Vous êtes sur la page 1sur 450

Julien Rouyer

Concours
externe et
interne

Réviser les bases


pour l’agrégation
de mathématiques

• Rappels fondamentaux
• Exercices d’annales corrigés
Références sciences

Réviser les bases


pour l’agrégation
de mathématiques
• Rappels fondamentaux
• Exercices d’annales corrigés

MPSI Julien Rouyer


P C SI
Concours
externeI et
PTS
interne
MP2I
Collection Références sciences

dirigée par Paul de Laboulaye


paul.delaboulaye@editions-ellipses.fr

Retrouvez tous les livres de la collection et des extraits sur www.editions-ellipses.fr

ISBN 9782340-069756
©Ellipses Édition Marketing S.A., 2022
8/10 rue la Quintinie 75015 Paris
Réviser les bases pour l’agrégation de
mathématiques.
Rappels fondamentaux et corrigés détaillés des
questions préliminaires des annales de 2017 à 2021.
Concours externe, interne et spécial docteur.

Julien Rouyer
Agrégé de mathématiques
Université de Reims Champagne-Ardenne
« s’il peut être doux de baigner dans leur hypnose,
il faut parfois savoir, comme de toute névrose,
se libérer des mathématiques »

à Franck Pirotte,
avec mon amicale gratitude.
Avant-propos

Avant-propos
Ce livre s’adresse principalement aux candidats à l’agrégation de ma-
thématiques mais il peut être consulté à profit par les étudiants de classes
préparatoires, de licence, de master, tout comme par les candidats au CAPES
de mathématiques. Les nombreux rappels et exercices courts qu’il contient
permettent à tous de tester rapidement connaissances et réflexes sur des points
précis, souvent d’un niveau licence. Son ambition est de collecter une bonne
partie des résultats incontournables qui forment le socle de connaissances
de l’agrégatif qui souhaite passer les écrits sans encombre tout en évitant de
se perdre dans la résolution de questions excessivement ardues par rapport au
niveau moyen attendu.

Les sujets des trois concours existants sont abordés :

— concours interne, ouvert notamment aux enseignants du secondaire


titulaires d’un CAPES et justifiant d’un nombre suffisant d’années
d’exercice,
— concours externe standard, ouvert à tout titulaire d’un master de
mathématiques,
— concours externe spécial docteur, ouvert aux seuls titulaires d’un
doctorat 1 .

Depuis plusieurs années, seule une partie des postes ouverts au concours
sont pourvus ; le jury estime que trop peu de candidats démontrent des qualités
suffisantes. L’agrégation de mathématiques, qui n’a donc plus de concours que
le nom, est devenue, bien que toujours difficile, un simple examen pendant
lequel on ne se bat pas contre les autres ; il suffit de faire la preuve d’une
certaine quantité de connaissances et de compétences pour être reçu.
Face à des sujets toujours très (trop) longs, les candidats perdent parfois
pied devant l’ampleur de la tâche à accomplir :

— les étudiants de master, manquant souvent cruellement d’expérience


et de recul, peinent à identifier les éléments clés d’un programme plus
que consistant,
1. Mais pas nécessairement un doctorat en mathématiques ! Noter que le concours ex-
terne spécial docteur ne permet pas d’obtenir de droit un poste de PRAG dans un établis-
sement d’enseignement supérieur ou auprès d’une classe préparatoire aux grandes écoles.
AVANT-PROPOS v

— les enseignants du secondaire doivent courageusement se frotter à


nouveau avec des notions d’une difficulté d’accès souvent sans com-
mune mesure avec le contenu quotidien de leur enseignement (à ce
sujet, effectuer des vacations dans un établissement d’enseignement
supérieur permettra à l’enseignant certifié qui souhaite devenir agrégé
d’affiner ses connaissances de niveau licence et de percevoir, en les
enseignant, les subtilités qu’il a oubliées ou qu’il n’avait pas perçues
lorsqu’il était étudiant),
— les docteurs, après s’être spécialisés dans un domaine de recherche
précis et souvent très largement distinct de la majeure part des mathé-
matiques enseignées dans un master de mathématiques fondamentales,
doivent retravailler des notions pointues et éloignées de leur domaine
d’excellence.

Pour les aider au mieux, ce manuel est organisé en deux parties :

— la première regroupe un certain nombre de résultats majeurs (le


théorème de Cayley-Hamilton, le théorème de Weierstrass, l’iné-
galité de Markov, etc.), ainsi que de longues listes de formules
d’un usage courant (propriétés du déterminant et de la trace d’une
matrice, développements en série entière usuels, etc.) ou encore des
collections d’objets mathématiques classiques (tels les polynômes
et les groupes remarquables, par exemple).
Son objectif n’est évidemment pas de balayer l’ensemble du programme
des écrits de l’agrégation, ni même seulement de licence...et encore
moins des oraux ! L’exhaustivité exigerait un volume bien plus impres-
sionnant que les maigres dimensions auxquelles nous avons contenu
notre tâche. Notre ambition s’est donc souvent limitée à dresser des
listes sans entrer dans les détails, espérant que celles-ci éveilleront
l’agrégatif sur certaines de ses lacunes et l’inciteront à les combler
en consultant d’autres ouvrages. Nous avons voulu présenter des ré-
sultats qui apparaissent régulièrement (voire chaque année) dans les
premières questions des sujets des épreuves écrites : les ignorer est
pour le jury le symptôme sans équivoque d’une copie qui s’annonce
médiocre. Au contraire, en montrer la maîtrise assurera probablement
une note au-dessus de la barre d’admissibilité.
Cette partie pourra parfois sembler un peu fourre-tout (voire répéti-
tive) : elle expose des objets et des résultats élémentaires bien connus
et a priori inutiles à rappeler (nous savons que ce n’est pas le cas et
la lecture des rapports des jurys en apporte la preuve), évoque spora-
vi AVANT-PROPOS

diquement quelques objets qu’on pourra juger non fondamentaux (à


quoi bon par exemple citer les polynômes de Laguerre ou le théo-
rème de Sophie Germain sans plus de développements ? La réponse
est triple : à la fois (1) pour la culture générale mathématique de l’agré-
gatif, (2) car des notions similaires pourraient fort bien apparaître dans
des sujets futurs mais (3) aussi parce que notre fantaisie nous a poussé
à évoquer certains résultats non essentiels plutôt que d’autres) et au
contraire souffre d’absences regrettables (l’analyse complexe est mal-
heureusement abordée trop superficiellement, le théorème de structure
des groupes abéliens finis n’est pas même cité, etc. Les exemples ne
manquent pas de résultats plus ou moins classiques qui pourraient ap-
paraître ponctuellement à l’avenir et qui ne sont pas insérés dans ce
manuel. Nous avons en particulier renoncé à rédiger une partie consa-
crée spécifiquement à la géométrie. On pourra, sur ce thème, se reporter
au manuel de Michèle Audin [Aud06]).

— la seconde partie propose au lecteur une sélection de corrigés d’exer-


cices extraits des épreuves écrites de 2017 à 2021 2 . Nous donnons pour
chacun une liste des notions à connaître dans le but de susciter ainsi
les révisions nécessaires avant même de se lancer dans la résolution de
l’exercice :

— les thèmes indiquent les domaines des mathématiques au cœur de


l’exercice et les notions usuelles qui y sont évoquées.
— les résultats majeurs sont des théorèmes importants ou de simples
propriétés dont le jury veut s’assurer de la bonne connaissance. Ces
résultats sont utilisés dans la majorité des sujets d’agrégation et
font partie des connaissances que chaque agrégé doit absolument
posséder, au risque sinon d’entraîner une dépréciation majeure de
sa copie. Ces résultats sont presque systématiquement repris dans
la première partie du livre.
— les remarques du jury sont extraites des rapports annuels des dif-
férents jurys d’agrégation. Nous nous sommes limités à reproduire
et parfois à reformuler celles qui nous semblaient les plus perti-
nentes en regard des exercices que nous proposons : elles doivent
permettre de mieux réaliser certaines attentes particulières du jury
et d’éviter certaines erreurs trop répandues dans les copies.

2. Les textes des énoncés sont, a priori, propriété de l’Éducation Nationale et de leurs
auteurs.
Table des matières

Avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . iv
Notations et abréviations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiii
Conseils du jury . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xv

I Une (raisonnable) flopée de résultats et d’objets dont on


Table des matières
ne peut décemment pas faire l’économie 3

1 Chapitre 1 : Algébre et arithmétique 5


1.1 Structures algébriques usuelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.2 Groupes .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..
Avant-propos .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. iv8
1.2.1 et Bestiaire
Notations . . . .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. ..
abréviations .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. xiii
8
Conseils du jury . . .majeurs
1.2.2 Résultats . . . . . .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. xv
12
1.3 Anneaux et corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.3.1 Bestiaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
I Une1.3.2 Résultats majeurs
(raisonnable) flopée de . . résultats
. . . . . . . .
et . . . . . .
d’objets . . . . on
dont . 18
ne 1.4
peutAlgèbres
décemment
. . . . pas
. . . faire
. . . .l’économie
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 3

2
1 Chapitre 21 : Algèbre
Algébre linéaire
et arithmétique 21
5
2.1
1.1 Espaces vectoriels
Structures . . . usuelles
algébriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 215
2.2
1.2 Propriétés
Groupes . usuelles
. . . . .des
. . matrices
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 228
2.3 Matrices remarquables
1.2.1 Bestiaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 268
2.4 Résultats majeursmajeurs
1.2.2 Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
12
1.3 Anneaux et corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
3 Chapitre
1.3.1 3 Bestiaire
: Polynômes
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
16
3.1 Polynômes symétriques
1.3.2 Résultats majeurs . . .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. 39
18
3.2
1.4 Algèbres . . . . . . . . . . .. .. .. .. .. ..
Polynômes d’interpolation .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. 42
20
3.3 Bestiaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
2 Chapitre 2 : Algèbre linéaire 21
4 Chapitre 4 :vectoriels
2.1 Espaces Topologie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
21
2.2 Propriétés usuelles des matrices . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.3 Matrices remarquables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
2.4 Résultats majeurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

3 Chapitre 3 : Polynômes 39
3.1 Polynômes symétriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
3.2 Polynômes d’interpolation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42
3.3 Bestiaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

4 Chapitre 4 : Topologie 47
x TABLE DES MATIÈRES

5 Chapitre 5 : Analyse 51
5.1 Résultats majeurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
5.2 Analyse complexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71

6 Chapitre 6 : Probabilités 75
6.1 Notions usuelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
6.2 Résultats majeurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77

II Agrégation interne 83

7 Épreuve 1, 2021 85

8 Épreuve 2, 2020 97

9 Épreuve 1, 2018 109

10 Épreuve 1, 2017 117

III Agrégation externe : mathématiques générales 127

11 Mathématiques Générales, 2021 129

12 Mathématiques Générales, 2020 151

13 Mathématiques Générales, 2019 171

14 Mathématiques Générales, 2018 193

15 Mathématiques Générales, 2017 201

IV Agrégation externe : analyse et probabilités 207

16 Analyse et Probabilités, 2021 209

17 Analyse et Probabilités, 2020 233

18 Analyse et Probabilités, 2019 245

19 Analyse et Probabilités, 2018 253


TABLE DES MATIÈRES xi

V Agrégation externe : concours spécial docteur 261

20 Épreuve de 2021 263

21 Épreuve de 2020 285

22 Épreuve de 2019 319

23 Épreuve de 2018 345

24 Épreuve de 2017 375

Bibliographie 421

Index 423
xii OUTILS NUMÉRIQUES UTILISÉS

Outils numériques utilisés


L’auteur a composé cet ouvrage en LATEX et réalisé les graphiques qui y
sont insérés avec GeoGebra.

Les polynômes de Bernstein pour l’approximation de la fonction valeur


absolue évoquée page 55 ont été obtenus à l’aide de SageMath.

En sus des ouvrages listés dans la bibliographie, nous avons régulièrement


consulté des articles francophones et anglophones consacrés aux mathéma-
tiques sur l’encyclopédie participative en ligne Wikipedia pour vérifier rapi-
dement, quand le besoin s’en faisait sentir, les hypothèses d’un théorème, la
définition d’un objet ou la liste de ses propriétés usuelles. Le principal défaut
de ces articles est d’être parfois d’un niveau technique trop élevé (sic) et d’of-
frir des réponses trop généralisantes 5 par rapport aux attendus basiques du
programme de l’agrégation.

5. Peut-être peut-on voir là l’œuvre de quelques disciples de Bourbaki.


Notations et abréviations

NOTATIONS ET ABRÉVIATIONS xiii

Notations et abréviations
Nous avons très largement conservé la présentation et les notations des
énoncés officiels et respecté certaines variations visibles d’une année sur l’autre,
tant au niveau de la numérotation des questions que des objets mathématiques
évoqués.
Par contre, à rebours des consignes typographiques et de l’usage constaté
dans les sujets officiels, nous préférons écrire R plutôt que R, C plutôt que
C, etc., considérant que ce sont les seules notations que peuvent employer les
candidats sur leurs copies.

A : un anneau quelconque ou plus généralement un ensemble muni d’une


structure algébrique.
C : le corps des nombres complexes.
E : l’espérance mathématique d’une v.a.
FX : la fonction de répartition d’une v.a. X.
Fq : « le » corps de cardinal q.
K : un corps commutatif quelconque.
N : l’ensemble des entiers naturels.
P : une mesure de probabilité.
Q : le corps des nombres rationnels.
R : le corps des nombres réels.
Un : l’ensemble des racines complexes n-ièmes de l’unité.
V : la variance d’une v.a.
Z : l’anneau des entiers relatifs.
x = max{n ∈ Z tel que n  x} : la partie entière d’un réel x.
a ∧ b : le PGCD des entiers (ou polynômes) a et b.
a ∨ b : le PPCM des entiers (ou polynômes) a et b.
À ne pas confondre avec les notations du calcul propositionnel :
p ∧ q : la conjonction logique ET de deux propositions p et q.
p ∨ q : la disjonction logique OU de deux propositions p et q.
¬p : la négation logique NON d’une proposition p.
Mn (A) ou Mn (A) : l’ensemble des matrices carrées de taille n à coefficients
dans A.
Mm,n (A) ou Mm,n (A) : l’ensemble des matrices de dimension m × n à
coefficients dans A.
Sp(M ) : le spectre d’une matrice M , l’ensemble de ses valeurs propres.
tr(M ) : la trace d’une matrice M .
δi,j : le symbole de Kronecker (vaut 1 si i = j, 0 sinon).
πM : le polynôme minimal de la matrice M .
χM : le polynôme caractéristique de la matrice M
xiv NOTATIONS ET ABRÉVIATIONS


A B : l’union de deux ensembles A et B disjoints.
[[a, b]] : l’ensemble des nombres entiers compris entre a inclus et b inclus.
a.l. : application linéaire.
cns : condition nécessaire et suffisante.
c.s. : convergence simple.
c.u. : convergence uniforme.
det(M ) : le déterminant d’une matrice M .
e.v. : espace vectoriel.
e.v.n. : espace vectoriel normé.
IPP : intégration par parties.
PGCD : plus grand commun diviseur.
PPCM : plus petit commun multiple.
p.s. : presque sûrement.
resp : respectivement.
ssi : si et seulement si.
thm : théorème.
v.a. : variable aléatoire.
v.a.r. : variable aléatoire réelle.

Enfin, nous suivons l’avis des grammairiens concernant l’usage de soit plu-
tôt que soient 6 lors de l’introduction simultanée de plusieurs objets.

6. Dans la 13e édition du Bon Usage de Maurice Grevisse et André Goosse, éd Deboeck,
§ 901, sections d et e : « Quand soit signifie supposons, prenons, il sert d’introducteur. Sa
valeur verbale est assez estompée pour qu’on le laisse invariable, mais plus d’un auteur,
surtout parmi les mathématiciens, continue à le traiter en verbe. »
Dans le Dictionnaire d’orthographe et d’expression écrite, éd. Le Robert, André Jouette
écrit : « Soit deux cercles tangents. On n’écrit plus comme autrefois : Soient deux cercles
tangents ; cette tournure est devenue un présentatif impersonnel, analogue à la conjonction
et invariable. »
Conseils du jury

CONSEILS DU JURY xv

Conseils du jury
Voici une liste de conseils récurrents dans les rapports de jury. Un can-
didat sérieux devra en tenir compte : la réussite à ce concours ne réside pas
seulement dans la capacité à répondre à des questions mathématiques mais
également à satisfaire les exigences exprimées ici.

— Bien lire avant de commencer les énoncés des exercices dans leur en-
semble pour acquérir un minimum de recul sur les résultats recherchés.
— Il est inutile et contre-productif de recopier les énoncés des questions.
— Les notations employées doivent être cohérentes et compatibles avec
celles de l’énoncé.
— Les qualités de soin, rigueur et clarté influent sur la note. Éviter les
pattes de mouche illisibles et les ratures délimitant mal ce qui est
proposé à l’attention du correcteur de ce qu’il ne doit pas évaluer.
— La rédaction des premières questions du sujet doit être exemplaire et la
première partie doit être traitée aussi intégralement que possible : il est
décevant de rencontrer, dès le début d’une copie, des arguments bâclés
alors qu’on attend que le candidat profite de ce premier contact pour
se présenter. Expliquer et justifier, en particulier par des références
claires et explicites à des théorèmes ou/et des questions correctement
identifiées, est une qualité utile à un enseignant.
— Les copies doivent être convenablement rédigées : orthographe et gram-
maire laissent trop souvent à désirer pour de futurs enseignants. Les
abréviations (par exemple c-à-d pour c’est-à-dire), et les « il est trivial
que » péremptoires sont très mal vus.
— On attend qu’un mathématicien professionnel orthographie correcte-
ment Cauchy-Schwarz et lipschitzienne.
— Les candidats doivent expliquer leur démarche, conclure les questions
et accompagner, quand c’est pertinent, leurs démonstrations de figures,
schémas ou autres illustrations géométriques.
— Les symboles ⇐ et ⇔ sont des connecteurs logiques, il est incorrect de
les utiliser comme des abréviations.
— Au moins un raisonnement par récurrence doit être conduit dans les
règles de l’art : le domaine d’entiers sur lequel la propriété porte est
indiqué, l’initialisation identifiée et traitée, l’hypothèse de récurrence
clairement énoncée, l’hérédité prouvée et la conclusion tirée.
— Se montrer intellectuellement honnête et ne pas chercher à abuser le
correcteur. Un recul critique sur les résultats obtenus, y compris lorsque
la démarche n’est pas aboutie, est souvent valorisé. Si un résultat est
absurde, il sera bien vu que le candidat indique clairement pourquoi il
xvi CONSEILS DU JURY

l’est, même s’il ne peut identifier clairement où se situe son erreur de


raisonnement ou de calcul.
— L’identification de la fonction f avec f (x), image de x par la fonction
f , est trop souvent rencontrée 7 .
— Écrire les formules en mettant toutes les parenthèses nécessaires pour
en préciser le sens.
— Être sensible à la nature des objets manipulés, à la justification de leur
définition et de leur sens. Il est nécessaire, tout au long du sujet, de
préciser les ensembles dans lesquels on prend les objets : « soit P un
polynôme » ne dit pas si P ∈ R[X] ou P ∈ C[X] par exemple. Les
variables introduites doivent être quantifiées.
— Quelques qualités attendues : des réponses concises mais précises, s’ap-
puyant sur des arguments construits et réfléchis, identifiant clairement
les points clés, et sur des calculs menés avec adresse. Les théorèmes
utilisés sont clairement pointés, toutes leurs hypothèses sont vérifiées ;
les résultats établis dans les questions précédentes qui sont utilisés sont
pointés avec la référence adéquate et leurs hypothèses sont vérifiées.
— Confondre raisonnement par l’absurde et raisonnement par contrapo-
sée est inélégant, les candidats usent souvent du second en croyant
faire usage du premier.
— Les imprécisions de raisonnement sont fréquentes dans le cas d’équiva-
lences, d’égalités d’ensemble ou d’expressions par double implication
ou double inégalité quand un des deux sens est évident. L’absence de
toute mention du sens réciproque (même pour simplement pointer qu’il
est évident) n’est pas considérée comme une omission mais comme une
erreur de raisonnement à part entière.

7. On a même pu la voir dans l’énoncé reproduit page 363. Il semble que le monde
anglophone admet plus facilement des expressions abrégées comme a function f (x) pour
signifier une fonction f de la variable x, comme on peut en lire dans An introduction to
mathematics de A.N. Whitehead.
2 INTERMÈDE

Figure 1 – Allégorie d’une démonstration mathématique a .

a. Partition d’un carré en vingt-et-un carrés dont les longueurs des côtés sont respecti-
vement 2, 4, 6, 7, 8, 9, 11, 15, 16, 17, 18 19, 24, 25, 27, 29, 33, 35, 37, 42 et 50. Il s’agit de
la plus petite partition possible sous la condition de n’avoir pas deux carrés identiques. Le
grand carré a pour côté 112.
Une (raisonnable) flopée de résultats et d’objets dont on ne peut décemment pas faire l’économie

Première partie

Une (raisonnable) flopée de


résultats et d’objets dont on ne
peut décemment pas faire
l’économie
Chapitre 1 : Algèbre et arithmétique
Structures algébriques usuelles

Chapitre 1

Algèbre et arithmétique :
groupes, anneaux, corps, idéaux
et algèbres

Le gros pavé de plus de mille pages de Berhuy [Ber18] permet une im-
mersion complète dans le très vaste domaine qu’est l’algèbre de niveau licence
et master. On pourra aussi se reporter à l’indispensable Cours d’algèbre de
Perrin [Per96] et au tome d’exercices qui lui est associé [Ort04], rédigé par
Ortiz. Citons également le classique tome d’algèbre [Gou21] du Maths en tête
de Gourdon.
Les recueils d’exercices d’algèbre du trio Francinou, Gianella & Ni-
colas [FGN01] proposent d’innombrables exemples pertinents et d’une grande
qualité sur ce domaine.
L’excellent recueil de contre-exemples de Hauchecorne [Hau07] permet
d’apprécier certaines subtilités.

1.1 Structures algébriques usuelles


Définitions
Un groupe est un ensemble non vide A muni d’une loi de composition
interne (addition, multiplication ou composition), un anneau (resp. un corps)
est un ensemble non vide A muni de deux lois de composition interne (addi-
tion et multiplication le plus souvent, parfois remplacée par la composition des
applications), un espace vectoriel est un ensemble non vide A muni d’une loi
de composition interne (addition) et d’une loi de composition externe (multi-
plication par un scalaire) et une algèbre est un ensemble non vide A muni de
6 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

deux lois de composition internes et d’une loi de composition externe. Les lois
en question satisfont, grosso modo, toutes les conditions qu’on peut raisonna-
blement attendre d’elles et dont voici la liste.
Les propriétés sont à entendre pour tous x, y, z ∈ A. Les symboles + et ×
représentent des lois de composition internes : ce ne sont pas nécessairement
l’addition ni la multiplication usuelles mais elles en possèdent un grand nombre
de caractéristiques :
— A est non vide.
— + est associative ((x + y) + z = x + (y + z)), possède un élément
neutre qu’on notera 0A ∈ A (x + 0A = 0A + x = x) et chaque x ∈ A
admet dans A un symétrique pour + qu’on notera −x ∈ A et vérifiant
x + (−x) = 0A .
— quand A possède toutes les propriétés ci-dessus, (A, +) est un groupe.
— + est commutative (x + y = y + x)
— quand (A, +) possède toutes les propriétés ci-dessus, (A, +) est un
groupe abélien (on dit aussi groupe commutatif).
— × est associative ((x × y) × z = x × (y × z)), distributive par rapport
à + (x × (y + z) = x × y + x × z et (x + y) × z = x × z + y × z).
— quand (A, +, ×) possède toutes les propriétés ci-dessus, c’est un an-
neau.
— quand x × y = 0A ⇒ x = 0A ou y = 0A , l’anneau (A, +, ×) est dit
intègre.
— quand × possède un élément neutre qu’on notera 1A , on dit de l’anneau
(A, +, ×) qu’il est unitaire.
— tout élément non nul x ∈ A admet dans A un symétrique qu’on notera
x−1 ∈ A et vérifiant x × x−1 = 1A (ce qui signifie en particulier que A
est supposé unitaire). (A, +, ×) est alors automatiquement intègre.
— quand (A, +, ×) possède toutes les propriétés ci-dessus, c’est un corps
et en particulier (A∗ , ×) est un groupe.
— quand × est commutative, on dit d’un anneau (A, +, ×) qu’il est com-
mutatif.
— quand (A, +, ×) possède toutes les propriétés ci-dessus, c’est un corps
commutatif et en particulier (A∗ , ×) est un groupe abélien.
— (A, +, ·) est un espace vectoriel sur un corps K donné, si (A, +)
est un groupe abélien et · est la multiplication des éléments de A
par les éléments de K (appelés scalaires). Cette multiplication doit
être associative (α · (β · x) = (αβ) · x), distributive par rapport à +
(α · (x + y) = α · x + β · y) et l’élément unité de K doit être neutre :
∀x ∈ A, 1K · x = x.
1.1 STRUCTURES ALGÉBRIQUES USUELLES 7

— (A, +, ×, ·) est une algèbre (resp. une algèbre commutative) sur un


corps K donné si (A, +, ×) est un anneau (resp. un anneau commuta-
tif) et (A, +, ·) est un espace vectoriel.

