la force
du coup.
On appelle pervertible tout accessoire de la vie quotidienne pouvant être
utilisé pour créer une percussion: cuillère en bois, spatule, règle, ceinture,
brosse, raquette, sangle de cuir, cintre, outil de massage, etc. Il est important
que l’outil soit solide et ne casse pas au contact, et qu’il n’ait pas de bordure
pointue qui pourrait couper la peau.
La torture érotique
La torture érotique propose des sensations différentes des jeux de
percussion, les deux pratiques étant fréquemment combinées dans une
même scène pour en retirer un maximum de plaisir. Il n’y a pas, dans la
torture érotique, les coups rythmés que l’on retrouve dans les jeux de
percussion. On parle plutôt de sensations intenses, douloureuses ou non, qui
peuvent être constantes ou ponctuelles, mais qui restent toujours localisées
à un point de contact. Ce type de jeu se pratique sur tout le corps,
particulièrement sur les seins, les organes génitaux et les parties du corps où
il y aura eu préalablement flagellation, la peau y étant très sensible et
parfois irritée. La torture peut servir au plaisir du soumis masochiste,
comme elle peut être utilisée en guise de punition ou dans le cadre d’un
scénario de jeu plus large (par exemple, dans le jeu d’interrogation ou de
bondage et de discipline).
Plusieurs jeux sexuels peuvent être utilisés en guise de torture érotique
(par exemple, le fisting, l’utilisation de jouets, les jeux d’orgasmes) et la
plupart des jeux de torture peuvent cibler plus précisément les organes
génitaux (ils sont connus en anglais sous les noms assez directs de cock and
ball torture, cunt torture, tit torture, ass torture). Divers outils peuvent
servir à la torture érotique. Comme tous les jeux BDSM, la seule limite, en
dehors de la sécurité des participants, est l’imagination du Dominant et le
matériel qu’il a sous la main. La torture érotique sera ici classée en deux
catégories: les jeux de sensations et les jeux de température.
Dans les jeux de sensations, le corps du Dominant est fréquemment
utilisé pour pratiquer la torture érotique. Il pourra ainsi utiliser ses mains
pour pincer, chatouiller, gifler, tirer ou serrer diverses parties du corps du
soumis. Il pourra également le lécher ou le mordre. Les ongles peuvent être
utilisés pour effleurer la peau, l’égratigner ou l’agripper. Des griffes
ajoutées au bout des doigts ou des gants à griffes sont aussi utilisés parfois.
Des pinces peuvent être posées sur différentes parties du corps,
particulièrement au niveau des seins ou des organes génitaux, pour susciter
une tension constante chez le soumis. Certaines pinces spécifiquement
conçues pour le BDSM sont rembourrées afin de ne pas couper la peau et
sont souvent ajustables, mais toutes les pinces peuvent être utilisées selon le
niveau de tolérance du soumis et la maîtrise des partenaires: pince à linge
ou à papier, étau, trappe à souris… Des poids peuvent être accrochés aux
pinces, qui peuvent être liées à d’autres par une chaîne ou une corde, ce qui
augmente la stimulation quand le Dominant tire dessus ou quand le soumis
bouge. Plusieurs pinces liées par une corde peuvent former une sorte de
fermeture à glissière (zipper). Lorsque la corde est tirée d’un coup sec,
toutes les pinces sont retirées au même moment. Le fait d’enlever les pinces
peut être plus intense que la pression de la pince en tant que telle. En effet,
quand la pince est retirée, le sang reflue et l’endroit devient hautement
sensible, ce qui peut donner lieu à d’autres jeux de torture.
Le chatouillement peut servir à éveiller les sens, mais peut aussi devenir
un véritable supplice, surtout si la personne est ligotée et ne peut s’échapper
ou se débattre. Des plumes de toutes sortes, de la fourrure ou n’importe quel
matériel doux peuvent être utilisés pour tourmenter le soumis.
De nombreux objets peuvent être utilisés pour piquer la peau, par
exemple un cure-dent, une aiguille à tricoter, une brochette en bois, une
baguette chinoise. Utilisés avec parcimonie, ces objets peuvent éveiller les
sens et l’excitation du soumis, mais ils peuvent aussi servir à la torture
quand on s’en sert à répétition à un endroit sensible, avec une grande force,
ou sur les organes génitaux. La roue de Wartenberg (pin wheel) est une
petite roulette attachée à un manche et crénelée de pics pointus. Utilisée en
neurologie, elle sert traditionnellement à tester la sensibilité au cours d’un
examen clinique. En BDSM, la roue de Wartenberg est roulée sur la peau
avec plus ou moins de force et de vitesse, pour créer une série de petits
pincements.
La friction consiste à frotter la peau sensible avec un outil abrasif. On
utilisera par exemple du papier sablé, un tampon à récurer, un gant de crin,
une pierre ponce, une lime à ongles, ou encore les poils drus d’une brosse
pour frotter la peau lentement, ou plus frénétiquement chez les joueurs très
masochistes. De l’alcool à friction peut aussi être tamponné ou versé
directement sur la peau pour procurer une sensation de brûlure. Certains
joueurs apprécient le rasage, qui cause une sensation d’abrasion et qui, en
enlevant les couches de peau morte, rend la peau plus sensible.
Les ventouses sont utilisées pour accroître l’afflux sanguin sur certaines
parties du corps. On les pose sur le corps, puis l’air en est retiré, ce qui crée
une succion. La peau est extrêmement sensible lorsqu’elles sont retirées.
Elles peuvent aussi causer une stimulation sexuelle directe lorsque posées
sur les organes génitaux ou les mamelons. Il existe des ventouses de toutes
tailles, les plus fréquemment utilisées étant celles que l’on retrouve dans les
trousses de premiers soins pour traiter les morsures de serpents. Dans le
même ordre d’idée, une pompe peut aussi être utilisée sur le pénis pour en
accroître la sensibilité.
Comme leur nom l’indique, les jeux de température utilisent le chaud et
le froid. La sensation au point de contact est souvent intense et brève.
Comme la plupart des jeux de torture érotique, ils sont généralement
prodigués sur une peau sensible ou irritée.
La très classique torture à la cire chaude consiste à faire couler la cire
d’une bougie allumée sur le corps. Pour éviter de brûler la peau, la paraffine
est généralement utilisée (son point de fusion est compris entre 50 et 57
°C). La hauteur d’où tombe la goutte détermine le niveau de douleur (plus
la cire tombe de haut, plus elle se refroidit). Certains joueurs expérimentés
utilisent une chaudière de cire liquide plutôt que de la verser goutte à
goutte. Lorsque la cire atteint la peau, le soumis ressent une sensation de
brûlure qui ne dure que quelques secondes, jusqu’à ce que la cire durcisse.
Une crème, de l’huile ou un gel chauffants peuvent aussi être mis sur la
peau, tout comme n’importe quel liquide tiède (par exemple, du chocolat
fondu) ou produit à base de menthol (du dentifrice) ou d’épices (de la sauce
piquante). On veille par contre à éviter les orifices, pour ne pas causer
d’infection. Un séchoir à air chaud peut être brandi au-dessus des organes
génitaux ou de la peau déjà irritée par la flagellation. Les mains simplement
frottées l’une contre l’autre peuvent aussi causer une sensation de brûlure
intense lorsque posées sur une peau échauffée.
Le figging consiste à insérer dans le vagin ou l’anus un morceau de
gingembre pelé pendant quelques minutes. Au contact des muqueuses, le
gingembre provoque une forte sensation de brûlure. Il peut aussi être frotté
sur les parties génitales. Une fois le gingembre retiré, la sensation de
brûlure peut persister pendant plusieurs minutes.
Pour provoquer le froid, le cube de glace est un moyen simple et
efficace. On le laisse fondre sur la peau, en prenant soin de ne pas le laisser
au même endroit trop longtemps. Un glaçon préalablement arrondi peut
aussi être inséré dans le vagin ou dans l’anus. Il est possible d’alterner entre
le glaçon et une source de chaleur légère (par exemple, la bouche). Il est
conseillé de manipuler la glace un instant avant de la mettre sur la peau du
soumis pour éviter qu’elle ne colle. N’importe quel produit réfrigéré (par
exemple, de la crème fouettée) ou congelé (par exemple, un sac de pois)
peut aussi être utilisé.
1. L’utilisation des termes «Dominant» et «soumis» ne sera donc pas restreinte ici aux personnes
s’identifiant strictement à ces rôles, mais comprendra celles qui adoptent un rôle de domination ou de
soumission dans le continuum BDSM (Maître, esclave, switch, etc.).
