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Leçon 4

I. LES CAUSES EXTERNES

1. L’influence des eux guerres mondiales

Les pays coloniaux ont exercé un rôle actif dans le premier conflit mondial. En effet, ils ont fourni à l’Europe des
combattants, des travailleurs et ont participé à son approvisionnement. La guerre leur permet de voir les limites
des Blancs. Ces derniers ont plusieurs fois proclamé les principes libéraux et les colonies en attendent la
réalisation.

En présentant leur résistance comme un combat de la liberté des peuples, les Alliés affirment le droit des peuples
à disposer d’eux-mêmes dans la charte de l’Atlantique.

La défaite des puissances coloniales telles que la France et l’Angleterre, l’occupation d’une partie de l’Empire
britannique réduisent le prestige des colonisateurs. Le Japon se présente alors comme le libérateur de la Grande
Asie orientale. Promettant l’indépendance aux pays qu’ils occupent. Les Allemands de leurs côtés essaient
d’utiliser les nationalistes contre les Alliés, en Egypte et en Iraq, notamment en 1943. Malgré tout cela, les Etats
colonisateurs ont perdu leurs forces dans la guerre.

La Seconde guerre mondiale influence le développement du nationalisme. Les mouvements nationalistes fondés
depuis la première guerre mondiale en Asie en sortent renforcés. En Afrique, ces mouvements apparaissent
tardivement mais effectuent de rapides progrès. Cette évolution est favorisée par les défaites européennes en
Asie face au Japon qui détruisent le mythe de l’homme Blanc. Les anciens combattants cherchent à mettre un
terme à l’exploitation coloniale. Ils sont revigorés par la Charte de l’Atlantique qui promet le droit à
l’autodétermination. Le président Wilson se montre favorable à l’application de cette charte dans tous les pays.

Si le premier conflit mondial avait contribué à ébranler la structure coloniale, le second achèvera de la
désagréger. Il apportera la goutte qui fait déborder le vase, le grain de sable qui enraye définitivement le
mécanisme du système.

La guerre, en effet, fut généralisée et totale : tous les moyens humains et économiques du monde entier furent
jetés dans la bataille. En 1945, France et Grande-Bretagne découvrirent qu’elles n’étaient plus que des puissances
de second ordre. L’Europe sortit du conflit matériellement et humainement prostrée, avec plusieurs millions de
morts. La France se retrouvait avec une dette de 1756 milliards, une flotte décimée ; le pays était divisé en
collaborateurs et résistants et, tout comme le reste de l’Europe, dépendait désormais des Etats-Unis. Après la
guerre, les pays colonisateurs tentèrent, certes, de reprendre en main leurs colonies, mais sans grande
conviction. De plus leur épuisement était tel que celles-ci représentèrent rapidement une charge au-dessus de
leurs moyens.

Ibrahima Baba Kaké, L’Afrique coloniale, Collection Histoire générale de l’Afrique, Paris, Présence africaine, 1988

2. La crise du système colonial

Les puissances coloniales affaiblies par le conflit ne peuvent rétablir par la force leur autorité près la Seconde
Guerre mondiale. Les peuples coloniaux sont solidaires dans leur combat. Ils bénéficient du soutien d’une partie
de l’opinion occidentale.
La mise en valeur économique produit des entre économiques, de moyens de transport. Même si les contraintes
économiques demeurent, on note une élévation du niveau de vie. On assiste à l’ascension des groupes sur les
populations données.

La crise du système colonial accentuée par l’issue de la seconde Guerre mondiale, se manifeste par le puissant
essor du mouvement de libération nationale dans les colonies et des pays dépendants. Par là même, les arrières
du système capitaliste se trouvent menacés.

Les peuples des colonies ne veulent plus vivre comme par le passé. Les classes dominantes des métropoles ne
peuvent plus gouverner les colonies comme auparavant. Les tentatives d’écrasement du mouvement de
libération nationale par la force militaire se heurtent maintenant à la résistance croissante des peuples des
colonies et conduisent à des guerres coloniales de longue durée : Hollande en Indonésie, France au Vietnam.

Extrait du rapport Jdanov, Sur la situation internationale, le 25 septembre 1947

3. L’évolution dans les métropoles

Si à la fin de la Seconde guerre mondiale, les puissances occidentales ne sont pas prêtes à envisager une
décolonisation en Afrique, elles assouplissent leurs positions pour plusieurs facteurs : la pression américaine, la
crainte de l’influence soviétique sur les mouvements de libération, le désir d’avoir de bonnes relations avec les
futurs Etats. De plus, l’opinion publique européenne se déclare favorable à la décolonisation. En effet, elle souhaite
la concentration de l’effort national sur la métropole et un désintéressement des colonies. Elle s’oppose du même
coup aux dépenses au profit des colonies.

En Afrique noire, la France paie. Elle coure le déficit des devises, étanche les déficits budgétaires, subventionne
dans des proportions croissantes la plupart des produits coloniaux… Il est impossible de ne pas se demander s’il
n’eût pas mieux valu construire à Nevers l’hôpital de Lomé, à Tarbes le lycée de Bobo-Dioulasso

Raymond Cartier, Paris-Match, 18 août 1956

4. Un contexte international favorable

Plusieurs courants soutiennent la volonté d’émancipation des pays colonisés : l’anticolonialisme des grandes
puissances.

 Ayant un passé colonial, les Etats-Unis sont solidaires des peuples colonisés. Pour eux, la
colonisation est une entrave au libre-échange car participe à la création de monopoles pour les
puissances capitalistes européennes. Les combattre équivaut à affaiblir leurs influences sur ces
potentiels marchés économiques. Ils souhaitent placer les colonies sous tutelle internationale,
transition incontournable vers l’indépendance. Les Etats-Unis donnent l’exemple en accordant
l’indépendance aux Philippines en 1946. Avec la guerre froide, ils craignent aussi que les
nationalismes ne basculent dans le camp soviétique et pour cela appuient certains mouvements
nationalistes.

« On ne pouvait pas lutter contre la servitude fasciste et en même temps ne pas libérer sur toute la surface sur
toute la surface du globe les peuples soumis à une politique coloniale rétrograde ». Le secrétaire d’Etat Cordell
Hull précise le 20 novembre 1942 : « J’ai dit que le Président et moi, et tout le gouvernement souhaitions
instamment la liberté pour tous les peuples dépendants à une date aussi proche que possible. »

H. Grimal, La Décolonisation 1919-1963, Armand Colin


 L’URSS encourage depuis 1920 les alliances entre communistes locaux et la bourgeoisie. En 1945,
elle préconise des négociations avec les métropoles. Elle considère l’impérialisme colonial comme
le stade suprême du capitalisme. Au nom du communisme, l’URSS s’érige contre toute forme de
domination capitaliste, soutient les peuples colonisés pour des raisons tout à la fois idéologiques
que politiques.

Les peuples des colonies ne veulent plus vivre comme par le passé. Les classes dominantes des métropoles ne
peuvent plus gouverner les colonies comme auparavant. Les tentatives d’écrasement du mouvement de
libération nationale par la force militaire se heurtent maintenant à la résistance armée croissante des peuples et
conduisent à des guerres coloniales de longue durée : Pays-Bas en Indonésie, France au Vietnam.

A. Jdanov, 1947

 L’ONU en 1945, n’encourage que l’autonomie pour les colonies. Mais les groupes des Etats-Unis
latino-américains, puis arabo-asiatiques, majoritaires à l’Assemblée générale avec les socialistes
s’opposent aux puissances coloniales. A partir de 1945, son Conseil de Tutelle prend en charge
l’émancipation des anciennes colonies allemandes et italiennes qui deviennent des mandats de
l’ONU. Le 16 février 1952, Elle proclame le droit des territoires non autonomes et sous tutelle de
disposer d’eux-mêmes.

Les Etats membres de l’Organisation doivent reconnaître et favoriser la réalisation, en ce qui concerne les
populations des territoires sous tutelle placés sous leur administration, du droit des peuples à disposer d’eux-
mêmes et doivent faciliter l’exercice de ce droit aux peuples de ces territoires, compte tenu des principes et de
l’esprit de la charte des Nations Unies en ce qui concerne chaque territoire et de la volonté librement exprimée
des populations intéressées, la volonté de la population étant déterminée par voie de plébiscite ou par d’autres
moyens démocratiques reconnus, de préférence sous l’égide des Nations-Unies.

Résolution adoptée par l’ONU le 16 décembre 1952

II. LES CAUSES INTERNES

1. La pression des grands mouvements religieux

Les colonisateurs en imposant leur culture ont créé des frustrations. Les colonies cherchent à retrouver leur
identité culturelle par un retour au passé.

L’Islam inspire des mouvements religieux traditionnalistes pour rejeter le colonialisme.

Dans les pays christianisés, les Eglises tentent de dissocier l’évangélisation et le colonialisme. Elles développent
des liturgies et des clergés autonomes.

2. La montée du nationalisme

Divers mouvements apparaissent pour renforcer le nationalisme en Afrique et en Asie : l’afro-asiatisme, le


panafricanisme, la négritude…

Les migrations vers la métropole sensibilisent davantage les travailleurs et les élites aux idées et pratiques
contestataires, politiques et syndicales. Le concours décisif des colonies à la victoire leur donne l’espoir de
nouvelles relations avec le colonisateur.

Durant la guerre, les espoirs nationalistes grandissent dans les colonies. L’Afrique espère que sa participation au
conflit mondial serait payée par un assouplissement du régime colonial. Déçue, elle développe la résistance. Des
Syndicats et partis politiques se forment. Le nationalisme s’exprime aussi par des journaux et des livres. De
nouvelles formes de luttes telles que les grèves, les émeutes urbaines apparaissent.

Depuis la fin de la guerre, nous avons vu l’éveil de la conscience nationale dans des peuples qui avaient vécu
jusque-là dans la dépendance d’autres puissances. Il y a quinze ans que le mouvement se propagea à travers
l’Asie. De nombreux pays de races et de civilisations différentes exprimèrent leur désir d’une existence nationale
indépendante. Aujourd’hui, la même chose se produit en Afrique. Ce sentiment national africain prend des
formes différentes selon les endroits, mais il se manifeste partout. Le vent du changement souffle partout à
travers ce continent.

Harold Macmillan, Discours devant le parlement sud-africain, le 3 février 1960, Capetown

3. Le développement de l’intelligentsia

Les étudiants de plus en plus en plus nombreux sont gagnés à un nationalisme radical et même au communisme.
Ils constituent des organisations telles que la FEANF (Fédération des étudiants d’Afrique noire francophone). Ils
vont jouer un rôle d’avant –garde. Ils exigent l’indépendance.

Ils retournent contre leurs métropoles les grandes idées telles que la liberté, l’égalité et la fraternité des peuples
et affichent par la même occasion leur volonté à participer à la gestion politique de leurs terroirs. L’élite formée
dans les universités se réclame des idées de 1789 et des nationalistes européens du XIXème siècle.

