Vous êtes sur la page 1sur 132

L’essence d’Ambroisie

L’Essence d'Ambroisie

L’Essence d'Ambroisie est un guide de méditation bouddhiste, composé par le prolifique et éclectique
érudit et pratiquant tibétain Tāranātha (1575-1634). Suivant l'exemple d'Atiśa, Tāranātha expose une
approche graduelle (connue sous le nom de Lam Rim) du développement cognitif et méditatif conçue pour
répondre aux besoins de trois types de personnes : les personnes de capacité moindre, moyenne et
supérieure.
La contribution innovante de Tāranātha à ce genre est d'instruire l'étudiant dans des « séances de
contemplation », qui guident spécifiquement un pratiquant bouddhiste débutant à travers les pratiques
traditionnelles de méditation, en commençant par la réflexion dévotionnelle jusqu'au sommet de la
méditation bouddhiste, la méditation de la vision supérieure (vipaśyanā). Le résultat est un guide d'initié
remarquablement accessible et concis sur la voie du bouddhisme Mahāyāna.

Willa Baker (Lama Palmo) est titulaire d'une maîtrise de l'Université de Virginie. Elle a effectué deux
retraites de trois ans au monastère Kagyu Thubten Choling à New York. Elle réside actuellement à
Cambridge, Massachusetts, où elle traduit, enseigne la méditation et prépare un doctorat à l'Université
Harvard.

"Un précieux manuel de méditation donnant vie aux étapes de la voie."


— Jeffrey Hopkins, Université de Virginie, auteur de Maps of the Profound

"Il s'agit d'une traduction exceptionnellement lucide d'un ouvrage fondateur sur les principales
pratiques et idées du bouddhisme tibétain. Une excellente ressource pour les étudiants, les universitaires
et les pratiquants."
. —Janet Gyatso, professeur Hershey d'études bouddhistes, Harvard Divinity School

"L'Essence d'Ambroisie de Tāranātha est l'un des manuels de chemin spirituel tibétain les plus
accessibles et les plus pratiques... En tant qu'érudite connaissant profondément le texte et son genre, la
voix de Baker établit un pont profond entre le monde de notre auteur du XVIIe siècle et celui du XXIe siècle.
Son introduction en tant que traductrice, les annotations et les glossaires méritent une attention
particulière.
—John Makransky, professeur de bouddhisme et de théologie comparée, Boston College

ISBN : 81-86470-37-9 Rs. 150

I
L’Essence d’Ambroisie

༄༅། །རྒྱལ་བའི་བསྟན་པ་ལ་འཇུག་པའི་རིམ་པ་སྐྱེས་བུ་གསུམ་གི་མན་ངག་གི་ཁིད་བདུད་རིའི་ཉིང་ཁུ་ཞྐྱེས་བྱ་
བ་བཞུགས་སོ།།
Gyalwa’i Tènpa la Djoukpa’i Rimpa Kyébou-Soum gyi Mèn-Ngak gui T’ri Dütsi’i Nying-Khou
Shé-Djawa Shoug-so

L’Essence d’Ambroisie
un Guide pour les Contemplations Bouddhistes
par Tāranātha

Traduit en anglais par Willa Baker


Traduit de l’anglais par Stéphane Lime

BIBLIOTHÈQUE DES ŒUVRES ET ARCHIVES TIBÉTAINES (LTWA)


L’essence d’Ambroisie

Copyright © 2005 : Willa Baker


First print : 2005

TOUS DROITS RÉSERVÉS


Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, stockée dans un système de récupération
ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit sans l'autorisation écrite préalable de
l'éditeur.

ISBN: 81-86470-37-9
Published by Library of Tibetan Works and Archives, Dharamsala and printed at Indraprastha Press (
CBT), 4 Bahadurshah Zafar Marg, New Delhi-100 002

III
L’Essence d’Ambroisie

Table des matières


[DÉDICACE]................................................................................................................................................... VIII
PRÉFACE ......................................................................................................................................................... IX
NOTE DE L'ÉDITEUR ........................................................................................................................................ X
REMERCIEMENTS........................................................................................................................................... XI
INTRODUCTION DE LA TRADUCTRICE ........................................................................................................... XII
Tāranātha (1575-1634) .......................................................................................................................... XIII
La lignée Jonang ....................................................................................................................................... XV
L’Essence d'Ambroisie ............................................................................................................................ XVI
La personne de moindre capacité (Partie I) ........................................................................................ XVIII
La personne de capacité médiane (Partie II) ......................................................................................... XXI
La personne de grande capacité (Partie III) ......................................................................................... XXII
PROLOGUE ..................................................................................................................................................... 1
CONTEMPLATION 1 : Se fier à un Maître spirituel, Racine de Toutes les Voies ..................................... 2
Partie I : L’ENTRAÎNEMENT AUX ÉTAPES COMMUNES AUX PERSONNES DE MOINDRE CAPACITÉ .................. 4
CHAPITRE UN : LES LIBERTÉS ET LES DOTATIONS D'UNE PRÉCIEUSE VIE HUMAINE .................................. 5
CONTEMPLATION 2 : La difficulté d'obtenir une précieuse vie humaine avec ses libertés et dotations
.................................................................................................................................................................... 5
CONTEMPLATION 3 : La probabilité de renaître humain ........................................................................ 7
CONTEMPLATION 4 : Pourquoi cette vie humaine est importante ........................................................ 8
CHAPITRE DEUX : L’IMPERMANENCE ET LA MORT..................................................................................... 10
CONTEMPLATION 5 : Assurément, vous allez bientôt mourir .............................................................. 10
CONTEMPLATION 6 : Vous n'avez aucune idée de quand vous mourrez. ........................................... 11
CONTEMPLATION 7 : Au moment de la mort, rien d'autre excepté la religion ne nous aidera. ........ 12
CONTEMPLATION 8 : Les cinq versets racines – les instructions utilisées pour les séances de
méditation sur l'impermanence et la mort ............................................................................................ 13
CHAPITRE TROIS : LES SOUFFRANCES DES ROYAUMES INFÉRIEURS ......................................................... 16
CONTEMPLATION 9 : La Souffrance des Enfers Chauds ........................................................................ 16
CONTEMPLATION 10 : La souffrance des enfers froids ......................................................................... 19
CONTEMPLATION 11 : La souffrance des enfers voisins ....................................................................... 20
CONTEMPLATION 12 : Les Enfers Éphémères ....................................................................................... 21
CONTEMPLATION 13 : Le royaume des fantômes affamés .................................................................. 22
CONTEMPLATION 14 : La souffrance du règne animal.......................................................................... 23
Table des Matières

CONTEMPLATION 15 : Résumé des points ci-dessus ............................................................................ 24


CHAPITRE QUATRE : LES INSTRUCTIONS SUR LES CAUSES ET LES EFFETS DE L'ACTION ......................... 26
CONTEMPLATION 16 : Le concept de Karma en général ...................................................................... 26
CONTEMPLATION 17 : Les causes de l'action négative ......................................................................... 26
CONTEMPLATION 18 : Les effets de l'action négative........................................................................... 28
CONTEMPLATION 19 : Les actions positives .......................................................................................... 29
CONTEMPLATION 20 : Les bienfaits des dix actions vertueuses........................................................... 30
CONTEMPLATION 21 : Le point essentiel de la pratique ....................................................................... 30
Partie II : L’ENTRAÎNEMENT AUX ÉTAPES COMMUNES POUR LA PERSONNE DE CAPACITÉ MÉDIANE .......... 33
CHAPITRE CINQ : LA SOUFFRANCE DES ROYAUMES SUPÉRIEURS ............................................................. 34
CONTEMPLATION 22 : La souffrance de la naissance ........................................................................... 34
CONTEMPLATION 23 : La souffrance du fait de vieillir .......................................................................... 35
CONTEMPLATION 24 : La souffrance de la maladie .............................................................................. 35
CONTEMPLATION 25 : La souffrance de la mort ................................................................................... 36
CONTEMPLATION 26 : Les autres souffrances humaines ..................................................................... 36
CONTEMPLATION 27 : La souffrance des royaumes des demi-dieux et des dieux .............................. 37
CONTEMPLATION 28 : La souffrance des royaumes divins supérieurs ................................................ 38
CHAPITRE SIX : LA SOUFFRANCE DE L'EXISTENCE CYCLIQUE EN GÉNÉRAL ............................................... 40
CONTEMPLATION 29 : Les trois types de souffrance ............................................................................ 40
CONTEMPLATION 30 : Les Huit Souffrances .......................................................................................... 40
CONTEMPLATION 31 : Les Six Souffrances............................................................................................. 41
CHAPITRE SEPT : LES ASPECTS DE L'ORIGINE .............................................................................................. 43
CONTEMPLATION 32 : La cause originelle de la souffrance.................................................................. 43
CHAPITRE HUIT : LES CAUSES ET LES RÉSULTATS DE LA LIBÉRATION ........................................................ 45
CONTEMPLATION 33 : La contemplation des causes et des résultats de la libération ....................... 45
Partie III : LES CONTEMPLATIONS EXTRAORDINAIRES POUR LA PERSONNE DE PLUS GRANDE CAPACITÉ..... 47
CHAPITRE NEUF : LA CONTEMPLATION PRÉPARATOIRE ET LES LIENS DE CAUSALITÉ ............................. 48
CONTEMPLATION 34 : Préparation ........................................................................................................ 48
CONTEMPLATION 35 : Les liens causals qui mènent à l'atteinte de la bouddhéité ............................. 49
CHAPITRE DIX : MÉDITATION SUR L'AMOUR ET LA COMPASSION ............................................................ 51
CONTEMPLATION 36 : L’Amour pour votre mère ................................................................................. 51
CONTEMPLATION 37 : Reconnaître l'étendue de l'amour de votre mère ........................................... 52
CONTEMPLATION 38 : L'expansion de l'esprit d'amour bienveillant envers tous les êtres sensibles 52

V
L’Essence d’Ambroisie

CONTEMPLATION 39 : La Méditation sur la Compassion...................................................................... 55


CHAPITRE ONZE : MÉDITATION SUR L'ESPRIT D'ÉVEIL EN ASPIRATION ................................................... 58
CONTEMPLATION 40 : L'esprit d’Éveil en aspiration ............................................................................. 58
CONTEMPLATION 41 : L’entraînement à la contemplation des bienfaits de l'esprit d’Éveil ............... 59
CONTEMPLATION 42 : Les engagements de l’entraînement ................................................................ 59
CONTEMPLATION 43 : Faire un effort pour accumuler du mérite ....................................................... 60
CONTEMPLATION 44 : L’entraînement aux huit actions ....................................................................... 61
CHAPITRE DOUZE : L’ENTRAÎNEMENT À LA MISE EN APPLICATION DE L’ESPRIT D’ÉVEIL ........................ 63
CONTEMPLATION 45 : La réflexion générale sur la mise en application de l’esprit d’Éveil ................ 63
CONTEMPLATION 46 : La Perfection de la Générosité ......................................................................... 63
CONTEMPLATION 47 : La Perfection de la Discipline Morale .............................................................. 64
CONTEMPLATION 48 : La Perfection de la Patience ............................................................................. 65
CONTEMPLATION 49 : La Perfection de la Diligence ............................................................................ 66
CONTEMPLATION 50 : Les causes de l'absorption parfaite ................................................................. 67
CONTEMPLATION 51 : La Perfection de l'Absorption – La contemplation principale ........................ 67
CHAPITRE TREIZE : LA SAGESSE................................................................................................................... 69
CONTEMPLATION 52 : La Perfection de la Sagesse .............................................................................. 69
CONTEMPLATION 53 : L’absence de "soi" des personnes ................................................................... 70
CONTEMPLATION 54 : L’absence de "soi" des phénomènes ............................................................... 71
CONTEMPLATION 55 : L’absence de "soi" de l’agrégat de la forme.................................................... 72
CONTEMPLATION 56 : L’absence de "soi" des particules minuscules ................................................. 73
CONTEMPLATION 57 : L’absence de "soi" des quatre autres agrégats ............................................... 73
CONTEMPLATION 58 : L’absence de "soi" de la conscience ................................................................ 74
CONTEMPLATION 59 : Méditation sur la vacuité de tous les êtres sensibles habitant le monde ..... 74
CONTEMPLATION 61 : La vacuité de l’environnement extérieur et de ses habitants ....................... 75
CONTEMPLATION 62 : La méditation sur la liberté ultime vis-à-vis des élaborations ........................ 75
CONTEMPLATION 63 : Comment maintenir la méditation sur l’absence de soi et la vacuité ........... 76
CONTEMPLATION 64 : La vacuité avec le cœur de compassion .......................................................... 77
CHAPITRE QUATORZE : LES MOYENS DE PROGRESSER DANS LA PRATIQUE ........................................... 79
SESSION 1 : Perfectionnement............................................................................................................... 79
SESSION 2 : Dissiper les obstacles.......................................................................................................... 79
SESSION 3 : Intégrer les pratiques ......................................................................................................... 80
SESSION 4 : Que faire à tout moment ................................................................................................... 80
Table des Matières

ÉPILOGUE : LA MANIÈRE D'OBTENIR LA FRUITION DE L’INSURPASSABLE ÉVEIL ........................................... 82


ANNEXE........................................................................................................................................................ 84
1. La Cérémonie de Génération de l'Esprit d'Éveil...................................................................................... 84
2. La Cérémonie de Prise du Vœu de Bodhisattva ..................................................................................... 86
CONCLUSION ............................................................................................................................................... 89
Prière à la Lignée Kadampa ..................................................................................................................... 89
GLOSSAIRE DES TERMES TECHNIQUES ET DES NOMS PROPRES ................................................................... 96
GLOSSAIRE DES TERMES DE CLASSIFICATION AVEC LE TIBÉTAIN .................................................................. 98
RÉFÉRENCES............................................................................................................................................... 105

VII
L’Essence d’Ambroisie

[DÉDICACE]

Ce livre est dédié à Lama Norlha Rinpoché, dont l'activité compatissante


se déploie constamment au profit des autres, et au sangha du
monastère Kagyu Thupten Choling, dont les prières et les pratiques
bénissent la région du nord de l'État de New York.
Préface

PRÉFACE

(traduction)
Le douzième Tai Sitoupa
Mme Palmo, disciple de Son Éminence Kalu Rinpoché, étudie et pratique le bouddhisme depuis de
nombreuses années. Elle a également officiellement terminé une retraite de méditation de trois ans.
Je prie les Trois Joyaux et appelle les protecteurs infaillibles du Dharma pour que sa traduction du
Lamrim (étapes du chemin) de Tāranātha guide et profite à tous les étudiants et pratiquants du Dharma.
Puissent les mérites acquis grâce à cette noble action assurer l’acquisition d’une base propice au bonheur
et au bien-être de tous les êtres sensibles.
Tai Situ Shérabling
10 janvier 2005

IX
L’Essence d’Ambroisie

NOTE DE L'ÉDITEUR

La Bibliothèque des œuvres et archives tibétaines (LTWA) est heureuse de publier le Lam-rim du
17ème siècle : L'essence d'ambroisie de Tāranātha, un texte sur les étapes du chemin conçu comme une
série de méditations sur les points-clés du chemin vers l'état de bouddhéité, à une époque où beaucoup
de gens sont intéressés par la méditation et le bouddhisme tibétain.
Nous sommes redevables à Willa Baker (Lama Palo) pour sa belle traduction et la remercions d'avoir
fourni les fonds nécessaires pour inclure le texte tibétain dans cette publication. Nous tenons également à
remercier M. Sangye Tandar Naga pour avoir revérifié la traduction et la relecture finale du texte tibétain
et Ani Tenzin Choying pour sa précieuse aide éditoriale.
Nous espérons que cette publication se révélera un guide utile et profitera à ses lecteurs et praticiens.

Département des publications


LTWA
Avril 2005
Remerciements

REMERCIEMENTS

Un certain nombre de personnes, peut-être plus que je ne


peux en nommer ici, ont contribué à la traduction de L’Essence
d’Ambroisie. La traduction n’aurait pas été possible sans
l’inspiration, la gentillesse et les conseils de mon maitre-racine Lama
Norlha Rinpoché, qui a été le premier à me transmettre les
enseignements de ce texte, ainsi qu’à un certain nombre d’autres
personnes fortunées. Si les mots de cette traduction ont une valeur
pour le lecteur, elle est assurément due à la présentation habile du
matériel par Lama Norlha et à sa capacité à animer les textes de
Tāranātha avec des anecdotes issues de sa richesse d'expérience et
de sagesse.
De même, je ne peux pas payer en retour la bienveillance de
Kalu Rinpoché et de Bokar Rinpoché qui m'ont accordé la
transmission de lecture de ce texte et de tous les autres textes et
pratiques Shangpa. Je suis reconnaissant à tous les résidents du
monastère Kagyu Thupten Choling à New York pour leur gentillesse
et leur soutien tout au long des vicissitudes du temps et des changements survenus pendant que cette
traduction était en cours.
Je suis particulièrement redevable à Ani Jamdron dont l'amitié, la profonde compréhension du
Dharma et la connaissance approfondie du tibétain ont été inestimables à différentes étapes de la
traduction. Je suis profondément reconnaissante envers Derek Maher et Jeffrey Hopkins qui m’ont fourni
la source sanskrite, m’ont apporté un soutien moral vital et une aide pratique pour affiner la traduction, et
dont l'érudition et l'attention aux détails m'ont inspirée à être plus méticuleuse.
Je suis profondément reconnaissante envers Ngawang Zangpo, qui m’a fourni des informations
précieuses sur la lignée Shangpa et Tāranātha pendant que j'écrivais l'introduction.
Je remercie également un certain nombre de personnes qui ont contribué à ce livre directement et
indirectement en offrant leur soutien pendant que j'y travaillais : Khenpo Tsultrim Gyatso Rinpoché, Ari
Goldfield, E. Gene Smith, Lama Chopal, Lama Surya Das, Lama Palden. , Robert Kelly du Bard College, John
Makransky du Boston College, Karen Lang et David Germano de l'Université de Virginie, Janet Gyatso de
l'Université Harvard et Marilyn Goldberg de l'Université du Maryland.
Mes plus sincères remerciements vont également à Tsering Namgyal et Sangye Tandar Naga ainsi
qu'au personnel de la Bibliothèque des œuvres et des archives tibétaines pour avoir rendu ce livre possible.
Je suis particulièrement reconnaissante envers Mike Miller, mon père Will Baker et mon oncle Charley, qui,
jour après jour, m'ont offert leurs encouragements, leur amour, leurs commentaires constructifs et leur
soutien sans compromis.

XI
L’Essence d’Ambroisie

INTRODUCTION DE LA TRADUCTRICE

Les mots composés par un maître doté de la sagesse de Tāranātha ont leur propre pouvoir
insondable. Mais de nombreuses années de familiarité avec le texte ont donné une idée de la magie qui
rend le livre de Tāranātha si émouvant et qui a rendu le texte populaire au fil des siècles. Tout d’abord, et
peut-être avant tout, le caractère pratique des textes. Tāranātha a composé L’Essence d’Ambroisie comme
un guide pratique, simple et convivial pour les méditants.
Contrairement à de nombreux autres textes de ce genre, par exemple le célèbre Lamrim Chenmo de
Tsongkhapa, le texte de Tāranātha est réduit à sa structure la plus élémentaire. Comme son titre, L’Essence
est la distillation des points les plus essentiels de la pratique de la méditation pour les débutants sur la voie
du Mahāyāna.
Tāranātha n'expose cependant pas ces points sous la forme d'un traité sur la pensée bouddhiste
mais les présente sous la forme la plus pratique imaginable pour les étudiants et les instructeurs : sous la
forme d'une série d’exercices de méditation.
Tāranātha indique très clairement, à travers ses directives fréquentes, qu'il attend des étudiants qui
lisent son texte qu'ils méditent formellement sur les concepts qu'il présente et qu'ils le fassent en séquence
jusqu'à ce que l'étudiant acquière une compréhension approfondie de chaque sujet de contemplation.
De plus, bon nombre des commentaires qu'il fait entre les séances de contemplation s'adressent aux
enseignants, indiquant que L'Essence d'Ambroisie a été conçue comme un manuel d'enseignement pour
les lamas et les instructeurs dans le contexte monastique qui peuvent grandement bénéficier de la
systématisation de la voie bouddhiste par Tāranātha à l’occasion de la formation des jeunes moines et
moniales.
L'attrait du texte est amplifié par le fait que la voix littéraire de Tāranātha n'est pas formulée dans le
langage formel de nombre de ses contemporains mais est conversationnelle, familière et accessible.
Tāranātha utilise généreusement des termes vernaculaires pour améliorer la description et se laisse
facilement aller à une digression pertinente occasionnelle. Son écriture parvient à être à la fois informelle
et organisée, de sorte que le lecteur a l'impression que Tāranātha est en train de parler plutôt que d'écrire
aux enseignants et aux étudiants pour lesquels le texte est composé. Tāranātha offre au lecteur des aperçus
fréquents et francs de son processus de pensée et de composition.
Peut-être parce que L'Essence d'Ambroisie est si accessible, simple et relativement courte, elle est
devenue le principal texte des « étapes du chemin » (Tib. lam rim, ལམ་རིམ།) pour les lignées Jonang, Shangpa
et Kagyü et le favori d'un certain nombre d'éminents lamas. Jamgön Kongtrül (1813-1899), le brillant érudit
du mouvement non sectaire du XIXe siècle a spécifié L’Essence d’Ambroisie comme l'un des trois textes que
ses étudiants devaient lire au début de leur participation à son programme de retraite de trois ans1 (les
deux autres étant Le Précieux Ornement de la Libération [Ouvrage de Gampopa] et L'Océan du Sens Définitif
[Ouvrage du IXe Karmapa Wangchuk Dordjé])
Au cours de ce siècle, Kalu Rinpoché (1904-1989), le principal héritier de la lignée Shangpa-Kagyu,
recommanda ce texte à ses étudiants débutants, tant dans son principal monastère de Sonada, Darjeeling

1
Zangpo. Manuel de retraite. (1994) : 82.
Introduction de la Traductrice

que dans ses nombreux centres en Occident. Le texte est également enseigné dans les centres et
monastères de la lignée Jonang par Khenpo Tsultrim Dargye, Khenpo Ngawang Dorje et d'autres au Tibet,
en Inde et en Occident.
Pour l’essentiel, L’Essence d’Ambroisie n’était pas un texte difficile à traduire car Tāranātha écrivait
sur un ton simple et conversationnel. Trois versions du texte ont été consultées pour cette traduction : la
version de Sonada, issue de la collection de livres Shangpa de Kalu Rinpoché qui a été copiée à partir du
Trésor des Instructions Orales de Jamgön Kongtrül, la version Dzamtang (Tib. འཛམ་ཐང།) et la version
Phuntsok Ling (Tib. ཕུན་ཚོགས་གིང།). Pour l'utilisation de ces deux derniers, je suis redevable à E. Gene Smith.
Tout en peaufinant la traduction, j'ai consulté Lama Norlha Rinpoché, Khenpo Nyima Gyaltsen,
Khenpo Ngawang Dorje, le Dr Derek Maher, Ani Jamdron et le Dr Jeffery Hopkins. Les termes techniques
tibétains ont été traduits en français lorsque cela était possible pour rendre le livre accessible à un large
public.
Le schéma structurel original de Tāranātha est inclus dans la traduction où il apparaît dans le texte
en gras. Pour des raisons d'organisation, une numérotation a été ajoutée par la traductrice aux parties et
aux chapitres. De plus, des titres ont été ajoutés à certaines sections et contemplations pour lesquelles
Tāranātha n'a pas fourni de titres explicites afin de rendre le contenu de ces sections plus accessible à une
large audience.
Tāranātha cite un certain nombre de sources tout au long de L’Essence. Dans la mesure du possible,
les sources originales de ces citations sont fournies. La première fois qu’une source est citée, elle apparaît
dans les notes de bas de page en sanskrit et en tibétain. Les citations ultérieures sont identifiées
uniquement par le titre français et l'auteur.
Un glossaire des termes techniques et des noms propres, situé à la fin, définit les termes techniques
avec leurs équivalents tibétain et sanskrit. Tout au long du texte, Tāranātha fait référence à des
classifications standards telles que les cinq agrégats, les dix actions non vertueuses, etc. Afin d'aider les
étudiants du bouddhisme et du tibétain qui souhaitent se familiariser avec ces catégories très courantes,
celles-ci sont incluses avec l'écriture tibétaine dans un glossaire de classifications séparé.

Tāranātha (1575-1634)
Tāranātha est né en 1575 dans le comté de Drong, dans la province du Tsang (Tib. gtsang) au Tibet
occidental. Les récits de sa vie, corroborés par son autobiographie, affirment qu'il fut reconnu par Kenchen
Lungrik Gyamtso dès son plus jeune âge comme une incarnation du maître Jonang Kunga Drolchok et qu'il
fut emmené dans un monastère local pour y suivre sa formation. Finalement, il s'installa à Jomonang, le
centre monastique de l'ordre Jonang à Tsang.
Même si Tāranātha restait affilié à Jomonang et à d'autres institutions monastiques et ermitages, il
était tout sauf un reclus. Il passa une grande partie de sa vie à voyager à travers le Tibet central (un
penchant reflété dans le surnom qu'il s'est donné, Gyalkampa, « le vagabond ») ; à étudier auprès d'un
certain nombre de lamas éminents ; à enseigner intensivement ; à reconstruire des temples et des

XIII
L’Essence d’Ambroisie

monastères et à composer un nombre impressionnant de textes sur divers aspects de la doctrine, de la


pratique et de l'histoire bouddhistes.
Au cours de ses voyages, l'activité de Tāranātha était à
la fois intense et concentrée, l’oeuvre d'un homme déterminé
à consacrer chaque instant de sa vie à la propagation et au
développement du bouddhisme. Tāranātha étudia auprès du
grand érudit indien Buddhaguptanatha et de plusieurs
maîtres tibétains, dont Jé Draktopa, Yéshé Wangpo,
KungaTrashi et Jampa Lhündrup.
Tāranātha était un étudiant enthousiaste, enseignant
tous les détails possibles sur l'histoire, la langue, la biographie,
la pratique liturgique et la méthode bouddhistes qu'il pouvait
glaner auprès de ses professeurs. L'éloquence et le soin qui
caractérisent l'érudition de Tāranātha ont dû s'exprimer par
la solidité et la qualité dans l'architecture puisque de
nombreux bâtiments conçus et construits sous les auspices de
Tāranātha, notamment le monastère de Takten Damcho Ling
et le stūpa de Jomonang, sont toujours debout.
Tout en étant engagé dans ces divers projets créatifs, il réussit à trouver suffisamment de temps pour
dispenser des enseignements fréquents dans des centres de retraite, des collèges monastiques, des
rassemblements publics et des réunions privées. Plus tard dans sa vie, il se rendit en Mongolie où il mourut
en 16342.
Les orientations et le contenu de l'érudition de Tāranātha le définissent comme un maître de toutes
les écoles du bouddhisme tantrique et comme quelqu'un qui croyait en la tolérance religieuse et en une
approche non partisane de la doctrine bouddhiste. L'étendue des connaissances et la synthèse critique
exposées dans les dix-sept grands volumes contenant ses histoires bouddhistes, ses biographies, ses
compositions originales et ses commentaires sur la pratique bouddhiste font de lui un penseur
exceptionnellement brillant et indépendant.
Ses ouvrages historiques ont trouvé leur place dans les bibliothèques de toutes les écoles du
bouddhisme tibétain, et ses commentaires sur les pratiques tantriques, en particulier le tantra de
Kālacakra, ont été attentivement lus et utilisés par les pratiquants de nombreuses lignées.
Son œuvre historique la plus connue est Une Histoire du Bouddhisme en Inde, un texte apprécié pour
son mélange attrayant d'anecdotes sur la vie des maîtres indiens et d'informations historiques. Il continue
d'être une ressource précieuse pour les historiens du bouddhisme indien. Ses autres œuvres historiques
comprennent sa propre autobiographie, une histoire du système Kālacakra, une histoire du Tantra de
Yamāntaka et une histoire du Tantra de Тārā.
Il contribua également de manière significative au renforcement de la transmission Jonang en
composant des commentaires sur de nombreuses pratiques Jonang et des récits biographiques sur la vie

2
Informations contenues dans ce paragraphe tirées de Riggs (2001) : 4-6, 249-262 ; Tāranātha (1981) : vii ; et Zangpo (2003) : 1-
5.
Introduction de la Traductrice

des maîtres Jonang. Cependant, la grande majorité de ses compositions concernaient toutes les traditions
bouddhistes du Tibet.
Peut-être parce que les troubles politiques et le sectarisme religieux menaçaient la paix du Tibet
central au XVIIIe siècle (plus de détails ci-dessous), Tāranātha tourna son attention vers des documents qui
seraient appréciés par tous les bouddhistes et les uniraient.
En fait, son travail inspirera plus tard un certain nombre d’érudits notables de toutes les écoles du
bouddhisme, notamment le maître non sectaire Jamgön Kongtrül (1813-1899) et Sa Sainteté le
quatorzième Dalaï-Lama (né en 1935). L'exemple de la vie de Tāranātha a tellement inspiré Jamgön
Kongtrül qu'il consacra trois jours par an dans son centre de retraite à la célébration de la mémoire de
Tāranātha, un honneur qu'il n'a accordé à aucun autre détenteur de lignée.
Selon ses propres mots, « Pendant cette époque de conflits, Tāranātha fut un grand Bouddha porteur
de Vajra dont le renoncement et la réalisation étaient impossibles à distinguer de ceux des maîtres
accomplis du Pays des Nobles »3.

La lignée Jonang
En tant qu'incarnation reconnue de Künga
Dröltchok, Tāranātha était l'héritier de la transmission
Jonang, une lignée qui comprenait quelques traditions
distinctes.
Le fondateur de la lignée Jonang, Youmo Mikyö
Dordjé4 (XIIe siècle), se spécialisa dans le tantra de
Kālacakra et les enseignements issus du pandit indien
Nalendrapa. Au XIIIe siècle, les Jonang s'approprient la
transmission Shangpa, un ensemble de pratiques et
d'enseignements remontant à la grande adepte
féminine Nigouma (XIIIe siècle) et à son disciple
Khyoungpo Nèldjor (978-1079)5.
Au XIIIe siècle également, Künpang Thoug-Djé
Tsöndrü (1243-1313)6 fonda le premier siège
monastique de la lignée Jonang, Jomonang, au Tibet
occidental.
Son élève, Dolpo Sherab Gyaltsen (1292-1361)7,
également connu sous le nom de Dolpopa, écrivit des

3
Zangpo (2003) 3.
4
Yumowa mi-Kyö Dordjé, ཡུ་མོ་བ་མི་བསོད་རོ་རྐྱེ།
5
Khyoungpo Nèldjor, ཁྱུང་པོ་རྣལ་འབྱོར།
6
Künpang Thoug-Djé Tsöndrü, ཀུན་སྤངས་ཐུགས་རྐྱེ་བརོན་འགྲུས།
7
Dolpopa Shérab Gyalts’èn, དོལ་པོ་པ་ཤྐྱེས་རབ་རྒྱལ་མཚན།

XV
L’Essence d’Ambroisie

traités philosophiques sur la vision du « vide d'autre » qui ont contribué à définir davantage le Jonang
comme une transmission distincte.
À l'époque où Tāranātha vivait à Jomonang, au XVIe et au début du XVIIe siècle, les Jonang
prospéraient en tant que lignée indépendante, prise en sandwich entre le puissant monastère Sakya à
l'ouest et les monastères Gelugpa politiquement influents de Lhassa, juste à l'est. La proximité de
Jomonang avec ces grands monastères a dû stimuler les échanges religieux entre lignées et enseignants.
Cependant, le début du XVIIe siècle fut une période de guerre civile au Tibet central et Jomonang,
comme les autres institutions religieuses de la région, fut pris dans des machinations politiques qui finirent
par dégénérer en guerre civile dans les années 1630. Peut-être que ces pressions ont donné une partie de
l'impulsion à la vision de Tāranātha d'un bouddhisme non sectaire et apolitique et ont alimenté son
aspiration à reconstruire et agrandir les monastères de Jonang ainsi qu'à combler toutes les lacunes de leur
bibliothèque.
Quoi qu’il en soit, ses efforts devaient se heurter à un sérieux revers dès son décès. Le roi de Tsang
(le successeur de Karma Tsétèn Dordjè, Karma Tènkyong) fut assassiné par Gushri Khan en 1642 et
Jomonang, laissé sans la protection de son patron, fut pris par le 5e Dalaï-Lama. Les blocs de bois des textes
de Tāranātha s furent scellés dans l'imprimerie Puntsok Ling à Jomonang et leur diffusion fut interdite.
Malgré ces événements, la lignée Jonang parviendra à survivre et finalement à prospérer en entrant
dans la clandestinité pendant un certain temps et en évitant toute affiliation à une seule institution
monastique. Même si bon nombre de ses pratiques ont été absorbées par les traditions Gelug, Sakya et
Kagyu, l'intégrité de la transmission a été préservée par des individus dévoués qui ont adopté les pratiques
Jonang comme les leurs.
Une institution qui a réussi à maintenir son identité avec la lignée Jonang était Sher Dzamthang, un
monastère à Golok construit par le disciple de Dolpopa, Kashipa Rinchènpal. Cette institution est devenue
et reste le siège principal de la tradition Jonang8.
Au XIXe siècle, le maître de Shalou, Losèl Dènkyong, parvint à obtenir des impressions à partir des
livres scellés à l'intérieur de Puntsok Ling, et les œuvres complètes de Tāranātha devinrent largement
disponibles.

L’Essence d'Ambroisie
L'Essence d'Ambroisie : Les Étapes du Chemin pour Entraîner les Trois Types de Personnes à Travers
les Contemplations, comme son titre l'indique, appartient à un genre littéraire de commentaire appelé
« étapes du chemin » (Tib. Lam-Rim, ལམ་རིམ།). Ce genre a été introduit au Tibet par le grand maître bengali
Atiśa (982-1054) dont La Lampe pour la Voie vers l’Éveil est devenue le texte prototypique des « étapes du
chemin » de la tradition kadampa et a rapidement connu une popularité auprès des autres lignées. L'un
des principaux attraits de La Lampe d’Atiśa fut qu'il résumait et organisait les volumineux sūtras et la
littérature des commentaires du Mahāyāna en un chemin systématique et pratique, étape par étape, que
presque tout le monde pouvait suivre.

8
Informations historiques sur Jomonang au 17ème siècle et les institutions Jonang de Snellgrove et Richardson (1980) : 196-99
; Tāranātha (1970) : vii ; Powers (1995) : 146-47 ; Zangpo (2003) : 1-5.
Introduction de la Traductrice

Inspiré par Atiśa, Tsongkhapa, le fondateur de l'ordre Gélougpa, composa le Lamrim Chenmo en
1402, un texte qui demeure aujourd'hui encore un classique. L'Essence d'Ambroisie de Tāranātha était
destinée à être le texte définitif des « étapes du chemin » pour la tradition Jonang, bien qu’elle fût
rapidement adoptée comme l'un des principaux manuels pour commencer la pratique dans la lignée Kagyü
également9.
Comme d’autres textes de ce genre, L’Essence d’Ambroisie n’est ni une œuvre polémique ni
strictement une œuvre de commentaire. Il s'agit plutôt d'une synthèse, vaguement basée sur le plan tracé
dans La Lampe pour la Voie vers l’Éveil d'Atiśa, de la pensée et de la pratique du bouddhisme exotérique
qui renvoient fréquemment aux enseignements des sūtras et d'autres textes fondamentaux du Mahāyāna.
Comme d'autres écrits du genre « étapes du chemin », cet ouvrage repose sur la proposition selon
laquelle certains états conceptuels de développement sont nécessaires pour atteindre le sommet de la
pratique bouddhiste, l’Éveil caractérisé par la réalisation non conceptuelle de la vacuité imprégnée de la
compassion universelle. Ces états conceptuels peuvent être développés et affinés progressivement par un
processus méthodique d’autoréflexion, d’analyse et de méditation.
À mesure que chaque étape de développement est atteinte, l’esprit devient moins égocentrique, plus
concentré, plus motivé et plus flexible qu’auparavant. En d’autres termes, l’Éveil n’est pas hors de portée
de qui que ce soit : les qualités mentales nécessaires à une pratique réussie de la méditation et à l’atteinte
de la bouddhéité elle-même peuvent être systématiquement cultivées par toute personne suffisamment
déterminée pour prendre les mesures nécessaires.
L’Essence telle que conçue par Tāranātha est un guide convivial pour les méditants en organisant
l'intégralité du texte autour de « Séances de contemplation ». Dans ces séances, la voix de Tāranātha
alterne entre directives et supports de contemplation à la première personne (c'est-à-dire quoi penser).
Afin de faire la distinction entre les deux, j'ai mis les directives en italique et le support de
contemplation en caractères ordinaires.
Entre les séances, Tāranātha cite ses sources, donne des recommandations liturgiques et adresse
certaines suggestions aux enseignants. Ces commentaires sont en caractères non justifiés entre accolades
{}. La simplicité et le caractère direct des supports de contemplation se reflètent dans le titre L’Essence
d’Ambroisie.
Tāranātha a distillé à partir d'une richesse de matériaux issus du Mahāyāna ce qu'il considère comme
l'essentiel des instructions du Bouddha et les a arrangées pour une pratique facile. Comme indiqué dans le
sous-titre, Tāranātha organise son texte, à l'instar d'Atiśa, en contemplations pour les « trois types de
personnes » : la personne de moindre capacité, la personne de capacité moyenne et la personne de plus
grande capacité.
Ces types de personnes représentent trois motivations et capacités de compréhension distinctes. Le
commentaire de Tāranātha à différents endroits du texte indique que ce modèle est plutôt
développemental qu'indicatif d'un potentiel absolu. En d’autres termes, cette classification n’implique pas
que les contemplations contenues dans chaque section soient destinées exclusivement à des personnes
différentes. Le texte suit plutôt une progression pédagogique visant à accroître les capacités des étudiants
débutants. Tous les étudiants commencent comme une « personne de moindre capacité » et sont

9
Kongtrül. Manuel de retraite. (1994): 28, 82.

XVII
L’Essence d’Ambroisie

finalement censés devenir, en vertu de leur pratique de ces contemplations, une « personne de plus grande
capacité ».

La personne de moindre capacité (Partie I)


Atiśa, dans La Lampe pour la Voie vers l’Éveil, définit la personne de moindre capacité :
གང་ཞིག་ཐབས་ནི་གང་དག་གིས། ། Gang Shik Thab ni Gang Dak gui
འཁོར་བའི་བདྐྱེ་བ་ཙམ་དག་ལ། ། Khorwa’i Déwa Tsam dak la
རང་ཉིད་དོན་དུ་གཉྐྱེར་བྱྐྱེད་པ་། ། Rang-nyid Dön-dou Nyèr Djépa
དྐྱེ་ནི་སྐྱེས་བུ་ཐ་མར་ཤྐྱེས། ། Dé ni Kyébou T’amar Shé
Celui qui, par quelque moyen que ce soit, recherche uniquement les plaisirs du cycle
des existences [saṃsāra] pour son propre bien, est connu comme une personne de
moindre capacité10.
Comme le suggèrent les mots d'Atiśa, la personne de moindre capacité est celle dont l'orientation
est généralement égocentrique et qui accorde une plus grande priorité à sa protection plutôt qu'à l'aide
aux autres. Comme beaucoup d’entre nous, il ou elle est plus attiré·e par le repos et la détente que par le
travail acharné et est facilement motivé·e par la peur. Par conséquent, les contemplations pour la personne
de moindre capacité visent à cultiver le renoncement à une renaissance inférieure11 et à renforcer la
motivation de l'étudiant à s'engager sur le chemin spirituel avec diligence et vigueur. Quatre sujets
conceptuels clés, appelés à juste titre « les quatre pensées qui transforment l’esprit », sont utilisés dans
cette section pour présenter progressivement à l'étudiant les concepts bouddhistes de base de l’état
humain, de l'impermanence, de la souffrance de l'existence cyclique et du karma.
Ces contemplations, employées de manière omniprésente dans les traditions bouddhistes tibétaines
dans le cadre des pratiques préliminaires (Tib. Ngöndro, སོན་གོ།), sont conçues pour « détourner l'esprit »
des préoccupations mondaines et l’orienter vers un intérêt pour les activités spirituelles. Dans L’Essence
d’Ambroisie, les contemplations de la première partie sont divisées en quatre chapitres, chacun couvrant
l'une des quatre pensées : « Les libertés et les dotations d'une précieuse vie humaine», « L'impermanence
et la mort », « La misère des royaumes inférieurs » et « Les instructions sur les causes et les effets des
actions ».
Bien que les titres de ces chapitres soient quelque peu descriptifs, l'auteur – qui écrivait
vraisemblablement principalement pour les moines tibétains – suppose une certaine familiarisation
préalable à la terminologie bouddhiste de base. Par conséquent, certaines explications sur ces sujets
peuvent être utiles à un public occidental.
Les contemplations du chapitre 1, « Les libertés et les dotations d'une précieuse vie humaine», visent
à éveiller un sentiment de profonde appréciation de ce que signifie être né en tant qu’humain. La doctrine

10
Tsongkhapa (2000): 130.
11
Skt. Saṃsāra, Tib. Khorwa, འཁོར་བ།. L'existence cyclique désigne le cycle de naissance et de mort que vivent les êtres sensibles.
L'existence cyclique est caractérisée par la souffrance et est désignée dans les sutras comme l'opposé du nirvana.
Introduction de la Traductrice

bouddhiste de la réincarnation soutient que chacun de nous renaît encore et encore sous toutes les formes
imaginables, remontant non pas à des siècles ou des millénaires, mais à une éternité. Naître sous une forme
humaine est donc une circonstance inhabituelle. Ce qui rend la forme humaine encore plus difficile à
atteindre, selon les sūtras, c'est que la cause de la renaissance humaine est de préserver une discipline
morale irréprochable, en particulier la discipline du vinaya12.
Les contemplations sur la précieuse vie humaine encouragent à prendre conscience de la rareté de
se retrouver sous une forme humaine. De plus, l’Éveil, l’objectif de toute pratique bouddhiste, ne peut être
atteint que dans un corps humain. En raison de leur incapacité à comprendre le langage, les animaux ne
peuvent pas l’atteindre. Parce qu’ils sont ivres de leur propre bonheur, les Dieux ne peuvent l’atteindre.
Les êtres des autres royaumes décrits dans la cosmologie bouddhiste sont empêchés de l'atteindre à cause
de leurs divers obscurcissements. Les huit états défavorables décrits dans la deuxième contemplation
délimitent ces conditions et d'autres qui empêchent les êtres d'atteindre la bouddhéité.

Ensuite, dans le chapitre 2 « L’impermanence et la mort », l'étudiant contemple que bien que ce
corps soit précieux et rare, il est éphémère. Les conditions peuvent changer à tout moment, balayant cette
vie et toute sa promesse d’atteindre la bouddhéité. Ces contemplations sont conçues pour accélérer la
reconnaissance du fait que la mort peut être imminente et pour inculquer à l'étudiant un profond
sentiment d'urgence à poursuivre le chemin spirituel. Selon le bouddhisme, la mort n’est pas une délivrance
bienheureuse des douleurs de la maladie ni une entrée glorieuse au ciel.
Les enseignements tibétains sur l'état après la mort (Tib. Bardo, བར་དོ།) décrivent l'esprit du défunt
comme un « corps mental » qui n'est pas contraint par les limitations de l'espace et des lois physiques.
Après une période d'inconscience (qui peut durer un bref instant ou plusieurs jours), le défunt se réveille,
se rend compte qu'il ou elle est mort·e et est plongé·e dans un état de terreur et de confusion accablantes.
En fonction du degré d'actions vertueuses et de méditation dans lequel le défunt s'est engagé de son vivant,
il est soumis à des visions plus ou moins effrayantes et a plus ou moins de contrôle sur les émotions qui
s’emparent de sa conscience. En revanche, une personne qui a mené à bien sa pratique de la méditation
avant de mourir n’est pas soumise à ces terreurs et peut même avoir une chance de devenir pleinement
éveillée au moment de sa mort. Par conséquent, le meilleur pari d’une personne est de suivre un chemin
spirituel, de s’engager dans des actions vertueuses, de méditer, d’abandonner tout attachement et de
développer un parfait contrôle de son esprit avant de mourir.