4
LA SÉCURITÉ AVANT LE PLAISIR
Les pratiques et techniques des jeux BDSM suivent des règles de base qui
sont d’une extrême importance. Ces règles assurent la sécurité physique et
psychologique de tous. Qu’il soit léger ou extrême, soft ou hard, tout jeu
BDSM a un certain niveau d’intensité, ce qui fait en sorte qu’il y aura
toujours la possibilité qu’un partenaire soit blessé physiquement ou
émotionnellement. Les règles de sécurité présentées dans ce chapitre ont
pour fonction de réduire ce risque le plus possible.
LES LIMITES
ET LA SÉCURITÉ PSYCHOLOGIQUE
On l’a vu, tout jeu BDSM a un versant psychologique, y compris les jeux
axés sur les sensations physiques. Que ce soit à travers l’échange de
pouvoir, la servitude ou l’humiliation, l’aspect mental est omniprésent et
indissociable du jeu. Or, il est indispensable pour les joueurs de porter une
attention particulière à leur bien-être psychologique, ainsi qu’à celui de
leurs partenaires. Il peut être facile de se perdre dans son rôle ou de
s’oublier au profit de l’autre, qu’on soit dans un rôle de soumission ou de
domination. Établir ses limites et s’enquérir de celles de son partenaire est
la clé de la sécurité psychologique dans le jeu.
Avant le jeu
On sait maintenant que toute pratique doit être négociée et consentie par les
participants à un jeu. Qu’elles soient orales ou écrites, trois façons de
négocier ces ententes émergent. D’abord, on peut négocier les pratiques à la
pièce, pour une scène précise. Dans cette négociation, les parties
s’entendent approximativement sur les pratiques qui auront lieu, le soumis
prenant le temps de mentionner ses limites en lien avec ces pratiques
uniquement. Ce type d’entente se conclut dans le cadre d’une séance
ponctuelle, par exemple entre deux amis qui ont envie de jouer ensemble
dans une soirée de jeu.
Une deuxième façon de procéder est de négocier un lot de pratiques. Ici,
un joueur présente à son ou à ses partenaires une série de pratiques, parfois
à prendre ou à laisser (par exemple, quand le joueur veut vivre un fantasme
précis, ou combler un fétiche particulier).
Enfin, la négociation peut se faire en parcourant toutes les pratiques
possibles pour s’entendre sur celles qui sont acceptables pour tous les
joueurs. Cette négociation se fait généralement à l’aide d’une liste de
limites, où toutes les pratiques sont énumérées et cotées par chaque joueur.
Ce formulaire peut être complété de concert ou en privé. On en retrouve
quelques modèles sur Internet, qui varient d’un court tableau à un document
d’une vingtaine de pages comportant des questions ouvertes. Ce mode de
négociation est généralement utilisé en début de relation BDSM. Un contrat
ad hoc peut également être établi entre les joueurs, spécifiant les conditions
de l’entente relationnelle. Au fil du temps et des nouvelles expériences, il
est possible de modifier le formulaire ou le contrat, si toutes les parties y
consentent.
Au-delà de la négociation des pratiques, il est utile de discuter des
motivations de chacun, de ce qui est recherché dans le jeu et de revenir sur
les expériences de chacun en BDSM. Il est également recommandé que le
soumis dévoile clairement toute expérience traumatisante qu’il aurait vécue
dans l’enfance ou dans sa vie adulte. Il est préférable que le Dominant évite
certains éléments qui pourraient être déclencheurs de sentiments négatifs.
En effet, certains jeux peuvent faire émerger des souvenirs ou des émotions
refoulés, ce qui n’est pas nécessairement souhaitable dans un contexte
ludique.
Même si le Dominant contrôle la scène, il est recommandé qu’il exprime
lui aussi ses limites. Cela permet au soumis de bien comprendre ses désirs
pour mieux y répondre et de ne pas avoir de fausses attentes quant à
certaines pratiques qui déplaisent au Dominant ou pourraient lui faire du
mal.
Il est important d’exprimer clairement qu’un Dominant ne pourra en
aucun cas imposer une pratique que le soumis a refusée dans l’entente
initiale entre les joueurs, à moins que celui-ci ait changé d’idée en cours de
route et l’ait signifié sans ambiguïté, de préférence avant la séance. Seule
une entente claire permet de protéger les joueurs, et il est primordial que les
limites soient respectées à la lettre, sans quoi le jeu n’est plus un jeu, mais
une relation de violence.
Il peut être intéressant de faire une analogie entre le BDSM et les sports
dits extrêmes. Dans tout sport extrême, relever des défis, pousser son corps,
vivre des émotions intenses et même faire face à un certain niveau de
danger attire les adeptes. Lorsqu’un objectif est atteint, l’adepte a parfois
envie d’aller au-delà de cette réussite et de se fixer un nouveau but qui
l’amène à aller plus haut, plus loin, plus vite. Pour beaucoup de joueurs, le
BDSM suscite également l’envie de pousser toujours plus loin leurs
pratiques pour vivre de nouvelles expériences. La modification des limites
initiales doit s’opérer en toute conscience, de façon négociée et pleinement
consentie, et viser l’avancement personnel du soumis et non la satisfaction
du Dominant.
Dans certaines relations BDSM qui perdurent depuis un certain temps,
où les joueurs se connaissent bien et comprennent les besoins de l’autre, il
peut arriver qu’une limite soit levée temporairement. On appelle cette
situation le consensual non-consent (le non-consentement consenti). Il
s’agit d’un moment où un consentement temporaire est donné par le soumis
pour des actions qui outrepassent les limites négociées, et qui seraient donc
normalement refusées par le soumis. Cette renonciation est généralement
accordée pour favoriser l’avancement psychologique du jeu. Mais même
quand le soumis a reconnu une pratique comme étant exceptionnellement
acceptable, le Dominant doit toujours avoir conscience que repousser ses
limites peut être difficile, voire dangereux pour lui. Il doit aussi être
conscient du risque de causer des dommages irréparables à la relation. La
priorité du Dominant doit toujours être le bien-être du soumis, et ce, bien
avant l’avancement du jeu.
En définitive, au-delà des négociations et ententes initiales et de leurs
éventuels amendements ou exceptions consenties, le soumis a un droit de
veto constant sur ce qui lui est fait. Il peut à tout moment demander que la
scène soit arrêtée. Le Dominant ne peut pas imposer une pratique sous
prétexte que celle-ci a été négociée. La réciproque s’applique tout autant, le
Dominant pouvant retirer son consentement à tout moment du jeu. Dans le
cas du rapport Maître-esclave, le concept du droit de veto est controversé.
Certains adeptes avancent qu’un vrai esclave doit faire preuve d’obéissance
totale envers son Maître, alors que d’autres estiment que cela n’est pas
conforme au protocole SSC. Mais en définitive, peu importe: où que l’on
soit, qui que l’on soit, non, c’est non, et la Loi sur les agressions sexuelles
ne peut être invalidée par aucune entente ou contrat.
Pendant le jeu
Même en négociant une entente dans les règles de l’art, il est possible que le
soumis réagisse de façon inattendue pendant une séance, selon son niveau
de fatigue, son état psychologique ou encore la manière dont il est
positionné. Des codes devraient donc être utilisés pour évaluer l’état du
soumis pendant le jeu. Ils impliquent généralement une gradation, par
exemple: niveau 1, «tout va bien»; niveau 2, «on approche de ma limite,
ralentissons»; et niveau 3, «la limite est dépassée, on arrête». La plupart des
joueurs utilisent les couleurs des feux de circulation: code vert, code jaune,
code rouge. Certains s’entendent également sur un safeword, un mot de
sécurité, pour signifier l’arrêt immédiat et complet du jeu. Il est souhaitable
que ce mot n’ait aucun lien avec le BDSM ou la sexualité, pour éviter tout
risque de confusion. Par exemple, «non» ou «arrête» sont des mots qui
peuvent échapper aux joueurs, et certaines personnes érotisent la simulation
d’une telle résistance. On choisira plutôt un mot qui est clair, aisément
compréhensible et hors scénario, par exemple «arachide», «911», ou plus
simplement «safeword». En général, les joueurs s’entendent sur le fait
qu’un code rouge est un temps d’arrêt et de discussion avant la reprise du
jeu, alors que l’utilisation du mot de sécurité signifie que le jeu doit être
abandonné pour faire le point sur ce qui s’est passé. Il n’est pas
recommandé de reprendre le jeu si le soumis s’est senti blessé ou s’il est
ébranlé.