Dans un congrès national qui se réunit à Accra, au début de 1920, on put entendre les revendications des
indigènes de l’Afrique occidentale anglaise : ils ont trouvé des porte-parole parmi une classe très curieuse de
nègres appelés The Educated Natives. Ces indigènes assimilés presque complètement par la civilisation anglaise,
(…) habitant les villes (…) n’ont pas perdu le sentiment de race et ils soutiennent la cause de leurs frères ; ils
réclament depuis longtemps des libertés politiques ; ils en propagent la notion dans toute l’Afrique occidentale.
En 1920, ils réussissent à réunir les délégués de tous les pays en congrès qui demanda l’établissement du self
government dans l’Afrique occidentale et protesta contre l’inégalité des races.

Albert Demangeon, L’Empire britannique, 1931

Discours de clôture de Nehru à la conférence de Bandung le 24 avril 1955

Il n’y a plus d’Asie soumise… Nous sommes résolus à n’être d’aucune façon dominés par aucun pays, par aucun
continent. Nous ne sommes pas des « béni-oui-oui » qui disent « oui » à tel ou tel pays. Nous sommes des grands
pays du monde et voulons vivre libres sans recevir d’ordres de personnes. Nous attachons de l’importance à
l’amitié des grandes puissances, mais à l’avenir, nous ne coopérerons avec eux que sur un pied d’égalité. C’est
pourquoi nous élevons notre voix contre l’hégémonie et le colonialisme dont beaucoup d’entre nous ont souffert
pendant longtemps

4. La Conférence de Bandoeng

En avril 1955, une conférence réunit à Bandoeng, dans l’ile de Java en Indonésie, 23 pays d’Asie et 6 d’Afrique. Les
initiateurs de cette conférence sont Nehru (Inde) et Ahmed Soekarno (Président de l’Indonésie). Dans son
communiqué final, la conférence condamne le colonialisme, affirme le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes
et l’égalité de toutes les nations. Cette conférence représente la moitié de l’humanité. Elle réclame le soutien de
l’ONU dans la lutte pour l’émancipation des peuples.
La conférence de Bandoeng marque la fin de la décolonisation de l’Asie et constitue un encouragement aux pays
africains encore sous tutelle coloniale.
Commentaire Les Noirs furent influencés par les américains, peuple dont l’attitude libérale était motivée
par la tradition anticoloniale de ses origines politiques.

Par la suite, ces mêmes Américains, s’étant rendu compte que 25 à 75 % de matières premières se
trouvaient dans les possessions coloniales des autres puissances, demandèrent l’égalité économique et
sociale des colonisés. Ils favorisèrent le trusteeship, régime de tutelle internationale dont le complément
était le régime de l’égalité économique. La politique américaine en Afrique va toujours osciller ainsi entre
ses aspirations libérales, d’une part, et la défense de ses intérêts de l’autre. La « guerre froide », cette espèce
de gel entre les rapports Est-Oust, cette course à la prépondérance des deux nouveaux Grands (URSS et
USA), a également joué un rôle important dans la décolonisation.

L’URSS, à la fin de la guerre, pratique elle aussi une politique anticoloniale fondée sur l’idéologie marxiste,
qui déclare qu’ un peuple qui en opprime d’autres ne saurait être libre ». Le stalinisme bénéficiant d’un
passé pratiquement vierge de tout attentat colonial, a besoin de se donner bonne conscience. En ce sens,
il n’accepte aucune tutelle politique et économique d’un pays sur un autre. Bie que l’URSS ait surtout
appliqué cette théorie en Asie, la rivalité politique des Deux Grands va profiter à l’Afrique, qui, par u subtil
jeu de balance, parviendra à faire aboutir quelques-unes de ses revendications

Ibrahima Baba Kaké, L’Afrique coloniale, Collection Histoire générale de l’Afrique, Paris, Présence africaine,
1988
LEÇON 5

LES ATTITUDES DES PUISSANCES EUROPEENNES FACE A LA DETERMINATION DES PEUPLES COLONISES

I. LA DECOLONISATION PACIFIQUE

1. Les indépendances négociées

Dans certains pays, l’indépendance résulte d’une évolution des institutions qui progressivement, s’assouplissent
donnant aux territoires une autonomie plus grande ; Une grande activité politique est déployée au sein des partis
locaux et des syndicats pour revendiquer le droit à l’autonomie et à l’émancipation totale. Dans ces pays, les
leaders politiques réussissent à négocier l’indépendance sans s’installer dans un conflit avec la métropole. Ce type
de décolonisation se caractérise en particulier les colonies anglaises et l’A.O.F.

Dans l’Afrique française en effet, après avoir longtemps rejeté l’idée d’émancipation, la France change d’attitude
au milieu des années 1950. Avec la loi-cadre de 1956, la France se détache progressivement de ses colonies. Cette
évolution se confirme avec la création de la communauté française en 1958 dans laquelle les territoires coloniaux
deviennent des républiques autonomes. A partir de 1960, la plupart de ces Etats obtiennent leur plein e
souveraineté à l’issue d’accords bilatéraux avec la France.

Dans les colonies britanniques ouest-africaines, les revendications pour l’indépendance ont été plus précoces. Dès
les années 1920, les Africains sont associés aux affaires publiques. Leur nombre augmente après la Seconde Guerre
mondiale. Plusieurs territoires accèdent à l’indépendance sans conflit notable avec l’autorité anglaise. Ainsi, la
Gold Coast, sous l’impulsion du parti de Nkrumah, passe de l’autonomie à l’indépendance en 1957.

2. Les indépendances mixtes

On appelle ainsi des négociations qui sont dominées par la négociation, mais qui connaissent à un moment donné
des manifestations de violences soit entre les communautés locales pour le contrôle du pouvoir, soit avec les
Européens qui tentent d’étouffer les revendications en faveur de l’émancipation par une forte répression.

Par exemple au Congo, la Belgique, jusque vers les années 1950, reste opposée à toute remise en question de sa
souveraineté, allant jusqu’à mettre sur pied un plan d’émancipation étalé sur 30 ans. Les nationalistes congolais
radicalisent leur action. Ils organisent de violentes émeutes qui contraignent la Belgique à accorder
l’indépendance en 1960. Cette indépendance précipitée provoque de grands troubles dans le pays.

En Inde, Gandhi organise la lutte nationaliste en s’appuyant sur le principe de la non-violence. Il utilise comme
moyen d’action la grève, le boycott, la désobéissance civile. Les Anglais répondent par la répression.
L’indépendance est proclamée en 194, elle a été accélérée par la guerre fratricide dans laquelle les Hindous et les
musulmans s’affrontent.

II. LA DECOLONISATION VIOLENTE

On a une décolonisation violente lorsque l’indépendance est conquise par la lutte armée. Celle-ci intervient quand
la métropole refuse la négociation et les réformes. Opposés aux exigences d’indépendance de leurs colonies, les
métropoles dont les colons y sont fortement implantés s’enlisent dans des guerres coloniales longues et
coûteuses. Cet immobilisme colonial dont elles font preuve entraîne une décolonisation violente.

En effet, les mouvements indigènes s’insurgent contre la colonisation en imposant la lutte armée. C’est le cas en
Indochine, en Algérie pour la France, dans toutes les colonies portugaises à partir de 1960.
Ces pays ont à leur actif des guerres de libération qui les opposent à la puissance coloniale. Souvent ces guerres
sont soutenues par les pays africains indépendants, des puissances étrangères. Par exemple : le Vietminh est aidé
par la Chine et l’URSS, le FLN algérien par la Tunisie, le Maroc et surtout l’Egypte.

Elles peuvent se compliquer de divisions internes pouvant conduire à la guerre civile. C’est l’exemple typique de
l’Angola. En Afrique, en dehors de l’Algérie, ces décolonisations ont été tardives : la Guinée-Bissau obtient
l’indépendance en 1974, l’Angola en 1975, le Zimbabwe en 1980, le Mozambique en 1975

La non-violence ne consiste pas « à s’abstenir de tout combat réel, face à la méchanceté ». Au contraire, je vois
dans la non-violence une forme de lutte plus énergique et plus authentique que la simple loi du talion qui aboutit
à multiplier par deux la méchanceté. Contre tout ce qui est immoral, j’envisage de recourir à des armes morales
et spirituelles. Je ne cherche pas à émousser le tranchant de l’arme que m’oppose le tyran en employant une lame
encore plus aiguisée que la sienne. Je m’emploie à désamorcer le ressort du conflit en n’offrant aucune résistance
d’ordre physique. Mon adversaire doit être tenu en respect par la force de l’âme. Tout d’abord, il sera
décontenancé, puis il lui faudra bien admettre que cette résistance spirituelle est invincible. S’il en convient, loin
d’être humilié, il ressort de ce combat plus noble qu’avant. On peut objecter que c’est là une solution idéale. C’est
tout à fait exact.

Gandhi, Tous les hommes sont frères, Gallimard

Cette indépendance du Congo, si elle est proclamée aujourd’hui dans l’entente avec la Belgique, pays ami avec
qui nous traitons d’égal à égal, nul Congolais digne de ce nom ne pourra jamais oublier cependant, que c’est par
la lutte qu’elle a été conquise, une lutte de tous les jours, une lutte ardente et idéaliste, une lutte dans laquelle
nous n’avons ménagé ni nos forces ni nos privations, ni nos souffrances, ni notre sang. C’est une lutte qui fut de
larmes de feu et de sang, nous en sommes fiers jusqu’au plus profond de nous-mêmes car ce fut une lutte noble
et juste, une lutte indispensable pour mettre fin à l’humiliant esclavage qui nous était imposé par la force.

Patrice Lumumba, Discours, dans La Libre Belgique

Dissertation

Il y a deux manières d’acquérir l’autonomie, l’une par la révolution armée et l’autre par des
méthodes non violentes, constitutionnelles et légitimes. Nous préconisons la seconde méthode.
La liberté, on ne l’avait (…) jamais accordé à aucun pays colonial sur un plateau d’argent ; on ne
l’avait gagnée qu’après d’amère et de vigoureuses luttes. A cause du retard des colonies en
matière d’instruction, la majorité des gens était illettrée et il n’y avait qu’une chose qu’ils puissent
comprendre, à savoir l’action.

Ces propos sont de Kwame N’Krumah, tirés de La naissance de mon parti et de son programme
d’action positive, Présence Africaine, 1957.

A partir de cette pensée, montrez les différentes formes de décolonisation en les illustrant par
des exemples précis.
LEÇON 6

I. LA DECOLONISATION DE L’INDE

1. Le nationalisme indien jusqu’à la Première Guerre mondiale

Depuis le milieu du XIXème siècle, L’Inde est une colonie anglaise. A la fin du siècle, l’élite formée de la bourgeoisie
industrielle et commerçante crée un parti nationaliste, en 1885, le Parti du Congrès. La victoire japonaise sur la
Russie encourage le nationalisme indien. Ainsi, en 1905 apparaît un nouveau slogan : « L’Inde aux Hindous ». Ce
mouvement est favorisé par divers facteurs : l’importation des produits anglais qui provoque la disparition de la
production locale, les contrats accordés aux gros propriétaires ruinant les agriculteurs. Les jeunes intellectuels
adoptent les idées du libéralisme politique ; ils demandent l’autonomie ou swaraj, une autonomie identique à
celle des dominions1.