Les contemplations du chapitre 3, « Les misères des domaines inférieurs », stimulent le renoncement
aux activités profanes en se concentrant sur la souffrance inhérente à l'existence cyclique. Le Bouddha
enseigna que six types d’êtres, vivant dans six royaumes ou domaines, font l’expérience de l’existence
cyclique. Ces six types d'êtres sont les êtres des enfers, les fantômes affamés, les animaux, les humains, les
demi-dieux et les dieux.
Ces êtres appartiennent à leurs « royaumes » respectifs en fonction de leurs souffrances communes
et de leurs obscurcissements mentaux. Ces royaumes sont créés par les projections karmiques des êtres

12
Skt. vinaya, Tib. Dülwa, འདུལ་བ། est l'une des « trois corbeilles » ou recueils d'enseignements qui sont dits être directement liés
aux enseignements originaux du Bouddha Śākyamuni. Ce recueil contient des descriptions des différentes sortes de discipline
laïque et monastique et décrit les règles formelles de la communauté spirituelle.

XIX
L’Essence d’Ambroisie

qui habitent chaque royaume. Le chapitre 3 se concentre uniquement sur les « trois royaumes inférieurs » :
le royaume des enfers, le royaume des fantômes affamés et le royaume des animaux. Les êtres qui
souffrent le plus intensément sont ceux des 18 enfers. Tāranātha dresse un tableau vivant de l’agonie que
les êtres dans les 8 enfers chauds, les 8 enfers froids, les enfers voisins et les enfers éphémères endurent
en guise de pénitence pour leurs actions passées. Tāranātha décrit ensuite les souffrances de la faim et de
la soif qui affligent les fantômes affamés. Parce qu’ils possèdent un « corps mental » subtil, les êtres de ces
deux royaumes sont invisibles pour les humains. La souffrance des animaux, en revanche, est familière aux
humains.
Dans une certaine mesure, les contemplations détaillées de la souffrance des trois mondes inférieurs
sont destinées à engendrer de l'inquiétude dans l'esprit du méditant, mais tel n'est pas leur objectif
premier. Leur but est de faire prendre conscience au méditant que les causes de l'expérience de la
souffrance des royaumes inférieurs existent en ce moment-même dans l'esprit de chaque être sensible
sous la forme d'émotions latentes. Ces émotions primaires de haine, de désir et d’ignorance, lorsqu’elles
sont traduites en actes, deviennent les graines qui mûrissent sous forme d’une renaissance dans les
royaumes inférieurs. Contempler la souffrance de chacun de ces royaumes, aussi désagréable que cela
puisse paraître, éveille chez l'étudiant la motivation de se libérer du cycle des renaissances.
De plus, l'étudiant en vient à s'identifier aux êtres de ces royaumes et à ressentir quelque chose pour
eux, base importante pour les réflexions ultérieures sur la compassion.

Les contemplations du chapitre 4, « Les instructions sur les causes et les effets des actions », sont
conçues pour familiariser l'étudiant avec la loi du karma13. Cette loi, en un mot, est que les pensées et les
actions vertueuses conduisent au bonheur et que les pensées et les actions non vertueuses conduisent à
la souffrance.
Le Bouddha Śākyamuni résuma les instructions sur le karma de manière concise dans une phrase
célèbre :
སིག་པ་ཅི་ཡང་མི་བྱ་ཞིང་། Dikpa Tchi Yang mi-Dja Shing
དགྐྱེ་བ་ཕུན་སུམ་ཚོགས་པར་སྤྱད། Guéwa Phün-Soum Ts’ogpar Tché
རང་གི་སྐྱེམས་ནི་ཡོངས་སུ་འདུལ། Rang-gui Sèm-ni Yongsou Dül
འདི་ནི་སངས་རྒྱས་བསྟན་པ་ཡིན། ‘Di-ni Sangyé Tènpa Yin
« Ne commettre aucun acte négatif, pratiquer parfaitement la vertu et discipliner
complètement son esprit, tel est l’enseignement du Bouddha ».
La directive fondamentale du Bouddha concernant les actions était d'éviter les dix actions non
vertueuses et de s'engager dans les dix actions vertueuses afin de créer les conditions les plus propices à
l'atteinte de la bouddhéité pour soi-même et pour les autres. De toutes les actions, les plus importantes
sont les « actions mentales » ou motivations. Le postulat du Bouddha était que si la motivation d'une
personne est bien orientée, ses paroles et ses actions suivront comme une charrette suit un cheval. Par

13
Skt. karma, Tib. Lé, ལས། est l’un des rares mots que j’ai décidé de laisser souvent non traduits dans ce texte. Le mot peut
généralement être traduit par « action ». Cependant, cela a souvent la connotation d’un lien non volontaire dans la relation
entre cause et effet et, dans ces cas, implique davantage une tendance qu’une action.
Introduction de la Traductrice

conséquent, cultiver les « actions » vertueuses de l’esprit, telles que la magnanimité, la tolérance et la
sagesse, revêt une importance particulière sur la voie bouddhiste.
Les contemplations du chapitre 4 encouragent l'étudiant à abandonner les actions négatives et à
adopter des actions positives en cultivant la pleine conscience [ou pleine présence] et la vigilance à l'égard
de chaque pensée et de chaque acte.

La personne de capacité médiane (Partie II)


Selon Atiśa :
སིད་པའི་བདྐྱེ་ལ་རྒྱབ་ཕོགས་ཤིང་། ། Sipa’i Dé la Gyab-Tchog shing
སིག་པའི་ལས་ལས་ལོག་བདག་ཉིད། ། Dikpa’i Lé lé Dog Dag-nyid
གང་ཞིག་རང་ཞི་ཙམ་དོན་གཉྐྱེར། ། Gang Shik Rang-Shi Tsam Dön Nyèr
སྐྱེས་བུ་དྐྱེ་ནི་འབིང་ཞྐྱེས་བྱ། ། Kyébou Dé ni Dring Shé Dja
« Celui qui se détourne des plaisirs de l’existence cyclique [saṃsāra] et se garde des
actes néfastes mais ne recherche que sa seule paix, est connu comme une personne
de capacité médiane »14.
Après avoir considéré la situation humaine, la souffrance des royaumes inférieurs et l'infaillibilité du
karma, la personne de capacité moyenne comprend les raisons pour lesquelles éviter les actions négatives,
abandonne la paresse et fait l’effort d’une pratique spirituelle. Cependant, il ou elle n’a pas pleinement
compris les causes de l’Éveil et, par conséquent, ne s’intéresse principalement qu’à son salut personnel.
En conséquence, les contemplations de la deuxième partie synthétisent les particularités de la
souffrance dans une perspective sur la nature de l'existence en général, explorent les causes de la
souffrance et définissent la libération vis-à-vis de la souffrance. Les contemplations du chapitre 5, « Les
misères des royaumes supérieurs », visent à dissiper les illusions selon lesquelles il existerait une
quelconque joie ultime dans les royaumes humains, des demi-dieux ou des dieux de l'existence cyclique.
Même les 28 royaumes divins sont décrits comme moins que satisfaisants. Bien que les dieux jouissent des
récompenses de leurs actions positives passées, lorsque leur karma est épuisé, ils éprouvent l’agonie de la
chute dans un royaume inférieur.
Le chapitre 6 synthétise toutes les contemplations précédentes dans la perspective selon laquelle la
souffrance imprègne toute existence. De la 29e Contemplation :
Je suis complètement entouré par la souffrance. La souffrance brûle comme le feu ;
elle bouillonne comme l'eau ; elle souffle comme le vent ; elle oppresse comme une
montagne. Quel que soit le lieu où je me trouve, c'est un lieu de souffrance. Quel
que soit le type de corps que j’habite, c’est un corps de souffrance. Qui que soit celui
avec qui je me lie d'amitié, c’est un compagnon de souffrance. Quoi que puisse être
ce que j'apprécie, c'est un plaisir de souffrance.

14
Tsongkhapa (2000) : 130.

XXI
L’Essence d’Ambroisie

Après avoir contemplé les souffrances partagées par toutes les créatures vivantes dans tous les
domaines, l'étudiant est amené à la conclusion qu'aucun espoir de bonheur ultime n'existe tant qu'il
demeure dans l’existence cyclique. La seule possibilité d’apaisement réside dans la libération du cycle, une
libération personnelle vis-à-vis de la souffrance.
Le chapitre 7 explore l'origine de l'existence cyclique : le karma et les afflictions émotionnelles et
cognitives. Dans ce chapitre, l'étudiant examine la nature des trois afflictions principales : l'attachement,
l'aversion et l'ignorance, et réfléchit à la manière dont elles se traduisent en action. Les actions négatives
renforcent à leur tour les afflictions et le cycle recommence. Face à cette situation, l’étudiant prend la
résolution de se libérer de l’emprise des afflictions.
Pour finir, le chapitre 8 contient une brève réflexion sur les causes et les résultats de la libération. Les
contemplations de cette section visent principalement à amener progressivement l’étudiant à comprendre
que la libération personnelle vis-à-vis de la souffrance ne suffit pas. Pour atteindre l’Éveil dans le Mahāyāna,
on doit désirer la liberté face à la souffrance et la libération pour le bien des autres.

La personne de grande capacité (Partie III)


Les contemplations de la troisième partie incluent les méditations qui constituent le sommet de la
pratique du Mahāyāna, appropriées uniquement à ceux qui possèdent la motivation adéquate. Atiśa
explique :
རང་རྒྱུད་གཏོགས་པའི་སྡུག་བསལ་གིས། ། Rang Gyü Togpa’i Douk-Ngèl gyi
གང་ཞིག་གཞན་གི་སྡུག་བསལ་ཀུན། ། Gang Shik Shèn gyi Douk-Ngèl Kün
ཡང་དག་ཟད་པར་ཀུན་ནས་འདོད། ། Yangdak Zépar Kün né Dö
སྐྱེས་བུ་དྐྱེ་ནི་མཆོག་ཡིན་ནོ། ། Kyébou Dé ni Tchok Yin-no
« Celui qui, comprenant ses propres souffrances, veut sincèrement éradiquer toutes
les souffrances d'autrui, cet être-là est "supérieur" 15».
La personne dotée de la plus grande capacité, la personne « supérieure », est celle qui utilise sa
propre expérience de la souffrance pour l'identifier à la souffrance des autres et qui est motivée par le désir
de soulager les êtres sensibles de leur souffrance à la fois temporairement et au sens ultime. Ce type de
personne est mûr pour être présenté au facteur de motivation clé du Mahāyāna : l’esprit d’Éveil16.
Du point de vue relatif, l’esprit d’Éveil est le souhait d’atteindre l’Éveil dans le but d’amener tous les
autres êtres sensibles à ce même état. Du point de vue ultime, l’esprit d’Éveil est la sagesse non
conceptuelle indissociablement combinée à une compassion spontanée et non référentielle.
L’esprit d’Éveil relatif et ultime se développe à la fois intérieurement grâce à la méditation, la
méthode volitive, et extérieurement grâce à une action consciemment dirigée. La méthode volitive consiste
à renforcer « l’aspiration de l’esprit d’Éveil », le désir désintéressé d’atteindre l’Illumination ou l’Éveil pour
le bien des autres. C'est le sujet des chapitres 9 à 11. Parce que l’essence de l’aspiration de l’esprit d’Éveil

15
Tsongkhapa (2000): 131.
16
Skt. Bodhicitta,Tib. Djang-Tchoub kyi Sèm, བྱང་ཆུབ་ཀི་སྐྱེམས།.
Introduction de la Traductrice

est l’amour et la compassion impartiaux et inconditionnels pour les êtres sensibles, les contemplations de
ces chapitres visent à susciter des sentiments d’amour, de compassion, de gentillesse et de magnanimité
envers tous les autres. Afin d'amener l'étudiant à des sentiments d'amour non feints pour les autres, les
contemplations commencent par une méditation sur l'amour envers sa propre mère.
Extrait de la 36e Contemplation :
« Elle m'a bercé avec ses dix doigts, m'a réchauffé avec la chaleur de sa chair, m'a
allaité de ses seins, a goûté ma nourriture et a essuyé la saleté de mes fesses de ses
propres mains. À l’époque où j’étais incapable de faire quoi que ce soit par moi-
même, j’étais aussi impuissant qu’un insecte, elle prenait soin de moi ».
En réfléchissant en détails aux soins manifestés par sa mère, l’étudiant développe une intense
appréciation de sa gentillesse et est ému par des sentiments d'amour et de compassion à son égard. Une
fois ces sentiments devenus stables, l’étudiant s’entraîne à les appliquer à ses amis, à ses ennemis et
finalement à tous les êtres sensibles.
Les méthodes actives sont regroupées sous le thème « l'application de l'esprit d’Éveil » et font l'objet
des chapitres 12 et 13. Ces chapitres présentent les six Perfections, les six qualités que l'aspirant doit
perfectionner afin d'atteindre l’objectif de l’Éveil dans la tradition Mahāyāna. Les perfections sont la
générosité, la patience, la discipline morale, la diligence, l'absorption méditative et la sagesse. Les
perfections fournissent un guide pour un comportement Mahāyāna exemplaire et fournissent un
ensemble de ressources correctives pour combattre les afflictions de l'avidité, de la colère, de
l'attachement, de la paresse et de la stupidité qui empêchent l'aspirant de progresser sur le chemin vers
l’Éveil. Le chapitre 13, consacré à la perfection de la sagesse, contient des séances de contemplation sur
l’absence de soi de l'individu et l’absence de soi des phénomènes : le summum de toutes les pratiques de
méditation du Mahāyāna et la base servant à la réalisation de la nature vide de tous les phénomènes.
En annexe de son livre, Tāranātha inclut les instructions procédurales pour les deux cérémonies les
plus importantes de la tradition Mahāyāna. La première est la génération formelle de l'esprit d’Éveil en
présence de son maître spirituel et la seconde est la prise du vœu de bodhisattva. Cette dernière est
l’acceptation formelle de l’engagement à observer les préceptes liés à l’attitude de compassion et de
bienveillance.
L'Essence d'Ambroisie est une ressource précieuse pour la réflexion, l'étude et l’analyse, à la fois pour
les étudiants débutants dans le bouddhisme et pour ceux qui pratiquent le bouddhisme depuis longtemps.
Considérant l’écart culturel et temporel presque inconcevable entre le Tibet prémoderne du XVIe siècle et
l’Europe et l’Amérique modernes du XXIe siècle, il est extraordinaire de constater à quel point le matériel
reste pertinent pour le chercheur moderne, même pour ceux d’entre nous qui sont immergés dans les
préoccupations professionnelles et familiales.
L'utilisation fraîche et informelle du langage par Tāranātha rend son livre accessible à travers le pont
des siècles. La traductrice espère que d'autres Occidentaux qui liront ces mots seront inspirés et émus par
l'inconcevable sagesse de Tāranātha. Si j'avais un conseil à donner aux lecteurs de ce livre, qu'ils soient ou
non enclins au bouddhisme, ce serait de lire les contemplations lentement, peut-être une par jour, en en
ruminant le sens. Faites-en un rituel ; faites-en une séance...

XXIII
Prologue

PROLOGUE

ན་མོ་བུདྡྷ་བོ་དི་ས་ཏྭ་བྷྱཿ
Namo Buddha Bodhisattva Bhya17 !
Est ici contenue L'Essence d'Ambroisie : Manuel d'Instructions pour les Étapes sur la Voie des Trois
Types de Personnes pour Entrer dans l'Enseignement Bouddhiste.
Hommage aux Trois Joyaux !
M'étant incliné devant le Lama qui détient les trois lignées18
Qui scintillent grâce aux joyaux des excellentes qualités,
Je vais maintenant expliquer le chemin suprême du grand véhicule,
Le sens du traité principal composé par le maître Atiśa.

{Ce qui est présenté ici est le chemin-même médité par tous les êtres nobles des trois véhicules
à travers les trois temps – les bouddhas, les bodhisattvas, les réalisateurs solitaires et les
auditeurs19 – le chemin-même qu'ils ont suivi pour atteindre le niveau suprême de libération
et d'omniscience. Ces méthodes spirituelles sont connues collectivement sous le nom des
« Étapes Successives Introduisant l’Aspirant à l’Enseignement du Bouddha ». Elles sont
également appelées « La Voie Graduelle pour les Trois Types de Personnes », « La Voie
Graduelle vers l'Illumination » ou « L'Introduction au Grand Véhicule ».}

Ce texte comporte trois sections principales : (1) S'appuyer sur un maître spirituel, racine de toutes les
voies ; (2) les étapes du chemin pour l’entraînement des trois types de personnes à travers les contemplations
; et (3) comment appliquer ces enseignements pour parvenir à l’insurpassable Éveil.

17
Sanskrit pour « Hommage aux bouddhas et bodhisattvas ».
18
Les trois lignées font référence aux disciplines et pratiques des traditions Hīnayāna, Mahāyāna et Vajrayāna.
19
Les bouddhas, les bodhisattvas, les réalisateurs solitaires et les auditeurs sont quatre types d'individus qui ont atteint différents
niveaux de réalisation déterminés par leurs aspirations et leurs caractéristiques (voir Glossaire des termes techniques et des
noms propres).

Page 1
L’Essence d’Ambroisie

CONTEMPLATION 1 :
Se fier à un Maître spirituel, Racine de Toutes les Voies
Afin de vous familiariser avec les caractéristiques d'un maître spirituel et de développer la capacité de
l'assister fidèlement, suivez ces étapes pendant la séance de méditation : Observez la bonne conduite
précédant la méditation en vous asseyant les jambes croisées, en redressant votre posture et en ainsi de
suite. Concentrez votre attention sur les bouddhas et les bodhisattvas qui remplissent l’étendue de l’espace.
Récitez une pratique élargie ou abrégée d’hommage et d’offrande de prière comme préliminaires ;
poursuivez en récitant trois fois la prière à sept branches20 de la « Prière d’Aspiration de Samantabhadra »
tout en réfléchissant au sens. Puis, très haut dans le ciel en face de vous, visualisez un nombre
incommensurable de bouddhas et de bodhisattvas. Directement devant eux dans le ciel, visualisez votre
lama-racine, entouré d’un rassemblement dense de tous les lamas de la lignée. Invoquez-les avec ferveur
par la prière suivante :
Bouddhas et bodhisattvas à travers l'univers,
Et vous, parfait lama, mon maître bienveillant et vraiment vertueux -
Veuillez poser votre regard sur moi et me bénir.
Veuillez apaiser complètement mes défauts.
Veuillez éveiller en moi d’authentiques visions profondes.
Veuillez dissiper tous les obstacles à la pratique de la voie du Mahāyāna.
Après avoir prié ainsi, faites des offrandes visualisées [au champ d'accumulation en face de vous]. Les
lamas racine et de la lignée entrent alors par le sommet de votre tête et viennent se reposer dans un pavillon
de lumière au niveau de votre cœur. Pensez que les bouddhas et les bodhisattvas se dissolvent dans cet état.
Consacrez le mérite en utilisant des versets tels que les suivants :
Puissent les racines de ma pratique vertueuse devenir une cause permettant d’atteindre l’état
de la bouddhéité pour le bien de tous les êtres sensibles.
Ou :
Par cette activité vertueuse,
Puissent tous les êtres réunir parfaitement mérite et sagesse,
Et obtenir les deux états sacrés21 !
Nés du mérite et de la sagesse.

Entre les séances de méditation, n’examinez pas le lama pour lui trouver des défauts ; songez
uniquement à ses qualités. Réfléchissez comme suit :

20
La « prière à sept branches » est un genre traditionnel de prière bouddhiste qui comprend sept parties : rendre hommage,
faire des offrandes, confesser ses actions négatives, se réjouir du mérite des autres, exhorter le Bouddha à enseigner, supplier
le maître de ne pas mourir et consacrer le mérite à l’éveil de tous les êtres sensibles (voir Glossaire des classifications).
21
Les deux états sacrés sont le « corps de forme » et le « corps de vérité » d’un Bouddha. Le premier (Skt. Rupakāya, Tib. Zoug-
Kou, གཟུགས་སྐུ།) fait référence collectivement au corps d'émanation et au corps de jouissance qu'un bouddha atteint pour le
bénéfice des autres. Ce dernier (Skt. Dharmakāya, Tib. Tchö-Kou, ཆོས་སྐུ།) fait référence au corps de vérité qu'un Bouddha atteint
pour son propre bénéfice (voir Glossaire des classifications).
Prologue

Je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer réellement le Bouddha [Śākyamuni]. Mais la compassion de


tous les bouddhas qui ont existé à travers les temps s’est incarnée sous la forme de ce maître spirituel.
Mon lama est donc en réalité un véritable Bouddha. Il a été plus bienveillant avec moi que tous les
bouddhas réunis. Sans rien cacher, il transmet les méthodes nécessaires pour obtenir tout ce que je
souhaite, qu'il s'agisse d'une renaissance dans les royaumes supérieurs, d'une libération de la souffrance
ou de la bouddhéité. Si je développe une seule bonne qualité ou supprime un seul défaut, c’est grâce à la
bonté de mon lama. Comme il est bienveillant de me transmettre ces enseignements profonds qui sont si
difficiles à obtenir !
Je dois employer mon corps et tous mes biens pour le bien du lama. Avec mon corps, j’accomplirai
tous les actes de respect, d’offrande et de service qui seront en harmonie avec les souhaits du lama. Avec
ma parole, je louerai les qualités du corps, de la parole et de l’esprit du lama et je converserai uniquement
dans le cadre d’un échange spirituel. Je me comporterai d'une manière qui lui plaît et j’accomplirai tout ce
qu'il me demandera.

Réfléchissez ainsi, encore et encore22 et efforcez-vous de pratiquer en conséquence.


Pour commenter le quatrième vers de la supplication du début de la contemplation [« Veuillez apaiser
complètement mes défauts »], il existe cinq fautes ou défauts : le défaut consistant à être attaché à cette
vie, le défaut consistant à ne pas avoir confiance en la loi du karma, le défaut consistant à s'accrocher à
l'existence cyclique comme source de bonheur, le défaut consistant à penser que ses propres besoins sont
les plus importants et le défaut consistant à percevoir les choses et les attributs comme existant réellement.
Pour commenter la cinquième ligne [« Veuillez éveiller en moi d’authentiques visions profondes »], il
y a cinq visions profondes [ou prises de conscience] authentiques : la vision profonde que la prochaine vie
est plus importante que celle-ci, la vision profonde consistant à avoir confiance en la loi du karma, la vision
profonde que l'existence cyclique est un état de souffrance, la vision profonde du fait que les besoins des
autres sont plus importants que les vôtres et la vision profonde du fait que la vérité ultime est le vacuité et
que la vérité relative est que les choses sont semblables à une illusion.
En ce qui concerne le sixième vers [« Veuillez dissiper tous les obstacles à la pratique de la voie du
Mahāyāna »], il existe trois types d’obstacles : les obstacles extérieurs sont les dommages infligés par des
forces humaines ou non humaines ; les obstacles intermédiaires sont les maladies qui affectent le corps
physique ; les obstacles intérieurs sont les pensées profanes et les émotions négatives. Priez pour que ces
trois obstacles soient dissipés. Les instructions ci-dessus comprennent une séquence de visualisation.

La deuxième section de ce texte, Les Étapes de la Voie pour l’Entraînement des Trois Types de Personnes
par des Contemplations, comporte trois sections : (1) L’entraînement aux étapes communes pour la personne
de moindre capacité ; (2) l’entraînement aux étapes communes pour la personne de capacité médiane et (3)
la formation aux étapes extraordinaires de la personne de capacité supérieure.

22
Tout au long du texte, l'instruction « réfléchissez ainsi, encore et encore » suit fréquemment certaines parties des
contemplations. Traditionnellement, les séances de contemplation et de méditation sont longues (2 à 4 heures). L'instruction
de répéter la contemplation fait référence à une directive incitant à répéter la contemplation plusieurs fois par séance. C'est
aussi une recommandation pour renforcer la contemplation entre les séances comme exercice spirituel.

Page 3
L’Essence d’Ambroisie

Partie I :
L’ENTRAÎNEMENT AUX ÉTAPES COMMUNES AUX PERSONNES DE
MOINDRE CAPACITÉ

{Il existe de nombreuses instructions sur ce sujet provenant des diverses traditions de pratique.
Même notre tradition, basée sur les glorieuses instructions orales du Seigneur Atiśa, comporte
plusieurs versions. Certaines versions commencent par la contemplation sur les souffrances de
l'existence cyclique. Certaines commencent par une explication du karma. Certaines
commencent par expliquer la difficulté d’obtenir une vie humaine avec ses libertés et ses
dotations. La plupart commencent par une réflexion sur l'impermanence et la mort23. Même si
ces variations existent, elles convergent toutes vers le même point – il n'y a aucune divergence
au niveau du sens. Néanmoins, les présentations les plus connues commencent par la
contemplation sur la difficulté d'obtenir un corps humain avec ses libertés et ses dotations car
c'est une bonne base pour la méditation sur l'impermanence. Commencer par la méditation
sur l'impermanence comporte le risque que le pratiquant pense : « Je n'ai jamais vraiment
existé au sens ultime, donc seul ce moment est réel. Autant m'amuser ! »24 Nous utiliserons
donc l'ordre suivant :}

(1) La contemplation sur la difficulté d'obtenir une précieuse vie humaine avec ses libertés et ses
dotations ; (2) la contemplation sur l'impermanence et la mort ; (3) la contemplation sur les souffrances
des royaumes inférieurs et (4) la contemplation sur les causes et effets des actions25.

23
Dans tout le texte « la contemplation sur l'impermanence et la mort » et « la contemplation sur l'impermanence » renvoient
à la même contemplation.
24
La méditation sur l’impermanence est la base pour comprendre que tout, y compris le soi individuel, est impermanent,
transitoire et manque donc d’existence [ou de réalité] ultime. Bien que cette compréhension soit le but de la méditation sur
l’impermanence, elle peut conduire à l’idée fausse que tout est dépourvu de sens. Ce malentendu pourrait potentiellement se
transformer en une vision teintée de nihilisme ou d'hédonisme (d'où « Autant m'amuser ! »), sans égard pour le mode de
fonctionnement du karma ni pour l'importance de s'efforcer à se libérer de l'existence cyclique.
25
Les quatre contemplations mentionnées ici et développées dans la première partie de L'Essence sont les contemplations
fondamentales qui comprennent la première partie des pratiques préliminaires (Tib. Ngöndro, སོན་འགོ།) adoptées par toutes les
formes du bouddhisme tibétain.
Chapitre Un : Les Libertés et les Dotations d’une Précieuse Vie Humaine

CHAPITRE UN :
LES LIBERTÉS ET LES DOTATIONS D'UNE PRÉCIEUSE VIE HUMAINE

CONTEMPLATION 2 :
La difficulté d'obtenir une précieuse vie humaine avec ses libertés et dotations
Faites des prosternations et des offrandes et récitez la prière à sept branches26 comme vous l’avez fait
précédemment. Invoquez/suppliez brièvement comme expliqué ci-dessus [dans la partie I]. Ensuite,
examinez attentivement votre situation (votre corps, votre maison, vos biens, votre environnement, etc.) et
réfléchissez :
Une vie humaine telle que celle que j’ai à présent obtenue sera extrêmement difficile à obtenir dans
le futur, donc je ne la gaspillerai pas dans des activités dépourvues de sens. Je dois l'utiliser au service de
la religion.
Cette réflexion de base doit précéder toutes les séances de méditation.

En résumé :
Les êtres des enfers, les fantômes affamés, les animaux,
Les barbares [les demi-dieux], les dieux à la longue vie,
Ceux qui ont des opinions déformées, ceux qui n’ont pas de connexion avec le Bouddha
Et les muets – tels sont les huit états défavorables27.

Les êtres nés dans les royaumes inférieurs connaissent une misère inévitable. Parce que leur corps
est un support extrêmement médiocre pour suivre la religion, ils ont peu d’opportunités de la pratiquer.
Même les dieux du royaume du désir sont distraits en raison de leur attachement aux plaisirs sensoriels.
Les dieux des royaumes de la forme et du sans forme sont pour la plupart enivrés par le bonheur de
l’absorption28, ils n’ont donc pas la chance d’écouter les enseignements.

26
Pour cette référence et toutes les références ultérieures, voir la note 20.
27
Extrait du Sūtra du Sublime Dharma du Clair Souvenir (skt. Saddharmasmṛtyupasthāna, Tib. P’agpa Dampa'i Tchö Drènpa
Nyèrwar Shagpa, འཕག་པ་དམ་པའི་ཆོས་དྲན་པ་ཉྐྱེར་བར་བཞག་པ།). Les huit états défavorables font référence à huit états d'incarnation avec des
circonstances défavorables à la poursuite du développement spirituel : incarnation en tant qu'être infernal, incarnation en
fantôme affamé, incarnation en animal, incarnation en barbare, incarnation en dieu, incarnation en personne avec une
disposition cynique, incarnation dans un monde où les enseignements du Bouddha n'existent pas et naissance en tant qu'humain
souffrant d’un dysfonctionnement des sens ou du mental complet. Pour une explication de la cosmologie des six royaumes, voir
l'Introduction ; (voir aussi Glossaire des classifications).
28
La transe [ou absorption] (skt. samādhi, Tib. Ting-Ngé Dzin, ཏིང་ངྐྱེ་འཛིན།) est une absorption méditative dans laquelle l'esprit est
dans un état de tranquillité doté de félicité. Bien que cet état implique un retrait des sens intérieurement, il ne s’agit pas d’un
état hypnotique mais d’un état dans lequel le méditant développe la concentration et le contrôle de l’esprit.

Page 5
L’Essence d’Ambroisie

Le corps d’un demi-dieu29 – plus encore que celui d’un dieu du désir – est un pauvre support,
comparable au corps d’un animal. Un être né dans un monde où aucun Bouddha n’est venu ou un être
barbare né dans une région éloignée où les habitants ignorent le bouddhisme n’a aucune chance de
pratiquer. Les royaumes où un Bouddha est venu et les endroits où le bouddhisme s'est répandu sont très
rares. Même ceux qui sont nés dans un pays où le bouddhisme s’est répandu peuvent développer des
opinions perverses et une aversion pour la religion, ou bien naître sans la capacité intellectuelle de
comprendre quelles actions doivent être abandonnées et lesquelles doivent être adoptées. Ces personnes
n’ont pas non plus la chance de pratiquer la religion.
À l’heure actuelle, j’ai obtenu un corps libre de ces huit conditions défavorables et j’ai donc la capacité
de pratiquer la religion.
Pour résumer les dix dotations en un verset :
Être né humain, au centre, disposer de ses facultés complètes,
Avec un karma intact et la foi/confiance.
Le Bouddha est venu, il a enseigné la Voie,
Son enseignement survit, il y a de nombreux adeptes,
Il y a des personnes qui ont un cœur aimant envers les autres30.

Globalement, je suis né humain. En particulier, je suis né dans un pays central où le bouddhisme s'est
répandu. Plus précisément, je suis né avec mes facultés complètes me permettant de savoir quoi adopter
et quoi abandonner. Et d’ailleurs, je ne me suis pas laissé influencer par des vues perverses. Je n’ai commis
aucune acte extrêmement négatif tel que l’un des cinq actes à rétribution immédiate31 et j’ai foi en une
source appropriée : les enseignements sacrés et les règles de discipline32. Les cinq dotations intérieures [ou
personnelles] sont donc complètes.

29
Skt. asura, Tib. Lha-min, ལྷ་མིན།. Les demi-dieux, les êtres de ce royaume, sont jaloux de la splendeur et de la richesse des dieux
et passent leur vie à se battre pour une place dans la demeure divine des dieux.
30
Extrait du Sūtra du Sublime Dharma du Souvenir Clair. Les dix dotations sont dix conditions d’incarnation qui rendent possible
la poursuite du développement spirituel. Elles désignent ceux qui sont nés en tant qu'humains, nés dans un pays où le
bouddhisme s'est répandu, nés avec des facultés sensorielles intactes, possédant un « karma non corrompu », ayant confiance
dans les Trois Joyaux, vivant à une époque où un Bouddha est venu au monde, vivant à une époque où le Bouddha a enseigné,
vivant à une époque où les enseignements du Bouddha survivent, vivant à une époque où l'enseignement compte de nombreux
adeptes et vivant à une époque où les sponsors soutiennent la pratique du Dharma. Kongtrül, Le Flambeau (1977) : 32 (voir
Glossaire des classifications).
Les cinq premiers d’entre eux sont appelés les « cinq dotations intérieures ». Ces cinq derniers sont appelés les « cinq dotations
extérieures ». Kongtrül définit le « karma non corrompu » comme le fait de ne pas être impliqué avec des personnes non
bouddhistes. Patrül Rinpoché le définit comme ayant un mode de vie qui entre en conflit avec les préceptes bouddhistes de
base, comme gagner sa vie grâce à la chasse ou à la prostitution. Kongtrül, Le Flambeau (1977) : 33 ; Patrül Rinpoché. (1998) :
24.
31
Les cinq actes à rétribution immédiate sont le matricide, le parricide, le fait de tuer un Arhat ou un gourou, provoquer un
schisme dans la communauté spirituelle et blesser intentionnellement un Bouddha. Kongtrül, Le Flambeau (1977) : 89 (voir
Glossaire des classifications).
32
Skt. vinaya, Tib. Dülwa : Les « règles de discipline » sont l'une des « trois corbeilles » composant le Canon bouddhiste. Cette
section du canon présente le code de discipline pour les moines, les novices et les pratiquants laïcs. Les deux autres corbeilles
sont les sūtras et l'abhidharma (voir Glossaire des classifications).
Chapitre Un : Les Libertés et les Dotations d’une Précieuse Vie Humaine

De plus, le Bouddha est déjà venu dans ce monde. Il a déjà enseigné les enseignements sacrés. Ses
enseignements n'ont pas décliné mais prospèrent. À l’heure actuelle, de nombreuses nouvelles personnes
commencent à pratiquer le bouddhisme. Il existe de nombreux parrains ou mécènes qui, animés par une
bienveillance envers les pratiquants religieux, leur offrent de la nourriture, des vêtements et des produits
de première nécessité. C’est une époque où les ressources nécessaires pour soutenir la pratique religieuse
sont disponibles. Ainsi, les cinq dotations extérieures sont pleinement complètes.
Avec les choses telles qu’elles sont, un tel corps, libre des huit états défavorables et bénéficiant des
dix dotations, est extrêmement difficile à obtenir. Par conséquent, je dois m’exercer dès maintenant à la
pratique religieuse.

Contemplez ainsi, encore et encore, en vous rappelant les raisons pour lesquelles le corps humain est
si difficile à obtenir. À la fin de la séance de méditation, consacrez le mérite à l’Éveil comme décrit
précédemment.

CONTEMPLATION 3 :
La probabilité de renaître humain
Pour cette contemplation, les préliminaires et la conclusion sont les mêmes que ceux expliqués ci-
dessus.

Parmi tous les êtres sensibles, ceux qui vivent dans les royaumes inférieurs sont extrêmement
nombreux, et ceux qui sont nés dans des existences supérieures sont très peu nombreux. C’est comme
comparer le nombre de grains de terre qui composent la terre avec le nombre de grains de poussière qui
peuvent reposer sur un ongle. Ou je pourrais considérer que si le nombre d'êtres en enfer était égal au
nombre d'atomes composant la terre ; alors le nombre de fantômes affamés serait comme des flocons de
neige dans un blizzard ; le nombre d'animaux aquatiques serait égal aux grains d'orge dans une cuve de
malt ; et les animaux terrestres remplissent chaque montagne, vallée et espace de la terre. Si j’examine ces
exemples, il semble à peine possible de naître en tant que dieu ou humain. Une renaissance humaine est
la moins probable de toutes. Et les humains nés sur terre sont particulièrement rares. Quant à la
renaissance en tant qu’humain pratiquant la religion, c’est presque impossible.
Compte tenu de tout cela, je dois absolument me résoudre à m’exercer à la pratique religieuse ! Mais
pourquoi une renaissance humaine est-elle si difficile à obtenir ? Parmi toutes les créatures vivantes, la
plupart sont enclines à agir de manière néfaste. En général, très peu exercent des activités vertueuses. Et
même parmi ceux qui le font, très peu d’êtres préservent la discipline morale nécessaire pour rendre
possible une renaissance humaine.
Il est donc difficile de parvenir à une renaissance humaine. De plus, j'ai besoin d'accumuler beaucoup
de mérite afin de consolider les dix dotations et de rencontrer les enseignements – une situation dans
laquelle je peux le faire est très difficile à trouver. Mais pour l’instant, grâce à mon karma précédent, j’ai –
en ce moment précis et dans cette circonstance heureuse – accumulé suffisamment de mérite pour obtenir
un corps humain doté de toutes les libertés et de toutes les dotations. Je dois m'exercer à la pratique de la
religion maintenant !
Page 7
L’Essence d’Ambroisie

CONTEMPLATION 4 :
Pourquoi cette vie humaine est importante
{À ce stade, plusieurs autres textes incluent une section intitulée « comprendre la difficulté
d'obtenir une renaissance humaine à l’aide d'exemples ». Puisque cette section présente
simplement des exemples de la rareté d’une vie humaine, il semble inutile dans ce cas de la
considérer comme une contemplation distincte en soi33}

Les préliminaires et la conclusion de cette contemplation sont les mêmes que précédemment. Après
les préliminaires, réfléchissez aux raisons pour lesquelles une renaissance humaine est difficile à obtenir
comme expliqué ci-dessus.

En ce moment exceptionnel, j’ai obtenu une vie humaine extrêmement difficile à obtenir – je dois
donc réaliser le grand sens de cette vie. Si je veux vivre avec une abondance de confort et de bonheur
matériels d’une vie à l’autre, je peux y parvenir sans effort en m’appuyant sur ce corps humain. Si je veux
parvenir à la libération de l’existence cyclique – l’éveil d’un auditeur ou d’un réalisateur solitaire34 – je peux
le faire maintenant sans trop de difficultés. Même si je veux atteindre l’illumination totale et complète, il
me serait facile de le faire en ce moment. Mais si je n’avais pas obtenu un corps humain tel que celui-ci,
comment pourrais-je parler de libération ou de bouddhéité ? Je n’aurais aucune idée de la manière
d’atteindre ne serait-ce qu’un seul aspect du confort mondain. C’est pourquoi, en ce moment-même, je
dois assimiler le sens essentiel de la vie. Si, au contraire, je consacre cette vie humaine que je n’ai obtenue
qu’une seule fois à des activités insignifiantes, ce serait un énorme gaspillage. L'Entrée dans la Conduite des
Bodhisattvas [parfois aussi en français La Marche vers l'Éveil ou Le Guide pour le Mode de Vie d’un
Bodhisattva] 35 de Śāntideva dit :
Si, ayant obtenu de telles libertés, je ne pratique pas les actions vertueuses, il ne pourrait y
avoir de plus grande prétention. Il ne pourrait y avoir de plus grande stupidité.

Gaspiller cette vie humaine, c'est me tromper moi-même ! Ce serait comme voyager sur une île aux
joyaux et en revenir les mains vides. Ce corps est une base extraordinaire qui peut m'apporter n'importe

33
L'histoire la plus fréquemment citée pour illustrer « la difficulté d'obtenir une renaissance humaine à titre d'exemple » est
l'histoire de la tortue et du joug : supposons que cette terre entière soit un océan et qu'une personne y jette un joug qui n'aurait
qu’un trou. Le joug flotterait d'avant en arrière dans les quatre directions. Sous cet océan, il y a une tortue aveugle qui vit
plusieurs milliers d’années mais qui remonte à la surface une fois tous les cent ans. Il serait très difficile que la tête de la tortue
rencontre le trou du joug ; pour autant, cela reste quand même possible. Naître dans une vie humaine précieuse est beaucoup
plus difficile. Gampopa (1998) : 62.
34
Les auditeurs (skt. Ṡrāvaka, Tib. Nyèn-Thö, ཉན་ཐོས།) et les réalisateurs solitaires (skt. Pratyekabuddba, Tib. Rang-Gyèl, རང་རྒྱལ།)
parviennent à une libération temporaire de la souffrance de l'existence cyclique en entrant dans un état d'absorption méditative
: « Ils maintiennent des états de concentration méditative non affectés, mais ces états sont basés sur l'empreinte psychique de
l'ignorance. Puisque leurs concentrations méditatives ne sont pas affectées, ils croient avoir atteint le nirvāṇa et restent ainsi »
(Gampopa. (1998): 52 (voir Glossaire des termes techniques et des noms propres pour définitions de chacun)
35
Skt. Bodhicaryāvatāra ou Bodhisattvacaryāvatāra, Tib. Djang-Tchoub-Sèmpa’i Tchöpa la Djoukpa, བྱང་ཆུབ་སྐྱེམས་དཔའི་སྤྱོད་པ་ལ་འཇུག་པ།.
Chapitre Un : Les Libertés et les Dotations d’une Précieuse Vie Humaine

quelle chose extraordinaire que je désire, et je ne l'ai obtenu que pour une fois. Si je ne fais rien du tout et
que je laisse cela me filer entre les doigts, ce sera ma faute. Auparavant, je l'ai laissé se perdre. Mais
maintenant, à compter de ce jour, je ne perdrai pas un instant ; Je dois pratiquer assidûment la religion.

Contemplez de cette manière, encore et encore.

De plus, si j’estime que le confort et les activités de cette vie sont des considérations importantes, je
devrais me rappeler que, même dans un contexte mondain, jouir du confort à long terme nécessite le
sacrifice temporaire des loisirs et du contentement pendant quelques jours ou quelques mois afin de
travailler pour obtenir cette sécurité éventuelle. De la même manière, si je veux gagner un bonheur
permanent qui dure toute la vie, il est nécessaire d'abandonner l'attachement à cette vie et de travailler à
la pratique religieuse. Il est dit :
Cette vie humaine, avec ses libertés et ses dotations, est très difficile à obtenir. Si vous trouvez
une vie pleine de sens, mais ne l'utilisez pas à bon escient, comment recevrez-vous à nouveau
ce cadeau parfait ?36

36
Śāntideva, Guide pour le Mode de Vie d’un Bodhisattva.

Page 9
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE DEUX :
L’IMPERMANENCE ET LA MORT

CONTEMPLATION 5 :
Assurément, vous allez bientôt mourir
Un sūtra dit :
Quiconque a vécu et vivra
Doit quitter ce corps et partir.
Effrayés par cela, les sages le réalisent ;
Ils en viennent à entrer dans la religion et à s’y entrainer définitivement 37.

Peu importe où je vis, je ne peux pas éviter la mort. Peu importe avec qui je me lie d’amitié, je ne
peux pas éviter la mort. Tous les êtres éphémères qui ont vécu sur la surface de la terre sont morts. Tous
ceux qui vivront dans le futur mourront également. Et parmi ceux qui vivent actuellement, de même,
personne ne peut échapper à la mort. Depuis le jour de ma naissance jusqu’à aujourd’hui, combien de mes
proches sont morts ? Combien de ceux qui m’étaient étrangers ou ennemis sont morts ? Il n’y a aucune
raison de croire que je perdurerai alors qu’ils sont tous morts.
Globalement, personne n’est épargné par la mort. Plus particulièrement, personne n’est capable de
prolonger sa vie. Depuis ma naissance, sans s'arrêter ne serait-ce qu'un instant, ma vie a diminué de sorte
que la mort se rapproche d'instant en instant. Chaque jour qui passe, elle se rapproche. Chaque mois qui
passe, elle se rapproche encore plus. Avec chaque année qui passe, elle devient excessivement proche. Je
me rapproche rapidement de la mort.
Maintenant, alors que je suis jeune, alors que je devrais acquérir de l'expérience dans la pratique
spirituelle, je pense parfois : « Je ne suis pas encore vieux ; si je le fais progressivement, tout ira bien ».
Dans cette courte vie, procrastiner tranquillement ainsi ne fonctionnera pas ! Par exemple, si je ne pratique
pas la religion quand je suis jeune, alors à soixante ans, ma vie se sera écoulée. Même si dans ma vieillesse
je décide de pratiquer la religion, étant donné que la force de mon corps et de mon esprit sera diminuée,
le fruit n’apparaitra pas38. La moitié du temps restant sera passée à dormir. Tombant sous l’influence d’une
myriade de choses insignifiantes comme préparer la nourriture, se déplacer, les distractions, etc., je gaspille
cette vie humaine. Même du point de vue de quelqu’un qui fait preuve d’une grande motivation et d’une
grande persévérance, le temps disponible pour pratiquer la religion et acquérir de l’expérience ne sera pas
très long.