Il y aurait bien quelques subtilités à dire (notamment sur les algèbres),


mais nous garderons un silence courtois à ce sujet.
Quand il n’y a pas d’ambiguïté sur les lois de composition, on peut se
permettre de parler du groupe (resp. anneau, corps, espace vectoriel, algèbre)
A plutôt que d’écrire lourdement (A, +) (resp. (A, +, ×), (A, +, ·), (A, +, ×, ·)),
noter xy pour x×y et αx pour α·x, voire, parfois (et seulement quand l’énoncé
nous y incite), f g pour f ◦ g.
Dans la suite, la loi d’un groupe sera notée multiplicativement (on écrira
ab et non pas a + b, a−1 et non pas −a) quand elle n’est pas explicitement une
addition.

Sous-structures
Un sous-groupe B d’un groupe A est une partie non vide de A stable par
la loi de composition interne de A, c’est-à-dire a, b ∈ B ⇒ ab ∈ B et a−1 ∈ B.
Les notions similaires de sous-anneau, sous-corps, sous-espace vectoriel
et sous-algèbre désignent à chaque fois des parties non vides et stables pour
l’ensemble des lois de composition (y compris par opposé ou inverse quand
l’une de ces notions a un sens) de la structure initiale.

Sous-groupe normal (ou distingué)


Un sous-groupe B d’un groupe A est dit normal ssi ∀a ∈ A, aB = Ba.
L’intérêt des sous-groupes normaux est de permettre de définir le groupe quo-
tient A/B (il est nécessaire que B soit distingué dans A pour pouvoir définir la
loi de composition interne du quotient à partir de celle de A).

Idéal
Un idéal I d’un anneau (A, +, ×) est un sous-groupe de (A, +) absorbant
pour ×.
Si ∀a ∈ A, ∀i ∈ I, ai ∈ I on dira de I que c’est un idéal à gauche.
Si ∀a ∈ A, ∀i ∈ I, ia ∈ I on dira de I que c’est un idéal à droite.
Si I vérifie les deux propriétés ci-dessus, c’est un idéal bilatère.
Dans un anneau commutatif, les trois notions ci-dessus se confondent.
L’intérêt des idéaux est de permettre de définir l’anneau quotient A/I (il est
nécessaire que I soit un idéal de A pour pouvoir définir les lois de composition
interne du quotient à partir de celles de A).
Groupes
Bestiaire

8 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

Un idéal I est dit maximal quand les seuls idéaux le contenant sont lui-
même et A et c’est le cas ssi A/I est un corps.
Un idéal I est dit premier quand I = A et ab ∈ I ⇒ (a ∈ I ou b ∈ I) et
c’est le cas ssi A/I est intègre.
Un idéal I est dit principal quand il est engendré par un seul élément,
c’est-à-dire ∃ a ∈ A, I = aA = {ab | b ∈ A}.
Les idéaux triviaux d’un anneau A sont 0A A = {0A } et 1A A = A.
Les idéaux de Z sont tous principaux et en particulier les idéaux non
triviaux de Z sont les groupes du type nZ pour n ∈ N∗ , n = 1. Les idéaux
du type pZ pour p ∈ P sont maximaux. Dans Z les notions d’idéal premier et
d’idéal maximal sont confondues, à l’exception de l’idéal {0} qui est premier
(comme c’est toujours le cas dans un anneau intègre) mais pas maximal.

1.2 Groupes
1.2.1 Bestiaire
On rappelle ici succinctement quelques-uns des groupes les plus courants,
à l’exception notable des groupes projectifs.
Soit E un espace vectoriel, K un corps commutatif, G et H deux groupes,
n ∈ N∗ .

Le groupe Z/nZ
Ses éléments sont les classes de congruence modulo n. C’est un groupe
abélien pour l’addition et plus précisément le groupe quotient du groupe abélien
Z par son sous-groupe nZ.

Le groupe linéaire GL(E) ou GLn (K)


(GL(E), ◦) est le groupe des automorphismes (c’est-à-dire les endomor-
phismes bijectifs) de E.
(GLn (K), ×) est le groupe des matrices inversibles de Mn (K).

Le groupe spécial linéaire SL(E) ou SLn (K)


Si E est de dimension finie, SL(E) est le sous-groupe de GL(E) constitué
des endomorphismes de E de déterminant 1.
SLn (K) est le sous-groupe de GLn (K) constitué des matrices de détermi-
nant 1.
1.2 GROUPES 9

Le groupe orthogonal O(E) ou On (K) ou O(E, q)


Si E est un espace euclidien, O(E) est le sous-groupe de GL(E) constitué
des isométries de E. Si u ∈ GL(E), cela revient à écrire :
u ∈ O(E) ⇔ ∀x ∈ E, ||u(x)|| = ||x||.
De même on note On (K) le sous-groupe de GLn (K) constitué des matrices qui
conservent la norme.
Les vecteurs colonnes (resp. lignes) d’un élément de On (K) forment une
base orthonormée de Kn .
L’inverse d’un élément de On (K) est égal à sa transposée.
Plus généralement, si E est un e.v. quelconque et q une forme quadratique
sur E, le groupe orthogonal de q, O(E, q) est constitué des automorphismes
u ∈ GL(E) laissant q invariante, c’est-à-dire tels que ∀x ∈ E, q(u(x)) = q(x).

Le groupe spécial orthogonal SO(E) ou SOn (K) ou SO(E, q)


SO(E) = SL(E) ∩ O(E) est le sous-groupe de GL(E) constitué des isomé-
tries de déterminant 1.
De même on note SOn (K) le sous-groupe de GLn (K) constitué des matrices
de déterminant 1 qui conservent la norme.
Plus généralement, SO(E, q) = SL(E) ∩ O(E, q) est le sous-groupe de
GL(E) constitué des endomorphismes de déterminant 1 laissant la forme qua-
dratique q invariante.

Le groupe diédral Dn
Le groupe diédral est constitué des 2n isométries du plan (n rotations dont
l’identité et n réflexions) laissant invariant le polygone régulier à n côtés.

Dn est engendré par la rotation d’angle et une réflexion.
n

Le groupe symétrique Sn
Le groupe symétrique, constitué de l’ensemble des permutations d’un en-
semble à n éléments (par exemple {1, 2, . . . , n}), est noté Sn ou encore Sn pour
ceux qui sont fâchés avec la graphie gothique. Il contient n! éléments.
Par exemple, S3 = {id, (12), (13), (23), (123), (132)}.
Les éléments de Sn peuvent toujours s’exprimer comme composées (on
dit aussi produits) de cycles à supports disjoints mais aussi comme produit de
transpositions (une transposition est un cycle de longueur 2).
Par exemple, (abc) désigne le cycle de longueur 3 qui à a associe b, à b
associe c et à c associe a.
10 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

Le groupe alterné An
Le groupe alterné est le sous-groupe de Sn constitué des permutations
paires (c’est-à-dire celles dont la signature vaut 1).
An est le noyau de l’application signature ε : Sn → {−1, 1}. Celle-ci
étant un morphisme de groupes surjectif quand n  2, le premier théorème
n!
d’isomorphisme permet d’obtenir que le cardinal de An est .
2
En tant que noyau d’un morphisme de groupes (mais aussi en tant que
sous-groupe d’indice 2, quand n  2), An est distingué dans Sn .
Par exemple, A3 = {id, (123), (132)}.

Le groupe de Klein
Le groupe de Klein Z/2Z × Z/2Z est le plus petit exemple de groupe
(additif) non cyclique. C’est aussi le plus petit anneau non intègre.

Le groupe des quaternions Q8


C’est, avec les règles i2 = j 2 = k 2 = ijk = −1, le groupe multiplicatif

Q8 = {1, −1, i, j, k, −i, −j, −k}.

On en déduit ij = k, ji = −k, jk = i, kj = −i, ki = j, ik = −j.


Ne pas confondre Q8 avec le corps des quaternions H.

Centre d’un groupe


Le centre Z(G) d’un groupe G est constitué des éléments de G qui com-
mutent avec tous les éléments de G :

z ∈ Z(G) ⇔ ∀g ∈ G, zg = gz.

Sous-groupe distingué (ou normal)


H est un sous-groupe distingué (ou normal) de G et on note H  G ssi

H⊂G et ∀g ∈ G, gHg −1 ⊂ H,

ce qui revient à montrer que ∀g ∈ G, gHg −1 = H ou encore ∀g ∈ G, gH = Hg.


Les sous-groupes distingués de G sont ceux qui sont stables par l’action
de conjugaison de G sur lui-même. Ce sont plus précisément les points fixes de
l’action de conjugaison de G sur l’ensemble des sous-groupes de G.
1.2 GROUPES 11

L’intérêt des sous-groupes distingués est de permettre de définir la notion


de groupe quotient (il est nécessaire que H soit un sous-groupe distingué de G
pour pouvoir définir les lois de composition interne du quotient G/H à partir
de celles de G).

Groupe quotient
Si H est un sous-groupe distingué de G, l’ensemble quotient G/H a pour
éléments les classes d’équivalence modulo H, c’est-à-dire les parties de G du
type gH = {gh; h ∈ H} pour les éléments g de G. G/H est muni d’une
structure de groupe induite naturellement par celle de G.

Groupe dérivé
Le groupe dérivé D(G) de G est le sous-groupe de G engendré par les
commutateurs [g, h] = ghg −1 h−1 , pour g, h ∈ G.
D(G) est un sous-groupe distingué de G et c’est le plus petit sous-groupe
distingué H de G tel que G/H soit abélien.

Groupe monogène
G est monogène si il est engendré par un de ses éléments g. On note
 
G = g = g k , k ∈ Z .

Tout groupe monogène infini est isomorphe à Z, tout sous-groupe d’un


groupe monogène est monogène.

Groupe cyclique
Si G est monogène et fini, il est dit cyclique.
Tout groupe cyclique d’ordre n ∈ N∗ est isomorphe à Z/nZ, tout sous-
groupe d’un groupe cyclique est cyclique.

Sous-groupe de Sylow ou p-Sylow


Si G est un groupe fini d’ordre |G| = n et si p ∈ P et α ∈ N sont tels que
pα | n et pα+1  | n (c’est-à-dire qu’on peut écrire n = pα m avec m premier avec
p), un sous-groupe de G d’ordre pα est appelé p-Sylow.
Résultats majeurs

12 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

1.2.2 Résultats majeurs

Des trois théorèmes d’isomorphismes, on doit surtout connaître parfaite-


ment le premier ainsi que sa démonstration. Donnés ici pour des groupes, ils
peuvent se généraliser à d’autres structures (les anneaux et les espaces vecto-
riels par exemple).

Théorèmes d’isomorphisme

Premier théorème d’isomorphisme. Soit G et H deux groupes et


f : G → H un morphisme de groupes.

G/Ker(f )  Im(f )

et l’isomorphisme de G/Ker(f ) = {gKer(f ), g ∈ G} à Im(f ) = {f (g), g ∈ G}


est fourni par le morphisme de groupes fˆ défini à partir de f par

G/Ker(f ) → Im(f )
fˆ : gKer(f ) → fˆ(gKer(f )) = f (g)

si G est noté multiplicativement (si G était un groupe additif, il conviendrait


d’écrire g + Ker(f ) au lieu de gKer(f )).
Il faut bien sûr vérifier que fˆ est ainsi (1) bien défini (c’est-à-dire que si
g1 Ker(f ) = g2 Ker(f ) on a bien f (g1 ) = f (g2 )), (2) un morphisme de groupes,
(3) injectif et (4) surjectif.

Deuxième théorème d’isomorphisme. Soit G un groupe, N un sous-


groupe distingué de G et H un sous-groupe de G. Alors H ∩ N est un
sous-groupe distingué de H et

H/(H ∩ N )  HN/N.

Il faut pour cela s’assurer que HN est un groupe et N un sous-groupe


distingué de HN . On utilise ensuite le premier théorème d’isomorphisme avec
f : h ∈ H → hN ∈ HN/N .
1.2 GROUPES 13

Troisième théorème d’isomorphisme. Soit G un groupe, M et N


deux sous-groupes distingués de G tels que M ⊂ N . Alors N/M est un
sous-groupe distingué de G/M et

(G/M )/(N/M )  G/N.

On définit un morphisme naturel f de G/M dans G/N par f (gM ) = gN


pour obtenir ce résultat à l’aide du premier théorème d’isomorphisme.

Théorème de Lagrange

Si G est un groupe fini d’ordre n = |G| et si H est un sous-groupe de G,


alors l’ordre de H divise celui de G :


|H|  |G|

et en conséquence,


∀ g ∈ G, o(g) = | < g > |  n.

L’ordre d’un groupe désigne son cardinal, c’est-à-dire son nombre d’élé-
ments. L’ordre de g désigne l’ordre du groupe < g >, c’est-à-dire le plus petit
k ∈ N∗ tel que g k = e (e désigne l’élément neutre du groupe G).
En conséquence, tout groupe fini d’ordre premier est cyclique (engendré
par l’un quelconque de ses p − 1 éléments différents de l’élément neutre) et
donc isomorphe à (Z/pZ, +).
Par ailleurs, on en déduit le petit théorème de Fermat :

Petit théorème de Fermat

∀n ∈ Z, np ≡ n[p]
 
et en particulier ∀n ∈ Z, n ∧ p = 1 ⇒ np−1 ≡ 1[p] ,

du fait notamment que les éléments inversibles de l’anneau Z/pZ forment un


groupe multiplicatif de cardinal p − 1.
14 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

À ne pas confondre avec le beaucoup plus difficile théorème de Fermat-


Wiles qui ne fut prouvé que vers 1995 par Andrew Wiles :

Théorème de Fermat-Wiles

∀n ∈ N, ∀(x, y, z) ∈ (Z∗ )3 , n  3 ⇒ xn + y n = z n

Certains cas particuliers de ce théorème peuvent faire l’objet de quelques


questions d’écrit d’un sujet d’agrégation (ou constituer le développement d’une
leçon d’oral), comme le théorème de Sophie Germain :

Théorème de Sophie Germain

Soit p ∈ P.

2p + 1 ∈ P ⇒ ∀(x, y, z) ∈ (Z∗ )3 , xp + y p = z p .

On pourra consulter [FGN01] pour la démonstration.

Théorème de Cauchy

Si G est un groupe fini d’ordre |G| = n et p un diviseur premier de n,


alors il existe un élément de G d’ordre p.
  
p ∈ P et pn = |G| ⇒ ∃g ∈ G, o(g) = p.

On retrouve alors que tout groupe fini d’ordre premier est cyclique. À ne
pas confondre avec l’un des innombrables autres théorèmes de Cauchy.

Théorème de Cayley

Tout groupe fini d’ordre n est isomorphe à un sous-groupe de Sn .

À ne pas confondre avec le théorème de Cayley-Hamilton qui lui concerne


un endomorphisme (ou une matrice) et son polynôme caractéristique.
1.2 GROUPES 15

La preuve de ce résultat consiste à faire agir un groupe G d’ordre n sur


lui-même par translation (à gauche par exemple). Chaque élément g ∈ G est
ainsi associé à σg : h ∈ G → gh ∈ G qui est un l’élément du groupe des
permutations de G (le groupe des permutations de G est lui-même isomorphe
à Sn ). L’ensemble des σg (pour g ∈ G) est un groupe isomorphe à G et forme
par ailleurs un sous-groupe de l’ensemble des permutations de G.

Sous-groupes de R

Tout sous-groupe de R est soit du type αZ pour un certain α ∈ R, soit


dense dans R.

La démonstration classique de ce résultat consiste à distinguer les cas où


un sous-groupe de R possède ou non un plus petit élément strictement positif
α ∈ R. Si
√c’est 
le cas il√est du type αZ, sinon il est dense dans R. Par exemple,
Q et Q( 2) = a + b 2, a, b ∈ Q sont des sous-groupes de R denses dans R.

Théorèmes de Sylow

Premier théorème de Sylow. Si G est un groupe fini d’ordre

|G| = pα m, avec p ∈ P, α ∈ N∗ et p ∧ m = 1,

alors G admet un p-Sylow (c’est-à-dire un sous-groupe d’ordre pα ).

On peut en déduire le théorème de Cauchy. En effet, tout élément d’un


p-Sylow a pour ordre une puissance de p (d’après le théorème de Lagrange,
l’ordre d’un élément divise l’ordre du groupe). En élevant à une puissance
convenable un élément différent du neutre, on obtient un élément d’ordre p.

Deuxième théorème de Sylow. Les p-Sylow de G sont conjugués


entre eux : si H et K sont deux p-Sylow de G alors

∃g ∈ G, K = gHg −1 .
Anneaux et corps
Bestiaire

16 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

Troisième théorème de Sylow. Le nombre np de p-Sylow de G divise


m et est congru à 1 modulo p :

np  m et np ≡ 1[p].

1.3 Anneaux et corps


1.3.1 Bestiaire
Anneau factoriel
C’est un anneau intègre dans lequel tout élément non inversible et non nul
se décompose de manière unique (à l’ordre près des facteurs et à des facteurs
inversibles près) comme produit de facteurs irréductibles.
Un élément irréductible de A est un élément non inversible qui ne peut se
décomposer comme produit de deux éléments non inversibles (en particulier
0A n’est pas irréductible).

Si A est factoriel alors A[X] aussi.


Z[i 3] est l’exemple
√ le plus
√ simple d’anneau non factoriel. Dans cet anneau
4 = 2 × 2 = (1 + i 3)(1 − i 3) sont deux décompositions distinctes (selon la
définition ci-dessus) en produit de facteurs irréductibles.

Anneau principal
C’est un anneau intègre dans lequel tout idéal I est principal, c’est-à-dire
du type I = aA pour un certain a ∈ A.

Tout anneau principal est factoriel.

Si A est un anneau mais pas un corps, A[X] n’est pas principal.


Par exemple l’idéal de Z[X] engendré par X et 2 (c’est-à-dire l’ensemble
des polynômes à coefficients entiers dont le terme constant est pair) est un
idéal de Z[X] mais il n’est pas principal.
1.3 ANNEAUX ET CORPS 17

Anneau euclidien

C’est un anneau intègre A muni d’un stathme euclidien, c’est-à-dire une


application N définie sur A et à valeurs dans N vérifiant la division euclidienne :
∀a, b ∈ A, b = 0A , ∃q, r ∈ A, a = bq + r et r = 0 ou N (r) < N (b) et sous-
multiplicative : ∀a, b ∈ A, a = 0A , b = 0A , N (ab)  N (a)N (b).
Le stathme est la plupart du temps la valeur absolue dans Z, le module
au carré dans Z[i] et on a dans ces deux cas N (0) = 0 ou encore le degré dans
les ensembles de polynômes et on pose en général dans ce cas N (0) = −∞.

Tout anneau euclidien est principal et donc également factoriel.

Les anneaux euclidiens les plus usuels sont l’anneau des entiers relatifs
Z, l’anneau des entiers de Gauss Z[i], l’anneau des entiers d’Eisenstein Z[j]
(où j = e2iπ/3 ), l’anneau K[X] des polynômes à coefficients dans K et l’anneau
K[[X]] des séries formelles à coefficients dans K (pour un corps commutatif K
quelconque).

Les anneaux principaux non euclidiens sont relativement rares dans le pay-
√ 
sage mathématique de l’agrégatif. Citons le classique bien qu’étrange Z 1+i2 19
dont on peut apprécier les caractéristiques dans [FGN01].

Corps

Un corps est un anneau dont les éléments non nuls forment un groupe
pour la multiplication. Les corps usuels sont Q, R, C, Z/pZ pour p ∈ P, K(X)
(le corps des fractions rationnelles à une indéterminée à coefficients dans un
corps K), H (le corps des quaternions).

Mais encore...

Il existe d’autres catégories d’anneaux sur lesquelles nous ne nous attar-


derons pas : les anneaux noethérien (en hommage à Emmy Noether) et en
particulier les anneaux de Dedekind qui en sont une sous-classe, les anneaux
de Bézout (dans lesquels la propriété de Bézout est vérifiée), les anneaux à
PGCD (c’est-à-dire où cette notion a un sens) et bien d’autres encore.
Résultats majeurs

18 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

1.3.2 Résultats majeurs


Théorème de Bézout dans un anneau principal

Dans un anneau principal A,

a, b ∈ A sont premiers entre eux ⇔ ∃ u, v ∈ A, au + bv = 1A .

Corollaire

Si a et b ont pour PGCD d dans l’anneau principal A alors

∃ u, v ∈ A, au + bv = d.

Remarque : ce corollaire n’est pas une équivalence : si au + bv = d, on peut


seulement dire de d que c’est un multiple du PGCD de a et b.

Théorème de Bézout dans un anneau euclidien


Tout anneau euclidien est principal (l’existence d’une division euclidienne
est un fait très puissant qui permet d’obtenir des résultats importants, en
particulier que tout idéal de l’anneau est principal) : on peut, dans le cas
particulier où A est un anneau euclidien, obtenir les deux résultats ci-dessus
à partir de la remontée de l’algorithme d’Euclide (nous rappelons à ce sujet
que c’est bien la remontée de l’algorithme d’Euclide qui permet, de manière
générale et en l’absence de solution évidente, de trouver les coefficients de
Bézout u et v évoqués dans les égalités ci-dessus. Quand l’anneau n’est pas
euclidien mais seulement principal, la détermination de u et v n’a a priori rien
d’évident).

Lemmes de Gauss
Le classique lemme de Gauss est, dans le cas particulier des anneaux prin-
cipaux, un corollaire du théorème de Bézout. Il est également valable dans
les anneaux factoriels.

Soit a, b, c ∈ A un anneau factoriel.

a|bc et a ∧ b = 1 ⇒ a|c.
1.3 ANNEAUX ET CORPS 19

On utilise ce résultat la plupart du temps dans Z ou dans un anneau de


polynômes A[X] quand A est un corps ou un anneau factoriel.
Un autre résultat porte le nom de lemme de Gauss :

Soit P, Q ∈ Q[X].
1
P Q ∈ Z[X] ⇔ ∃ r ∈ Q, rP ∈ Z[X] et Q ∈ Z[X],
r

et on peut aussi le formuler ainsi :

Si P, Q ∈ Q[X] sont deux polynômes unitaires dont l’un au moins n’est


pas dans Z[X] alors le produit P Q ∈ Q[X] n’est pas non plus dans Z[X].

Caractéristique d’un corps


K désigne un corps quelconque.
De deux choses, l’une :
— soit K « contient » Z (on peut plonger Z dans K), c’est-à-dire que

k ∈ Z → k · 1K = 1K + · · · + 1K

est une application injective et K est dit de caractéristique nulle,


— soit l’application k ∈ Z → k · 1K n’est pas injective et elle a alors pour
noyau un idéal premier de Z du type pZ pour un certain p ∈ P et K
est dit de caractéristique p.

Théorème de Wedderburn

Tout corps fini est commutatif.

Ce théorème se démontre en utilisant les actions de groupe.

Extension de corps
Un corps L est une extension de K si K ⊂ L. L peut alors être vu comme
un K-espace vectoriel.
Algèbres

20 CHAPITRE 1 : ALGÉBRE ET ARITHMÉTIQUE

Dans le cas où L est de cardinal fini, on a |L| = |K|n où n est la dimension


de L en tant que K-e.v. On dit alors que n est le degré de l’extension et L
peut être vu comme le quotient de K[X] par l’idéal engendré par un polynôme
irréductible de degré n à coefficients dans K.

Le cardinal d’un corps fini est du type q = pn où p ∈ P, n ∈ N∗ .

On peut parler du (seul) corps fini de cardinal q = pn car tous les corps
de même cardinal fini q sont isomorphes.

Corps algébriquement clos


Il s’agit d’un corps K pour lequel tout polynôme à coefficients dans K
admet au moins une racine dans K (et en conséquence toutes ses racines dans
K, autrement dit, tout polynôme à coefficients dans un corps algébriquement
clos K est scindé sur K).
C est algébriquement clos (il s’agit du théorème de d’Alembert-Gauss)
mais R ne l’est pas.

Tout corps admet une extension algébriquement close.

Ce résultat a de pratique qu’il permet, si besoin, de quitter le corps dans


lequel on travaille pour se placer dans un corps plus grand dans lequel tout
polynôme est scindé.

1.4 Algèbres
Un exemple typique est donné par C : c’est une R-algèbre. Plus générale-
ment, toute extension L d’un corps K est une K-algèbre.
Pour tout corps K, K[X] et Mn (K) sont des K-algèbres.
Le corps des quaternions H est une R-algèbre et un C-e.v. mais pas une
C-algèbre.
Les exemples donnés ci-dessus constituent tous des algèbres associatives.
Il existe aussi des algèbres non-associatives avec par exemple comme deuxième
loi de composition interne le crochet de Lie (A, B) → AB − BA ou encore le
produit vectoriel.
Chapitre 2 : Algèbre linéaire
Espaces vectoriels

Chapitre 2

Algèbre linéaire : espaces


vectoriels, matrices et
endomorphismes

2.1 Espaces vectoriels

Exemples

Si K est un corps, Kn est un K-e.v. de dimension n ∈ N∗ . Cn est un R-e.v.


de dimension 2n car C est un R-e.v. de dimension 2. De manière plus générale,
une extension L d’un corps K est un K-e.v. On peut voir R comme un Q-e.v.
de dimension infinie.
Mn,p (K) est un K-e.v. de dimension np.
L’ensemble des fonctions réelles de classe C n sur un intervalle ]a, b[ est un
R-e.v. de dimension infinie.

Base et dimension

Tout espace vectoriel admet une base et on appelle dimension de cet es-
pace le cardinal de l’une quelconque de ses bases (elles ont toutes même
cardinal).
Propriétés usuelles des matrices

22 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

Théorème de la base incomplète

Toute famille libre d’un K-e.v. peut être complétée en une base de E.

