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Entre-deux

Mots clefs : identités, langue, cœur, fragments, étrange, étranger(s), mémoire(s), origine, traverses,
branches, intersections, racines, enfance.

L'entre-deux ? Entre-deux identitaire, de langue, de pays, de cœur. L'entre-deux pour moi c'était
France-Algérie. Née là bas, ayant grandi ici, pendant plus de quinze ans j'avais oublié l'Algérie.
Quand j'ai remis les pieds en terre natale en 2014, je me suis posée à nouveau la question de la
maison. Là-bas ils disent que je suis d'ici ; ici on dit que je viens de là-bas. J'ai voulu rencontrer
mes compagnons de l'in between. Sonder l'entre-deux entre-trois dans le calme niortais. L'eau et
les arbres, la lumière et les ombres dessinent l'exil intérieur, les doubles identités, la recherche
d’attaches – quelque chose qui nous traverse et vient d'ailleurs.

Aller simple, aller/retour. Alger. Tiaret. Damas. Tbilissi. Brazzaville. Sfax. Ovalle. Téhéran. Paris.
On dit que le mouvement va des racines aux branches, mais se peut-il qu'il aille dans un sens, puis
dans un autre, se peut-il que l'herbe pousse véritablement par le milieu ? Je me souviens d'une
phrase dans un livre d'Anaïs Nin : « mes racines ? Oh, elles sont portatives ».
« Hé Lynn ! C'est pas nous qui traversons la frontière, c'est la frontière qui nous traverse ! » Mus,
au téléphone

« Pourquoi épurer, aller à l'origine alors que tu es la somme de toutes ces choses. Il n'y a pas
d'identité sans introspection. Ce sont des questions : pourquoi ça, ça ne me parle pas ? Pourquoi
ça, ça me parle plus ? Parfois vu de l'extérieur c'est schizophrénique, mais pour moi c'est comme
une évidence. » Laïd, né à Niort, vit à Niort

« Je me sentais être à la maison, en France, et puis je n'étais jamais sorti du pays, je n'étais jamais
retourné au Congo, mais quand on est confronté aux problèmes administratifs, aux contrôles
d'identité, on se dit est ce qu'on est là, est ce qu'on est pas là... » C., né à Brazzaville, vit à Niort

« J'aurais aimé parler la langue de mes parents, mais je comprends le choix qu'ils ont fait. S'ils ont
vu un danger à l'époque, c'est que l'intégration devait être beaucoup plus compliquée... C'est ça
qui est bizarre dans la double culture, à la fois il y a une forme de différence parce que tes parents
sont algériens, physiquement tu es « typée » et à côté de ça, tu n'as même pas le truc en plus, tu
es banalement française ! » Aïda
« J'ai voyagé parce que j'en avais marre de rester là de me sentir un étranger, ici, et de ne pas
pouvoir avancer... à l'étranger, j'étais un étranger parmi d'autres étrangers. Puis, j'ai commencé à
rentrer au Congo. Les congolais sentent que je suis un parisien, c'est comme ça qu'ils m'appellent,
mais j'insiste sur le fait que je suis là, et qu'ils doivent composer avec. » C.

« Je suis italienne. En France, je me sens italienne. Mais en Italie, je me sens sarde. » Emanuela,
née à Badesi (Sardaigne), vit à Niort

« Tu ne peux pas ne pas avoir de racines, ça n'a pas de sens. Mais ensuite, l'identité, c'est creuser,
c'est l'ossature sur laquelle tu rajoutes quelque chose. Et pourquoi épurer, aller à l'origine alors
que tu es la somme de toutes ces choses. Il n'y a pas d'identité sans introspection. Ce sont des
questions : pourquoi ça, ça ne me parle pas ? Pourquoi ça, ça me parle plus ? Parfois vu de
l'extérieur c'est schizophrénique, mais pour moi c'est comme une évidence. » Laïd, né à Niort, vit à
Niort

« C’est très particulier le rapport à la langue, les histoires de langues... mais qu'il y a un au delà de
la culture... tu ne peux pas expliquer une personnalité juste parce que tu es né dans un pays, il y a
quelque chose qui se fait au delà de la transmission du culturel... Ce qui m'interesse c'est la
singularité de chacun. » Sarah, née à Niort, vit à Niort
« Ça m'est arrivé qu'on me demande, tu te sens plus français ou algérien et je réponds, ni l'un ni
l'autre, je suis méditerranéen... je suis né en France, je travaille en France, mes enfants sont nés
en France, sont scolarisés en France... je me sens algérien de cœur parce que c'est ma culture, ce
sont mes repères... et je peux pas l'enlever. Je suis... comme le propriétaire du bateau qui fait
Marseille Alger. » Mus, né à Parthenay, vit à Niort

« Mon père, il y avait vraiment cette duplicité, une personne en France et une autre en Tunisie... »
Sarah

« Il y a du très bon et du moins bon, en Syrie comme en France, alors si on peut, on prend le
meilleur de chaque culture... La richesse ce n'est pas l'argent dans les poches ou à la banque, c'est
comment on aime, comment on respecte l'autre... je pense que chacun de nous est un
ambassadeur pour son pays. Je suis palestinienne. Si je suis une bonne personne, alors je donne
une bonne image de mon pays. » Mayada, née palestinienne en Syrie, vit à Niort
« Le mouvement, je pense qu'il va des racines aux branches. Mais ça va dans les deux sens, si tu
décides de faire le retour. Moi c'est mes parents qui ont planté l'arbre ici... mais si demain ils
doivent retourner avec l'arbre ils seront obligés de couper les branches. Les parents sont les
piliers, le jour où ils ne seront plus là, la dalle s'effondre. S'ils décident de partir il faut d'abord que
toutes les branches décident de s'accorder pour voir si on repart avec le tronc. C'est un
mouvement permanent ; y a rien de figé, tu t'adaptes... » Mus
Exposition aux 23ème Rencontres de la Jeune Photographie Internationale à Niort :

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