37
Prajnavarman. Le Recueil des Déclarations (Skt. Udānavarga. Tib. Tché-dou Djöpa’i Ts’om kyi Mam gyi Drèlpa, ཆྐྱེད་དུ་བརོད་པའི་
ཚོམས་ཀི་མམ་གི་འགྐྱེལ་པ།).
38
À l'époque où ce texte a été rédigé, au XVIe siècle, il est probable que la durée de vie ordinaire ne dépassait généralement pas
soixante ans, comme l'indique l'auteur. L'intention de cette section n'est pas de laisser entendre que les personnes âgées ne
peuvent pas pratiquer une religion, mais d'encourager l'aspirant à ne pas tergiverser, car les défis liés à la pratique d'une religion
deviennent plus grands avec l'âge.
Chapitre Deux : L’Impermanence et la Mort

Je dois rapidement réaliser la vérité, celle qui a été réalisée par des personnes saintes qui se sont
exercées à chaque instant disponible. Au cours de cette courte vie, je n’adopterai jamais l’approche
consistant à reporter la pratique spirituelle au futur par indolence ou procrastination !

Il est très important de méditer de cette manière, encore et encore, en réfléchissant aux raisons de
pratiquer.

CONTEMPLATION 6 :
Vous n'avez aucune idée de quand vous mourrez.
Globalement, non seulement la vie est courte, mais je n’ai aucune indication du moment où je
mourrai. Si j’ai de la chance, ma durée de vie – propulsée par mon karma passé – pourrait éventuellement
s’étendre jusqu’à 60 ou 70 ans. Mais, plus probablement, ce ne sera pas autant que ça. Même en admettant
que je puisse vivre longtemps, il n’est pas possible de calculer à partir d’aujourd’hui quelle sera ma durée
de vie. Elle est peut-être à moitié terminée, ou elle est presque épuisée. Pour certains, en raison de leur
karma antérieur, il est possible que leur vie ne s’étende pas au-delà de trente ou quarante ans.
En d’autres termes, le seigneur de la mort est véritablement arrivé à ma porte. Les ennemis, les amis,
les richesses, les biens matériels, les associés, les serviteurs et les compagnons de cette vie, le bonheur, la
tristesse et la conversation, aucun ne restera longtemps avec moi. Quel est le but de tout cela ? Comme il
est dit :
Si la terre, les montagnes et les océans
Doivent être incinérés par sept soleils de feu,
Et qu'aucun de ces corps ne subsiste, même comme cendre39,
Il va sans dire que je ne devrais pas compter sur quelque chose d'aussi fragile40.

Ce corps, un agrégat de chair, de sang et de fluides, est éphémère. La respiration est instable, comme
une brume en automne : je n’ai aucune idée du moment où elle s’arrêtera. Parce que je n’ai pas réalisé la
liberté de l’esprit41, je ne suis sûr d’absolument rien et je ne sais pas quand je mourrai.
Maitreyanātha enseigna :
Dire : "Aujourd'hui au moins, je ne mourrai pas"
Et rester tranquille n’est pas sage.
Lorsque je disparaitrai,

39
Selon la cosmologie bouddhiste, l’univers est créé et détruit à plusieurs reprises. À la fin de chaque éon, l’univers est incinéré
par sept soleils pendant sept jours. Patrül Rinpoché (1998) : 40.
40
Nāgārjuna. La lettre à un ami (Skt. Suhrl-lekha, Tib. Shépa’i Tring-Yik, བཤྐྱེས་པའི་སིངས་ཡིག).
41
Ici, la liberté d’esprit est synonyme de réalisation de la bouddhéité. L'atteinte de la bouddhéité garantit la liberté sur son état
mental dans cette vie et la liberté de choisir le lieu et le type de sa renaissance.

Page 11
L’Essence d’Ambroisie

Mon sort ne fera aucun doute42.

Dans les paroles de Nāgārjuna :


Les circonstances de décès sont nombreuses.
Celles qui soutiennent la vie sont peu nombreuses ;
Ces mêmes choses peuvent aussi causer la mort.
Par conséquent, pratiquez continuellement la religion43.

Les causes potentielles de décès incluent les êtres sensibles tels que les humains, les animaux et les
démons ; l'environnement et les éléments tels que les précipices, le feu et l'eau ; et intérieurement les
quatre cent quatre sortes de maladies du corps. Bref, il n’y a rien au sujet de quoi on puisse dire : « Cela ne
peut pas être la cause de mon décès ». Ces choses qui sont considérées comme des facteurs permettant
de ne pas mourir et de rester en vie – la nourriture, les vêtements, ma maison, mon lit, les médicaments,
etc. – peuvent à un moment donné devenir des circonstances de mort, par exemple lorsque la nourriture
devient rance ou lorsque l’on prend le mauvais médicament. Je vis au centre d’un tourbillon de
circonstances défavorables à mon corps et à ma vie et je ne sais rien du moment où je mourrai !

CONTEMPLATION 7 :
Au moment de la mort, rien d'autre excepté la religion ne nous aidera.
Śāntideva dit :
Quand je serai saisi par le messager du seigneur de la mort,
À quoi me serviront mes proches ? À quoi me serviront mes amis ?44

Au moment de ma mort, même si j'ai beaucoup de richesses et de nombreux biens, je serai


impuissant à emporter ne serait-ce qu'une seule graine de sésame. Même si je suis au centre d'un grand
nombre de membres de ma famille, de compagnons, d'ouvriers, de serviteurs, de seigneurs, de chefs, etc.,
je ne pourrai pas emmener avec moi ne serait-ce que le plus humble serviteur ou un seul chiot, et ils ne
pourront pas non plus me suivre. Tout cela a le caractère des adieux et de la séparation, et n'apportera
absolument aucun avantage.

Méditez avec un profond dégoût. Appliquez cela de la même manière à tout : amis, ennemis, confort,
misère, bonnes et mauvaises circonstances.

42
Maticitra. Lettre au Roi Kaniska (Skt. Mahārāja-Kanika-lekha, Tib. Gyalpo Tchènpo Kanika la TringpaiI Tring-Yik , །རྒྱལ་པོ་ཆྐྱེན་པོ་ཀ་
ནིས་ཀ་ལ་སིངས་པའི་སིང་ཡིག).
43
La Précieuse Guirlande des Avis au Roi (Skt. Ratnāvalī, Tib. Gyalpo la Tam Djawa Rinpoché’i T’rèngwa, རྒྱལ་པོ་ལ་གཏམ་བྱ་བ་རིན་པོ་ཆྐྱེའི་
ཕྐྱེང་བ།).
44
Guide du mode de vie du bodhisattva.
Chapitre Deux : L’Impermanence et la Mort

Si rien de tout cela ne me suit, qu’est-ce qui me suit ? Mon karma accumulé, à la fois positif et négatif,
suivra derrière moi. Une fois que j’ai fait quelque chose de négatif, cela continuera à me faire du mal. En
revanche, toutes les actions vertueuses que j’ai accomplies me bénéficieront sans la moindre exception. Je
devrais réfléchir aux paroles de Tchödèn Rabdjor :
Tous les autres resteront ;
En dehors des actions vertueuses et négatives,
Rien ne vous suivra.
Sachez-le et analysez-le bien45.

Par conséquent, je devrais cultiver la pensée que je suis certain de mourir, que je mourrai bientôt,
que je ne sais pas quand je devrai mourir et que rien ne me servira à ma mort. À compter du moment où
je mourrai et durant des vies illimitées, la seule chose qui puisse me bénéficier est l'enseignement sacré :
je dois dès à présent concentrer mes efforts sur la pratique de cet enseignement !

CONTEMPLATION 8 :
Les cinq versets racines – les instructions utilisées pour les séances de méditation sur
l'impermanence et la mort
Les versets racines :
Considérez d’abord que rien ne reste pareil ; tout change.
Pensez aux nombreuses autres personnes qui sont mortes.
Pensez encore et encore aux nombreuses causes potentielles de décès.
Méditez : « Comment cela se passera-t-il lorsque je vais mourir ? »
Contemplez ce qui se passera après la mort.

1. "Considérez d'abord que rien ne reste pareil ; tout change".


Pour chacun d’entre nous, depuis notre naissance jusqu’à notre mort, ce continuum d’agrégats
change et se développe. Au début, quand j'étais petit bébé, j'étais comme ça. Quand j'étais enfant, j'étais
ainsi. À l’époque de ma jeunesse, j’étais comme ceci. Maintenant, je suis comme ça, me rapprochant de
plus en plus de la mort. Rien n’a été d’aucun bénéfice. Dans un état d’esprit posé, cultivez un sentiment de
désenchantement.

2. "Pensez aux nombreuses autres personnes qui sont mortes".


Rappelez-vous clairement l’impermanence. Énumérez ensuite mentalement les personnes dont vous
avez entendu parler ou que vous connaissiez et qui sont décédées là où vous résidez et réfléchissez :

45
Matricita. Lettre au roi Kaniska.

Page 13
L’Essence d’Ambroisie

Combien de personnes plus âgées que moi sont mortes ? Combien de personnes de mon âge ou
moins sont décédées ? Quand j'y pense, plus de gens sont morts ici qu'il n'y en a aujourd'hui de vivants, et
pour la plupart, les gens meurent dans la fleur de l'âge. Je suis de la même nature qu'eux. Je ne transcende
pas cette situation. Penser que je ne finirai pas parmi eux est une idiotie. Avant de mourir, je dois pratiquer
purement ma religion.

Avec une conscience aiguë de l’impermanence, songez aux personnes et aux animaux dont vous avez
entendu parler ou que vous avez connus et qui sont morts. Pensez à ceux qui sont vivants – vos
connaissances et ceux dont vous avez entendu parler – qui sont passés de très puissants à très faibles, ou
de faibles à puissants, de riches à pauvres et ainsi de suite, puis réfléchissez :
Moi, mes affaires, mes plaisirs et ainsi de suite sont de cette nature. Eux aussi sont transitoires.

3. « Pensez encore et encore aux nombreuses causes potentielles de décès. »


Après avoir réfléchi comme auparavant aux nombreuses causes potentielles de décès, réfléchissez :
Je ne sais même pas comment tout ce qui m’entoure pourrait contribuer aux circonstances de ma
mort. Je ne sais pas comment les choses peuvent changer spontanément à tout moment.

4. « Méditez : « Comment cela se passera-t-il lorsque je mourrai ? »


Quand je mourrai, si mon esprit est dans un état non vertueux, je ferai l'expérience de souffrances
terrifiantes – le karma de ma force vitale étant coupé, etc. La mort n’est ni désirée ni accueillie avec joie.
Non désirée, elle arrive tout d’un coup. Les gens ne meurent pas heureux et pleins de joie. Ils meurent
accompagnés de souffrances puissantes et intenses. L’autre monde n’est pas celui que je connais et dont
je suis familier. Je m'apprête à errer sans direction dans un pays inconnu.

5. « Contemplez ce qui se passera après la mort. »


Quand je mourrai, mon corps et mon esprit se sépareront. Ce corps sera enterré et deviendra un
amas de vers ou sera jeté à l'eau pour être mangé par les poissons et les loutres, ou sera incinéré et réduit
à une poignée d'os, ou encore transporté dans les montagnes ou les plaines pour être éparpillé et dévoré
par les oiseaux et les chacals. Au final, au bout de quelques jours, il n’en restera même plus aucune trace.
La disparition de ce corps, entretenu avec tant de soin maintenant, se déroulera ainsi. Si l’esprit qui porte
le fardeau du karma doit se rendre dans un lieu de naissance inconnu, y a-t-il un moyen pour moi de ne pas
pratiquer de religion en ce moment ? Ou, si je l’ai pratiquée, y a-t-il un moyen de la reporter à plus tard ?

Après avoir ainsi réfléchi, formez un plan en pensant :


Maintenant, je vais me lancer dans une pratique spirituelle pure. Avec l’armure de cette
détermination, je ferai naître, vivrai et garderai la pratique spirituelle. Alors je passerai ma vie avec une
grande joie. Après ma mort, les autres diront : « C’était vraiment une personne religieuse » et aspireront à
être comme moi. En vivant cette vie, je dois m'engager à un objectif. Pour cela, je dois méditer sur la vérité
et atteindre un état stable. Pour que cela se produise, je dois me familiariser avec la pratique de la
méditation, puis devenir compétent. Si je n’atteins pas la stabilité, alors lorsque je rencontrerai des
Chapitre Deux : L’Impermanence et la Mort

circonstances négatives, mon esprit ne sera pas fonctionnel. Il y a un risque que je ne m’en tienne pas à
mes projets de pratique religieuse. Je pourrais agir contrairement à la religion et finir par avoir des regrets.
La mort viendra au milieu d’un vacarme de dénigrement de la part de tous les autres. Il n’est pas question
que je laisse cela se produire ; dès maintenant, afin de réaliser les aspirations des autres et mon bonheur,
je vais m'engager dans une pratique spirituelle authentique et la maintenir jusqu'à ma mort.

Faites ce serment encore et encore. De nos jours, pour tous les croyants, ce remède est crucial.

Page 15
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE TROIS :
LES SOUFFRANCES DES ROYAUMES INFÉRIEURS

{Incluez les préliminaires et la conclusion dans chaque séance de contemplation comme


auparavant. Réfléchissez ensuite à ce qui suit : « Je n'ai pas la liberté de rester longtemps dans
ce monde humain. La mort finira par me détruire. Mais la mort elle-même n'est pas la seule
chose que je doive craindre. Je ne vais pas seulement mourir – je vais être obligé de renaître.
C'est de cela dont je devrais m'inquiéter. Si je ne m'engage pas dans des actions vertueuses et
qu’au lieu de cela je m'engage dans de nombreuses actions néfastes, je renaîtrai dans l'un des
trois royaumes inférieurs. Comme c’est effrayant ! » Toutes les réflexions sur la souffrance des
royaumes inférieurs devraient commencer par cette réflexion.}

Les royaumes des enfers

CONTEMPLATION 9 :
La Souffrance des Enfers Chauds
Pour résumer en vers :
Reviviscence, Lignes noires, Écrasement,
Lamentations, grandes lamentations,
Chaleur, Extrême chaleur et Tourments incessants46.

Tous les royaumes des enfers chauds ont ces caractéristiques en commun : il n’y a ni montagnes ni
vallées à la surface de la terre – le sol est fait de fer brûlant ; des flammes flambent constamment à une
longueur de bras; des ravins et des précipices déchiquetés traversent le paysage ; l'eau prend ici la forme
de cuivre brûlant et fondu, de bronze fondu, de plomb fondu et d'eau salée bouillante – les rivières et les
lacs sont composés de ces substances ; même les arbres sont faits de fer brûlant. Ces royaumes regorgent
d'oiseaux agressifs, d'animaux carnivores, de démons karmiques47 et de meurtriers. Les êtres de l’état
intermédiaire48 qui sont destinés à y renaître font d'abord l'expérience d'un froid extrême : ils peuvent être
soufflés par le vent, frappés par la pluie, etc. Par la force de leur karma antérieur, ils voient l’un des
royaumes des enfers chauds, ont envie d’y aller et courent dans cette direction. Ils sont alors pris dans ce
royaume et y renaissent.
Le feu fait avec du bois de santal est sept fois plus chaud qu’un feu ordinaire. Le feu du premier
royaume infernal, « Reviviscence », est sept fois plus chaud que cela. De même, la chaleur de chaque enfer

46
Vasubandhu. Le Trésor de la Phénoménologie (Skt. Abhidharmakośabhāṣya, Tib. Tchö Ngönpa’i Dzö kyi Ts’ik Lé’Our Djépa, ཆོས་
མངོན་པའི་མཛོད་ ཀི་ཚིག་ལྐྱེའུར་བྱས་པ།).
47
Les « démons karmiques » sont les gardiens des enfers qui sont en fin de compte des projections mentales apparaissant en
raison du karma négatif des êtres nés dans ce royaume.
48
Tib. bardo, Skt. Antarabhava. L'état intermédiaire fait référence à l'état entre la mort et la renaissance.
Chapitre Trois : Les Souffrances des Royaumes Inférieurs

inférieur est sept fois plus grande que celle de celui qui se trouve au-dessus. L’esprit d’un être vivant dans
les royaumes infernaux est extrêmement sensible : il est poignardé et obscurci par les sentiments. Le corps
d'un être infernal est mou et sa chair tendre, comme celle d'un nouveau-né. Son corps et son esprit tolèrent
peu la douleur, c’est pourquoi sa souffrance est particulièrement intense.
Les facultés et les membres des êtres de ces royaumes sont instantanément restaurés 49 comme s'ils
sortaient du sommeil. Tous les êtres qui prennent une « naissance miraculeuse », comme les êtres des
enfers50, connaissent des expériences similaires.

Les particularités de chaque enfer chaud :


1. Reviviscence : ici, les êtres se voient comme des ennemis et des assassins et génèrent donc de
l’aversion les uns envers les autres. Leurs bras levés se transforment en armes tranchantes qu’ils
utilisent pour se poignarder et se couper mutuellement en morceaux. Finalement, ils perdent
connaissance et tombent comme s'ils étaient morts. Puis un vent froid vient du ciel et une voix crie
« Revis ! » Leurs corps sont restaurés dans leur état d'origine ; ils se battent comme avant, meurent
et ressuscitent dans un cycle sans fin.
2. Lignes noires : les gardiens de cet enfer51 tracent de nombreuses lignes noires sur le corps des êtres
sensibles de ce royaume infernal, puis les coupent avec des scies, les hachent avec des haches et les
transpercent avec des armes tranchantes. Pendant que la partie supérieure de leur corps est
découpée, la moitié inférieure guérit. Pendant que la partie inférieure de leur corps est découpée, la
moitié supérieure guérit. Cela se poursuit constamment, sans interruption.
3. Écrasement : ici, les êtres font la douloureuse expérience d'être coincé entre ou sous le poids
d'animaux énormes et effrayants tels que des béliers. Ou encore, ils peuvent faire l’expérience d’être
écrasé par d'énormes rochers qui prennent des formes terrifiantes telles que des têtes de mouton,
de chèvre, de buffle d'eau ou de lion. Ou bien ils peuvent être écrasés et étouffés depuis le haut par
une grande montagne. Parfois, un groupe d'êtres sensibles de ce royaume sont rassemblés au
sommet d'une énorme barre de fer, où ils sont broyés et brisés par un gourdin ou un marteau.
Lorsque la montagne ou le gourdin s'élève, le corps des êtres retrouve son état d'origine. Le corps
est alors à nouveau broyé et réduit en poussière.
4. Hurlements : les êtres de cet enfer sont poursuivis par de nombreux animaux sauvages terrifiants. De
loin, ils aperçoivent une maison blanche. Pensant qu'ils y seront en sécurité, ils fuient vers la maison
pour s'y abriter. Mais aussitôt qu’ils se trouvent à l’intérieur, elle devient une maison en fer sans
portes. Le feu les embrase et les brûle à l’intérieur comme à l’extérieur. Sans espoir de s’échapper,
ils sanglotent et hurlent.
5. Grand Hurlement : cet enfer est similaire à celui décrit ci-dessus, mais la maison en fer a deux étages.
Les êtres y sont cuits à l'intérieur d'une marmite en fer remplie de fer en fusion.

49
Les êtres des royaumes infernaux ont des « corps mentaux » et n’existent pas sous forme physique. Par conséquent, après
avoir perdu connaissance ou avoir été mutilés, ils se réveillent avec le sentiment que leur corps est à nouveau complet et entier.
50
Les quatre types de naissance présents dans les six royaumes sont : la naissance à partir d'un ventre maternel, d'un œuf, de
la chaleur et de l'humidité et la naissance miraculeuse. Gampopa. (1998) : 439 (voir Glossaire des classifications).
51
Voir note 47.

Page 17
L’Essence d’Ambroisie

6. Chaleur : les êtres de ce royaume sont lentement empalés du haut de la tête jusqu'à l'anus ou de
l'anus jusqu’au sommet de la tête avec des pieux ou des lances brûlants afin que leurs entrailles
soient cuites dans le processus. Du feu et de la fumée sortent de leurs neuf orifices.
7. Extrême chaleur : cet enfer est similaire à « Chaleur », mais les êtres qui s'y trouvent sont transpercés
par des lances à trois pointes et ainsi de suite. La souffrance vécue dans les enfers supérieurs est
également vécue dans les enfers plus profonds, mais la souffrance dans les enfers plus profonds est
beaucoup plus intense.
8. Tourments incessants : ici, la misère est incommensurable, sans le moindre répit de confort. Les corps
des êtres de ce royaume sont enveloppés dans une feuille de fer fondu, placés dans un panier en fer
et secoués avec du sable chaud. On enseigne également que certains d'entre eux subissent la
souffrance d’avoir leur langue labourée par 500 énormes charrues. Comme les mèches des lampes à
beurre, leurs corps brûlent avec du feu à l'intérieur et à l'extérieur, de sorte que le feu et leur corps
sont indivisibles. À part leurs paroles et leurs cris, il serait même difficile de les identifier comme des
êtres sensibles.

Les êtres des royaumes infernaux éprouvent d’intenses souffrances pendant longtemps. Le Trésor de
la Phénoménologie dit :
Cinquante années humaines équivalent à un jour dans le royaume des dieux du désir.
Et ils vivent 500 années divines.
La durée de vie dans les [royaumes] supérieurs double à mesure que vous montez...
La durée de vie et les jours dans " Reviviscence " et les six autres sont égaux au royaume des
dieux du désir...
Cinquante années humaines sont équivalentes à un jour pour les quatre grands rois [du royaume des
dieux du désir]. Si vous étiez capable de vivre cinq cents années dans le royaume des enfers, cela
équivaudrait à un jour de « Reviviscence». La durée de vie dans « Reviviscence » est de cinq cents ans. La
durée de vie des êtres dans les enfers d’en bas double à mesure que vous descendez. La durée de chaque
jour dans chaque enfer inférieur est deux fois plus longue que celle du dessus. L’enfer directement au-
dessus devient la base pour calculer la durée des jours et la durée de vie des êtres dans l’enfer en dessous.

À la fin de chaque séance, pensez :


La souffrance dans ces enfers est extrême. Elle dure longtemps. Pour l’instant, si je me brûle
simplement le bout du doigt, pendant un bref instant, avec une petite flamme, j'ai du mal à le supporter.
Si un jour je me retrouve en enfer, je ne pourrai pas du tout supporter la souffrance. Une fois né là-bas, je
n’aurai aucun moyen de renverser la situation. Mais, pour le moment, j’ai un moyen d’inverser la tendance :
purifier le karma négatif et les mauvaises actions qui conduisent à la renaissance est le seul moyen. Afin de
ne pas renaître dans un royaume infernal, je dois m’exercer à la pratique spirituelle.

{Selon votre inclination, il n'y a aucun problème à diviser ces contemplations en plusieurs
séances.}
Chapitre Trois : Les Souffrances des Royaumes Inférieurs

CONTEMPLATION 10 :
La souffrance des enfers froids
Pour résumer en une strophe :
Cloques, Cloques Éclatées,
Gémissements « atchou ! », Soupirs « kyihou ! », Claquements de dents,
Crevasses telle une fleur Utpala, Crevasses tel un lotus rouge et Grandes crevasses tel un
lotus52.

Dans tous les enfers froids, le sol, les montagnes et les vallées sont constitués de neige et de glace,
entrecoupés de crevasses et de ravins. Des vents violents et glaciaux et des tempêtes de neige font
constamment rage sur le paysage. Les vents sont si froids qu'ils pénètrent la peau et glacent la chair des
êtres jusqu'aux os.
Chacun des huit enfers est sept fois plus froid que celui qui le surplombe. Les êtres sensibles destinés
à y naître font d'abord l'expérience dans l'état intermédiaire d'être brûlés dans un incendie. Ils souhaitent
se rafraîchir et, voyant de loin le paysage froid de l'enfer, courent dans cette direction. Une fois entrés dans
ce royaume, ils y renaissent.

1. Cloques : les êtres de ce royaume ont si froid que des ampoules recouvrent leur corps, à l'extérieur
comme à l'intérieur.
2. Cloques Éclatées : les êtres de ce royaume ont si froid que leurs cloques éclatent. Le pus recouvre
leur corps et gèle, les frigorifiant davantage. Il est dit dans La Lettre à un Disciple53 que des vers
infestent le pus, pénètrent dans le corps des êtres et les dévorent.
3. Gémissements « atchou !» : ici, les êtres ont si froid qu'ils sont tout juste capables d'émettre de courts
sons monosyllabiques.
4. Soupirs « kyihou ! » : ici, les êtres ont encore plus froid que ceux-là et ne peuvent même pas
prononcer une syllabe – ils sont juste capables de faire de légers bruits à peine audibles.
5. Claquements de dents : ici, les êtres ont encore beaucoup plus froid et ne peuvent émettre aucun
son vocal. Leurs corps frissonnent de manière incontrôlable ; leurs mentons tremblent et leurs dents
claquent.
6. Crevasses comme une fleur d'Utpala : ici, le corps des êtres gèle et se brise en quatre ou huit
morceaux.
7. Crevasses comme un lotus : le corps de ces êtres se brise en une centaine de morceaux ou plus.
8. Crevasses comme un grand lotus : C'est le plus extrême des enfers froids. Ici, chaque section du corps
des êtres se divise en centaines et en milliers de morceaux.

52
Vasubandhu. Le Trésor de la Phénoménologie.
53
Candragomin. Skt. Śiṣyalekha, Tib. Lobma la Tringpa’i Yik, སོབ་མ་ལ་སིང་པའི་སིང་ཡིག།.

Page 19
L’Essence d’Ambroisie

Quelle est la durée de vie des êtres dans Cloques ? Supposons qu’il y ait un silo pouvant contenir
quatre-vingts boisseaux et qu’il soit entièrement rempli de graines de moutarde. Si l’on retirait une graine
de moutarde tous les cent ans, la vie d’un être dans Cloques prendrait fin une fois le silo vide. C’est ainsi
qu’on le présente. La durée de vie des êtres dans chacun des enfers inférieurs est vingt fois plus longue
que celle du dessus.

Le début et la conclusion de la contemplation sur la souffrance des enfers froids sont les mêmes que
pour les enfers chauds.

CONTEMPLATION 11 :
La souffrance des enfers voisins
Le Trésor de la Phénoménologie dit :
En plus de ces huit, il y en a seize autres.
Les quatre principaux sont La Fosse de Feu, Le Marais des Cadavres Putrides,
La Route des Rasoirs et La Rivière.
Autour de chacun des huit enfers chauds, dans les quatre directions cardinales, se trouvent
quatre enfers voisins.

1. La Fosse de Feu : dans cet enfer, il y a un puits extrêmement large rempli de braises chaudes. Certains
êtres y sont nés dès le début, et d'autres y errent depuis les principaux enfers chauds. Parce que la
misère des êtres sensibles dans les enfers principaux est si intense, ils deviennent obsédés par l’idée
de s’échapper. Au final, certains parviennent à s’enfuir et tombent dans le gouffre de braises. En
fonction de la lourdeur de leur karma, ils peuvent s’enfoncer jusqu'aux genoux, jusqu'à la taille, etc.
Lorsqu’ils souhaitent fuir la fosse, ils deviennent confus et retournent en courant vers les enfers
principaux. Les terrifiants gardiens des enfers principaux les entourent et se saisissent d’eux, et ils ne
peuvent plus s'échapper avant un certain temps.
2. Le Marais des Cadavres Putrides : mais lorsqu'ils s’enfuient à nouveau, ils tombent dans un marécage
appelé « Cadavres Putrides » qui est rempli de neuf choses dégoûtantes54. La puanteur y est si fétide
qu'elle suffit à leur fendre le crâne et à leur faire perdre connaissance. Le marais regorge d'insectes
aux dents de fer et de cuivre qui pénètrent et dévorent les corps des êtres comme les termites
dévorent le bois.
3. La Route des Rasoirs et autres : les êtres voient d'abord au loin une belle prairie verdoyante et ils
courent vers elle. Lorsqu'ils arrivent sur place, le sol est couvert de rasoirs d'une hauteur d'environ
quatre pouces et ils endurent le supplice d'avoir les pieds coupés.

54
Les neuf choses répugnantes sont les cadavres bleutés, les cadavres en décomposition, les cadavres rongés par les vers, les
cadavres gonflés, les cadavres ensanglantés, les cadavres dévorés par des prédateurs, les parties du corps éparses, les cadavres
en feu et les os secs. Dhammapada. (1985) : 278.
Chapitre Trois : Les Souffrances des Royaumes Inférieurs

Un enfer apparenté dans ce voisinage est « La Forêt des Épées ». Les êtres des enfers principaux,
torturés par la chaleur, sont ravis de voir au loin une forêt fraîche et ombragée. En courant vers elle,
ils découvrent que toutes les feuilles des arbres sont des épées et d'autres armes. Le vent souffle,
faisant tomber les armes comme de la pluie et coupant leurs corps en morceaux.
Un autre enfer est celui des « Arbres Śāmali ». Les êtres de ce royaume sont d'abord pourchassés par
des animaux dangereux. Les êtres voient un grand arbre Śāmali et grimpent sur son tronc. Il y a des
épines d'un pied de long sur le tronc, tournées vers le bas, qui transpercent progressivement leur
corps tout au long. Ils subissent également d’autres terreurs, comme des nuées d’oiseaux féroces qui
leur crèvent les yeux et leur déchirent la chair. Puis, lorsqu'ils essaient de descendre, les épines se
tournent vers le haut et transpercent leur corps au fur et à mesure qu'ils descendent. Puisque les
trois enfers voisins décrits ci-dessus sont tous associés aux blessures causées par des armes, ils sont
classés dans la même catégorie.
4. La Rivière Infranchissable de Cendres Chaudes : les êtres infernaux, tourmentés par la chaleur,
aperçoivent une rivière fraîche couler au loin. Arrivés là, ils s'y jettent sans aucune hésitation mais
c’est pour découvrir que la rivière est un mélange de feu et d'eau. Elle est extrêmement chaude,
profonde et large. Leur corps s'enfonce dans l'eau et il est complètement cuit, jusqu'à ce que la chair
se sépare des os. La chair tombe, mais la force vitale reste dans les os. Les êtres deviennent des
squelettes et sortent de l'eau. Dès que cela se produit, leur chair est restaurée et ils s'enfoncent à
nouveau dans la rivière. La durée pendant laquelle ils doivent endurer cette torture est indéterminée,
mais elle est toujours longue : cent, mille ans ou plus.

Le début et la fin de la séance de méditation suivent le schéma de la précédente.

CONTEMPLATION 12 :
Les Enfers Éphémères
Ces enfers existent sous la terre ainsi que dans les montagnes, les plaines et les eaux de la terre. La
durée de vie des êtres dans ces enfers est variable. Alors que certains d’entre eux vivent plus longtemps
que les êtres des enfers principaux, d’autres vivent très peu de temps. Le type de souffrance qu’ils endurent
varie également. Les sūtras déclarent que certains êtres des enfers éphémères expérimentent le bonheur
des dieux pendant la journée et les souffrances de l'enfer la nuit. Ils peuvent prendre diverses formes dans
cet enfer, comme un siège, un mur, un pilon, un arbre, un fantôme, un balai, etc.55

Le début et la conclusion de chaque séance sont les mêmes que ci-dessus.

55
Les êtres des enfers éphémères ont, selon la nature de leurs projections karmiques, une grande variété de modes d'existence.
Par exemple, certains êtres peuvent se projeter mentalement sur des objets inanimés.
Patrül Rinpoché explique : « Les êtres peuvent être écrasés entre des rochers ou piégés dans une pierre, congelés dans la glace,
cuits dans de l'eau bouillante ou brûlés dans le feu. Certains ont l’impression que, lorsque quelqu'un coupe un arbre, ils sont
l'arbre dont les membres sont coupés. Certains souffrent parce qu’ils identifient leur corps avec des objets constamment utilisés,
comme des mortiers, des balais, des casseroles, des portes, des piliers, des plaques de cuisson et des cordes ». Patrül Rinpoché.
(1998) : 69.

Page 21
L’Essence d’Ambroisie

{Pendant la période où vous méditez sur la souffrance des enfers, générez la confiance en
écoutant, en réfléchissant et en étudiant des extraits de sūtras tels que l'histoire de
'Sanghanakshita'56}

CONTEMPLATION 13 :
Le royaume des fantômes affamés
Les préliminaires et la base de cette contemplation sont les mêmes que ci-dessus.

Si je pense : « Et si je n'étais pas né dans un royaume infernal mais plutôt comme un fantôme affamé,
serais-je alors heureux ? », quand j’y réfléchis, je ne serais pas heureux. Il existe deux types de fantômes
affamés : ceux qui vivent sous terre et ceux qui vivent dispersés.

1. Les fantômes affamés vivant à Serkya : le premier type de fantômes affamés vit à 500 milles sous
terre. Ils vivent dans la ville des fantômes affamés appelée Serkya, l'empire du roi Yamadharma, chef
des fantômes affamés. D'innombrables fantômes affamés vivent autour de cette ville.
2. Les fantômes affamés vivant dispersés : il existe d'innombrables fantômes affamés qui se déplacent
dans l'espace, sur la terre et sous la terre. Si j'avais la clairvoyance, je serais capable de percevoir que
les fantômes affamés sont partout. Ils sont simplement incapables de trouver un endroit où aller
vivre. Il y en a quelques-uns dotés de grands pouvoirs miraculeux qui sont plutôt heureux. Mais la
plupart d’entre eux connaissent de grandes souffrances. Le sūtra La Mise en Pratique de la Pleine
Conscience du Dharma Sacré57 mentionne trente-six sortes de fantômes affamés. En résumé, il existe
en trois types principaux : ceux ayant des obscurcissements extérieurs, ceux ayant des
obscurcissements intérieurs et ceux ayant des obscurcissements associés à la nourriture et à la
boisson.
3. Les fantômes affamés avec des obscurcissements extérieurs : durant de nombreuses années, ces
fantômes affamés sont incapables de trouver à manger et à boire. De temps en temps, ils aperçoivent
au loin des tas de nourriture ; mais quand ils arrivent, il ne reste plus rien. Parfois, ils voient un grand
fleuve ; mais quand ils arrivent au rivage, celui-ci est asséché et il ne reste plus que du sable et le fond
pierreux de la rivière. Parfois, un arbre verdoyant et chargé de fruits apparaît devant eux, mais il
sèche lorsqu'ils arrivent à sa base. Parfois, la nourriture est gardée par de nombreux démons qui les
empêchent d’y accéder.
4. Les fantômes affamés avec des obscurcissements intérieurs : leur bouche est aussi large que le chas
d’une aiguille. Au début, ils sont incapables de mettre de la nourriture ou à boire dans leur bouche.
Quand finalement un peu de nourriture arrive, elle se perd dans l'énorme cavité de leur bouche. Si

56
Une traduction de cette histoire peut être trouvée dans Gampopa. (1998) : 357-361.
57
Skt. Saddharmasmṛtyupasthāna, Tib. P’agpa Dampa'i Tchö Drènpa Nyéwar Shagpa, འཕག་པ་དམ་པའི་ཆོས་དྲྐྱེན་པ་ཉྐྱེ་བར་གཞག་པ།.
Chapitre Trois : Les Souffrances des Royaumes Inférieurs

un peu de liquide parvient à pénétrer, il est asséché par le poison présent dans leur salive. S’ils
parviennent à avaler de la nourriture ou à boire, cela ne parvient généralement pas dans leur gorge,
qui est aussi étroite qu'un archet. Même si une partie parvient à y descendre, comme leur estomac
est de la taille d'une montagne, ils ne sont jamais rassasiés.
5. Les fantômes affamés qui ont des obscurations associées à la nourriture et aux boissons : quelle que
soit la nourriture ou la boisson absorbée par ces fantômes affamés, elle se transforme en feu qui
brûle l'intérieur de leur corps. De plus, tout ce qu’ils peuvent trouver à manger, ce sont des choses
dégoûtantes qui les font souffrir, comme des charbons ardents, des excréments, de l’urine, du pus
et du sang. Ils ne trouvent jamais rien de bon à manger.

Globalement, tous ces fantômes affamés souffrent, constamment et de manière insupportable, de


la faim et de la soif. Ils n’ont pas de vêtements, ils sont donc brûlés quand il fait chaud et ils gèlent quand
il fait froid. En hiver, même la lumière du soleil est glaciale. En été, même le clair de lune les brûle. Lorsqu’il
pleut, ils perçoivent les gouttes comme des charbons ardents qui leur brûlent la peau. À tout moment,
incapables de trouver de quoi se nourrir, ils éprouvent la souffrance de l’épuisement et de la lassitude, et
leur corps devient émacié à cause du manque de nourriture et de boisson. Des flammes jaillissent des 360
articulations disloquées de leur corps. Parce qu’ils se perçoivent l’un l’autre comme des ennemis, ils
s’attrapent, se ligotent, se battent et se poignardent mutuellement et ils ressentent la peur d’être tués. De
plus, parce qu’ils sont naturellement timides et craintifs, ils ressentent une terreur extrême sans raison
particulière. Les fantômes affamés subissent ce genre de souffrance intense. La plupart des fantômes
affamés vivent jusqu’à environ 15 000 années humaines.

Les préliminaires et la conclusion sont les mêmes que pour les contemplations précédentes.

{Bien que les contemplations ci-dessus soient complètes, il existe une coutume de réserver une
séance séparée pour méditer sur les démons affamés qui se déplacent dans l'espace. Puisque
ce type de fantômes affamés nuit aux autres, ils renaissent à plusieurs reprises dans les
royaumes inférieurs. Certains de ces fantômes affamés nuisent aux autres avec le poison58 sans
le vouloir. Les puissants nuisent aux autres en les frappant et en les cognant. Lorsqu'un malheur
inexpliqué s'abat sur les gens, ils blâment les fantômes affamés en disant : « Même si je n'ai
rien fait pour le mériter, ce démon m'a fait du mal ! » En entendant cela, les fantômes affamés
ressentent une angoisse mentale. Il est également possible de ne pas en faire une session
distincte ; cette contemplation peut être incluse dans l'une des séances précédentes.}

CONTEMPLATION 14 :
La souffrance du règne animal

58
Poison qui sort spontanément de leur souffle ou de leur corps.

Page 23
L’Essence d’Ambroisie

1. Les animaux vivant sous l'eau : les animaux vivant dans l'océan n'ont aucune source de protection et
errent sans but, emportés par les vagues. Ils se mangent les uns les autres. Anticipant constamment
l'approche d'un prédateur, ils sont effrayés et malheureux. Ils endurent des souffrances
insupportables, comme être dévorés vivants, etc.
2. Les animaux qui sont dispersés : ce sont les animaux vivant parmi les humains et les dieux. Les
animaux sauvages vivent constamment avec un esprit inquiet car ils sont naturellement anxieux à
l’approche des prédateurs. Les animaux domestiques endurent les épreuves d'être tondus, de se faire
percer le nez, d'être battus et d'être forcés de porter de lourdes charges. Ils endurent de nombreuses
souffrances liées au fait d'être réduits en esclavage ou tués pour leur viande, leur sang, leur peau et
leurs os. De plus, ils endurent la faim, la soif, la chaleur et le froid comparables à la souffrance des
êtres de l'enfer et des fantômes affamés. Leur principale souffrance est celle de l'ignorance ; ne
connaissant pas mieux, ils s'attaquent les uns aux autres et vivent dans la crainte constante d'être
pourchassés par un prédateur qui en aurait après à leur chair.

Les préliminaires, la base et la conclusion de cette séance sont les mêmes que ci-dessus.

CONTEMPLATION 15 :
Résumé des points ci-dessus
Après avoir contemplé les souffrances des trois mondes inférieurs, pensez comme suit :
Il semble que la situation dans tous ces mondes soit intolérable. Je dois trouver une source de refuge
qui soit capable de me protéger d’y reprendre naissance. Qui peut me protéger ? Si même Brahma, Indra
ou un monarque universel59 ne peuvent pas me protéger, comment quelqu'un d'autre pourrait-il le faire ?
Seuls les Trois Joyaux ont cette capacité. Je prendrai donc le Bouddha comme mon maître. Je prendrai son
enseignement comme ma pratique et je prendrai la communauté spirituelle comme mes compagnons sur
la voie.
Quant au refuge, même si je me réfugie auprès du Bouddha, c'est l'enseignement qui me protège.
Même le Bouddha ne peut pas me sortir de l’existence cyclique comme on arracherait un cheveu du
courant d’une rivière. Pour être protégé, je dois recevoir des enseignements sur le Dharma puis mettre ces
enseignements en pratique.
Après avoir médité avec foi sur le Bouddha, je mettrai en pratique l’enseignement tel qu’il l’a expliqué
et j’imiterai les actions de la noble communauté spirituelle.

59
Selon la croyance bouddhiste, Brahma est le chef du premier niveau du royaume de la forme. Indra est souverain du Ciel des
Trente-Trois (Gampopa. (1998) : Glossaire). Tous deux sont des dieux très importants dans l’Inde pré-bouddhiste. Ils sont
transférés dans le bouddhisme bien qu’ils soient rétrogradés. Un monarque universel (Skt. Chakravartin, Tib. Khorlo Gyourwa’i
Gyalpo, ཁོར་ལོས་སྒྱུར་བའི་རྒྱལ་པོ།) « évoque la suprématie matérielle, l'équivalent séculier de la suprématie spirituelle du Bouddha »
(Kongtrul. Le Flambeau (1977) : 113. Pour une discussion intéressante sur l’origine du concept de monarque universel, voir
Kongtrul. Myriad. (1995) : 134-138.
Chapitre Trois : Les Souffrances des Royaumes Inférieurs

Au début et à la fin de cette séance, il est important de s’engager dans l’activité vertueuse consistant
à réciter la prière de refuge. Ceci complète la méthode parfaite de prise du refuge pour la personne de
moindre capacité.

{À ce stade, il est important que l'enseignant donne au disciple une explication générale sur le
fait de prendre refuge [ou : entrer en refuge]. Il est également important que le disciple cultive
minutieusement ces contemplations dans son esprit.
Dans certains textes anciens décrivant les étapes du chemin, les étapes destinées à la personne
de moindre capacité se terminent à ce stade. Il est aussi de coutume de transmettre les
enseignements sur les actions et leurs effets tout au long de la présentation. Cependant, dans
la plupart des textes présentant les étapes du chemin, les actions et leurs effets sont enseignés
séparément, et c'est ainsi que cela sera transmis ici.}

Page 25
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE QUATRE :
LES INSTRUCTIONS SUR LES CAUSES ET LES EFFETS DE L'ACTION

{Ce chapitre commence par le concept d'action en général ; les réflexions restantes concernent
des types d'action spécifiques.}

CONTEMPLATION 16 :
Le concept de Karma en général
Le bonheur provient uniquement des actions positives ou vertueuses. La souffrance provient
uniquement des actions négatives ou néfastes. Puisque les actions vertueuses et nuisibles mûrissent
inévitablement de cette manière, je devrais adopter certaines actions et en abandonner d’autres.
Que mes actions soient vertueuses ou négatives, au moment de l'action causale, ce que je fais peut
être mineur. Mais au moment de la maturation de l’action, le résultat augmente considérablement en
ampleur. Les plus petites augmentations sont multipliées par cent ou mille. Les augmentations les plus
importantes sont incommensurables. Il est donc très important d’abandonner les actions négatives et
d’adopter les actions positives.
Si je ne prends pas de mesures pour réparer les actions négatives que j'ai commises, [les empreintes
karmiques de] ces actions ne diminueront pas le moins du monde jusqu'à ce que l'action mûrisse
pleinement en tant qu'effet. Si je n’ai rien fait, il est impossible que le karma positif ou négatif
correspondant surgisse dans mon continuum. Il est donc très important pour moi de faire attention à ce
que je fais et à ce que j’évite.

CONTEMPLATION 17 :
Les causes de l'action négative
Les préliminaires et la conclusion de la séance de méditation sont les mêmes que précédemment.
Incluez la récitation de la Prière en Sept Branches, suivie de la Prière du Refuge.

Toutes les souffrances dans les trois mondes inférieurs et dans les mondes supérieurs ne surviennent
pas sans cause ni sans conditions. Sa cause réside dans les actions non vertueuses. Pensez-y comme base
de la contemplation.
Bien qu’il existe de nombreuses énumérations des actions non vertueuses, les principales actions que
je devrais abandonner peuvent être grossièrement résumées comme « les dix actions non vertueuses ».