Lorsque le soumis ne peut pas parler, par exemple parce qu’il est
bâillonné ou porte une cagoule, des signaux physiques doivent être établis.
Il pourra laisser tomber un objet qu’il tient dans la main, taper deux fois sur
une table, ou encore serrer le doigt du Dominant une fois si tout va bien et
deux fois pour demander l’arrêt du jeu. Encore là, les signaux ne doivent
pas risquer d’être interprétés comme faisant partie du scénario: hocher la
tête ou se tortiller ne serait pas un code adéquat.
Il est évidemment crucial que tous les joueurs s’entendent parfaitement
sur la signification des codes négociés. Même entre des partenaires de
longue date, les signaux de sécurité devraient être validés avant le début de
chaque séance. La présence de codes permet à chacun de s’exprimer
librement pendant le jeu. Ainsi, le soumis n’hésitera pas à se débattre, à
supplier ou à pleurer pendant une séance – si c’est ce qu’il désire –, et le
Dominant, sachant que cela fait partie du scénario, ne sera pas inquiet.
Il peut être gênant pour un joueur d’utiliser les codes de sécurité; c’est
un problème à régler impérativement. Le soumis peut ne pas vouloir
montrer ses limites ou encore craindre de froisser le Dominant en lui faisant
comprendre qu’il est allé trop loin. Or il ne devrait surtout pas attendre la
dernière minute pour signaler son malaise: de longues secondes peuvent
être nécessaires pour le détacher et retirer certains outils (pinces, cagoule,
etc.). Ce moment peut susciter un sentiment de panique, voire un
traumatisme. Voilà pourquoi il est important que tous comprennent que les
codes ne remettent nullement en question le talent du Dominant ou la
volonté du soumis. Ils sont un système de protection pour le soumis, pour le
Dominant et pour leur relation.
Un Dominant doit obtempérer aux codes sans égard à ce qu’il pense des
raisons qu’a le soumis d’y recourir. Un soumis qui dit le mot de sécurité,
c’est un joueur qui retire son consentement. Dans bien des cas, poursuivre
le jeu même quelques instants serait une agression. Le Dominant est
également tenu d’utiliser les codes de sécurité s’il sent que le soumis est
dans un état altéré ou est dans une transe telle qu’il ne peut reconnaître ses
propres limites. Même chose s’il estime que le soumis désire qu’on lui
inflige de la douleur pour se punir d’une manière non ludique, ou encore si
la pratique rend le Dominant mal à l’aise pour quelque raison que ce soit.
La responsabilité du Dominant d’assurer la sécurité du soumis implique
qu’il arrête le jeu s’il a le moindre doute, même si son partenaire proteste
que tout va bien.
Après le jeu
Après une séance intense sur le plan émotionnel ou physique, il est
important que le Dominant accorde quelques minutes d’attention au soumis
pour s’assurer de son bien-être. On appelle cette pratique l’aftercare. Le
soumis se trouve parfois dans un état de conscience altéré après une séance,
que ce soit dû à l’afflux d’hormones dont il a fait l’expérience, à
l’épuisement physique ou encore à un trop-plein d’émotions. À ce moment
de la séance, le Dominant doit prendre soin du soumis et lui fournir ce dont
il pourrait avoir besoin, par exemple de l’eau, de la nourriture, une
couverture ou des caresses. Le Dominant doit également s’assurer que le
soumis n’est pas blessé et qu’il ne souffre pas d’étourdissements ou de
désorientation avant de le laisser marcher sans aide ou quitter la pièce.
Une fois la tension descendue, il faut également faire un bilan de
l’expérience vécue, par exemple en discutant de ce qui a été apprécié et ce
qui l’a moins été, et plus généralement de ce que le soumis a ressenti
pendant la séance et de ce qu’il ressent maintenant qu’elle s’est achevée. Ce
bilan peut se faire juste après le jeu, mais il se peut que le soumis ait besoin
de quelques heures, voire de quelques jours pour reconnaître pleinement les
impacts d’une séance. Certains Dominants demanderont au soumis de faire
un rapport écrit. Quoi qu’il en soit, en plus de son importante dimension
rassérénante et sécuritaire, ce genre de retour est un bon moyen de mieux
concevoir les séances suivantes.
Quelques heures après le jeu, certains soumis font l’expérience d’un
phénomène qu’ils appellent le subdrop. Il s’agit de symptômes physiques
attribuables à la baisse drastique d’endorphines dans le corps et au retour à
la réalité après une expérience hors de l’ordinaire. Cet état qui s’apparente à
la gueule de bois (fatigue, douleur musculaire) est parfois accompagné d’un
sentiment de nostalgie ou de tristesse. Le subdrop peut durer quelques jours
et le seul remède proposé par les adeptes est de prendre le temps de se
reposer et d’exprimer ses émotions si le besoin s’en fait sentir. Il semble
que le Dominant pourrait également faire l’expérience d’un Domdrop.
Le BDSM n’est pas érotisé par le joueur et a pour but unique de satisfaire les besoins de l’autre. Il
est vu comme une solution à un problème personnel ou relationnel. Il est utilisé en lieu de thérapie,
pour soi ou pour son couple. Il sert à guérir des blessures relationnelles ou personnelles. Il donne
l’illusion d’une prise de contrôle sur ses souffrances présentes ou sur des traumas vécus dans
l’enfance.
Motivations du soumis
Le soumis érotise l’échange de pouvoir et les sensations physiques intenses et désire intégrer les
pratiques qui les véhiculent dans sa vie sexuelle. Il utilise le BDSM pour vivre de temps à autre des
moments de lâcher-prise, s’affranchir des responsabilités de la vie quotidienne et diversifier ses
sensations physiques et érotiques. Il comprend bien ce qu’il désire et est apte à prendre ces décisions
pour lui-même.
Le BDSM semble être le seul moyen pour le soumis de se sentir aimé, désiré ou en sécurité. Il lui
permet de fuir complètement la réalité et de remettre toute responsabilité de soi dans les mains de
l’autre. Le soumis se crée une identité distincte pour échapper à son anxiété ou fuir ses angoisses
existentielles. Il désire ressentir de la souffrance psychique ou une douleur réelle non sublimée, voire
mutilante. Le BDSM consiste en une prise de risques substantiels pour sa santé physique, sexuelle et
mentale, une forme de punition ou un moyen de dissimuler des intentions autodestructrices ou
suicidaires.
Motivations du Dominant
Le Dominant érotise l’échange de pouvoir et le BDSM lui permet de mettre en scène ses fantasmes.
Il ressent du plaisir dans le fait d’être temporairement en contrôle d’une autre personne. Il désire
donner du plaisir au soumis et l’accompagner dans son évolution à l’égard de son rôle, en
concordance avec ses besoins et désirs érotiques.
Le contexte du jeu
Le jeu est négocié, discuté, encadré et consenti par tous les partis. Des codes de sécurité sont mis en
place et les joueurs savent qu’ils sont en droit de les utiliser sans aucun préjudice. Les joueurs
possèdent en outre toutes les connaissances nécessaires pour effectuer les pratiques de façon
sécuritaire. Tous les participants sont perçus comme des personnes à part entière qui conservent leur
individualité et ont pleinement conscience du jeu qui se déroule et de ce qu’il engendre. Chacun
connaît et affirme ses propres besoins et limites. L’intégrité physique et psychique de tous les joueurs
est respectée en tout temps.
Les pratiques sont imposées à l’autre, les désirs et limites du partenaire ne sont pas pris en compte et
son consentement n’est pas vérifié. Les codes de sécurité ne sont pas clairement établis ou ne sont
pas respectés, et le retrait du consentement en cours de jeu n’est pas envisagé. Le soumis ne connaît
pas ses limites ou affirme ne pas en avoir et laisse le Dominant les définir. Les limites sont
systématiquement repoussées, la quête de sensations fortes est constante et insatiable. Les joueurs
s’engagent dans des jeux sans bien les connaître ou sous l’influence d’alcool ou de drogues. Les jeux
se déroulent dans un contexte de violence, de coercition et de prise de risque psychologique et
physique.
Le BDSM prend toute la place dans les actes et les pensées du joueur. Son rôle le définit comme
personne et lui interdit d’exprimer d’autres facettes de lui-même. Il est malheureux et se sent
incomplet quand il n’est pas en période de jeu. Le BDSM est une dépendance, une compulsion qui
semble seule pouvoir le satisfaire. Il est prêt à mettre en pratique tous les jeux BDSM, sans égard
pour ses propres besoins et limites.