Jusqu’en 1905, le mouvement nationaliste inquiète peu les Anglais. Mais la victoire japonaise agite toute l’Asie. Le
gouverneur de l’Inde ou vice-roi décide de diviser le Bengale (à l’est) en deux provinces. Les nationalistes
répandant alors des journaux et tracts pour soulever la population hindoue et les amener à boycotter les produits
anglais. Des sociétés secrètes se livrent à des attentats contre les fonctionnaires anglais. Le mouvement gagne le
Pendjab. Le conseil national hindou de 1906 réclame alors une réforme du gouvernement de l’Inde. Les Anglais
répondent par des mesures répressives.

En 1909 une nouvelle disposition réorganise l’Inde : l’élection d’une partie du conseil législatif central, ce qui
représente un système semi-représentatif. Les Anglais restent cependant maîtres de la situation jusqu’à la
Première Guerre mondiale.

2. L’évolution de l’Inde jusqu’à la Seconde Guerre mondiale

Le parti du Congrès joue un rôle important à partir de 1914. Gandhi réclame l’autonomie interne par la résistance
active, le satyagraha, sans violence. L’échec des mouvements nationalistes fait monter la pression anglaise

De 1920 à 1925, l’Inde se trouve alors dans un régime de dyarchie (statut de 1919) où l’on distingue :
- Le gouvernement central qui règne sur les « affaires réservées » : douanes, armée, finances…
- Les gouvernements généraux, installés dans les provinces, qui disposent des affaires transférées : santé,
éducation, agriculture…
-
Mais le mouvement nationaliste devient de plus en violent, amenant Gandhi à changer de stratégie. Il lance un
nouveau plan : la non coopération non violente, consistant à boycotter toute fonction élective ou administrative,
les écoles, les tribunaux anglais, les écoles. L’efficacité de cette action amène les anglais à emprisonner Gandhi
pour 6 ans en 1922. Mais les swarajistes de plus en plus nombreux demandent toujours avec plus d’insistance
l’abrogation du statut de 1919, et l’autonomie. En 1927 arrive la commission Simon chargée d’évaluer le statut de
1919. L’absence d’Indiens dans la commission conduit le Congrès à la boycotter pour demander l’indépendance

1
Territoire autonome puis État souverain appartenant à l'Empire britannique. Exemple : Canada, Australie,
Nouvelle-Zélande et Union sud-africaine.
immédiate. Le rapport de la Commission ignorant le statut de dominion, le parti du Congrès déclenche une
nouvelle campagne de désobéissance civique

En 1930, la première conférence de la Table ronde s’ouvre à Londres. Elle comprend des délégués indiens, mais
choisis en dehors du Congrès. L’absence de consensus pousse les Anglais à libérer Gandhi. Cela lui permet de
participer à la seconde conférence en 1931. Il réclame alors le responsable government immédiat, le contrôle de
l’armée, de la défense, des affaires extérieures. A la place de ces revendications, les Anglais proposent un nouveau
statut en 1935, instaurant les cadres d’un nouvel Etat fédéral. D’après ce statut, chaque province aurait son
gouvernement et son parlement. Au sommet, la fédération reste dirigée par le gouverneur général nommé pour
5 ans, assisté d’un conseil d’Etat et d’une Assemblée élus. Ils sont chargés des questions d’intérêt général. Ces
modifications excluant le dominion tant demandé, sont rejetées par le Congrès. De plus les musulmans
manifestent leur opposition. Opposés à un gouvernement fédéral dominé par la majorité hindoue, la Ligue
musulmane formée en 1905, souhaite la réunion des régions majoritairement musulmanes dans des Etats
indépendants.

3. L’évolution politique de 1942 à l’indépendance en 1947

En 1942, l’Angleterre refuse de proclamer l’indépendance mais la promet pour l’après-guerre. Le parti du Congrès
lance la résolution « Quittez l’Inde », mouvement qui dure jusqu’en 1945. Les Anglais procèdent à de nombreuses
arrestations. Pendant ce temps, l’adversaire de Gandhi dans le Congrès Chandra Subhas Bose, fonde le
mouvement « Inde libre » qui appelle à la révolte contre les Britanniques. Une violence incontrôlée s’installe. Mais,
les Anglais sont débordés par les difficultés financières au Proche Orient, en Malaisie, et en Inde. De plus la
résistance des fonctionnaires indiens leur enlève tout moyen d’imposer leur autorité. Ils envisagent alors à partir
de 1945 de quitter l’Inde, poussée dans cette voie par les Etats-Unis. Le parti du Congrès et la Ligue musulmane
se rapprochent.

Des négociations s’ouvrent après la défaite du Japon. Elles sont rendues difficiles par la diversité culturelle et
ethnique. En 1945, la mission de trois ministres envoyée en Inde, décide en accord avec le vice-roi lord Wavell de
mettre sur pied un gouvernement intérimaire. Des représentants provinciaux sont élus pour une assemblée
constituante. Le parti du Congrès obtient 209 sièges, la Ligue musulmane 75 et les autres petits partis 14. Mais la
Ligue musulmane demeure attachée à la création d’un Etat musulman. Pour soutenir cette aspiration, elle organise
en juillet 1946, des manifestations souvent violentes. En août, les désordres se montrent extrêmement graves.
1000 morts seront comptés à Calcutta. Néanmoins un gouvernement provisoire est installé par le vice-roi : il est
présidé par ce dernier, Nehru est président, les autres membres représentent les groupes religieux : 5 ministres
hindous, 3 ministres musulmans pris en dehors de la Ligue, 4 ministres représentants les autres religions. Le
gouvernement est critiqué à la fois par les Ligue, les « Intouchables2 ». De nouveaux troubles éclatent.
L’acceptation d’une participation de la Ligue au gouvernement le 13 octobre ne met pas fin à la violence
intercommunautaire.

En décembre, l’Assemblée constituante tient sa première réunion, mais la Ligue boycotte la session. Nehru
demande la démission des ministres de la Ligue dans la mesure où ce Parti refuse de siéger à l’Assemblée.
Le 20 février, le gouvernement anglais décide d’évacuer l’Inde au plus tard en juin 1948. Le parti du Congrès devant
cette situation sans issue, se soumet à l’idée de la division de l’Inde en deux Etats, avec l’approbation du nouveau
vice-roi lord Mountbatten. Ce dernier convoque une conférence de la table ronde le 3 juin et fait accepter son
plan par toutes les parties : l’Inde et le Pakistan accèdent au statut de dominions, les troupes anglaises devront se
retirer le 15 août, le vice-roi deviendrait gouverneur général jusqu’au 31 mars 1948.

2
Intouchables : Les intouchables, ou dalits, forment un groupe d'individus exclus du « système des castes »). Les
individus constituant cette « non-caste », elle-même divisée en castes correspondant à leurs différents métiers,
sont littéralement considérés comme « intouchables », que l'on ne peut et ne doit toucher. Ils sont par
conséquent sujets à de nombreuses discriminations : contact interdit avec l'eau (et donc les puits) et la nourriture
des autres castes, restrictions à la liberté de se déplacer et au droit à la propriété, etc.
Le 15 août 1947, l’Angleterre accorde l’indépendance à deux Etats : l’Union indienne à majorité hindoue et le
Pakistan musulman composé de deux territoires distants de 1700 km.

II. LA DECOLONISATION DE L’INDOCHINE

L’Indochine est une péninsule au sud-est de l’Asie, comprenant plusieurs Etats. La France y contrôle 5 territoires,
formant fédération indochinoise. Il s’agit de 4 protectorats (le Cambodge, le Laos, le Tonkin, et l’Annam et d’une
colonie (la Cochinchine). L’Annam, le Tonkin et la Cochinchine sont peuplés de Vietnamiens. Divers mouvements
de résistance se sont constitués avant la Seconde Guerre mondiale. On peut citer :

- La Ligue révolutionnaire de la jeunesse vietnamienne, fondée par Nguyen Ai Quoc, plus connu sous le
nom de Ho Chi Minh
- Le VNQDD (Vietnam Quoc Dan Dong) inspiré du Guo Min Dang
- Divers mouvements religieux dont le plus important est le caodaïsme3

A partir de 1926, les grèves et les attentats se multiplient. La répression française est violente.

1. L’Indochine de 1939 à 1945

a. Le mouvement nationaliste

En 1940, la France connaît la défaite en


Europe, face à l’Allemagne. Affaiblie,
elle ne peut empêcher la pénétration
japonaise en Indochine, faute de
renforts. L’Indochine subit ainsi une
double occupation : celle de la France
déjà ancienne, celle du Japon qui est
récente. Les conséquences sont lourdes
pour les populations indochinoises, en
raison des multiples contraintes
imposées non seulement par la France,
mais aussi par le Japon. Ce dernier se
présente cependant en libérateur, et
apporte son soutien à la ligue pour la
libération du Vietnam, aux intellectuels
confucéens et catholiques, et aux
sectes caodaïstes. De son côté, le Guo
Min Dang prête son appui à la Ligue
démocratique pour l’indépendance du
Vietnam ou Vietminh4, nom adopté en
1941 par le parti de Ho Chi Minh, et qui
organise les maquis dans le pays.

3
Caodaïsme : Le caodaïsme est une religion fondée en 1921 et instituée en 1925 au Vietnam par Ngô Van
Chieu, fonctionnaire vietnamien
4
Vietminh est l’abréviation de Vietnam Doc Lap Dong Minh
b. Les indépendances de 1945

En 1945, à l’approche de la défaite, le Japon, avant de se replier, désarme les troupes françaises, réinstalle Bao
Daï, l’empereur de l’Annam et l’incite, tout comme le roi du Cambodge à proclamer l’indépendance. Ainsi est
proclamée par Bao Daï le 9 mars 1945 l’indépendance du Vietnam libéré. Tran Trong Kim est nommé Premier
ministre.

Après la défaite japonaise des forces non françaises occupent militairement le pays : Chinois au nord, du 16ème
parallèle, Anglais au sud. Les troupes françaises commandées par le général Leclerc prennent rapidement la place
des Anglais en Cochinchine, tandis qu’au nord on assiste au pillage du pays par les troupes chinoises dirigées par
le général Lu Han.

Le Vietminh désavoue l’indépendance octroyée par le Japon. Il se rapproche alors des Alliés en se présentant
comme un parti anti japonais. Le 7 août 1945, Ho Chi Minh constitue le Comité de libération du peuple vietnamien.
Il appelle à l’union des forces nationalistes pour s’opposer au retour de l’ordre colonial. L’aile militaire du Vietminh,
ALN (armée de libération nationale) déclenche l’insurrection générale. Le 25 août, Bao Daï abdique et 3 jours plus
tard est formé un gouvernement provisoire. Le 2 septembre 1945, Ho Chi Minh proclame à Hanoi l’indépendance
de la République démocratique du Vietnam. Il souhaite réunir en un seul Etat indépendant tous les peuples des
différents territoires de l’Indochine.

2. La réaction française

Le général De Gaulle veut restaurer la souveraineté française. Il envoie un corps expéditionnaire dirigé par le
général Leclerc qui débarque à Saigon et reconquiert la Cochinchine (au sud). Mais les forces françaises, réduites,
se heurtent à une forte résistance vietnamienne. De ce fait, les représentants français, en tête, le commissaire du
Tonkin, Jean Sainteny, sont favorables à une pause tactique. C’est ainsi qu’un compromis est conclu le 6 mars
1946 : l’accord Sainteny-Ho chi Minh, qui replace le Vietnam au sein de l’Union française en qualité de république
indépendante reconnue par la France. La réunification des trois Ky 5 est envisagée à l’issue d’un référendum. Les
négociations se poursuivent à Dalat, puis à Fontainebleau au mois d’avril suivant.