Théorème de la base extraite

De toute famille génératrice d’un K-e.v. on peut extraire une base de E.

Espace dual
L’espace dual, noté E ∗ , d’un K-e.v. E est constitué de l’ensemble des
formes linéaires sur E, c’est-à-dire l’ensemble des applications linéaires définies
sur E et à valeurs dans K. E ∗ est un K-e.v. de même dimension que E.

Base duale

Si (e1 , . . . , en ) est une base d’un K-e.v. E de dimension n ∈ N∗ alors sa


base duale, notée (e∗1 , . . . , e∗n ) est la base de E ∗ définie par

1 si i = j
∀1  i, j  n, ei (ej ) = δij =

0 sinon.

On montre en effet aisément que cette famille est engendre de manière


unique toute forme linéaire sur E.

2.2 Propriétés usuelles des matrices


Nous rappelons ici une litanie de formules élémentaires toutes indispen-
sables quant à la trace, la transposée, le déterminant et l’inverse d’une matrice
carrée (et par extension d’un endomorphisme en dimension finie).

Soit A, B ∈ Mn (K) deux matrices carrées à coefficients dans un corps


commutatif K et P, Q ∈ GLn (K) (c’est-à-dire deux matrices inversibles. Les
résultats dans lesquels les matrices P et Q n’interviennent pas peuvent être
étendus à un anneau commutatif quelconque A à la place du corps K).
2.2 PROPRIÉTÉS USUELLES DES MATRICES 23

Déterminant
Le déterminant commute avec la multiplication. Il n’est donc pas sensible
à l’ordre des facteurs :

det(AB) = det(A)det(B) = det(B)det(A) = det(BA).

On en déduit 1 = det(In ) = det(P P −1 ) = det(P )det(P −1 ), d’où :

det(P −1 ) = (det(P ))−1 et det(P −1 AP ) = det(A).

Ce dernier résultat permet de définir le déterminant d’un endomorphisme


comme celui de l’une de ses matrices associées puisqu’il ne dépend pas de
la base dans laquelle on exprime cette matrice (P correspond dans cette for-
mule à une matrice de passage d’une base à une autre).

Le déterminant n’est pas une forme linéaire mais multilinéaire si on le


considère comme une application sur les vecteurs colonnes (resp. lignes) de
la matrice. On veillera en particulier à ne pas oublier la puissance n dans la
formule qui suit :
∀α ∈ K, det(αA) = αn det(A).
Par ailleurs, le déterminant est plus précisément une forme multilinéaire
alternée : quand on commute deux colonnes (resp. lignes), le déterminant
change de signe. Plus généralement, si on applique une permutation σ sur les
colonnes (resp. lignes) de la matrice, le déterminant est multiplié par la signa-
ture ε(σ) de σ.

Le déterminant est invariant par transposition :

det(At ) = det(A).

Enfin, il convient de connaître la formule explicite suivante

 n

det(A) = ε(σ) aiσ(i) ,
σ∈Sn i=1

 n

qu’on peut aussi écrire det(A) = ε(σ) aσ(i)i (cette constatation, qui
σ∈Sn i=1
découle du fait que σ et σ −1 ont même signature, permet de prouver que
det(At ) = det(A)).
24 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

Par exemple, en notant (12) la transposition qui échange 1 avec 2 :


 
a a
det 11 12 = ε(id)a1id(1) a2id(2) + ε ((12)) a1(12)(1) a2(12)(2)
a21 a22

= a11 a22 − a12 a21 .

Polynôme caractéristique d’une matrice

Le polynôme caractéristique d’une matrice A ∈ Mn (K) est le poly-


nôme unitaire de degré n

χA (X) = det(XIn − A)

mais on trouve aussi la définition χA (X) = det(A − XIn ) qui a le désavantage


de ne pas fournir un polynôme unitaire (c’est-à-dire de coefficient dominant
égal à 1) pour n impair. Dans le cas où la parité de n n’est pas connue, le
coefficient dominant est alors le peu pratique (−1)n .

Trace
La trace d’une matrice est égale à la somme de ses éléments diagonaux.
La trace est une forme linéaire :
∀α ∈ K, tr(αA) = αtr(A) et tr(A + B) = tr(A) + tr(B).
La trace d’un produit de matrices n’est pas sensible à l’ordre des facteurs
(cela se démontre en écrivant laborieusement en détail chaque coefficient des
produits AB et BA en fonctions de ceux de A et B) :
tr(AB) = tr(BA)
et en particulier
tr(P −1 AP ) = tr(AP P −1 ) = tr(A),
ce dernier résultat permet alors de définir la trace d’un endomorphisme comme
celle de l’une de ses matrices associées puisqu’elle ne dépend pas de la base
dans laquelle on exprime cette matrice.

La trace est invariante par transposition puisque la diagonale d’une ma-


trice est invariante par transposition (une matrice et sa transposée ont même
diagonale) :
tr(At ) = tr(A).
2.2 PROPRIÉTÉS USUELLES DES MATRICES 25

Transposée
La transposée de A est notée At , AT , tA ou encore TA quand on ne veut
pas la confondre avec une puissance. Les probabilistes la notent souvent A . On
peut bien sûr transposer une matrice rectangulaire de Mm,n (K) : le résultat
est alors dans Mn,m (K). Toutes les propriétés ci-dessous restent valables mais
on ne parlera pas d’involution dans le cas des matrices rectangulaires puisque
l’espace d’arrivée n’est pas identique à celui de départ.

La transposée (ou transposition) est une application linéaire :

(A + B)t = At + B t et ∀α ∈ K, (αA)t = αAt .

La transposée est une involution sur Mn (K) (elle est sa propre réciproque :
l’appliquer deux fois de suite redonne la matrice de départ. On peut voir la
transposition comme une symétrie d’axe la diagonale de la matrice) :
 t
At = A.

La transposée commute l’ordre des facteurs :

(AB)t = B t At .

Propriétés de l’inverse
L’inverse (ou inversion) commute l’ordre des facteurs :

(P Q)−1 = Q−1 P −1 .

L’inverse est une involution sur GLn (K) :


 −1
P −1 = P.

La transposée et l’inverse commutent :

(P −1 )t = (P t )−1 .

Enfin, last but not least, il convient de connaître la formule suivante

A × (com(A))t = det(A)In ,
Matrices remarquables

26 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

qu’on peut écrire sous les trois autres formes

det(A)In = At × (com(A))

= (com(A))t × A

= (com(A)) × At ,

et dans le cas d’une matrice inversible (ce qui est équivalent à dire que son
déterminant est lui-même inversible) :

1
A−1 = (com(A))t ,
det(A)

où com(A) désigne la comatrice de A, c’est-à-dire la matrice dont les coeffi-


cients bij sont les mineurs signés (c’est-à-dire affectés d’un signe + ou −) de
A : le mineur mij de A est le déterminant de la sous-matrice de A obtenue en
retirant la ligne i et la colonne j de A. On a bij = (−1)i+j mij .

2.3 Matrices remarquables


Soit n ∈ N∗ . On désigne par A = (aij )1i,jn , B, P et Q quatre matrices
carrées de Mn (K).

Matrices inversibles
A est dite inversible si il existe une matrice B telle AB = In .
On a alors également BA = In (comme dans tout groupe, l’inverse à
gauche est égal à l’inverse à droite) et B est unique : c’est l’inverse de A et on
la note B = A−1 .

Matrices équivalentes
A et B sont dites équivalentes si il existe deux matrices inversibles P et
Q telles que A = P BQ et on a le théorème suivant :

deux matrices sont équivalentes ssi elles ont même rang.


2.3 MATRICES REMARQUABLES 27

Matrices semblables
A et B sont dites semblables si il existe une matrice inversible P telle que
A = P BP −1 .

Deux matrices semblables ont même rang, même spectre, même polynôme
caractéristique, même polynôme minimal.

On dit de ces quatre notions que ce sont des invariants de similitudes (des
matrices semblables ont mêmes invariants de similitude mais en revanche des
matrices ayant certains invariants de similitude en commun ne sont pas forcé-
ment semblables).

Matrices triangulaires
Les matrices triangulaires inférieures vérifient ∀1  i < j  n, aij = 0 :
 
a11 0 ... 0
 .. .. 
 a21 a22
 . . 

 .. .. .. 
 . . . 0 
an1 an2 . . . ann

alors que les triangulaires supérieures vérifient ∀1  j < i  n, aij = 0 :


 
a11 a12 . . . a1n
 0 a22 . . . a2n 
 
 .. .. .. ..  .
 . . . . 
0 ... 0 ann

Matrices trigonalisables
Ce sont les matrices semblables à une matrice triangulaire.

Une matrice est trigonalisable ssi son polynôme caractéristique est scindé
dans K[X].

Toutes les matrices à coefficients dans K = C sont trigonalisables.


28 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

Matrices diagonales
Ce sont les matrices qui sont à la fois triangulaires inférieures et triangu-
laires supérieures, c’est-à-dire celles dont tous les termes extra-diagonaux sont
nuls : ∀i = j, aij = 0.
 
a11 0 . . . 0
 .. 
 0 a22 . . . . 
Diag(a11 , . . . , ann ) = 
 .. .. ..
.

 . . . 0 
0 ... 0 ann

Matrices diagonalisables
Ce sont les matrices semblables à une matrice diagonale.

A est diagonalisable ssi son polynôme minimal est scindé à racines simples.

La condition de diagonalisabilité est évidemment plus contraignante que


celle de trigonalisabilité. Elle porte sur le polynôme minimal et non pas sur le
polynôme caractéristique. En particulier, si le polynôme minimal est scindé à
racines simples alors le polynôme caractéristique est scindé.

Matrices scalaires
Ce sont les matrices diagonales pour lesquelles

∃ λ ∈ K, ∀1  i  n, aii = λ.

Elles correspondent aux homothéties :


 
λ 0 ... 0
 .. .. 
0 λ . ..
A = λIn = 
 .. . . .. 
. . . 0
0 ... 0 λ

Matrices symétriques
Ce sont les matrices égales à leur transposée : ∀i = j, aij = aji . Les
matrices symétriques réelles sont diagonalisables.Ce n’esten revanche pas
i 1
le cas pour les matrices complexes : la matrice est symétrique
1 −i
2.3 MATRICES REMARQUABLES 29

mais sa seule valeur propre est 0 (on peut voir par exemple que sa trace et
son déterminant sont tous les deux nuls) : elle n’est donc pas diagonalisable
(les seules matrices diagonalisables n’ayant qu’une seule valeur propre sont les
matrices scalaires λI).

Matrices hermitiennes
Ce sont les matrices complexes égales à la conjuguée de leur transposée :
∀i = j, aij = aji et ∀i, aii ∈ R. Les matrices hermitiennes sont diagonalisables.

Matrices nilpotentes
Pour celles-ci, ∃ p ∈ N∗ , Ap = 0 (nilpotente signifie « qui a une puissance
(potens) nulle (nil) »). À moins de connaître ses puissances successives, on ne
peut pas voir au premier coup d’œil qu’une matrice quelconque A est ou pas
nilpotente, sauf dans le cas particulier suivant :

Matrices triangulaires strictes


Ce sont les matrices triangulaires dont la diagonale est nulle, c’est-à-dire
telles que ∀1  i  j  n, aij = 0 :
 
0 ... ... 0
 .. 
 a21
 . 0 
 .. .. .. ..  .
 . . . .
an1 . . . an n−1 0

ou telles que ∀1  j  i  n, aij = 0 :


 
0 a12 . . . a1n
 .. . . .. .. 
.
 . . .  .
 .. .. 
. . an−1 n 
0 ... ... 0

Les matrices triangulaires strictes sont nilpotentes mais la réciproque n’est


pas vraie: il existedes matricesnilpotentes
 qui ne sont pas triangulaires, par
1 1 i −i
exemple ou encore dont il est facile de constater que le
−1 −1 1 1
carré est nul.
30 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

Matrices stochastiques
Ce sont les matrices de transition d’une chaîne de Markov : leurs co-
efficients représentent des probabilités (ils sont donc dans [0, 1] et on les no-
tera pij plutôt que aij ) et la somme des coefficients de chaque ligne vaut 1 :
 n
∀1  i, j  n, 0  pij  1 et ∀1  i  n, pij = 1.
j=1

Réduction et blocs de Jordan


Les blocs de Jordan sont des matrices du type
 
λ 1 0 ... 0
 .. .. 
0 λ
 1 . .
 .. . . .. .. 
J(λ) = λIn + J =  .
 . . . 0 
 .. .. .. 
. . . 1
0 ... ... 0 λ

où en particulier, la matrice J = J(0) est un bloc de Jordan nilpotent :


 
0 1 0 ... 0
 .. .
0 0
 1 . .. 

J =  ... .. ..
 
 . . 0 
.
 .. .. 
. . 1
0 ... ... ... 0

Si K est un corps algébriquement clos (comme le corps des complexes C. At-


tention, le corps des réels R n’est pas algébriquement clos car, par exemple,
l’équation X 2 + 1 = 0 n’a pas de solution dans R), tout endomorphisme d’un
K-espace vectoriel de dimension finie admet, dans une base bien choisie, une
représentation matricielle sous la forme
 
J1 (λ1 ) 0 ... 0
 . .. 
 0
 J2 (λ2 ) . . .  
 .. .. .. 
 . . . 0 
0 ... 0 Jn (λn )

où J1 (λ1 ), . . . , Jn (λn ) sont des blocs de Jordan de taille non nécessairement


égales, et λ1 , . . . , λn des éléments de K non nécessairement distincts.
2.3 MATRICES REMARQUABLES 31

Matrices et déterminants de Vandermonde


C’est un des grands classiques des sujets d’agrégation (voir page 134).
Nous nous limitons au cas d’une matrice de Vandermonde carrée.
Elles vérifient ∀1  i, j  n, aij = αij−1 pour n − 1 scalaires α1 , . . . , αn−1 :
 
1 α1 α12 . . . α1n−1
1 α2 α2 . . . αn−1 
 2 2 
 2 n−1 
V (α1 , . . . , αn ) = 1 α3 α3 . . . α3  .
. .
 .. .. .. .. 
. . 
2
1 α n αn . . . αnn−1

Cette matrice a la très remarquable propriété d’avoir pour déterminant



det(V ) = (αj − αi )
1i<jn

et en conséquence d’être inversible (quand ses coefficients sont dans un corps


K) ssi les αi sont deux à deux distincts, c’est-à-dire ∀i = j, αi = αj (on peut
se reporter à [Gou21] pour la preuve).

Remarque : une matrice à coefficients dans un anneau A est inversible


ssi son déterminant est un élément inversible de A : il ne suffit donc pas, dans
le cas où A n’est pas un corps, que son déterminant soit non nul pour qu’une
telle matrice soit inversible.

Matrices compagnons
Voici un autre grand classique des sujets d’agrégation (voir page 174).
La matrice compagnon d’un polynôme unitaire de degré n,

P = c0 + c1 X + · · · + cn−1 X n−1 + X n

est  
0 0 ... 0 −c0
1 0 ... 0 −c1
 
 .. .. ..
CP = 
0 1 . . .

 .. . . .. 
. . . 0 −cn−2 
0 ... 0 1 −cn−1
et a la remarquable propriété d’avoir pour polynôme caractéristique le poly-
nôme P lui-même :
χCP = P.
Résultats majeurs

32 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

On renvoie le lecteur à [Gou21] pour la preuve.


On cite le résultat suivant, spécifique aux matrices compagnons : une ma-
trice compagnon est diagonalisable ssi elle possède n valeurs propres distinctes
λ1 , . . . , λn (c’est-à-dire que le polynôme P associé à CP est scindé à racines
simples).
Dans ce cas, une matrice de passage vers une base de diagonalisation est
l’inverse de la matrice de Vandermonde V (λ1 , . . . , λn ) et on a

CP = V (λ1 , . . . , λn )−1 Diag(λ1 , . . . , λn )V (λ1 , . . . , λn ).

Matrices circulantes
Nous mettons en lumière ces matrices car elles sont, au même titre que
les matrices compagnons, liées aux matrices de Vandermonde.
Les coefficients d’une ligne sont obtenus à partir de ceux de la ligne pré-
cédente en les décalant d’une colonne vers la droite :
∀ 2  i  n, ∀ 2  j  n, aij = ai−1 j−1 et ai1 = ai−1 n .
On peut de ce fait les noter sous la forme suivante :
 
c1 c2 c3 . . . cn
 cn c1 c2 . . . cn−1 
 
cn−1 cn c1 . . . cn−2 
 .
 .. .. .. .. 
 . . . . 
c2 c3 . . . cn c1

L’ensemble des matrices circulantes est l’algèbre engendrée par la matrice J


évoquée plus haut.
2iπ
Une matrice circulante est toujours diagonalisable, via, en notant ζ = e n ,
la matrice de passage
1
√ V (1, ζ, . . . , ζ n−1 ).
n

2.4 Résultats majeurs


Rang
Le rang d’une matrice (carrée ou pas) est le plus grand nombre de ses lignes
(resp. colonnes) formant une famille libre, c’est-à-dire le nombre maximal de
ses lignes (resp. colonnes) linéairement indépendantes.
C’est aussi la dimension de son image.
2.4 RÉSULTATS MAJEURS 33

Une matrice carrée est inversible ssi elle est de rang maximal : son rang
est alors égal à son nombre de ligne (resp. colonnes).
À toute matrice de Mm,n (K) est canoniquement associée une application
linéaire de Kn dans Km (attention à l’ordre : la dimension de l’espace de départ
correspond, dans les conventions standard où on multiplie une matrice par un
vecteur colonne, au nombre de colonnes de la matrice. Si on préfère multiplier
un vecteur ligne par une matrice on aurait alors une application de Km dans
Kn ). À toute application linéaire entre deux K-e.v. de dimensions finies E et
F munis de bases déterminées, est associée une unique matrice à coefficients
dans K. Les deux versions du théorème du rang proposées ci-dessous sont donc
presque équivalentes.

Théorème du rang pour les matrices

Soit K un corps et m, n ∈ N∗ .
Pour toute matrice A ∈ Mm,n (K) :

dim (Ker(A)) + rg(A) = n

où rg(A) = dim(Im(A)).

Théorème du rang pour les morphismes d’espaces vectoriels

Soit K un corps, E un K-e.v. de dimension finie n ∈ N∗ et F un K-e.v.


Pour toute application linéaire f : E → F :

dim (Ker(f )) + rg(f ) = dim(E)

où rg(f ) = dim(Im(f )).

La dimension de F , finie ou pas, ne joue aucun rôle et il faut bien prendre


garde que la somme des dimensions du noyau et de l’image de l’application
linéaire f est égale à la dimension de l’espace de départ E et non à celle de
l’espace d’arrivée F .

La démonstration usuelle de ce théorème consiste à considérer une base


(e1 , . . . , ek ) du noyau de f (on suppose Ker(f ) de dimension k  n. Si k = 0,
cette base est vide et ce n’est pas gênant pour la suite), complétée en une
base (e1 , . . . , ek , ek+1 , . . . , en ) de E (on évoque ici le théorème de la base
34 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

incomplète : dans un e.v. E, toute famille libre peut être complétée en une
base de E) et montrer que les images des vecteurs ek+1 , . . . , en forment une
base de l’image de f .

En effet, Im(f ) = Vect (f (e1 ), . . . , f (en )) = Vect (f (ek+1 ), . . . , f (en )) car


∀ 1  i  k, f (ei ) = 0.
La famille (f (ek+1 ), . . . , f (en )) est donc génératrice de Im(f ).
Par ailleurs, si αk+1 , . . . , αn ∈ K on a
n
 n 
 
αi f (ei ) = 0 ⇔ f αi ei = 0
i=k+1 i=k+1

n

⇔ αi ei ∈ Ker(f )
i=k+1

⇔ ∀ i ∈ [[k + 1, n]], αi = 0

car les éléments de Ker(f ) ont des composantes nulles sur ek+1 , . . . , en (ces
vecteurs formant une base d’un supplémentaire de Ker(f ) dans E). La famille
(f (ek+1 ), . . . , f (en )) est donc libre et constitue ainsi une base de Im(f ). Le
cardinal de cette base est n − k : c’est aussi la dimension de Im(f ).

Finalement, dim(Ker(f )) + dim(Im(f )) = k + n − k = n = dim(E).

Théorème de Cayley-Hamilton
Soit K un corps commutatif.

Le polynôme caractéristique χA d’une matrice A ∈ Mn (K) annule cette


matrice :
χA (A) = 0.

Corollaire

Le polynôme minimal πA de la matrice A est un diviseur de χA .

Le théorème de Cayley-Hamilton exprime le fait que le polynôme ca-


ractéristique d’une matrice est un polynôme annulateur de cette matrice et
2.4 RÉSULTATS MAJEURS 35

en conséquence, les valeurs propres de A sont à chercher parmi les racines de


χA . On sait par ailleurs plus précisément que les valeurs propres de A sont
exactement les racines de χA .

Quand K = R ou C, la preuve la plus élémentaire du théorème de Cayley-


Hamilton consiste à le démontrer pour les matrices diagonales (c’est immédiat
car appliquer un polynôme sur une matrice diagonale revient à l’appliquer sur
ses éléments diagonaux), puis à le déduire pour les matrices diagonalisables
 k
(du fait que P −1 AP = P −1 Ak P , pour tout k ∈ N). Enfin, les matrices
diagonalisables formant une partie dense de Mn (K) et le déterminant étant
une application continue, on obtient le résultat général pour toute matrice.
Voir [BMP05] (Ex4.19. Prolongement d’une identité) pour cette preuve.
Michel Coste (Université de Rennes) indique au moins trente preuves
différentes de ce théorème (une recherche sur Internet avec pour mots-clés
"coste cayley" suffira à vous permettre de consulter un document éclairant et
muni de références bibliographiques complètes).

Critère de trigonalisation

Une matrice A ∈ Mn (K) est trigonalisable dans K ssi son polynôme ca-
ractéristique πA est scindé dans K.

Critère de diagonalisation

Une matrice A ∈ Mn (K) est diagonalisable dans K ssi son polynôme


minimal πA est scindé à racines simples dans K.

Corollaire

Si son polynôme caractéristique χA est scindé à racines simples alors A


est diagonalisable.

Ce corollaire est immédiat : πA divise χA donc si χA est scindé à racines


simples, πA aussi.

Cas particuliers
On considère une matrice de Mn (K) (K = R ou C).
36 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

— une matrice diagonale est évidemment diagonalisable et son polynôme


minimal est le produit des X − α, pour α décrivant l’ensemble des
éléments diagonaux de cette matrice, chacun pris une et une seule fois
(si une valeur apparaît plusieurs fois sur la diagonale, on ne la prend
qu’une fois). Il est donc bien scindé à racines simples.
— une matrice triangulaire dont les éléments diagonaux sont deux à deux
distincts est toujours diagonalisable. Son polynôme minimal est le pro-
duit des X − α pour α décrivant l’ensemble des éléments diagonaux.
Il est de degré n. Cette matrice possède n valeurs propres distinctes et
chacun de ses n sous-espaces propres est de dimension 1.
— inversement, une matrice triangulaire non diagonale dont les éléments
diagonaux
  sont tous égaux n’est jamais diagonalisable. En particulier
1 1
n’est pas diagonalisable.
0 1
— plus généralement, une matrice non scalaire n’ayant qu’une seule valeur
propre n’est pas diagonalisable.
— la seule matrice diagonalisable n’ayant qu’une seule valeur propre λ
est la matrice scalaire (donc diagonale) λIn .
— les matrices symétriques réelles et plus généralement les matrices her-
mitiennes sont diagonalisables.

Décomposition de Dunford pour les matrices


Voir page 193 (la partie II de l’épreuve de 2018 est entièrement consacrée à
la décomposition de Dunford mais nous réservons sa correction à un éventuel
second tome à notre ouvrage). Voir également [RB06].
Les deux versions données ci-dessous sont rigoureusement équivalentes.
Soit une matrice A ∈ Mn (C).

A se décompose de manière unique sous la forme A = S + N où


— S ∈ Mn (C) est une matrice diagonalisable
— N ∈ Mn (C) est une matrice nilpotente
— S et N commutent : [S, N ] = SN − N S = 0.

On a alors

— χ A = χS
— Sp(A) = Sp(S)
— S, N ∈ C[A] : S et N sont des polynômes en A.
2.4 RÉSULTATS MAJEURS 37

On remarquera en particulier que si une matrice A est diagonalisable alors


S = A et N = 0. En général, la matrice diagonalisable S n’a aucune raison
d’être diagonale et la matrice nilpotente N n’a aucune raison d’être triangulaire
stricte.

Décomposition de Dunford pour les endomorphismes


Soit E un C-espace vectoriel de dimension finie et u ∈ L (E) un endomor-
phisme de E.

u se décompose de manière unique sous la forme u = s + n où


— s ∈ L (E) est un endomorphisme diagonalisable
— n ∈ L (E) est un endomorphisme nilpotent
— s et n commutent : [s, n] = s ◦ n − n ◦ s = 0.

On a alors

— χ u = χs
— Sp(u) = Sp(s)
— s, n ∈ C[u] : s et n sont des polynômes en u.

Théorème spectral pour les endomorphismes en dimension finie

Tout endomorphisme auto-adjoint d’un espace euclidien ou hermitien E


(donc nécessairement de dimension finie) muni d’un produit scalaire ·, ·
est diagonalisable dans une base orthonormale bien choisie et ses valeurs
propres sont toutes réelles.