La sexualité du joueur se limite au BDSM. Il ne porte aucun intérêt à l’érotisme en dehors du jeu. Il
a besoin des pratiques BDSM pour être excité sexuellement. Il est sous l’emprise de fantasmes
rigides ou de fétiches qui contrôlent entièrement son désir et sa capacité orgasmique. Il a un rapport
honteux ou coupable avec le sexe. Il se laisse imposer ou impose à l’autre des contacts sexuels
durant les séances BDSM.
Le BDSM est en concordance avec les besoins et les désirs érotiques de l’adepte. Le joueur se sent
pleinement acteur de sa sexualité. Le jeu lui permet de s’émanciper, de mieux se connaître et de
mieux connaître l’autre, en se dévoilant à lui à son rythme. Le BDSM est une source de plaisir et
d’un sentiment de plénitude sexuelle.
Le joueur ne tire pas de plaisir ou de satisfaction des pratiques BDSM. Le niveau de douleur ou
l’intensité de l’échange de pouvoir dépasse l’excitation qu’il peut ressentir. Le BDSM nuit à sa santé
mentale ou physique et nourrit un sentiment de désarroi et une souffrance intime. Le joueur ne
ressent pas de connexion entre le jeu et son identité d’être sexualisé. Le jeu fragilise son estime
personnelle, sapant ou changeant complètement son identité. Il ne sait pas pourquoi il pratique le
BDSM et ne reconnaît plus ses propres besoins.
Le BDSM est la soupape des problèmes du couple, le seul exutoire aux conflits relationnels.
L’échange de pouvoir crée une distance entre les partenaires et exclut l’intimité.
Consulter un professionnel
Si un malaise se maintient après qu’on a tenté d’y remédier, la consultation
d’un sexologue ou d’un psychologue peut être indiquée. Le choix du
thérapeute est important: plusieurs études ont démontré qu’une grande
proportion de professionnels de la santé mentale ou de la sexualité ont une
vision négative du BDSM ou ne sont pas à l’aise à l’idée de travailler avec
un client adepte de ces pratiques. Certains considèrent le BDSM comme
étant dysfonctionnel en soi et l’interpréteront d’emblée comme la source du
problème. Leur réflexe sera alors de conseiller au patient de remplacer le
BDSM par d’autres pratiques plus saines à leurs yeux. Il est en effet
possible que les pratiques BDSM soient la cause directe de la souffrance
d’un adepte, mais il peut aussi en aller tout autrement.
Avant la consultation ou au tout début de celle-ci, il est recommandé de
«prendre le pouls» du thérapeute en l’interrogeant sur son aisance à
travailler autour de cette thématique. Il n’est pas nécessaire que
l’intervenant soit un expert sur le sujet, mais plutôt qu’il présente une
attitude d’ouverture et d’empathie, sans tomber immédiatement dans la
pathologisation des pratiques. D’autres adeptes peuvent donner les
références de thérapeutes qu’ils ont consultés et qui les ont aidés. Certains
thérapeutes qui ont de l’expérience avec la clientèle BDSM s’associent au
réseau des Kink-aware professionals, qui regroupe des membres de
plusieurs corps de métiers qui sont sensibles aux sexualités alternatives.
Dans toute thérapie, le lien de confiance entre le client et le thérapeute a
une immense importance. Ainsi, il n’est pas recommandé de cacher ses
pratiques par peur de se faire juger, surtout si celles-ci ont un lien avec le
motif de consultation. Il est important de prendre le temps de choisir son
thérapeute, mais aussi de lui laisser la chance de se familiariser avec le
BDSM et de comprendre les motivations qui sous-tendent le jeu. Le
thérapeute examinera les pratiques de BDSM et procédera à l’évaluation de
leur impact sur la vie de son client, sans nécessairement juger les pratiques
en soi. Sa démarche impliquera plutôt de porter un regard clinique global
sur la sexualité de l’individu, de manière à élaborer un plan d’intervention
adéquat. En revanche, si un thérapeute réagit négativement ou émet des
commentaires désobligeants à seule la mention du BDSM, il est préférable
d’en chercher un autre qui sera mieux outillé pour travailler avec cette
réalité de la vie du client.
5
LA COMMUNAUTÉ
LA SOIRÉE DE JEU
Les communautés BDSM sont généralement centrées autour d’activités
organisées. Il peut s’agir d’activités courantes de socialisation, appelées
munch (5 à 7, sorties au cinéma, repas au restaurant); d’ateliers sur des
techniques de jeu animés par des experts; d’événements de levées de fonds;
de panels ou de forums en ligne sur des sujets en lien avec le jeu, la
sexualité ou les configurations relationnelles, etc. Ces activités sont
organisées par des volontaires ou, dans le cas de regroupements plus
structurés, par des personnes désignées plus formellement. Bien entendu, la
soirée de jeu est la plus populaire des activités qu’organisent les
communautés BDSM (notons cependant que toutes n’en organisent pas). La
plupart des activités demandent l’acquittement d’un frais d’entrée,
généralement compris entre 10 $ et 30$ par personne.
Le donjon
Le donjon était la plus haute tour d’un château moyenâgeux, souvent
utilisée comme poste d’observation et de tir lors d’un siège, mais aussi
parfois pour isoler les prisonniers du seigneur des lieux. Dans le contexte
qui nous intéresse, le mot fait référence à l’imaginaire d’enfermement et de
torture. Le donjon BDSM est un endroit comportant des meubles et
accessoires qui facilitent les jeux. Il peut s’agir d’un appartement entier ou
d’une pièce dévolus au jeu, ou d’un endroit transformé pour la soirée, par
exemple une résidence ou un local commercial loué pour l’occasion. Le
donjon appartient toujours à un particulier, sauf dans quelques grandes
villes qui comptent des bars comportant des espaces de jeu. Certains
donjons peuvent être loués à des particuliers le temps de quelques heures.
On retrouve toujours dans un donjon des stations de jeu, c’est-à-dire des
meubles ou accessoires fabriqués spécifiquement pour le jeu ou pouvant le
faciliter. Parmi les classiques, citons le banc de fessée, un banc à
chevaucher comportant généralement des appuis de chaque côté pour
soutenir les jambes, ainsi que la croix de saint André, deux longues
planches installées de manière à former un «X». On retrouve généralement
diverses stations permettant d’écarter le soumis ou de mettre en valeur ses
fesses, notamment un prie-Dieu, une table capitonnée de cuir, divers types
de supports matelassés sur lesquels le soumis peut se pencher ou
s’agenouiller, une table d’auscultation, ou encore un harnais suspendu au
plafond (sex swing). Ces meubles comportent fréquemment des anneaux
placés à la hauteur des mains et des pieds afin d’y fixer le soumis à l’aide
de bracelets ou de cordes. On peut aussi retrouver dans le donjon des cages
de différents formats (une prison, une cage à chien), des anneaux au plafond
ou au mur, un lit à colonnes, un poteau dédié à la danse érotique, un pupitre
d’écolier, un mur de cordes ou de chaînes, une poulie dont l’extrémité pend
du plafond, un pilori, une chaise de barbier, un trône, ou tout autre mobilier
pouvant contribuer à un scénario d’humiliation ou de soumission, ou plus
simplement à maintenir en place le soumis.
L’ambiance du donjon se veut mystérieuse et érotique. Les murs et le
mobilier sont souvent noirs, rouges, gris, finis en bois ou bien en pierre de
manière à imiter un cachot. L’éclairage est tamisé, souvent rouge, et on
allume parfois des chandelles. Il y a souvent des miroirs aux murs ou au
plafond, et des images ou objets BDSM divers sont mis en évidence:
cagoules, souliers à talon, harnais, martinets, cordes, chaînes, menottes, etc.
La décoration peut être complétée d’accessoires de style médiéval, victorien
ou steampunk (chandeliers, plafonniers, colonnes, tapis, figurines, coffres,
épées, etc.). Les fenêtres sur l’extérieur, s’il y en a, seront obstruées par
d’épais rideaux. Une musique d’ambiance, énergique sans nécessairement
être forte, est diffusée en arrière-plan.
La configuration des donjons est variable, mais tous comportent de petits
espaces de socialisation avec divans, chaises et tables basses. Certains
séparent clairement la section de jeu de la section de socialisation, d’autres
non. Les stations de jeux peuvent se trouver dans des coins reculés, êtres
délimitées par des rideaux, voire situées dans des pièces fermées, comme
elles peuvent être en plein milieu de la pièce, selon l’espace disponible et la
dynamique recherchée.