Pour le haut-commissaire de la fédération indochinoise, l’amiral Thierry d’Argenlieu, la France se livre à une
politique d’abandon. Il négocie la création d’une république séparée en Cochinchine où il installe un
gouvernement provisoire. Le Vietminh, considérant cette mesure comme une violation de l’accord Sainteny-Ho
Chi Minh, intensifie la guérilla. Il participe malgré tout à une conférence à Fontainebleau en septembre 1946 et y
signe un modus vivendi6 prévoyant l’égalité des droits de tous les citoyens français et vietnamiens, la création
d’une unité monétaire et douanière et l’installation de consulats vietnamiens dans les pays voisins. Ce modus
vivendi ne dure pas longtemps.

Le 28 novembre 1946, un incident survenu lors d’un contrôle douanier par les Français dans le port de Haiphong
est exploité comme prétexte à un bombardement de cette ville. Le Vietminh riposte par des massacres
d’Européens dans leurs quartiers d’Hanoi le 19 décembre, puis lance une attaque généralisée contre les Français.
La France riposte. C’est le début de la guerre d’Indépendance.

3. La guerre d’Indochine (1946-1954)

Le Vietminh mène une guérilla sous la direction militaire du général Giap. Le Vietminh rejette la demande
d’armistice faite par la France en 1947. Dès lors, les Français cherchent à diviser les Vietnamiens. Ils signent avec
Bao Daï les accords de la Baie d’Along en 1948 reconnaissant l’indépendance d’un Etat du Vietnam associé à la
France et englobant la Cochinchine. Des accords semblables sont signés avec le Laos et le Cambodge. Tout cela
dans le but de détourner le choix des Vietnamiens. Mais la tentative de division est un échec.

Jusqu’en 1949, le conflit indochinois est une guerre sans front. Mais à partir de cette date, il s’internationalise. En
effet, les puissances de la guerre froide déplacent leur rivalité dans ce conflit colonial. Ainsi, les Etats-Unis et

5
Les trois Ky : Annam, Cochinchine, Tonkin
6
Modus vivendi :
l’Angleterre soutiennent la France, alors que l’URSS et la Chine appuient le Vietminh sur le plan logistique et
militaire. Le Vietminh peut désormais mener une guerre ouverte. Il bat les troupes françaises à Langson et leur
allié Bao Daï en 1950. La France nomme le général de Lattre de Tassigny haut-commissaire. Ce dernier améliore
la position militaire française sans réussir à vaincre le Vietminh qui mène des opérations de guérilla et de sabotages
dans le sud de l’Annam, en Cochinchine, au Laos et au Cambodge.

En 1953, pour couper les routes du ravitaillement de son adversaire, et aussi aller en force aux négociations
prévues à Genève, la France souhaite une victoire décisive. Elle concentre ses meilleures troupes dans la cuvette
de Dien Biên Phu à l’ouest du Tonkin. Cette localité est transformée en puissant centre de résistance, imprenable,
selon les considérations françaises. Le but recherché est d’attirer l’armée vietnamienne et de l’écraser par
l’artillerie et par l’aviation. C’est l’Opération Atlante. Le 13 mars, le Vietminh se lance à l’assaut de Dien Biên Phu
avec le soutien d’une puissante artillerie. Un à un les postes avancés français tombent. Les forces françaises
capitulent le 7 mars 1954, après 56 jours de combats violents.

Peu avant la chute de Dien Biên Phu, s’ouvre la conférence de Genève. Les accords de Genève du 20 juillet 1954
reconnaissent l’indépendance du Vietnam, du Laos et du Cambodge. Des élections sont prévues dans un délai de
2 ans. L’armistice s’étend au Laos et au Cambodge. Cependant le Vietnam est provisoirement divisé en deux Etats
à partir du 17ème parallèle : le nord communiste, sous la direction de Ho Chi Minh et le sud proaméricain, avec Bao
Daï. Ce dernier est écarté à l’issue d’élections au profit de Ngo Dinh Diem.
La déclaration d’indépendance du Vietnam

colonialistes français se sont rendus à genoux pour


« Tous les hommes naissent égaux. Le Créateur nous leur livrer notre pays.
a donné des droits inviolables, le droit de vivre, le
droit d'être libre et le droit de réaliser notre Depuis, notre peuple sous le double joug japonais et
bonheur » français a été saigné littéralement. Le résultat a été
terrifiant. Dans les derniers mois de l'année passée
Cette parole immortelle est tirée de la Déclaration et le début de cette année, du Quang Tri au Nord
d'indépendance des États-Unis d'Amérique en 1776. Vietnam, plus de deux millions de nos compatriotes
Prise dans un sens plus large, cette phrase signifie : sont morts de faim.
Tous les peuples sur la terre sont nés égaux ; tous les
peuples ont le droit de vivre, d'être heureux, d'être Le 9 mars dernier, les Japonais désarmèrent les
libres. troupes françaises. Les colonialistes français se sont
enfuis ou se sont rendus. Ainsi, bien loin de nous «
La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen protéger », en l'espace de cinq ans, ils ont, par deux
de la Révolution française de 1791 proclame fois vendu notre pays aux Japonais…
également « Les hommes naissent et demeurent
libres et égaux en droits. » En fait, depuis l'automne de 1940, notre pays a cessé
Ce sont là des vérités indéniables. d'être une colonie française pour devenir une
possession nippone. Après la reddition des
Et pourtant, pendant plus de quatre-vingts années, Japonais, notre peuple tout entier s'est dressé pour
les colonialistes français, abusant du drapeau de la reconquérir sa souveraineté nationale et a fondé la
liberté, de l'égalité, de la fraternité, ont violé notre République démocratique du Vietnam.
terre et opprimé nos compatriotes. Leurs actes vont
directement à l'encontre des idéaux d'humanité et La vérité est que notre peuple a repris son
de justice. indépendance des mains des Japonais et non de
celles des Français. Les Français s'enfuient, les
Dans le domaine politique, ils nous ont privés de Japonais se rendent, l'empereur Bao Dai abdique.
toutes les libertés. Ils nous ont imposé des lois Notre peuple a brisé toutes les chaînes qui ont pesé
inhumaines. Ils ont constitué trois régimes sur nous durant près d'un siècle, pour faire de notre
politiques différents dans le Nord, le Centre et le Sud Vietnam un pays indépendant. Notre peuple a, du
du Vietnam pour détruire notre unité nationale et même coup, renversé le régime monarchique établi
empêcher l'union de notre peuple… depuis des dizaines de siècles, pour fonder la
République démocratique.
En automne 1940, quand les fascistes japonais, en
vue de combattre les Alliés, ont envahi l'Indochine Ho Chi Minh, président.
pour organiser de nouvelles bases de guerre, les
Hanoi, le 2 septembre 1945.

Dissertation

(Sujet de 2011 – 1er groupe)

On distingue deux types de décolonisation en Asie : une décolonisation violente avec une guerre
d’indépendance et une décolonisation négociée plus ou moins pacifique. A partir de ces deux exemples,
montrez que la décolonisation en Asie a été ratée.
LEÇON 7

I. LA PALESTINE JUSQU'A LA FIN DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE

1. Le sionisme

Dans la seconde moitié du XIXème siècle, on voit apparaître les premiers essais littéraires d’un retour des Juifs en Palestine.
Exemple : Autoémancipation de Leo Pinsker, un médecin russe qui plaide en faveur d’une solution nationale du problème
juif, Rome et Jérusalem de Moses Hess un allemand qui encourage la constitution d’un Etat juif et socialiste en Palestine.

En 1896, Theodor Herzl, publie L’Etat juif. L’année suivante, il organise à Bâle le premier Congrès sioniste mondial. Le
sionisme est un mouvement ayant pour but la création d’un Etat juif en Palestine. L’organe d’expression et d’action du
mouvement est l’Organisation sioniste mondiale. Au cours de cette période, la population juive en Palestine augmente
très vite, par vagues ou Aliah :

 La première alyah (1882-1903) est composée de Juifs russes (25 000 hommes)
 La 2ème (1904-1914) comprend des Juifs polonais et russes (35 000 hommes)
 La 3ème (1919-1923) mobilise 35 000 Juifs : c’est l’alyah dogmatique formée en Russie
 La 4ème (1924-1927) vient de Pologne, elle n’est pas socialiste. C’est la première alyah bourgeoise fuyant les
mesures anti-juives en 1924. Environ 82 000 personnes sont concernées.
 La 5ème (1935-1947) intéresse un grand nombre : 265 000 juifs.

A la veille de la proclamation de l’Etat Israël, la population juive est estimée à 630 000 individus contre 24 000 en 1880.
Dans le même temps la population arabe est passée de 525 000 habitants en 1880 à 1 310 000.

La Première Guerre mondiale est la « grande chance » du sionisme. Les Anglais veulent s’installer au Moyen-Orient. Ils
soutiennent les aspirations des Arabes contre les Turcs, mais en même temps s’entendent avec les Français pour acquérir
des zones d’influence au Proche-Orient. C’est le sens des accords Sykes-Picot de 1916. Les sionistes font pression sur le
gouvernement anglais pour lui faire endosser une déclaration politique endossant leurs vues. Cette action est dirigée par
Haïm Weizmann. Après de longues discussions, le gouvernement anglais publie le 2 novembre 1917 la déclaration
Balfour7. Celle-ci ouvre une ère nouvelle. Dans cette déclaration, les Anglais se disent disposés à soutenir la création d’un
foyer national juif en Palestine. La déclaration, unilatérale au début, acquiert une légitimité du fait du mandat sur la
Palestine accordée par la SDN à l’Angleterre en 1920. La déclaration Balfour lie désormais les Anglais.

2. La Palestine sous mandat britannique

En 1920, la Palestine devient un mandat britannique. C’est à l’origine un mandat de type A, laissant une large place à
l’autonomie des populations locales du fait de l’hostilité des Arabes au programme sioniste. Les Arabes boycottent les
élections pour la mise en place d’un Conseil législatif ; les Anglais installent un système d’administration directe. Ils
doivent, en tant que puissance mandataire, mettre en place les installations permettant l’établissement du foyer national
juif. Ainsi, ils reconnaissent l’Organisation sioniste mondiale et surtout sa branche locale en Palestine, l’Agence juive.
Celle-ci installe une administration parallèle, se chargeant de l’accueil des Juifs, de l’attribution des terres et de leur mise
en valeur. Une assemblée est élue au suffrage universel par tous les Juifs ; elle nomme le Conseil national qui est l’organe
exécutif. L’Agence juive et le Conseil national réussissent à créer une société où le pouvoir est exercé par des autorités
juives.

Durant toute la période du mandat les tensions entre les Juifs et les Arabes ne cessent de s’exacerber. Elles sont marquées
par des séries d’attentats, d’attaques contre les localités juives et en 1936, par une grève générale de plusieurs mois.

7
Sir Arthur James Balfour, Secrétaire au Foreign Office.
La politique anglaise se montre très fluctuante entre les Arabes et les Juifs. Elle devient antisioniste à la veille de la seconde
Guerre mondiale. Ainsi en 1939, soucieuse de renforcer le monde arabe, l’Angleterre publie un Livre Blanc comprenant
deux mesures :

 Interdiction d’achat de terres par les Juifs


 Limitation du nombre de certificats d’immigration.