Les trois actions non vertueuses du corps :


Chapitre Quatre : Les Instructions sur les Causes et les Effets de l'Action

1. Prendre la vie signifie tuer un autre être, mener cet acte à son terme avec l’intention de prendre la
vie. L'acte est complet si l'intention de tuer n'est pas annulée avant la mort de la victime.
2. Prendre ce qui n'est pas donné signifie prendre, soit de manière dissimulée, soit ouvertement,
quelque chose qui appartient à autrui, avec l'intention de l'obtenir pour soi-même.
3. Se livrer à une inconduite sexuelle sous l’effet du désir : l’inconduite à l'égard de l'objet signifie avoir
des relations sexuelles avec un partenaire inapproprié, tel que le conjoint d'une autre personne ; un
parent depuis sept générations ; quelqu’un qui est sous la tutelle de ses parents, de son employeur
ou du gouvernement ; une personne ordonnée qui tient le vœu de célibat, etc. L'inconduite en
matière de temporalité signifie avoir des relations sexuelles avec une personne qui ne le souhaite
pas, qui est malade ou enceinte. L'inconduite en ce qui concerne le lieu signifie avoir des relations
sexuelles à proximité d'une salle de sanctuaire, d'un stūpa, des quartiers d'un lama ou d'un autre lieu
sacré. L'inconduite relative à la méthode signifie avoir des rapports sexuels par un orifice autre que
le vagin parce que son désir n'est pas satisfait. Telles sont les quatre modes inappropriés ; ce sont les
lignes directrices pour une personne laïque. Pour celui qui a fait vœu de célibat, tout type de rapport
sexuel constitue une inconduite sexuelle.

Les quatre actions non vertueuses de la parole :


4. Mentir signifie modifier ce que vous percevez et dire intentionnellement quelque chose de faux. La
personne à qui le mensonge est dit doit être un être humain et elle doit être capable de l’entendre.
5. Calomnier signifie prononcer des paroles qui provoquent davantage de rancune et de méchanceté
entre deux personnes qui ne sont pas en harmonie. Une ou plusieurs personnes doivent entendre les
paroles.
6. Prononcer des paroles dures signifie prononcer des paroles qui blessent une autre personne, comme
parler des défauts d'une autre personne alors qu'elle peut les entendre.
7. S'engager dans une conversation dénuée de sens inclut tout discours motivé par des émotions
négatives, qui n'est pas inclus dans les trois actions de parole non vertueuses précédentes. Cela inclut
les insinuations, les flatteries et les conversations sur des sujets aussi banals que la guerre, les
prostituées et les affaires. Cela inclut également les chants frivoles, les représentations scéniques et
l’expression d’opinions distordues.

Les trois actions non vertueuses de l’esprit :


8. Avoir un esprit cupide signifie être affecté par le désir de posséder la richesse, le conjoint, la famille,
la suite, la terre et ainsi de suite de quelqu'un d'autre.
9. Avoir un esprit nuisible signifie être affecté par le souhait que du mal puisse arriver à une autre
personne ou qu'elle puisse éprouver de la souffrance.
10. Avoir une vision erronée signifie ne pas avoir foi en la vérité des actions et de leurs effets, ne pas
croire aux vies passées et futures ni aux Trois Joyaux, et considérer cette vision comme suprême.

Si je considère ces dix actions du point de vue du perfectionnement du chemin de l'action, je devrais
essayer d'abandonner toutes les pensées et les actions qui y sont même liées : par exemple, tuer quelqu'un

Page 27
L’Essence d’Ambroisie

involontairement ou accidentellement. Ce sont des actions auxquelles je devrais définitivement renoncer


d’emblée.

Contemplez de cette manière, encore et encore.

CONTEMPLATION 18 :
Les effets de l'action négative
Chacune de ces dix actions non vertueuses peut entraîner une renaissance dans l’un des six
royaumes, en fonction de la force de la motivation derrière l’action. Si l’acte est très puissant ou s’il est
accompli de manière répétée, il peut mûrir sous forme de renaissance dans l’un des royaumes infernaux.
Si l’action est d’intensité moyenne, elle peut mûrir sous la forme d’une renaissance comme un fantôme
affamé. Si l'action est faiblement motivée ou n'est que partielle, elle peut mûrir comme une renaissance
comme un animal. La renaissance en tant que ce type d'êtres qui connaissent la souffrance est appelée le
« résultat pleinement mûri » de ces actions.
Le meurtre conduit à une vie brève. Le vol conduit au manque de biens et de jouissances. L’inconduite
sexuelle conduit à se faire de nombreux ennemis. Mentir conduit à être calomnié par les autres. La
calomnie amène vos amis à se retourner contre vous. Prononcer des mots durs mûrit en entendant les
autres dire des choses désagréables. Les discours dénués de sens mûrissent dans le fait d’être ignoré par
les autres. La convoitise mène à la déception. Avoir un esprit nuisible mûrit sous forme de souffrance et de
peur. Avoir une vision erronée mûrit sous la forme d’une stupidité et d’une ignorance extrêmes. C’est ce
qu’on appelle « les expériences résultantes qui sont en accord avec la cause ».
Les « actions résultantes en accord avec la cause » sont des actions que les gens aiment parce qu'elles
les ont faites dans le passé.
Les « résultats environnementaux » sont les effets d'actions reflétées dans l'environnement
externe60. Le résultat du meurtre est la faiblesse des récoltes et des médicaments. Le résultat du vol est
une mauvaise récolte. Le résultat de l’inconduite sexuelle est de vivre dans un endroit où règnent des
tempêtes. Mentir conduit à vivre là où les montagnes sont escarpées et où les déplacements sont difficiles.
La calomnie conduit à vivre dans un endroit où la terre est alcaline. Les paroles dures entraînent de la grêle
et du grésil. Les discours dénués de sens mûrissent sous forme de déséquilibres saisonniers ; par exemple,
l'hiver est trop froid ; l'été, trop chaud ; le printemps est sec et l'automne est trop humide. L’esprit cupide
mûrit dans le futur en récoltant une récolte de petits grains. L’esprit nuisible mûrit comme une récolte
insipide. Avoir des opinions erronées aboutit à des récoltes qui ne mûrissent pas correctement.
Qui plus est, les « résultats en accord avec la cause » et les « résultats environnementaux » peuvent
mûrir au cours de la même vie durant laquelle l'acte causal a été commis. De plus, le moment de la

60
Pour expliquer autrement les résultats environnementaux, les propensions karmiques véhiculées dans un environnement
donné par les êtres qui vivent ensemble dans le même lieu déterminent la nature de cet environnement. Les résultats
environnementaux utilisés comme exemples dans ce passage concordent avec une société agraire. Dans un contexte moderne,
les résultats pourraient se refléter de plusieurs autres manières, comme par exemple en cas de virus informatiques ou de
problèmes de voiture.
Chapitre Quatre : Les Instructions sur les Causes et les Effets de l'Action

maturation est incertain, de sorte qu'un être peut s'être engagé dans des actions non vertueuses dans cette
vie et naître dans les royaumes supérieurs dans la vie suivante61.

Réfléchissez, encore et encore :


Puisque ces dix actions non vertueuses entraînent des souffrances et divers événements indésirables,
je ne m'y engagerai pas, même au risque de ma vie. Je m'efforcerai de trouver des méthodes pour purifier
les actions négatives que j'ai commises précédemment.

CONTEMPLATION 19 :
Les actions positives
L’obtention d’un corps physique dans les royaumes supérieurs et tous les états heureux de l’existence
cyclique découlent d’actions vertueuses. Même les états supra-mondains, les trois types d’éveil, découlent
d’actions vertueuses. Je devrais donc abandonner toutes les actions nuisibles et cultiver toutes les actions
vertueuses autant que possible. Bien qu’il existe de nombreux types d’actions vertueuses qui peuvent être
pratiquées, la porte d’entrée vers toute vertu est la conduite pure des dix actions vertueuses 62. Maintenant
que j’ai mentalement abandonné les dix actions non vertueuses expliquées ci-dessus, que j’ai engendré la
décision de modifier mes habitudes corporelles et de parole et que j'ai mis cette intention en pratique, je
prendrai l'engagement de continuer ainsi de façon permanente.
Afin d’abandonner mentalement les dix actions non vertueuses, je dois comprendre que ce sont des
imperfections et qu’elles causent des problèmes. Savoir cela me motivera à m’en débarrasser pour
toujours. Sur cette base, je renverserai les habitudes du corps et de la parole.
Mais si je ne m’engage dans des actions positives que sporadiquement ou si je n’y parviens pas
pendant mon temps libre, c’est comme si je les pratiquais dans un but lucratif. Alors, même si l’occasion se
présente de les pratiquer sans effort, je ne le ferai pas. En me rappelant mon engagement mental à
abandonner les actions nuisibles, je m’empêcherai de m’engager d’emblée sur la mauvaise voie. L’abandon
mental seul suffit donc : les sept actions vertueuses du corps et de la parole sont incluses dans les trois
actions de l’esprit.
Considérer les actions non vertueuses comme contraires à l’éthique est à la base de l’abandon
mental. Reconnaître les actions contraires à l’éthique pour ce qu’elles sont est une compréhension sans
confusion au niveau relatif. Cela conduit à la pratique de la voie des remèdes et constitue l’essence de la
conduite morale.
Si l'attitude d'abandon surgit fortement à plusieurs reprises, même si la pratique est interrompue par
le sommeil, la distraction, etc., je reconnaîtrai quand même les actions non vertueuses comme des erreurs
et des fautes. En me concentrant sur les conditions qui éveillent ces tendances, je les éviterai et les limiterai.

61
« Le moment de la maturation est incertain » signifie que la maturation d'une action peut être retardée de plusieurs vies.
62
Tāranātha n’explique pas explicitement les dix actions vertueuses car il met l’accent sur l’attitude d’abandon dans cette
contemplation. Les dix actions vertueuses sont celles consistant à sauver la vie, à donner généreusement, à préserver une
conduite morale, à dire la vérité, réconcilier des amis divisés par la calomnie, parler avec douceur, parler de manière significative,
se réjouir de la bonne fortune des autres, avoir un esprit aimant envers les autres et avoir foi dans les enseignements du
Bouddha. Gyamtso. Shérab. (1992) : 40 (voir Glossaire des classifications).

Page 29
L’Essence d’Ambroisie

Ce processus naît de la force de l’attitude [d’abandon], et cette force vient de la puissance de la graine
initiale [considérer les actions non vertueuses comme contraires à l’éthique]. Pour cette raison, l’attitude
consistant à abandonner les dix actions non vertueuses ainsi que leur graine [la conscience de la nature
contraire à l’éthique de ces actions] constituent les dix actions vertueuses.

CONTEMPLATION 20 :
Les bienfaits des dix actions vertueuses
Le résultat pleinement mûri de la pratique intensive des dix actions vertueuses est la renaissance en
tant que dieu. Les pratiquer moins intensivement aboutit à l’obtention d’un corps humain. Pratiquer la
vertu avec une attitude impure, etc., aboutit à la renaissance en tant que demi-dieu. C'est ainsi que cela
est expliqué dans les sūtras.
Les « résultats en accord avec la cause » et les « résultats environnementaux » sont à l'opposé des
résultats expliqués ci-dessus pour les dix actions non vertueuses. Ainsi, les résultats vertueux en accord
avec la cause sont une longue vie, une richesse adéquate, l'absence d'ennemis, des louanges, de nombreux
amis, le fait d’entendre des choses agréables, une parole noble, la réalisation de ses objectifs, un esprit
heureux et une intelligence en expansion63. Les résultats environnementaux de Pratiquer la vertu, c'est
avoir une grande puissance et d'excellentes récoltes et vivre dans un endroit agréable, où le terrain est uni
et la terre cultivable, où l'herbe et les arbres fleurissent, le climat est doux, les grains sont gros et délicieux
et où les fruits prospèrent.

Afin de maintenir la pratique des dix actions vertueuses, réfléchissez encore et encore :
Puisqu’elles sont la cause d’un bonheur continu dans cette vie et dans les vies futures, je maintiendrai
constamment ma pratique des dix actions vertueuses.

{Lorsque vous vous engagez dans ces réflexions, il est important d’examiner méticuleusement
les quatre divisions au sein du thème des actions et de leurs effets. Par conséquent, le Lama
doit expliquer le sujet à plusieurs reprises et le disciple doit le cultiver dans son esprit. Au lieu
de se contenter d’une simple compréhension intellectuelle, le disciple doit la comprendre à un
niveau personnel. C'est un point important.}

CONTEMPLATION 21 :
Le point essentiel de la pratique
Cette session est le cœur de ces réflexions sur les actions et les effets. Réfléchissez d’abord aux actions
positives et négatives et à leurs effets expliqués ci-dessus. Considérez ensuite que, puisque vous avez déjà
commis des actions négatives et non vertueuses, il est important de faire une confession complète avec les

63
En d’autres termes, sauver la vie conduit à avoir soi-même une longue vie ; donner conduit à devenir riche et ainsi de suite.
Chapitre Quatre : Les Instructions sur les Causes et les Effets de l'Action

quatre pouvoirs [ou « forces »]. "Le pouvoir du support" consiste à entrer en refuge et à engendrer l'esprit
d’Éveil. "Le pouvoir de s'engager pleinement dans une action corrective" consiste à pratiquer des actions
vertueuses qui purifient le karma négatif autant que vous le pouvez. "Le pouvoir de réparation" consiste à
regretter les actions néfastes dans lesquelles vous vous êtes engagés auparavant. "Le pouvoir du
renversement" consiste à faire le vœu de ne plus s’y engager à l’avenir64.

Au début de chaque séance, pratiquez ce genre de confession plusieurs fois. Entre les séances, en
présence de votre professeur, maître, lama ou de la communauté spirituelle, reconnaissez et confessez
encore et encore vos méfaits. Si vous ne pouvez pas faire cela, visualisez que le ciel est rempli de bouddhas
et de bodhisattvas et offrez-leur une confession. Vous pouvez réciter des prières de confession à partir de
textes tels que Le Sutra des Trois Tas ou La Confession de la Lumière Dorée Sacrée. Le point essentiel est de
reconnaître et d’exprimer pleinement, sans rien cacher ni dissimuler, que vous vous êtes livré à des actions
négatives. Puis réfléchissez :

Non seulement j’éviterai les dix actions non vertueuses, mais je ne commettrai également aucune
action, grande ou petite, associée à la non-vertu. Je détournerai les autres des actions négatives et je ne
me réjouirai pas lorsque je verrai les autres s’y livrer. Je ne louerai ni ne glorifierai ces actions.
Non seulement je pratiquerai les dix actions positives et vertueuses, mais je m'engagerai également
dans tout ce qui touche à la vertu. Je sauverai des vies, donnerai de la nourriture et des biens matériels,
maintiendrai une conduite éthique, ferai des offrandes aux Trois Joyaux, engendrerai la foi, etc.
J'encouragerai les autres à s'engager dans la vertu, je me réjouirai de mes actions vertueuses et de celles
des autres et je louerai la vertu.
De plus, il existe des actions neutres qui ne sont ni vertueuses ni mauvaises, comme aller, se tenir
debout, dormir, s'asseoir, etc. Même si celles-ci ne donnent pas un résultat complètement mûri, elles
constituent une perte de temps inutile. Je ne me laisserai pas tomber sous le pouvoir de la paresse et de la
distraction ! Lorsque je me trouve dans un état d’indifférence, je tourne mon esprit et mon comportement
vers la vertu.

En complément, entre les séances de méditation, vous devriez réfléchir de cette manière. Passez votre
temps à vous engager dans les méthodes exceptionnelles pour accumuler du mérite de vie en vie, exprimées
par les huit qualités d’un corps dans les royaumes supérieurs :
1. Abandonner l’intention de nuire mène à une longue vie.
2. Offrir des lampes à beurre [aux bouddhas], des vêtements [aux pauvres], etc. conduit à un corps sain.
3. Être humble et altruiste en présence de votre lama et de vos compagnons spirituels – qu'ils soient
au-dessus ou en dessous de vous – et les respecter conduit à renaître dans une bonne famille.
4. Donner le nécessaire à ceux qui vous ont aidé, à ceux qui souffrent, à ceux qui ont de bonnes qualités
et à d'autres bénéficiaires conduit à avoir de la force, de la dignité et des joies abondantes.

64
Les quatre pouvoirs sont quatre éléments qui doivent être présents pour qu'un acte de confession soit efficace et complet. La
procédure de confession est souvent enseignée en tandem avec la méditation sur la divinité Vajrasattva (voir Glossaire des
classifications).

Page 31
L’Essence d’Ambroisie

5. S'engager uniquement dans des paroles vertueuses conduit à avoir un discours noble.
6. Faire des offrandes à votre lama, aux Trois Joyaux, à vos parents, etc. et faire des prières d'aspiration
pour accomplir diverses qualités positives conduit à avoir un grand pouvoir et une grande influence.
7. Aimer les choses associées au domaine humain65 et protéger les animaux de la castration entraîne la
renaissance en tant qu’humain.
8. Être serviable et utile dans les activités religieuses, sans attendre de récompenses ou d’éloges de la
part des autres, conduit à l’acquisition de pouvoirs abondants.

Pratiquez-les autant que vous le pouvez.

{Ceci conclut la section sur les étapes de pratique pour la personne de moindre capacité.}

65
La traduction littérale de cette phrase semble être « se lier d'amitié avec les hommes », mais elle peut être traduite telle
qu'elle est ici. Tāranātha écrivait pour des moines ordonnés, qui seraient encouragés à se lier d'amitié avec des personnes du
même sexe afin de maintenir la pureté de leurs vœux d'ordination.
Partie II : L’Entraînement aux Étapes Communes pour la Personne de Capacité Médiane

Partie II :
L’ENTRAÎNEMENT AUX ÉTAPES COMMUNES POUR LA PERSONNE DE
CAPACITÉ MÉDIANE

Cette partie comporte deux sections : les causes et les résultats de l'existence cyclique
[Contemplations 22-32] et les causes et résultats de la libération [Contemplation 33].
La première section est divisée en deux sous-sections : les contemplations sur la souffrance résultante
de l'existence cyclique [Contemplations 22-31] et les types d'origine [Contemplation 32].
Les contemplations sur la souffrance résultante de l'existence cyclique sont divisées en contemplations
sur la souffrance des royaumes supérieurs [Chapitre 5] et en contemplations sur la souffrance de l'existence
cyclique en général [Chapitre 6].

Page 33
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE CINQ :
LA SOUFFRANCE DES ROYAUMES SUPÉRIEURS

CONTEMPLATION 22 :
La souffrance de la naissance
Récitez une version légèrement développée de l’hommage, des offrandes et de la confession.
Ensuite, faites l'offrande en sept branches et entrez en refuge. Pour la contemplation, commencez par
réfléchir :
J'ai envisagé les possibilités de renaître comme l'un des six types d'êtres grâce au pouvoir du karma
et je suis maintenant familier avec la souffrance qui accompagne la renaissance dans les royaumes
inférieurs. Mais si je devais renaître humain, ne serais-je pas heureux ? La réponse est non ; je ne le serais
pas.
Pour la plupart, les humains naissent de l’utérus. Pendant les neuf mois environ que le fœtus reste
dans l'utérus, il éprouve constamment la souffrance de la peur, la souffrance de vivre dans l'obscurité et la
souffrance des odeurs désagréables.
Lorsque la mère a faim, le fœtus a l’impression d’être suspendu dans un abîme. Lorsqu'elle est
rassasiée, le fœtus a l'impression d'être écrasé par une montagne. Lorsque la mère absorbe des aliments
ou des boissons chaudes, le fœtus a l'impression de bouillir dans de l'eau chaude. Lorsqu’elle absorbe des
aliments ou des boissons froides, il a l’impression qu’ils sont gelés sur un iceberg.
Lorsque le bébé naît, il est également misérable : pendant qu'il est expulsé de l'utérus, il a l'impression
qu'il est pressé entre les morceaux de bois d'une presse à graines de sésame. Toutes ses articulations
semblent avoir été disloquées et écrasées. Juste après sa naissance, tout ce qu’il touche est dur. Même s’il
est enveloppé dans la soie la plus douce, il a l’impression d’avoir été jeté dans un gouffre d’épines. Quand
quelqu'un prend le bébé dans ses bras, il se sent pitoyable, comme un petit oiseau emporté par un faucon.
Je n’ai pas souvenir de ce que c'était que de naître. Si c’était le cas, je n’aurais pas besoin d’être
convaincu. En contemplant uniquement la souffrance de la naissance, je perdrais tout intérêt à naître
humain.
J'ai besoin d'une pratique spirituelle qui me permettra d'échapper au pouvoir du karma et à la
renaissance ultérieure dans l’existence cyclique. Même si naître en tant qu’humain du ventre d’une femme
est intense, où que l'on naisse, il y a de la souffrance partout dans les trois mondes66. Quel que soit le type
d’être en lequel on naît, il y a de la souffrance. Quelle que soit la situation dans laquelle on naît, il y a de la
souffrance.

Pour être plus précis, la naissance implique cinq types de souffrance :


1. Le processus de naissance lui-même est douloureux : il s’accompagne de sentiments extrêmement
inconfortables.

66
Les trois domaines sont les domaines du désir, de la forme et du sans forme (voir Glossaire des classifications).
Chapitre Cinq : La Souffrance des Royaumes Supérieurs

2. La naissance implique l'acceptation d'une situation négative : elle plante les graines de l'apparition et
du développement des émotions afflictives.
3. La naissance devient la base de souffrances supplémentaires : de la naissance proviennent les
souffrances supplémentaires de la vieillesse, de la maladie et de la mort.
4. La naissance est la base des émotions afflictives : une fois que vous êtes né, lorsque vous rencontrez
plus tard des conditions désagréables, de nombreuses émotions affligeantes surgissent. Sur cette
base, vous accumulez beaucoup de karma.
5. La naissance implique la souffrance d'une disparition inévitable : dès votre naissance, vous
commencez à mourir, instant après instant.
Ainsi, la naissance est une souffrance.

CONTEMPLATION 23 :
La souffrance du fait de vieillir
De plus, les humains souffrent de vieillir. Quand je serai vieux, j'éprouverai cinq souffrances liées à la
dégénérescence ou à la dégradation :
1. Dégradation du teint : ma couleur et mon éclat sains vont décliner. Mon teint va devenir repoussant,
avec des taches brunes. Mon visage deviendra cendré et mes cheveux deviendront blancs comme
une fleur de trawa. Tous mes sens perdront leur acuité.
2. Dégradation de la forme : mes dents vont tomber. Ma posture deviendra courbée ; mes bras et mes
jambes deviendront arthritiques ; mes muscles vont rétrécir et ma peau va se relâcher. Mon visage,
plein de rides comme un vieux coussin, deviendra désagréable à regarder.
3. Dégradation de la force : lorsque je me relèverai, je devrai utiliser mes quatre membres. Quand je
marcherai, je serai instable. Quand je m'assiérai, ce sera comme couper la corde d'une charge de sel.
Quand je parlerai, ma voix chevrotera.
4. Dégradation des facultés sensorielles : mes yeux ne verront plus clairement et je commencerai à
devenir sourd. Les autres ne me prendront plus au sérieux.
5. Dégradation du plaisir : je n'apprécierai plus les plaisirs des sens. Si je mange un peu, j'aurai faim. Si
je mange beaucoup, j’aurai une indigestion, etc.

Je ne peux pas échapper aux souffrances de la vieillesse. Même si j’ai une longue vie, à la fin je
vieillirai. Mes amis, mes parents et mes ennemis sont aussi comme ça.

CONTEMPLATION 24 :
La souffrance de la maladie
Sur la base du karma antérieur et de circonstances inattendues, diverses maladies surviennent. Il
existe cinq types de souffrance liée à la maladie :

Page 35
L’Essence d’Ambroisie

1. La maladie implique des douleurs physiques et de la détresse mentale : lorsque je suis malade, je fais
l’expérience de la souffrance de la douleur manifeste.
2. La maladie implique des changements physiques spontanés : mes muscles dépérissent ; ma peau se
dessèche, etc.
3, 4. Je n'apprécie plus les choses agréables et je dois me contenter de choses désagréables : la nourriture
délicieuse et les autres choses que j'appréciais auparavant ne sont plus agréables. Au lieu de cela, je
dois prendre des médicaments, recevoir des injections, subir de la moxibustion, etc.
5. Je serai séparé de ma force vitale : la maladie implique la souffrance de mourir et la peur de la mort.
La maladie provoque l’angoisse d’anticiper la souffrance imminente de la mort elle-même. Jusqu'à
ce que je sois guéri, cette peur reste avec moi.

Mes parents, mes amis, mes ennemis – en fait, tous les êtres – sont exactement comme moi à cet
égard.

CONTEMPLATION 25 :
La souffrance de la mort
Il existe encore d’autres souffrances partagées par tous les êtres du monde humain. La souffrance de
la mort a cinq aspects :
1. Je serai séparé de la richesse des possessions et des jouissances.
2. Je serai séparé de la richesse du pouvoir et de la capacité à me défendre.
3. Je serai séparé d’une multitude d’associés et d’amis.
4. Je serai séparé de mon corps bien-aimé et choyé.
5. La mort elle-même s'accompagne de souffrance et d'un intense sentiment de malheur.

Je serai séparé de toutes les choses [et des personnes] que j'aime et chéris le plus : ma famille, mes
richesse, mon maître, mes serviteurs et mes amis. Je mourrai dans la grande souffrance de voir ma force
vitale coupée.

Si vous souhaitez élargir cette contemplation, méditez conformément à la section sur l'impermanence
et la mort expliquée précédemment.

CONTEMPLATION 26 :
Les autres souffrances humaines
La souffrance de chercher ce que l’on veut mais de ne pas le trouver : je me bats et je risque ma vie
juste pour acquérir un peu de richesse, de renommée ou de pouvoir. Je me lance dans des projets qui
prennent plusieurs mois ou années à réaliser. Je travaille continuellement saison après saison mais je ne
Chapitre Cinq : La Souffrance des Royaumes Supérieurs

reçois aucune récompense pour mes efforts. Faisant de la force de mes jambes le fardeau, de la force de
mes bras la charrue, de mes mollets le cheval et de la tête le fouet, je me dirige vers le sud et me tire vers
le nord, mais aucun de mes objectifs n'est atteint. J'endure volontiers la faim et la soif, je me tourmente
dans la chaleur et le froid et je n'ai aucun répit de jour comme de nuit. Pendant que mon corps de chair et
de sang dépérit, je ne parviens même pas à acquérir suffisamment de nourriture ou de vêtements. Parce
que tous mes efforts ont échoué, mon esprit se lasse.
La souffrance de rencontrer ce qui est désagréable : ce type de souffrance comprend le fait d’être à
la merci d'un ennemi, d’être frappé par une maladie virulente ou par une souffrance intense, de rencontrer
un meurtrier qui a l'intention de me tuer, de tomber d'une falaise, d’être emporté par l'eau. , d’entendre
des ragots négatifs, d’être jeté en prison, d’être banni et d’autres expériences de perte.
La souffrance d'être séparé de ce que l'on aime : lorsque je suis séparé de mes parents, de mes
proches, de mon conjoint, de mon foyer et de mes amis – les personnes dont il semble impossible de se
passer – une souffrance insupportable surgit dans mon esprit au point que je peux même marcher courbé
de chagrin. De même, je me sens malheureux à chaque fois que je dépense ou perds ma richesse, que mon
influence se détériore, que ma force s'effondre, que je suis privé de liberté, que je perds quelque chose
auquel mon esprit est attaché ou qu’il me manque quelque chose qui m'intéresse. Même si je n’ai pas
encore vécu toutes ces souffrances, je n’éviterai pas éternellement leur influence.

Ajoutez ici tout ce qui convient des contemplations précédentes.

{Même si d’autres êtres que les humains expérimentent ces sept souffrances, elles sont
principalement vécues par les humains et ont donc été mentionnées dans cette section. Il existe
une tradition consistant à méditer sur une huitième souffrance67 à ce stade, mais j'ai choisi de
l'inclure dans une contemplation ultérieure car cela fonctionne mieux ainsi.}

CONTEMPLATION 27 :
La souffrance des royaumes des demi-dieux et des dieux
Je pourrais me demander : si j’étais né dans le royaume des demi-dieux, n’y serais-je pas heureux ?
Après réflexion, je ne le serais pas. Jaloux de la splendeur des dieux, mon esprit serait constamment en
proie à l’anxiété. Parfois, les demi-dieux se battent avec les dieux. Parce que leur mérite est plus faible, ils
doivent endurer la souffrance d'être tués ou battus, parfois d’être mutilés ou de perdre leurs membres.
Parce que la plupart d’entre eux sont enclins au vice, ils méprisent le Dharma. Bien que certains d’entre
eux soient enclins à pratiquer, leur esprit est obscurci par un karma pleinement mûri et n’a donc pas la
chance d’atteindre une réalisation extraordinaire.
"Eh bien", pourrais-je alors me demander, "si j'étais né dans le royaume du dieu du désir, j'y serais
sûrement heureux ?" Non, je n'y serais pas non plus heureux. Sans même que j'en sois conscient, ma vie
s’épuiserait alors que je serais en train de m'adonner négligemment aux plaisirs des sens. De plus, les dieux

67
La huitième souffrance est la souffrance des cinq agrégats, discutée dans la 30e Contemplation.

Page 37
L’Essence d’Ambroisie

les plus faibles sont chassés de leur place par les dieux les plus forts. Ceux qui ont encore moins de mérite
sont si pauvres qu’ils n’ont d’autre bien qu’une seule guitare. Lorsqu’ils voient la grande richesse des autres
dieux, ils éprouvent une angoisse mentale et du désespoir face à leur manque de mérite.
Les dieux vivant dans le Ciel des Quatre Grands Rois et dans le Ciel des Trente-trois68 sont
particulièrement enclins à se battre avec les demi-dieux, ce qui leur cause d'intenses souffrances. Tous les
dieux du monde du désir connaissent les souffrances ordinaires de la mort et du transfert, ainsi que la
« souffrance du déclin ». En ce qui concerne cette dernière, sept jours avant la mort d'un dieu du monde
du désir, il voit cinq présages de mort : la couleur de son corps devient peu attrayante ; il se sent déprimé
et désespéré ; les guirlandes de fleurs qui le parent se fanent ; ses vêtements prennent une odeur
nauséabonde et son corps se met à transpirer.
Lorsque ces signes apparaissent, il est abandonné par ses serviteurs et ses amis des deux sexes. Puis,
au milieu de la compagnie d'autres dieux, il prend conscience que – malgré son attachement aux
jouissances désirables du royaume divin – il en sera arraché sans avoir le choix. Sans la moindre chance
d'éviter son sort inéluctable, il souffre comme une chamelle qui a perdu son petit, un serpent emporté par
un faucon, un poisson se tordant sur le sable chaud ou un bateau solitaire à la dérive sur le grand océan.
Bien que la durée de cette période de deuil soit de sept jours divins, cela équivaut à au moins 10 400 années
humaines, comme dans le cas, par exemple, du Pays des Quatre Grands Rois. Après avoir enduré cette
longue période de chagrin et de déclin, un dieu meurt. Après cela, il est à peine possible qu’il renaisse en
tant que dieu. Ceux qui renaissent en tant qu’humains sont également extrêmement rares. La plupart
renaissent dans les royaumes inférieurs. Comme il est dit :
Après qu'un être quitte le monde des dieux,
S'il ne lui reste pas quelque mérite non dépensé,
Il renaîtra sans avoir le choix sous la forme d'un animal, d’un fantôme affamé
Ou dans les enfers, selon ce qui convient69.
Puisqu'un dieu possède la clairvoyance, il est capable de voir les êtres des royaumes situés en dessous
de lui et de percevoir où il renaîtra. S'il doit renaître en tant qu'humain, ses yeux de plaisir sont consternés
et il voit de nombreux humains qui souffrent70. S'il doit renaître dans les trois mondes inférieurs, il réalise
qu'il est destiné à y expérimenter les souffrances. L'insupportable angoisse mentale qu'il ressent est encore
pire que la souffrance physique vécue par les êtres des trois royaumes inférieurs.

CONTEMPLATION 28 :
La souffrance des royaumes divins supérieurs
Alors je pourrais penser : « Eh bien, si j'étais né dans l'un des royaumes divins supérieurs, n'y serais-
je pas heureux ? Hélas, il n'y a pas de bonheur là non plus.

68
Selon la cosmologie bouddhiste, il existe six royaumes divins du désir, dix-sept royaumes divins de la forme et quatre royaumes
divins sans forme. Les deux mentionnés ici font partie des royaumes divins du désir les plus bas (voir Glossaire des classifications).
69
Nāgārjuna. La lettre à un ami.
70
Les yeux du dieu sont appelés ici « yeux de plaisir » car ils sont habitués à ne voir que des formes agréables.
Chapitre Cinq : La Souffrance des Royaumes Supérieurs

Les êtres ordinaires sont incapables de percevoir la souffrance manifeste dans les royaumes divins
supérieurs, mais les êtres nobles71 peuvent détecter que l'expérience des dieux ne transcende pas la
souffrance d'une existence conditionnée72. Parce que les dieux sont intoxiqués par la transe, leurs qualités
positives n'augmentent pas.
Tant qu’ils savourent cette expérience de transe, ils ne peuvent supporter d’en être séparés. De plus,
lorsque leur transe se détériore, ils meurent. Le karma méritoire qu’ils ont accumulé en tant qu’êtres
ordinaires est épuisé et ils renaissent à nouveau dans le royaume du désir. Il est vrai que la transe
méditative mondaine des humains et la transe d'absorption méditative sans forme mentionnée ici sont des
états dotés d'une expérience de béatitude intense et de relaxation extrême, mais ces états à eux seuls ne
stabilisent pas l'esprit, et ceux qui les pratiquent finissent par dégénérer en êtres ordinaires. Leurs
afflictions émotionnelles deviennent encore plus grossières et leurs souffrances plus grandes
qu’auparavant. Quel est l’intérêt de vivre dans cet état ?

71
Tib. P’agpa, འཕགས་པ།, Skt. Ārya. Les êtres nobles sont ceux qui ont atteint le premier niveau de bodhisattva.
72
La souffrance de l'existence conditionnée est l'un des trois types de souffrance (voir ci-dessous) et est la plus subtile des trois
types. Elle fait référence à la souffrance inhérente à l'existence conditionnée, à l'insatisfaction qui existe en l'absence de sagesse
transcendante (voir Glossaire des classifications).

Page 39
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE SIX :
LA SOUFFRANCE DE L'EXISTENCE CYCLIQUE EN GÉNÉRAL

CONTEMPLATION 29 :
Les trois types de souffrance
Commencez par les préliminaires comme présentés ci-dessus. Contemplez brièvement la souffrance
des royaumes infernaux. Continuez ensuite en contemplant les souffrances des fantômes affamés, des
animaux, des humains, des demi-dieux, des dieux du désir et des dieux des royaumes de la forme et du sans
forme. Compte tenu de tout cela, réfléchissez :

L'existence cyclique, avec ses trois domaines, est caractérisée par trois, six ou huit types de
souffrance. C'est un entrepôt de souffrances. Je suis complètement entouré par la souffrance. La
souffrance brûle comme le feu ; elle bouillonne comme l'eau ; elle souffle comme le vent ; elle oppresse
comme une montagne. Quel que soit le lieu où je me trouve, c'est un lieu de souffrance. Quel que soit le
type de corps que j’habite, c’est un corps de souffrance. Qui que soit celui avec qui je me lie d'amitié, c’est
un compagnon de souffrance. Quoi que puisse être ce que j'apprécie, c'est un plaisir de souffrance.
Trois types de souffrance imprègnent toute existence :
La « souffrance de la souffrance » (la souffrance manifeste) [ou la souffrance ressentie] fait référence
à toute souffrance qui se manifeste par des sensations d'inconfort, comme des sensations de chaleur, de
froid, de maladie, etc.
La « souffrance du changement » fait référence aux sentiments de bonheur de la vie et aux plaisirs
du bonheur de l'absorption méditative.
La « souffrance de l’existence conditionnée ou composite » [ou la souffrance liée à la nature même
des choses conditionnées] est à la base des deux autres types de souffrance. Elle fait simplement référence
aux phénomènes composites de ces agrégats adoptés73 qui sont l'origine et le champ où se développe
toute souffrance. Lorsque les agrégats font l’expérience d’un état de simple neutralité, le terme « la simple
souffrance d’une existence composite » est utilisé. Si je ne me libère pas de cette souffrance, je ne me
libérerai pas des deux autres. Je dois, par tous les moyens, me libérer des trois types de souffrance.

CONTEMPLATION 30 :
Les Huit Souffrances
Jusqu'à présent, sept souffrances du monde humain ont été expliquées : la souffrance de la
naissance, la souffrance du vieillissement, la souffrance de la maladie, la souffrance de la mort, la
souffrance de rencontrer ce qui est désagréable, la souffrance d'être séparé de ce que l'on aime et la

73
Skt. Skandha, Tib. P’oungpo, ཕུང་པོ།. L'esprit et le corps de chaque être sensible (l'organisme vivant) sont composés de cinq
agrégats : la forme, la sensation, la perception, les formations mentales et la conscience (voir Glossaire des classifications).
Chapitre Six : La Souffrance de l'Existence Cyclique en Général

souffrance de ne pas trouver ce que l'on cherche. La huitième souffrance est la souffrance des cinq agrégats
étroitement adoptés, l'organisme corps-esprit lui-même. Ce type de souffrance comporte également cinq
aspects :
1. L’organisme est le vaisseau de la souffrance manifeste : c’est le lieu où se cultive la souffrance des
vies futures.
2. L'organisme est le vaisseau de la souffrance qui soutient la douleur : il est l'origine de toutes les autres
souffrances, comme celles de la naissance, de la vieillesse, de la maladie et de la mort.
3. L'organisme est le vaisseau de la souffrance de la souffrance.
4. L'organisme est le véhicule de la souffrance du changement : la souffrance de la souffrance et la
souffrance du changement naissent toutes deux sur la base des agrégats.
5. L'organisme a la nature de la souffrance de l'existence conditionnée : l'organisme lui-même définit la
souffrance de l'existence conditionnée.

L'ensemble de l'existence cyclique avec ses trois domaines est l'essence des huit types de souffrance.

CONTEMPLATION 31 :
Les Six Souffrances
La souffrance de l’existence cyclique présente plusieurs facettes supplémentaires.
Premièrement, l’existence cyclique est marquée du défaut de la souffrance parce qu’elle est peu
fiable. Mes ennemis, mes amis, mes parents, mes enfants, mes lieux, mon corps et mes plaisirs ne sont pas
fiables. Comme il est dit74 :
Le père devient le fils, et la mère, la femme..........
Deuxièmement, elle a le défaut de l’insatisfaction. Peu importe le plaisir auquel je m’abandonne, je
ne suis jamais satisfait. Peu importe la souffrance que je ressens, je ne me lasse jamais. Comme le verset
continue :
...chacun remplissant plus que les quatre grands océans...
Troisièmement, il y a le défaut de devoir abandonner mon corps encore et encore. Le vers continue :
...doit vivre encore et encore la mort. Dans chaque type d’existence, j’ai laissé une montagne d’os.
Quatrièmement, il y a le défaut de devoir renaître encore et encore. Les êtres sont obligés de renaître
sans fin :
Celles qui ont été mes mères sont infinies comme les baies de genièvre75.
Cinquièmement, il y a le défaut de fluctuer encore et encore entre les états élevés et les états
inférieurs. Même si je deviens Indra, je retomberai sur terre. Même si je deviens un monarque universel,

74
Nāgārjuna. La lettre à un ami.
75
Littéralement, cette ligne se lit comme suit : « Celles qui ont été mes mères sont égales au nombre de baies de genièvre. » La
ligne fait référence à un enseignement kadampa qui compare le nombre de mères au nombre de boulettes de terre dans la terre
si ces boulettes avaient la taille d'une baie de genièvre. Voir Mind Training Like the Sun, Bibliothèque des œuvres et archives
tibétaines. (2002) : 38.

Page 41
L’Essence d’Ambroisie

je renaîtrai comme le plus humble serviteur. Même dans cette vie-ci, je ne peux avoir aucun sentiment
d’assurance mentale quant à mon état de bonheur et de souffrance, de hauts et de bas, de richesse et de
pauvreté. Cela est exprimé dans la ligne :
Même si je deviens Indra, digne des offrandes du monde...
Sixièmement, il y a le défaut de souffrir parce que je suis finalement seul, sans compagnon. Quand je
suis né, je suis né seul. Quand je mourrai, je mourrai seul. Le vieillissement et la maladie se vivent aussi
seuls. Dans le bardo, je devrai voyager seul. Mes amis, ma famille et mon conjoint ne me servent à rien.
Ceci s'applique à la ligne :
Je suis sûr de pleurer à la fin.

Par conséquent, toute l’existence cyclique est souffrance, en raison de la nature de ces six facettes
de la souffrance. Même si je suis né au pinacle de l’existence, il m’est facile de sombrer dans les
profondeurs de l’enfer. Je passe simplement d'une souffrance à l'autre. C'est comme si j'étais dans une
maison en feu, comme si je m'étais échoué sur une île de démons carnivores et comme si j'errais dans le
désert sans guide. Je dois me libérer de cette situation immédiatement !

Contemplez de cette manière encore et encore.


Chapitre Sept : Les Aspects de l'Origine

CHAPITRE SEPT :
LES ASPECTS DE L'ORIGINE

CONTEMPLATION 32 :
La cause originelle de la souffrance
Toutes ces grandes souffrances de l’existence cyclique ne surviennent pas sans causes ni conditions.
Une fois la cause de la souffrance abandonnée, il est possible d’éviter une existence cyclique. Quelle est
cette cause?
Toutes les souffrances proviennent de l’accumulation de karma. Pour que le karma surgisse, les
afflictions émotionnelles doivent être manifestement présentes. S’il n’y avait pas d’affliction émotionnelle
au départ, le karma ne mûrirait pas dans le futur. Par conséquent, la racine de toute souffrance, la cause
fondamentale du fait que tous les êtres sensibles et moi-même errons dans l’existence cyclique, ce sont
les afflictions émotionnelles. Elles sont décrites en utilisant diverses classifications. Parfois, elles sont
présentées au nombre de six : l’attachement, la colère, l’orgueil, l’ignorance, le fait d’avoir des opinions
perverties et le fait d’héberger des doutes. Parfois, elles sont présentées comme étant neuf. Quelle que
soit la présentation, la racine de chacune d’elles, ce sont les trois poisons : l’attachement, l’aversion et
l’ignorance.
Il existe également de nombreuses classifications du karma, mais elles peuvent toutes être
regroupées sous les trois types d’actions qui déterminent l’existence cyclique : l’action non méritoire,
l’action méritoire et l’action immobile.
L’action non méritoire comprend les actions néfastes qui nous conduisent vers les royaumes
inférieurs. L'action méritoire comprend l'absorption méditative et les actions vertueuses du domaine du
désir, telles que la générosité qui se développe sur le chemin vers la libération, la discipline morale qui
réfrène le désir, etc. Ces types d’actions sont une cause de renaissance en tant que dieu ou humain du
royaume du désir. L'action immobile inclut les quatre stabilités méditatives, ou les samādhis des quatre
royaumes sans forme, qui sont uniquement méritoires. Ce type d’action propulse un individu vers les
royaumes divins de la forme ou du sans forme.
Tous les types de karma sont entachés par l'ignorance de la non-réalisation de l'état naturel76.
L'ignorance conduit à l'auto-préoccupation [ou auto-chérissement]. L’action motivée par l’auto-
préoccupation devient la cause de l’existence cyclique. Si je me demande si j’ai cette affliction d’ignorance,
il me suffit d’examiner mon esprit.
Je ne connais pas la nature de l’existence cyclique, ni quand ni comment elle a commencé. Je ne
connais pas la nature de la libération ni les méthodes pour y parvenir. Je ne sais même pas comment être
sûr de ces choses. Il est possible que j'aie une compréhension rudimentaire grâce à l'étude et à la réflexion,
mais lorsque j'examine la façon dont les choses apparaissent dans mon esprit, quelle que soit la façon dont

76
Tib. Né-Loug, གནས་ལུགས།. L'« état naturel » est la vérité ultime et son expression en tant qu'essence ou nature de l'esprit.