Bienséance et interdits
Certaines façons d’être et d’agir sont à favoriser dans les soirées de la
communauté et à l’inverse, certaines actions devraient être évitées à tout
prix. Voici quelques indications en rafale.
Les soirées de jeu sont un endroit où chacun peut vivre le BDSM à sa
manière sans jugement ni restriction. Par contre, certains jeux controversés
ou nécessitant un équipement particulier peuvent être interdits dans certains
donjons, notamment les jeux d’urologie et de scatologie, l’asphyxie
érotique, le marquage et le perçage. En cas de doute, il est recommandé
d’interroger le moniteur de jeu avant de commencer une scène. De plus, il
est d’une grande importance que toutes les pratiques soient hygiéniques.
Lors de pratiques pouvant engendrer l’exposition à des fluides (sang,
sperme, sécrétions), il est de coutume de recouvrir les meubles du donjon
d’un drap ou d’une pellicule de plastique afin que ceux-ci ne soient pas
souillés. Des lingettes sont toujours mises à la disposition des joueurs afin
qu’ils puissent nettoyer leur station de jeu après usage. On a vu que des
jouets peuvent être exposés dans le donjon, mais il est strictement interdit
de les utiliser sans la permission du propriétaire. Tous les adeptes doivent
apporter leurs propres instruments aux soirées de jeu.
Les stations de jeu, comme leur nom le dit, servent strictement au jeu:
les joueurs s’y rendent pour y effectuer une scène, la nettoient, puis la
quittent. Elles sont généralement en nombre restreint dans un donjon, et il y
a rarement plus d’une station du même type. Ainsi, un peu comme dans un
gymnase, il est mal vu de s’asseoir sur une station, de la réserver pendant
plusieurs minutes sans l’utiliser, ou encore d’y entreposer ses effets
personnels. Il est généralement convenu qu’une scène ne devrait pas durer
plus d’une heure, pour laisser la chance aux autres joueurs de pouvoir
utiliser la station.
Pendant une séance de jeu, il est impoli de déranger les joueurs en leur
adressant la parole sans y avoir été invité, en se tenant trop près d’eux, en
parlant trop fort à proximité, etc. Le fait de garder une distance raisonnable
permet de respecter l’intimité des joueurs, mais aussi parfois d’éviter de
recevoir l’élan d’un coup, surtout dans le cas du martinet ou du fouet, qui
nécessitent autant d’espace devant le Dominant que derrière lui. Puisque le
BDSM n’est pas que physique, il faut être vigilant avant d’aborder un
couple en pleine séance d’humiliation ou en aftercare après une séance.
Une approbation visuelle est toujours de mise avant de s’approcher.
Évidemment, un individu ne saurait s’inviter dans une séance sans en
demander la permission expresse et ne peut forcer un soumis à jouer avec
lui sous prétexte qu’il est soumis; le fait de s’identifier à un rôle de
soumission ne signifie pas qu’une personne a le devoir de se soumettre à
quiconque.
Il est demandé aux joueurs d’être vigilants quant à la prise de photos ou
de vidéos. Le BDSM est une partie cachée de la vie de plusieurs joueurs:
nombre d’entre eux ne veulent pas l’afficher sur Internet. De plus, les flashs
peuvent être perturbants pour certaines personnes lors d’une séance. Dans
certains donjons, les photos et vidéos sont permises avec le consentement
des adeptes si on les capte discrètement, mais la plupart des soirées les
bannissent tout simplement.
Alors que la plupart des soirées fournissent ou vendent de l’eau et des
boissons non alcoolisées, les participants peuvent habituellement apporter
leur propre alcool. Par contre, sa consommation doit être modérée, surtout
si les joueurs participent à une séance de jeu. Dans tous les cas, un individu
dont le jugement semble altéré par l’alcool, des drogues, des médicaments
ou la fatigue se verra demander de cesser de jouer par le moniteur de jeu.
Le code vestimentaire
Toutes les soirées de jeu ont un code vestimentaire. Les vêtements fétiches
sont généralement de rigueur, c’est-à-dire un habillement dont le matériau
principal est le PVC, le latex, le cuir ou le vinyle. La lingerie, les corsets,
les uniformes (écolière, infirmière, policier, prisonnier, etc.) ainsi que les
vêtements de style victorien (redingotes, robes d’époque) ou gothique
(vêtements de velours, résilles, bottes plateforme, éléments médiévaux) sont
également acceptés. S’habiller tout en noir est généralement toléré,
notamment parce que tous les joueurs ne peuvent pas se permettre d’acheter
des vêtements fétiches, qui sont chers, et parce que c’est plus commode
pour les nouveaux joueurs. Les règlements sur la nudité diffèrent d’une
soirée à l’autre. Certains donjons l’interdisent, tandis que d’autres acceptent
la nudité partielle ou complète.
Généralement, on peut déceler quelques différences entre l’habillement
des femmes soumises et des Dominantes. Souvent, la femme Dominante
porte des accessoires imposants qui évoquent l’autorité, par exemple des
bottes hautes en PVC, des gants jusqu’aux coudes, un chapeau de style
policier ou un long manteau. Il y a là un souci d’affirmer une certaine classe
et d’imposer le respect. La Dominante s’affirmera souvent en féminisant ou
en masculinisant son habillement. Celle qui désire dégager un charisme
sexualisé aura tendance à s’habiller en lingerie, en PVC ou de manière à
faire ressortir ses charmes, tandis que celle qui recherche un look autoritaire
portera plutôt des vêtements plus masculins tels qu’un long manteau, des
pantalons de cuir ou une casquette. L’une et l’autre de ces stratégies
vestimentaires sont aussi bien perçues par la communauté. La soumise,
quant à elle, est plus souvent vêtue très sommairement, voire dénudée:
vêtements en résille ou transparents, jupe très courte, sous-vêtements ou
seins nus. Son habillement est généralement féminisé et très sexualisé; elle
dégage une image de femme-objet.
Chez les hommes, le port du complet se voit parfois, autant chez les
Dominants que chez les soumis. Cet habillement peut représenter le
pouvoir, mais aussi une forme de soumission, et il est aussi un moyen de se
vêtir proprement en respectant le critère du «tout en noir». Le soumis est
plus souvent dévêtu que le Dominant; on le voit porter ceinture de chasteté,
chaps, sous-vêtements ou harnais. Les hommes qui aiment l’humiliation ou
qui ont un fétiche particulier pourront porter des accessoires, des vêtements
ou des sous-vêtements féminins. Le Dominant homme recherche
essentiellement une image imposante de «mâle alpha», ce qui l’attire
fréquemment vers le cuir, signe de sévérité et de virilité.
De façon générale, on reconnaît les soumis parmi les autres joueurs par
la présence d’un collier de soumission qui représente l’appartenance à un
Dominant. Un soumis qui n’appartient à aucun Dominant pourra tout de
même porter un collier temporaire, afin de montrer son rôle. Ces colliers
ressemblent fréquemment à un collier pour chiens, et peuvent être en latex,
en cuir ou en métal. Ils sont souvent munis d’anneaux, de cadenas ou de
breloques décoratives ou humiliantes. Une laisse peut être attachée au
collier.
Les opinions à propos du code vestimentaire diffèrent parmi les adeptes
que j’ai rencontrés; certains joueurs ne voient pas de lien entre le fait de
pratiquer le BDSM et celui d’adhérer à la mode fétiche, mais plusieurs
considèrent au contraire que celle-ci permet de donner une ambiance
érotique aux soirées, de mettre en scène adéquatement leur rôle, et de
distinguer les moments de jeu de la réalité.
CONCLUSION
Le BDSM est un ensemble d’activités érotiques auxquelles s’adonnent des
adultes consentants dans un cadre négocié, régulé et structuré. Toute
pratique qui ne correspondrait pas à cette description est rejetée par la
communauté BDSM, où j’ai pu observer le souci constant que les jeux
auxquels participent les adeptes soient sécuritaires à tout point de vue.
En définitive, le BDSM est-il sain, oui ou non? Sa pratique n’est plus
officiellement reconnue comme une maladie mentale, ce qui pourrait porter
à croire qu’il est accepté par les communautés médicale, sexologique ou
psychologique. Or cela ne semble pas être encore le cas, le BDSM étant
toujours la cible de vives critiques de la part de nombre de professionnels.
Est-ce dû à un manque de connaissances sur le sujet? À des préjugés qui
toucheraient autant les experts en santé que le grand public? Je ne saurais
l’affirmer avec certitude, mais il me semble que l’évaluation sérieuse et
exhaustive du BDSM dans ces champs reste encore à faire.