L’adjoint d’un endomorphisme u est noté u∗ et est l’unique endomor-


phisme vérifiant
∀x, y ∈ E, u(x), y = x, u∗ (y).
Un endomorphisme auto-adjoint est par définition son propre adjoint :

u∗ = u.

Dans le cas euclidien, on note parfois ut pour u∗ car dans ce cas et pour
une base de E donnée, la matrice de u∗ est la transposée de la matrice de u.
38 CHAPITRE 2 : ALGÈBRE LINÉAIRE

De manière générale et en particulier dans un espace hermitien, la matrice de


u∗ est la matrice conjuguée (dans le sens complexe du mot) de la transposée
de la matrice de u.

Théorème spectral pour les matrices


On considère des matrices de Mn (K) pour K = R ou C.

Soit A une matrice symétrique réelle (resp. hermitienne complexe), alors


il existe une matrice P orthogonale (resp. unitaire) et une matrice D
diagonale dont tous les coefficients sont réels, telles que

A = P DP t .

On prendra garde qu’une matrice symétrique vérifie At = A alors qu’une


matrice hermitienne vérifie At = A (la transposée d’une matrice hermitienne
A est la matrice dont les coefficients sont les conjugués complexes de ceux de
A. Autrement dit, ∀1  i, j  n, aij = aji et en particulier les coefficients
diagonaux sont réels : ∀1  i  n, aii ∈ R).
On rappelle qu’une matrice P est
— orthogonale ssi P −1 = P t , c’est-à-dire P P t = In . Cela revient à
dire que les vecteurs colonnes (resp. lignes) de P forment une base
orthonormée de Kn ,
— unitaire ssi elle est orthogonale et de déterminant 1.
Chapitre 3 : Polynômes
Polynômes symétriques

Chapitre 3

Polynômes

Théorème de d’Alembert-Gauss
Aussi appelé théorème fondamental de l’algèbre, on peut le donner sous
l’une des trois formes équivalents suivantes :

C est algébriquement clos.

Tout polynôme à coefficients complexes est scindé dans C.

Tout polynôme à coefficients complexes admet une racine dans C.

3.1 Polynômes symétriques


Soit A un anneau commutatif unitaire et n ∈ N∗ .

Définition

Dans A[X1 , . . . , Xn ], le polynôme symétrique élémentaire de degré


k, pour 1  k  n est, par définition

 k
  
σn,k (X1 , . . . , Xn ) = Xi  = Xi
1i1 <···<ik n =1 I∈Pk ([[1,n]]) i∈I

où Pk ([[1, n]]) désigne l’ensemble des parties à k éléments de [[1, n]].


40 CHAPITRE 3 : POLYNÔMES

On pose de plus σn,0 (X1 , . . . , Xn ) = 1 (ce qui correspond à la définition


donnée pour k = 0 car pour k = 0, celle-ci fait apparaître une somme réduite
à un seul terme correspondant à I = ∅ et un produit vide donc égal à 1).

Définition

De manière générale, un polynôme symétrique de A[X1 , . . . , Xn ] est


un polynôme invariant par permutation des indéterminées X1 , . . . , Xn .
C’est-à-dire un polynôme P tel que

∀σ ∈ Sn , P (Xσ(1) , . . . , Xσ(n) ) = P (X1 , . . . , Xn ).

Noter en particulier que pour tout n ∈ N∗ :


n

— σn,1 (X1 , . . . , Xn ) = X i = X1 + · · · + X n ,
i=1
n

— σn,n (X1 , . . . , Xn ) = Xi = X1 . . . Xn .
i=1

Exemples

Dans R[X1 , X2 ], les trois polynômes symétriques élémentaires sont :


— degré 0 : σ2,0 (X1 , X2 ) = 1,
— degré 1 : σ2,1 (X1 , X2 ) = X1 + X2 ,
— degré 2 : σ2,2 (X1 , X2 ) = X1 X2 .
Dans R[X1 , X2 , X3 ], les quatre polynômes symétriques élémentaires sont :
— degré 0 : σ3,0 (X1 , X2 , X3 ) = 1,
— degré 1 : σ3,1 (X1 , X2 , X3 ) = X1 + X2 + X3 ,
— degré 2 : σ3,2 (X1 , X2 , X3 ) = X1 X2 + X1 X3 + X2 X3 ,
— degré 3 : σ3,3 (X1 , X2 , X3 ) = X1 X2 X3 .

Lien avec les racines d’un polynôme

Soit α1 , . . . , αn ∈ A.
3.1 POLYNÔMES SYMÉTRIQUES 41

 
n
 n
  n−j

(X − αi ) = (−1)n−j α i  X j
i=1 j=0 1i1 <···<in−j n =1

n

= (−1)n−j σn,n−j (α1 , . . . , αn )X j .
j=0

Le coefficient du monôme de degré j (c’est-à-dire X j ) du polynôme P (X) =


n

(X − αi ) est le polynôme symétrique élémentaire de degré n − j (c’est-à-
i=1
dire σn,n−j ) évalué sur les racines α1 , . . . , αn de P , au signe près (−1)n−j .

Si on se perd dans les indices, les signes et les coefficients, on peut a mi-
nima comprendre cette imposante formule en développant :

pour n = 2 :

(t − a)(t − b) = t2 − (a + b)t + ab = σ2,0 (a, b)t2 − σ2,1 (a, b)t + σ2,2 (a, b),

pour n = 3 :

(t − a)(t − b)(t − c) = t3 − (a + b + c)t2 + (ab + ac + bc)t − abc


= σ3,0 (a, b, c)t3 − σ3,1 (a, b, c)t2 + σ3,2 (a, b, c)t
−σ3,3 (a, b, c).

Théorème

L’ensemble des polynômes symétriques de A[X1 , . . . , Xn ] est la sous-


algèbre de A[X1 , . . . , Xn ] engendrée par les polynômes symétriques élé-
mentaires.

Tout polynôme symétrique s’exprime comme un polynôme sur les poly-


nômes symétriques élémentaires. Les polynômes symétriques élémentaires sont
les briques fondamentales qui permettent de construire les polynômes symé-
triques, de même que les nombres premiers permettent de construire tous les
entiers.
Polynômes d’interpolation

42 CHAPITRE 3 : POLYNÔMES

Exemples

X 3 + Y 3 = (X + Y )3 − 3XY (X + Y )

= (σ2,1 (X, Y ))3 − 3σ2,2 (X, Y )σ2,1 (X, Y )

X 2 + Y 2 + Z 2 = (X + Y + Z)2 − 2(XY + XZ + Y Z)

= (σ3,1 (X, Y, Z))2 − 2σ3,2 (X, Y, Z)

3.2 Polynômes d’interpolation


Soit n ∈ N, n + 1 nombres réels distincts x0 , . . . , xn et n + 1 nombres réels
(non nécessairement distincts) y0 , . . . , yn .

Polynômes de Lagrange

Il existe un unique polynôme L ∈ Rn [X] tel que ∀ 0  i  n, L(xi ) = yi .


Il est donné par la formule suivante :
 
n
 n
 X − xj 
L(X) = yi 

.
xi − xj 
i=0 j=0
j=i

Graphiquement, cela signifie que par n + 1 points du plan d’abscisses


différentes, on peut faire passer une et une seule courbe polynomiale de degré
au plus n (et non pas de degré n : on peut notamment penser que par trois
points du plan alignés et distincts passe bien une seule droite mais aucune
parabole).
Il est clair que la formule donnée offre une solution.
L’unicité se démontre en évoquant le fait que si deux polynômes L1 et L2
vérifient les conditions de l’énoncé, leur différence L1 − L2 est un polynôme
de degré au plus n admettant au moins n + 1 racines distinctes (à savoir les
nombres x0 , . . . , xn ) : c’est donc nécessairement le polynôme nul (le polynôme
nul est le seul polynôme de degré au plus n ayant au moins n + 1 racines.
On peut le démontrer à l’aide de la division euclidienne : a ∈ R est racine de
P ∈ R[X] ssi X − a divise P ).
Bestiaire

3.3 BESTIAIRE 43

Polynômes de Newton
La famille de n + 1 polynômes

Ni (X) = (X − xj ), 0in
0j<i

(avec en particulier n0 (X) = 1 correspondant au produit vide dans la formule


ci-dessus) constitue une base de Rn [X], appelée base de Newton associée
aux points (x0 , y0 ), . . . , (xn , yn ). Elle permet de retrouver les polynômes de
Lagrange sous la forme
n

L(X) = ak Nk (X),
k=0

où les n + 1 coefficients ak = [y0 , . . . , yk ] sont les différences divisées calculées à


partir des n+1 ordonnées (yi )0in , c’est-à-dire les valeurs définies par [yi ] = yi
et par la formule de récurrence

[yi+1 , . . . , yj ] − [yi , . . . , yj−1 ]


∀0  i < j  n, [yi , . . . , yj ] = .
xj − xi

3.3 Bestiaire
Polynôme caractéristique d’une matrice

Le polynôme caractéristique d’une matrice A ∈ Mn (K) est

χA (X) = det(XIn − A).

Polynôme minimal d’une matrice

Le polynôme minimal d’une matrice A ∈ Mn (K), noté πA est le poly-


nôme unitaire de plus petit degré annulant A. C’est-à-dire qu’on a

πA = 0, πA (A) = 0 et si P ∈ K[X] alors P (A) = 0 ⇒ πA | P.

En particulier χA (A) = 0 (théorème de Cayley-Hamilton) et πA | χA .


44 CHAPITRE 3 : POLYNÔMES

Polynômes de Bernstein

Les n + 1 polynômes de Bernstein de degré n ∈ N sont définis par


 
n k
∀ 0  k  n, Bk (x) =
n
x (1 − x)n−k .
k

Ils sont au cœur d’une élégante démonstration probabiliste constructive


du théorème de Weierstrass. Ils peuvent fournir quelques questions d’un
sujet d’agrégation et ont notamment les propriétés suivantes :

— ils forment une base de Rn [X].


— B00 est le polynôme constant égal à 1.
— pour tout n  1, pour tout 0  k  n, Bkn est positif sur [0, 1], ne
s’annule qu’en 0 (si k = 0)
 eten 1 (si k = n).
k
— Bkn a pour maximum Bkn sur [0, 1].
n
n
— la formule du binôme donne facilement ∀x ∈ R, Bkn (x) = 1.
 n−1  k=0
— ∀1  k  n − 1, (Bkn ) = n Bk−1 − Bkn−1 .
— ∀0  k  n − 1, Bk+1
n+1 n
= (1 − X)Bk+1 + XBkn .

Polynômes de Bernstein associés à une fonction

Si f est une fonction continue sur [0, 1], les polynômes de Bernstein
associés à f sont définis par
n    
 n k
∀n ∈ N, Bn (f ) = f xk (1 − x)n−k .
k n
k=0

Cette suite converge uniformément vers f sur [0, 1] et fournit ainsi une
preuve constructive du théorème de Weierstrass.
3.3 BESTIAIRE 45

Théorème de Weierstrass

Toute fonction réelle continue sur un segment est la limite uniforme d’une
suite de polynômes.

Voir par exemple [QZ20].

Polynômes d’Hermite
Ils sont définis par
2 /2
 2 /2
(n)
∀n ∈ N, ∀x ∈ R, Hn (x) = (−1)n ex e−x ,

c’est-à-dire qu’ils correspondent, au signe près, au facteur polynomial de la


2
dérivée n-ième de x → e−x /2 . On peut les écrire explicitement sous la forme
n/2
 n!
Hn (x) = (−1)k xn−2k .
2k k!(n− 2k)!
k=0

Hn est solution de l’équation différentielle linéaire du second ordre


y  − xy  + ny = 0 n ∈ N.

Polynômes de Laguerre
Ils sont définis par
ex  n −x (n)
∀n ∈ N, ∀x ∈ R, Ln (x) = x e .
n!
Ln est solution de l’équation différentielle linéaire du second ordre
xy  + (1 − x)y  + ny = 0.

Polynômes de Tchebychev
Ils sont définis de manière récursive par
T0 = 1, T1 = X
∀n ∈ N, Tn+2 = 2XTn+1 − Tn
ou de manière implicite comme étant les seuls polynômes vérifiant
∀n ∈ N, ∀θ ∈ R, Tn (cos θ) = cos(nθ).
Chapitre 4 : Topologie

Chapitre 4

Topologie

Cette partie, encore plus que les autres, est très lacunaire. Nous avons
voulu faire le plus simple possible. On pourra se reporter au classique ouvrage
de Hervé Queffélec [Que20].

Espace topologique
Il s’agit d’un ensemble non vide E muni d’une topologie, c’est-à-dire d’un
ensemble de parties A de E dont les éléments sont appelés des ouverts et
vérifiant
— ∅ ∈ A ,E ∈ A
— stabilité par intersection finie : ∀A, B ∈ A , A ∩
B ∈ A

— stabilité par réunion quelconque : ∀A ⊂ A , A∈A
A∈A 
Remarque : Il suffit que l’intersection de deux éléments de A soit dans
A pour que toute intersection finie d’éléments de A le soit aussi.
Le cas particulier, maximal, où A = P(E) est l’ensemble des parties de
E est appelé topologie discrète et n’est pas vraiment le plus intéressant. Le cas
opposé, minimal, où A = {∅, E} ne l’est pas plus. Ces deux cas fournissent
des topologies sans aucun intérêt pratique.
Un fermé est par définition le complémentaire, dans E, d’un ouvert :

A est un fermé ⇔ A ∈ A est un ouvert.

Espace métrique
Il s’agit d’un ensemble non vide E sur lequel on dispose d’une distance,
c’est-à-dire une application d définie sur E 2 vérifiant
48 CHAPITRE 4 : TOPOLOGIE

— positivité : ∀x, y ∈ E, d(x, y)  0,


— séparation : ∀x, y ∈ E, d(x, y) = 0 ⇔ x = y,
— symétrie : ∀x, y ∈ E, d(x, y) = d(y, x),
— inégalité triangulaire : ∀x, y, z ∈ E, d(x, z)  d(x, y) + d(y, z).

À partir de cela, pour tout r > 0, on peut définir les notions de boule
ouverte
B(x, r) = {y ∈ E, d(x, y) < r}
et de boule fermée

Bf (x, r) = {y ∈ E, d(x, y)  r}

puis les notions plus générales d’ouvert (c’est-à-dire une partie de E qui contient
une boule ouverte autour de chacun de ses points : un ouvert peut donc être vu
comme une réunion de boules ouvertes) et de fermé (le complémentaire d’un
ouvert). Tout espace métrique est donc muni d’une topologie induite par sa
distance.

Espace vectoriel normé


Il s’agit d’un K-espace vectoriel E (avec K = R ou C en général) muni
d’une norme, c’est-à-dire une application || · || définie sur E, à valeurs dans R
(et plus précisément R+ ) et vérifiant

— positivité : ∀x ∈ E, ||x||  0,
— séparation : ∀x ∈ E, ||x|| = 0 ⇔ x = 0E ,
— homogénéité : ∀x ∈ E, ∀λ ∈ K, ||λ · x|| = |λ| · ||x||,
— inégalité triangulaire (sous-additivité) : ∀x, y ∈ E, ||x+y||  ||x||+||y||.

Toute norme induit une distance définie par d(x, y) = ||x−y||. Tout espace
vectoriel normé est donc un espace métrique et est automatiquement muni de
la topologie induite par cette distance.

Espace euclidien
Il s’agit d’un R-espace vectoriel E de dimension finie (on a tendance à
oublier cette condition) muni d’un produit scalaire, c’est-à-dire une applica-
tion ·, · définie sur E 2 , à valeurs dans R et vérifiant

— symétrie : ∀x, y ∈ E, x, y = y, x,


50 CHAPITRE 4 : TOPOLOGIE

Espace de Hilbert
Il s’agit d’un R-espace vectoriel muni d’un produit scalaire euclidien ou
d’un C-espace vectoriel muni d’un produit scalaire hermitien et qui de plus est
complet pour la topologie induite par ce produit scalaire.
Un espace de Hilbert est donc un espace de Banach dans lequel la
norme est induite par un produit scalaire.
Les espaces de Hilbert les plus courants sont Rn et Cn munis de leur
produit scalaire habituel, l’ensemble L2 ([a, b]) des fonctions (réelles ou com-
plexes) de carré intégrable sur un segment donné et l’ensemble l2 des suites
(réelles ou complexes) de carré sommable, chacun de ces espaces étant muni
d’un produit scalaire construit de manière analogue au produit scalaire usuel
sur Rn ou Cn .
Chapitre 5 : Analyse
Résultats majeurs

Chapitre 5

Analyse

On pourra se reporter aux classiques ouvrages de Rudin [Rud20] et [Rud21]


ou encore ceux du duo Zuily/Queffélec [QZ20] et pourquoi pas le tome
d’analyse [Gou20] du Maths en tête de Gourdon. Pour l’analyse complexe en
particulier, on lira à profit le livre de Tauvel [Tau20].
Les sommes d’exercices d’analyse proposés par le trio Francinou, Gia-
nella & Nicolas [FGN01] sont comme en algèbre une source intarissable et
de qualité constante.
Le recueil de contre-exemples de Hauchecorne [Hau07] permet de mieux
comprendre certaines subtilités.

5.1 Résultats majeurs

Théorème de Rolle

Soit deux réels a < b et une fonction f : [a, b] → R continue sur [a, b] et
dérivable sur ]a, b[.

f (a) = f (b) ⇒ ∃c ∈]a, b[, f  (c) = 0.

Le théorème de Rolle a pour corollaire sa généralisation, le TAF :


52 CHAPITRE 5 : ANALYSE

Théorème des accroissements finis (TAF)

Soit deux réels a < b et une fonction f : [a, b] → R continue sur [a, b] et
dérivable sur ]a, b[.

f (b) − f (a)
∃c ∈]a, b[, f  (c) = .
b−a

On le prouve aisément en posant une fonction g définie à partir de f et


vérifiant les hypothèses du théorème de Rolle, par exemple

f (b) − f (a)
∀x ∈ [a, b], g(x) = f (x) − (x − a) .
b−a

g a les mêmes propriétés de continuité et de dérivabilité que f et de plus


f (b) − f (a)
g(a) = g(b) = f (a). Enfin, comme g  (x) = f  (x) − , de g  (c) = 0
b−a
f (b) − f (a)
on déduit f  (c) = .
b−a
Le TAF signifie que sous les hypothèses indiquées, il existe au moins une
tangente à la courbe parallèle à la corde (AB), où A et B sont les points de la
courbe d’équation y = f (x) d’abscisses respectives a et b.

Le théorème de Rolle étant un cas particulier du TAF, ces deux théo-


rèmes sont équivalents. On déduit trivialement du TAF, l’IAF :

Inégalité des accroissements finis (IAF)

Soit deux réels a < b et une fonction f : [a, b] → R continue sur [a, b] et
dérivable sur ]a, b[. Si |f  | est majorée par M  0 sur ]a, b[ alors

∀x, y ∈]a, b[, |f (x) − f (y)|  M (x − y).

On peut en particulier prendre M = sup |f  (t)|.


t∈]a,b[
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 53

Figure 5.1 – Illustration du TAF avec deux solutions c.

Théorème de Bolzano-Weierstrass

Énoncé simple. Dans un espace vectoriel normé de dimension finie (en


particulier dans R, C ou Rn ), toute suite bornée admet une sous-suite
convergente.

La version la plus élémentaire de ce théorème est vue en tout début


d’études universitaires : toute suite réelle bornée admet une sous-suite conver-
gente.

Énoncé complet. Un espace métrique (ou métrisable) est compact ssi


toute suite de cet espace admet une sous-suite convergente,
54 CHAPITRE 5 : ANALYSE

ou encore :

un espace métrique (ou métrisable) est compact ssi toute partie infinie de
cet espace admet une valeur d’adhérence.

Théorème du point fixe

Toute fonction contractante f : E → E d’un espace métrique complet


E admet un unique point fixe x ∈ E et toute suite de E définie par
xn+1 = f (xn ) (avec x0 ∈ E quelconque) converge vers x.

Un point fixe x d’une fonction f vérifie par définition f (x) = x.

Théorème de Weierstrass

Pour toute fonction f continue sur un segment [a, b] de R, pour tout ε > 0,
il existe un polynôme P ∈ R[X] tel que ||f − P ||∞  ε.

La généralisation de ce théorème à un espace compact X quelconque au


lieu de [a, b] porte le nom de théorème de Stone-Weierstrass.
Ce théorème signifie qu’on peut toujours approximer, sur un segment
donné, la courbe d’une fonction continue f par celle d’une fonction polynomiale
P , l’écart vertical entre les deux n’excédant jamais un ε > 0 fixé préalablement
au choix de P .
Sur la figure ci-dessus sont représentés les courbes d’équation

y = f (x) = |2x − 1|
y = B2 (f )(x) = 1 − 2x + 2x2
y = B4 (f )(x) = 1 − 2x + 4x3 − 2x4
y = B6 (f )(x) = 1 − 2x + 10x4 − 12x5 + 4x6
..
.
y = B20 (f )(x) 1 − 2x + 33592x11 + · · · − 9724x20

où Bn est le n-ième polynôme de Bernstein associé à f . B2 , B4 , B6 et B20


correspondent respectivement à des écarts ε de 0.5, 0.38, 0.32 et 0.18 : la
convergence n’est pas très rapide.
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 55

Figure 5.2 – Approximation de la courbe d’équation y = |2x − 1| par des


courbes polynomiales.

Les polynômes de Bernstein constituent l’exemple majeur associé au


théorème de Weierstrass. Ils ont permis la découverte des courbes de Bézier
dont les applications dans l’industrie sont multiples.
On peut obtenir d’autres polynômes en utilisant les méthodes d’interpo-
lations usuelles (polynômes de Lagrange).

Développements en série entière usuels


Il faut absolument connaître les développements qui suivent et les liens
qui les unissent : de l’un on peut souvent déduire plusieurs autres et nous
verrons qu’en connaissant seulement deux développements on retrouve tous
les développements usuels.
On rappelle que la formule de Taylor donne le développement en sé-
rie entière d’une fonction indéfiniment dérivable en un point a d’un intervalle I :
56 CHAPITRE 5 : ANALYSE

+∞
 (t − a)n
f (t) = f (n) (a)
n!
n=0

et son cas particulier pour a = 0 dont l’usage, sans être exclusif, est majori-
taire :
+∞
 tn
f (t) = f (n) (0) .
n!
n=0
L’intervalle de validité de ces développements est spécifique à chaque fonc-
tion : il peut être réduit à un seul point ou être valable sur R, voire sur C.

On rappelle que si f est seulement n fois dérivable en a, le théorème de


Taylor-Young affirme que f admet un développement limité à l’ordre n en
a, c’est-à-dire :

n
 f (n) (a)
f (t) = (t − a)k + o ((t − a)n ) .
k!
k=0

Développements liés à la fonction exponentielle


À partir de la formule de Taylor, sachant que la fonction exponentielle
est égale à sa dérivée (et donc à toutes ses dérivées), on obtient facilement :
+∞ n

t t
e =
n!
n=0

et également, en remplaçant t par −t :


+∞
 +∞

−t (−t)n tn
e = = (−1)n .
n! n!
n=0 n=0

On a immédiatement, en combinant les deux développements précédents :


+∞

et + e−t t2n
ch(t) = =
2 (2n)!
n=0

+∞

et − e−t t2n+1
sh(t) = =
2 (2n + 1)!
n=0
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 57

Les fonctions cosinus et sinus hyperboliques sont respectivement les parties


paire et impaire de l’exponentielle : leurs développements respectifs ne contiennent
que les termes pairs ou que les termes impairs du développement de l’exponen-
tielle.
Le développement de l’exponentielle complexe mérite d’être écrit. On peut
le décomposer suivant les puissances paires et impaires pour isoler les parties
réelles et imaginaires. Ici t ∈ R :
+∞
 +∞

(it)n tn
eit = = in
n! n!
n=0 n=0

+∞
 +∞

2n t2n t2n+1
= i + i2n+1
(2n)! (2n + 1)!
n=0 n=0

+∞
  +∞
t2n t2n+1
= (−1)n +i (−1)n
(2n)! (2n + 1)!
n=0 n=0

et en remplaçant t par −t :
+∞
  +∞
−it t2n
n t2n+1
e = (−1) + i(−1)n+1 .
(2n)! (2n + 1)!
n=0 n=0

Les fonctions circulaires cosinus et sinus sont respectivement les parties réelle
et imaginaire de l’exponentielle complexe. On a donc immédiatement (ou en
combinant les deux développements qui précèdent dans le cadre des formules
d’Euler) :
+∞
eit + e−it  t2n
cos(t) = Re(eit ) = = (−1)n
2 (2n)!
n=0
+∞

eit − e−it t2n+1
sin(t) = Im(eit ) = = (−1)n .
2i (2n + 1)!
n=0
On peut également remarquer qu’en dérivant le développement du sinus on
obtient celui du cosinus, en dérivant celui du cosinus on obtient l’opposé de
celui du sinus (sin = cos et cos = − sin).
Par contre, en intégrant, il faut ajouter la constante idoine : si en intégrant
le cosinus on obtient bien sans effort le développement du sinus, en intégrant
le sinus, il faut non seulement changer tous les signes pour obtenir le dévelop-
pement du cosinus mais également ajouter, in fine, la constante cos(0) = 1.
Le seul développement de et permet ainsi de retrouver ceux de e−t , eit ,
cos(t), sin(t), ch(t) et sh(t) et de manière a priori plus efficace qu’en utilisant
58 CHAPITRE 5 : ANALYSE

brutalement et systématiquement la formule de Taylor. Notons en passant


que toutes ces fonctions admettent, à l’instar de l’exponentielle, un développe-
ment en série entière de rayon de convergence infini.