Mais les Juifs ont des avantages : ils possèdent certaines infrastructures économiques (industries, agriculture), une armée
semi-clandestine (la Haganah) à laquelle s’ajoute l’Irgoun dont se détachera plus tard le groupe Stern. Ils ont aussi leur
organisation politique, administrative, leur réseau d’écoles ; ils mènent une politique étrangère par l’intermédiaire de
l’Organisation sioniste mondiale et le département politique de l’Agence juive.

II. VERS L’INDEPENDANCE

Au début de la Seconde Guerre mondiale, les Juifs s’engagent dans le conflit aux côtés des Anglais ; ils mènent en même
temps la lutte contre le terrorisme arabe et les mesures anti-juives des Anglais. En 1944, le terrorisme anti-anglais et anti-
arabe se développe ; il est à l’initiative des groupes dissidents de la Haganah tels que l’Irgoun et le groupe Stern.

A la fin de la Seconde guerre mondiale, la politique anglaise se raidit. Une série de plans est proposé. En 1947, les Anglais
décident de porter l’affaire de la Palestine devant l’ONU, qui, par la résolution 181, propose un plan de partage du pays en
trois entités :

 Un Etat juif
 Un Etat palestinien
 Jérusalem et les lieux saints dotés d’un statut particulier et placés sous la tutelle de l’ONU

Les troupes anglaises doivent évacuer le territoire au plus tard le 1 er août 1948. Les Juifs acceptent le plan, mais les Etats
arabes le rejettent. L’Angleterre quant à elle refuse de participer à la mise en œuvre du plan. Les attentats se multiplient
des deux côtés sans que les britanniques n’interviennent. Ils annoncent leur départ pour le 15 mai 1948 à 0 heure.

Cependant, les Juifs se préparent à la prise de pouvoir. Ils créent un organe regroupant les principales organisations : le
Conseil du Peuple. Celui-ci proclame par la voix de David Ben Gourion la déclaration d’indépendance de l’Etat d’Israël le
14 mai 1948 sur le territoire alloué par l’ONU suivant la résolution 181.

III. LES RELATIONS AVEC LES ARABES

1. Les guerres israélo-arabes

a. La première guerre ou guerre d’indépendance (1948-1949

Dès le lendemain de la proclamation de l’Etat d’Israël, les pays arabes voisins lancent leurs armées contre lui. En fait, la
guerre avait commencé vraiment le 4 avril 1948 avec la mise en œuvre du « plan Dalet » dont l’objectif est la conquête
du pays par la Haganah. Elle s’étend à l’ensemble de la région le 15 mai avec l’entrée en guerre des Etats arabes ((Liban,
Syrie, Transjordanie, Egypte) qui refusent la création de l’Etat d’Israël et l’éviction des Palestiniens de leurs terres. Ils sont
bien équipés de matériel lourd, mais leurs armées manquent d’expérience et de cohésion. Elles sont battues par les
Israéliens qui contrôlent désormais 78 % du territoire de l’ancienne Palestine et Jérusalem-Ouest. La guerre s’achève 7
janvier 1949 sans qu’aucun traité de paix ne soit signé. Les Palestiniens deviennent majoritairement des réfugiés. En effet,
750 000 Palestiniens sont obligés de quitter le pays. Une grande partie du territoire promis à un Etat arabe par l’O.N.U.
est intégrée à Israël. Le reste (Cisjordanie, Jérusalem-Est) est annexé à la Transjordanie ou placé sous gouvernement
militaire égyptien. C’est le cas de la Bande de Gaza. Le droit du retour des réfugiés avec compensation, recommandé par
l’ONU, le 11 décembre 1948 est resté sans suite. Le 11 mai 1949, Israël est admis à l’ONU.
b. La deuxième guerre : la crise de Suez (1956)

Israël participe à l’expédition de Suez. Cette guerre est déclenchée par Nasser8. En réaction au refus des Anglo-Saxons de
financer la construction du barrage d’Assouan, il nationalise le canal de Suez alors contrôlé par le Royaume-Uni en 1956.
Le Premier ministre britannique Anthony Eden annonce une intervention. La France, désireuse de neutraliser le soutien
qu’apporte l’Egypte au FLN algérien l’Egypte, profite de l’occasion pour s’associer à l’opération. Israël quant à lui pense à
protéger ses accès maritimes et en même temps affaiblir l’Egypte qui vient de recevoir des armes soviétiques par
l’intermédiaire de la Tchécoslovaquie.

C’est ainsi que les trois armées frappent simultanément l’Egypte : celles de la France, de la Grande-Bretagne et d’Israël.
C’est l’opération Mousquetaire. Israël occupe la zone du canal le 29 novembre. Cette intervention est condamnée par
l’ONU, tandis que l’URSS menace la coalition de représailles nucléaires. Les USA retirent leur soutien à la livre sterling.
Ces pressions ajoutées à celles de l’ONU amènent les puissances étrangères à retirer alors leurs troupes qui sont
remplacées par les Casques bleus pour garantir la sécurité d’Israël et la libre navigation dans le canal.

c. La troisième guerre ou La guerre des « Six Jours » (1967)

En 1967, l’Egypte craignant une agression israélienne, mobilise son armée le 17 mai et exige le départ des troupes
onusiennes stationnées dans le Sinaï et à Gaza. Le 22 mai, elle ferme le golfe d’Akaba à la navigation israélienne. Nasser
conclue une alliance avec les voisins d’Israël en commençant par la Jordanie, le 31 mai. Cela permet aux partisans de la
guerre préventive en Israël de l’emporter sur les modérés, notamment le Premier ministre, Levi Eshkol, partisan de la
retenue.

Le 5 juin, l’armée israélienne passe à l’attaque, frappant simultanément, l’Egypte, la Jordanie, et la Syrie. En 6 jours elle
prend le Sinaï, Gaza, la Cisjordanie et le Golan9. Cette victoire assure à Israël le contrôle de 1 million de Palestiniens, tandis
que 300 mille habitants de Gaza et la Cisjordanie se transforment en réfugiés.

Les Etats-Unis proposent le plan Rogers, mais il est rejeté par Mme Golda Meir, le Premier ministre israélien. Malgré sa
défaite, l’Egypte continue à mener une guerre d’usure contre dans le canal de Suez. Israël opère des incursions profondes
en Egypte. Le cessez-le feu intervient en 1970.

d. La quatrième guerre ou guerre du Kippour (1973)

Sadate le successeur de Nasser reconstitue son armée pour tenter une percée militaire. Son plan réussit en grande partie.
Pendant la fête du Yom Kippour, date la plus sacrée du calendrier juif, le 6 octobre 1973, l’Egypte attaque l’armée
israélienne dans le Sinaï. La Syrie fait de même sur le plateau du Golan. Pendant une semaine l’attaque syro-égyptienne
met Israël en difficulté, favorisée par l’effet de surprise. Le 9 octobre les assaillants sont renforcés par l’aviation irakienne.
Les Palestiniens du Fatah et les unités jordaniennes participent également à l’attaque. Mais la situation se retourne. Israël
lance la contre-offensive. Les Syriens et leurs alliés sont repoussés. Les Egyptiens sont contenus au sud. Au bout de 10
jours Israël a la maîtrise de la situation. Après avoir franchi le canal de Suez, ses troupes se trouvent non loin du Caire.
Les deux supergrands et le Conseil de sécurité exigent le cessez-le feu. Les négociations aboutissent au dégagement des
troupes. En réalité aucun des supergrands ne souhaite la victoire finale d’un des camps. C’est pourquoi l’URSS menace
dès le 22 octobre d’intervenir si Israël n’arrête pas sa progression ; les Etats-Unis mettent leurs forces en alerte.
Israël rend une petite partie du Sinaï, puis quelques kilomètres du Golan. Il est désormais la principale puissance militaire
du Proche-Orient.

Le 17 octobre, en représailles, l’OPAEP (organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) décide de réduire de 5%
ses exportations pétrolières jusqu’à la libération des territoires occupés par Israël et de pratiquer un embargo vers les
pays qui soutiennent Israël. Ces mesures entrainent une hausse du prix du pétrole qui est multiplié par quatre. C’est le
premier choc pétrolier qui frappe sévèrement les pays industriels.

8
Nasser (Gamal Abdel) : Militaire de carrière, Président de l’Egypte et champion du panarabisme

9
Au premier jour, l’aviation égyptienne est détruite au sol. Le Sinaï est conquis en deux jours, puis la Jordanie passe
sous contrôle israélien le troisième jour. Au cours des deux derniers jours Israël envahit le Golan. La guerre des Six jours
est ainsi une victoire israélienne
e. La cinquième guerre (1982) : « l’Opération Paix en Galilée »

En juin 1982, Israël bombarde massivement la banlieue sud de Beyrouth, les camps palestiniens de Sabra et Chattila, Borj
el-Brajneh, ainsi que plusieurs localités du sud-Liban. L’objectif de cette attaque dénommé « Opération Paix en Galilée »
est de chasser l’OLP du Liban où se sont installés de nombreux combattants palestiniens qui menacent le nord d’Israël.
L’armée israélienne assiège Beyrouth-Ouest. Les 16, 17, et 18 septembre 1982, les Israéliens introduisent les Phalanges
libanaises dans les camps de Sabra et Chattila situés seulement à 200 m de leurs lignes. L’opération fait plus de 1000
victimes civiles palestiniennes. La commission d’enquête qui sera formée plus tard accuse Israël d’être indirectement
responsable de ces massacres.

2. L’évolution de la question palestinienne

a. La résistance palestinienne

La fondation de l’Etat d’Israël développe chez les Palestiniens la conscience d’une identité nationale. A partir de 1948, la
cause palestinienne devient le ciment du monde arabe.

La question palestinienne résulte de la revendication d’une même terre par deux nationalismes :

 Le nationalisme juif
 Le nationalisme palestinien à la fois arabe et islamique, qui résiste à l’expulsion des leurs terres des Palestiniens.

Après la première guerre contre Israël, la résistance palestinienne a pour cadre les camps de réfugiés. Divers mouvements
prônent la lutte armée et l’unité arabe face à l’Etat hébreux : Fatah, FDLP, FPLP10… En 1964, l’OLP (Organisation de
libération de la Palestine) est créée à l’initiative de la Ligue arabe et surtout du président égyptien Nasser. Ce dernier
craint d’être entraîné dans une guerre contre Israël par des groupes palestiniens incontrôlés. Il place à la tête de la jeune
organisation Ahmed Choukeiri. Le Congrès fondateur se tient à Jérusalem. Dans sa charte, l’OLP rejette l’existence
d’Israël. L’OLP regroupe plusieurs organisations palestiniennes dont la plus importante est le Fatah qui se veut
indépendant des pays arabes.