En attendant, je constate que l’on tend à envisager la question d’un point
de vue philosophique, puisqu’il s’agit plutôt d’une affaire de valeurs que de
faits. Certains seront intuitivement en défaveur du BDSM, à cause de sa
brutalité apparente, par exemple, ou des fantasmes de domination sexiste
qu’il met souvent en scène. D’autres, auxquels on aura bien compris que je
m’identifie, l’approchent avec un regard neutre, et tentent d’évaluer
l’impact du jeu sur les joueurs plutôt que le jeu en soi. Si le BDSM est une
source de plaisir et de satisfaction pour les adeptes, et s’il ne nuit pas aux
autres, qui sommes-nous pour juger de son bien-fondé?
Le BDSM est-il pour tout le monde? Des études rapportent que les
fantasmes de domination et de soumission sont présents chez un très grand
nombre d’adultes, les données rapportées par les chercheurs variant
généralement entre 30% et 60%. Évidemment, comme c’est le cas de tout
fantasme sexuel, leur présence dans l’imaginaire n’implique pas
nécessairement un désir de les transposer dans le réel, puisque «seulement»
10% de la population adulte aurait pratiqué une forme ou une autre de jeu
assimilable au BDSM. Il reste qu’on peut avancer que le BDSM est une
source de plaisir potentiel pour les personnes qui érotisent l’échange de
pouvoir.
Alors, est-ce que quiconque ressentant un intérêt envers les pratiques du
BDSM devrait le pratiquer chez lui, ou rejoindre une communauté? Non. Le
BDSM ne devrait pas être banalisé, même si c’est ce que la culture
médiatique tend à faire. Il s’agit d’un jeu exigeant, autant physiquement que
psychologiquement, et pour s’y adonner de façon sécuritaire, certaines
caractéristiques personnelles sont nécessaires. D’abord, peu importe le rôle
qu’il revêt, l’adepte du BDSM doit avoir une très bonne connaissance de
lui-même et être toujours en mesure d’identifier ses propres besoins,
préférences et limites, sans égard à ceux de ses partenaires. Ensuite, il doit
être capable d’affirmer ces souhaits, peu importe la situation dans laquelle il
se trouve. Il faut également qu’il sache exprimer son identité dans le jeu,
mais aussi en dehors de celui-ci. L’adepte doit être à l’écoute de son corps
et de ses émotions, et savoir repérer et exprimer toute impression
d’incohérence entre ce qu’il ressent et ce qui se déroule. Enfin, bien
entendu, le respect et l’écoute véritable de l’autre sont absolument
indispensables. Si, et seulement si, quelqu’un présente ces caractéristiques,
peut-être bien alors que le BDSM pourrait lui procurer une satisfaction qu’il
ne saurait trouver ailleurs.
Au-delà de toute considération, le plus important dans le BDSM, c’est
l’honnêteté envers soi-même et envers ses partenaires. Mais n’est-ce pas là
la clé de toute sexualité épanouie?
GLOSSAIRE
24/7: Relation de domination-soumission à temps plein où les individus
sont constamment dans leur rôle.
Abrasion: Jeu de sensation qui consiste à frotter la peau avec un outil
abrasif, tels un papier sablé, un tampon à récurer, un gant de crin, une pierre
ponce, une lime à ongles, une brosse.
Adolescentilisme: Jeu de rôle qui consiste à traiter le soumis comme s’il
était un adolescent.
Adoration: Adulation et vénération d’une personne ou d’une partie de
son corps (pieds, cheveux, organes génitaux).
Adult baby diaper lover (ABDL): Jeu de rôle qui consiste à traiter le
soumis comme s’il était un très jeune enfant en utilisant des accessoires
pour bébés (couches, biberons, suces, etc.).
Aftercare: Soins prodigués au soumis après une séance de jeu (caresses,
réponse à ses besoins immédiats) et retour sur la séance.
Asphyxie érotique: Pratique qui consiste à priver d’oxygène une
personne dans le but de créer un sentiment de panique ou un quasi-
évanouissement, censé entraîner un plaisir sexuel.
Bâillon: Objet inséré dans la bouche du soumis ou placé dessus pour
l’empêcher de parler. Il peut s’agir d’un bâillon-boule en caoutchouc (gag
ball), d’une muselière, d’un mors, d’une bande autocollante, d’un morceau
de tissu ou de tout autre objet sécuritaire.
Banc de fessée: Station de jeu constituée d’un banc à chevaucher,
généralement agrémenté d’appuis de part et d’autre pour soutenir les
jambes et comprenant des attaches. Normalement, le banc de fessée permet
un accès facile aux fesses du soumis.
Barre d’écartement: Bâton rigide avec un anneau à chaque extrémité
servant à forcer une distance entre les pieds ou les mains du soumis.
BDSM hard: Se dit de toute pratique qui relève d’un BDSM axé sur la
douleur ou l’humiliation extrême.
BDSM soft: Se dit de toute pratique dont le niveau de douleur ou
d’humiliation est faible.
Bondage-discipline (BD): Jeu combinant la restriction physique avec le
contrôle psychologique du soumis.
Bondage japonais (shibari ou kinbaku): Pratique de restriction qui
consiste à envelopper le corps de cordes en fibres naturelles de manière à
restreindre le mouvement à l’aide de boucles. Pratique considérée comme
méditative ou spirituelle.
Bondage Western: Pratique de restriction qui consiste à utiliser des
cordes de différentes textures et couleurs ainsi qu’un système de nœuds
restrictifs ou décoratifs pour maintenir en place le ligotage. Plus utilitaire
que le bondage japonais.
Bottom: Rôle adopté par celui qui apprécie recevoir les sensations
offertes par le jeu BDSM dans le cadre d’une séance. Se dit du soumis et de
l’esclave.
Brat ou smart-ass masochist: Soumis souvent très masochiste qui
provoque le Dominant pour se faire punir. Il aime défier celui qui domine et
tente de contrôler la scène malgré son rôle de soumis. Mal vu par les
joueurs traditionalistes.
Cagoule: Dispositif couvrant entièrement ou partiellement la tête et le
visage et permettant parfois de priver le soumis de la vue, de l’ouïe et (ou)
de la parole.
Canne: Baguette longue, mince et flexible.
Cathéter: Tube de plastique flexible qui s’insère dans la vessie.
Ceinture de chasteté: Dispositif couvrant les organes génitaux et
permettant au Dominant de contrôler la sexualité du soumis. Peut comporter
une serrure à clé.
Cell popping: Pratique qui consiste à brûler de petits ronds sur la peau
de manière à former une figure à l’aide d’une mince tige de métal dont le
bout arrondi est chauffé.
Cire chaude: Jeu de température qui consiste à laisser couler la cire
d’une bougie allumée sur le corps. Peut être effectué à l’aide d’une
chaudière de cire liquide.
Code de sécurité: Indicateur verbal ou physique utilisé pour évaluer
l’état du soumis pendant une séance de jeu.
Collier de soumission: Objet porté au cou en signe de soumission et
d’appartenance à un Dominant.
Combat érotique: Jeu de rôle qui consiste en une lutte entre deux
individus jusqu’à ce qu’un vainqueur ressorte.
Contrôle de la sexualité: Jeu d’humiliation où le Dominant contrôle
l’entièreté ou une partie de la sexualité du soumis (orgasme, masturbation,
pratiques sexuelles).
Contrôle mental (mindfuck): Pratique psychologique consistant à
déstabiliser, à manipuler ou à créer intentionnellement de la confusion dans
l’esprit du soumis. A pour but de causer chez le soumis un sentiment
d’excitation, d’anticipation, de peur ou d’humiliation.
Cravache: Outil constitué d’une baguette rigide au bout de laquelle est
fixée une petite languette de cuir flexible.
Croix de saint André: Station de jeu constituée de deux planches
installées de manière à former un «X». Souvent capitonnée de cuir, elle
comporte des anneaux placés à la hauteur des mains et des pieds pour
attacher le soumis.
Dépersonnalisation: Jeu d’humiliation qui consiste à traiter le soumis
comme s’il n’avait aucune émotion, aucune valeur.
Discipline: Pratique qui consiste à entraîner le soumis de sorte qu’il
agisse comme le souhaite le Dominant. Se traduit notamment par
l’instauration de règles strictes et d’un système de récompenses et de
punitions.
Dominant: Rôle adopté par celui qui assume le contrôle dans une
situation d’échange de pouvoir. Le Dominant a un contrôle physique, mais
aussi mental et émotionnel sur le soumis.