Développements liés à la fonction logarithme


Le deuxième développement en série entière majeur à connaître est celui-
ci (le produit qui apparaît dans la formule est vide et donc égal à 1 quand
n = 0) :

t2 t3
(1 + t)α = 1 + αt + α(α − 1) + α(α − 1)(α − 2) + . . .
2 3!
+∞
n−1 
  tn
= (α − i) .
n!
n=0 i=0

On l’obtient en remarquant que pour tout n ∈ N :

((1 + t)α )(n) = α(α − 1)(α − 2)... (α − (n − 1)) (1 + t)α−n .

On en déduit, pour α = −1 :

 +∞
1
= (1 + t)−1 = (−1)n tn
1+t
n=0

qu’on peut intégrer (la constante d’intégration est nulle : ln(1 + 0) = 0) pour
obtenir
+∞
 +∞
(−1)n n+1  (−1)n+1 n
ln(1 + t) = t = t
n+1 n
n=0 n=1

ou dans lequel on peut remplacer t par −t et retrouver la formule de la somme


des termes d’une suite géométrique :

 +∞
1
= tn .
1−t
n=0

Si on intègre celui-ci ou si on remplace t par −t dans le précédent, on obtient


+∞
 1 n
ln(1 − t) = − t
n
n=1
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 59

et si on remplace t par t2 :
+∞
1
2
= (−1)n t2n
1+t
n=0

1
En se souvenant que ∀t ∈ R, arctan (t) = , et en intégrant ce dernier
1 + t2
développement, on obtient celui de la fonction arctangente (la constante d’in-
tégration est ici arctan(0) = 0) :
+∞
 (−1)n 2n+1
arctan(t) = t .
2n + 1
n=0

1
En posant désormais α = , on obtient, sans qu’aucune formule vraiment
2
simple n’apparaisse :
+∞
  
√ (−1)n−1 2n − 1 n
1+t = 1+ t
(2n − 1)22n−1 n
n=1

1 1 1 5 4
= 1 + t − t2 + t3 − t + ...
2 8 16 128
1
Et de même en posant α = − :
2
1 1 3 5 35 4
√ = 1 − t + t2 − t3 + t − ...
1+t 2 8 16 128
1
En remplaçant t par −t2 , ce dernier développement donne celui de √ puis
1 − t2
en intégrant, celui de la fonction arcsinus (ici aussi, la constante d’intégration
est nulle : arcsin(0) = 0).
1 1 3 5 35 8
√ = 1 + t2 + t4 + t6 + t + ...
1 − t2 2 8 16 128
1 3 5 7 35 9
arcsin(t) = t + t3 + t5 + t + t + ...
6 40 112 1152
Cette deuxième salve de fonctions admettent toutes des développements en
série entière de rayon de convergence égal à 1.

Critères de convergence des séries numériques


Dans ce qui suit, α et z désignent des nombres complexes, f une fonction.
60 CHAPITRE 5 : ANALYSE

Règle de comparaison

Si an = O(bn ), c’est-à-dire si ∃ c > 0, ∃N ∈ N, n  N ⇒ |an |  c bn


et en particulier si (1) ∀n ∈ N, 0  an  bn ou (2) an ∼ bn alors
+∞
 
bn converge ⇒ an aussi.
n0 n0

 
On a aussi, par contraposée, an diverge ⇒ bn diverge.
n0 n0

Comparaison série-intégrale

Si f est positive, décroissante et continue sur [1, +∞[ alors


  +∞
f (n) et f (t)dt sont de même nature.
n1 1

Lemme d’Abel
n
Si pour
un réel r > 0 la suite (|an |r )n∈N est bornée et |z| < r alors la
série an z n est absolument convergente.
n0

Critère de Riemann
 1
converge ⇔ α > 1

n1

En particulier, pour α = 1 :

la série harmonique
1
diverge.
n
n1
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 61

et il n’est pas interdit de se souvenir que pour α = 2 :

+∞
 1 π2
2
=
n 6
n=1

ni qu’on peut obtenir ce résultat dans le cadre de l’étude de la série de Fourier


de la fonction 2π-périodique définie par x → x2 pour x ∈ [−π, π] (et plus
précisément à l’aide de la formule de Parseval).
Bien qu’il n’est pas nécessaire de connaître précisément les deux égalités
suivantes, il est bon d’en avoir une certaine idée et savoir qu’on peut les obtenir
par des moyens similaires (Fourier et Parseval) :

+∞
 +∞

1 π4 1 π6
= et = .
n4 90 n6 945
n=1 n=1

+∞
 +∞

1 1
En revanche, on ne sait presque rien sur 3
et .
n n5
n=1 n=1

Critère de convergence d’une série alternée

Si (un )n∈N est une suite positive, décroissante et de limite nulle alors

(−1)n un converge.
n0

et en particulier

la série harmonique alternée


 (−1)n+1
converge et sa somme vaut ln 2.
n
n1
62 CHAPITRE 5 : ANALYSE

Critère de convergence d’une série géométrique


Dans ce qui suit, comme presque partout dans ce manuel, z ∈ C.


z n converge ⇔ |z| < 1
n0

et dans ce cas
+∞
 1
zn = .
1−z
n=0

Série géométrique dérivée


nz n−1 converge ⇔ |z| < 1
n1

et dans ce cas
+∞
 1
nz n−1 = .
(1 − z)2
n=1

Série géométrique dérivée seconde


n(n − 1)z n−2 converge ⇔ |z| < 1
n2

et dans ce cas
+∞
 2
n(n − 1)z n−2 = .
(1 − z)3
n=2

Il ne faut pas apprendre par cœur ces deux derniers résultats mais plutôt
savoir les retrouver très vite en calculant des dérivées. On pourrait d’ailleurs
continuer à dériver pour obtenir le résultat suivant (dérivée k-ième de la série
géométrique)

+∞
 k!
∀k ∈ N∗ , n(n − 1) . . . (n − k + 1)z n−k =
(1 − z)k+1
n=k
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 63

qu’on peut, en divisant par k! et en remarquant que

 
n(n − 1) . . . (n − k + 1) n
= ,
k! k

mettre sous la forme suivante :

Formules du binôme inverse et du binôme de Newton

Si |z| < 1 et k ∈ N :
+∞  
 n 1
z n−k = ,
k (1 − z)k+1
n=k

à comparer avec le cas particulier de la formule du binôme de Newton :

∀z ∈ C, ∀n ∈ N :
n  
 n
z n−k = (1 + z)n .
k
k=0

Dans la première k est fixé et n varie alors que dans la seconde c’est n
qui est fixé et k qui varie. Dans les deux cas, la variable de sommation (n
pour la première, k pour la seconde) varie autant que possible sous la même
contrainte 0  k  n, le coefficient binomial est le même, ainsi que la puissance
sur z. Il n’y a aucune condition sur z ∈ C dans la formule du binôme de
Newton (c’est une somme finie). Notons qu’on peut aussi, par symétrie, écrire
n  
n k
z = (1 + z)n et que la formule du binôme de Newton, sous sa forme
k
k=0
 n  
n k n−k
générale a b = (a + b)n est valable dans tout anneau commutatif
k
k=0
ou du moins à condition que les objets a et b commutent, c’est-à-dire si ab = ba.
64 CHAPITRE 5 : ANALYSE

Série exponentielle

zn
La série exponentielle, de terme général , converge sur C :
n!
+∞ n
 z
∀z ∈ C, = ez .
n!
n=0

Produit de Cauchy
 
Si an et bn sont deux séries complexes absolument convergentes
n0 n0
n

alors la série de terme général ak bn−k converge et
k=0
 +∞   +∞  +∞ 
n
  
an bn = ak bn−k .
n=0 n=0 n=0 k=0

Critères de convergence des intégrales


Critères de Riemann
 +∞
1
dt converge ⇔ α > 1
1 tα

et

 1
1
dt converge ⇔ α < 1.
0 tα

Le passage de l’une à l’autre de ces deux intégrales se fait par le change-


1
ment de variable u = qui a l’avantage de définir un C 1 -difféomorphisme entre
t
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 65

]0, 1[ et ]1, +∞[ (quel que soit l’ensemble de départ choisi parmi ces deux in-
tervalles). On retrouve
aisément ces résultats en se souvenant qu’une primitive
1 t → 1 t1−α si α = 1
−α
de t → α = t est 1−α
t ln t si α = 1.

Critère de Bertrand

 
+∞
1 α=1
dt converge ⇔ α > 1 ou
1 tα (ln t)β β > 1.

Ce deuxième critère généralise le précédent (le critère de Riemann n’est


que le critère de Bertrand pour β = 0). La connaissance des croissances
comparées est au cœur de la démonstration. La voici, succinctement :
α+1
L’idée principale consiste à considérer la moyenne de α et de 1 : ce
2
nombre est du même côté de 1 que α.
α+1 α−1 α−1
Si α > 1 : on écrit α = + . Comme > 0, on a
2 2 2
1 α+1
−→ 0. Comme de plus > 1, le résultat suit en consta-
t(α−1)/2 (ln t)β t→+∞ 2
1
tant que la fonction à intégrer est négligeable devant t → (α+1)/2 dont l’inté-
t
grale sur ]1, +∞[ converge d’après le critère de Riemann.
α−1
Si α < 1 : on procède de même mais ici < 0 et la fonction à intégrer
2
est supérieure (en +∞ en tout cas, c’est-à-dire plus précisément pour x > A
1
pour un certain A > 1) à t → (α+1)/2 dont l’intégrale diverge d’après le critère
t
de Riemann.
1
Si α = β = 1, une primitive de t → est t → ln(ln t), fonction
t ln t
divergente en +∞.
1 (ln t)1−β
Si α = 1 et β = 1, une primitive de t → est t →
 ,
t(ln t)β 1−β
fonction divergente en +∞ quand β < 1 et convergente quand β > 1.

Théorème de convergence dominée


On se place dans un espace mesuré (X, A , µ) (X est un ensemble non
vide, A est une tribu sur X et µ une mesure sur A ).
66 CHAPITRE 5 : ANALYSE

Si (fn )n∈N est une suite de fonctions mesurables réelles (ou complexes)
convergeant (simplement) vers une fonction f et si de plus il existe une
fonction intégrable g dominant chacune des fn , c’est-à-dire

∀n ∈ N, ∀x ∈ X, |fn (x)|  g(x)

alors f est également intégrable,



lim |fn − f |dµ = 0
n→+∞ X

et  
f dµ = lim fn dµ,
X n→+∞ X

c’est-à-dire qu’on peut commuter limite et intégrale sur la suite (fn )n∈N .

Continuité et dérivabilité des intégrales à paramètre

Les hypothèses de continuité et de dérivabilité qui figurent dans ces théo-


rèmes sont parfaitement naturelles (n’est-ce pas ?). La seule hypothèse qu’il
faut donc raisonnablement essayer de retenir est celle concernant la majora-
tion de |f | par une fonction g continue et intégrable (à l’instar du théorème
de convergence dominée dont les deux théorèmes ci-dessous sont des consé-
quences).

Théorème de continuité d’une intégrale à paramètre

Soit A une partie d’un espace normé de dimension finie, I un intervalle


de R et f une fonction définie sur A × I à valeurs dans R. Sous les trois
hypothèses suivantes :
— pour tout t ∈ I, x → f (x, t) est continue sur A ;
— pour tout x ∈ A, t → f (x, t) est continue (par morceaux) sur I ;
— il existe g : I → R+ continue (par morceaux) et intégrable et telle
que,
∀x ∈ A, ∀t ∈ I, |f (x, t)|  g(t),

on peut affirmer que la fonction F : x → f (x, t)dt est continue sur A.
I
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 67

Théorème de dérivabilité d’une intégrale à paramètre


Aussi appelé théorème de dérivabilité sous le signe intégrale et
règle de Leibniz.

Soit I, J deux intervalles de R et f une fonction définie sur I × J à valeurs


dans K. Sous les cinq hypothèses suivantes :
— pour tout x ∈ I, t → f (x, t) est continue (par morceaux) et inté-
grable sur J ;
∂f
— est définie sur I × J ;
∂x
∂f
— pour tout x ∈ I, t → (x, t) est continue (par morceaux) sur J ;
∂x
∂f
— pour tout t ∈ J, x → (x, t) est continue sur I ;
∂x
— il existe g : J → R continue (par morceaux) et intégrable telle
+

que,  
 ∂f 
∀x ∈ I, ∀t ∈ J,  (x, t) ≤ g(t),

∂x

on peut affirmer que la fonction F : x → f (x, t)dt est de classe C 1 sur
J
I et 
∂f
∀x ∈ I, F  (x) = (x, t)dt.
J ∂x

Inégalité de Hölder pour le calcul intégral


On pose d ∈ N∗ et on travaille avec des
 fonctions
 définies sur Rd .
p d
Soit p ∈]0, +∞[. Dans l’ensemble L R des fonctions réelles (ou com-
plexes) définies sur Rd et de puissance p-ième intégrables, on dispose de la
norme définie par
 1/p
||f ||p = |f (x)|p dx
Rd
 
Dans l’ensemble L ∞ R d des fonctions bornées, on dispose de la norme définie
par
||f ||∞ = sup |f (x)|
x∈Rd
Soit p, q ∈]0, +∞] deux nombres positifs ou infinis et conjugués, c’est-à-dire
1 1
vérifiant + = 1. On a alors
p q
68 CHAPITRE 5 : ANALYSE

   
Inégalité de Hölder : ∀f ∈ Lp Rd , ∀g ∈ Lq Rd ,
 
f g ∈ L1 Rd et ||f g||1  ||f ||p ||g||q ,,

c’est-à-dire

  1/p  1/q
|f (x)g(x)|dx  p
|f (x)| dx q
|g(x)| dx .
Rd Rd Rd

Cette propriété se généralise ainsi : soit p, q, r ∈]0, +∞] trois nombres po-
1 1 1
sitifs ou infinis vérifiant + = . On a alors :
p q r
     
∀f ∈ Lp Rd , ∀g ∈ Lq Rd , f g ∈ Lr Rd et ||f g||r  ||f ||p ||g||q ,

c’est-à-dire

 1/r  1/p  1/q


r
|f (x)g(x)| dx  p
|f (x)| dx q
|g(x)| dx .
Rd Rd Rd

Corollaire : inégalité de Cauchy-Schwarz


Pour p = q = 2, on obtient (en passant par l’inégalitétriangulaire)
 l’in-
égalité de Cauchy-Schwarz dans l’espace de Hilbert L2 Rd des fonctions
de carré intégrable.

   
∀f, g ∈ L2 Rd , f g ∈ L1 Rd et |f, g|  ||f g||1  ||f ||2 ||g||2 ,

c’est-à-dire :
5.1 RÉSULTATS MAJEURS 69

  
 
 f (x)g(x)dx  |f (x)g(x)|dx

R d Rd

 1/2  1/2
 2
|f (x)| dx 2
|g(x)| dx ,
Rd Rd

ou encore

 2  
 
 f (x)g(x)dx  |f (x)|2 dx |g(x)|2 dx

R d Rd Rd

 d

 le produit scalaire f, g de deux fonctions f, g ∈ L R est défini par
2

f (x)g(x)dx.
Rd

Inégalité de Hölder pour les suites numériques


Dans l’ensemble p des suites réelles (ou complexes) de puissance p-ième
sommables, on dispose de la norme définie par
 +∞ 1/p

||u||p = |un |p .
n=0

Dans l’ensemble ∞ des suites réelles (ou complexes) bornées, on dispose de la


norme définie par
||u||∞ = sup(|un |).
n∈N

Soit p, q ∈]0, +∞] deux nombres positifs ou infinis et conjugués, c’est-à-dire


1 1
vérifiant + = 1. On a alors l’inégalité de Hölder :
p q

Inégalité de Hölder.

∀u ∈ p , ∀v ∈ q , uv ∈ 1 et ||uv||1  ||u||p ||v||q ,


70 CHAPITRE 5 : ANALYSE

c’est-à-dire :

+∞
 +∞ 1/p  +∞ 1/q
  
|un vn |  |un | p
|vn | q
.
n=0 n=0 n=0

Cette propriété se généralise ainsi : soit p, q, r ∈]0, +∞] trois nombres po-
1 1 1
sitifs ou infinis vérifiant + = . On a alors :
p q r

∀u ∈ p , ∀v ∈ q , uv ∈ r et ||uv||r  ||u||p ||v||q ,

c’est-à-dire :

 +∞ 1/r  +∞ 1/p  +∞ 1/q


  
|un vn | r
 |un | p
|vn | q
.
n=0 n=0 n=0

Corollaire : inégalité de Cauchy-Schwarz


Pour p = q = 2, l’inégalité de Cauchy-Schwarz dans l’espace de Hil-
bert 2 des suites de carré sommables s’obtient en passant par l’inégalité
triangulaire. Le produit scalaire u, v de deux suites u, v ∈ 2 est défini par
+∞

un v n .
n=0

∀u, v ∈ 2 , uv ∈ 1 et |u, v|  ||uv||1  ||u||2 ||v||2 ,

c’est-à-dire :

+∞
 +∞ 1/2  +∞ 1/2
  
|un vn |  |un | 2
|vn | 2

n=0 k=0 n=0


Analyse complexe

5.2 ANALYSE COMPLEXE 71

ou encore

 +∞ 2 +∞ +∞
  
|un vn |  |un |2 |vn |2 .
n=0 n=0 n=0

5.2 Analyse complexe


Théorème des résidus
Soit γ un lacet (c’est-à-dire un arc fermé de longueur finie) d’un ouvert
U de C et z1 , . . . , zn des points de U qui ne sont pas sur le chemin γ. Nous
donnons seulement le cas particulier (a priori le seul utile) où γ ne fait qu’un
seul tour autour des singularités zk . Dans le cas où γ fait λ tours autour de zk
(dans le sens direct), il faut multiplier le résidu par λ (si on préfère se com-
pliquer l’existence et tourner dans le sens indirect, il conviendra de penser à
changer le signe du résultat) : le résidu est compté à chaque tour.

Si f est une fonction holomorphe sur U \{z1 , . . . , zn } alors


 n

f (z)dz = 2iπ Res(f, zk )
γ k=1

où, si f possède un pôle d’ordre p en a, le résidu de f en a est

1 ∂ p−1
Res(f, a) = lim p−1 ((z − a)p f (z)) .
(p − 1)! z→a ∂z

On dit que f a un pôle d’ordre p en a ssi il existe une fonction holomorphe


g(z)
g telle que g(a) = 0 et f (z) = sur un voisinage de a. Une fonction
(z − a)p
holomorphe en un point z = a d’un ouvert U de C est une fonction complexe
f (z) − f (a)
définie et dérivable en a, c’est-à-dire telle que lim existe.
z→a
z∈U
z−a
72 CHAPITRE 5 : ANALYSE

Séries de Fourier
Soit f une fonction définie sur R, localement intégrable et T -périodique.
Les coefficients de Fourier complexes de f sont

 T
1
∀n ∈ Z, cn (f ) = f (t)e−i2πnt/T dt
T 0

et les coefficients de Fourier réels de f sont

 T  
2 2πnt
∀n ∈ N, an (f ) = cn (f ) + c−n (f ) = f (t) cos dt,
T 0 T
 T  
2 2πnt
∀n ∈ N, bn (f ) = i (cn (f ) − c−n (f )) = f (t) sin dt
T 0 T

 T
2
et en particulier a0 (f ) = f (t)dt = c0 (f ) et b0 (f ) = 0.
T 0
an (f ) − ibn (f ) an (f ) + ibn (f )
On a également ∀n ∈ cn (f ) = et c−n (f ) = .
2 2

La série de Fourier associée à f est la série trigonométrique


     
i2πnx/T 1 2πnx 2πnx
cn (f )e = a0 (f )+ an (f ) cos +bn (f ) sin .
2 ∗
T T
n∈Z n∈N

Remarque : une autre convention


 existe. La seule différence
 consiste à définir
1 T 2 T
à part a0 (f ) comme égal à f (t)dt et non pas f (t)dt. La somme
T 0 T 0
de la série devient alors
 
cn (f )ei2πnx = a0 (f ) + (an (f ) cos(2πnx) + bn (f ) sin(2πnx))
n∈Z n∈N∗


= (an (f ) cos(2πnx) + bn (f ) sin(2πnx)) .
n∈N
5.2 ANALYSE COMPLEXE 73

Égalité de Parseval
Si f est T -périodique et de carré intégrable sur une période alors

 T +∞

1
||f ||2 = |f (t)|2 dt = |cn (f )|2
T 0 n=−∞

|a0 (f )|2 1   
+∞
= + |an (f )|2 + |bn (f )|2 .
4 2
n=1

|a0 (f )|2
Remarque : avec l’autre convention, est à remplacer par |a0 (f )|2 .
4

Théorème de Dirichlet
 
Si f est périodique,
 intégrable sur une période et admet une limite f x+ 0
(resp. f x− 0 ) à droite (resp. à gauche) en x0 ∈ R alors la série de Fourier
de f converge en x0 et sa somme vaut
   −
f x+
0 + f x0
Sf (x0 ) = .
2

Transformée de Fourier
Soit N ∈ N∗ et f une fonction intégrable sur RN . On définit sa transfor-
mée de Fourier par

ˆ N ˆ
f : ξ ∈ R → f (ξ) = e−ixξ f (x)dx.
RN

Formule d’inversion de Fourier


Sous les mêmes hypothèses, on a alors, symétriquement (le signe moins
disparaît de l’exponentielle) :

N
∀x ∈ R , f (x) = eixξ fˆ(ξ)dξ.
RN
Chapitre 6 : Probabilités
Notions usuelles

Chapitre 6

Probabilités

On pourra se reporter aux deux tomes rédigés par Ouvrard [Ouv00]


dont le contenu couvre l’ensemble du programme des écrits et des oraux (y
compris l’épreuve de modélisation) de l’agrégation externe (et donc également
des autres concours), ou encore au livre de Barbe et Ledoux [BL07] destiné
plus spécifiquement à la L3 et au M1 et plus recentré sur l’essentiel.
Dans tout ce qui suit, on dispose des éléments suivants :
— un ensemble de réalisations Ω (ou univers, c’est-à-dire un ensemble
non vide),
— une tribu F d’événements sur Ω (c’est-à-dire un ensemble non vide
de parties de Ω, contenant l’ensemble vide, stable par union dénom-
brable et par complémentaire et donc également par intersection dé-
nombrable. Une tribu est aussi appelée σ-algèbre. Ses éléments sont
appelés événements)
— une mesure de probabilité P sur F (c’est-à-dire une application qui
à tout élément de F associe un nombre entre 0 et 1 et en particulier
qui à l’ensemble vide associe 0, et qui plus est σ-additive : à toute
réunion dénombrable d’événements disjoints elle associe la somme des
mesures de chaque événement).

6.1 Notions usuelles

Espérance d’une variable aléatoire réelle

On rappelle que l’espérance est une application linéaire :


76 CHAPITRE 6 : PROBABILITÉS

∀a, b ∈ R, E(aX + bY ) = aE(X) + bE(Y )


et en particulier
E(aX + b) = aE(X) + b,

à condition que les variables aléatoires X et Y admettent une espérance.

Variance d’une variable aléatoire réelle

Si X est une v.a.r. admettant un moment d’ordre 2, c’est-à-dire si E(X 2 )


existe, alors sa variance est définie par
 
V(X) = E (X − E(X))2

et on obtient en développant la formule de Koenig-Huygens d’un usage


en général plus simple :
 
V(X) = E X 2 − (E(X))2 .

Rappelons que la variance d’une v.a.r. X est toujours positive et qu’elle


n’est nulle que si X est presque sûrement constante.

Covariance d’un couple de variables aléatoires réelles

Si X et Y sont deux v.a.r. admettant chacune un moment d’ordre 2, c’est-


à-dire si E(X 2 ) et E(Y 2 ) existent, alors leur covariance est définie par

Cov(X, Y ) = E ((X − E(X))(Y − E(Y )))

et on obtient en développant la formule suivante d’un usage en général


plus simple :
Cov(X, Y ) = E (XY ) − E(X)E(Y ).

La covariance est de plus une application bilinéaire symétrique sur l’en-


semble des v.a.r. admettant un moment d’ordre 2 et on a en particulier

Cov(X, X) = V(X).
Résultats majeurs

6.2 RÉSULTATS MAJEURS 77

Si les variables X et Y admettent une variance, on a alors

∀a, b ∈ R, V(aX + bY ) = a2 V(X) + 2abCov(X, Y ) + b2 V(Y )


et en particulier
V(aX + b) = a2 V(X).

6.2 Résultats majeurs

Théorème de transfert (ou de transport)

Soit une variable aléatoire réelle X et une fonction ϕ : R → R. Alors :


 
E [ϕ(X)] = ϕ (X(ω)) P(dω) = ϕ(x)PX (dx),
Ω R

ce qui donne, plus explicitement, dans les deux situations les plus courantes :

Cas d’une variable discrète :



E [ϕ(X)] = ϕ(n)P[X = n].
n∈X(Ω)

Cas d’une variable continue de densité f :



E [ϕ(X)] = ϕ(x)f (x)dx.
X(Ω)
78 CHAPITRE 6 : PROBABILITÉS

Formule des probabilités totales

Si (An )n∈N est un système complet d’événements et B un événement quel-


conque alors
 
P(B) = P(B ∩ An ) = P(An ) × PAn (B).
n∈N n∈N

Un système complet d’événements est une partition de l’univers Ω, c’est-


à-dire que Ω est la réunion disjointe des événements de ce système :

An = Ω.
n∈N

Inégalité de Markov
On peut l’écrire sous l’une des deux formes équivalentes suivantes :

Pour toute variable aléatoire X de L1 (Ω, F , P) :

E(|X|)
∀α > 0, P(|X|  α) 
α

ou

pour toute variable aléatoire X de Lp (Ω, F , P) :

E(|X|p )
∀α > 0, P(|X|  α)  .
αp

L’inégalité de Markov offre un majorant utile quand on dispose d’une


suite de variables aléatoires admettant des moments d’ordre p. En dehors de
ce cas, on utilise principalement p = 1 ou p = 2 (en particulier quand on se
ramène à l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev). Sa démonstration est très
simple et peut faire l’objet d’une question à l’écrit ou à l’oral. La voici.
6.2 RÉSULTATS MAJEURS 79

Soit α > 0. En distinguant le cas |X|  α du cas |X| < α, on constate


qu’on a :
αp 1{|X|α}  |X|p .