Après la guerre des « Six Jours », les Palestiniens se dégagent de l’influence des Etats arabes. En rejetant la résolution
242, Yasser Arafat s’éloigne de la position des pays arabes. A. Choukeiri démissionne, privé du soutien de Nasser. L’OLP
durcit sa charte et intègre les groupes armées dissidentes. Yasser Arafat en devient le président en 1969. A partir du
territoire jordanien, l’OLP lance ses attaques contre Israël. Mais le manque de discipline finit par irriter la Jordanie
donnant lieu à dans combats sanglants avec cette dernière. Les Jordaniens mettent en déroute les activistes palestiniens
en 1970. Ces derniers se replient au Liban et multiplient les attentats. Les Palestiniens utilisent le terrorisme international
pour faire connaître leurs revendications s’isolant par la même occasion sur la scène internationale. Exemple : l’assassinat
de 44 athlètes israéliens aux Jeux olympiques de Munich en 1972.

En 1974, l’OLP adopte une attitude plus modérée, s’éloignant du terrorisme. Mais d’autres mouvements de l’OLP tels
que le FDLP dénoncent cette orientation. Elle est reconnue par les pays arabes comme le représentant légitime du peuple
palestinien. Elle obtient à l’ONU la qualité d’observateur. Les institutions politiques prennent le relais des formations
militaires : centre de recherches, institutions culturelles, union de masse, etc. L’activité diplomatique est intense.

En 1977, l’Egypte, principal allié de la Palestine, décide de mettre fin à son conflit avec Israël. Son président, Anouar el
Sadate, se rend en visite à Israël, puis signe en 1978, avec le premier ministre israélien, Menahem Begin, les accords de
Camp David sous la médiation du président des Etats-Unis, Bill Clinton. A cette occasion l’Egypte reconnaît Israël qui à
son tour évacue le Sinaï. Les pays arabes réagissent par l’exclusion de l’Egypte de la Ligue arabe. Sadate est assassiné en
1981 (6 octobre) par les islamistes.

Après la guerre de 1982, la direction de l’OLP se déplace vers Alger et Tunis.


En 1987, le 7 décembre, un accident de circulation provoque l’insurrection à Gaza et en Cisjordanie. C’est le début de
l’intifada11. L’état de siège est décrété, mais les soldats israéliens et les jeunes palestiniens continuent à s’affronter.

10
FDLP : Front de libération de la Palestine - FPLP : Front populaire de libération de la Palestine
11
Intifada : (aussi écrit : Intifadah) est un terme arabe signifiant soulèvement. La première Intifada, appelée « guerre
des pierres », a débuté en décembre 1987. La seconde Intifada, également appelée « Intifada « Al-Aqsa » », commence
en 2000 après la visite d’Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées qui est aussi le Mont du Temple à Jérusalem
Malgré cela Israël consolide sa mainmise en développant la colonisation juive. Une première conséquence de l’Intifada
est la renonciation de la Jordanie à l’annexion de la Cisjordanie. Une autre est le retour de l’OLP sur la scène ; elle en avait
été éloignée depuis son expulsion du Liban 1982 et se trouvait affaiblie davantage par des rivalités internes. Profitant de
cette évolution, en 1988, le Conseil national palestinien proclame l’existence d’un Etat de Palestine fondé sur les
résolutions 181, 242 et 338 et implicitement reconnaît l’existence d’Israël. Il réaffirme également sa condamnation du
terrorisme. En s’engageant aux côtés de l’Irak pendant la guerre du Golfe en 1991, l’OLP connaît de sérieuses difficultés.
Elle parvient cependant à obtenir avec Israël l’ouverture de négociations secrètes qui vont aboutir aux accords d’Oslo de
1993. Au cours de cette période, émergent de nouveaux mouvements tels que le Hamas et le Jihad islamique. De
nouveaux moyens de lutte sont mis en œuvre avec le financement d’ONG et d’Etats.

b. Les relations israélo-palestiniennes depuis 2000

La seconde Intifada commence le 28 septembre 2000. Elle est violemment réprimée par l’armée israélienne. Le Hamas
mène une campagne d’attentats-suicides jusqu’à la fin de 2001. Israël réagit par l’opération Rempart en 2002, marquée
par la bataille de Jénine d’une part et la construction d’une barrière de séparation en Cisjordanie.

En 2004, Israël tente de mettre un terme à la guérilla dans la bande de Gaza ; c’est l’opération « Arc- en-ciel ». En 2006,
Israël lance une opération militaire dans la Bande ce Gaza. C’est l’opération « Pluies d’été », dans le but de sauver la vie
au soldat Gilad Shalit, prisonnier d’un commando palestinien. Les activistes Palestiniens réclament en échange la
libération des prisonniers détenus par l’Etat hébreu. Ce dernier exprime son refus de négocier avec des terroristes.
L’opération a aussi pour but de mettre fin aux tirs de roquettes sur les villes israéliennes et de déstabiliser le
gouvernement du Hamas.

Depuis janvier 2006, le Hamas dispose de la majorité parlementaire en Palestine (42,9 %). De ce fait, le Premier ministre
de l’Autorité palestinienne est issu de ses rangs. Mais la collaboration avec le Fatah est difficile, les deux camps cherchant
à s’éliminer mutuellement. En 2007, le Hamas prend le pouvoir à Gaza, le soustrayant à l’autorité du président Mahmoud
Abbas. Israël déclare la bande de Gaza « entité hostile ». Elle est soumise à un blocus israélo-égyptien, tandis que la
violence se développe avec Israël en 2008 : aux tirs de roquettes répondent les raids israéliens.

En 2009, le cessez-le feu appelé par l’ONU n’est pas respecté. De nombreuses manifestations sont organisées dans
diverses villes du monde pour condamner la violence des attaques israéliennes tandis que la situation humanitaire se
dégrade.

En 2010 et 2011, les flottilles humanitaires qui tentent de rejoindre Gaza sont arraisonnées par Tsahal. Le 27 avril 2011,
le Fatah et le Hamas signent un accord de réconciliation pour pouvoir organiser des élections générales au cours de
l’année.

c. Les démarches diplomatiques depuis 1993

Les accords d’Oslo du 13 septembre 1993 servent de cadre à l’évolution de la Palestine. Ils ont prévu pour 5 ans avant la
conclusion d’un accord définitif annoncé pour le 4 mai 1999. Il sera tacitement prorogé en attendant cet accord. Dans
ces accords la Palestine reconnaît le droit d’Israël à l’existence, tandis qu’Israël reconnaît la légitimité de l’OLP. Les deux
adversaires définissent leurs relations futures de 25 février 1994, et 3 mois plus tard précisent les modalités d’application
des accords d’Oslo ; on appelle cette mesure Oslo 1. Les extrémistes multiplient les attentats. Le Premier ministre
israélien Itzhak Rabin est lui-même tué par un extrémiste juif, qui l’accuse de trahison à la cause juive (25 novembre
1995).

Son successeur Shimon Pérès lance l’offensive au Liban pour détruire les bases terroristes. Il perd les élections st Benjamin
Netanyahou lui succède. Peu enthousiaste pour les négociations, il encourage les implantations de colonies juives dans
les territoires occupés en 1967. Malgré cette politique, de petits actes pour la recherche de la paix sont posés :

 La visite d’Arafat au Président israélien Ezer Weizmann (8 octobre 1996)


 L’accord sur le retrait israélien des 4/5 de Hébron en 1997. Un nouveau calendrier de négociation est établi.
C’est Oslo 2.
 Le président Américain Clinton réunit Arafat et Netanyahou à Wye River aux Etats-Unis (Pennsylvanie). Un
nouvel accord est signé : Israël s’engage à évacuer en 1998, 13 % de territoire supplémentaire en Cisjordanie, à
créer un passage entre Gaza, Jéricho, et à libérer des prisonniers palestiniens
En 1999, Ehud Barak remplace Netanyahou. Les négociations reprennent avec plus de détermination. Ainsi, en 2000,
Israël accepte de se retirer de 91 % de la Cisjordanie et de partager Jérusalem avec la Palestine.

En 2000, le Vatican apporte son soutien à la Palestine et signe avec elle un accord historique de coopération dans lequel
il s’oppose à toute action unilatérale d’Israël sur Jérusalem.

En 2001, en pleine Intifada, le président Clinton provoque une rencontre à Taba. Israël fait de nouvelles concessions sur
la Cisjordanie, le contrôle des frontières, les implantations juives et Jérusalem. Mais les Palestiniens refusent le partage
de Jérusalem et exigent dans le même temps le retour des réfugiés de 1948 et 1967, ce que Israël refuse, pour ne pas se
laisser envahir par une population majoritairement arabe. Ehud Barak, qui est allé trop loin dans ses concessions doit
céder la place à un nouveau Premier ministre, Sharon.

Au cours des années suivantes, Israël devient la cible d’attentats meurtriers, organisés par le Hamas, le Jihad islamiques,
les Brigades Al Aqsa. La confiance est rompue entre les autorités israéliennes et Yasser Arafat.

L’organe suprême de l’autonomie palestinienne est le Conseil de 88 membres. En 1996, Arafat le président du comité
exécutif de l’OLP devient président d l’Autorité palestinienne dont les compétences sont cependant limitées aux seules
zones autonomes. Elle n’a aucune compétence en matière de défense et de politique extérieure.

En 2004, Yasser Arafat décède. Mahmoud Abbas est élu à la présidence de l’Autorité palestinienne. Il s’engage à mettre
un terme à la terreur et à négocier la paix sur base du retrait israélien de toute la Rive occidentale du Jourdain et de Gaza,
d’une capitale à Jérusalem et du retour des réfugiés palestiniens.

Le Quartet formé entre les USA, l’Union Européenne, la Russie et l’ONU propose une « Feuille de route pour la paix »
ayant pour but de conduire à un Etat palestinien avant 2005. Le président palestinien Mahmoud Abbas obtient l’arrêt des
actions violentes des groupes armés palestiniens contre Israël qui de son côté, lance le processus d’évacuation de la
bande de Gaza allant jusqu’aux expulsions forcées.

En 2007, le 19ème sommet ordinaire de la Ligue arabe relance l’initiative arabe de paix, le "plan Abdallah". Il tente de
convaincre les groupes de résistance palestinienne à marquer une trêve avec Israël, mais il ne sera pas entendu. Jusqu’en
2011, les progrès diplomatiques sont limités tandis que le Hamas multiplie les actes violence contre Israël. Le Hamas a
pris depuis 2007 le contrôle de la bande Gaza où il a installé un gouvernement parallèle.

En 2011, le Fatah et le Hamas se réconcilient au Caire, après 4 ans d’antagonisme. Ils s’entendent pour un gouvernement
intérimaire, des élections en Cisjordanie et à Gaza. Le président de l’Autorité palestinienne sera élu au suffrage universel
direct. Le Hamas est favorable à la création d’un Etat palestinien dans les frontières de 1967. Il comprendrait la bande de
Gaza, la Cisjordanie, et Jérusalem-Est. Le président Obama soutien ce projet, rejeté par Israël qui estime que les frontières
de 1967 sont indéfendables.