Page 43
L’Essence d’Ambroisie

je les regarde, trouver la vérité, c'est comme essayer d'imaginer un pays lointain que je n'ai jamais visité. Il
ne me reste qu’un concept vague, flou et incertain.
Parce que je ne comprends pas les conditions de l’existence cyclique et de la libération, des doutes
surgissent quant à la vérité ultime. De là naissent toutes les idées fausses, comme celle de s’accrocher à un
soi là où il n’y a pas de soi ; par conséquent, toutes les opinions fausses proviennent de l’ignorance
fondamentale.
De plus, au départ, je suis attaché à mon corps et à mon esprit. Sur cette base, je m'attache à d'autres
êtres sensibles : le sexe opposé, mes amis proches, mes serviteurs, etc. Je m'attache également aux choses :
à la nourriture, aux vêtements, aux biens, à ma maison, à mon champ, à mes richesses, à mes biens, à mon
pays, etc. Le sentiment de désir et d’affection mentalement douloureux que je ressens pour mon corps et
mes biens est l’affliction émotionnelle de l’attachement. Sur cette base, la fierté, la cupidité et la jalousie
surgissent.
Envers tout ce qui me nuit ou nuit à mes biens, je ressens de l’aversion. Avec un sentiment
d'inconfort, je me concentre mentalement sur les êtres sensibles qui me font du mal ou menacent de me
faire du mal ou à tout ce qui m'est cher. Cet état mental est la colère ou l'aversion. Parfois, je me mets
même en colère contre des objets inanimés. Par exemple, un lieu ou une habitation peuvent déclencher
un inconfort mental. Je peux être irrité parce que mon champ est inondé par une rivière. Tous ces exemples
indiquent la présence de l’aversion. L’état mental grossier résultant d’une forte colère qui souhaite nuire
aux autres, la colère, l’irritation, la méchanceté, etc. sont toutes des formes d’aversion.

Pensez à votre propre situation, en l'enracinant dans le courant de votre être :


Puisque ces trois poisons nous font errer, moi ainsi que tous les êtres sensibles, dans l’existence
cyclique, je les abandonnerai autant que possible. Je reconnaîtrai les afflictions émotionnelles qui
surviennent dans mon continuum et identifierai les actions qui découlent de ces afflictions.

{À ce moment, il est très bénéfique de compléter ces contemplations avec toute présentation
du karma et des afflictions émotionnelles appropriée au disciple.}
Chapitre Huit : Les Causes et les Résultats de la Libération

CHAPITRE HUIT :
LES CAUSES ET LES RÉSULTATS DE LA LIBÉRATION

CONTEMPLATION 33 :
La contemplation des causes et des résultats de la libération
Ayant abandonné l’existence cyclique, je dois atteindre la libération. Par conséquent, je dois réfléchir
à la nature de la libération.
Ce qu’on appelle « libération » n’est pas un lieu, un autre pays ou une direction vers lequel on peut
voyager. Il s’agit plutôt d’un déracinement du potentiel latent des afflictions émotionnelles qui existent
dans mon esprit, afin qu’elles ne surgissent jamais dans le futur et soient purifiées dans l’expansion 77.
Une fois ce potentiel purifié, il n’est plus nécessaire de renoncer délibérément aux actions parce que
les résultats karmiques ne peuvent pas survenir. Le cycle entier de l’accumulation karmique disparaît dans
l’expansion. Dans la terminologie religieuse du canon bouddhiste : « Une fois les graines abandonnées, le
fruit ne peut pas germer. » Une fois le karma et les afflictions émotionnelles abandonnés, l’existence
cyclique ne réapparaîtra plus. Toutes les traces restantes de karma se disperseront rapidement. Le résultat
final de l’épuisement de toutes les afflictions émotionnelles des trois domaines de l’existence cyclique est
simplement une conscience immaculée – c’est-à-dire la libération.
« Abandon sans régression » signifie qu’une fois la libération atteinte, il est impossible que ce niveau
se détériore. La cause pour atteindre la libération est une sagesse qui ne se détériore pas, qui comprend la
véritable nature de l’altruisme des hommes et de l’altruisme des phénomènes, et qui renonce à tout
obscurcissement. La cause de cette prise de conscience est d’entraîner l’esprit dans une transe en un seul
point. Si mon esprit veut atteindre un seul point, j’ai besoin d’une discipline morale pure. La discipline
morale signifie maintenir une pure attitude de renoncement et cultiver la vision de l’altruisme. Par
conséquent, le renoncement et la vision de l’absence d’entité propre sont la cause naissante et indéfectible
de la libération.

Afin de me libérer de l’existence cyclique, je veillerai dès maintenant à la discipline morale. Je


cultiverai le samādhi. Ayant développé la sagesse grâce à la méditation, je réaliserai le sens de
l'impermanence, de la souffrance, de la vacuité et de l'altruisme.

Contemplez de cette manière encore et encore.

{À ce moment-là, il est excellent d'expliquer au disciple la présentation commune de la fruition,


de la paix et du nirvāṇa et une présentation sommaire des trois entraînements. Cependant,

77
L'étendue (Skt. Dhātu, Tib. Ying, དབྱིང་།) fait référence à la vraie nature de tous les phénomènes reflétés, dans ce cas, dans la
vraie nature de l'esprit.

Page 45
L’Essence d’Ambroisie

bien que les instructions sur la méditation du calme mental78 et la méditation sur l’absence de
soi de l'individu puissent être transmises à ce stade, un individu de capacité moyenne ne peut
pas encore saisir le point central de cette pratique. Par conséquent, les instructions sur la
méditation du calme mental et l’altruisme entrent dans la catégorie des contemplations
destinées aux personnes ayant une plus grande capacité. Au chapitre 8, la pratique consiste à
développer progressivement le désir de s’entrainer au chemin vers la libération. Ceci complète
les pratiques pour l'individu de capacité moyenne.}

78
Skt. Śamatha, Tib. Shi-Né, ཞི་གནས།.
Partie III : Les Contemplations Extraordinaires pour la Personne de Plus Grande Capacité

Partie III :
LES CONTEMPLATIONS EXTRAORDINAIRES POUR LA PERSONNE DE
PLUS GRANDE CAPACITÉ

La troisième partie consiste en une contemplation préparatoire [Contemplation 34] et des


contemplations qui élargissent les limites [de l'esprit d’Éveil] [Contemplations 35-64].

Page 47
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE NEUF :
LA CONTEMPLATION PRÉPARATOIRE ET LES LIENS DE CAUSALITÉ

CONTEMPLATION 34 :
Préparation

Une fois que vous avez contemplé les défauts de l’existence cyclique tels que présentés dans les
sections précédentes, vous êtes prêt à renoncer à l’existence cyclique et à atteindre l’état du nirvāṇa. Pour
atteindre le nirvāṇa, vous devez étudier les trois entraînements. Le nirvāṇa obtenu peut être divisé en trois
types d’illumination : l’illumination d’un auditeur, l’illumination d’un réalisateur solitaire et l’illumination
d’un parfait bouddha.

Les deux premiers types d’individus – ceux qui obtiennent l’illumination d’un auditeur ou d’un
réalisateur solitaire – n’ont pas perfectionné les abandons et la réalisation est pour leur seul bénéfice. Ils
manquent d’intérêt pour l’obtention d’un vaste bénéfice au profit des êtres sensibles. De plus, leur
abandon est incomplet : ils renoncent aux obscurcissements émotionnels mais ne renoncent pas aux
obscurcissements cognitifs. Leur réalisation est également incomplète, ils se rendent compte seulement
de l'absence de soi de l'individu et de l'interdépendance relative, mais ils ne se rendent pas compte de
l'absence de soi des phénomènes ni de l'interdépendance ultime. Ils développent des qualités particulières
distinctes, mais pas celles qui se propagent de manière illimitée. Ils ne tiennent pas les êtres sensibles
éloignés de la souffrance, mais pratiquent plutôt des méthodes pour se libérer. Ils n’ont aucune intégrité,
des aspirations limitées et aucun avenir : c’est une libération qui a abandonné le bien des autres.
D'un autre côté, les bonnes qualités des êtres nobles, qui ne retournent pas au saṃsāra et se
reposent dans un état exempt de complications, ne peuvent pas être englobées par l'esprit d'une personne
ordinaire comme soi. Cependant, si je compare la libération d'un Bouddha ou d'un Bodhisattva avec la
libération d'un auditeur ou d'un réalisateur solitaire, cela souligne la totalité de l'abandon des deux
obscurcissements par les bouddhas et les bodhisattvas, l'étendue de leur sagesse qui connaît la nature et
la multiplicité de toute chose79, l'infinité de leurs qualités, la force et l'efficacité de leur compassion
infatigable et la vigueur de leur activité au profit des êtres sensibles.
C'est comme comparer une graine de sésame au mont Mérou. Par conséquent, je perfectionnerai
tous les abandons et réalisations pour mon propre bénéfice. Ensuite, j'atteindrai l'illumination en
perfectionnant les facteurs libérateurs qui ont la nature d'une activité inépuisable au profit des autres.
D’une manière ou d’une autre, j’atteindrai la bouddhéité !

Prenez cette résolution encore et encore.

79
« Connaître les choses telles qu'elles sont » fait référence à la réalisation par un Bouddha de l'essence ultime de tous les
phénomènes. « Connaître les choses dans leur multiplicité » signifie la qualité omnisciente de l'esprit d'un bouddha qui est
conscient de chaque phénomène et événement spécifique.
Chapitre Neuf : La Contemplation Préparatoire et les Liens de Causalité

Les contemplations qui visent à élargir les limites [de l'aspiration de l'esprit d’Éveil] consistent en une
contemplation des liens de causalité [Contemplation 35] et des contemplations sur la signification de ces
liens [Contemplations 36-64].

CONTEMPLATION 35 :
Les liens causals qui mènent à l'atteinte de la bouddhéité
En vous basant sur les réflexions précédentes, réfléchissez comme suit :
J'ai besoin d'atteindre la bouddhéité. J’ai donc besoin de cultiver l’esprit d’Éveil puisque c’est la cause
de la bouddhéité. La cause de l’esprit d’Éveil est la compassion. La cause de la compassion est l'amour. La
cause de l’amour est l’appréciation et la gratitude. La cause de l'appréciation est de reconnaître que tous
les êtres sensibles ont été mes parents. Je devrais méditer sur le développement de ces qualités par étapes.
Méditez encore et encore

Tous les êtres sensibles sont mes parents – ils ont été si bienveillants à mon égard. Ne serait-il pas
juste qu'ils soient libérés de la souffrance ? Ne serait-il pas juste qu'ils soient à l'aise et heureux ? J’atteindrai
donc la bouddhéité afin de les établir tous dans le bonheur. Une fois que j’aurai atteint la bouddhéité, je
placerai également tous les êtres sensibles en l’état de la bouddhéité.

{En ce qui concerne les éléments ci-dessus, les instructions spéciales transmises par le disciple
de maître Sharawa, Guéshé Toum-Tönpa Lodrö Drak80, présentent cinq connexions de cause à
effet, comme expliqué ci-dessus.
Cependant, dans la lignée du disciple de Dja-Yülwa, Tsangpa Rinpoché81, comme l'écrit Guéshé
Mü-Mèn82 dans les annales des enseignements graduels appelés Les Étapes Nécessaires de
l'Entraînement de l’Esprit dans le Mahāyāna83, cette citation apparaît : « Vous devriez entraîner
votre esprit par étapes dans les sept liens de causalité que l’on trouve dans les extraordinaires
enseignements d'Atiśa sur le Mahāyāna ».
La présentation par Atiśa des sept liens de causalité déclare que la bouddhéité n'est pas sans
causes ni conditions : 1. La bouddhéité naît de la cause qu’est l’esprit d’Éveil ; 2. L’esprit d’Éveil
naît d’une motivation pure et excellente ; 3. Une motivation pure naît d’une grande
compassion ; 4. Une grande compassion naît d’un grand amour ; 5. L'amour naît du fait de

80
Toum-Tönpa Lodrö Drakpa, གཏུམ་སྟོན་བོ་གོས་གགས་པ། (1106-1166), disciple du maître kadampa Sharawa Yöntèn Drak, ཤ་ར་བ་ཡོན་ཏན་གགས།
(1070-1141).
81
Tsangpa Dordjé mi-Kyö, གཙང་པ་རོ་རྐྱེ་མི་བསོད། (XIe siècle), disciple du maître kadampa Dja-Yülwa Shönou Ö, བྱ་ཡུལ་བ་གཞོན་ནུ་འོད། (1075-
1138) [qui fut par ailleurs un des maîtres de Gampopa].
82
Mü-Mènpa Dütsi Tchar-Tchèn, མུས་སྨན་པ་བདུད་རི་ཆར་ཆྐྱེན། (XIe siècle).
83
Tib. T’ègpa Tchènpo Lodjong gui Rimpa, ཐྐྱེག་པ་ཆྐྱེན་པོ་བོ་སོང་གི་རིམ་པ།.

Page 49
L’Essence d’Ambroisie

considérer les êtres sensibles avec affection ; 6. Considérer les êtres sensibles avec affection
naît de l’appréciation et de la gratitude ; 7. L'appréciation et la gratitude découlent du
développement de la perception des êtres sensibles comme étant [ou ayant été] vos mères.
Tels sont les sept liens de causalité [tels qu'exprimés par Atiśa]. Cependant, le terme « sept
liens de causalité » ne leur a été appliqué que plus tard. Je mentionne cela ici pour établir que
je n'ai pas inventé la classification moi-même.}

Les contemplations précisant la signification des liens de causalité peuvent être divisées en trois
sections : la méditation sur l'amour [Contemplations 36-38], la méditation sur la compassion [Contemplation
39] et la méditation sur l'esprit d'Éveil [Contemplations 40-64].
Chapitre Dix : Méditation sur l'Amour et la Compassion

CHAPITRE DIX :
MÉDITATION SUR L'AMOUR ET LA COMPASSION

CONTEMPLATION 36 :
L’Amour pour votre mère

La mère qui m'a donné naissance dans cette vie a été extrêmement bienveillante envers moi.
D’abord, elle m’a gardé dans son ventre pendant neuf ou dix mois. Durant sa grossesse, elle m'a protégé,
me chérissant plus que sa propre vie. Elle m'a donné mon corps humain, ma vie, mon énergie.
Puis dès ma naissance, elle m'a aidé avec son propre corps. Elle m'a bercé avec ses dix doigts, m'a
réchauffé avec la chaleur de sa chair, m'a allaité de ses seins, a goûté ma nourriture et a essuyé la saleté
de mes fesses de ses propres mains. À l’époque où j’étais incapable de faire quoi que ce soit par moi-même
et où j’étais aussi impuissant qu’un insecte, elle a pris soin de moi.
Elle m'a aidé avec ses paroles. Elle m’appelait avec des termes affectueux. Elle m'a félicité sans raison.
Elle a vanté mes qualités alors que je n'en avais aucune. Même lorsque mon exécution des tâches était
médiocre, elle était ravie.
Elle m'a aidé avec son esprit. Elle était constamment préoccupée par mon bien-être, pensant : « Je
dois m'assurer que mon enfant ait une longue vie. Je dois m'assurer qu'il ne tombe pas malade. Je dois
m'assurer qu'il soit honoré par les autres. Les gens l'admireront-ils ? Aura-t-il du succès?"
Quand j’ai appris à m’asseoir, à marcher et à prononcer mes premiers mots, elle a été submergée de
joie. En grandissant, non seulement elle n’avait plus peur de me donner tout ce qu’elle possédait, mais elle
le faisait avec joie. Elle n'aurait pas eu la moindre hésitation à me donner toute la richesse et les vêtements
de l'univers.
Comme ma mère m’a aidé et a pris soin de moi ! Elle m’a aimé et a été si gentille avec moi ! Ne serait-
il pas juste qu'elle soit à l'aise maintenant et pour toujours ? Ne serait-il pas juste qu'elle soit heureuse ? Je
dois établir ma mère dans un confort et un bonheur insurpassables.

{Cette méditation sur l'amour envers sa propre mère est la racine de toutes les pratiques axées
sur le développement de l'amour. Parce qu'il est facile de développer l'amour de cette façon, il
est important de continuer à pratiquer cette contemplation jusqu'à ce que l'expérience de
l'amour surgisse en vous.}

Page 51
L’Essence d’Ambroisie

CONTEMPLATION 37 :
Reconnaître l'étendue de l'amour de votre mère

Je viens de méditer sur les bienfaits que ma mère m'a apportés dans cette vie. Mais sa générosité ne
se limite pas à cette vie ou à deux vies.
Au contraire, durant un nombre infini de vies, elle a été ma mère, me venant en aide au cours
d'innombrables incarnations, tout comme elle l'a fait dans cette vie. Parfois, elle est née comme mon père,
me venant en aide d'innombrables fois sous cette forme. Elle est apparue un nombre infini de fois en tant
que membres de ma famille, proches, compagnons, conjoints, maîtres et ainsi de suite, juste pour mon
bien. Pour moi seul, elle a amassé plus haut que le Mont Mérou un tas de vêtements pour m'envelopper
et de bijoux pour me parer. La quantité de lait qu'elle a offert de son sein ne pourrait pas être contenue
par le volume des quatre grands océans. Ma chère mère, incarnée en tant que mes pères, mes mères, mes
enfants et mes proches avec un esprit si plein d'amour qu'elle jura de mourir avant que de laisser quoi que
ce soit m'arriver, a pleuré pour moi plus de larmes que ne pourraient remplir 100 millions de rivières.
Quand mon bien-être était en jeu, elle s'est mise en danger. Elle ignorait la souffrance. Elle ignorait
les ragots. Elle ne pensait qu'à mon bien. Comme elle a été bienveillante et a pris soin de moi ! Elle m'aimait
et a été si gentille avec moi ! Ne serait-il pas juste qu'elle soit à l'aise maintenant et pour toujours ? Ne
serait-il pas juste qu'elle soit heureuse ? Je dois établir ma mère dans un confort et un bonheur
insurpassables.

CONTEMPLATION 38 :
L'expansion de l'esprit d'amour bienveillant envers tous les êtres sensibles
Répétez la contemplation précédente mais remplacez l’objet unique [votre mère] par cinq ou six
personnes de votre famille ou de votre cercle d'amis comme votre père, votre conjoint, etc.
Puis réfléchissez :
Dans cette vie, certaines de ces personnes m’ont beaucoup apporté. Certains m’ont aidé dans une
certaine mesure. Certains ne m'ont aidé qu’un petit peu. Cependant, si je considère que l’existence cyclique
est sans commencement, il n’y a aucune différence entre les bienfaits que chacune de ces personnes m’a
apportés et ceux que ma mère a apportés. Il n’y a aucune différence dans leur degré de gentillesse. Tous
ces gens m’ont énormément apporté ! N'est-il pas juste qu'ils aient le confort ? N'est-il pas juste qu'ils
soient heureux ? Je dois les placer dans un état de bonheur et de confort ultimes.

Vous pouvez augmenter cette contemplation avec certaines des idées [contenues dans la 36e
Contemplation].
Chapitre Dix : Méditation sur l'Amour et la Compassion

De la même manière, appliquez progressivement la méditation aux autres. La tradition de Maître


Jayulwa84 et de Narthangpa85 suggère d'élargir la contemplation par étapes pour couvrir une zone
géographique de plus en plus vaste. Cette méthode, expliquée ci-dessous, semble être la plus efficace pour
les débutants en pratique contemplative.

Après vous être engagé dans les réflexions décrites ci-dessus, étendez votre attention aux personnes
qui vivent dans votre région : vos ennemis, vos amis et vos connaissances. Incluez ensuite les animaux :
ceux qui vivent en dessous, sur et au-dessus de la terre. Considérons ensuite les fantômes affamés : les
démons aussi bien que les indigents, les supérieurs aussi bien que les pauvres et les ordinaires. Tous ont
été vos mères et pères pendant d’innombrables vies. Considérez comment ils vous ont été bénéfiques et
comment ils ont fait preuve de gentillesse envers vous. Appliquez-leur la méditation sur l'amour comme
dans les contemplations précédentes.
Ensuite, étendez la contemplation pour inclure des régions de plus en plus vastes du pays jusqu'à ce
que – dans le contexte où vous êtes un Tibétain – vous incluiez les trois types d'êtres86 habitant l'ensemble
du Tibet. Incluez ensuite la Chine à l’est du Tibet, l’Inde au sud, le Népal à l’ouest et la Mongolie au nord,
en étendant votre visualisation pour inclure les tigres, les léopards et tous les autres êtres des trois types
vivant dans ces grands pays.
Méditez ensuite sur les trois types d'êtres habitant le Pays de Djambou87. Méditez comme ci-dessus
sur les fantômes affamés qui vivent sous la terre, les êtres des huit enfers chauds et des huit enfers froids.
Étendez ensuite votre contemplation pour inclure les trois types d'êtres qui remplissent le reste des quatre
continents : le continent Corps Majestueux88 à l'est, le continent Bénéficiant de Vaches à l'ouest89 et le
continent Sons Déplaisants au nord90.
Incluez également les différents êtres des trois royaumes inférieurs. Sur les quatre marches du Mont
Mérou se trouvent les dieux du Ciel des Quatre Grands Rois. Au sommet du mont Meru se trouvent les
dieux du Ciel des Trente-trois. Sur les quatre sous-escaliers menant au rivage de l'eau se trouvent les
villages où vivent les chefs des demi-dieux.
Méditez comme précédemment sur les êtres vivant dans ces lieux.
Contemplez ensuite les dieux, les démons91 et les animaux vivant au-dessus de l'eau sur les sept
montagnes d'or et le cercle extérieur des montagnes de fer, ainsi que les divers demi-dieux, fantômes

84
Tib. Dja-Yülwa (1075-1138), également connu sous le nom de Shönou Ö, est l'auteur d'un ancien texte kadampa important
sur le Lam-Rim.
85
Tib. Nar-Thangpa, སྣར་ཐང་པ།, également connu sous le nom de « Djamyang Rintchèn », འཇམ་དབྱང་རིན་ཆྐྱེན། », était un maître kadampa
du 14e siècle.
86
Les trois types d’êtres sont ceux qui vivent sur, au-dessous et au-dessus de la terre.
87
Skt. Jambudvīpa, Tib. Dzambou-Ling, འཛམ་བུ་གིང་།. [Le continent Terre des Jambosiers] Il s’agit du continent situé au sud du mont
Mérou, considéré dans la cosmologie bouddhiste comme étant notre monde.
88
Skt. Pūrvavideha, Tib. Lü-P’agpo, ལུས་འཕགས་པོ།.
89
Skt. Avaragodāniya, Tib. Balang-Tchö, བ་ལང་སྤྱོད།.
90
Skt. Uttarakuru, Tib. Dra mi-Nyèn, སྒྲ་མི་སྙན།.
91
Skt. Yakṣa, Tib. Nö-Djin, གནོད་སིན།.

Page 53
L’Essence d’Ambroisie

affamés et animaux vivant sous la surface de l'eau. Dans et autour des sept lacs tourbillonnants et de
l’océan extérieur vivent des nāgas amphibies ordinaires, des demi-dieux et des animaux.
Méditez sur chacun d’eux comme des objets de votre amour bienveillant. Trois types d'animaux
possèdent des pouvoirs miraculeux : les gāruḍas qui volent dans l'espace, les fantômes qui vivent à la
surface de la terre et les nāgas qui vivent sous terre ou dans l'eau. Méditez spécifiquement sur ces êtres
également.
Cette méditation couvre la région jusqu'au grand et puissant sol doré, aussi loin que les montagnes
de fer et aussi loin que le Ciel des Trente-trois92. Au-dessus du Ciel des Trente-trois se trouvent les cieux
appelés Libéré des Conflits, Se Réjouissant de la Création et Jouissance des Plaisirs en strates les uns au-
dessus des autres.
Au-dessus de ces royaumes se trouvent les trois cieux du premier stade d'absorption93 qui ont chacun
la taille d'un univers composé de quatre continents : le Royaume de Brahma, les Acolytes de Brahma et le
Grand Ciel de Brahma. Les sources originelles94 expliquent que ces niveaux sont les habitats du royaume
de la forme, où seuls les dieux du royaume de la forme peuvent vivre – les êtres des cinq autres types ne
s'y trouvent pas. Même les dieux du royaume du désir ne peuvent pas y vivre. À partir de ce niveau, seuls
les dieux appartenant à chaque royaume divin spécifique peuvent exister dans ce royaume.
Globalement, au-dessous des royaumes de Brahma95 se trouve un univers avec les quatre continents,
où vivent les êtres des six royaumes. Méditez sur chacun d’eux comme auparavant. Il existe plusieurs
milliers de ces systèmes-mondes, et au bord de ceux-ci se trouve un anneau de montagnes de fer. Au-
dessus de tout ce système se trouvent les trois cieux de la deuxième étape d’absorption : la Petite Lumière,
la Lumière Incommensurable et la Claire Lumière. La Claire Lumière couvre mille systèmes d’univers.
Méditez comme auparavant sur les êtres des six royaumes dans cette zone.
Au bord d’un ensemble de mille de ces univers se trouve un anneau de montagnes de fer. Au-dessus
se trouvent les trois cieux de la troisième absorption : Petite Vertu, Vertu Incommensurable et Vertu Infinie.
La Vertu Infinie couvre les six types d'êtres vivant dans le système universel composé d'un million de
systèmes mondiaux.
Au bord d’un ensemble de mille de ces univers se trouve un autre vaste anneau de montagnes de
fer. Chaque système d’univers à ce niveau possède une base en or, au-dessous de laquelle se trouve un
maṇḍala d'eau. Les milliards de maṇḍalas d'eau sont soutenus par un seul maṇḍala de vent. Par
conséquent, au-dessous de tout ce système se trouve un maṇḍala de vent, et au-dessus se trouvent les
trois lieux ordinaires de la quatrième absorption : Sans nuages, Mérite d'Éveil et Grand Fruit. Au-dessus de
ceux-ci se trouvent Incomparable, Paisible, Glorieuse Apparence, Magnifique et Ciel Suprême. Ciel
Suprême couvre à lui seul le système d’un milliard de mondes96.

92
Voir le Glossaire des classifications pour une énumération des royaumes divins.
93
Skt. Dhyāna, Tib. Sam-Tèn, བསམ་གཏན།.
94
La référence aux « sources originelles » est probablement une référence générale aux sources des sūtras qui traitent de la
cosmologie et du Trésor de la Phénoménologie de Vasubhandu, un texte sur lequel Tāranātha s'appuie fréquemment dans cette
section.
95
Les « royaumes de Brahma » font référence à un ensemble de trois cieux de la première étape d'absorption.
96
Tib. Tong Soum, སྟོང་གསུམ།.
Chapitre Dix : Méditation sur l'Amour et la Compassion

Ce qu'on appelle « un grand système d'un milliard de mondes » est recouvert par les innombrables
êtres sensibles dans le royaume des dieux sans forme.
Méditez sur les six types d’êtres dans les trois royaumes comme auparavant.
Ensuite, à l’est de ce système-monde se trouvent d’innombrables systèmes-mondes. Pour donner
une idée du nombre de systèmes-mondes qui s'étendent à l'est, si vous deviez remplir un système-monde
de graines de moutarde et en placer ensuite une sur chacun des systèmes-mondes à l'est, vous finiriez par
manquer de graines de moutarde. Mais même dans ce cas, les systèmes-mondes à l’Est perdureraient. Si
vous recommenciez le processus dans n’importe quelle direction, ce serait la même chose que
précédemment. Même si vous vous livriez à cet exercice un nombre infini de fois, les univers ne finiraient
pas. Ils sont tous remplis des six types d'êtres. Reconnaissant chacune d’elles comme votre mère, méditez
comme avant sur la bienveillance à leur égard.

Songez :
Il n’y a pas de fin à l’espace qui s’étend dans toutes les directions. Partout où l’espace pénètre, des
univers existent. Tous les êtres sensibles ont été mes pères et mères bienveillants. Ils ont été mes parents
un nombre incalculable de fois. À chaque fois qu’ils ont été mes parents, ils m’ont aidé de nombreuses
manières. Ils m’ont protégé de nombreux dangers. Que tous les êtres sensibles, mes anciennes mères,
soient satisfaits ! Puissent-ils être heureux ! Je les établirai dans un contentement et un bonheur
insurpassables.

Cette contemplation comporte de nombreux aspects, il est donc possible de la diviser de différentes
manières. La manière de le diviser n'est pas précisée car elle dépend des dispositions de l'individu. Mais
comme les aspects de la contemplation se rapportent tous à l’expansion de l’esprit de bonté aimante, j’ai
tout inclus dans un long cycle de contemplation.

{À ce stade, il est important pour le disciple de se familiariser avec cette présentation du


système des univers [cosmologie]. Ceci termine les réflexions sur la bonté aimante.}

CONTEMPLATION 39 :
La Méditation sur la Compassion
Les préliminaires et la conclusion de chaque séance se déroulent comme d'habitude. Après avoir
brièvement rappelé la réflexion précédente, considérez :

Je dois établir tous ces êtres sensibles dans le contentement et le bonheur. Mais quand je regarde le
monde des êtres sensibles, il est évident qu’ils ne vivent pas avec le bonheur ni les causes du bonheur. Ils
vivent avec la souffrance et les causes de la souffrance. Quand ils font des souhaits, ils souhaitent le
bonheur. Ils ne veulent pas souffrir, mais ils en font quand même l’expérience. Le bonheur ne leur arrive
pas – la misère est leur seul lot. Pour la plupart, la souffrance qu’ils vivent est apparente. Dans les royaumes
infernaux, ils supportent la chaleur et le froid. Dans les royaumes fantômes affamés, ils endurent la faim et

Page 55
L’Essence d’Ambroisie

la soif. Dans le règne animal, ils s’entredévorent. Dans les royaumes supérieurs, il n’y a pas un seul d’entre
nous qui ne ressente manifestement une souffrance quelconque : nous avons des vies courtes, de
nombreuses maladies, peu de liberté, la famine et la misère et sommes forcés de travailler, sommes blessés
par des armes, etc. Tous les êtres en général accumulent les causes incommensurables de la souffrance.
Certaines personnes ne subissent pas actuellement de souffrances intenses et indésirables, mais
accumulent un grave karma négatif. Ils iront directement en enfer quand leur souffle s'arrêtera. Ce genre
d’individu est encore plus digne de ma compassion que ceux qui souffrent actuellement.
Comme nous sommes confus par les apparences ! Hélas, que faire ? Et si les yeux de ma propre mère
ne pouvaient plus voir et qu’elle se brisait les jambes ? Et si elle était sans guide, sans canne ? Et si elle était
sur le point de tomber du bord d’une falaise abrupte ? Qu'est-ce que je ferais? Je n'hésiterais pas un instant
mais je courrais pour la rattraper et l'empêcher de tomber de la falaise.
Tous ces êtres qui ont été mes mères dans des vies antérieures sont dans cette situation difficile :
leurs yeux de sagesse sont aveugles ; leurs jambes de méthode sont brisées. Ils sont sans guide. Ils ont
perdu leur canne. Ils se livrent encore et encore à toutes sortes d’actions négatives, parfois même lorsqu’ils
savent que leur action est mauvaise. Ils s’éloignent du chemin menant aux royaumes supérieurs. C’est
comme s’ils étaient sur le point de plonger dans l’abîme des royaumes inférieurs. Quelle tragédie que ces
êtres soient accablés par les causes de la souffrance ! Comment pourrais-je ne pas réussir à les protéger
de la souffrance en ce moment ?
De plus, les êtres des trois mondes inférieurs éprouvent principalement la souffrance manifeste. Les
êtres des trois mondes agréables, en revanche, expérimentent principalement les causes de la souffrance.

Rappelez-vous les types de souffrances qu'éprouvent tous ces êtres à partir des explications données
dans le cadre des contemplations pour les personnes de moindre et moyenne capacité.

Si ces souffrances devaient m’arriver soudainement, je serais incapable de les surmonter, même à
faible dose. Si je ne pouvais pas les supporter, comment font-ils pour supporter leur misère ? Ceux qui
subissent réellement ces souffrances, qui expérimentent les causes infinies de la souffrance au cours de
leur vie, qui vont de misère en misère sans interruption, comme j’ai pitié pour eux ! Puissent-ils être libérés
de toute souffrance ! Puissent-ils être libérés des causes de la souffrance : le karma et les afflictions
émotionnelles. Puissé-je protéger mes anciennes mères, les six types d'êtres sensibles, de toutes les actions
et souffrances négatives. Puis-je les sortir de l'existence cyclique, du lieu de la souffrance.

Réfléchissez de cette manière encore et encore.

{Une autre coutume divise la session ci-dessus en trois sessions. Dans ce cas, vous devriez
commencer par une séance de contemplation sur l’expérience de la souffrance manifeste par
une personne de votre choix. Ensuite, faites une séance de contemplation sur l'expérience de
cette personne concernant les causes de la souffrance. Faites ensuite une séance de
contemplation combinant les axes des deux premières séances. C’est excellent si vous
Chapitre Dix : Méditation sur l'Amour et la Compassion

continuez à élargir progressivement la visualisation pour vous connecter à tous les êtres
comme dans la contemplation sur la bienveillance expliquée ci-dessus.
Une autre option consiste à enseigner les instructions sur la bienveillance et la compassion en
même temps et à demander au disciple de les pratiquer ensemble en alternant entre la
première partie de la bienveillance, suivie d'une séance sur la première partie de la compassion
et ainsi de suite en alternant de l’une à l’autre jusqu'à ce que les deux soient terminées. C'est
également correct de ne pas diviser la session en plusieurs parties.}

Page 57
L’Essence d’Ambroisie

CHAPITRE ONZE :
MÉDITATION SUR L'ESPRIT D'ÉVEIL EN ASPIRATION

Ce chapitre comporte trois parties : l'entraînement à l'aspiration de l'esprit d’Éveil [Contemplation 40],
l'entraînement au rappel des bienfaits [Contemplation 41] et les engagements de l'entraînement
[Contemplations 42-44].

CONTEMPLATION 40 :
L'esprit d’Éveil en aspiration
Inspiré par la méditation sur la bienveillance et la compassion, je pense que je dois établir ces mères
dans le bonheur. Je dois les établir dans le confort. Elles restent dans un état de malheur, d’inconfort et de
souffrance – hélas ! Il n’est pas possible que je reste indifférent sans soulager leurs souffrances ! Il n’est
pas possible que j’échoue à les établir dans le bonheur !
Mais je n'ai pas cette capacité. Non seulement moi, mais même Brahma, Indra et les monarques
universels ne l’ont pas. Qui l'a ? Seul le parfait Bouddha l’a. Ce n’est que si j’atteins la bouddhéité que ce
pouvoir sera entre mes mains. Par conséquent, je dois atteindre la bouddhéité. Si j’y parviens, je pourrai
guider les êtres sensibles hors de l’existence cyclique. Afin de venir en aide à tous les êtres sensibles, je dois
atteindre la bouddhéité.
Pensez de cette façon, encore et encore.

{Lorsque le disciple s'entraîne [dans le contexte de la 34e contemplation, la contemplation


préparatoire], il ou elle se familiarise avec les qualités du Bouddha et la différence entre le
grand et le petit véhicules. Grâce à cette prise de conscience, il ou elle en vient à percevoir le
parfait Éveil comme étant l’objectif le plus précieux. Cependant, l’esprit d’Éveil généré sur la
base de la simple connaissance de ses qualités n’est pas suffisant. Par conséquent, [la 40 e
contemplation] se concentre sur la valeur du parfait Éveil basée sur son bénéfice pour les autres
– dans cet état, les qualités de l’esprit d’Éveil sont complètes. Bien qu'en effet [la 34e
contemplation] concerne le fait de venir en aide aux autres, tant que l'amour et la compassion
ne seront pas maîtrisés grâce aux contemplations qui s'ensuivent, le bénéfice pour autrui ne
peut pas vraiment être l'objectif principal.}
Chapitre Onze : Méditation sur l'Esprit d'Éveil en Aspiration

CONTEMPLATION 41 :
L’entraînement à la contemplation des bienfaits de l'esprit d’Éveil
L’esprit d’Éveil a le potentiel d’accomplir tous mes objectifs. Un sūtra dit : « l’esprit d’Éveil est comme
une graine car il donne naissance à tous les attributs de la bouddhéité ». Il a également l'avantage
d’accomplir les objectifs des autres : « il est comme un champ car il fait croître les tendances vertueuses
de tous les êtres ». Il a le mérite de dissiper toutes les fautes : « il est comme un sol fertile car elle épuise
toute conduite fautive ». Il a le mérite d'attirer les qualités : « parce qu'il magnétise toutes les qualités, il
est comme un grand océan ». Ainsi, il présente quatre avantages.
Cette méditation-même sur l’esprit d’Éveil dans laquelle je suis actuellement engagé plante la graine
de la libération dans mon esprit et éveille toutes les habitudes vertueuses. Cette excellente attitude profite
réellement aux êtres et me donne la capacité d'aider les autres. Grâce à cette méditation, je purifie une
grande partie du karma négatif. En surmontant des émotions négatives telles que l'attachement, l'aversion,
l'orgueil et la jalousie et en adoucissant l'esprit, l'esprit d'Éveil nourrit toutes les qualités.
Une fois que j’ai pris l’engagement d’accomplir la bouddhéité, toutes les autres qualités que je dois
acquérir surgiront naturellement. À compter de maintenant et jusqu’à la fin du chemin, la réalisation pour
moi-même, l’activité pour le bien des autres, la purification des défauts et l’acquisition des qualités sont
toutes générées par l’esprit d’Éveil. En bref, quelles que soient les qualités de l’omniscient, l’esprit d’Éveil
les possède également. Quelle que soit la valeur d’un bouddha, l’esprit d’Éveil l’a également.

En le générant avec enthousiasme et clarté, méditez à nouveau sur l’esprit d’Éveil comme ci-dessus.
Répétez ces contemplations plusieurs fois. Entre les séances, générez l’esprit d’Éveil en restant concentré
sur le fait de prendre [le karma négatif, la maladie, la souffrance, etc.] accumulés des autres, encore et
encore. Lorsque vous n'êtes pas capable d'engendrer l'esprit d'Éveil aussi largement que décrit ci-dessus,
dites-vous continuellement : « Pour le bien des êtres, j'atteindrai la bouddhéité » parce que cette résolution
engendre elle-même l'esprit d'Éveil. Récitez également la Prière en Sept Branches, encore et encore.

CONTEMPLATION 42 :
Les engagements de l’entraînement
Le premier engagement auquel je dois m'entraîner est de ne jamais abandonner en esprit les êtres
sensibles. Il existe deux manières d’abandonner mentalement les êtres sensibles : les abandonner dans
leur ensemble et les abandonner individuellement.
Les abandonner dans leur ensemble se produit si je renie mentalement mon engagement initial à
pratiquer la religion. Renier mon engagement signifie avoir des pensées telles que « Je n'obtiendrai jamais
mon propre bien ou celui des autres, alors autant être une personne ordinaire et non religieuse ». Cela
implique également de se détourner mentalement du Mahāyāna en pensant à des choses telles que
« Puisque je ne pourrai jamais accomplir le bien des êtres sensibles, je devrais cultiver la motivation d'un
auditeur ou d'un réalisateur solitaire ».

Page 59
L’Essence d’Ambroisie

L'abandon des êtres individuellement se produit lorsque quelqu'un me contredit ou agit contre moi,
et que je pense : « Même si j'ai l'occasion de vous aider, que ce soit de manière temporaire ou ultime, je ne
le ferai pas ». Cette attitude est dénuée de bonté aimante.
Que j'abandonne mentalement les êtres dans leur ensemble ou individuellement, si je maintiens
cette attitude d'abandon pendant une séance (environ quatre heures) sans appliquer de remède, j'ai
abandonné la pratique de génération de l'esprit d'Éveil. Puissé-je ne jamais donner naissance à un esprit
qui abandonne les êtres sensibles ! Si cela devait se produire hors de mon contrôle, puissé-je appliquer un
remède immédiatement en le confessant immédiatement après son apparition ! À la fin, puissé-je venir en
aide à tous ceux à qui je ne peux pas venir en aide pour l’instant !

CONTEMPLATION 43 :
Faire un effort pour accumuler du mérite
À mesure que mes qualités se développent progressivement, il est important d’élargir les deux
accumulations. Par conséquent, à partir de ce jour, je dois m’entraîner aux deux accumulations. Je
m'entraînerai à l'accumulation de mérites en faisant des offrandes aux Trois Joyaux dont la grande
bienveillance est décrite dans les sūtras et les commentaires, en servant la communauté spirituelle, en
offrant des tormas97 aux esprits, en me prosternant, en donnant, en circumambulant, en récitant des
mantras, en cultivant la foi, en méditant sur l'amour et la compassion, en méditant sur la patience, etc.
Je devrais m'entraîner à accumuler de la sagesse en écoutant le Dharma, en en saisissant les mots,
en réfléchissant à leur sens et en questionnant les idées [qui y sont développées]. De cette façon, mon
intelligence dissipera les doutes. En étudiant, j’arriverai à appréhender et à comprendre ; grâce à la
contemplation, j'arriverai à avoir confiance [en ce qui est exposé] ; et grâce à la méditation, je réaliserai
directement le sceau de la non-conception des trois sphères98, le fait que l'intégralité de l'existence cyclique
et du nirvāṇa est irréelle. C’est la seule chose que je dois comprendre et réaliser. Grâce à la vue qui perçoit
l’activité d’offrande et autres99 comme irréelle et grâce à l’entraînement destiné à soutenir cette vue, le
mérite devient sagesse, et la sagesse devient mérite. C’est ainsi que l’on pratique l’union des deux
accumulations.

Contemplez de cette manière, encore et encore. Entre les séances, mettez toujours en pratique ces
points autant que possible.

97
Les tormas sont des gâteaux (généralement à base de farine d'orge) offerts pour plaire et apaiser les divinités et les esprits.
98
Les trois sphères sont le sujet, l'objet et l'action. Le sceau de la non-conception des trois sphères signifie cesser d’appréhender
de manière dualiste.
99
Le « ainsi de suite » fait ici référence au reste des sept branches (expliquées dans la note 20).
Chapitre Onze : Méditation sur l'Esprit d'Éveil en Aspiration

CONTEMPLATION 44 :
L’entraînement aux huit actions
Les quatre actions noires sont globalement des fautes graves. Plus précisément, c’est à cause d’elles
que j’oublierai le Bodhicitta une fois que j’aurai quitté cette vie. Globalement, les quatre actions blanches
sont très bénéfiques. Plus précisément, c’est grâce à elles que je pourrai me souvenir de l’esprit d’Éveil
dans toutes mes vies. Par conséquent, je devrais abandonner les quatre actions noires et m’entraîner aux
quatre actions blanches.

