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Pourquoi l’espionnage est-il intimement lié à la fin du monde ?

La fin du monde ne change rien au fonctionnement général de la société, elle


réside même dans ce fonctionnement général : cette idée précieuse, qui est
encore notre façon la plus moderne de penser, est-elle née à Vienne au début du
XXe siècle, avec Karl Kraus, ou dans l’Amérique de Nixon décrite par Philippe
K Dick ou bien tardivement avec Jean Baudrillard dans les années 80
françaises ?
Quoi qu’il en soit, cette fin du monde-là est la fin du caractère jouable de
l’existence et du caractère praticable de la réalité. Il suffit pour la mettre en
œuvre de se tenir exactement dans le sens du courant. Le mot universel de Main
stream a été inventé pour ces nouveaux, innombrables, cavaliers de
l’apocalypse.

Tout ce qui interrompt le fonctionnement général de la société (et c’est parfois


difficile, l’événement est de plus en plus rare, de plus en plus prévisible, intégré,
récupéré, tout le monde y travaille sans le savoir), relance donc le monde, le
monde infini, interminable. La grands agents de rupture, les révolutionnaires, les
messies, les inventeurs de l’acte pur, sont donc en fait des agents de la
continuité.
Lorsque je lis l’apocalypse de Jean, j’ai plutôt l’impression d’une nouvelle
genèse : la terre s’y peuple de nouvelles créatures, mi-animales, mi-divines. Ce
qui disparaît, ce sont les villes, pas les humains. L’horreur des villes récurrente
dans toute la Bible, depuis Sodome jusqu’à….
D’assez bonnes nouvelles en 2005 surt la reconstitution du milieu marin après
les marées noires, notamment au large de la Galice. Ainsi, nous prenons
conscience de la relative capacité de convalescence de certains biotopes, de
certaines espèces, notazmment bactériennes. Et la catastrophe écologique qui
ferait disparaître l’homme est de moins en moins conçue comme une extinction
global du vivant dans son ensemble. Les céphalopodes prendront notre place, il
ne s’agit que de quelques millions d’années. Ainsi se rétrécit lentement
l’ampleur et la portée du drame. On a plus affaire qu’à du théâtre de boulevard,
non à de la tragédie.
Après avoir fait disparaître certains hommes, on fait disparaître certains groupes
d’hommes, puis certaines espèces, dont l’humaine : toujours ce goût de
l’élargissement et de la généralisation.
Ne pas mourir avant d’avoir épurer l’exercice de la peur. La peur pour rien, la
peur de rien. Mais la peur intense

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