C’est sur cette lancée, que l’idée de la proclamation de l’indépendance de la Palestine pour le 28 septembre 2011 prend
forme.
Commentaire

Il y a sur le même territoire la Palestine, deux nationalismes contemporains antagonistes. Les


Palestiniens arabes ont la hantise, exprimée nettement et publiquement dès 1891, de garder leur
identité et leurs terres. Le sionisme politique, clairement exposé dans le livre de Théodore Herzl, L’Etat
juif (1897), revendique des terres et l’installation d’un peuplement juif immigré croissant. Face à la
puissance mandataire britannique (1918-1948), les deux mouvements mènent chacun une lutte
d’indépendance propre. Ils ne peuvent pas davantage de nos jours se rejoindre dans une lutte unique,
car les Palestiniens, et les Arabes en général, estiment que l’Etat d’Israël reste un Etat colonial
cautionné et soutenu par ce que certains nomment l’impérialisme mondial dirigé par les Etats-Unis et
aidé par le sionisme international, mouvement et doctrine déclarés racistes au sein même d’une
Assemblée générale de l’ONU en 1975. La seule solution vraisemblable consistera pourtant en une
coexistence des deux peuples sur le même territoire. Ce conflit persistant se manifeste de manière
critique et meurtrière par trois guerres importantes entre Israël et la coalition des Etats arabes : en
1948, en 1967, en 1973. Chacune des guerres est suivi à terme, de conflits armés bilatéraux forts
importants : la guerre israélo-égyptienne du canal de Suez en 1956, avec la participation franco-
britannique ; la « guerre d’usure entre l’Egypte et Israël en 1968-1970 ; la guerre entre Israël et la
résistance palestinienne au Liban en 1982-1985 ; enfin la « guerre des pierres » ou Intifada
(soulèvement) à Gaza et en Cisjordanie depuis décembre 1987. Si bien que l’on peut parler de sept
conflits armés israélo-arabes.

Olivier Carré, Le conflit israélo-arabe, in Les Enjeux, éditions Encyclopaedia universalis, Paris, 1990
LEÇON 8

I. ÉVOLUTION DE L'ALGÉRIE AVANT LA GUERRE D'INDÉPENDANCE (1954)

1. L'Algérie française

L'Algérie occupe dans l'empire français une place à part. Pour les Français elle n’est pas une colonie, mais un ensemble
de trois départements. A ce titre, elle relève du ministère l'intérieur. La population est formée de 2 groupes inégaux en
nombre et en droit :

 Une minorité de Pieds Noirs (près d’un million), les Français d'Algérie, qui jouissent de droits politiques et qui
dominent la vie économique et administrative.
 Les Musulmans qui forment la grande majorité arabo-berbère (8,5 millions). Ils sont soumis au régime de
l’indigénat.

Les conditions différentes qui caractérisent ces 2 groupes, ont pour conséquences un durcissement du nationalisme
algérien.

2. Le nationalisme algérien jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale

Une conscience nationale naît au sein des lettrés, des commerçants, des émigrés. Trois tendances émergent : les « Jeunes
Algériens », l’Association des Oulémas, et « l’Etoile Nord-Africaine »
 Les « Jeunes Algériens » regroupent la petite élite citadine, favorable à l'assimilation complète de l'Algérie à la
France. Partisans de l’assimilation, ils sont regroupés dans la Fédération des élus indigènes. Leur audience est
réduite à cause du peu de résultats obtenus au parlement français.

 L'association des Ouléma, se veut le défenseur d'une Algérie musulmane et arabe. Défavorable à l’assimilation,
elle prône l’indépendance dans une Fédération arabe. Les oulémas et les militants de l’arabisme proposent une
autre issue : la « Nation algérienne ». Les Oulémas vulgarisent leurs idées par divers moyens : enseignement,
scoutisme, propagande écrite et orale. Leur mot d’ordre est : « L’Algérie est ma patrie, l’arabe ma langue, l’islam
ma religion »

 « L'Étoile Nord-Africaine » est une organisation à tendance communiste, dirigée par Messali Hadj. Fondé à Paris
en 1926, il gagne l'Algérie 10 ans plus tard. Il est remplacé en 1937 par le P.P.A. (Parti du peuple Algérien). Il
réclame l’indépendance. Il s’oppose aux assimilationnistes représentés par Mohammed Bendjelloul et Ferhat
Abbas jusqu’en 1940 et à la formule du protectorat (véhiculée par Cheikh Ben Badis et El Ibrahim).

En 1936, encouragées par l'avènement du Front populaire en France, ces différentes tendances organisent un « Congrès
musulman » qui réclame le rattachement à la France, un collège unique, la représentation des musulmans au parlement.
Mais non seulement le gouvernement français rejette ce projet, mais également le clan de Messali Hadj. D’ailleurs, le
P.P.A jugé dangereux est dissous en 1939.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, favorisé par la défaite française, le débarquement anglo-américain en Afrique
du Nord et l'anticolonialisme des États-Unis, le nationalisme algérien se renforce. C'est ainsi qu'en 1943, Ferhat Abbas,
publie le « Manifeste du peuple algérien » où il réclame un État algérien autonome et démocratique. De nombreuses
personnalités alors considérées comme modérées signent le document. Trois mois plus tard, le Manifeste est complété
par des projets de réformes réclamant un gouvernement franco-algérien, l’égalité totale entre Musulmans et Français .Le
Comité français de libération nationale (CFLN) considère comme inacceptable cette demande, annonce cependant des
réformes politiques, notamment, l’octroi de la citoyenneté à une frange de musulmans, avec maintien du statut
personnel de musulman ; pour les autres, la citoyenneté sera étendue après le vote de l’Assemblée constituante. Cette
mesure abolit définitivement le statut de l’indigénat. En 1944, toutes les mesures d'exception contre les musulmans sont
abolies. Ces réformes, un peu tardives, suscitent peu d'enthousiasme, et sont considérées comme une francisation
autoritaire. Ce qui pousse Ferhat Abbas à fonder en 1944, l'Association des Amis du manifeste, qui rassemble tous les
nationalistes et demande l'autonomie. Le nationalisme algérien devient ainsi plus actif. Le PPA diffuse de son côté des
idées plus hostiles.

En 1945, Messali Hadj envisage l’insurrection. Mais des manifestations de protestations se transforment en graves
émeutes dans la région de Sétif. Les paysans du nord-Constantinois attaquent les fermes des colons et massacrent une
centaine d’Européens isolés. L'armée française riposte violemment. La révolte est maîtrisée en moins de deux semaines.
3. Évolution du nationalisme algérien au lendemain de la Seconde Guerre mondiale

La France espère apaiser la situation par des réformes économiques et politiques. Mais, depuis 1946, les nationalistes
algériens se sont réorganisés en deux tendances : l’UDMA et le MTLD.

 L'U.D.M.A. (Union démocratique du manifeste algérien), fondée par Ferhat Abbas. Elle est favorable à une
république algérienne autonome, associée à la France. Il recrute essentiellement parmi les notables
occidentalisés

 Le M.T.L.D. (Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques), le nouveau parti de Messali Hadj. Il
revendique une Algérie musulmane et arabe indépendante. La base de recrutement de ce parti est plus large. A
partir de 1947, le MTLD est devenu la principale force politique du pays. Son mot d’ordre est : « parlement
algérien, souveraineté algérienne ». Il possède une organisation paramilitaire secrète, l'Organisation spéciale
(O.S.) dirigée par Ahmed Ben Bella. Elle doit préparer la résistance armée. Cette organisation est cependant
dissoute en 1950. Plusieurs tendances vont alors diviser le parti. L'une d'elle crée le 23 novembre 1954 autour
d'anciens membres de l'O.S. le Comité révolutionnaire d'unité et d'action (C.R.U.A.).

II. LA GUERRE D'INDÉPENDANCE (1954-1962)

1. L'insurrection

a. La naissance du FLN (Front de libération nationale)

En 1954, la plupart des réformes promises par la France ne sont pas appliquées. Il n’y a plus de dialogue avec les
nationalistes algériens. Ces derniers qui progressent sur le plan culturel souhaitent le modernisme et la restauration de
leurs valeurs nationales. Ils créent le FLN (Front de libération nationale) au Caire, qui apparait publiquement le 1er
novembre 1954. Il est composé d’un petit groupe de militants du PPA exaspéré par la rupture au sein de la direction de
leur parti (entre messalistes et centralistes12).

En effet, l’objectif du CRUA - réconcilier les tendances messalistes et centralistes en vue de déclencher la lutte armée -
ayant avorté, le MTLD se disloque. Les messalistes organisent leur propre congrès en Belgique (à Hornu) en juillet 54. Les
centralistes font de même à Alger en août. Mais dès le début du mois de juillet, 22 cadres de l’O.S. décident de passer à
la lutte armée. Ils chargent un comité (de 5 puis 6 personnes 13) de mettre en application leurs décisions. Ainsi prend
forme une nouvelle organisation qui prend le nom de FLN-ALN et qui fixe au 1er novembre la date de l’insurrection avec
des actions armées sur l’ensemble du territoire alors divisé en 6 régiosn (les wilayas). Les wilayas sont elles-mêmes
organisées en zones (les mintaqa) et en secteurs (kism). A partir de 1956, Alger devient le siège du FLN. Le FLN se dote
d’institutions précises : le conseil national de la résistance algérienne (CNRA), sorte de parlement (24 membres), le comité
de coordination et d’exécution (CCE).

b. L’insurrection

er
L'insurrection est lancée comme prévue le 1 novembre 1954 dans les Aurès par le FLN. Qui rapidement entre en rivalité
avec le MNA14 (Mouvement national algérien) de Messali Hadj, favorable au légalisme politique associé à l’action directe.
Les deux tendances se font la guerre ; leur rivalité se solde par 10 000 morts et 25 000 blessés. Le FLN est vainqueur. Son
programme est : « restaurer un Etat algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques ».
Il devient le représentant du peuple algérien. Après le 1 er novembre, le gouvernement français lance une répression tous
azimuts, considérant le soulèvement comme une rébellion. Il dépêche 6 bataillons, de la 25 ème division aéroportée,
renforcer les 50 000 hommes déjà présents. La révolte gagne la Kabylie15 et le Nord-Constantinois16. En 1955, les insurgés

12
Partisans du comité central
13
Ahmed Ben Boulaid, Larbi Ben M’hidi, Mourad Didouche, Krim Belkacem,Rabah Mirat
14
La fraction messaliste crée le MNA en décembre 1954
15
Kabylie : La Kabylie est une située dans le nord de l'Algérie. Terre de montagnes densément peuplées, elle tient son
nom des Kabyles, population berbère

16
Nord-Constantinois : Constantine est la capitale du troisième département de l’Algérie française, à l’est ; les autres
départements étant le département d’Alger au centre et celui d’Oran à l’ouest.
du Nord-Constantinois s'attaquent à 36 centres de colonisation. La France appelle 60 000 réservistes. Dès lors la guérilla
se transforme en guerre d’indépendance.

A la fin de 1955, les centralistes du MTLD rejoignent le FLN, suivis des Oulémas et de l’UDMA en 1956. En 1956, les
Combattants de la libération sont créés. Des réseaux de guérilla urbaine sont mis en place. Ils finissent par intégrer le
FLN. Le FLN renforce son contrôle sur les ouvriers grâce à la création de l’UGTA (Union générale des travailleurs algériens)
en 1956, sur les commerçants par l’UGCA (Union générale des commerçants algériens), et les étudiants par l’UGEMA
(Union générale des étudiants algériens). Il réussit à écarter les élites politiques et sociales alliés du pouvoir colonial. Ainsi,
61 élus indigènes démissionnent.