Par croissance de l’espérance, on obtient :


 
E αp 1{|X|α}  E(|X|p ).

Or, par linéarité de l’espérance puis à l’aide du rappel donné quelques lignes
plus bas :
   
E αp 1{|X|α} = αp E 1{|X|α} = αp P(|X|  α),

d’où
αp P(|X|  α)  E(|X|p )

et finalement
E(|X|p )
P(|X|  α)  .
αp
Rappel : Pour tout événement A ∈ F , la fonction indicatrice

1 si X ∈ A
1{X∈A} =
0 si X ∈
/A

est une variable aléatoire de Bernoulli de paramètre P(A) et son espérance


est donnée par

E(1{X∈A} ) = 1 × P(X ∈ A) + 0 × P(X ∈


/ A) = P(X ∈ A).

Inégalité de Bienaymé-Tchebychev

Pour toute variable aléatoire X admettant un moment d’ordre 2 :


V(X)
∀α > 0, P(|X − E(X)|  α)  .
α2

L’inégalité de Bienaymé-Tchebychev s’obtient à partir de celle de Mar-


kov en remplaçant X par X−E(X) et en posant p = 2. On voit alors apparaître
la variance de X dans le membre de droite.
80 CHAPITRE 6 : PROBABILITÉS

Loi du zéro-un de Borel & lemme de Borel-Cantelli


La connaissance de ces deux résultats constitue une démarcation majeure
avec le lot des candidats qui les ignorent. Quand il est question de lim inf ou de
lim sup dans un contexte probabiliste, on doit penser à la loi du zéro-un de
Borel et à la généralisation de la moitié de cette loi au cas où les événements
ne sont pas forcément indépendants, le lemme de Borel-Cantelli.
Les notions de limite inférieure et limite supérieure sont définies de manière
symétriques par les égalités suivantes :
 
lim inf An = Ak
n0 kn
 
lim sup An = Ak
n0 kn

et en particulier, par passage au complémentaire,

lim inf An = lim sup An .

La limite inférieure d’une suite de parties est constituée de tous les éléments qui
sont présents dans toutes les parties à partir d’un certain rang n quelconque :

x ∈ lim inf An ⇔ ∃n ∈ N, ∀k  n, x ∈ Ak .

La limite supérieure d’une suite de parties est constituée de tous les éléments
qui sont présents, pour tout rang n, dans au moins une partie de rang k supé-
rieur à n :
x ∈ lim sup An ⇔ ∀n ∈ N, ∃k  n, x ∈ Ak .
On a évidemment
lim inf An ⊂ lim sup An .

Loi du zéro-un de Borel.


Elle donne un critère suivant lequel une probabilité vaut 0 ou 1.
Si (An )n∈N est une suite d’événements indépendants alors
+∞

P(An ) < +∞ ⇒ P (lim sup Ak ) = 0,
n=0
+∞

P(An ) = +∞ ⇒ P (lim sup Ak ) = 1.
n=0
6.2 RÉSULTATS MAJEURS 81

Par passage au complémentaire, on obtient


+∞
  
P(An ) < +∞ ⇒ P lim inf Ak = 1,
n=0

+∞
  
P(An ) = +∞ ⇒ P lim inf Ak = 0.
n=0

Lemme de Borel Cantelli.


Cas zéro de la loi du zéro-un de Borel sans hypothèse d’indépendance.
+∞

P(An ) < +∞ ⇒ P (lim sup Ak ) = 0.
n=0

Loi des grands nombres


Soit (Xn )n∈N une suite de variables aléatoires indépendantes de même loi
n
1
et d’espérance E(X0 ) = µ. On note X n = Xk la moyenne empirique
n
k=1
des v.a. X1 , . . . , Xn . La loi forte (aux hypothèses plus exigeantes) entraîne la
loi faible, de même que la convergence presque-sûre entraîne la convergence en
probabilité.

 faible des grands nombres : théorème de Khintchine.


Loi
X n n∈N converge en probabilité vers l’espérance µ :
  
∀ε > 0, lim P X n − µ > ε = 0.
n→+∞

Loi forte des grands nombres.


 les (Xn )n∈N sont de plus intégrables (c’est-à-dire E (|X0 |) < +∞) alors
Si
X n n∈N converge presque-sûrement vers l’espérance µ :
 
P lim X n = µ = 1.
n→+∞
82 INTERMÈDE

Figure 6.1 – Preuve géométrique d’une formule arithmétique. a


 n
2 n
 
a. Il s’agit de l’identité k = k3 pour k = 5.
k=1 k=1
n

Dans un grand carré de côté k, on découpe des petits carrés de côtés k pour 1  k  n.
k=1
Pour k impair on a k carrés de côtés k et pour k pair on a k − 1 carrés et deux demis-carrés
de côtés k qui recouvrent à chaque fois une aire de k 3 . On prouve facilement par récurrence
que cette construction tient pour tout n ∈ N∗ .
Agrégation interne

Deuxième partie

Agrégation interne
Épreuve 1, 2021

Chapitre 7

Épreuve 1, 2021

Thème
algèbre linéaire (matrice, trace, base, forme linéaire,
matrice nilpotente, sous-espace vectoriel stable par un endomorphisme,
diagonalisabilité)

Résultat majeur
endomorphismes codiagonalisables

Remarques du jury
1. Écrire « la trace est la somme des valeurs
propres » est insuffisant : il faut préciser le corps de base et les multi-
plicités.
4.b. Les éléments de G fournissent une famille génératrice de Vect(G).
Utiliser le théorème de la base extraite.
Le groupe linéaire GLn (K) n’est pas un espace vectoriel.
5.b. Utiliser un polynôme annulateur scindé à racines simples pour
caractériser la diagonalisabilité.
86 CHAPITRE 7 : ÉPREUVE 1, 2021

Énoncé
Soit K un sous-corps de C.
Dans cette partie, on établit quelques résultats dont certains pourront être
utiles par la suite 1 . Pour i et j entiers tels que 1  i  n et 1  j  n, on note
Ei,j l’élément de Mn (K) dont tous les coefficients sont nuls sauf celui situé à
l’intersection de la i-ème ligne et la j-ème colonne, qui vaut 1. Ces matrices
forment donc la base canonique de Mn (K). On pourra utiliser le symbole de
Kronecker défini pour tous entiers i et j par δi,j = 1 si i = j et 0 sinon.

1. Soit A un élément nilpotent de Mn (K), c’est-à-dire pour lequel il existe


un entier naturel p non nul tel que Ap = 0. Quelle est sa trace ?

2. Soit A, B, C trois éléments de Mn (K).


(a) Démontrer que
tr(AB) = tr(BA)
et
tr(ABC) = tr(CAB).

(b) Soit i, j, k, l quatre entiers tels que 1  i  n, 1  j  n, 1  k  n


et 1  l  n. Donner sans démonstration ce que vaut le produit
Ei,j Ek,l . On utilisera le symbole de Kronecker.
(c) Démontrer que pour n  2, il peut arriver que

tr(ABC) = tr(CBA).

3. Les formes linéaires sur Mn (K).


(a) Démontrer que si f est une forme linéaire sur Mn (K), il existe une
unique matrice A de Mn (K) telle que pour toute matrice M de
Mn (K), on ait f (M ) = tr(AM ) :

∀f ∈ L (Mn (K), K), ∃!A ∈ Mn (K), ∀M ∈ Mn (K), f (M ) = tr(AM ).

(b) Démontrer que si les matrices M1 , M2 , . . . , Mn2 forment une base de


Mn (K), alors les formes linéaires définies pour tout entier i tel que
1  i  n2 par fi (M ) = tr(Mi M ), forment une base de l’espace
vectoriel des formes linéaires sur Mn (K). En déduire qu’il existe une
1. La suite en question n’est pas abordée dans le présent ouvrage. Se reporter au sujet
complet pour la traiter.
AGRÉGATION INTERNE 87

base (F1 , . . . , Fn2 ) de Mn (K) telle que pour toute matrice M de


Mn (K), on ait
n2

M= tr(Mi M )Fi .
i=1

(c) Démontrer que si f est une forme linéaire sur Mn (K) telle que
f (M N ) = f (N M ) pour toutes matrices M et N de Mn (K), alors f
est proportionnelle à la trace. On pourra utiliser les matrices Ei,j et
le symbole de Kronecker, définis au début de cette partie.

4. Soit G un sous-groupe de GLn (K).


On note G la sous-algèbre de Mn (K) engendrée par G.

(a) Démontrer que G = Vect(G), où Vect(G) désigne le sous-espace vec-


toriel de Mn (K) engendré par G.
(b) Démontrer qu’il existe une base de G formée d’éléments de G.

5. Soit E un K-espace vectoriel de dimension finie et f et g deux endomor-


phismes de E. On suppose qu’ils commutent.

(a) Démontrer que tout sous-espace propre de f est stable par g.


(b) Démontrer que si g est diagonalisable, alors sa restriction à tout
sous-espace stable (par g) est diagonalisable.
(c) Démontrer que si f et g sont diagonalisables, alors ils sont co-diago-
nalisables, c’est-à-dire qu’ils possèdent une base commune de diago-
nalisation.

Corrigé
1. La trace d’une matrice complexe est égale à la somme de ses valeurs
propres complexes, comptées avec leurs multiplicités algébriques. Une
matrice nilpotente à coefficients complexes a pour seule valeur propre
0. En effet, si λ ∈ K est une valeur propre de A et X ∈ Cn un vecteur
propre associé (c’est-à-dire un vecteur non nul vérifiant AX = λX), alors
une simple récurrence montre que

∀k ∈ N∗ , Ak X = λk X.
88 CHAPITRE 7 : ÉPREUVE 1, 2021

En particulier, puisque Ap = 0 et X = 0, on obtient


0 = Ap X = λp X ⇒ λp = 0 ⇒ λ = 0
car K est un corps (et plus précisément car K est un anneau intègre).
La trace de A est donc nulle.

2. (a) Il suffit d’écrire explicitement la somme des éléments diagonaux d’un


produit de matrices et pour cela d’écrire dans un premier temps tous
les coefficients d’un tel produit.
En notant A = (aij )1i,jn et B = (bij )1i,jn , on a
 n 

AB = aik bkj
k=1 1i,jn
et  
n

BA = bik akj
k=1 1i,jn
d’où
n 
 n
tr(AB) = aik bki
i=1 k=1
et
n 
 n
tr(BA) = bik aki .
i=1 k=1
Ces deux doubles sommes sont égales car les variables de sommation
i et k sont muettes et indépendantes l’une de l’autre.
En utilisant (1) l’associativité du produit matriciel et (2) en appli-
quant le principe que nous venons de démontrer aux matrices AB et
C, on obtient
tr(ABC) = tr((AB)C) = tr(C(AB)) = tr(CAB).
(1) (2) (1)

(b)
Ei,j Ek,l = δjk Eil .
En effet, si j = k, le produit est nul (les coefficients égaux à 1 ne sont
pas « en face » l’un de l’autre : le numéro de la colonne ou 1 apparait
dans la première matrice ne correspond pas à celui de la ligne où il
apparait dans la seconde matrice).
Par contre, si j = k, le produit des deux matrices donne un unique
1, situé sur la ligne i et la colonne l de la matrice résultante.
AGRÉGATION INTERNE 89

(c) Il suffit d’utiliser la question précédente (sinon, à quoi servirait-elle ?)


et ne pas chercher trop compliqué. On peut par exemple poser n = 2
et A = E11 , B = E12 et C = E21 .
On obtient alors

tr(ABC) = tr((E11 E12 )E21 ) = tr(E12 E21 ) = tr(E11 ) = 1

et

tr(CBA) = tr((E21 E12 )E11 )) = tr(E22 E11 ) = tr(0) = 0 = 1.

Dans ce genre de question, si la première idée qui se présente à votre


esprit n’est pas fructueuse, il suffit de réessayer en changeant un peu
l’exemple choisi.

3. (a) Soit f est une forme linéaire sur Mn (K).


Rappelons qu’une forme linéaire sur un K-e.v. E est une application
linéaire sur E et à valeurs dans K.
On peut procéder par analyse-synthèse, procédé particulièrement ef-
ficace non seulement pour trouver la solution à un problème mais
également pour démontrer son unicité.
Analyse : si une telle matrice A = (aij )1i,jn existe, en pensant
que toute application linéaire, et a fortiori toute forme linéaire est
entièrement définie par les images d’une base de l’espace vectoriel E,
une idée naturelle vient à l’esprit : utiliser, ici encore, les matrices
(Eij )1i,jn qui constituent la base canonique de Mn (K).
Le seul élément diagonal non nul de la matrice AEij est situé sur
la j-ième colonne et vaut aji (la matrice AEij a en fait une seule
colonne non nulle : la j-ième, égale à la i-ième colonne de A. Si on se
perd dans les indices, on peut, a minima, se convaincre de ce résultat
en faisant des calculs avec des matrices 3 × 3). On a donc

∀ 1  i, j  n, f (Eij ) = tr(AEij ) = aji .

Ce qui permet de définir A de manière unique par

A = (aij )1i,jn = (f (Eji ))1i,jn .

Synthèse : Vérifions que la matrice A obtenue ci-dessus convient à


toute matrice M ∈ Mn (K).
90 CHAPITRE 7 : ÉPREUVE 1, 2021

n 
 n
En écrivant M = (mij )1i,jn = mij Eij sa décomposition
i=1 j=1
dans la base (Ei,j )1i,jn de Mn (K), on obtient :

 
n 
 n
f (M ) = f mij Eij 
i=1 j=1

n 
 n
= mij f (Eij )
(1)
i=1 j=1

n 
 n
= mij aji
(2)
i=1 j=1

= tr(M A) = tr(AM )
(3) (4)

avec
(1) par linéarité de f ,
(2) car on a posé A = (aij )1i,jn telle que aij = f (Eji ),
(3) par le même calcul explicite de la trace vu dans la question 2.(a),
(4) d’après la question 2.(a).
La matrice A définie plus haut convient donc bien (c’est ce que vient
de prouver la synthèse) et c’est la seule (d’après l’analyse).

(b) Soit f une forme linéaire. On sait d’après ce qui précède que

∃!A ∈ Mn (K), ∀M ∈ Mn (K), f (M ) = tr(AM ).

De plus, la base de Mn (K) fournie par l’énoncé donne

n2

n2
∃(αi )1in2 ∈ K , A = α i Mi .
i=1

La bilinéarité du produit matriciel (en fait seule la linéarité à gauche


sert ici ; pour ne pas se tromper de côté, inutile de préciser) et la
AGRÉGATION INTERNE 91

linéarité de la trace (dont on se sert pour l’égalité (1)) donnent


∀M ∈ Mn (K), f (M ) = tr(AM )
 
n2
= tr  α i Mi M 
i=1

n2

= αi tr(Mi M )
(1)
i=1

n2

= αi fi (M ),
i=1

n 2

ce qui prouve que f = αi fi et donc que la famille (fi )1in2
i=1
engendre la forme linéaire f .
De plus, le même calcul montre que si les coefficients (αi )1in2 sont
n2

choisis de manière à ce que αi fi soit la forme linéaire nulle, la
i=1
n 2

matrice αi Mi est alors la matrice A de la question 3.(a) et asso-
i=1
ciée ici à la forme linéaire nulle. Or, la matrice nulle convient éga-
lement. L’unicité obtenue dans la question précédente donne donc
n2
A= αi Mi = 0. La famille (Mi )1in2 étant par hypothèse une
i=1
base de Mn (K), il vient ∀1  i  n2 , αi = 0, ce qui prouve que la
famille (fi )1in2 est libre.
Cette famille est à la fois génératrice et libre, elle constitue donc une
base de l’espace vectoriel des formes linéaires sur Mn (K).
Notons qu’on a ainsi démontré que la dimension de (Mn (K))∗ est
égale à celle de Mn (K), c’est-à-dire n2 (c’est d’ailleurs un résultat
bien connu : si E est un e.v. quelconque de dimension finie n alors son
dual E ∗ , constitué des formes linéaires sur E, est aussi de dimension
n).
On dispose d’un isomorphisme d’espaces vectoriels entre Mn (K) et
(Mn (K))∗ . En effet, deux K-e.v. de même dimension finie sont tou-
jours isomorphes et l’application vue dans la question 3.(a) qui à A
92 CHAPITRE 7 : ÉPREUVE 1, 2021

associe f : M → tr(AM ) constitue un tel isomorphisme (sa linéarité


découle de la bilinéarité du produit matriciel et de la linéarité de la
trace, sa bijectivité vient de l’existence et de l’unicité de A pour f
donnée. Notons, bien que ce ne soit pas indispensable, que récipro-
quement, pour A donnée, il est clair que M → tr(AM ) définit une
forme linéaire sur Mn (K)).
Notons ϕ : Mn (K) → (Mn (K))∗ cet isomorphisme.
On a ainsi, par définition,

∀M, N ∈ Mn (K), ϕ(M )(N ) = tr(M N ).

Procédons ici encore par un processus d’analyse et de synthèse :


Analyse : si on dispose d’une base (F1 , . . . , Fn2 ) satisfaisant la condi-
tion demandée dans l’énoncé, on a alors, par linéarité de ϕ :
 
n2
 n2
ϕ(M ) = ϕ  
tr(Mi M )Fi = tr(Mi M )ϕ(Fi ).
i=1 i=1

Et en particulier pour les éléments de la base (M1 , . . . , Mn2 ) de


Mn (K), on obtient
n2

∀1  j  n , ϕ(Mj ) =
2
tr(Mi Mj )ϕ(Fi ).
i=1

et donc
n 2

∀1  j, k  n , ϕ(Mj )(Mk ) =
2
tr(Mi Mj )ϕ(Fi )(Mk ).
i=1

Par ailleurs, on a aussi

∀1  j, k  n2 , ϕ(Mj )(Mk ) = tr(Mj Mk ) = tr(Mk Mj ).

On doit donc avoir


n2

∀1  j, k  n , tr(Mk Mj ) =
2
tr(Mi Mj )ϕ(Fi )(Mk ).
i=1

On remarque alors que la condition ϕ(Fi )(Mk ) = δi,k (pour tous


i et k) permettrait à cette égalité d’être satisfaite (le membre de
gauche de l’égalité étant un des n2 coefficients visibles dans la somme
présente dans le membre de droite, celui pour lequel i = k).
AGRÉGATION INTERNE 93

Il suffit alors de poser

∀ 1  i  n2 , Fi = ϕ−1 (e∗i )

où e∗i est l’unique forme linéaire sur Mn (K) vérifiant

∀1  i, j  n2 , e∗i (Mj ) = δi,j

(pour définir une forme linéaire, il suffit de définir ses images sur une
base).
La famille (e∗1 , . . . , e∗n2 ) ainsi définie constitue précisément l’habituelle
base duale de la base (M1 , . . . , Mn2 ) donnée dans l’énoncé.
Synthèse : La famille, (F1 , . . . , Fn2 ) ainsi définie est une base de
Mn (K), en tant qu’image réciproque par l’isomorphisme ϕ (c’est-
à-dire en tant qu’image directe par l’isomorphisme ϕ−1 ) de la base
(e∗1 , . . . , e∗n2 ) de (Mn (K))∗ (les isomorphismes conservent les bases et
à vrai dire ils conservent absolument tout).

(c) Il vient immédiatement, en suivant l’indication généreuse de l’énoncé :

∀1  i, j  n, f (Ei,k ) = f (Ei,j Ej,k ) = f (Ej,k Ei,j ) = δi,k f (Ej,j )


(1) (2)

(1) par l’hypothèse faite sur f dans l’énoncé,


(2) d’après le résultat de la question 2.(b).
On en déduit que f (Ei,k ) est nul quand i = k et que

∀1  i, j  n, f (Ei,i ) = f (Ej,j ).

On a donc une information presque complète sur f , à savoir les


images par f des éléments d’une base de Mn (K), à une exception
près, à savoir l’image de E1,1 qui elle est quelconque.
Soit A ∈ Mn (K). En écrivant

n 
 n
A = (αij )1i,jn = αij Ei,j ,
i=1 j=1
94 CHAPITRE 7 : ÉPREUVE 1, 2021

on obtient par linéarité de f :


 
 n
n 
f (A) = f  αij Ei,j 
i=1 j=1

n 
 n
= αij f (Ei,j )
i=1 j=1

n

= αii f (E1,1 )
i=1

= f (E1,1 )tr(A),
ce qui prouve que f est proportionnelle à la trace, le coefficient de
proportionnalité étant f (E1,1 ) ∈ K.

4. G est un sous-groupe de GLn (K) et G est la sous-algèbre de Mn (K)


engendrée par G.
(a) G est, par définition d’une algèbre, composée de l’ensemble des élé-
ments du type P (G1 , . . . , Gk ) où k ∈ N∗ , P ∈ K[X1 , . . . , Xk ] et
G1 , . . . , Gk ∈ G sont tous quelconques.
Comme G est un sous-groupe de GLn (K), il est stable par produit :
Gi , Gj ∈ G ⇒ Gi Gj ∈ G
et par élévation à une puissance entière, positive ou non :
Gi ∈ G ⇔ ∀k ∈ Z, Gki ∈ G.
On peut donc plus simplement voir G comme l’ensemble des éléments
du type P (G1 , . . . , Gk ) où k ∈ N, P ∈ K1 [X1 , . . . , Xk ] (c’est-à-dire
que P est de degré au plus 1) et G1 , . . . , Gk ∈ G, c’est-à-dire les
 k
éléments du type αi Gi +αIn (ne pas oublier que le terme constant
i=1
α d’un polynôme P , une fois ce dernier appliqué sur une matrice,
donne la matrice αIn ).
Comme de plus In ∈ G (car G est un sous-groupe de GLn (K)),
les éléments de G peuvent donc être vus comme les combinaisons
linéaires d’éléments de G, c’est-à-dire les éléments de Vect(G).
D’où l’égalité G = Vect(G).
AGRÉGATION INTERNE 95

(b) Vect(G) est par définition le sous-espace vectoriel de Mn (K) engen-


dré par les éléments de G. Les éléments de G constituent donc une
famille génératrice de Vect(G). Il suffit alors d’extraire de cette fa-
mille une famille génératrice minimale, cette dernière étant alors au-
tomatiquement une base de Vect(G) et donc de G puisque ces deux
ensembles sont identiques d’après le résultat de la question précé-
dente.
Elle constitue donc une base de G formée d’éléments de G.

Remarque : de même qu’on peut toujours compléter une famille


libre de manière à obtenir une base (théorème de la base incomplète),
on peut toujours, symétriquement, extraire d’une famille génératrice
une base (théorème de la base extraite).

5. (a) E est un K-espace vectoriel de dimension finie et f et g sont deux


endomorphismes de E qui commutent.
Pour montrer la stabilité par g des sous-espaces propres de f , il suffit
de prendre un quelconque vecteur propre de f et montrer que son
image est dans le même sous-espace propre pour f .
Soit x ∈ E un vecteur propre pour f associé à une valeur propre
λ ∈ K. On a alors
f (g(x)) = g(f (x)) = g(λx) = λg(x)
(1) (2) (3)

(1) car f et g commutent, (2) par définition du vecteur x, (3) par


linéarité de g.
Ceci prouve que g(x) est dans le sous-espace propre de f associé à
la valeur propre λ (car de deux choses l’une : soit g(x) est nul, soit
il ne l’est pas et c’est alors un vecteur propre pour f associé à λ).

(b) Si g est diagonalisable alors son polynôme minimal πg est scindé à


racines simples. Ce polynôme πg reste toujours un polynôme annu-
lateur de la restriction de g à un quelconque sous-espace stable par
g (qui peut le plus peut le moins). Le polynôme minimal de cette
restriction est donc un diviseur de πg et en tant que diviseur il est
également scindé à racines simples, ce qui suffit à prouver que cette
restriction est diagonalisable.