1. Le premier couple : mentir ou a contrario être honnête : c'est un acte noir que d'induire en erreur un
lama qui est le réceptacle de la générosité ou d'induire en erreur toute personne digne d'offrandes.
Induire en erreur signifie le tromper avec des mensonges.
Le remède à cela est d’abandonner complètement le fait de mentir intentionnellement. Puisque je
ne dois pas intentionnellement dire le moindre mensonge à une personne ordinaire, comment
pourrais-je tromper quelqu’un qui mérite des offrandes ?
2. Le deuxième couple : susciter des remords inappropriés ou a contrario enseigner la vertu : c'est un
acte noir que de faire ressentir à quelqu'un des remords pour quelque chose qu'il ou elle ne devrait
pas regretter. Même si je dois inspirer du remords pour des actions négatives qui méritent d’être
regrettées, je ne dois pas essayer de faire en sorte que quelqu’un se sente mal pour avoir fait quelque
chose de vertueux. Peu importe qu’il se sente réellement mal ou non : cela reste un acte noir. Voici
quelques exemples de façons qui font regretter aux autres leurs actions positives : dire à quelqu'un
« Si vous donnez tout cela, qu'allez-vous manger ? » ou « Si vous prenez l'ordination, votre statut
social sera inférieur à celui d'une femme » ou « Si vous ne vous vengez pas de votre ennemi, votre
réputation sera ternie ».
Pour remédier à cette tendance, je m'entraînerai aux actes blancs qui font mûrir les êtres sensibles à
la vertu des trois véhicules. Je présenterai aux êtres sensibles les attitudes mentales associées aux
trois véhicules, en fonction de leurs dispositions et établirai autant d'êtres que possible dans le grand
véhicule. J'encouragerai les autres à pratiquer les actions vertueuses autant que possible et à faire
des prières d'aspiration à l’Éveil. S’il est de mon devoir d’encourager même les gens les plus mondains
à pratiquer la vertu, comment pourrais-je instiller des remords à quiconque pour l’avoir pratiquée ?
3. Le troisième couple – les paroles dures ou a contrario les éloges : c'est un acte noir que d’adresser
des mots durs à une personne qui a pris les préceptes de l'esprit d'Éveil. Parler durement est une
faute, que le discours soit prononcé en privé ou en public et que la personne ait réellement engendré
l’esprit d'Éveil ou non n'a pas d'importance. De plus, peu importe que la personne pense que je lui ai
fait du mal ou non. Si une personne a ne serait-ce que prononcé les mots « Je prends le vœu de
l’esprit d’Éveil », je ne devrais jamais la calomnier.
Tous les êtres sensibles ont la nature de Bouddha. De plus, ils facilitent le rassemblement des
accumulations et purifient les obscurcissements et sont donc semblables aux bouddhas. Il est dit :
« Les êtres sensibles et les bouddhas sont identiques en ce qui concerne l'accomplissement de la
bouddhéité et le suivi des enseignements ». Par conséquent, en considérant les êtres sensibles
comme des bouddhas, je les admirerai et les louerai constamment. Si je ne devais pas blâmer mais

Page 61
L’Essence d’Ambroisie

plutôt féliciter même les gens ordinaires, comment pourrais-je blâmer quelqu'un qui a engendré
l'esprit d'Éveil ?
4. Le quatrième couple – la tromperie ou a contrario l’attitude altruiste, bienfaisante et héroïque : c'est
un acte noir que de tromper les êtres sensibles. Tromper signifie imposer sa loi à quelqu'un ou agir
dans son dos pour atteindre ses propres objectifs. Cela inclut même quelque chose d’aussi léger que
la tricherie. S’il y a tromperie, quelle qu’elle soit, c’est un acte noir. En guise de remède, l’acte blanc
consiste à cultiver une attitude altruiste, bienfaisante et héroïque envers les êtres sensibles. Altruiste
et bienfaisante, c'est vouloir les établir dans le bonheur dans cette vie et dans la suivante. Héroïque
signifie assumer les fardeaux des autres comme étant les siens. Je devrais m'entraîner à ne pas hésiter
à cause du manque de sincérité, mais plutôt à parler directement et honnêtement aux autres comme
un parent parle à son enfant sans dissimuler quoi que ce soit en son for intérieur. Puisque je dois me
conformer à l’esprit héroïque qui désire aider tous les êtres sensibles, comment pourrais-je vouloir
les tromper ?

Je devrais cultiver assidûment ces actes blancs comme cœur de la pratique. À partir d’aujourd’hui, je
ne m’engagerai plus jamais dans les quatre actes noirs. Je m'entraînerai aux quatre actes blancs autant que
possible.

{Il existe un précédent alternatif pour faire une contemplation de chacun des quatre couples.
Cette méthode aide la personne aux capacités intellectuelles étroites à gagner en certitude. Les
choses iront de mieux en mieux au fur et à mesure qu’il ou elle progressera.
Une autre option consiste à classer les contemplations selon les huit entraînements. Ceux-ci
consistent à (1) se souvenir des bienfaits de l'engendrement de l'esprit d'Éveil, (2) s'entraîner à
engendrer l'esprit d'Éveil pendant les six moments du jour et de la nuit, (3) ne pas abandonner
les êtres sensibles, (4) s'entraîner aux deux accumulations et (5 -8) s’entraîner à chacun des
quatre couples. Utilisez la méthode d’entraînement qui vous semble la plus appropriée.
Le disciple peut formellement prononcer le vœu de l'esprit d'Éveil100 après que les instructions
sur la compassion [la 39e Contemplation] ont été transmises et avant les instructions sur
l'aspiration de l'esprit d'Éveil [la 40e Contemplation]. Insérer ici le vœu semble être la manière
la plus simple.
Une autre possibilité est d'enseigner les contemplations jusqu'à ce point et d'insérer ici la
Cérémonie du Vœu de l'Esprit d'Éveil [après la 44e Contemplation]. Il est important qu’au
moment de la cérémonie de prise de vœux, le disciple ait une certitude quant au sens.
C’est donc également un excellent endroit pour l’insérer. Alternativement, il est acceptable que
le disciple engendre l'esprit d'Éveil [grâce à la cérémonie du vœu de l'esprit d'Éveil] après que
toutes les instructions de ce livre aient été complétées dans leur intégralité et avant la
Cérémonie du Vœu de Bodhisattva. Insérez-la quand vous le jugez le plus pratique.}

100
La cérémonie du vœu de l’esprit d’Éveil est expliquée plus en détail dans l’annexe de ce texte.
Chapitre Douze : L’Entraînement à la Mise en Application de l’Esprit d’Éveil

CHAPITRE DOUZE :
L’ENTRAÎNEMENT À LA MISE EN APPLICATION DE L’ESPRIT D’ÉVEIL

CONTEMPLATION 45 :
La réflexion générale sur la mise en application de l’esprit d’Éveil
Si je veux atteindre la bouddhéité, je dois m'entraîner à la conduite d'un bodhisattva101. Vouloir
atteindre la bouddhéité mais ne pas cultiver la conduite d'un bodhisattva, c'est comme souhaiter une
excellente récolte mais ne pas vouloir labourer la terre. Même s’il est vrai qu’il y a de nombreux avantages
à aspirer à l’Éveil, si je ne pratique pas la conduite du bodhisattva, quelles que soient mes qualités, elles ne
pourront pas se développer pleinement. Par conséquent, je dois m’entraîner à la conduite d’un
bodhisattva.
L’essence de la conduite du bodhisattva réside dans les Six Perfections et les quatre manières de
rassembler les disciples. Il n'y a rien d'autre à pratiquer que les Perfections et les quatre voies. Par
conséquent, je dois me mettre à la pratique des Six Perfections, les expliquer aux autres et encourager les
autres à les pratiquer. Encourager les autres à pratiquer les Six Perfections est en soi une des Perfections
et une manière de rassembler des disciples. Je pratiquerai sérieusement et complètement les Dix
Perfections102. Je ne vais pas tergiverser, mais je commencerai tout de suite ! En ce moment, même si ma
promesse et ma pratique ne prêtent pas à confusion, je dois pratiquer autant que possible. Je dois
m'entraîner à partir de ce jour !
Cultivez cette aspiration, encore et encore.

CONTEMPLATION 46 :
La Perfection de la Générosité
Si je dois m’engager dans la conduite d’un bodhisattva, je dois commencer par m’entraîner à la
perfection de la générosité. La générosité peut être classée en trois types : la générosité matérielle, la
générosité consistant à offrir une protection contre la peur et la générosité consistant à offrir le Dharma.

1. La générosité matérielle : je donnerai généreusement à tous les êtres sensibles jusqu'à ce qu'ils soient
satisfaits.
Si vous n’êtes pas en mesure de donner autant, pensez :

101
Tib. Djang-Tchoub Sèmpa, བྱང་ཆུབ་སྐྱེམས་དཔའ།. Un bodhisattva (littéralement « un être héroïque de l’éveil ») fait généralement
référence à toute personne qui a pris les engagements Mahāyāna de l'esprit d'éveil, mais plus spécifiquement à une personne
qui s'efforce d'atteindre les Six Perfections (expliquées ci-dessous et voir Glossaire des classifications).
102
Les Six Perfections plus les Perfections des moyens habiles, de l'aspiration, de la force et de la sagesse (voir Glossaire des
classifications).

Page 63
L’Essence d’Ambroisie

Dans le futur, quand je serai un monarque universel, je donnerai tout ce que j’ai. Pour l’heure, je
donnerai toute la nourriture, les vêtements, etc. que je peux me permettre sans affecter
négativement ma pratique spirituelle. Sauf pour éviter de m’endetter ou de m’affamer, je dois par
tous les moyens abandonner absolument tout le reste. Je ne me contenterai pas d’en faire une simple
contemplation – je dois absolument mettre cette générosité en pratique !

2. Offrir une protection contre la peur : je protégerai tous les êtres sensibles des peurs telles que celles
causées par la maladie, les armes, les voleurs, le poison, par des prédateurs tels que les animaux
sauvages, les serpents venimeux, etc., par les précipices, les routes dangereuses, le feu, l'eau, les
agresseurs, jusqu'à et y compris la peur des royaumes inférieurs. Pour l’heure, je vais faire tout ce
que je peux pour protéger les autres des peurs de la maladie, des démons, des ennemis, des quatre
éléments, etc. Se contenter de le visualiser ne suffit pas : je le mettrai en pratique autant que possible
sans nuire à ma discipline morale et à ma pratique spirituelle. À tout le moins, je réconforterai les
autres avec des paroles utiles.
Tel est l’entraînement par application.
Offrir la protection contre la peur est synonyme de venir en aide aux êtres sensibles qui souffrent.
Ainsi, si le moment n’est pas approprié ou si la tentative d’aide devait impliquer des actions négatives, alors
la perte dépasse le profit et l’action est potentiellement dangereuse. Dans ce cas, bien que vous deviez
quand même vous entraîner mentalement, il n’est pas approprié d’agir.

3. Offrir des enseignements : entraînez-vous en songeant : Je satisferai tous les êtres sensibles en
donnant des enseignements spirituels. En enseignant la vérité, je ferai mûrir les êtres qui n’ont pas
encore mûri. Je libérerai ceux qui ont mûri. Je ferai comprendre à ceux qui ne comprennent pas. Je
ferai réaliser ceux qui n’ont pas encore réalisé. Je ferai en sorte que ceux qui n'ont pas encore atteint
la liberté l'atteignent. De plus, à l'heure actuelle, si j'ai la capacité d'expliquer la vérité, je devrais me
rendre utile aux autres en la leur expliquant sans égard pour la richesse et la renommée. Si je ne suis
pas quelqu’un qui peut faire cela, je devrais aspirer à enseigner la vérité aux humains et aux non-
humains. Tout en cultivant cette intention, je devrais réellement m'engager dans la récitation de
sūtras et le chant de textes. Je ne me contenterai pas de le visualiser : je vais véritablement le mettre
en pratique. Je m’entrainerai au moyen de l’application.

Ainsi, les trois types de générosité ont à la fois un aspect contemplatif et un aspect d’engagement. Il
existe donc au total six modes d’entraînement. Si vous les mettez tous ensemble, c’est l’entraînement à la
Perfection de la Générosité.

CONTEMPLATION 47 :
La Perfection de la Discipline Morale
Appliquez le concept des méthodes contemplatives et engagées d’entraînement à toutes les
Perfections qui suivent.
Chapitre Douze : L’Entraînement à la Mise en Application de l’Esprit d’Éveil

Ensuite, je devrais m'entraîner à la Perfection de la Discipline Morale. Il existe trois types de discipline
morale : la discipline morale qui restreint les conduites erronées, la discipline morale qui rassemble les
attributs vertueux et la discipline morale qui accomplit le bien des êtres.
1. La discipline morale qui restreint les conduites erronées : globalement, je dois éviter toutes les
actions qui sont manifestement mauvaises, comme les dix actions non vertueuses. En particulier, je
ne dois transgresser aucun des préceptes que j'ai pris tels que les vœux laïcs, de novice ou
monastiques ; le vœu de l’entraînement du bodhisattva ; ou les engagements du mantra secret. En
bref, je me détournerai de tout ce qui est considéré comme erroné dans le canon bouddhiste. Je dois
m'y entraîner immédiatement !
2. La discipline morale qui rassemble les attributs vertueux : sans me limiter à un seul type d'action
vertueuse, je m'entraînerai constamment à tout ce qui est inclus dans les Six Perfections. À partir de
maintenant, je vais pratiquer cela autant que possible.
3. La discipline morale qui accomplit le bien des êtres : j'accomplirai le bien des êtres en les établissant
dans divers types de bonheur et de vertu. À partir de maintenant, j’aiderai autant que possible –
autant que j’en suis capable – les êtres sensibles et les amènerai au bonheur.

Restreindre les comportements erronés n’est pas quelque chose que je peux remettre à plus tard.
Dès que j’apprends qu’une action est moralement mauvaise, je dois arrêter cette action et m’en
détourner. Parmi deux futurs possibles, un seul se réalisera. Par conséquent, je dois utiliser toute la
force d’esprit dont je dispose pour pratiquer maintenant autant que possible. Si je ne pratique pas
maintenant, j'accepte tacitement de devenir un simple objet de prière pour les autres103. Si un
bodhisattva n’œuvre pas au bénéfice des autres, c'est une faute monumentale ! Par conséquent, je
dois cultiver la discipline morale consistant à accomplir le bien des autres. Parce que je dois faire
mûrir mon propre esprit pour pouvoir aider les autres, je dois pratiquer des actions vertueuses. Il ne
suffit pas d'être moi-même exempt de fautes, mais il est important, comme base de départ, de
restreindre les comportements erronés. Sans cette base, même si j’essaie de développer les deux
autres aspects de la discipline morale, le résultat ne sera pas satisfaisant.

CONTEMPLATION 48 :
La Perfection de la Patience
Il existe trois types de patience : la patience de ne pas peser le mal, la patience d’accepter la
souffrance et la patience de la certitude quant à la vérité.
1. La patience de ne pas peser le mal : quand quelqu’un me fait du mal en me battant ou en volant mes
richesses, je réagis avec impatience et colère. Mais comment puis-je être impatient face à des
préjudices aussi insignifiants qui sont la cause me permettant d’accomplir la bouddhéité104 ? Même
si les êtres sensibles des trois royaumes deviennent mes ennemis et me font du mal de toutes sortes

103
L’idée ici est que les personnes qui ne s’engagent pas elles-mêmes dans des actions méritoires ne peuvent qu’espérer être
aidées par les prières d’aspiration et la gentillesse des autres.
104
Parce qu'un bodhisattva doit perfectionner sa patience pour atteindre la bouddhéité, le mal est une cause indirecte de l’Éveil.

Page 65
L’Essence d’Ambroisie

de manières, je m'enracinerai fermement dans la patience. Si je ne peux pas être patient face à un
tel mal, mon espoir d’atteindre la bouddhéité et mon espoir de devenir une personne religieuse ne
sont qu’une illusion.
2. La patience consistant à accepter la souffrance : lorsque je pratique la religion, je rencontre parfois
des souffrances liées à la chaleur, au froid, à la faim, à la soif, etc. Certaines fois, je devrai voyager sur
des routes dangereuses, j'aurai du mal à établir des conditions favorables pour la pratique et je
pourrai me sentir déprimé, fatigué et découragé. Ce ne sont là que des difficultés insignifiantes !
Comment puis-je ne pas être patient ? Afin d’obtenir la richesse ou une femme, j’endurerais sans
hésitation des souffrances cent ou mille fois plus grandes que cela. Afin d’atteindre la bouddhéité, je
dois d’abord suivre l’exemple des bodhisattvas qui m’ont précédé. Si je suis impatient face à ces
épreuves minimes endurées au nom de la religion, mon engagement envers le Mahāyāna est une
plaisanterie.
En pensant ainsi, appliquez fermement et immédiatement le remède de la patience.
3. La patience de la certitude concernant la vérité : être certain de la vérité signifie ne pas être intimidé
par les méthodes profondes, par les divers moyens habiles, par la vaste activité, par les qualités
infinies, par la vraie nature au-delà des élaborations, etc. Cela implique également d’être capable de
laisser l’esprit reposer dans la vacuité pendant une période prolongée. De même, je devrais
considérer tout le mal et la souffrance dont je fais actuellement l’expérience comme une illusion ou
un rêve. Puisqu’ultimement ils sont vides, apparents et pourtant dépourvus d’existence réelle, à quoi
bon s’impatienter ?

CONTEMPLATION 49 :
La Perfection de la Diligence
Ensuite, je dois m'entraîner à la Perfection de la Diligence. Il existe trois types de diligence : la
diligence semblable à une armure, la diligence de l’application et la diligence qui ne fait pas machine arrière.
1. La diligence semblable à une armure : je ne serai pas méprisant, pensant que parmi toutes les
activités vertueuses, je n'ai pas besoin d'en observer certaines, et que donc il serait correct de tuer par
exemple. De même, je ne serai pas timide, estimant que certains projets vertueux sont trop grands pour
être entrepris. Au lieu de cela, j’accomplirai toutes les activités vertueuses. J’ai la capacité de toutes les
accomplir. Je vais les réaliser maintenant ! Je les accomplirai constamment !
Penser de cette manière, c’est avoir une attitude engagée, enthousiaste pour les actions vertueuses
et intrépide. Afin de faire de la vertu une habitude mentale, méditez de cette manière encore et encore.
2. La diligence de l'application : lorsque je mets en pratique les actions vertueuses, je ne céderai pas
à la paresse et aux distractions, mais je m'engagerai plutôt avec enthousiasme dans la vertu. Tout en restant
enthousiaste, je prolongerai autant que possible toute activité vertueuse.
3. La diligence qui ne fait pas machine arrière : si les signes de chaleur105 et les bienfaits de la pratique
n'apparaissent pas rapidement ou si un projet que je commence ne peut pas être réalisé facilement, peu

105
Les « signes de chaleur » font référence aux signes qui accompagnent une pratique de méditation réussie.
Chapitre Douze : L’Entraînement à la Mise en Application de l’Esprit d’Éveil

importe combien de temps cela durera ou combien d'épreuves je devrai endurer, je ne laisserai pas mon
enthousiasme faiblir. L’une des instructions orales des manuels pédagogiques précise :
La diligence du corps est cultivée à travers les prosternations et les circumambulations, etc. La
diligence de la parole est cultivée par la récitation, le chant, etc. La diligence de l'esprit se cultive de
manière générale grâce à la vertu et plus spécifiquement par l'enthousiasme envers la pratique
spirituelle.
Puisque ce sont là les différentes formes de diligence, je m’efforcerai d’être diligent de cette manière.
Ne cédant pas à la paresse et à la procrastination, je pratiquerai la vertu avec enthousiasme.

CONTEMPLATION 50 :
Les causes de l'absorption parfaite
Je dois désormais m'en tenir aux causes de l'absorption106. Pour que l’absorption se développe, je
dois réduire mes objectifs et mes occupations. Pour réduire mes objectifs, je dois avoir peu de désirs et
savoir me contenter [de ce que j’ai]. Pour avoir peu de désirs, je dois me satisfaire de peu de nourriture, de
vêtements, d’un logement et d’un lit médiocre. Quelles que soient mes possessions, je ne m'y attacherai
pas, mais je méditerai pour développer le samādhi107. Si je n'ai aucune possession, je considérerai le
dénuement comme une bonne chose et non comme un obstacle au Dharma. Quoi qu’il arrive, je m’en
contenterai.
Contemplez de cette façon, encore et encore.

CONTEMPLATION 51 :
La Perfection de l'Absorption – La contemplation principale
Bien qu'il existe de nombreuses classifications de l'absorption, cette contemplation en considérera
trois : l'absorption qui demeure tranquille avec les phénomènes visibles est l'atteinte de la tranquillité de
flexibilité mentale et physique. L'absorption qui réalise l'émergence de bonnes qualités entraîne
généralement l'acquisition de la clairvoyance, la capacité d'accomplir des miracles, etc. L'absorption qui
accomplit le bien des êtres bénit l'esprit des autres en s'appuyant sur le pouvoir de la transe ou agit au
profit des êtres sensibles en s'appuyant sur divers types de clairvoyance. Pour maîtriser ces absorptions, je
dois cultiver un état de tranquillité sans faille et perfectionner les attributs [requis pour une méditation
réussie]. Je commencerai par reposer l’esprit uniformément dans la tranquillité. Ensuite, j'accomplirai
toutes les autres transes particulières.
Méditez de cette manière, encore et encore.

106
Skt. Dhyāna Tib, Samtèn (བསམ་གཏན།). Ce mot fait référence à l'absorption méditative, un état de concentration en un seul point
doté des attributs de clarté, de bonheur et de relaxation (voir Glossaire des termes techniques et des noms propres :
« absorption »).
107
Voir la remarque 28.

Page 67
L’Essence d’Ambroisie

{À ce stade, il est bon de donner une explication concise de la méditation de la tranquillité [ou
calme mental, śamatha] jusqu'à ce que le disciple en ressente la certitude108. Cependant, bien
qu'il soit effectivement utile de conférer des instructions sur la méditation de la tranquillité à
ce stade, la méditation du disciple n'a pas besoin de devenir stable : elle est suffisante pour que
le disciple acquière une certaine certitude et acquière une certaine expérience. De plus,
l'intention de tous les grands textes est que le disciple réalise la perspicacité [ou vision
pénétrante, vipaśyanā] en atteignant d'abord un état de tranquillité excellent et stable, puis en
maintenant la vision par la suite. C’est bien la voie tracée dans les grands textes.
Cependant, les gens d’aujourd’hui ont des facultés émoussées et mettent beaucoup de temps
à atteindre un état de tranquillité stable et sans défaut, et je crains qu’ils ne soient privés de la
possibilité de méditer sur la Perfection de la Sagesse. De plus, si le calme mental est atteint
dans le processus de recherche d’une expérience de la vue, la tranquillité peut être atteinte
simultanément avec la perspicacité.
Par conséquent, pour le confort des disciples au regard de l’enseignement et de la
compréhension, je n’ai pas expliqué ici en détail la pratique de la méditation de tranquillité.}

108
La Perfection de l'Absorption s'accomplit par la pratique de la méditation de tranquillité (Skt. Śamatha, Tib. Shi-Né ཞི་གནས།) et
la Pratique de la Sagesse s'accomplit par la pratique de la méditation perspicace (Skt. Vipaśyanā, Tib. Lhak-Thong ལྷག་མཐོང་།). Dans
cette section, Tāranātha n’explique pas les méthodes de la méditation de tranquillité, laissant apparemment cela à l’instructeur.
Une présentation des méthodes de la méditation de tranquillité peut être trouvée dans Mahāmudrā : The Quintessence of Mind
and Meditation de Takpo Tashi Namgyal et dans un certain nombre d'autres sources.
Chapitre Treize : La Sagesse

CHAPITRE TREIZE :
LA SAGESSE

CONTEMPLATION 52 :
La Perfection de la Sagesse
La Perfection de la Sagesse est la principale et la plus exceptionnelle de toutes les formes
d’entraînement et la pratique ultime parmi toutes les pratiques. Il existe trois sortes de sagesse : la sagesse
qui réalise la vérité ultime, la sagesse qui réalise la vérité relative et la sagesse qui sait comment venir en
aide aux autres.
La première est la sagesse qui réalise la vraie nature, la vacuité. La seconde est la sagesse qui réalise
sans erreur l’essence de tous les objets de connaissance, leurs classifications et l’interdépendance des
causes et des conditions. La troisième est la sagesse qui sait comment venir en aide aux autres grâce aux
quatre façons de rassembler des disciples. Celles-ci sont :
1. Donner : la première façon de rassembler des disciples est de donner des biens matériels et de savoir
inspirer les êtres de diverses manières à pratiquer la religion.
2. Parler agréablement : la deuxième façon implique de savoir parler agréablement lorsqu'on donne
des instructions religieuses appropriées aux dispositions de ces êtres.
3. Aider les autres : la troisième façon est de se familiariser avec la manière d'établir les autres dans
l'activité significative des Six Perfections.
4. Agir selon le sens109 : la quatrième façon implique d'aider les autres sans transgresser soi-même la
conduite des Six Perfections. Entre autres, établir autrui dans les Six Perfections implique de savoir
quelles méthodes sont appropriées pour quels disciples.

De plus, je devrais développer les sagesses de l’écoute, de la réflexion et de la méditation. Grâce à


l’écoute, la compréhension se développe. Par la réflexion, les doutes sont dissipés. Grâce à la méditation,
la véritable réalisation est atteinte. J’engendrerai assurément ces trois sagesses dans mon esprit.
Tel est l’entraînement général à la contemplation de la sagesse.

{Ensuite, vous devez vous entraîner à la pratique de la Perfection de la Sagesse. La pratique de


la sagesse comporte trois étapes : la méditation sur l’absence de soi des personnes, la
méditation sur l’absence de soi des phénomènes et l'entraînement à la vacuité dotée d'un cœur
de compassion.}

109
Selon Rigzin (1986) : 150, la dernière voie est « la cohérence entre les paroles et les actions ».

Page 69
L’Essence d’Ambroisie

CONTEMPLATION 53 :
L’absence de "soi" des personnes
Les préliminaires d'une séance et la conclusion sont les mêmes que ceux expliqués précédemment.
Pour la pratique principale, asseyez-vous avec les jambes croisées110 et les mains en position d'équilibre
méditatif. Redressez votre colonne vertébrale. Rentrez votre menton (littéralement, courbez votre cou).
Étirez vos épaules. Laissez votre mâchoire et vos lèvres se reposer naturellement. Joignez votre langue à
votre palais supérieur. Regardez le bout de votre nez. Expirez lentement et profondément par les narines
trois fois, puis respirez simplement naturellement. Tout d’abord, méditez intensément sur le renoncement
et la lassitude. Méditez ensuite sur l’amour et la compassion jusqu’à ce que vous vous sentiez profondément
ému. Enfin, concentrez-vous mentalement sur votre corps, votre parole et votre esprit – scrutez-les.
Contemplez comme suit :
Tout au long de l’existence cyclique sans commencement, m’étant habitué à m’accrocher au concept
du « je » en tant que « moi », je suis devenu convaincu qu’un soi continu existe. Cependant, ce « je » ou ce
« moi » n’a en réalité jamais existé.
C'est la base de la contemplation.
Si ce que l'on appelle un « je » ou un « moi » existe réellement, il doit y avoir quelque chose qui soit
désigné comme une entité personnelle indépendante, le soi de la personne. Mais l’existence matérielle
d’une telle chose n’a jamais été établie. Par conséquent, puisqu’aucune existence matérielle ne peut être
trouvée, l’essence du "soi" de la personne111 ne peut pas non plus être prouvée. Néanmoins, l’ego a le don
de s’accrocher à ce "moi" inexistant comme s’il existait réellement. Conformément à cette perception
trompeuse, je crois que le "moi" est permanent, singulier et indépendant. À partir de là, j'ai la pensée
« L'année dernière, j'ai fait ça » et « Cette année, je ferai ceci » et « Le "soi" de l'année dernière était
comme ça » et « Mon "moi" dans le présent est comme ça ». Penser que je continuerai à exister ainsi est
ce qu'on appelle « s'accrocher à un "soi" comme étant permanent ».
Lorsque ces pensées présentes surgissent, je considère les phénomènes extérieurs et intérieurs
comme étant autres que moi. Il me semble qu’il existe une essence d’un soi qui serait établie au cœur de
mon être et qui n’est pas mélangée à cette multitude d’expériences et d’apparences. C’est « s’accrocher à
un "soi" comme singulier ».
Il me semble que le "soi" est propriétaire de certains plaisirs, de certaines substances et possessions.
C’est « s’accrocher à un "soi" indépendant ». Même si ces différentes manières de s’accrocher sont mon
mode de perception, il n’est pas possible de prouver que les choses sont ainsi en vérité. Si le "moi" était
permanent, si j’éprouve du bonheur une fois, je devrais toujours le ressentir. Si je souffre une fois, je devrais
toujours souffrir. Si j’étais dès le commencement piégé dans l’existence cyclique, une période de libération
future ne se produirait jamais. De même, en utilisant la même logique inverse, si une période de libération
future survenait, cela signifierait qu’une existence cyclique antérieure n’a jamais eu lieu. Cependant, le

110
Cette position, appelée position en sept points ou position Vairocana, est une position où chaque pied repose sur la cuisse
opposée.
111
Ici, le mot « essence » indique une nature inhérente de la « personnalité » qui transcende tout cas individuel d'une seule
personne. Cette essence hypothétique reçoit le nom de « soi de la personne ».
Chapitre Treize : La Sagesse

bonheur et la souffrance sont tous deux ressentis et des incidents individuels d'esclavage et de libération
se produisent. Par conséquent, je devrais me résoudre au fait qu’il n’y a pas de "moi" permanent.
Le "soi" qui serait singulier n’est pas non plus une proposition acceptable. Bien qu’il semble que les
différentes parties qui composent le corps et l’esprit existent, les yeux ne sont pas le "soi". Les oreilles, le
nez, la langue et l’esprit ne sont pas non plus le "soi". Si chacun d’eux était le "soi", alors il y aurait plusieurs
"soi". Si aucun d’eux n’est le "soi", alors il est impossible de trouver un "soi". De plus, si le "soi" était un
agrégat, il devrait être éphémère112. S’il s’agissait de quelque chose d’autre qu’un agrégat, alors, lorsque
quelque chose est vu par la conscience oculaire, il entrerait en contact avec le corps entier de celui ou celle
qui voit113. J'aurais la perception que j'ai touché l'objet. Par conséquent, un « je » ou un « moi » qui aurait
pour nature la singularité n’est pas établi. Sa singularité n’étant pas établie, son indépendance ne l’est pas
non plus. De plus, puisque je peux clairement voir que tous les événements dépendent de conditions,
l’existence d’un "soi" indépendant est impossible. Un "soi" ne peut donc pas être établi en dehors des
agrégats. Un "soi" ne réside pas dans les agrégats. Chacun des agrégats pris individuellement n’est pas le
"soi". Le "soi" n’est pas une sorte d’enveloppe englobant les agrégats.
Le "soi" n’est pas constitué des agrégats pris comme un tout. Ce n’est pas un tout qui serait autre
que chacun des agrégats. Par conséquent, le soi-disant « soi » n’est qu’une simple imputation mentale, un
simple masque de confusion, seulement une distorsion. Ultimement, il n’existe pas du tout.

{Cette méditation sur l’absence de "soi" des personnes peut être divisée en plusieurs séances
de contemplation selon la capacité intellectuelle du disciple.}

CONTEMPLATION 54 :
L’absence de "soi" des phénomènes
Les phénomènes sont définis comme les agrégats, les constituants et les sources114. Les êtres ne les
perçoivent pas comme des imputations mentales : ils semblent exister comme des choses matérielles avec
une identité solide. Bien que le terme «"soi" des phénomènes » soit utilisé pour identifier les agrégats, les
constituants et les sources, une telle chose n’a jamais existé. Tous les phénomènes sont dépourvus d’un
"soi" des phénomènes. Quand bien même il en est ainsi, au fil des renaissances infinies dans l’existence
cyclique, je me suis habitué au concept qui perçoit les agrégats, les constituants et les sources comme
possédant une identité solide. Par conséquent, je dois de méditer sur l’absence de "soi" des phénomènes.

112
Le raisonnement ici est que les agrégats sont toujours sujets à détérioration.
113
Le raisonnement ici est que le "soi" est celui qui expérimente les phénomènes. Par conséquent, si l’un des agrégats tels que
la perception (visuelle) ne faisait pas partie du "soi", alors quelque chose d’autre (comme la forme du corps) devrait faire
l’expérience de l’objet. Pour une analyse détaillée de l’absence de "soi", voir Jeffrey Hopkins, Meditation on Emptiness.
114
Skt. Skandha, Dhātu, Āyatana, Tib. P’oungpo ཕུང་པོ། ; Kham, ཁམས། ; Kyé-Tché, སྐྱེ་མཆྐྱེད།. Les 5 agrégats, les 18 constituants et les 12
sources (voir Glossaire des classifications) constituent le continuum corps-esprit de chaque être sensible et déterminent la
nature de l'expérience individuelle et collective.

Page 71
L’Essence d’Ambroisie

Premièrement, je devrais méditer que les agrégats de mon propre continuum115 sont dépourvus de
nature véritable. Si j’examine le phénomène qu’est l’agrégat de la forme de mon corps, ce n’est rien d’autre
qu’un conglomérat de diverses choses qui semblent être une seule chose. Je lui appose le label générique
« corps » et je pense qu'il existe quelque chose qui équivaut à ce nom. Hormis pour ma perception cognitive
erronée, il n’existe pas.
Ce corps peut être séparé en parties distinctes telles que le sens visuel, le sens auditif, le sens olfactif,
le sens gustatif et le sens tactile. Il existe également des facultés intérieures qui s'appuient sur chacun des
sens mais qui ne sont pas la même chose que ces sens. L'agrégat de la forme du corps est composé de
diverses parties : la tête, le cou, la poitrine, le dos, la taille, le ventre, l'intestin, les deux bras, les deux
épaules, les deux coudes, les deux avant-bras, les deux mains, les deux cuisses, les deux mollets, les deux
pieds, les organes internes du corps tels que les cinq organes vitaux et les six organes secondaires, les neuf
orifices et ainsi de suite.
Hormis l’imputation mentale du « corps », cette collection n’est ultimement pas réelle. Si chacune de
ces parties était le corps, alors il y aurait plusieurs corps. Si le corps n’était constitué d’aucune de ces parties,
alors le corps ne pourrait pas être trouvé. Si je pense qu'il est l'ensemble des parties, je dois considérer que
le corps ne peut être autre chose que chacune de ses parties. Par conséquent, je suis obligé de conclure
qu’il s’agit simplement d’une imputation mentale.

CONTEMPLATION 55 :
L’absence de "soi" de l’agrégat de la forme
Pour souligner que l'agrégat de la forme n'est pas établi en tant qu'entité valide, réfléchissez comme
suit :
Chacun de mes quatre membres est composé de plusieurs parties. Il comporte une partie supérieure
et inférieure, un joint et son prolongement, un extérieur et un intérieur. Si je me demande « Chaque partie
est-elle établie comme une entité valide ?116 », ce n’est pas le cas. Chaque partie est reliée par trois joints
et ainsi de suite. Si je me demande « Chaque joint est-il finalement réel ? », ce n’est pas le cas.
Par exemple, les doigts ont de nombreuses articulations. Si je me demande « Chaque partie des doigts
est-elle établie comme une entité valide ? », ce n’est pas le cas. Chaque doigt comporte sept parties.
Chacune de ces parties n’est pas non plus réelle. Après avoir divisé mentalement les doigts en sept parties,
chaque partie peut être décomposée en particules grossières : particules de "soma", particules de "lumière
du soleil", particules de "vache", particules de "mouton", particules de "lapin", particules d'"eau", et les
particules de "fer"117.Chacune de ces particules, lorsqu'elle est divisée en sept parties, donne le type de
particule suivant dans la liste [chacune est sept fois plus petite que la précédente]. Si je me demande si la
particule de "fer" [la plus petite de cette liste] existe réellement, ce n’est pas le cas. Si je scrute la particule

115
Skt. Saṃtāna, Tib. Gyü, རྒྱུད།. Le terme « continuum » implique à la fois les composantes mentales et physiques d'un être
sensible.
116
À ce stade, la logique repose sur l’idée que quelque chose qui est « établi comme une entité valide » ne peut pas être divisé
en parties – qu’il s’agit d’une unité absolue.
117
Ce sont des noms standards pour ces particules et n’ont rien à voir avec les animaux et les éléments qui leur donnent leur
nom. C'est un peu comme nos noms d'éléments tels que "molécule de fer" et molécule de cuivre".
Chapitre Treize : La Sagesse

de "fer", elle est composée de sept particules « subtiles ». La particule « subtile » n’est pas non plus établie :
elle est composée de sept particules « infimes ».
En d’autres termes, lorsque j’examine et tente de mesurer le parcours des sept particules, chacune
des particules précédentes se divise en particules suivantes pour produire un total de 343 [7 x 7 x 7]
particules. Il existe donc au total sept types de particules grossières et quarante-neuf divisions possibles.
Même la plus petite de ces particules peut être divisée en sept.

CONTEMPLATION 56 :
L’absence de "soi" des particules minuscules
Si je me demande si une infime particule peut être établie comme une entité valide, ce n’est pas le
cas. Chacune a des côtés, un haut et un bas. Et chacune doit avoir une partie médiane. Si tel n’était pas le
cas, alors si je regardais la particule depuis l’est ou l’ouest, je serais incapable de la voir118.Si je divise de
cette manière chacune de ces particules en sept parties, on constate qu’elles ne sont pas établies. Cette
division peut se poursuivre à l’infini : le processus est sans fin. Par conséquent, ce que j'appelle le « corps »
est juste une imputation mentale. En réalité, son existence est totalement infondée. Par conséquent, ces
simples apparences illusoires, sans entrave, sont par nature primordialement non existantes. Sur la base
de cette logique, ces choses apparemment matérielles ne sont pas établies comme singulières.
Puisqu’elles ne sont pas établies comme singulières, elles ne peuvent s’établir comme multiples. Le
raisonnement est le suivant : pour prouver qu’un ensemble de plusieurs choses est établi, il faut d’abord
prouver qu’une chose [individuelle] peut être établie.

CONTEMPLATION 57 :
L’absence de "soi" des quatre autres agrégats
119Eh
bien, et si je pensais que, même si l’agrégat de la forme n’est pas réel, l’esprit est réel ? L’esprit,
lui aussi, peut être divisé en parties. La vision des formes, l'audition des sons, etc. constituent la conscience,
la partie principale de l'esprit. Il existe huit consciences distinctes120.L’existence de multiples agrégats de
conscience est donc confirmée.
Des sentiments tels que le bonheur, la souffrance et la neutralité sont également ressentis dans le
cadre de l’esprit. Par conséquent, le « sentiment » ne peut pas non plus être établi comme une entité
singulière. Il existe également des perceptions désignées par des termes définitifs tels que élevées et
basses, bonnes et mauvaises, etc. La « perception » ne peut donc pas être qualifiée de singulière. Enfin, il
existe de multiples concepts tels que l'attachement, l'aversion, la foi, etc. Tous ces concepts sont
collectivement appelés « formations mentales ». Par conséquent, la « pensée » n’est pas non plus une

118
Le raisonnement est que ce ne serait pas tridimensionnel.
119
Les quatre autres sont la conscience, la sensation, la perception et les formations mentales (voir Glossaire des classifications).
120
Les huit consciences sont les consciences visuelle, auditive, olfactive, gustative, tactile, la conscience mentale, la conscience
émotionnelle et la conscience fondamentale.

Page 73
L’Essence d’Ambroisie

entité singulière. Dans la mesure où ces aspects de l’esprit ne peuvent pas être établis comme singuliers,
ils ne peuvent pas non plus être établis comme multiples.

CONTEMPLATION 58 :
L’absence de "soi" de la conscience
Toutes les épithètes de la conscience ne font référence à rien d’autre qu’à cette conscience vive et
dynamique. Rien d’autre ne peut être établi comme vrai. Les phénomènes qui apparaissent à l'esprit sont
comme une montagne reflétée à la surface d'un lac121. Si j'examine cette conscience dynamique, l'esprit
du passé a cessé et, par conséquent, n'existe pas. L’esprit du futur n’est pas encore apparu ; par
conséquent, il n’existe pas non plus. La conscience momentanée actuelle est tout ce qui existe. Néanmoins,
de son propre chef, elle n’est pas établie comme vraie parce que ce moment unique de prise de conscience
ne peut être établi. Il peut être divisé en un début du moment, une partie où ce moment cesse et une
partie qui demeure au centre. Si j’examine cette partie médiane, elle peut également être divisée en trois
parties. De cette façon, je peux analyser à l’infini jusqu’à l’absurde. Rien ne peut donc être établi comme
ayant une essence singulière. Si l’on ne peut pas en établir une, beaucoup ne peuvent pas l’être non plus.

CONTEMPLATION 59 :
Méditation sur la vacuité de tous les êtres sensibles habitant le monde
Grâce à ce raisonnement, je peux conclure que les agrégats de mon propre corps ne sont pas réels.
Sur la base de cette conclusion selon laquelle les cinq agrégats composant mon corps et mon esprit ne sont
pas réels, je peux en conclure que les cinq agrégats constituant l'esprit et le corps de tous les êtres sensibles
sont exactement pareils.
En particulier, lorsque je me concentre sur un objet particulier qui génère des émotions fortes comme
un ennemi que je méprise ou un ami que j'aime, je peux analyser son corps de la même manière que j'ai
analysé le mien. Tout comme j’ai analysé l’ensemble que j’appelle mon esprit, je devrais analyser son esprit.
En imputant mentalement des noms à des personnes telles que « Lisa » et « George »122, je décide que
telle ou telle personne existe. Bien que j’effectue cette imputation erronée avec certitude, le fondement
de cette imputation n’existe pas du tout. C'est comme une illusion.

En vous entraînant de cette manière, appliquez ce raisonnement à toutes les circonstances.

121
Dans cette analogie, les agrégats, les constituants et les sources [qui définissent les « phénomènes »] sont assimilés à la
montagne. L'esprit est comparé au lac. Le reflet de la montagne [des phénomènes] dans l'eau [de l'esprit] est comme notre
perception des apparences. L'analogie du reflet d'une montagne [ou de la lune] dans l'eau est souvent utilisée pour indiquer la
nature illusoire des apparences.
122
Dans le texte tibétain, il est écrit « Chegemo » et « Gagemo », deux noms génériques.
Chapitre Treize : La Sagesse

CONTEMPLATION 61 :
La vacuité de l’environnement extérieur et de ses habitants
Toutes les choses matérielles – moi-même, les autres, l’environnement, ses habitants et les formes
que je vois et entends – sont composées des cinq éléments que sont la terre, l’eau, le feu, le vent et
l’espace. L'esprit, avec toute son énergie et son mouvement, est constitué des consciences.
Le raisonnement précédent, selon lequel rien ne peut être établi comme ayant sa propre existence
véritable au niveau le plus subtil, peut être appliqué aux quatre éléments matériels [terre, eau, feu et vent].
Tout comme un atome de terre n’est pas établi, cela peut s’appliquer aux autres éléments.
Ce que nous appelons « espace » est le vide dépourvu de toutes ces formes matérielles. Hormis le
fait d’être une imputation mentale, l’espace ne fait rien et n’a aucune existence manifeste. La conscience
n'est également qu'un aspect de l'apparence résultant de conditions adventices. À part cela, il est
impossible de l'identifier. Par conséquent, moi-même, les autres, l’environnement et ses habitants sont
tous par nature « non réellement existants ». Bien que les projections de l’esprit confus de chaque être
sensible soient sans entraves, elles sont dépourvues de nature inhérente, comme une illusion.

CONTEMPLATION 62 :
La méditation sur la liberté ultime vis-à-vis des élaborations
Les soi-disant « non-choses » sont simplement imputées par l'esprit en fonction d'un concept de
« choses ». Elles ne sont pas établies, même en tant qu’objets au niveau conventionnel et fonctionnel,
encore moins en tant que vérité ultime. En d’autres termes, puisqu’absolument rien n’existe
intrinsèquement et que tous ces phénomènes qui apparaissent ou sont entendus n’ont jamais été établis,
on peut également supposer que ce qu’on appelle « le phénomène de la vacuité originellement déracinée »
n’existe pas.
C'est comme l'exemple du fils d'une femme stérile. En premier lieu, il n’est pas possible qu’un enfant
naisse d’une femme stérile. Il n’est donc pas valable de dire que « le fils d’une femme stérile n’existe
pas »123. Ce type de vacuité dépend d'une idée de non-vacuité et est donc imputé mentalement. L'existence
et la non-existence, l'être et le non-être, etc. ne sont absolument pas établis.

Par conséquent, ne vous accrochez pas mentalement à quoi que ce soit et au lieu de cela, reposez
vivement dans un état de clarté et de non-conceptualité. Lorsqu’une pensée surgit à nouveau, examinez son
essence : elle est libre de toute identification. Méditez directement là-dessus. Il est important de méditer
lucidement encore et encore pendant de courtes périodes sur cette contemplation et sur la contemplation
précédente.

123
L'argument ici est que « le fils d'une femme stérile » (comme le vide ou la vacuité) est validé en discutant de son absence
d'existence. L’idée est absurde, donc d’autres preuves posées sur la base de cette idée sont invalides.

Page 75
L’Essence d’Ambroisie

CONTEMPLATION 63 :
Comment maintenir la méditation sur l’absence de soi et la vacuité
Ensuite, méditez en synthétisant toutes ces contemplations précédentes sur l’absence de soi et la
vacuité. Afin de synthétiser les compréhensions précédentes, réfléchissez comme suit :

Moi-même et les autres, le monde et ses habitants sommes tous dépourvus d’un soi véritablement
existant. Aucun créateur n’a fabriqué tout cela. Cela apparaît simplement en raison de l'assemblage de
connexions interdépendantes. Rien ne peut être établi comme existant en tant que une chose ou plusieurs
choses. Tout cela n’apparaît que comme le visage de l’illusion ; en réalité, rien de tout cela n’existe
vraiment. Si j’examine la question attentivement, « non établi » et « non existant » sont également des
attributs nouvellement fabriqués et créés par l’esprit. Pour indiquer quelque chose qui semble être le
contraire [de l'existence], je lui impute simplement les termes « non existant » et « non établi ».