Domination-soumission (Ds): Régime d’échange de pouvoir entre un
Dominant et un soumis.
Donjon: Lieu comportant des meubles et accessoires facilitant les jeux
BDSM.
Douleur érotique: Sensation intense qui, hors du contexte érotique et
attendu du jeu, s’apparenterait à de la douleur.
Dragon tail: Outil constitué d’un long triangle de tissu roulé sur lui-
même à sa base et fixé à une poignée.
Échange de pouvoir: Situation dans laquelle un individu donne le
contrôle à un autre individu de manière consensuelle. Se dit du rapport entre
Dominant et soumis.
Esclave: Rôle adopté par celui qui appartient entièrement à un Maître.
L’esclave renonce à ses droits, à ses désirs, à son pouvoir et à son contrôle
sur des aspects de sa vie qui sont négociés entre les deux parties.
Exhibition: Jeu d’humiliation qui consiste à exposer le soumis dans une
position ou un état considéré comme dégradant. L’exhibition peut être
psychologique, physique ou sexuelle.
Féminisation: Jeu d’humiliation qui consiste à forcer un soumis homme
à s’habiller ou à agir en femme. La féminisation est considérée comme
humiliante par les joueurs, ce qui la distingue du travestisme.
Fessée: Jeu de percussion qui consiste à administrer des claques sur le
corps du soumis, la main nue ou couverte d’un gant.
Fétiche: Érotisation d’une matière, d’un vêtement, d’un objet, d’un
comportement ou d’une partie du corps qui n’est pas traditionnellement
considéré comme une source d’excitation.
Fétichiste: Rôle adopté par celui qui est excité sexuellement par un
fétiche.
Figging: Jeu de température qui consiste à insérer dans le vagin ou
l’anus un morceau de gingembre pelé, ce qui provoque une sensation de
brûlure au contact des muqueuses.
Fisting: Insertion de la main dans le vagin ou l’anus.
Fouet: Outil comportant un corps flexible en cuir tressé attaché à une
poignée, qui s’étire sur plusieurs mètres en s’affinant.
Germanicus: Style de domination cérébral dont le but est de mettre en
scène des fantasmes sans retenue apparente mais en toute sécurité, dans un
scénario qui s’approche le plus possible du réel.
Goréen: Style de domination basé sur les romans de John Norman qui
décrivent la vie sur la planète Gor, où la soumission sexuelle des esclaves à
leurs Maîtres est encouragée.
Harnais: Dispositif servant à restreindre les mouvements d’une partie
du corps (tête, bras, jambes, torse, organes génitaux masculins).
Humiliation: Pratique qui éveille des sentiments de honte, d’embarras
ou de dégradation chez le soumis. Peut être physique, mentale ou sexuelle.
Infantilisation: Jeu de rôle qui consiste à traiter le soumis comme s’il
était un enfant.
Interrogation: Jeu d’humiliation qui consiste à soutirer une information
du soumis. Peut être mélangé avec de la torture et de la restriction.
Isolation: Jeu d’humiliation qui consiste à isoler le soumis dans une
cage, dans un coin de la pièce, dans un garde-robe, etc.
Jeu: Pratique de nature BDSM. Provient du terme anglais «play», utilisé
pour rappeler le côté ludique du BDSM.
Jeu d’aiguilles (needle play): Pratique qui consiste à insérer de petites
aiguilles sous la surface de la peau.
Jeu d’électricité: Pratique qui consiste à stimuler le corps avec des
courants électriques de basse intensité ou de l’électricité statique.
Jeu d’urologie: Jeu d’humiliation qui consiste à utiliser la miction ou
l’urine dans un contexte éro-tique dégradant.
Jeu de genre (gender play): Jeu de rôle qui consiste à utiliser des
attributs généralement associés au sexe opposé dans le but d’altérer son état
physique ou psychologique.
Jeu de feu (fire play): Pratique qui consiste à mettre le feu à une
substance sur la peau du soumis, toujours suivie immédiatement de
l’utilisation d’un linge humide pour éviter les brûlures.
Jeu de limites (edge play): Regroupement de jeux hard impliquant un
niveau de danger plus élevé pour le soumis.
Jeu de pouvoir: Jeu de rôle où sont incarnés des personnages ayant un
rapport de pouvoir.
Jeu de régression (age play): Jeu de rôle qui consiste à agir comme une
personne substantiellement plus jeune que soi.
Jeu de rôle: Scénario érotique dans lequel les joueurs incarnent des
personnages déterminés.
Jeu de rôle animal (pet play): Jeu de rôle consistant à faire semblant
d’être un animal. Les gestes, postures et sons imitent ceux de l’animal
choisi, le plus fréquemment un chien, un chat ou un poney.
Jeu de scatologie: Jeu d’humiliation qui consiste à utiliser la défécation
ou les matières fécales dans un contexte érotique dégradant.
Jeu de sensations: Jeu de torture érotique qui consiste à provoquer un
éventail de sensations sur la peau pour stimuler les sens du soumis
(pincement, chatouillement, morsure, friction, etc.).
Jeu de simulation: Jeu de rôle où un fantasme du soumis est reproduit
dans un scénario complexe et élaboré.
Jeu de température: Jeu de torture érotique qui consiste à utiliser le
chaud ou le froid pour stimuler la peau, éveiller les sens et causer une
sensation de brûlure.
Jeu de terreur (terror games): Jeu de rôle qui consiste à provoquer le
soumis avec un couteau, une arme à feu (non chargée) ou un objet
contondant dans le cadre d’une scène ou d’un rapport sexuel.
Jeu médical: Jeu d’humiliation où l’on simule un examen médical en
scrutant le soumis à la loupe. Inclus souvent des instruments médicaux:
table d’examen et étriers, spéculum, thermomètre, etc.
Jouet: Instrument utilisé dans les jeux de BDSM.
Joueur: Individu pratiquant le BDSM.
Joueur protocolaire: Se dit d’un individu pratiquant un jeu axé sur le
protocole relationnel, c’est-à-dire comportant un grand nombre de règles
servant à marquer la différence de pouvoir entre les joueurs.
Kinkster: Rôle souple adopté par celui qui aime ce qui est… kinky.
Souvent associé à de l’exhibitionnisme ou du voyeurisme.
Kinky: Caractère de ce qui est hors de l’ordinaire sur le plan sexuel. Se
dit d’une pratique, d’une personne, d’un événement.
Laisse: Jeu d’humiliation qui consiste à attacher une laisse au cou du
soumis et à le diriger. Souvent couplé avec la marche à quatre pattes.
Lavement: Jeu d’humiliation qui consiste à injecter un liquide dans
l’anus pour provoquer la défécation ou nettoyer les parois anales.
Ligotage: Jeu de restriction visant à restreindre la mobilité du soumis.
Limite: Restriction quant aux pratiques admises dans une relation
BDSM. Les limites sont négociées entre les parties et validées avant et
durant le jeu.
Liste de limites: Liste énumérant toutes les pratiques BDSM qui sont
cotées par le joueur quant à leur acceptabilité. Sert de base à la négociation
avant le jeu.
Maître: Rôle adopté par celui ou celle qui maîtrise l’art de la
domination, classiquement mais non exclusivement dans le cadre de la
relation Maître-esclave.
Marquage au fer (branding): Pratique qui consiste à brûler la peau
avec un morceau de métal chauffé.
Marquage par coupures (cutting): Pratique qui consiste à faire des
incisions peu profondes sur la peau avec un scalpel stérilisé de manière à
laisser des marques semi-permanentes.
Marque: Trace ou ecchymose laissée sur la peau après l’utilisation
d’instruments sur le corps. Leur intensité en termes de couleur et de temps
de guérison varie selon plusieurs facteurs: le type de peau, l’instrument et la
force avec laquelle il a été utilisé, l’endroit sur le corps, etc.
Martinet (flogger): Outil ayant plusieurs longues lanières attachées à un
manche, généralement de minces languettes de cuir ou de suède.
Masochiste: Rôle adopté par celui qui apprécie recevoir des sensations
de douleur érotique.
Milking: Jeu d’humiliation qui consiste à évacuer le sperme sans
orgasme par le massage de la prostate de l’homme soumis.
Momification: Jeu de restriction qui consiste à enrouler le corps du
soumis dans un matériau souple de manière à l’empêcher complètement de
bouger.
Moniteur de jeu (dungeon master, dungeon monitor ou DM):
Personne qui a la responsabilité d’assurer que les jeux ayant cours dans une
soirée de jeu soient sécuritaires, tant au niveau physique et psychologique
qu’hygiénique. Souvent un joueur expérimenté qui a suivi une formation
spécifique.