(c) Il suffit, sous les hypothèses données, de décomposer tout d’abord


E en somme directe de sous-espaces propres pour f (appelons-les de
96 CHAPITRE 7 : ÉPREUVE 1, 2021

manière générique Fi pour certains indices i). Sur chacun de ceux-ci,


la restriction de g (notons-la gi ) est diagonalisable : chaque Fi se
décompose alors comme une somme directe de sous-espaces propres
pour gi . Notons-les Fi,j pour certains indices j. Ces derniers sont
également des sous-espaces vectoriels des sous-espaces propres pour
g. Il ne reste plus qu’à choisir une base quelconque de chaque Fi,j
puis former une base de E par concaténation de l’ensemble d’entre
elles. Cette base, par construction, est une base commune de diago-
nalisation pour f et g car chacun des vecteurs qui la constituent est
à la fois un vecteur propre pour f et pour g.
Épreuve 2, 2020

Chapitre 8

Épreuve 2, 2020

Thèmes
topologie (fermé, compact, norme, distance, boule,
continuité, fonction lipschitzienne)
espaces euclidiens (produit scalaire, norme euclidienne)

Résultat majeur
propriétés des compacts dans un e.v.n. de
dimension finie

Remarques du jury
1. La borne inférieure n’est pas atteinte a priori.
3.(a) Pour affirmer qu’un fermé borné est compact, il faut préciser que
c’est une partie d’un R-espace vectoriel normé de dimension finie. F
n’est pas bornée a priori.
4.(a) ||u + v||2 = ||u||2 + ||v||2 + 2||u||.||v||.
(b) Rappeler que Γ(x) = ∅ avant de conclure que c’est un singleton.
(c) i. ϕ(t) n’est ni une fonction ni un polynôme mais un nombre réel.
ii. L’existence du minimum de ϕ n’a rien à voir avec le signe du coef-
ficient dominant.
98 CHAPITRE 8 : ÉPREUVE 2, 2020

Énoncé
On se place dans un espace euclidien (E, ·, ·) de dimension n ∈ N∗ .
On note || · || la norme euclidienne associée.
Pour tout vecteur x de E et tout réel positif r, on note B(x, r) (resp.
B(x, r)) la boule ouverte (resp. fermée) de centre x et de rayon r.
Pour toute partie fermée non vide F de E et tout x ∈ E, on admet sans
démonstration que l’ensemble

{||x − f ||, f ∈ F }

admet une borne inférieure notée inf ||x − f || et on pose


f ∈F

dF (x) = d(x, F ) = inf ||x − f ||.


f ∈F

On pose alors

Γ(x) = {f ∈ F, ||x − f || = d(x, F )}.

C’est donc l’ensemble (éventuellement vide) des points de F pour lesquels la


borne inférieure est atteinte.

Lorsque Γ(x) est un singleton, on note π(x) son unique élément.

Le problème a pour objectif d’étudier la différentiabilité de la fonction

dF : x → d(x, F )

en fonction de la partie F .

On fixe donc une partie F de E non vide et fermée.

1. Montrer que, pour tout vecteur x de E, dF (x) = 0 si et seulement si


x ∈ F.

2. a) Montrer que, pour tout (x, y) ∈ E 2 et tout f ∈ F , on a :

dF (y)  ||y − x|| + ||x − f ||.

b) En déduire que dF est 1-lipschitzienne.


AGRÉGATION INTERNE 99

3. Soit x un vecteur de E et x0 un vecteur de F . On pose r = ||x − x0 || et


K = B(x, r) ∩ F .
a) Montrer que K est une partie compacte et non vide de E.
b) Montrer que Γ(x) est non vide.

4. On suppose, dans cette question seulement, que F est en outre une partie
convexe de E.
a) Montrer que, quels que soient les vecteurs u et v de E, on a :
 
||u + v||2 + ||u − v||2 = 2 ||u||2 + ||v||2 .

b) Soit x un vecteur de E et soit f et f  deux éléments de Γ(x). On


suppose que f = f  .
  2
 1 
Montrer que  (f + f ) − x < d(x, F )2 .
  
2
En déduire que, pour tout vecteur x de E, Γ(x) est un singleton.
Ainsi, avec les notations de l’introduction, Γ(x) = {π(x)}.
c) On souhaite montrer que :

∀x ∈ E, ∀f ∈ F, f − π(x), x − π(x)  0.

Pour cela, on fixe des éléments x de E et f de F . On introduit la


fonction

[0, 1] → R
.
ϕ: t → ||(1 − t)π(x) + tf − x||2
i. Montrer que ϕ est une fonction polynomiale de degré inférieur ou
égal à 2.
ii. Justifier que ϕ admet un minimum en 0. Conclure.
d) On fixe un vecteur x de E. Soit z un vecteur de F . On suppose que :

∀f ∈ F, f − z, x − z  0.

Montrer que z = π(x).


100 CHAPITRE 8 : ÉPREUVE 2, 2020

Corrigé
1. Soit x ∈ E.
Premier cas : si x ∈ F , on a

0  dF (x) = inf ||x − f ||  ||x − x|| = ||0|| = 0.


f ∈F

Nous avons ainsi démontré la première implication :

x ∈ F ⇒ dF (x) = 0.

Deuxième cas : si par contre x ∈ F , alors x est dans le complémentaire


de F . Comme F est un fermé, son complémentaire est un ouvert (et plus
précisément non vide car il contient x). Il existe alors un réel r > 0 tel
que la boule ouverte B(x, r) soit incluse dans le complémentaire de F ,
c’est-à-dire B(x, r) ∩ F = ∅. Autrement dit

∀f ∈ F, f ∈ B(x, r),

c’est-à-dire
∀f ∈ F, ||x − f ||  r

et en conséquence, par passage à la borne inférieure

dF (x)  r > 0.

Nous venons de montrer que

x ∈ F ⇒ dF (x) > 0.

Ainsi, par contraposée,

dF (x) = 0 ⇒ x ∈ F.

On a donc l’équivalence

dF (x) = 0 ⇔ x ∈ F.
AGRÉGATION INTERNE 101

2. a) Il s’agit d’utiliser (1) la définition de dF , (2) les propriétés immédiates


des bornes inférieures et (3) l’inégalité triangulaire pour les normes.

∀(x, y) ∈ E 2 , ∀f ∈ F, dF (y) = inf ||y − f  ||


(1) f  ∈F

 ||y − f ||
(2)

= ||(y − x) + (x − f )||

 ||y − x|| + ||x − f ||.


(3)

b) En passant à la borne inférieure sur tous les f ∈ F dans la majoration


obtenue à l’instant, on obtient

∀(x, y) ∈ E 2 , dF (y)  ||y − x|| + dF (x)

et donc
∀(x, y) ∈ E 2 , dF (y) − dF (x)  ||y − x||.
On obtient alors (1) symétriquement (les rôles de x et y sont in-
terchangeables) et (2) par homogénéité de la norme (en particulier
∀u ∈ E, || − u|| = ||u|| avec ici u = y − x) :

∀(x, y) ∈ E 2 , dF (x) − dF (y)  ||x − y|| = ||y − x||.


(1) (2)

Du fait que

a  b
∀a, b ∈ R, |a|  b ⇔ −b  a  b ⇔
−a  b

on a donc finalement, avec a = dF (y) − dF (x) et b = ||y − x|| :

∀(x, y) ∈ E 2 , |dF (y) − dF (x)|  ||y − x||,

ce qui prouve que dF est 1-lipschitzienne.


La conséquence immédiate de ce résultat, non explicitement deman-
dée, est que dF est une application continue sur E.

3. a) K est non vide car elle contient x0 .


En effet, par hypothèse x0 ∈ F et par ailleurs

||x − x0 || = r ⇒ x0 ∈ B(x, r).


102 CHAPITRE 8 : ÉPREUVE 2, 2020

On a ainsi x0 ∈ B(x, r) ∩ F = K.
K est l’intersection de deux fermés de E (une boule fermée est évi-
demment un fermé et F est fermée par hypothèse) : K est donc un
fermé de E.
K est de plus incluse dans la boule fermée de centre x et de rayon r,
ce qui se traduit par

∀y ∈ K, ||y − x||  r.

On peut, bien que ce ne soit pas indispensable, préciser que

∀y ∈ K, ||y|| = ||y − x + x||  ||y − x|| + ||x||  r + ||x||.

r + ||x|| est donc un majorant de la norme des éléments de K. K est


donc donc bornée.
K est ainsi une partie fermée et bornée de l’espace E. Puisque E est
de dimension finie n ∈ N∗ , K est un compact de E.

Rappel : il faut bien prendre garde au fait que les fermés bornés
d’un espace de dimension infinie ne sont pas forcément compact. Il
faut donc absolument rappeler que E est de dimension finie pour af-
firmer qu’un fermé borné de E est automatiquement un compact de E.

b) Puisque x0 ∈ F et dF (x)  ||x − x0 || = r, on peut construire une


suite (xn )n∈N d’éléments de K tels que

lim ||x − xn || = dF (x).


n→+∞

K étant compact, on peut extraire de cette suite une sous-suite conver-


gente. Par commodité de notation, on peut considérer que la suite
(xn )n∈N est construite de manière à être convergente vers une limite
qu’on notera  ∈ K.
On obtient alors
||x − || = ||x − lim xn ||
n→+∞

= || lim (x − xn )||
n→+∞

= lim ||x − xn ||
(1) n→+∞

= dF (x),
AGRÉGATION INTERNE 103

avec (1) par continuité de la norme.


Puisque K ⊂ F , on a donc  ∈ F et  ∈ Γ(x). Γ(x) est donc non vide.

4. a) Ce résultat est classique et on le donne aux lycéens quand on introduit


le produit scalaire et la norme euclidienne dans le plan et dans l’es-
pace. En voici la preuve, dans laquelle on utilise (1) et (3) la définition
de la norme euclidienne en fonction du produit scalaire :

∀u ∈ E, ||u|| = u, u

et (2) la bilinéarité de ce produit scalaire.


Soit u, v ∈ E :

||u + v||2 + ||u − v||2 = u + v, u + v + u − v, u − v


(1)

= u, u + u, v + v, u + v, v


(2)
+ u, u − u, v − v, u + v, v
 
= 2 ||u||2 + ||v||2 .
(3)

b) L’égalité rappelée dans la question précédente permet d’écrire,


(1) en posant u = x − f et v = x − f 
et ensuite,
(2) en se souvenant qu’on suppose f, f  ∈ Γ(x), c’est-à-dire

dF (x) = ||x − f || = ||x − f  ||,

||(x − f ) + (x − f ) ||2 + ||(x − f ) − (x − f  )||2


 
= 2 ||x − f ||2 + ||x − f  ||2
(1)

 
= 2 dF (x)2 + dF (x)2
(2)

= 4dF (x)2 ,
ce qui donne, en simplifiant le premier membre de cette égalité

||2x − (f + f  )||2 + ||f  − f )||2 = 4dF (x)2


104 CHAPITRE 8 : ÉPREUVE 2, 2020

et finalement, par homogénéité de la norme (on divise par 4 cette


égalité, ce qui revient à diviser par 2 à l’intérieur de la première norme,
car elle est au carré)
 2
 
x − 1 (f + f  ) + 1 ||f  − f )||2 = dF (x)2 .
 2  4
Si f = f  alors ||f  − f || > 0 et on aurait alors
 2
 1 
0  x − (f + f  ) < dF (x)2
2
ou encore, par homogénéité de la norme (|| − u|| = ||u||)
  2
 1 
 
0   (f + f ) − x < dF (x)2 .

2
Par ailleurs,
1
f, f  ∈ Γ(x) ⇒ f, f  ∈ F ⇒ (f + f  ) ∈ F
2
car F est supposée convexe. En effet
1 1 1
(f + f  ) = f + f 
2 2 2
est un élément du segment [f, f ] (communément appelé son milieu)


et nous rappelons qu’une partie convexe contient, par définition, tous


les segments reliant deux de ses éléments.
On a donc, par définition de dF (x) :
 
 1 
 (f + f ) − x  d(x, F )  0

 2 
et finalement, par croissance de la fonction carré sur R+ :
  2
 1 
 (f + f  ) − x  d(x, F )2 .
 2 
Ce qui entre en contradiction avec l’inégalité obtenue plus haut :
  2
 1 
 (f + f  ) − x < d(x, F )2 .
 2 

Il est donc absurde de supposer que Γ(x) contient deux éléments dis-
tincts f et f  . Comme on a vu dans la question 3.b) que pour tout
x ∈ E, Γ(x) est non vide, on peut conclure que pour tout vecteur x
de E, Γ(x) est un singleton.
AGRÉGATION INTERNE 105

c) i. Ici encore il suffit (2) de se ramener au produit scalaire, d’uti-


liser (3) sa bilinéarité et sa symétrie puis (4) de revenir à des
normes et enfin (5) d’utiliser la linéarité à droite du produit sca-
laire pour faire apparaître l’expression dont l’énoncé nous indique
qu’on veut démontrer qu’elle est négative ou nulle. Mais tout
d’abord, (1) on regroupe les termes en t avant de développer pour
être un peu plus efficace.
Soit t ∈ R :
ϕ(t) = ||(1 − t)π(x) + tf − x||2

= ||t(f − π(x)) + π(x) − x||2


(1)

= t(f − π(x)) + π(x) − x, t(f − π(x)) + π(x) − x


(2)

= t2 f − π(x), f − π(x) + 2tf − π(x), π(x) − x


(3)
+π(x) − x, π(x) − x

= ||f − π(x)||2 t2 + 2f − π(x), π(x) − xt + ||π(x) − x||2 ,


(4)

= ||f − π(x)||2 t2 − 2f − π(x), x − π(x)t + ||π(x) − x||2 ,


(5)

ce qui montre que ϕ est une fonction polynomiale (sur la variable


réelle t) de degré inférieur ou égal à 2.

Remarque : attention à ne pas conclure trop vite que ϕ est exac-


tement de degré 2. Les apparences sont parfois trompeuses : rien
n’indique, en effet, que son monôme de degré 2 n’a pas un coeffi-
cient nul.

ii. Tout d’abord, on peut calculer


ϕ(0) = ||π(x) − x||2 = dF (x)2
et remarquer ensuite que par convexité de F , comme f ∈ F et
π(x) ∈ F , on a également
∀t ∈ [0, 1], (1 − t)π(x) + tf ∈ [π(x), f ] ⊂ F.
On a donc
∀t ∈ [0, 1], ϕ(t) = ||(1 − t)π(x) + tf − x||2  dF (x)2 = ϕ(0),
106 CHAPITRE 8 : ÉPREUVE 2, 2020

ce qui prouve que ϕ admet un minimum en t = 0.

Montrons que f − π(x), x − π(x)  0.

Premier cas : si f = π(x) alors

f − π(x), x − π(x) = 0, x − π(x) = 0.

Deuxième cas : si par contre f = π(x) alors ϕ est de degré 2 car


on a dans ce cas ||f − π(x)||2 = 0.

Le coefficient dominant de ϕ étant strictement positif, l’extension


de ϕ à R est  
f − π(x), x − π(x)
— décroissante sur −∞,
||f − π(x)||2
 
f − π(x), x − π(x)
— croissante sur , +∞
||f − π(x)||2
Remarque : souvenez-vous qu’une fonction polynomiale réelle
du second degré t → at2 + bt + c avec a > 0 est décroissante sur
] − ∞, −b/(2a)[ et croissante sur ] − b/(2a), +∞[.

Puisque ϕ admet un minimum


 en 0 sur [0, 1], 0 est nécessaire-
f − π(x), x − π(x)
ment dans l’intervalle , +∞ (sinon ϕ se-
||f − π(x)||2
rait strictement décroissante sur un intervalle du type [0, ε] pour
un 0 < ε < 1, et on aurait en particulier ϕ(ε) < ϕ(0), ce qui
contredirait la minimalité de ϕ(0)). On a donc

f − π(x), x − π(x)
0
||f − π(x)||2

et donc par positivité de ||f − π(x)||2 :

f − π(x), x − π(x)  0.

Remarque : il était inutile de mener le calcul du discriminant


de ϕ :

∆ = (2f − π(x), x − π(x))2 − 4||f − π(x)||2 × ||π(x) − x||2


 
= 4 f − π(x), x − π(x)2 − ||f − π(x)||2 × ||π(x) − x||2
AGRÉGATION INTERNE 107

et d’utiliser l’inégalité de Cauchy-Schwarz pour obtenir


|f − π(x), x − π(x)|  ||f − π(x)|| × ||x − π(x)||
et en élevant au carré
f − π(x), x − π(x)2  ||f − π(x)||2 × ||x − π(x)||2
et donc ∆  0, ce qui permet seulement de savoir que ϕ est po-
sitive.

d) Après avoir (1) directement utilisé la formule


||a + b||2 = ||a||2 + ||b||2 + 2a, b,
alors que précédemment nous l’avons lourdement redémontrée deux
fois à l’aide des propriétés du produit scalaire (reconnaissons que
c’était au moins une fois de trop) on utilise encore (2) la symétrie
et (3) la linéarité à gauche du produit scalaire pour obtenir
∀f ∈ F, ||x − f ||2 = ||x − z + z − f ||2

= ||x − z||2 + ||z − f ||2 + 2x − z, z − f 


(1)

= ||x − z||2 + ||z − f ||2 + 2z − f, x − z


(2)

= ||x − z||2 + ||z − f ||2 − 2f − z, x − z


(3)

 ||x − z||2
car d’une part
||z − f ||2  0
et d’autre part
−2f − z, x − z  0
car f − z, x − z  0 par hypothèse.
Finalement, par croissance de la fonction racine carrée sur R+ :
∀f ∈ F, ||x − f ||  ||x − z||.
Comme z ∈ F par hypothèse, on a alors
||x − z|| = inf ||x − f ||.
f ∈F

z est donc un élément de l’ensemble Γ(x) = {π(x)} qui ne contient


que le seul π(x), d’où z = π(x).
Épreuve 1, 2018

Chapitre 9

Épreuve 1, 2018

Thèmes
algèbre linéaire (matrice, matrice par bloc,
matrice inversible, déterminant, spectre, morphisme d’algèbres)
nombres complexes (conjugaison, module)

Résultats majeurs
propriétés usuelles du déterminant
propriétés usuelles de la conjugaison

Remarques du jury
2.(b) Faire la différence entre espace vectoriel et
algèbre, montrer que l’image de In est In . Toute involution est bijective.
3.(a) Une matrice non nulle n’a pas a priori de valeur propre non nulle.
(b) Connaître la définition d’une partie dense d’un e.v.n. et parler de
norme (en dimension finie toutes les normes sont équivalentes).
4.(a) Le produit matriciel n’est pas commutatif.
(b) Justifier que A est inversible en donnant son inverse.
5. Ne pas résoudre par équivalence mais par double implication.
110 CHAPITRE 9 : ÉPREUVE 1, 2018

Énoncé
L’objectif du problème est d’établir l’assertion (1) suivante :
 
A B
∀(A, B) ∈ Mn (C)2 , det ∈ R+ .
−B A

Pour cela, on commencera par montrer que cette assertion est équivalente à
l’assertion (2) :
∀C ∈ Mn (C), det(In + CC) ∈ R+ .
On fixe deux matrices A et B de Mn (C).
1. Démontrer l’assertion (1) dans le cas où n = 1.
2. Étude de la conjugaison dans Mn (C).
(a) Montrer que, pour tout A ∈ Mn (C) et tout v ∈ Cn , Av = A v.

Mn (C) → Mn (C)
(b) Montrer que l’application : est un auto-
A → A
morphisme de R-algèbre involutif.
(c) Montrer que, pour tout A ∈ Mn (C), det(A) = det(A).
(d) En déduire que, pour tout A ∈ GLn (C), det(AA) ∈ R∗+ .
3. Densité de GLn (C).
(a) Soit A ∈ Mn (C). Montrer qu’il existe η > 0 tel que :

∀λ ∈ C, 0 < |λ| < η ⇒ A − λIn ∈ GLn (C).

(b) En déduire que GLn (C) est dense dans Mn (C).


4. On suppose dans cette question que A est inversible.
   
In 0 A B
(a) Calculer × .
BA−1 In −B A
(b) En déduire qu’il existe une matrice C ∈ Mn (C) à déterminer telle
que :  
A B
det = |det(A)|2 det(In + CC).
−B A
5. Montrer que (1) et (2) sont équivalentes.
AGRÉGATION INTERNE 111

Corrigé
1. Si n = 1, les matrices A et B s’identifient à des nombres complexes a et
b. On a alors :
   
A B a b
∃a, b ∈ C, det = det = aa+bb = |a|2 +|b|2 ∈ R+ .
−B A −b a
2. (a) On pourrait se contenter de dire que l’opération de conjugaison est
un (auto)morphisme de corps sur C, c’est-à-dire
∀z, z  ∈ C, z + z  = z + z  et zz  = z z  et 1=1
ou aller jusqu’à préciser que la conjugaison est un (auto)morphisme
de R-algèbre, c’est-à-dire qu’on a de plus
∀z ∈ C, ∀α ∈ R, αz = α z.
Mais on n’a pas du tout besoin de voir C comme un R-espace vec-
toriel : le fait que C soit un corps, et à vrai dire seulement que C
soit un anneau, suffit.
Cependant, nous pouvons donner le détaildescalculs.
v1
 .. 
Notons pour cela A = (aij )1i,jn et v =  . .
v
  n
v1
 .. 
On a donc A = (aij )1i,jn et v =  . .
vn
 n   n 
 
 a1i vi   a1i vi 
   
 i=1   i=1 
Av = 
 .
..   .
.. 
= 
 n   
   n 
 ani vi   
ani vi
i=1 i=1
 n
  n

 
 a1i vi   a1i vi 
   
 i=1   i=1 

=  .. 
=
 .. 
.   .  = Av
 n   n 
   
 ani vi   ani vi 
i=1 i=1
112 CHAPITRE 9 : ÉPREUVE 1, 2018

(b) L’aspect involutif de la conjugaison sur Mn (C) est immédiat et


découle du fait que la conjugaison est une involution sur C :
 
A = (aij )1i,jn = (aij )1i,jn = aij 1i,jn = (aij )1i,jn = A.

Les matrices réelles sont invariantes par conjugaison (de même que
les nombres réels le sont) et en particulier, In = In .
Il est clair que

∀A, B ∈ Mn (C), A + B = A + B

et un calcul similaire à celui de la question précédente amène

∀A, B ∈ Mn (C), A × B = A × B.

De plus, la conjugaison étant un (auto)morphisme de R-algèbre sur


C, on obtient

∀A ∈ Mn (C), ∀α ∈ R, αA = αA

La conjugaison est donc un (auto)morphisme de R-algèbre sur Mn (C).


Une involution étant toujours bijective (elle est de plus sa propre
réciproque), la conjugaison est donc bien bijective sur Mn (C).
On peut écrire, bien que ce ne soit pas indispensable :

∀A ∈ Mn (C), ∃!B ∈ Mn (C), B = A,

où bien sûr B 
= A.
Mn (C) → Mn (C)
L’application est donc bien un automor-
A → A
phisme de R-algèbre involutif.

(c) Le déterminant est une application polynomiale homogène de degré


n à coefficients réels (et plus précisément uniquement +1 et −1)
sur les n2 coefficients complexes des matrices de Mn (C). Du fait
que la conjugaison est un (auto)morphisme de R-algèbre sur C, elle
commute avec les polynômes à coefficients réels :
∀P ∈ R[X1 , . . . , Xn2 ], ∀z1 , . . . , zn2 ∈ C :

P (z1 , . . . , zn2 ) = P (z1 , . . . , zn2 )

et donc en particulier

∀A ∈ Mn (C), det(A) = det(A).


AGRÉGATION INTERNE 113

(d) Du fait que

∀A, B ∈ Mn (C), det(AB) = det(A)det(B),

et en utilisant le résultat de la question précédente, on a en parti-


culier

∀A ∈ GLn (C), det(AA) = det(A)det(A)

= det(A)det(A)

= |det(A)|2 ∈ R∗+ .

3. (a) Rappelons tout d’abord que

A − λIn ∈ GLn (C) ⇔ λ ∈ Sp(A).

Si la matrice A admet une valeur propre non nulle, il suffit de choisir


n’importe quel η > 0 inférieur au module de chaque élément non
nul du spectre de A.
Posons par exemple

1
η= min {|λ|, λ ∈ Sp(A), λ = 0} .
2
Il est clair que η ainsi défini est strictement positif et que

∀λ ∈ C, (0 < |λ| < η ⇒ λ ∈ Sp(A) ⇒ A − λIn ∈ GLn (C)) .

Si au contraire la matrice A admet 0 pour seule valeur propre (c’est-


à-dire si A est nilpotente), il est clair que

∀λ = 0, A − λIn ∈ GLn (C)

et il suffit alors de poser par exemple η = 1.

(b) Mn (C) est un C-espace vectoriel de dimension finie n2 (ou bien


encore un R-espace vectoriel de dimension finie 2n2 ) et donc toutes
les normes sur Mn (C) sont équivalentes.
Considérons par exemple la norme || · ||∞ définie par

||(aij )1i,jn ||∞ = max |aij |.


1i,jn
114 CHAPITRE 9 : ÉPREUVE 1, 2018

On a alors :

∀A ∈ Mn (C), ∀ε > 0, ∃B ∈ GLn (C), ||A − B||∞ < ε.

Il suffit en effet de poser B = A − λIn pour un λ vérifiant

0 < λ < min(η, ε)

où η est défini comme précédemment.


Toute matrice de Mn (C) peut donc être approchée à ε > 0 près
(relativement à || · ||∞ ) par une matrice de GLn (C).
GLn (C) est donc dense dans Mn (C).

4. (a) Les matrices définies par blocs se multiplient comme des matrices
« normales » :
   
In 0 A B
×
BA−1 In −B A
 
In A − 0B In B + 0A
=
BA−1 A − In B BA−1 B + In A
 
A B
=
B − B BA−1 B + A
 
A B
= .
0 BA−1 B + A

(b) Remarquons tout d’abord que dans le produit que nous venons de
calculer, le premier facteur a pour déterminant 1 (c’est une matrice
triangulaire inférieure dont la diagonale n’est constituée que de 1) :
 
In 0
det = 1.
BA−1 In

On s’intéresse alors naturellement au déterminant du résultat du


produit ci-dessus et en particulier au déterminant du terme situé en
bas à droite : il suffit de mettre A en facteur (ce qui est possible car
A est supposée inversible, donc A l’est aussi) pour faire apparaître
In dans un premier temps puis la matrice C cherchée (noter qu’on
peut mettre A en facteur à gauche ou à droite mais que la gauche
AGRÉGATION INTERNE 115

semble tout de même plus naturelle) :


  
−1
BA−1 B + A = A A BA−1 B + In
 
= A A−1 BA−1 B + In .