En analysant ainsi d’avant en arrière, l’objet de concentration se dissipe. Dans la vacuité qui reste,
reposez-vous uniformément sans penser à rien. Une fois l’objet de concentration précédent éliminé, un état
apparaît, libre de toute identification. Tant que cela dure, restez dans cette non-conceptualité. Si cet état se
détériore, restez dans la simple non-conceptualité de la disparition de l'aspect de la vacuité. Parce qu'il est
nécessaire de répéter la méditation qui vient d'être décrite, il est important de reconnaître le point où
commence cette disparition [pour arriver à distinguer l'état de non-conceptualité et sa détérioration].
Au début, vous ne pourrez pas rester très longtemps dans cet état. À la fin, lorsque vous aurez compris
le but de l’expérience, vous serez en mesure de la maintenir pendant des périodes de plus en plus longues
qu’auparavant. La concentration de l'esprit sur l'objet de concentration124 est connue sous le nom de
« placement »125, et la prolongation de cette expérience est appelée « placement continu ». Lorsque vous
devenez capable d’arrêter vos pensées dès qu’elles surgissent, c’est le « placement répété ». Ensuite, lorsque
l'état de non-conceptualité s'étend sur des périodes de plus en plus longues, on parle de « placement
rapproché ». Finalement, en vous rappelant les bonnes qualités de la transe, vous commencerez à méditer
plus fréquemment et avec joie, et l'enthousiasme surgira. C'est l'étape dite « disciplinée ».
Parfois, en se remémorant les défauts tels que la distraction, la distraction cessera d'elle-même. Cette
étape est appelée « pacification ». Ces deux phases sont également connues sous le nom de « engendrer
l'enthousiasme » et « engendrer le renoncement ». Quelles que soient les pensées d'espoir et de peur,
d'attachement et d'aversion qui surgissent, regardez directement leur essence et scellez-les avec la
méditation sur leur irréalité que vous avez cultivée précédemment. Cette pacification naturelle est l'étape
connue sous le nom de « pacification rapprochée ».
Tant que votre esprit utilise parfois et perd parfois [sa pleine conscience], vous devez cultiver ces
méthodes encore et encore. À un moment donné, lorsque vous concentrez votre esprit, vous ne souffrirez
plus des défauts de l’ennui et de l’agitation et vous serez capable de reposer votre esprit pendant
longtemps sur l’objet de votre concentration, qui est la vacuité.

124
Dans le cas de cette méditation, l’objet central est la non-conceptualité.
125
À partir de là, Tāranātha décrit les neuf étapes du repos de l'esprit [ou calme mental] (voir Glossaire des classifications).
Chapitre Treize : La Sagesse

À ce moment-là, il est nécessaire de se concentrer, de se focaliser uniment sur le continuum mental.


Finalement, simplement en vous souvenant de l’expérience de la vision que vous avez cultivée auparavant,
vous serez capable de simplement reposer et demeurer longtemps dans l’aspect de la vacuité. À ce
moment-là, vous devez relâcher votre effort et reposer naturellement. À ce stade, vous avez atteint l’état
appelé « repos égal ».

{La manière de soutenir la méditation présentée ci-dessus vient de la tradition du Trésor de la


Phénoménologie. C’est l’unique façon de méditer le calme mental qui soit précédée par la vision
pénétrante. Elle peut être interprétée comme la même que la tradition présentée dans Les
étapes de la Méditation126 par Kamalaśīla et ainsi de suite, connue comme « la méthode de
méditation avec le précédent de la non-conceptualité ». Cela peut également être interprété
comme la tradition du glorieux Atiśa extraite des Annales127 du grand Maître Potowa appelée
« le seul préliminaire nécessaire ». Ces instructions sont conformes à la tradition des sūtras
telles que les nombreuses instructions sur l'entraînement de l’esprit transmises par Atiśa et aux
nombreuses instructions tantriques telles que les enseignements sur le Mahāmudrā.
Bien qu'il existe un grand nombre d'instructions qui adoptent cette approche, dans ce cas, j'ai
souhaité présenter les instructions de manière graduelle et j'ai donc dû m'appuyer sur les
enseignements de Shé-Nyèn Potowa128. Dans la tradition de Potowa du soutien de la vue, une
fois que l'esprit arrive au repos, alors la méditation de la vision pénétrante est à nouveau
pratiquée. On affirme également que, dès le début, la tranquillité et la perspicacité peuvent
être cultivées dans l'union.}

CONTEMPLATION 64 :
La vacuité avec le cœur de compassion
La réalisation de la vacuité seule ne suffit pas pour atteindre la Perfection de la Sagesse. Je dois
pratiquer la vacuité et la compassion en union. Parce que les phénomènes qui apparaissent et existent sont
composés, au niveau de la vérité ultime ils ne peuvent en aucun cas être établis comme ayant une existence
inhérente. Ils sont comme l'espace.
Si je réalise vraiment que seul le non-établissement des phénomènes est établi, alors les êtres
sensibles qui expérimentent la souffrance n'existent pas. La souffrance qu’ils ressentent n’existe pas. La
manière dont ils ressentent la souffrance en raison des interactions cycliques du karma, des émotions et
de la souffrance n’a jamais été primordialement établie. Néanmoins, jusqu’à ce que cette réalisation se
produise, l’apparence des êtres sensibles qui expérimentent la souffrance surgit. L'apparence de leur
souffrance surgit. La façon dont ils expérimentent la souffrance et la façon dont ils sont pris dans le cycle
surgissent. Tous ces phénomènes n’existent pas réellement et pourtant ils apparaissent. Malgré tout, les

126
Skt. Bhāvanā-krama, Tib. Gompa'i Rimpa, སོམ་པའི་རིམ་པ།.
127
Tib. Bé'ou Boum, བྐྱེའུ་བུམ།.
128
Potowa était un maître kadampa renommé et disciple de Guéshé Dromtönpa, འབོམ་སྟོན་པ།.

Page 77
L’Essence d’Ambroisie

êtres sensibles sont trompés par cette illusion et subissent donc ces diverses souffrances. Pauvres êtres
chers ! Après avoir dissipé leur illusion, je dois les établir dans la bouddhéité, la réalisation de la vraie nature.
Ultimement, moi non plus, je n'existe pas. Ces êtres sensibles n'existent pas. L'illusion n'existe pas.
Même le chemin qui dissipe l’illusion n’existe pas. Pourtant, du point de vue des apparences relatives et
confuses, souffrance et obscurcissements semblent exister. Le chemin semble exister. Grâce au chemin de
la méditation, l’illusion est dissipée et un individu devient un bouddha qui demeure dans l’essence de l’état
naturel. Par conséquent, mon "moi" semblable à une illusion montrera aux êtres sensibles semblables à
une illusion le chemin et l'enseignement semblables à une illusion. De cette façon, les adversités de leurs
souffrances semblables à une illusion seront libérées dans l’étendue.
Puisque toutes les expériences de souffrance et ceux qui en font l’expérience ne sont pas établis
comme existant réellement, il est également impossible d’établir tout phénomène de perception tel que
l’apparence ou le son comme existant réellement. Cependant, on pourrait affirmer l’extrême de la
permanence, suggérant qu’une seconde nature est surimposée à la nature inexistante. Dans ce cas, on
pourrait considérer qu’il y ait une souffrance réellement existante. Mais il n’existe aucun moyen
d’augmenter l’expérience d’une souffrance irréelle par une autre expérience de souffrance réellement
existante129. Si l’on réalisait que cette souffrance est inexistante, elle serait auto-libérée. Comme je ressens
de la compassion pour ceux qui ne s’en sont pas rendu compte !

Méditez, en réfléchissant de cette façon encore et encore.

129
En d’autres termes, la souffrance ne peut pas être à la fois inexistante et réellement existante.
Chapitre Quatorze : Les Moyens de Progresser dans la Pratique

CHAPITRE QUATORZE :
LES MOYENS DE PROGRESSER DANS LA PRATIQUE

SESSION 1 :
Perfectionnement
Afin d’améliorer les reconnaissances enseignées ci-dessus, méditez pendant un jour uniquement sur
la vacuité. Pendant une journée, méditez uniquement sur la compassion. Pendant une journée, méditez
sur la vacuité et la compassion en union comme décrit dans la contemplation précédente. Méditer de
manière répétée et alternée améliorera la pratique. Parfois, méditez pendant une séance uniquement sur
la vacuité. Méditez pendant une séance sur la compassion uniquement. Méditez pendant une séance sur
la vacuité et la compassion dans l’union. Méditer par moments de cette manière apportera une autre forme
de perfectionnement.

SESSION 2 :
Dissiper les obstacles
En pratiquant la méditation principale qui intègre la vacuité et la compassion, on risque de rencontrer
l’obstacle de l’attachement au bonheur de cette vie. La vie est pleine de joies, d'échanges agréables et de
conversations intéressantes. Certains pratiquants religieux se croient supérieurs aux gens ordinaires mais,
en attendant, s'accrochent à l'espoir de réussite. A défaut de développer un renoncement sincère, ils
blâment les autres et se protègent. Ils s’engagent dans des actions apparemment positives telles que
restaurer des temples, endurer des austérités et mendier des aumônes. Ils jouent le rôle de vertueux par
désir de nourriture. Ils accomplissent les pratiques des déités pour la gloire. Ils sont vaniteux et hypocrites.
Ils veulent secrètement que les gens aient foi en eux. Parce qu’ils espèrent vaincre les autres, ils les
calomnient et les trompent. Au nom de la religion, ils s’engagent dans des activités qui renforcent leurs
objectifs mondains. C’est le contraire de la vacuité et de la compassion, comme mélanger de la nourriture
avec du poison. Les attitudes et les actions qui sont dès le départ mondaines sont toujours négatives et,
par conséquent, répréhensibles. Cependant, il est encore pire de mélanger ces préoccupations avec la
religion et de les présenter sous le faux prétexte d’être positives. Pour remédier à ces tendances, rappelez-
vous encore et encore les contemplations destinées à la personne de moindre capacité.
Il y a aussi l’obstacle de s’attacher au bonheur futur des dieux et des humains. Si vous n’inversez pas
votre soif de bonheur mondain, vous pourriez paraître généreux, sembler préserver la discipline morale et
vous engager scrupuleusement et proprement dans des actions vertueuses. Mais si vous aspirez aux joies
d’amasser de la nourriture, des vêtements, des biens, une belle maison, des femmes, des amis, des
serviteurs et du pouvoir, alors la vacuité et la compassion sont devenues des interférences. En guise de
remède, méditez à plusieurs reprises sur les contemplations destinées à l’individu de capacité médiane.
Même si votre esprit se tourne vers la religion, vous ne pensez qu’à votre propre bien. C'est le
contraire de la vacuité et de la compassion. Pour remédier à cela, méditez sur l’égalité de vous-même et

Page 79
L’Essence d’Ambroisie

des autres et pratiquez l’échange entre vous et les autres. Il est très important de ne pas laisser la
méditation comme un simple exercice intellectuel mais d’atteindre la certitude en appliquant la
concentration directement sur votre propre corps et votre esprit.

Ces instructions sont explicitées dans les textes sur l'entraînement de l’esprit [par Atiśa] et sont
développées dans le Mode de vie du Bodhisattva et Le Compendium des Entraînements130. Le Bodhisattva
Maitreya a dit :
L’esprit quintessentiel est le même pour vous et pour les autres.
Lorsque vous découvrirez que les autres [méritent d’être] plus aimés et appréciés que vous,
Vous saurez que les objectifs des autres sont plus importants que les vôtres.
Quels que soient vos propres objectifs, ce sont aussi les objectifs d’autrui.

Lorsque vous méditez encore et encore sur la vacuité, l'objet à comprendre, vous aurez la pensée
"Rien n'est réel. Tout est comme une illusion". Puisque ce concept est susceptible de se dissiper, vous n’êtes
pas arrivé au point essentiel. Les pensées grossières concernant les ennemis, les amis, les plaisirs, les
conversations, etc. sont des éléments qui interfèrent avec la vacuité et la compassion. Par conséquent,
vous devez appliquer le concept des choses étant semblables à une illusion directement à votre propre
corps, votre esprit, vos possessions, vos ennemis et vos amis. Il est important d’atteindre ainsi une certitude
résolue et de la maintenir.

SESSION 3 :
Intégrer les pratiques
Ensuite, consacrez une journée à chacun des sujets suivants : la difficulté d’accéder à une vie
humaine ; la mort et l'impermanence ; les souffrances de l'existence cyclique ; action, cause et résultat ; la
foi en la religion ; l'esprit éveillé d'amour et de compassion ; et les deux absences de "soi". Durant chaque
séance, méditez parfois sur la séquence entière. Méditez-les parfois en sens inverse. Méditez parfois en les
mélangeant. De temps en temps, méditez sur vos défauts les plus forts, ceux qui nuisent le plus à votre
esprit. De temps en temps, Parfois, méditez sur ce à quoi vous vous sentez le plus enclin à vous concentrer.

SESSION 4 :
Que faire à tout moment
Pour votre pratique principale et continue de méditation, concentrez-vous sur quatre sujets : (1) le
rappel intense de l'impermanence, (2) l’attention et la retenue nées de la contemplation du sens de l'action
et du résultat, (3) la compassion pour tous les êtres dans les trois domaines de l'existence cyclique et (4) le
repos égal dans la vraie nature, libre d'élaborations.

130
Śāntideva. Compendium des entraînements. Sc. Śikṣā-samuccaya, Tib. Labpa Kün lé Tüpa, བསབ་པ་ཀུན་ལས་བཏུས་པ།.
Chapitre Quatorze : Les Moyens de Progresser dans la Pratique

Méditez sur les autres sujets par roulement, comme décrit ci-dessus. Passez du temps avec de saints
lamas qui pratiquent cet enseignement et avec des amis sains. Entre les séances, la lecture et l’écoute des
sūtras enrichiront votre pratique de la méditation. Trouvez la certitude dans l’enseignement. Invoquez avec
foi. En particulier, comme l'expriment les Annales131 de la tradition kadampa des étapes de la voie, il est
important et essentiel d'appliquer les enseignements directement à vos perspectives, pensées, résolutions
et objectifs.
Les quatre sujets mentionnés au début de cette session devraient être votre pratique continue,
complétée par l’entraînement destiné à dissiper les obstacles et induire une amélioration. Ces sujets ne
nécessitent pas de séances de contemplation spécifiques [ils peuvent être pratiqués à tout moment], mais
il n’y a aucune faute à le faire.

131
Potowa. Bé'ou Boum, བྐྱེའུ་བུམ།.

Page 81
L’Essence d’Ambroisie

ÉPILOGUE :
LA MANIÈRE D'OBTENIR LA FRUITION DE L’INSURPASSABLE ÉVEIL

{La meilleure façon de comprendre la manière dont l’Éveil peut être atteint est d'étudier les
traités originaux132. L'explication proposée ici ne peut être comparée à celle présentée dans les
sources originales. La signification essentielle selon maître Nāgārjuna est la suivante :
La discipline morale et la générosité profitent aux autres.
La diligence et la patience profitent à soi-même.
La méditation et la sagesse sont la cause de la libération.
La compassion atteint tous les objectifs...
Chacune de ces sept perfections sans exception est la sphère de l’insurpassable sagesse.
Un Protecteur du Monde les atteindra.
En s'entraînant à l'attitude de l'esprit d'éveil et à la conduite des Six Perfections, l'esprit reste
fixé sur la religion par son propre pouvoir et n'est pas distrait. La foi dans les Trois Joyaux, la
vigilance concernant l'action et le résultat, et le renoncement à l'existence cyclique surgissent
naturellement. Si vous développez un enthousiasme infatigable pour méditer sans distraction
les enseignements, peu importe que vous développiez ou non une transe stable : vous avez
saisi le point du chemin et le chemin mineur d'accumulation133 est né dans votre continuum.
Le chemin de l’accumulation lui-même est atteint lorsque vous parvenez, dans une certaine
mesure, à une compréhension claire de la signification de l’impermanence, de la souffrance,
de la vacuité et de l’absence de "soi". C’est ce qu’on appelle « l’absorption d’une conduite
naissante et imminente ». Ensuite, en développant le pouvoir de la méditation et le pouvoir de
l’accumulation de mérites, vous ferez l’expérience de la forme creuse, etc. Vous réaliserez que
les cinq agrégats sont comme une illusion et peu à peu vous acquerrez une compréhension
claire du caractère dépourvu de "soi" des phénomènes. C’est ce qu’on appelle « l’absorption
qui distingue complètement le sens ».
En commençant par le chemin de la vision et en passant par les dix niveaux de bodhisattva, naît
la sagesse qui réalise directement la liberté vis-à-vis des élaborations. C’est ce qu’on appelle
« l’absorption qui se concentre sur l’ainsité ». Du premier au septième niveau de bodhisattva,
le bodhisattva n'a qu'une compréhension partielle de « l'absorption vertueuse d'un
Tathāgata134». Aux huitième, neuvième et dixième niveaux, il y a la [version] inférieure,
moyenne et supérieure [de cette méditation]. Au niveau de la parfaite bouddhéité, il y a
« l’absorption vertueuse ultime d’un Tathāgata ». La quatrième absorption est la sagesse

132
Les traités originaux sont les œuvres du canon bouddhiste Mahāyāna.
133
Les cinq voies abordées ici sont la voie de l'accumulation, la voie de la jonction, la voie de la vision, la voie de la méditation et
la voie de la fin de l'apprentissage (voir Glossaire des classifications). Chaque chemin comporte trois niveaux : inférieur,
intermédiaire et supérieur.
134
Tathāgata est une épithète pour un Bouddha pleinement éveillé.
Épilogue

émergente qui réalise directement l’essence. Pour une explication détaillée, vous devriez
chercher ailleurs. Ces quatre absorptions ne se retrouvent pas dans les écrits mentionnés
précédemment dans ce texte : l'explication ici est basée sur le matériel trouvé dans les sūtras.
Au début, jusqu’à ce que vous compreniez le point essentiel du chemin, votre pratique
comportera un certain degré de défi. Il est donc important que vous abandonniez toute autre
activité et que vous vous appliquiez assidûment et exclusivement à la pratique de la méditation.
Après un certain temps, bien que vous deviez travailler pour accroître votre effort, la pratique
deviendra plus facile. À ce moment-là, élargissez vos activités : accumulez du mérite de diverses
manières et faites diverses prières d’aspiration. En entraînant votre esprit de cette manière, la
sagesse du chemin de la jonction apparaîtra. Par sa propre impulsion, cette sagesse se
développera et deviendra facile à comprendre. À ce stade, il y a beaucoup de karma négatif
subtil à abandonner, d’obstacles à dissiper et d’améliorations à affiner. Puis, progressivement,
surgira la sagesse qui réalise directement la véritable nature de tous les phénomènes. Vous ne
ferez alors l’expérience que de bonheur sur bonheur.
La bouddhéité du fruit est décrite comme suit : le corps d’essence135 est la sagesse simple de
la luminosité naturelle. Le corps de jouissance136 est celui qui fait tourner la roue ultime de la
vérité vers le pur cortège du Ciel le plus élevé. Le corps d'émanation137 est celui qui accomplit
le bien des êtres dans les royaumes impurs en les disciplinant de manière appropriée. Au moyen
de la sagesse, de l'amour et du pouvoir, l'activité éveillée [de ces corps] profite à tous les êtres
sensibles selon leurs propensions et les établit dans l’insurpassable félicité. Les informations ci-
dessus ne constituent pas nécessairement une séance : expliquez-les de la manière qui semble
appropriée au disciple. Ceci complète le commentaire intitulé « Entrer dans l'enseignement du
Bouddha138 ».}

135
Skt. Svabhāvikakāya, Tib. Ngowo-nyid Kou, ངོ་བོ་ཉིད་སྐུ། (voir Glossaire des classifications).
136
Skt. Saṃbhogakāya, Tib. Long-Kou, ལོང་སྐུ།.
137
Skt. Nirmāṇakāya, Tib. Trül-Kou, སྤྲུལ་སྐུ།.
138
L'un des titres que Tāranātha donne à L’Essence d’Ambroisie.

Page 83
L’Essence d’Ambroisie

ANNEXE
Cette section expliquera les rituels permettant d’engendrer l’esprit d’Éveil comme fruit de la pratique
et de prendre le vœu de bodhisattva. Cette section comporte deux parties : La Cérémonie de Génération de
l'Esprit d'Éveil et La Cérémonie de la Prise du Vœu de Bodhisattva.

1. La Cérémonie de Génération de l'Esprit d'Éveil

Disposer un support139 et des offrandes. Offrez un maṇḍala140. Répétez ensuite après le lama trois
fois :
Bouddhas et bodhisattvas qui résidez dans les dix directions, je vous en prie, posez votre regard
sur moi. Maître, je vous en prie, posez votre regard sur moi. Tout comme les Tathāgatas du
passés, les Conquérants, les parfaits Bouddhas pleinement éveillés et les bodhisattvas résidant
en les dix terres ont commencé par générer l'insurpassable et parfait esprit d'Éveil, de même
moi (votre nom) aussi – par le pouvoir de mon maître – je prie de générer l'insurpassable et
parfait esprit d'Éveil.

Après avoir répété ce passage trois fois, répétez-le encore trois fois, en remplaçant la dernière partie
par :
Moi (votre nom), à partir de maintenant et jusqu'à ce que j’atteigne le cœur de l’Éveil, je prends
réfuge dans le meilleur des êtres humains, les bouddhas transcendants. Je prends refuge dans
le meilleur des enseignements, l'enseignement de la paix libre d’attachement. Je prends refuge
dans la meilleure des assemblées, la communauté spirituelle des nobles bodhisattvas qui sont
au-delà de la régression.

La version étendue nécessite d'ajouter le verset « je vous en prie, posez votre regard sur moi » avant
chaque phrase de prise de refuge. Si vous faites une version condensée, ce qui est écrit ci-dessus est
suffisant. À ce stade, accumulez du mérite en répétant trois fois La Prière à Sept Branches issue de La Prière
d'Aspiration à l’Excellente Conduite [également traduite en français sous le titre La Prière d'Aspiration
Royale à la Conduite Noble et Excellente]141.

139
Un « support » est une représentation sacrée du corps, de la parole et/ou de l'esprit du Bouddha, généralement sous la forme
d'un tangkha, d'une peinture ou d'une statue (représentant le corps éveillé); un texte sacré (représentant la parole éveillée) ; et
un stūpa (représentant l'esprit éveillé).
140
Un maṇḍala est une représentation symbolique de l'univers.
141
Tib. Zangpo'i Tchöpa'i Mönlam, བཟང་པོའི་སྤྱོད་པའི་སྨོན་ལམ། La Prière d'Aspiration à l’Excellente Conduite, dont est tirée La Prière à
Sept Branches, est une longue prière souvent récitée au début des cérémonies et des rituels pour permettre aux participants de
purifier les actions négatives et d'accumuler des mérites (voir Note 20 pour La Prière à Sept Branches et voir Glossaire des
classifications).
Annexe

Vient ensuite la partie principale de la cérémonie. La demande à considérer est la même que ci-dessus.
Puis récitez :
Moi (votre nom), dans cette vie et dans toutes les autres vies, je m'engagerai dans les racines de
vertu : l'esprit de générosité, l'esprit de discipline morale et l'esprit de méditation. J’encouragerai les autres
à s’y engager et je me réjouirai de leur engagement. Par ces racines de vertu, tout comme les précédents
parfaits bouddhas, les conquérants victorieux et les grands bodhisattvas qui demeurent en les dix niveaux
ont engendré l'esprit d’Éveil, moi (votre nom), à partir de ce moment jusqu'à ce que j'arrive au cœur de
l’Éveil, je fais naître l’attitude du grand, parfait et insurpassable Éveil. Puissé-je guider les êtres sensibles
qui n'ont pas traversé. Puissé-je libérer ceux qui n'ont pas été libérés. Puissé-je abriter ceux qui sont
opprimés. Puissent ceux qui n’ont pas transcendé la souffrance transcender complètement la souffrance.
Répétez cette strophe trois fois.

Enseignez à partir des explications précédentes de l’entraînement à l'aspiration de l'esprit d'Éveil, soit
en version développée, soit en version abrégée. Une explication détaillée de l'entraînement et des
nombreux avantages de l'esprit d'Éveil est disponible dans des sūtras tels que Le Sūtra des Sept Dharmas
requis par le noble Avalokiteśvara et Le Sūtra de l’Ornement de Tiges [traduit également en français sous le
titre Soûtra de l'Entrée dans la dimension absolue]142. Vous pouvez les réciter.
Enfin, faites toutes les prières d’aspiration appropriées. Pour une conclusion abrégée, récitez « Par
ce mérite, puissent tous les êtres… » et ainsi de suite. Faites à nouveau des offrandes aux Trois Joyaux et
faites des offrandes au maître. Ceci est connu sous le nom de « La Cérémonie de Génération de l'Esprit
d'Éveil et d’Entrée en Refuge » et est la cérémonie d'aspiration de l'esprit d'Éveil.

{Avant la cérémonie, il n'est pas nécessaire de soumettre le disciple à une évaluation, et il n'est
pas nécessaire que le disciple ait initialement suivi l'un des huit types d'ordination laïque et
monastique143 comme préalable. Vous pouvez accorder le vœu à toute personne qui a envie
de le prononcer. Cette lignée génération de l’esprit d’Éveil, qui tire son origine de Maitreya, a
donné lieu à une cérémonie alternative de génération de l’esprit d’Éveil célèbre en Inde
composée par le maître, le noble Asaṅga. Elle est incluse dans un traité appelé La Corbeille du
Bodhisattva144 qui n'est pas celui du Tas de Joyaux145 145. L'intention du texte d'Asaṅga est en
harmonie avec ce qui est présenté ici.
Cette présentation était basée sur ce que l'on retrouve clairement dans la cérémonie de
génération de l’esprit d’Éveil composée par Atiśa.}

142
Skt. Gaṇḍa-Vyūha Sūtra, Tib. Dongpo Köpa'i Do, སོང་པོ་བཀོད་པའི་མདོ།.
143
Pour la liste, voir Glossaire des classifications.
144
Skt. Bodhisattvapiṭaka, Tib. Djang-Tchoub Sèmpa’i Dé-Nö, བྱང་ཆུབ་སྐྱེམས་དཔའི་སྐྱེ་སྣོད།.
145
Skt. Ratnakūṭa, Tib. Kön-Tsèg, དཀོན་བརྐྱེགས།.

Page 85
L’Essence d’Ambroisie

2. La Cérémonie de Prise du Vœu de Bodhisattva

{L’entraînement de base d'un véritable bodhisattva est largement enseigné dans les sūtras du
Mahāyāna : vous devriez donc étudier de nombreux sūtras. Alternativement, il est excellent
d'étudier les citations du Bodhisattva-bhūmi146 et de La Lettre à un Disciple car celles-ci
constituent l'essence de l'ensemble du Mahāyāna. Écoutez au moins147 b une transmission de
lecture d'un sūtra tel que Le Sūtra du Nuage de Joyaux148 ou Le Sūtra de l'Essence de l'Espace149.
Maintenir méticuleusement les étapes des instructions du chemin présentées dans ce volume,
c'est comme étudier le cœur du Mahāyāna. ... Cependant, il ne faut pas sous-estimer la valeur
de l'étude des mots originaux d'un sūtra du Mahāyāna.}

Pour vous préparer à prononcer réellement le Vœu de Bodhisattva, disposez les offrandes devant les
trois supports150. En faisant trois prosternations devant le Maître, joignez vos paumes et invoquez-le trois
fois :
Maître, je vous adresse la requête de prendre le pur vœu de discipline du bodhisattva
auprès de vous. Si aucun mal ne survient, je vous en prie, veuillez tourner vers moi votre
attention compatissante pendant un court moment et accordez-le moi.
Si vous avez mémorisé ces mots, vous pouvez les réciter seul. Sinon, vous devriez les réciter après le
maître ou un ami.
Alors le Maître dit : Noble enfant, écoute ! Souhaites-tu guider les êtres sensibles qui n’ont pas traversé?
Souhaites-tu libérer ceux qui n’ont pas été libérés ? Souhaites-tu abriter ceux qui sont
opprimés ? Souhaites-tu amener complètement au nirvāṇa ceux qui n’ont pas encore
atteint le nirvāṇa ? Désires-tu rejoindre la lignée ininterrompue du Bouddha ?
Le disciple répond : Tel est mon souhait.
Le Maître : Tu dois faire confiance à la génération de l’esprit d’Éveil et à la déité de méditation.
Souhaites-tu prendre ce vœu pour rivaliser avec les autres ?
Disciple : Non.
Le Maître : Prends-tu ce vœu sous la contrainte de quelqu’un d’autre ?
Disciple : Non.

146
Asaṅga. Tib. Djang-Tchoub Sèmpa’i Sa, བྱང་ཆུབ་སྐྱེམས་དཔའི་ས།.
147
Candragomin. Skt. Sisya-lekha, Tib. Lobma la Tringpa’i Tring-Yig, སོབ་མ་ལ་སིངས་པའི་སིང་ཡིག།.
148
Skt. Ratna-megha-sutra, Tib. P’agpa Rinpotché’i P’oungpo Shé-Djawa T’ègpa-Tchènpo’i Do, འཕགས་པ་རིན་པོ་ཆྐྱེའི་ཕུང་པོ་ཤྐྱེས་བྱ་བ་ཐྐྱེག་པ་ཆྐྱེན་
པོའི་མདོ།.
149
Skt. Ākāśagarbha-sūtra, Tib. Namkha'i Nyingpo'i Do, ནམ་མཁའི་སྙིང་པོའི་མདོ།.
150
Dans le cas de la prise du vœu, les supports idéaux sont le maître spirituel représentant le Bouddha, les textes sacrés
représentant le Dharma et les membres de la communauté spirituelle représentant le Saṅgha. Ou bien, les supports peuvent
être une statue représentant le corps éveillé, des textes représentant la parole éveillée et un stūpa représentant l’esprit éveillé.
Annexe

Faites ensuite des offrandes en récitant les versets « Les offrandes en général… » et ainsi de suite.
Adressez des louanges et des hommages en récitant tout ce qui est approprié, des versets tels que
« Protecteur, doté d'une grande compassion… » et ainsi de suite. Puis, avec révérence envers le Maître,
récitez trois fois cette supplication ou requête :
Disciple : Maître, je vous en prie, accordez-moi sans délai le pur vœu de discipline du bodhisattva.
Le Maître répond [Nom du disciple], noble enfant, es-tu un bodhisattva ?
Disciple : Je le suis.
Le Maître : Fais-tu des prières d'aspiration à l’Éveil ?
Disciple : Oui.
Maître : Noble enfant, écoute ! Souhaites-tu accepter les fondements de l’entraînement de tous
les bodhisattvas et les disciplines de tous les bodhisattvas ?
Disciple : Je souhaite les accepter.

Puis, pour la partie centrale de la cérémonie :


Le Maître dit : Vénérable et noble fils, [nom du disciple], recevras-tu de moi – le bodhisattva [nom du
Maître] – toute préparation à l’entraînement dans laquelle les bodhisattvas passés se
sont engagés et toute préparation à la discipline morale qu'ils ont préservée, toute
préparation à l’entraînement dans laquelle les futurs bodhisattvas s'engageront et toute
préparation à la discipline morale qu'ils préserveront, toute préparation à l'entraînement
que les Bodhisattvas actuels suivent actuellement dans les dix directions et toute
préparation pour l'entraînement à la discipline morale qu'ils préservent?
T’engageras-tu dans tout entraînement dans lequel tous les bodhisattvas du passé se sont
engagés, à tout entraînement dans lequel les bodhisattvas du futur se sont engagés et à
tout entraînement dans lequel les bodhisattvas du présent résidant dans les dix directions
s'engagent actuellement comme bases pour l’entraînement du Bodhisattva ?
Accepteras-tu toutes les disciplines morales des Bodhisattvas : la discipline morale des
vœux, la discipline morale qui rassemble les attributs vertueux, et la discipline morale qui
accomplit le bien des êtres ?
Recevras-tu ceci de ma part ?
Disciple : Je les recevrai complètement.

En répétant cet échange trois fois, le vœu de bodhisattva est éveillé.

Le Maître supplie maintenant les bouddhas et les bodhisattvas de lui prêter attention en récitant trois fois :
Le noble fils, le bodhisattva [nom du disciple] a parfaitement reçu de ma part, le
bodhisattva [nom du maître] et par trois fois le pur vœu de discipline d'un bodhisattva.
Ce bodhisattva [nom du disciple] a parfaitement accepté le vœu de discipline d’un
bodhisattva. Moi, [nom du Maître], j’ai agi en tant que témoin. Bien que les êtres nobles

Page 87
L’Essence d’Ambroisie

et suprêmes soient cachés, tous les phénomènes qui composent le monde ne le sont pas.
Par conséquent, veuillez prêter attention à ces engagements qui font partie du monde
phénoménal.

Il semble que le Maître devrait se tenir debout pendant qu'il chante ceci et disperser des fleurs dans
toutes les directions.
En réponse, le disciple fait trois prosternations devant les Trois Joyaux et le Maître et se rassied.

Le Maître dit : Maintenant que tu as prononcé le vœu de bodhisattva, tous les bouddhas et bodhisattvas
te considèrent comme leur enfant et leur frère ou sœur. Ils te protégeront et prendront
toujours soin de toi. Ils feront croître tes accumulations de mérite et de sagesse. Cet acte
de prise du vœu de bodhisattva ne doit pas être évoqué et doit être gardé secret pour
ceux qui manquent de foi. Désormais, abandonnes toujours les quatre ou huit chutes, les
46 fautes, etc. Deviens habile dans les méthodes de préservation de la discipline d’un
bodhisattva, en sachant peser la gravité des transgressions et en sachant manœuvrer au
sein des disciplines.

{Si vous souhaitez faire une version étendue de la Cérémonie du Vœu, vous pouvez parler ici
de manière générale de l’entraînement [d'un bodhisattva]. Habituellement, dans cette
tradition de prise du vœu de bodhisattva, une explication complète des entraînements est
donnée en premier et est suivie par la prise du vœu. Par conséquent, si vous n'expliquez pas
les entraînements durant de la cérémonie, vous ne commettrez pas la faute de la dénigrer.}

Enfin, faites des offrandes et consacrez la vertu à l’Éveil. Ceci conclut la Cérémonie du Vœu du
Bodhisattva.
Conclusion

CONCLUSION

{Ceci conclut "Les Étapes du Chemin pour Entrer dans l'Enseignement du Bouddha", également
connu sous le nom de "Les Pratiques et les Résultats qui Comprennent les Instructions pour les
Trois Types de Personnes ainsi que la Pratique de Génération de l'Esprit d'Éveil".
Toute personne souhaitant pratiquer le bouddhisme, même si elle ne s'intéresse qu'à la
tradition des sūtras, trouvera toutes les pratiques des sūtras contenues ici. De nos jours, les
pratiquants de la tradition des sūtras ne s’appuient sur aucun autre texte (ils insistent pour
garder leur lignée intacte). Ce Dharma lui-même a la bénédiction de la transmission des sūtras
et contient les principales pratiques qu’ils doivent entreprendre. Si ceux qui s’intéressent au
tantra ne commencent pas par ces pratiques, leur pratique du mantra secret risque d’être
déformée. Par conséquent, quiconque souhaite réaliser l’intention de tous les bouddhas et de
leur progéniture devrait s’entraîner à ces contemplations.}

Prière à la Lignée Kadampa


།ཐུགས་རྐྱེ་དབང་ཕྱུག་རྒྱལ་བ་བཅོམ་ལན་འདས། Thoug-Djé Wang-Tchouk Gyalwa Tchomdèndé
།རྒྱལ་ཚབ་དམ་པ་རྒྱལ་སས་མི་ཕམ་མགོན། Gyaltsab Dampa Gyalsé Mip’am Gön
།ཆོས་ཀུན་བདག་པོ་འཕགས་པ་ཐོགས་མྐྱེད་ཞབས། Tchö Kün Dagpo P’agpa Thogmé Shab
།ཀུན་མཁྐྱེན་གཉིས་པ་རྒྱལ་སས་དབྱིག་གཉྐྱེན་ལ། Kün-Khyèn Nyipa Gyalsé Djik-Nyèn la
།ཕག་འཚལ་སབས་སུ་མཆིའོ་གསོལ་བ་འདྐྱེབས། Tchag-Ts’èl Kyab-sou Tchi’o Sölwa Dèb

Puissant Seigneur de compassion, Victorieux Bhagavān ;


Sublime régent, Bodhisattva "Protecteur Invincible" [Maitreyanātha] ;
Maître de tous les Dharmas, Noble et Vénérable Asaṅga ;
Second omniscient, Bodhisattva Vasubandhu :
Je me prosterne devant vous, je prends refuge en vous et je vous adresse ma prière.

།མཆོག་སྐྱེ་ལ་སོགས་གསྐྱེར་གིང་རྒྱལ་པོའི་བར། Tchog-Dé lasog Serling-Gyalpo’i Bar


།རྒྱ་ཆྐྱེན་སྤྱོད་བརྒྱུད་བ་མ་མཆོག་རྣམས་དང་། Gya-Tchèn Tchö Gyü Lama Tchog nam dang
།རྒྱལ་སས་འཇམ་དཔལ་འཕགས་པ་ཀླུ་སྒྲུབ་སོགས། Gyalsé Djampèl P’agpa Lou-Droub sog
།ཟབ་མོ་ལྟ་བའི་བརྒྱུད་པ་མཆོག་རྣམས་དང་། Zabmo Tawa’i Gyüpa Tchog nam dang
།གསང་བདག་རྣལ་འབྱོར་མ་དཔལ་ཏིལི་སོགས། Sang-Dag Nèldjorma Pèl Tilli sog
།ཉམས་ལྐྱེན་བྱིན་རླབས་བརྒྱུད་པ་མཆོག་རྣམས་ལ། Nyamlèn Djin-Lab Gyüpa Tchog nam la

།གུས་པས་གསོལ་བ་འདྐྱེབས་སོ་བྱིན་གིས་རློབས། Güpé Sölwa-Dèb-so Djin gyi Lob

Tchog-Dé [Cakrasaṃvara ?] et les autres jusqu’au roi de Serling151 [Sumatra],

151
Tib. Serlingpa Tchö kyi Dragpa, གསྐྱེར་གིང་པ་ཆོས་ཀི་གགས་པ། (Xe siècle) était l'un des maîtres d'Atiśa.

Page 89
L’Essence d’Ambroisie

Suprêmes Lamas de la lignée de la Vaste Conduite ;


Bodhisattva Mañjuśrī, Noble Nāgārjuna, etc.‒
Suprêmes [Lamas de] la lignée de la Vision Profonde ;
Yoginī maîtresse du Secret, glorieux Tilli [Tilopa] et les autres ‒
Suprêmes [Lamas de] la lignée de pratique fondée sur la bénédiction ;
Respectueusement, je vous adresse ma prière : veuillez m’accorder votre bénédiction !

།ཡིད་བཞིན་ནོར་འདྲའི་ཐུགས་མངའ་ཏི་ཤ། Yishin-Nor Dra’i Thoug Nga Atiśa


།རྒྱལ་བའི་འབྱུང་གནས་འབོམ་སྟོན་རིན་པོ་ཆྐྱེ། Gyalwa’i Djoung-Né Dromtön Rinpotché
།མཁྐྱེན་པའི་དཀིལ་འཁོར་རབ་རྒྱས་པོ་ཏོ་བ། Khyènpa’i Kyil-Khor Rabgyé Potowa
།གཞུང་ལུགས་རྒྱ་མཚོའི་མཐར་སོན་ཤ་ར་བ། Shoung-Loug Gyamts’o’i Thar-Son Sharawa

Atiśa dont l'esprit est comme un joyau qui exauce les vœux,
Dromtön Rinpoché152, "Origine des Victorieux",
Potowa,"Pleine Expansion du maṇḍala de la Connaissance",
Sharawa153 qui a traversé un océan de traditions scripturaires,

།ཆོས་བཞིན་སྤྱོད་མཛད་གཏུམ་སྟོན་བོ་གོས་གགས། Tchö Shin Tchö-Dzé Toum-Tön Lodrö Drak


།བཀའ་གདམས་བསྟན་པའི་སོག་ཤིང་རོ་སྟོན་པ། Kadam Tènpa’i Sog-Shing Ngo Tönpa
།ཤྐྱེས་རབ་གགས་མཆན། Shérab Drak Tchèn
།ཡྐྱེ་ཤྐྱེས་གཟི་འོད་འབར་བའི་དཔལ་ལན་གོ། Yéshé Dji-Ö Barwa’i Paldèn Dro
།བདུད་རི་གགས་མཆན། Dütsi Drak Tchèn
བསབ་གསུམ་རྣམ་དག་སོ་སྟོན་སྐྱེང་གྐྱེ་སབས། Lab-Soum Namdak Kyotön Sèngué Kyab

Toumtön Lodrö154, qui agissait en accord avec le Dharma,


Arbre de vie des enseignements kadampas, Dotönpa
(également connu sous le nom de Shérab Drak)155,
Paldèn Dro qui flamboie de l’éclat majestueux de la Sagesse
(également connu sous le nom de Dütsi Drak)156,
Protecteur Kyotön Sèngué157, dont les trois entraînements étaient purs,

152
Tib. Dromtön Gyalwa’i Djoung-Né, འབོམ་སྟོན་རྒྱལ་བའི་འབྱུང་གནས། (1004-1064) fut l'un des principaux disciples d'Atiśa.
153
Sharawa Yöntèn Drak, ཤ་ར་བ་ཡོན་ཏན་གགས། (1070-1141), disciple de Potowa, fut l'auteur de deux textes importants du lamrim
Kadampa.
154
Toum-Tön Lodrö Drak, གཏུམ་སྟོན་བོ་གོས་གགས། (1106-1166) était un élève de Sharawa.
155
Do-Tönpa, གདོ་སྟོན་པ། (XIIe siècle) était un élève de Toumtön Lodrö.
156
Dromo Tchéwa Dütsi Drak, གོ་མོ་ཆྐྱེ་བ་བདུད་རི་གགས། (XIIe siècle), élève de Dotönpa, est l'auteur du Lam Tchog, ལམ་མཆོག། [La Voie
Suprême].
157
Sangyé Gompa Sèngué Kyab, སངས་རྒྱས་སོམ་པ་སྐྱེང་གྐྱེ་སབས། (1179-1250) fut l'élève de Palden Dro.
Conclusion

།ཆྐྱེ་དགུའི་གཙུག་རྒྱན་འཆིམས་ཆྐྱེན་ནམ་མཁའ་གགས། Tché-Gou’i Tsouk-Gyèn Tchim Tchèn Namkha Drak


།ནུས་མཐུའི་མངའ་བདག་སྨོན་ལམ་ཚུལ་ཁིམས་ཞབས། Nü-T’ou’i Nga-Dag Mönlam Tsültrim Shab
།འགོ་དོན་དཔག་མྐྱེད་ཟྐྱེའུ་གགས་པའི་མཚན། Dro-Dön Pakmé Zé’ou Drakpa’i Ts’èn
བརོན་འགྲུས་གགས་མཆན། Tsöndrü Drak Tchèn
།ཆོས་མངོན་རྒྱ་མཚོའི་མཐར་སོན་བོ་བཟང་འཆིམས། Tchö-Ngön Gyamts’o’i Thar-Son Lobzang Tchim

Ornement de la couronne des neuf grands, Tchim-Tchèn Namkha158,


Maître du pouvoir et de la force, Vénérable Mönlam Tsültrim159,
Celui qui accomplit des bienfaits illimités pour les êtres, Zé’ou Drakpa160,
(également appelé Tsöndrü Drak),
Maître de l’océan de l’Abhidharma, Lobzang Tchim161

།རྣམ་དག་ཐུགས་མངའ་གོ་སྟོན་ཀུན་རྒྱལ་བ། Namdak Thoug Nga Drotön Kün Gyalwa


།གྲུབ་པ་ཤྐྱེས་རབ་སྤང་སྟོན་ཆོས་ཀི་རྐྱེ། Droubpa Shérab Pangtön Tchö kyi Djé
།བོ་མཆོག་དམ་པ་བསོད་ནམས་མཆོག་གྲུབ་དང་། Lo Tchog Dampa Sönam Tchog-Droub dang
ཟབ་དོན་སོལ་འཛིན་དཔལ་ལན་དོན་གྲུབ་ཞབས། Zab-Dön Sol-Dzin Paldèn Döndroub Shab

Drotön Kün-Gyalwa162 qui possède un esprit pur,


Accompli Shérab Pang-Tön163, Seigneur du Dharma,
Intelligence sainte et suprême, Sönam Tchokdroub164,
Détenteur de la tradition du sens profond, Vénérable Paldèn Döndroup165,

158
Tchim Namkha Drakpa, མཆིམས་ནམ་མཁའ་གགས་པ། (1210-1267 ?), élève de Kyotön Sèngué, écrivit des textes sur le lamrim et la
logique.
159
Mönlam Ts’ül-T’rim, སྨོན་ལམ་ཚུལ་ཁིམས། (1219-1299) était un élève de Tchim-Tchèn Namkha.
160
Zé'ou Drakpa Tsöndrü, ཟྐྱེའུ་གགས་པ་བརོན་འགྲུས། (1253-1316), élève de Mönlam Tsültrim, fut abbé de Narthang pendant 12 ans.
161
Tchim Lobsang Drakpa, མཆིམས་བོ་བཟང་གགས་པ། (1299-1375), élève de Zeu Drakpa, fut l'auteur d'un commentaire sur le Trésor de
phénoménologie de Vasubandhu et fut abbé de Narthang pendant 39 ans.
162
Drotön Künga Gyalts’èn, གོ་སྟོན་ཀུན་དགའ་རྒྱལ་མཚན། (1338-1401), élève de Lobzang Tchim, fut abbé de Narthang pendant 27 ans et
auteur d'un commentaire sur le Compendium des Entraînements de Śāntideva.
163
Pangtön Droubpa Shérab, སྤང་སྟོན་གྲུབ་པ་ཤྐྱེས་རབ། (1357-1423), élève de Drotön Küngyalwa, est l'auteur d'un commentaire sur Le
Mode de Vie du Bodhisattva de Śāntideva.
164
Khèn-Tchèn Sönam Tchog-Droub, མཁན་ཆྐྱེན་བསོད་ནམས་མཆོག་གྲུབ། (1399-1452), élève de Shérab Pangtön, est l'auteur de deux
commentaires sur la pratique de l'entraînement de l’esprit.
165
Khèn-Tchèn Zöpa Pèl Droub, མཁན་ཆྐྱེན་བཟོད་པ་དཔལ་གྲུབ། (XVe siècle) était un élève de Sönam Tchokdroub.