2. L’installation de la guerre d’indépendance

En 1956, l’Algérie est soumise à un régime d’exception, les gouverneurs disposant de pouvoirs spéciaux. En 1957 et au
début de 1958, le FLN inflige de sérieux revers aux Français dont les effectifs sont progressivement portés à 500 000
hommes et se lance dans la guerre des villes. Il réussit à tenir en échec les parachutistes du général Massu pendant la
bataille d’Alger pendant plus de 9 mois.

Cependant, il ne parvient pas à établir un gouvernement indépendant sur le territoire. Il multiplie les attentats et les
embuscades plongeant ainsi la France dans une véritable guerre. La découverte de pétrole au Sahara renforce
l’intransigeance de la France.

Des négociations sont tentées mais échouent à cause pour deux raisons :

 L’armée française intercepte l’avion marocain transportant les quatre négociateurs du FLN parmi lesquels
Ahmed Ben Bella, le 22 octobre 1956. En effet, le Maroc et la Tunisie ayant invité plusieurs membres du FLN à
Tunis, ces derniers venant du Caire transitent par l’Espagne et le Maroc. Ils poursuivent leur route sur un avion
français, affrété par une compagnie marocaine, mais piloté par un équipage français. Suivant les directives
données par les officiers français, le pilote fait atterrir l’avion à Alger où les quatre responsables sont arrêtés.

 La France joue un rôle actif dans la crise de Suez contre l'allié du FLN, l'Égypte.

La violence gagne du terrain : au terrorisme urbain du FLN, la France répond par la terreur, le ratissage des zones
contrôlées par le FLN, le déplacement des populations et la construction d'un barrage électrifié sur les frontières pour
isoler l'Algérie de ses voisins arabes. C’est la ligne Morrice.

Cependant, l'armée française échappe de plus en plus au contrôle de l'administration. De plus, la France connaît un revers
diplomatique en 1958 suite au bombardement d'un village tunisien (Sakiet Sidi Youssef) abritant un camp d’entraînement
de l’A.L.N. Cela entraîne des réactions à l'ONU. Le F.L.N. se rapproche des nationalistes marocains et tunisiens. C'est dans
cette situation que des colons constituent un Comité de Salut public17 présidé par le général Massu à l'Alger, opposé au
nouveau gouvernement et favorable à « l’Algérie française ». Le commandant des troupes d’Algérie, le général Salan et
le chef d’état-major, le général Ely annoncent que l’armée ne tolérerait pas une nouvelle capitulation. Craignant un coup
d’Etat militaire à Paris par des militaires venus d’Algérie, de nombreux hommes politiques estiment que seul le général
de Gaulle peut éviter à la France la guerre civile. De Gaulle, investi Président du Conseil, réclame une nouvelle
constitution, mettant fin à la 4ème République.

3. La marche vers l'indépendance

L’arrivée de De Gaulle et la mise en place d’une nouvelle stratégie de guerre transforment profondément les rapports de
force. Des camps de regroupement sont érigés où seront parqués plus de 2 millions de ruraux rendant difficile la
progression du FLN. L’approvisionnement en armes à partir du Maroc et de la Tunisie est bloqué par la construction de
la ligne Morice électrifiée et minée. Cela permet aux offensives aéroportées d’avoir une grande efficacité contre le FLN.

17
A l’issue des funérailles de trois soldats français tués par le FLN, Robert Martel (un viticulteur) et Pierre Lagaillarde
(commerçant), leaders des colons complotant contre le gouvernement incitent à la foule à prendre d’assaut le
gouvernement général. Ces leaders seront membres du Comité de salut public
Dès son investiture, De Gaulle se rend à Alger (le 4 juin) où il prononce un discours rassurant mais ambiguë, dans lequel
il envisage l’égalité des musulmans et des Pieds Noirs, des élections au collège unique et appelle les deux camps à faire
la paix. Le FLN refuse les propositions de réconciliation sur la base de l’assimilation, intensifie sa lutte et forme en
septembre 1958 le G.P.R.A. (Gouvernement provisoire de la république algérienne) présidé par Ferhat Abbas, assisté de
Belkacem Krim et Ahmed ben Bella, alors internés en France. De Gaulle annonce d'importantes mesures de
développement économique et social à travers le plan de Constantine (redistribution de 250 000 ha de terres aux
musulmans, construction de 20 000 logements, création de 400 000 emplois, industrialisation du pays) alors que l'armée
française combat vigoureusement l'ALN appliquant le plan Challe.

Cette guerre affaiblit diplomatiquement la France ; de plus, elle doit faire face au coût élevé de la guerre et à la pression
internationale très forte. Le temps n’est plus à une solution militaire mais à un règlement négocié. De Gaulle ouvre cette
perspective le 16 septembre 1959 en proposant une solution politique : après le retour de la paix, les Algériens devront
choisir entre l'indépendance qu'il qualifie de sécession, le rattachement direct à la France ou intégration, et l'autonomie.
Ce discours a pour conséquence une baisse de la popularité du Général.

En effet, l'armée et une partie des Pieds Noirs considèrent ce discours comme un abandon de la part de la France. C'est
pourquoi, ils tentent un coup de force en dressant à Alger des barricades en janvier 1960 (la semaine des barricades : 24-
30 janvier). Le 24 janvier, la gendarmerie passe à l’action en ouvrant le feu. Le bilan est de 26 morts parmi les civils
algériens. Mais De Gaulle a le dessus sur eux tandis que le GPRA se déclare ouvert aux négociations. Elles sont engagées
en 1960, mais sont rendus difficiles par l’intransigeance du FLN et la résistance des Pieds Noirs. De Gaulle décidé à
résoudre le problème algérien, organise un référendum en 1961 pour obtenir l'aval des électeurs français. Le vote lui
étant favorable, tant du côté des autochtones que des métropolitains, il reprend contact avec le GPRA.

D'anciens généraux fomentent un coup d'État en avril 1961, mais De Gaulle reprend le contrôle de la situation, et relance
les négociations avec le GPRA en mai. En septembre, il accepte le principe d'un État indépendant décidé par un scrutin
d'auto-détermination. Mais parallèlement, les combats se poursuivent. Les Pieds Noirs opposés à cette évolution
organisent alors la résistance à travers une organisation terroriste, l'O.A.S. (organisation de l'armée secrète) constituée
par deux généraux putschistes, Salan et Jouhaux, et passent dans la clandestinité. L’OAS menace les Musulmans et les
gaullistes multipliant les attentats.

Les négociations secrètes puis officielles à Evian, entre le gouvernement français et le F.L.N. commencées en 1961,
aboutissent aux accords du 18 mars 1962 qui accordent l’indépendance à l’Algérie. Des accords sont signés entre la
France et le GPRA ; ils sont approuvés par un référendum en France. Les négociateurs du GPRA ont fait quelques
concessions :

 Les Français bénéficieront de la double nationalité pendant 3 ans ; ils choisiront ensuite la nationalité française
ou algérienne
 Les sociétés françaises disposent d’un droit préférentiel dans la distribution de permis de recherche et
d’exploitation du pétrole du Sahara pour pendant 6 ans
 Les hydrocarbures algériens, les bases militaires de Mers el Kébir (pour 15 ans) et les installations du Sahara (5
ans) seront payées en francs français. En contrepartie la France s’engage à apporter son aide économique et
financière à l’Algérie indépendante notamment en réalisant le plan de Constantine de 1958 et à développer la
coopération culturelle.

Le 8 avril 1962, le peuple français approuve les accords d’Evian par referendum (80 % des votants approuvent les accords
d’Evian). Le 1er juillet suivant le peuple algérien plébiscite son indépendance (99 % de oui). L’indépendance est proclamée
le 3 juillet 1962. La guerre est finie. Les armées cessent le feu, mais les activistes de l’OAS poursuivent la violence,
pratiquant la terre brûlée, attisant la haine entre Français et Musulmans. Les Français, malgré les accords signés à Evian,
ne peuvent se maintenir dans le pays : 1 million de pieds noirs et 150 000 harkis quittent précipitamment le pays pour
rejoindre la métropole.
Commentaire

Allocution radiodiffusée et télévisée du général De Gaulle, prononcée le 16 septembre 1959


Devant la France, un problème difficile et sanglant reste posé : celui de l’Algérie. Il nous faut le
résoudre… Nous le ferons comme une grande nation et par la seule voie qui vaille, je veux dire
par le libre choix que les Algériens eux-mêmes voudront faire de leur avenir.

Mais le destin politique, qu’algériens et Algériennes auront à choisir dans la paix, quel peut-il
être ? Chacun sait que théoriquement, il est possible d’en imaginer trois. Comme l’intérêt de tout
le monde, et d’abord celui de la France, est que l’affaire soit tranchée, sans aucune ambiguïté,
les trois solutions concevables feront l’objet de la consultation.

Ou bien : la Sécession, où certains croient trouver l’indépendance. La France, quitterait alors les
Algériens qui exprimeraient la volonté de se séparer d’elle. Ceux-ci organiseraient, sans elle, le
territoire où ils vivent, les ressources dont ils peuvent disposer, le gouvernement qu’ils souhaitent.
Je suis, pour ma part convaincu qu’un tel aboutissement serait invraisemblable et désastreux.
L’Algérie étant ce qu’elle est, et le monde ce que nous connaissons, la sécession entraînerait une
misère épouvantable, un affreux chaos politique, l’égorgement généralisé et, la dictature
belliqueuse des communistes. Mais il faut que ce démon soit exorcisé et qu’il le soit par les
Algériens. Car s’il devait apparaître, par extraordinaire malheur, que telle est bien leur volonté, la
France cesserait à coup sûr, de consacrer tant de valeurs et de milliards à servir une cause sans
espérance. Il va de soi que, dans cette hypothèse, ceux des algériens de toutes origines qui
voudraient rester Français le resteraient de toute façon et que la France réaliserait, si cela était
nécessaire, leur regroupement et leur établissement. D’autre part, toutes dispositions seraient
prises, pour que l’exploitation, l’acheminement, l’embarquement du pétrole saharien, qui sont
l’œuvre de la France et intéressent tout l’Occident, soient assurés quoiqu’il arrive.

Ou bien : la francisation complète, telle qu’elle impliquée dans l’égalité des droits : les Algériens
pouvant accéder à toutes les fonctions politiques, administratives et judiciaires de l’Etat et entrer
dans tous les services publics ; bénéficiant, en matière de traitements, de salaires, de sécurité
sociale, d’instruction, de formation professionnelle, de toutes les dispositions prévues pour la
métropole ; résidant et travaillant où bon leur semble sur toute l’étendue du territoire de la
République ; bref, vivant à tous les égards, quelles que soient leur religion et leur communauté,
en moyenne sur le même pied et au même niveau que les autres citoyens et devenant partie
intégrante du peuple français, qui s’étendrait, dès lors, effectivement, de Dunkerque à
Tamanrasset.

Ou bien : le Gouvernement des Algériens par les Algériens, appuyés sur l’aide de la France et en
union étroite avec elle, pour l’économie, l’enseignement, la défense, les relations extérieures.
Dans ce cas, le régime intérieur de l’Algérie devrait être de type féodal, afin que les communautés
diverses, française, arabe, kabyle, mozabite, etc., qui cohabitent dans le pays, y trouvent des
garanties quant à leur vie propre et un cadre pour leur coopération.

Charles de Gaulle, Discours et Messages, 1952-1962, Editions Plon

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