Mot de sécurité (safeword): Mot n’ayant aucun rapport avec le BDSM
ou la sexualité, utilisé pour arrêter complètement et immédiatement une
scène en cas d’inconfort de la part d’un joueur.
Munch: Événement de socialisation organisé par les membres de la
communauté BDSM.
Non-consentement consenti (consensual non-consent): Situation où un
consentement temporaire est donné par le soumis pour des actions qui
supassent les limites négociées, et qui seraient donc normalement refusées
par celui-ci. Pratiqué uniquement par des joueurs expérimentés ou qui se
connaissent très bien.
Obéissance: Pratique qui consiste à obéir à la lettre aux demandes du
Dominant.
Objectification: Jeu d’humiliation qui consiste à traiter le soumis
comme un objet.
Palette: Outil rigide constitué d’une section plate rattachée à une
poignée.
Perçage temporaire: Pratique qui consiste à percer la peau à l’aide d’un
outil de perçage qui sera retiré rapidement de sorte que la peau n’aura pas le
temps de cicatriser au lieu d’insertion.
Percussion: Regroupement de pratiques qui consistent à donner un ou
plusieurs coups sur le corps d’une personne.
Personal responsibility in informed consensual kink (PRICK): Règle
qui veut que tous les joueurs sont personnellement responsables de
s’informer sur les pratiques et d’y consentir avant et pendant le jeu.
Pervertible: Accessoire de la vie courante pouvant être utilisé pour une
percussion.
Privation sensorielle: Pratique qui consiste à restreindre un ou plusieurs
sens du soumis.
Protocole: Ensemble de règles qui régulent les interactions entre les
joueurs et indiquent les devoirs et obligations de chacun.
Punition: Correction donnée au soumis par le Dominant qui prétend
l’éduquer à la bonne manière d’agir dans le cadre de jeux de discipline.
Restriction: Pratique ayant pour objectif de restreindre physiquement,
mentalement ou sexuellement la personne soumise.
Risk-aware consensual kink (RACK): Règle qui exige que tous les
joueurs s’informent sur les risques impliqués dans les pratiques et, à la
lumière de ces informations, y consentent.
Rôle: Position adoptée par les joueurs et choisie en fonction de leurs
préférences quant aux pratiques BDSM.
Roue de Wartenberg (pin wheel): Roulette à pics qui crée une série de
petits pincements sur la peau.
Sadique: Rôle adopté par celui qui apprécie d’infliger des sensations de
douleur érotique. Souvent couplé à un rôle de Dominant ou de Maître.
Sadomasochisme (SM): Jeux d’échange de pouvoir incluant le fait
d’infliger ou de se faire infliger des sensations de douleur érotique.
Safe, sane and consensual (SSC): Règle qui assure que toutes les
pratiques sont effectuées de manière consensuelle et sans danger, tant
physique que psychologique, pour tous les joueurs impliqués.
Scénario: Histoire mise en scène dans une séance de jeu.
Scène: Moment délimité dans le temps où chaque participant adopte un
rôle précis dans le cadre d’un jeu.
Séance de jeu: Synonyme de scène.
Service: Mise en scène de rituels instaurés par le Dominant et effectués
par le soumis de manière à exprimer sa dévotion.
Sexualité forcée: Jeu d’humiliation lors duquel le Dominant contraint le
soumis à effectuer certains actes sexuels (forcer l’orgasme, la masturbation,
une pratique sexuelle, un partenaire sexuel).
Slapper: Outil constitué d’une languette flexible attachée à une poignée.
Semblable à la palette.
Soirée de jeu: Événement organisé par les membres de la communauté
BDSM lors duquel les joueurs peuvent arborer leur rôle et jouer devant (ou
avec) d’autres adeptes. Se déroule généralement dans un donjon.
Sonde: Cylindre permettant de dilater ou d’explorer l’urètre, le vagin ou
l’anus.
Soumis: Rôle adopté par celui qui renonce au contrôle dans une scène.
Station de jeu: Meuble ou aire dévolu à une séance de jeu BDSM.
Subspace: État de bien-être, de déconnexion et de plénitude après une
séance intense. Serait le résultat de la forte sécrétion d’endorphines
conséquente aux sensations de douleur et de plaisir ressenties lors d’une
séance.
Subdrop: État de fatigue physique et parfois d’abattement chez le
soumis, qui peut suivre une séance de jeu.
Supplication: Jeu d’humiliation qui consiste à forcer le soumis à
implorer le Dominant pour avoir accès à ce qu’il désire.
Suspension: Jeu de restriction qui consiste à suspendre le soumis à
l’aide de cordes.
Switch: Rôle adopté par celui qui peut aussi bien assumer un rôle de
domination que de soumission.
Table de fessée: Station de jeu horizontale généralement capitonnée de
cuir comprenant des attaches pour le soumis.
Top: Rôle adopté par celui qui assume le contrôle dans une situation
d’échange de pouvoir. Se dit du Dominant et du Maître.
Torture érotique: Regroupement des pratiques qui consistent à donner
des sensations intenses, douloureuses ou non, de manière constante ou
ponctuelle, et localisées à un point de contact.
Transcutaneous electrical nerve stimulation (TENS): Instrument qui
envoie des courants électriques de basse fréquence dans les nerfs et les
muscles à l’aide d’électrodes collées sur la peau, ce qui engendre des
spasmes musculaires.
Travestisme: Pratique qui consiste à porter les vêtements ordinairement
assignés au sexe opposé.
Vacuum bed: Dispositif constitué de deux draps de latex scellés
maintenus par un cadre rigide. Sert à immobiliser une personne en aspirant
l’air entre les draps.
Vanille: Caractère de tout ce qui n’est pas lié au BDSM. Se dit d’une
pratique, d’une personne, d’un événement.
Ventouses: Jeu de sensation qui consiste à retirer l’air sous une
ventouse, ce qui crée une succion de la peau dans la coupe et accroît
l’afflux sanguin.
Vêtement fétiche: Vêtement dont le matériau principal est le PVC, le
latex, le cuir ou le vinyle. Généralement le vêtement de rigueur lors de
soirées de jeu.
Violet wand: Baguette utilisée lors d’un jeu d’électricité qui envoie de
l’électricité statique à la surface de la peau à travers divers embouts de verre
ou de métal.
Zipper: Jeu de sensation qui consiste à lier avec de la corde une série de
pinces, à poser les pinces sur le corps, puis à tirer sur la corde d’un coup de
manière à retirer toutes les pinces au même moment.
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Remerciements
Merci aux membres de la communauté BDSM de Montréal, qui m’ont
ouvert leurs portes et leurs cœurs. Vous avez été généreux et honnêtes avec
moi, et je vous en serai éternellement reconnaissante.
Merci à ceux et à celles qui ont lu et commenté des passages de cet ouvrage
et en ont débattu avec moi: ils m’ont aidée à comprendre et à expliquer.
Merci à Annie, qui a partagé avec moi ses travaux et ses idées. Nos
échanges ont été aussi stimulants que profitables.
Merci à Nancy & Fan, Anne, Marie-Soleil et Sara, qui m’ont offert des
lieux inspirants pour des retraites rédactionnelles. Sans vous, j’en serais
encore au premier chapitre.
Merci à Alain-Nicolas Renaud, chez VLB Éditeur, qui a cru en mon projet
dès le début et a osé s’aventurer sur ce terrain tabou.
Merci, enfin, à mes parents, qui n’ont jamais jugé mes choix professionnels
mais, au contraire, sont devenus des agents de démystification à leur tour. Je
suis fière de vous!
Cet ouvrage composé en Chronicle Text G1 corps 11.5 a été achevé d’imprimer au Québec
sur les presses de Marquis Imprimeur le vingt-neuf mars deux mille seize
pour le compte de VLB éditeur.
Table des matières
Avant-propos
1. L’ABC DU BDSM
2. LES ADEPTES
3. LE JEU
4. LA SÉCURITÉ AVANT LE PLAISIR
5. LA COMMUNAUTÉ
Conclusion
Glossaire
Bibliographie sélective
Remerciements
Direction littéraire: Alain-Nicolas Renaud
Maquette de la couverture: Clémence Beaudoin
VLB ÉDITEUR
Groupe Ville-Marie Littérature inc.* DISTRIBUTEUR:
Une société de Québecor Média Les Messageries ADP inc.*
1055, boulevard René-Lévesque Est 2315, rue de la Province
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Nous remercions le Conseil des arts du Canada de l’aide accordée à notre programme de publication.