Page 91
L’Essence d’Ambroisie

།ཐུགས་ཀི་སས་གྱུར་གནས་བརྟན་བསོད་ནམས་གགས། Thoug kyi Sé Gyour Né-Tèn Sönam Drak


།བྱང་ཆུབ་ཐུགས་ལན་ཀུན་དགའ་མཆོག་གྲུབ་ཞབས། Djangtchoub Thoug Dèn Künga Tchog-Droub Shab
།འཇམ་མགོན་གྲུབ་པའི་དཔའ་བོ་གོལ་མཆོག་རྐྱེ། Djamgön Droubpa’i Pawo Dröl-Tchog Djé
།སྐྱེ་མྐྱེད་དོན་གཟིགས་ལུང་རིག་རྒྱ་མཚོའི་ཞབས། Kyé-mé Dön Zig Loung-Rig Gyamts’o’i Shab
།དྐྱེ་ལྟར་ར་བརྒྱུད་བ་མ་ཐམས་ཅད་ལ། Détar Tsa-Gyü Lama Thamtché la
།གསོལ་བ་འདྐྱེབས་སོ་བྱིན་གིས་བརླབ་ཏུ་གསོལ། Sölwa-Dèb-so Djin gyi Lab-tou Söl

Sönam Drak166, arhat devenu fils de cœur,


Vénérable Künga Tchokdroub167 qui possède le cœur de bodhicitta,
Héros qui accomplit Maitreya, Seigneur Dröltchok168,
Vénérable Loungrik Gyatso169 qui voit la réalité non née :
À tous ces lamas racine et de la lignée,
J’adresse ma prière et je sollicite leur bénédiction.

།ཡང་ན་རྒྱལ་བའི་འབྱུང་གནས་ཀི་རྐྱེས་སུ། Yang na Gyalwa’i Djoung-Né kyi Djé-sou


།ཚུལ་ཁིམས་ཡྐྱེ་ཤྐྱེས་འབར་བའི་སྤྱན་མངའ་བ། Ts’ül-T’rim Yéshé Barwa’i Tchèn Ngawa
།བ་མ་དམ་པས་བྱིན་རླབས་བྱ་ཡུལ་བ། Lama Dampé Djin-Lab Dja-Yülwa
།གནས་ལུགས་མངོན་གྱུར་གཙང་པ་རིན་པོ་ཆྐྱེ། Né-Loug Ngön Gyour Tsangpa Rinpotché
།གདམས་ངག་རྒྱ་མཚོའི་མཐར་སོན་མུས་སྨན་པ། Dam-Ngak Gyamts’o’i Thar-Son Mü-Mènpa
།དྐྱེ་རྐྱེས་དཔལ་ལན་གོ་ནས་མཁན་ཆྐྱེན་བསོད་ནམས་མཆོག་ Dé Djé Paldèn Dro né Khèntchèn Sönam Tchog-Droub kyi Bar Gong Shing
གྲུབ་ཀི་བར་གོང་བཞིན།
De plus, à vous qui suivez "Origine des Victorieux" [Dromtönpa],
Qui avez les yeux qui flamboient de moralité et de sagesse,
Djayülwa170, béni par les saints lamas,
Tsangpa Rinpoché171, qui actualisa l'état naturel,
Mümènpa172 qui maîtrisa un océan d'instructions,
Après eux, depuis les cinq grands disciples173 jusqu'à Khènchèn Sönam Tchok-Droup174

166
P’ag-Tchog Drakpa Sönam, འཕགས་མཆོག་གགས་པ་བསོད་ནམས། (XVe siècle) était un professeur Sakya de Künga Tchokdroub.
167
Künga Tchog-Droub, ཀུན་དགའ་མཆོག་གྲུབ། (15e siècle) était un maître Sakya de Künga Dröltchok.
168
Djonang Djétsün Künga Dröl-Tchog, ཇོ་ནང་རྐྱེ་བཙུན་ཀུན་དགའ་གོལ་མཆོག། (1507-1565), auteur prolifique de textes Jonang, fut le
détenteur des transmissions Jonang, Shangpa et Kālacakra.
169
Pèn Loungpa Khèn-Tchèn Loung-Rig Gyamts’o, སྤྐྱེན་ལུང་པ་མཁན་ཆྐྱེན་ལུང་རིག་རྒྱ་མཚོ། (XVIe siècle) était le maître-racine de Tāranātha.
170
Dja-Yülwa Shönou Ö, བྱ་ཡུལ་བ་གཞོན་ནུ་འོད། (1075-1138), auteur d'un lamrim Kadampa, fut le fondateur du monastère Dakpo
Lhogyü Djayül.
171
Tsangpa Dordjé mi-Kyö, གཙང་པ་རོ་རྐྱེ་མི་བསོད། (XIe siècle) était un élève de Djayülwa.
172
Mü-Mènpa Dütsi Tchar-Tchèn, མུས་སྨན་པ་བདུད་རི་ཆར་ཆྐྱེན། (XIe siècle) était un élève de Djayülwa.
173
Les cinq disciples Kadampas de Djayülwa.
174
Sönam Tchog-Droub Drak Zang, བསོད་ནམས་མཆོག་གྲུབ་གགས་བཟང། (1399-1452).
Conclusion

[ou : et après eux, de Paldèn Dro jusqu’à Khènchèn Sönam Tchok-Droup comme évoqués précédemment]
དྐྱེ་ནས་ཡོན་ཏན་མཆོག་གྱུར་མཁན་ཆྐྱེན་ཀུན་རྒྱལ་བ། Déné Yöntèn Tchog Gyour Khèntchèn Kün-Gyèlwa
།མཁྐྱེན་རབ་རྣམ་དག་ཡྐྱེ་ཤྐྱེས་རིན་ཆྐྱེན་དང་། Khyèn-Rab Namdak Yéshé Rintchèn dang
།བརོན་པས་རྐྱེ་གཅིག་སྒྲུབ་མཛད་ལྷ་ཆུང་བ། Tsönpé Tsé-Tchik Droub-Dzé Lha-Tchoungwa
།བྱམས་པའི་མཚན་ཅན་ར་བའི་བ་མ་ལ། Djampa’i Ts’èn Tchèn Tsawa’i Lama la
།གསོལ་བ་འདྐྱེབས་སོ་བྱིན་གིས་བརླབ་ཏུ་གསོལ། Sölwa Dèb-so Djin gyi Lab-tou Söl

[Puis, à] celui qui possède les qualités suprêmes, Khènchèn Küngyalwa175,


À celui qui a une connaissance parfaite, Yéshé Rintchèn176,
À celui qui pratiquait sans distraction avec diligence, Lha-Tchoungwa177,
À mon Lama-racine nommé Jampa178 :
Je vous adresse ma prière et je sollicite votre bénédiction.

Vous pouvez compléter ces versets selon vos besoins, car de nombreuses lignées portent ces
enseignements. Vous pouvez ajouter des versets pour vos lignées spécifiques de transmission de textes et
d’instructions, en utilisant le format présenté dans la prière ci-dessus.
Ensuite, invoquez comme suit :

La foi pure : le chemin de la personne de moindre capacité ;


Le renoncement pur : le chemin de la personne de capacité médiane ;
L’attitude pure et excellente : le chemin de la personne de capacité supérieure :
Puissé-je atteindre les trois chemins purs !

Si la conscience de l'impermanence et de la mort ne naît pas dans mon continuum,


Quels que soient mes efforts, cela ne fera qu’augmenter mes tendances mondaines.
Bénissez-moi afin que je puisse être libéré des liens des huit préoccupations mondaines
Qui amènent mon esprit à s’éloigner de la religion une fois qu’il s’est tourné vers elle.

Si la confiance dans l’infaillibilité de l’action et du résultat ne s’éveille pas,


Toutes les activités religieuses se perdent dans un état de prétention au bien.
Même si vous essayez de compenser cela par une pratique sérieuse, cela passera pour autre chose.
Bénissez-moi pour que la confiance dans la vérité s'éveille !

175
Sonpa Künga Gyalwa, སོན་པ་ཀུན་དགའ་རྒྱལ་བ། (XIIIe siècle) est à l'origine de la tradition Son de la lignée Jonang.
176
Yéshé Rintchèn est le même que Lha-Tchoung (voir ci-dessous).
177
Lha-Tchoungwa Yéshé Rintchèn, ལྷ་ཆུང་བ་ཡྐྱེ་ཤྐྱེས་རིན་ཆྐྱེན། (XVIe siècle) était un élève de Künga Gyalts’èn.
178
Khé-Wang Djampa Lhündroub, མཁས་དབང་བྱམས་པ་ལྷུན་གྲུབ། (XVIe siècle) était l'un des maîtres de Tāranātha.

Page 93
L’Essence d’Ambroisie

Si l'amour et la compassion ne s'éveillent pas dans mon continuum,


Même si je m'efforce à la pratique, cela sera relégué au véhicule inférieur.
Portant la souffrance de tous les êtres comme mon fardeau,
Bénissez-moi afin que je puisse m'entraîner au suprême esprit d'éveil !

Si je ne réalise pas la vacuité où toutes les complications sont libérées,


Je n'appréhenderai pas tous les phénomènes comme étant semblables à une illusion
Et, perdu par la puissance de la saisie des attributs, mon esprit ne sera pas libéré.
Bénissez-moi afin que je puisse réaliser l'état naturel ultime !

{En rédigeant ce texte du Dharma, j'ai consulté les explications contenues dans La Lampe sur la
Voie vers l'Éveil, Le Commentaire sur les Deux Vérités179 et Les Instructions Spéciales sur la Voie
du Milieu180. J'ai également étudié le commentaire de Mümènpa, les enseignements graduels
de Boumpawa et le commentaire-racine de Potowa avec le suprême érudit Djampa Lhündroup.
Du grand érudit Loungrik Gyamts’o, j'ai reçu la transmission de lecture, l'explication détaillée
et la clarification expérientielle du commentaire-racine de Potowa, Les Annales, du
commentaire-racine181 de Narthanpa, La Voie Suprême182 182 et du commentaire-racine 183
de Tchim183, Enseignements quotidiens184.
Bien que j'aie étudié un certain nombre d'autres textes, ceux mentionnés ci-dessus sont les
principaux consultés dans la composition de ce livre.}

[Dédicace des mérites]


Grâce au mérite généré par ce simple résumé de
L’intention de tous les bouddhas et de leur progéniture,
Puissent tous les êtres sensibles, sans exception,
Atteindre rapidement l’état de Bouddha Omniscient !

179
Tchö kyi Sèngué (1109-1169), Ouma Dèn Nyi kyi Drèlpa, དབུ་མ་བདྐྱེན་གཉིས་ཀི་འགྐྱེལ་པ།.
180
Namkha Drak, Ouma’i Mèn-Ngak Sèl-Drön, དབུ་མའི་མན་ངག་གསལ་སྒྲོན།.
181
Dromo Tchéwa Dütsi Drak, གོ་མོ་ཆྐྱེ་བ་བདུད་རི་གགས། (XIIe siècle).
182
Lam Tchog, ལམ་མཆོག།.
183
Tchim Namkha Drakpa, མཆིམས་ནམ་མཁའ་གགས་པ། (1210-1267 ?).
184
Soung-Gyün, གསུང་རྒྱུན།
Conclusion

[Colophon]
L’Essence d’Ambroisie : Le Commentaire sur les Instructions
Destinées aux Trois Types de Personnes fut définitivement composé
par Tāranātha, « le vagabond »185.
Le format de ce texte, comme une série de foyers de méditation
expliquant la manière dont le sens doit être compris par l'intellect du
pratiquant, est basé sur les œuvres des saints du passé. Grâce à cette
composition, puissent les précieux enseignements se diffuser et
perdurer pour longtemps !

185
Surnom que Tāranātha se donnait lui-même (voir Introduction sur la vie de Tāranātha pour le tibétain). [En tibétain :
Gyalkyampa]

Page 95
L’Essence d’Ambroisie

GLOSSAIRE DES TERMES TECHNIQUES ET DES NOMS PROPRES

Absorption (Tib. Samtèn, བསམ་གཏན། ; Skt. Dhyāna) : cinquième des Six Perfections, l'absorption est la
pratique de la méditation du calme mental qui conduit à l'atteinte de la paix mentale et de la stabilité. Les
quatre absorptions et les neuf étapes de repos de l'esprit (pour les étapes, voir Glossaire des classifications)
entrent dans la catégorie de l'absorption.
Agrégat (Tib. P’oungpo, ཕུང་པོ། ; Skt. Skandha) : dans ce texte, le terme agrégat fait référence aux cinq
composantes de la vie sensible : la forme, la sensation, la perception, les formations mentales et la
conscience.
Arhat (Tib. Dra-Tchompa, དག་བཅོམ་པ།) : un individu qui s'est libéré des afflictions émotionnelles, mais
qui n'a pas atteint la pleine bouddhéité. L'atteinte de l'état d’arhat est le but des Auditeurs.
Atiśa (982-1054) : grand philosophe et enseignant indien, considéré comme fondateur de l'école
kadampa. Son œuvre La Lampe pour le Chemin vers l'Illumination est devenue le prototype de la littérature
des étapes du chemin.
Esprit d'Éveil (Tib. Djang-Tchoub kyi Sèm, བྱང་ཆུབ་ཀི་སྐྱེམས། ; Skt. Bodhicitta) : au niveau relatif, l'esprit
d'Éveil est le désir de s'éveiller au profit des êtres sensibles, ainsi qu'une attitude de bienveillance et de
compassion. Au niveau ultime, il s’agit d’une profonde compréhension non conceptuelle de la nature de
tous les phénomènes.
Bodhicitta (Tib. Djang-Tchoub kyi Sèm, བྱང་ཆུབ་ཀི་སྐྱེམས།) : voir « esprit d’Éveil ».
Bodhisattva (Tib. Djang-Tchoub Sèmpa, བྱང་ཆུབ་སྐྱེམས་དཔའ།) : un être qui a généré le désir d'amener tous
les êtres à l'illumination et qui pratique les six Pāramitās. Parfois, ce terme fait référence à de nobles
Bodhisattvas, qui ont atteint une vision directe de la vacuité.
Bouddha (Tib. Sangyé, སངས་རྒྱས།) : Un être qui a purifié tous les obscurcissements de l'esprit et qui a
perfectionné toutes les qualités de l’Éveil.
Bouddha (Tib. Sangyé, སངས་རྒྱས།) : Le fondateur du bouddhisme qui vécut vers le Ve siècle avant JC.
Brahmā (Tib. Ts’angpa, ཚངས་པ།) : Roi des dieux dans le domaine de la forme.

Demi-dieux (Tib. Lha-min, ལྷ་མིན། ; Skt. asura) : Un type d'être qui vit dans le royaume des demi-dieux.
Les demi-dieux ont des corps mentaux subtils, sont affligés par la jalousie et expérimentent la souffrance
des combats avec les dieux.
Dharma (Tib. Tchö, ཆོས།) : L'enseignement du Bouddha.
Auditeur (Tib. Nyèn-Thö, ཉན་ཐོས། ; Skt. Ṡrāvaka) : Un adepte du Hīnayāna qui écoute les paroles du
Bouddha et aspire à l'illumination pour sa propre paix et son bénéfice.
Hīnayāna (Tib. Thègpa Tchoung-Ngou, ཐྐྱེག་པ་ཆུང་ངུ་།) : La tradition du « véhicule fondateur » qui
soutient la doctrine de la discipline personnelle comme moyen d'atteindre l'illumination.
Glossaire des Termes Techniques et des Noms Propres

Fantôme affamé (Tib. Yidak, ཡི་དྭགས། ; Skt. Preta) : Une espèce d'être qui vit dans le royaume des
fantômes affamés, affligés par la souffrance de la faim et de la soif. La principale affliction qui conduit à la
naissance dans ce royaume est l’avidité.
Indra (Tib. Gya-Djin, བརྒྱ་བྱིན།) : Roi des trente-trois royaumes des dieux.
Karma (Tib. Lé, ལས།) : (1) action (2) les effets produits par les actions passées, y compris les tendances
habituelles latentes.
Mahāyāna (Tib. Thègpa Tchènpo, ཐྐྱེག་པ་ཆྐྱེན་པོ།) : La tradition du « grand véhicule » pratiquée au Tibet
qui épouse les doctrines de l’esprit d'Éveil, de la compassion, de la sagesse et de l’absence de "soi" comme
principes de base.
Nāgārjuna (Tib. Lou-Droub, ཀླུ་སྒྲུབ།) : philosophe indien ayant vécu aux Ier et IIe siècles, auteur de
plusieurs ouvrages fondateurs sur la doctrine de la voie du milieu.
L’entité propre [ou intrinsèque] de la personne (Tib. Gang-Zag gui Dag, གང་ཟག་གི་བདག། ; Skt.
Pudgalātman) : L’existence inhérente d’une personne nominalement existante186 est utilisée pour faire
référence à l’idée fausse qui impute une existence inhérente aux êtres sensibles.
L'entité propre [ou intrinsèque] des phénomènes (Tib. Tchö kyi Dag, ཆོས་ཀི་བདག། ; Skt. Dharmātman) :
L'existence inhérente des phénomènes, utilisée pour désigner le concept erroné qui impute une existence
inhérente aux phénomènes,
Śāntideva (Tib. Shiwa Lha, ཞི་བ་ལྷ།) Grand poète et bodhisattva indien ayant vécu au 7ème siècle,
auteur du Mode de vie des bodhisattvas.
Réalisateur solitaire (Tib. Rang-Sangyé, རང་སངས་རྒྱས། ; Skt. Pratyekabuddha) : bouddhas auto-libérés
qui ont atteint un état de paix mais qui n'aspirent pas à enseigner ou à aider directement les êtres sensibles.
Trois Joyaux (Tib. Köntchog Soum, དཀོན་མཆོག་གསུམ། ; Skt. Triśaraṇā) : Le Bouddha, le Dharma et le
Saṅgha : Les sources de refuge pour les bouddhistes.
Transe (Tib. Ting-Ngé Dzin, དིང་ངྐྱེ་འཛིན། ; Skt. Samādhi) : L'état d'absorption paisible qui découle de la
pratique de la méditation du calme mental.
Vajrayāna (ou mantra secret) (Tib. Dordjé Thègpa, རོ་རྐྱེ་ཐྐྱེག་པ།) : Le « véhicule du diamant », le
bouddhisme tantrique, met l'accent sur les pratiques de visualisation des dèités, la récitation de mantras
et la non-conceptualité comme méthodes pour atteindre l'illumination.

186
Hopkins. Meditation. (1983): 175.

Page 97
L’Essence d’Ambroisie

GLOSSAIRE DES TERMES DE CLASSIFICATION AVEC LE TIBÉTAIN

Les deux absences d’entité propre བདག་མྐྱེད་གཉིས། Dag-mé Nyi


L’absence d’entité propre de la personne གང་ཟག་གི་བདག་མྐྱེད། Gang-Zak gui Dag-mé
L’absence d’entité propre des phénomènes ཆོས་ཀི་བདག་མྐྱེད། Tchö kyi Dag-mé
Les Trois Joyaux དཀོན་མཆོག་གསུམ། Köntchok Soum
Bouddha སངས་རྒྱས། Sangyé
Dharma ཆོས། Tchö
Sangha དགྐྱེ་འདུན། Guèndün
Les Trois Véhicules ཐྐྱེག་པ་གསུམ། T’ègpa Soum
Hinayana ཐྐྱེག་པ་ཆུང་ངུ་། T’ègpa Tchoung-Ngou
Mahayana ཐྐྱེག་པ་ཆྐྱེན་པོ། T’ègpa Tchènpo
Vajrayana ར་རྐྱེ་ཐྐྱེག་པ། Dordjé T’ègpa
Les Trois Corbeilles སྐྱེ་སྣོད་གསུམ། Dé-Nö Soum
Les Sutras མདོ། Do
Le Vinaya འདུལ་བ། Dülwa
L’Abhidharma མངོན་པ། Ngönpa
Les trois poisons དུག་གསུམ། Douk Soum
Le désir-attachement འདོད་ཆགས། Dö-Tchag
La haine-vaersion ཞྐྱེ་སང་། Shé-Dang
L’ignorance གཏི་མུག Timoug
Les trois types de souffrance སྡུག་བསལ་གསུམ། Douk-Ngèl Soum
La souffrance manifeste [lit. La souffrance de la སྡུག་བསལ་གི་སྡུག་བསལ། Douk-Ngèl gyi Douk-
souffrance] Ngèl
La souffrance du changement འགྱུར་བའི་སྡུག་བསལ། Gyourwa’i Douk-Ngèl
La souffrance de l'existence conditionnée འདུ་བྱྐྱེད་ཀི་སྡུག་བསལ། Dou-Djé kyi Douk-Ngèl
Les trois types de vœux སོམ་པ་རྣམ་གསུམ། Dompa Nam Soum
Les vœux de libération individuelle (pratimoksha) སོ་སོ་ཐར་པའི་སོམ་པ། So-So Tharpa’i Dompa
Le vœu de bodhisattva བྱང་ཆུབ་སྐྱེམས་པའི་སོམ་པ། Djang-Tchoub Sèmpa’i
Dompa
Les vœux du mantra secret གསང་སགས་ཀི་སོམ་པ། Sang-Ngak kyi Dompa
Les trois royaumes ཁམས་གསུམ། Kham Soum
Glossaire des Termes de Classification avec le Tibétain

Le royaume du désir འདོད་ཁམས། Dö-Kham


Le royaume de la forme གཟུགས་ཁམས། Zoug-Kham
Le royaume sans forme གཟུགས་མྐྱེད་ཁམས། Zoug-mé-Kham
Les quatre types de naissance སྐྱེ་གནས་བཞི། Kyé-Né Shi
La naissance à partir d’un utérus མངལ་ནས་སྐྱེས་པ། Ngèl né Kyépa
La naissance à partir d’un œuf སོང་ང་ལས་སྐྱེས་པ། Gong-Nga lé Kyépa
La naissance miraculeuse བརྫུས་ཏྐྱེ་སྐྱེས་པ། Djü té Kyépa
La naissance à partir de la chaleur et de l'humidité དྲོད་གཤྐྱེར་ལས་སྐྱེས་པ། Drö-Shèr lé Kyépa
Les quatre pouvoirs སྟོབས་བཞི། Tob Shi
Le pouvoir du soutien རྟྐྱེན་གི་སྟོབས། Tèn gyi Tob
Le pouvoir de s’engager pleinement dans les གཉྐྱེན་པོ་ཀུན་ཏུ་དཔོད་ Nyènpo Kün-tou
actions correctives. པའི་སྟོབས། Tchöpa’i Tob
Le pouvoir de la réparation སུན་འབྱིན་པའི་སྟོབས། Sun Djinpa’i Tob
Le pouvoir du renversement སར་ལོག་པའི་སྟོབས། Lar-Dokpa’i Tob
Les quatre façons de réunir des disciples བསྡུས་པའི་དངོས་པོ་བཞི། Düpa’i Ngöpo Shi
Le don སིན་པ། Djinpa
Parler agréablement སྙན་པར་སྨྲ་བ། Nyènpar Mawa
Agir en accord avec les enseignements དོན་མཐུན་པ། Dön Thünpa
Être utile དོན་སྤྱོད་པ། Dön Tchöpa
Les quatre corps d’un Bouddha སྐུ་བཞི། Kou Shi
Le corps d'Émanation (Nirmāṇakāya) སྤྲུལ་པའི་སྐུ། Trülpa’i Kou
Le corps de Gloire (Saṃbhogakāya) ལོངས་སྤྱོད་རོགས་པའི་སྐུ། Long-Tchö Dzogpa’i Kou
Le corps de Vérité (Dharmakāya) ཆོས་ཀི་སྐུ། Tchö kyi Kou
Le corps d'Essence (Svabhovikakāya) ངོ་བོ་ཉིད་ཀི་སྐུ། Ngowo-nyid kyi Kou
Les cinq agrégats ཕུང་པོ་ལྔ༌། P’oungpa Nga
Forme གཟུགས། Zoug
Sensation འཚོར་བ། Ts’orwa
Perception འདུ་ཤྐྱེས། Doushé
Formations mentales འདུ་བྱྐྱེད། Doudjé
Conscience རྣམ་ཤྐྱེས། Namshé
Les cinq chemins ལམ་ལྔ། Lam Nga
Le chemin de l’accumulation ཚོགས་ལམ། Ts’og Lam
Le chemin de l’union སོར་ལམ། Djor Lam

Page 99
L’Essence d’Ambroisie

Le chemin de la vision མཐོང་ལམ། T’ong Lam


Le chemin de la méditation སོམ་ལམ། Gom Lam
Le chemin où il n’y a plus à apprendre མི་སོབ་པའི་ལམ། mi-Lobpa’i Lam
Les six mondes, les six domaines རིགས་དྲུག Rig Drouk
Les enfers དམྱལ་བ། Nyèlwa
Les fantômes affamés ཡི་དྭགས། Yidak
Les animaux དྲོད་འགོ། Dütro
Les humains མི། Mi
Les demi-dieux ལྷ་མིན། Lha-min
Les dieux ལྷ། Lha
Les six consciences sensorielles རྣམ་ཤྐྱེས་ཚོགས་དྲུག Namshé Ts’og Drouk
La conscience oculaire མིག་གི་རྣམ་ཤྐྱེས། Mig gui Namshé
La conscience auditive རྣ་བའི་རྣམ་ཤྐྱེས། Nawa’i Namshé
La conscience olfactive སྣའི་རྣམ་ཤྐྱེས། Na’i Namshé
La conscience gustative ལྐྱེའི་རྣམ་ཤྐྱེས། Tsé’i Namshé
La conscience du corps (tactile) ལུས་ཀི་རྣམ་ཤྐྱེས། Lü kyi Namshé
La conscience mentale ཡིད་ཀི་རྣམ་ཤྐྱེས། Yid kyi Namshé
Les Six Perfections ou Pāramitās ཕ་རོལ་ཏུ་ཕིན་པ་དྲུག P’aröl-tou Tchinpa Drouk
Générosité སིན་པ། Djinpa
Discipline morale ཚུལ་ཁིམས། Ts’ül-T’rim
Patience བཟོད་པ། Zöpa
Diligence བརོན་འགྲུས། Tsöndrü
Absorption བསམ་གཏན། Samtèn
Sagesse ཤྐྱེས་རབ། Shérab
Les huit états défavorables མི་ཁམས་བརྒྱད། mi-Kham Gyé
Incarnation comme être des enfers དམྱལ་བའི་ལུས་སུ་སྐྱེས་པ། Nyèlwa’i Lü-sou Kyépa
Incarnation en fantôme affamé ཡི་དྭགས་སུ་སྐྱེས་པ། Yidak-sou Kyépa
Incarnation en tant qu'animal དུད་འགོར་སྐྱེས་པ། Dütror Kyépa
Incarnation en barbare ཀླ་ཀློར་སྐྱེས་པ། Lalor Kyépa
Incarnation en dieu ལྷར་སྐྱེས་པ། Lhar Kyépa
Avoir des opinions erronées ལོག་ལྟར་གནས་པ། Loktar Népa
Incarnation dans un monde où les enseignements སངས་རྒྱས་ཀིས་སྟོང་པ། Sangyé kyi Tongpa
de Bouddha n'existent pas.
Glossaire des Termes de Classification avec le Tibétain

Naissance en tant qu'humain sans དབང་པོ་མ་ཚང་བ། Wangpo ma-Ts’angwa


fonctionnement sensoriel ou mental.
Les huit préoccupations mondaines འཇིག་རྟྐྱེན་ཆོས་བརྒྱད། Djiktèn Tchö Gyé
Gain རྐྱེད་པ། Nyépa
Perte མ་རྐྱེད་པ། mi-Nyépa
Notoriété སྙན་པ། Nyènpa
Disgrâce མི་སྙན་པ། mi-Nyènpa
Calomnie སྨད་པ། Mépa
Louange བསྟོད་པ། Töpa
Plaisir བདྐྱེ་བ། Déwa
Douleur སྡུག་བསལ། Douk-Ngèl
Les huit types d'ordination prātimokṣa སོ་ཐར་རིགས་བརྒྱད། So-Thar Rik Gyé
Moine དགྐྱེ་སོང༌། Guélong
Nonne དགྐྱེ་སོང་མ། Guélongma
Moine novice དགྐྱེ་ཚུལ། Guéts’ül
Nonne novice དགྐྱེ་ཚུལ་མ། Guéts’ülma
Pratiquant laïc (avec vœux laïcs) དགྐྱེ་བསྙྐྱེན། Guényèn
Pratiquante laïc (avec vœux laïcs) དགྐྱེ་བསྙྐྱེན་མ། Guényènma
Vœux de religieuse postulante དགྐྱེ་སོབ་མ། Guélobma
Détenteur d'un vœu pour une seule journée བསྙྐྱེན་གནས། Nyèn-Né
Les dix opportunités དལ་བ་བཅུ། Dèlwa Tchou
Naître en tant qu'humain མི་རུ་སྐྱེས་པ། Mi-rou Kyépa
Naître dans un pays où le bouddhisme s'est ཡུལ་དབུས་སུ་སྐྱེས་པ། Yül Ü-sou Kyépa
répandu.
Naître avec des facultés sensorielles intactes. དབང་པོ་ཚང་བ། Wangpo Ts’angwa
Avoir un « karma non corrompu » ལས་མཐའ་མ་ལོག་པ། Lé Tha ma-Lokpa
Avoir foi ou confiance dans les Trois Joyaux གནས་ལ་དད་པ། Né la Dépa
Vivre à une époque où un Bouddha est venu au སངས་རྒྱས་འཇིག་རྟྐྱེན་དུ་ Sangyé Djiktèn-dou
monde. བྱོན་པ། Djonpa
Vivre à une époque où le Bouddha a enseigné སངས་རྒྱས་ཀི་དམ་པའི་ Sangyé kyi Dampa’i
ཆོས་གསུངས་པ། Tchö Soungpa
Vivre à une époque où les enseignements de ཆོས་གསུང་པ་རྣམས་གནས་ Tchö-Soungpa nam
Bouddha survivent. པ། Népa

Page 101
L’Essence d’Ambroisie

Vivre à une époque où l’enseignement compte de ཆོས་གནས་པ་རྣམས་རྐྱེས་ Tchö-Népa nam Djé-sou


nombreux adeptes. སུ་འཇུག་པ། Djoukpa

Vivre à une époque où les mécènes soutiennent གཞན་གི་ཕིར་སྙིང་བརྐྱེ་བ་ Shèn gyi Tchir Nying
la pratique du Dharma. ཡོད་པ། Tséwa Yöpa

Les dix actions vertueuses དགྐྱེ་བ་བཅུ།


Protéger la vie སོག་སོབ་པ། Sog Kyobpa
Donner སིན་པ། Djinpa
Préserver la conduite morale ཚུལ་ཁིམས་སྲུང་བ། Ts’ült’rim Soungwa
Dire la vérité བདྐྱེན་པར་སྨྲ་བ། Dènpar Mawa
Parler doucement ངག་འཇམ་པོར་སྨྲ་བ། Ngak Djampor Mawa
Réconcilier les amis ཕ་མ་མི་བྱྐྱེད་པ། T’rama mi-Djépa
Parler de manière significative དོན་དང་ལན་པའི་གཏམ་སྨྲ་བ། Dön dang Dènpa’i Tam Mawa
Contentement ཆོག་ཤྐྱེས་པ། Tchog Shépa
Altruisme ཕན་སྐྱེམས་སྐྱེས་པ། P’èn-Sèm Kyépa
Abandonner les points de vue erronés ལོག་ལྟ་སྤོང་བ། Lok-Ta Pongwa
Les dix actions non vertueuses མིག་དགྐྱེ་བ་བཅུ། mi-Gué Tchou
Tuer སོག་གཅོད་པ། Sog Tchöpa
Voler མ་སིན་ལྐྱེན་པ། ma-Djin Lènpa
Comportement sexuel incorrect འདོད་ལོག་སྤྱོད་པ། Dö Lok Tchöpa
Mensonge རྫུན་སྨྲ་བ། Djoun Mawa
Paroles dures ཚིག་རྩུབ་སྨྲ་བ། Ts’ik-Tsoub Mawa
Calomnie ཕ་མ། T’rama
Bavardage dépourvu de sens ངག་འཁལ། Ngak K’yèl
Cupidité རྣབ་སྐྱེམས། Nab Sèm
Esprit malveillant གནོད་སྐྱེམས། Nö Sèm
Vues erronées ལོག་ལྟ། Lok-Ta
Les douze sources སྐྱེ་མཆྐྱེད་བཅུ་གཉིས། Kyé-Tché Tchou-Nyi
La forme གཟུགས། Zoug
Le son སྒྲ། Dra
L’odeur དྲི། Dri
Le goût རོ། Ro
L’objet tangible རྐྱེག་བྱ། Rék-Dja
Glossaire des Termes de Classification avec le Tibétain

Les phénomènes ཆོས། Tchö


La faculté de l'oeil མིག་གི་དབང་པོ། Mik gui Wangpo
La faculté d'audition རྣའི་དབང་པོ། Na’i Wangpo
La faculté du nez སྣའི་དབང་པོ། Na’i Wangpo
La faculté de langue ལྐྱེའི་དབང་པོ། Tsé’i Wangpo
La faculté du corps ལུས་ཀི་དབང་པོ། Lü kyi Wangpo
La faculté de l'esprit ཡིད་ཀི་དབང་པོ། Yid kyi Wangpo
Les dix-huit constituants [les douze sources plus ཁམས་བཅོ་བརྒྱད། Kham Tcho-Gyé
les six consciences]
Les six royaumes des dieux du désir འདོད་ཁམས་དྲུག Dö-Kham Drouk
Paradis des Quatre Grands Rois རྒྱལ་བཞིའི་རིས། Gyal-Shi’i Ri
Ciel des Trente-Trois སུམ་ཅུ་ར་གསུམ་པ། Soum-Tchou-Tsa-Soumpa
Sans conflit འཐབ་བལ། T’ab-Drèl
Heureux དགའ་ལན། Ka-Dèn
Se réjouir de la création འཕྲུལ་དགའ། T’rül-Ka
Profitez des émanations གཞན་འཕྲུལ་དབང་བྱྐྱེད། Shèn-T’rül Wang-Djé
Les dix-sept royaumes des dieux de la forme གཟུགས་ཀི་ཁམས་བཅུ་བདུན། Zoug kyi Kham Tchou-Dün
Paradis de Brahma ཚངས་རིས། Ts’ang Ri
Acolytes de Brahma ཚངས་པ་མདུན་ན་འདོན། Ts’angpa Dün na Dön
Grand Ciel de Brahma ཚངས་པ་ཆྐྱེན་པོ། Ts’angpa Tchènpo
Lumière limitée འོད་ཆུང་། Ö Tchoung
Lumière illimitée ཚད་མྐྱེད་འོད། Tché-mé Ö
Claire Lumière འོད་གསལ། Ö-Sèl
Vertu limitée བདྐྱེ་ཆུང་། Dé Tchoung
Vertu illimitée ཚད་མྐྱེད་བདྐྱེ། Tché-mé Dé
Vertu Étendue བདྐྱེ་རྒྱས། Dé Gyé
Sans Nuages སིན་མྐྱེད། Trin-mé
Mérite Croissant བསོད་ནམས་སྐྱེས། Sönam Kyé
Grande Maturité འབས་བུ་ཆྐྱེ་བ། Drébou Tchéwa
Aucun Majeur མི་ཆྐྱེ་བ། mi-Tchéwa
Sans affliction མི་གདུང་བ། mi-Doungwa
Apparence Glorieuse རྒྱ་ནོམ་སྣང་བ། Gyanom Nangwa
Plus Charmant ཤིན་ཏུ་མཐོང་། Shintou T’ong

Page 103
L’Essence d’Ambroisie

Ciel le Plus Haut འོག་མིན། Okmin


Les Quatre Royaumes du Sans-Forme གཟུགས་མྐྱེད་ཁམས་བཞི། Zoug-mé Kham Shi
Sphère de l’espace illimité ནམ་མཁའ་མཐའ་ཡས་སྐྱེ་མཆྐྱེད། Namkha T’ayé Kyé-Tché
Sphère de conscience illimitée རྣམ་ཤྐྱེས་མཐའ་ཡས་སྐྱེ་མཆྐྱེད། Namshé T’ayé Kyé-Tché
Sphère de rien ཅི་ཡང་མྐྱེད་པའི་སྐྱེ་མཆྐྱེད། Tchi-Yang mépa’i Kyé-Tché
Sphère de ni perception ni non-perception འདུ་ཤྐྱེས་མྐྱེད་འདུ་ཤྐྱེས་མྐྱེད་མིན་གི་ Doushé-mé Doushé-mé-min
སྐྱེ་མཆྐྱེད། gyi Kyé-Tché
Références

RÉFÉRENCES

 Banerjee, Anukul Chandra. Aspects of Buddhist Culture from Tibetan Sources. Calcutta: Firma Private
Limited, 1984
 Dharma Publishing Staff, translator. Dhammapada. Berkeley: Dharma Publishing, 1985.
 Gampopa. The Jewel Ornament of Liberation, Translated by Khenpo Konchog Gyaltsen Rinpoche, edited
by Ani K. Trinlay Chodron Ithaca: Snow Lion Publications, 1998.
 Traduit en français par Christian Bruyat sous le titre Le Précieux Ornement de la Libération, Ed.
Padmakara, 1999.
 Gyatso, Khenpo Tsultrim, Shes rab snang ba (no place, no date).
 Hopkins, Jeffrey. Meditation on Emptiness. Boston: Wisdom Publications, 1983.
 Kapstein, Matthew. "The Shang-pa Bka-brgyud : An Unknown Tradition of Tibetan Buddhism.” In Tibetan
Studies in Honor of Hugh Richardon, ed. Michael Aris and Aung San Suu Kyi, pp. 138-144. Warminster,
England : Aris and Phillips Ltd., 1980.
 Kongtrül, Jamgön. The Torch of Certainty. Translated by Judith Hanson. Boston: Shambala, 1977.
 Traduit en français par Judith Hanson, sous le titre Le flambeau de la certitude, Ed. Yiga Tcheu
Dzin, 1980.
 Kongtrül, Jamgön. Myriad Worlds. Translated and edited by the International Translation Committee of
Kunkhyab Choling, Ithaca: Snow Lion Publications, 1995.
 Publié en français sous le titre Le trésor de connaissances: Tome 1, Les systèmes philosophiques
bouddhistes, Ed. Padmakara, 2020.
 Patrül Rinpoché, The Words of My Perfect Teacher. Translated by the Padmakara Translation Group.
Shambala: Boston, 1998
 Traduit en français sous le titre Le chemin de la grande perfection, Ed. Padmakara, 1997.
 Powers, John. Introduction to Tibetan Buddhism, Ithaca: Snow Lion Publications, 1995.
 Riggs, Nicole. Like An Illusion: Lives of the Shangpa Kagyu Masters Eugene, Oregon: Dharma Cloud Press,
2001
 Rigzin, Tsepak. Tibetan English Dictionary of Buddhist Terminology. Dharamsala: LTWA, 1986.
 Sherburne, Richard. The Complete Works of Atiśa. New Delhi: Aditya Prakashan, 2000.
 Smith, E. Gene. Among Tibetan Texts : History and Literature of the Himalayan Plateau, Boston: Wisdom
Publications, 2001
 Snellgrove, David and Hugh Richardson. A Cultural History of Tibet. Boulder: Prajna Press, 1980.
 Sterns, Cyrus. The Buddha From Dolpo: A Study of the Life and Thought of the Tibetan Master Dolpopa
Sherab Gyaltsen. Edited by Matthew Kapstein. Albany: State University of New York Press, 1999

Page 105
L’Essence d’Ambroisie

 Publié en français sous le titre Le Bouddha du Dolpo : Vie, pensée et réalisation du maître Tibétain
Dolpopa Shérab Gyaltsen, Ed. Claire Lumière, 2005.
 Tāranātha. History of Buddhism in India. Translated by Lama Chimpa and Alaka Chattopadhyaya, edited
by Debiprasad Chattopadhyaya, Simla : Indian Institute of Advanced Study, 1970.
 Tibetan Buddhist Resource Center Website, www. tbrc.org.
 Tāranātha, Jonang. The Origin of Tara Tantra. Translated by David Templeman. Dharamsala: Library of
Tibetan Works and Archives, 1981
 Tsongkhapa. The Great Treatrise on the Stages of the Path to Enlightenment. Translated by The Lamrim
Chenmo Translation Committee, Ithaca: Snow Lion Publications, 2000,
 Traduit en français par Yonten Gyatso, sous le titre Le Grand Livre de la progression vers l’Éveil
(2 tomes), Ed. Dharma, 1999.
 Traduit en français par Guéshé Lhoundoub Sopa, sous le titre Les étapes de la voie vers l'Éveil (3
tomes), Ed. Vajra Yogini, 2014.
 Vasabandhu, Abhidharmakotabhasyam. Translated by Louis de La Valee Poussin. Translated into English
by Leo M. Pruden. Berkeley : Asian Humanities Press, 1988
 Zangpo, Ngawang, translator. Jamgön Kongtrül’s Retreat Manual, Whaca Snow Lion Publications, 1994.
 Traduit en français par Pamela White, sous le titre Manuel de retraite de Djamgoeun Kongtrul,
Ed. Yogi Ling, 1997.
 Zangpo, Ngawang. Tāranātha. Unpublished biography, 2003.
 Zangmo, Tenpa. Dharma Vocabulary. Wappingers Falls, NY: Kagyu Thubten Choling (no date)

Vous aimerez peut-être aussi