En posant alors naturellement C = A−1 B on obtient


BA−1 B + A = A(CC + In )

= A(In + CC).
Enfin, le déterminant d’une matrice triangulaire par bloc étant égal
au produit des déterminants des blocs situés sur la diagonale (on se
sert de cette propriété en (*)), on obtient
 
A B
det
−B A
   
In 0 A B
= det −1 × −1
−BA In 0 BA B + A
   
In 0 A B
= det −1 × det −1
−BA In 0 BA B + A
 
A B
= 1 × det −1
0 BA B + A
 
A B
= det
0 A(In + CC)
  
= det(A) × det A In + CC
(∗)

   
= det(A) × det A × det In + CC
 
= det(A) × det(A) × det In + CC

= |det(A)|2 × det(In + CC).

5. Remarquons pour commencer que

∀A ∈ Mn (C), |det(A)|2 ∈ R+ .
116 CHAPITRE 9 : ÉPREUVE 1, 2018

Il est alors clair que si l’assertion (2) :

∀C ∈ Mn (C), det(In + CC) ∈ R+

est vraie, le résultat de la question précédente prouve que l’assertion (1) :


 
2 A B
∀(A, B) ∈ Mn (C) , det ∈ R+
−B A

l’est également (il suffit d’appliquer l’assertion (2) à la matrice C = A−1 B


définie ci-dessus).

Réciproquement, supposons que l’assertion (1) est vraie.


Posons alors, pour une matrice C ∈ Mn (C) quelconque, une matrice
A ∈ GLn (C) quelconque (mais à ce compte là, autant aller au plus simple
en posant A = In ) et B ∈ Mn (C) telle que C = A−1 B, c’est-à-dire
C = A−1 B ou encore B = A C (en particulier B = C si on a choisi
A = In ).
Le résultat de la question précédente amène alors, sous l’hypothèse que
l’assertion (1) est vraie, que l’assertion (2) l’est aussi.
En particulier, on peut écrire,
 
In C
∀C ∈ Mn (C), det(In + CC) = det
−C In
 
−2 A B
= |det(A)| det ∈ R+
−B A

en posant A = In et B = C.

(1) et (2) sont donc bien équivalentes.


Épreuve 1, 2017

Chapitre 10

Épreuve 1, 2017

Thèmes
nombres complexes (homographie)
algèbre linéaire (matrice, matrice symétrique, trace)
algèbre bilinéaire (produit scalaire, norme euclidienne)

Résultat majeur
théorème spectral

Remarques du jury
2.(b) Justifier que g(O + ) = D.
3.(a) La positivité de t M M pose problème : démontrer la positivité des
valeurs propres en utilisant déterminant et trace est insuffisant (sauf
en dimension  2). Les matrices M et t M n’ont pas a priori les mêmes
sous-espaces propres. Les valeurs propres de t M M ne sont pas a priori
les carrés des valeurs propres de M .
(b) Les vérifications sur la norme euclidienne se font sur le produit
scalaire. Il est inutile de justifier l’inégalité triangulaire.
4. Distinguer le produit hermitien de la norme qu’il induit.
118 CHAPITRE 10 : ÉPREUVE 1, 2017

Énoncé
On considère les sous-ensembles de C suivants :
O + est le demi-plan ouvert des nombres complexes de partie réelle > 0.
D le disque unité ouvert de C, c’est-à-dire l’ensemble des nombres com-
plexes de module < 1.
1. Soit z un nombre complexe qui n’est pas un nombre réel négatif ou nul
(z ∈ C\R− ). Démontrer qu’il existe un unique nombre complexe dans
√ √
O + noté z tel que ( z)2 = z.

2. Soit g la fonction de la variable complexe z définie sur C\{−1} par :

z−1
g(z) =
z+1

(a) Démontrer que g(O + ) ⊂ D.


(b) Démontrer que g réalise une bijection de O + sur D. Expliciter la
bijection inverse.

3. On définit sur Mn (R) l’application N en posant, pour M dans Mn (R),

N (M ) = Tr(t M M )

(a) Soit M dans Mn (R) telle que M = (mij ). Justifier que t M M est
une matrice symétrique positive, qui est définie positive si M est
inversible.
(b) Justifier que N est le carré d’une norme euclidienne sur Mn (R).
Expliciter le produit scalaire ,  défini par

∀M ∈ Mn (R), M, M  = N (M ).

4. Expliciter un produit hermitien sur Mn (C) tel que [le carré de] 1 la norme
associée, noté N  , vérifie :

∀M ∈ Mn (C), N  (M ) = Tr(M ∗ M ).
1. Les termes placés entre ces crochets ne figuraient pas initialement dans l’énoncé offi-
ciel. Nous les ajoutons.
AGRÉGATION INTERNE 119

Corrigé

1. Il faut pour commencer écrire z sous forme exponentielle (la forme ex-
ponentielle est la mieux adaptée pour manipuler les puissances, produits
et quotients de nombres complexes) :

∀z ∈ C\R− , ∃!r > 0, ∃!θ ∈] − π, π[, z = reiθ .

Notez bien l’unicité de r et de θ dans les intervalles indiqués. r est le


module de z et θ est l’argument principal de z.
√ 
 π π
On cherche un nombre z = r eiθ avec z  > 0 et θ ∈ − , tel que
√ 2 2 2
2
( z) = z , ce qui est équivalent à résoudre le système


r2 = r
2θ = θ

dont la seule solution, sous les conditions imposées à r et θ est donnée


par
 √
r  = r
θ  = θ .
2

On peut préciser que la fonction carré est bijective de R∗+ sur lui-même
θ  π π
et que la fonction linéaire θ → est bijective de ] − π, π[ sur − , .
2 2 2
√ √ iθ/2
Le nombre z = re est bien dans O et il est le seul à vérifier
+

( z)2 = z.

2. (a) Soit z ∈ O + . Montrons que g(z) ∈ D, c’est-à-dire |g(z)| < 1.


Écrivons z = x + iy pour


x = Re(z) > 0 (car z ∈ O + )
y = Im(z) ∈ R.
120 CHAPITRE 10 : ÉPREUVE 1, 2017
 
z − 1

|g(z)| =  
z + 1
 
 x − 1 + iy 
=  
x + 1 + iy 

|x − 1 + iy|
=
|x + 1 + iy|

(x − 1)2 + y 2
=  .
(x + 1)2 + y 2

On a

(x + 1)2 = x2 + 2x + 1 > x2 − 2x + 1 = (x − 1)2

car x > 0, et on en déduit

(x + 1)2 + y 2 > (x − 1)2 + y 2 .

La fonction racine carrée étant strictement croissante sur R+ , on a


alors
 
(x + 1)2 + y 2 > (x − 1)2 + y 2  0

et donc par quotient


(x − 1)2 + y 2
 < 1.
(x + 1)2 + y 2

Nous venons de montrer que

∀z ∈ O + , g(z) ∈ D,

c’est-à-dire

g(O + ) ⊂ D.
AGRÉGATION INTERNE 121

(b) Soit z ∈ O + et posons z  ∈ D.

z−1
z  = g(z) ⇔ z  =
z+1

⇔ z  (z + 1) = z − 1

⇔ zz + z = z − 1

⇔ z  z − z = −1 − z 

⇔ z(z  − 1) = −(1 + z  )

−(1 + z  ) z + 1 1
⇔ z= 
= − 
=− .
(1) z −1 z −1 g(z  )

On a en particulier utilisé en (1) que z  = 1 car z  ∈ D.


Posons h l’application définie sur C\{1} par

z+1
h(z) = − .
z−1

Tout d’abord, notons que D ⊂ C\{1}.


Montrons que z ∈ D ⇒ h(z) ∈ O + . Soit z ∈ D.

z+1
h(z) = −
z−1

(z + 1)(z − 1)
= −
(z − 1)(z − 1)

zz − z + z − 1
= −
(z − 1)(z − 1)

|z|2 − 1 − (z − z)
= −
|z − 1|2

|z|2 − 1 − 2i Im(z)
= −
|z − 1|2

1 − |z|2 + 2i Im(z)
= ,
|z − 1|2
122 CHAPITRE 10 : ÉPREUVE 1, 2017

ce qui nous montre que

1 − |z|2
Re(h(z)) = >0
|z − 1|2
car en effet
1 − |z|2
z ∈ D ⇔ |z| < 1 ⇔ |z|2 < 1 ⇔ > 0.
|z − 1|2

Nous disposons donc d’une fonction h telle que h(D) ⊂ O + et qui,


par les équivalences que nous avons écrites au début de notre réponse
à cette question, vérifie :

∀z ∈ O + , g(z) = z  ⇔ z = h(z  ),

ce qui suffit à montrer que g est bijective de O + sur D, de réciproque


1
h=− .
g

3. On définit sur Mn (R) l’application N en posant, pour M dans Mn (R),

N (M ) = Tr(t M M )

(a) La symétrie est immédiate du fait que pour deux matrices A et B


dont le produit est défini, on a t (AB) = t B t A et du fait que la
transposition est une involution, c’est-à-dire t (t A) = A :
t t
( M M ) = t M t (t M ) = t M M.
tM M est symétrique : le théorème spectral donne alors l’existence
d’une matrice P orthogonale (c’est-à-dire telle que P −1 = t P ) et
d’une matrice diagonale D telles que
t
M M = P D t P,

ce qui signifie en particulier que t M M est diagonalisable.


Pour X ∈ Rn , la norme euclidienne de X est donnée par

||X|| = t XX.

Soit X ∈ Rn un vecteur propre de t M M associé à la valeur propre


λ. On a donc t M M X = λX et ||X|| =
 0 (par définition, un vecteur
propre est non nul).
AGRÉGATION INTERNE 123

Par ailleurs
||M X||2 = t
(M X)M X

t
= X tM M X

t
= XλX

= λt XX

= λ||X||2
et donc, puisque ||X|| =
 0 (car X = 0) :

||M X||2
λ= ,
||X||2

ce qui prouve que λ est positive ou nulle.


t M M est donc une matrice symétrique positive.
t M M est inversible ssi ses valeurs propres sont toutes non nulles,

c’est-à-dire ssi elles sont toutes strictement positives (car on sait par
ce qui précède qu’elles sont positives ou nulles), ce qui revient bien
à dire que t M M est définie positive.
De plus, M est inversible ssi son déterminant est non nul.
Comme
det(t M M ) = det(t M )det(M )

= det(M )det(M )

= (det(M ))2 ,
on a
det(t M M ) = 0 ⇔ det(M ) = 0.
tM M est donc bien définie positive ssi M inversible.

(b) Il s’agit bien ici de montrer qu’on dispose d’une norme euclidienne
et non pas simplement d’une norme, définie par

||M ||2 = Tr (t M M ).

On doit donc montrer que cette norme présumée est associée à un


produit scalaire. Remarquons tout de même que, puisque les valeurs
propres de t M M sont toutes positives ou nulles, sa trace Tr(t M M ),
124 CHAPITRE 10 : ÉPREUVE 1, 2017

égale à la somme des valeurs propres de t M M , est également positive


et || · ||2 est bien définie.
L’application ϕ définie par :

Mn (R) → R
ϕ : (A, B) → Tr(t AB)

est bilinéaire, par linéarité de la trace, de la transposition et par


bilinéarité de l’application qui à deux matrices associe leur produit.
ϕ est de plus symétrique car pour toutes matrices A et B de Mn (R),

Tr(AB) = Tr(BA),

Tr(t A) = Tr(A),
t
(AB) = tB tA
et donc en particulier
    
Tr t AB = Tr t t BA
 
= Tr t BA .

ϕ est positive d’après les résultats de la question précédente.


Enfin si N (M ) = 0, par positivité des valeurs propres de t M M , cela
signifierait que t M M serait une matrice diagonalisable dont la seule
valeur propre est 0 (on sait que les valeurs propres de t M M sont po-
sitives. Si de plus leur somme est nulle alors elles sont toutes nulles).
Or la seule matrice diagonalisable n’ayant qu’une seule valeur propre
λ est la matrice scalaire λIn , ce qui impliquerait t M M = 0 et en par-
ticulier les éléments diagonaux de cette matrice seraient tous nuls.
Or ces éléments diagonaux sont précisément les normes au carré des
vecteurs colonnes de la matrice M . Ces vecteurs seraient alors tous
nuls et la matrice M également. Ceci prouve que l’application ϕ est
bien définie positive et que c’est donc un produit scalaire dont la
norme euclidienne associée est || · ||2 définie ci-dessus.

4. Il y avait là une erreur manifeste dans l’énoncé initial. Il fallait lire au


choix :
Expliciter un produit hermitien sur Mn (C) tel que la norme associée,
notée N  , vérifie :

∀M ∈ Mn (C), N  (M ) = Tr(M ∗ M ),
AGRÉGATION INTERNE 125

ou bien plutôt, par analogie avec les notations de la question 3. :


Expliciter un produit hermitien sur Mn (C) tel que le carré de la norme
associée, noté N  , vérifie :

∀M ∈ Mn (C), N  (M ) = Tr(M ∗ M ).

Le produit scalaire hermitien associé est l’application ψ définie par :

Mn (C) → C
ψ : (A, B) → Tr(A∗ B)

où A∗ = t A est la matrice conjuguée de la transposée de A.


On vérifie sans peine et nous jugeons pour une fois qu’il n’est pas in-
dispensable, arrivé là, de détailler des calculs identiques en tout point à
d’autres développés plus haut, qu’on définit bien ainsi une forme sesqui-
linéaire à gauche (c’est-à-dire linéaire à droite et antilinéaire à gauche),
symétrique hermitienne (ce qui, à partir de la linéarité à droite, entraîne
l’antilinéarité à gauche), définie positive :
∀ A, B, C ∈ Mn (C), ∀ α ∈ C :

ψ(A, αB + C) = αψ(A, B) + ψ(A, C)

ψ(B, A) = ψ(A, B)

ψ(A, A)  0

ψ(A, A) = 0 ⇔ A = 0.
126 INTERMÈDE

(a2 + b2 )(α2 + β 2 ) = (aα − bβ)2 + (aβ + bα)2


= (aα + bβ)2 + (aβ − bα)2

(a2 + b2 + c2 + d2 )(α2 + β 2 + γ 2 + δ 2 )
= (aα − bβ − cγ − dδ)2 + (aβ + bα + cδ − dγ)2
+ (aγ − bδ + cα + dβ)2 + (aδ + bγ − cβ + dα)2

= (aα + bβ + cγ + dδ)2 + (aβ − bα + cδ − dγ)2


+ (aγ − bδ − cα + dβ)2 + (aδ + bγ − cβ − dα)2

(a21 + a22 + · · · + a28 )(α12 + α22 + · · · + α82 )

= (a1 α1 + a2 α2 + a3 α3 + a4 α4 + a5 α5 + a6 α6 + a7 α7 + a8 α8 )2

+ (a1 α2 − a2 α1 + a3 α4 − a4 α3 + a5 α6 − a6 α5 + a7 α8 − a8 α7 )2

+ (a1 α3 − a2 α4 − a3 α1 + a4 α2 + a5 α7 − a6 α8 − a7 α5 + a8 α6 )2

+ (a1 α4 + a2 α3 − a3 α2 − a4 α1 − a5 α8 − a6 α7 + a7 α6 + a8 α5 )2

+ (a1 α5 − a2 α6 − a3 α7 + a4 α8 − a5 α1 + a6 α2 + a7 α3 − a8 α4 )2

+ (a1 α6 + a2 α5 + a3 α8 + a4 α7 − a5 α2 − a6 α1 − a7 α4 − a8 α3 )2

+ (a1 α7 − a2 α8 + a3 α5 − a4 α6 − a5 α3 + a6 α4 − a7 α1 + a8 α2 )2

+ (a1 α8 + a2 α7 − a3 α6 − a4 α5 + a5 α4 + a6 α3 − a7 α2 − a8 α1 )2

Dans un anneau commutatif, les ensembles des sommes de n carrés sont


stables par produit ssi n ∈ {1, 2, 4, 8} (Hurwitz, 1898). La première formule
est l’identité de Diophante, un cas particulier de l’identité de Brahmagupta
qui correspond au produit des carrés des modules de deux nombres complexes.
La seconde formule (dans sa première version) est similaire mais dans le corps
des quaternions H (Hamilton, 1843). La seconde version (une variante de
l’identité des quatre carrés d’Euler) est plus équilibrée dans sa distribution
des signes + et −. La dernière formule est une variante 2 de l’identité de Degen
(1818) et correspond aux octonions (Cayley, 1845) mais avec une distribution
plus équilibrée des signes.
2. Dérisoire et anachronique exploit arithmétique réalisé par l’auteur à l’aide de raison-
nements de symétrie, d’homogénéité et de simples permutations.
Agrégation externe : mathématiques générales

Troisième partie

Agrégation externe :
mathématiques générales
Mathématiques Générales, 2021

Chapitre 11

Mathématiques Générales, 2021

Exercice 1

Thèmes
algèbre linéaire (famille libre, sous-espace vectoriel,
endomorphisme, polynôme caractéristique, polynôme minimal, diago-
nalisabilité)
polynômes (dans Q[X])

Résultat majeur
CNS de diagonalisabilité

Remarques du jury
1. Utiliser le théorème de la famille échelonnée.
3. Justifier la linéarité de ∆.
130 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

Énoncé
Pour tout entier naturel k, on introduit le polynôme à coefficients ration-
nels 
1 si k = 0
Hk (X) = X(X − 1) . . . (X − k + 1)
 sinon.
k!
On introduit l’opération de dérivation discrète :

∆: Q[X] → Q[X]
P (X) → P (X + 1) − P (X)

1. Justifier que les polynômes H0 , H1 , H2 et H3 forment une famille libre


dans Q[X].
2. Expliciter le sous-espace vectoriel F de Q[X] engendré par les polynômes
H0 , H1 , H2 et H3 .
3. Justifier que ∆ induit un endomorphisme sur F .
On note ∆F l’endomorphisme induit par ∆ sur F .
4. Déterminer le polynôme caractéristique de ∆F .
5. Déterminer le polynôme minimal de ∆F .
6. L’endomorphisme ∆F est-il diagonalisable ?

Corrigé
Comme en 2020, voici un exercice basique d’algèbre linéaire, quoique d’un
niveau très légèrement plus élevé. Il est difficile d’imaginer un agrégatif admis-
sible qui n’aurait pas traité presque parfaitement cet exercice.
1. Les polynômes H0 , H1 , H2 et H3 sont respectivement de degré 0, 1, 2
et 3. Ils forment donc une famille échelonnée en degré dans Q[X] (les
coefficients de ces quatre polynômes sont évidemment rationnels). Cette
famille est donc libre.

H0 (X) = 1 H1 (X) = X

X(X − 1) X(X − 1)(X − 2)


H2 (X) = H3 (X) = .
2 6
AGRÉGATION EXTERNE 131

2. Les quatre polynômes H0 , H1 , H2 et H3 forment une base du sous-espace


vectoriel F de Q[X] constitué par les polynômes à coefficients rationnels
de degré inférieur ou égal à 3, communément noté Q3 [X] (ces quatre
polynômes sont en effet tous dans Q3 [X] et Q3 [X] est un Q-e.v. de di-
mension 4. On peut rappeler qu’une famille libre constituée de quatre
vecteurs dans un espace vectoriel de dimension 4 est automatiquement
une base de cet espace).

3. Il est clair que


Q(X) ∈ F ⇒ Q(X + 1) ∈ F

et donc
Q(X) ∈ F ⇒ Q(X + 1) − Q(X) ∈ F .

On s’en convainc si besoin en écrivant

Q(X) = aX 3 + bX 2 + cX + d

pour quatre coefficients a, b, c, d ∈ Q. On a alors

Q(X + 1) = a(X + 1)3 + b(X + 1)2 + c(X + 1) + d

= aX 3 + (3a + b)X 2 + (3a + 2b + c)X + a + b + c + d

et finalement

Q(X + 1) − Q(X) = 3aX 2 + (3a + 2b)X + a + b + c.

La linéarité de ∆ sur Q[X] est immédiate (elle résulte de la linéarité


évidente de Q(X) → Q(X + 1), de Q(X) → (Q(X), Q(X + 1)) et de
(Q, R) → Q − R. Pour cette dernière application, on parle bien de linéa-
rité et pas de bilinéarité ! Précisons qu’il s’agit de linéarité d’applications
définies sur des Q-e.v.) et la détailler consiste à enfiler des perles. Dans
le doute, ou si on ne sait pas décomposer clairement les opérations élé-
mentaires listées ci-dessus, on peut préférer écrire la très scolaire litanie
suivante, dans laquelle on prendra bien garde que les coefficients des po-
lynômes et les scalaires sont dans le corps Q (et non pas R ou C comme
souvent) :
132 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

∀Q, R ∈ Q[X], ∀q, r ∈ Q,

∆(qQ + rR) = (qQ + rR)(X + 1) − (qQ + rR)(X)

= qQ(X + 1) + rR(X + 1) − qQ(X) − rR(X)

= q(Q(X + 1) − Q(X)) + r(R(X + 1) − R(X))

= q∆(Q) + r∆(R).

Remarque : dans le calcul qui précède, on peut omettre le coefficient r


et calculer
∆(qQ + R) = · · · = q∆(Q) + ∆(R).

On peut aussi préférer décomposer en deux étapes distinctes, l’une pour

∆(Q + R) = · · · = ∆(Q) + ∆(R),

l’autre pour
∆(qQ) = · · · = q∆(Q).

On peut indiquer que relativement à la base canonique (X 3 , X 2 , X, 1) de


F , la matrice associée à ∆F est
 
0 0 0 0
3 0 0 0
 
3 2 0 0
1 1 1 0

mais il est plus pertinent de remarquer que relativement à la base (H0 , H1 , H2 , H3 )


de F , la matrice associée à ∆F est
 
0 1 0 0
0 0 1 0
M =
0
.
0 0 1
0 0 0 0

car en effet

∆(H0 ) = H0 (X + 1) − H0 (X) = 1 − 1 = 0

∆(H1 ) = H1 (X + 1) − H1 (X) = X + 1 − X = 1 = H0 (X)


AGRÉGATION EXTERNE 133

∆(H2 ) = H2 (X + 1) − H2 (X)

(X + 1)X X(X − 1)
= − = X = H1 (X)
2 2

∆(H3 ) = H3 (X + 1) − H3 (X)

(X + 1)X(X − 1) X(X − 1)(X − 2)


= −
6 6
X(X − 1)
= = H2 (X).
2
4. En se plaçant dans la base (H0 , H1 , H2 , H3 ), on calcule le déterminant
d’une matrice triangulaire, égal au produit de ses éléments diagonaux,
soit  
X −1 0 0
 0 X −1 0 
det(XI4 − M ) = det  0
 = X 4.
0 X −1
0 0 0 X
On peut aussi remarquer que ∆F est un endomorphisme nilpotent :
comme tous les endomorphismes nilpotents d’un e.v. de dimension 4, son
polynôme caractéristique est X 4 .

5. Le polynôme minimal de ∆F est en particulier unitaire. Il divise le po-


lynôme caractéristique de ∆F et annule ∆F . ∆3F n’est pas l’endomor-
phisme nul de F (en particulier ∆3 (H3 ) = H0 ). Le polynôme minimal
de ∆F ne divise donc pas X 3 mais divise X 4 , c’est donc X 4 .

6. ∆F n’est pas diagonalisable car son polynôme minimal n’est pas scindé
à racine simple (refrain bien connu). Bien que ce soit plus long à expri-
mer, on peut préférer rappeler que le polynôme caractéristique de ∆F
n’a qu’une seule racine et donc ∆F n’a qu’une seule valeur propre (préci-
sément cette racine). Les seuls endomorphismes diagonalisables n’ayant
qu’une seule valeur propre sont les homothéties, ce que ∆F n’est évidem-
ment pas puisque par exemple ∆F (H1 ) = H0 ∈ / Vect(H1 ) (on peut aussi
arguer du fait que les matrices représentatives de ∆F vues ci-dessus ne
sont pas des multiples de la matrice identité).
134 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

Exercice 2

Thèmes
algèbre linéaire (calcul matriciel, déterminant)
polynômes (racines, factorisation)
théorie des corps (corps fini, corps infini, extension de corps)

Résultats majeurs
déterminant de Vandermonde
le groupe multiplicatif k ∗ du corps k de cardinal q est cyclique
d’ordre q − 1

Remarques du jury
2. Trouver la bonne forme pour T puis se
soucier de son déterminant.
4. Se soucier de l’espace dans lequel vivent les objets manipulés. On
peut inverser la matrice dans k et son inverse est également dans k.
Ne pas oublier le cas n = 0.
5. Prendre en compte la finitude de K.

Énoncé
Soit k un corps.
Soit n un entier naturel. Pour n + 1 éléments de k, x0 , . . . , xn , on note
V (x0 , . . . , xn ) la matrice dans Mn+1 (k) définie par
 
1 x0 x20 . . . xn0
1 x1 x 2 . . . x n 
 1 1
 2 n
V (x0 , . . . , xn ) = 1 x2 x2 . . . x2  .
 .. .. .. .. 
. . . . 
1 xn xn . . . xnn
2
AGRÉGATION EXTERNE 135

n

1. Soit a0 , a1 , . . . , an dans k et soit le polynôme P = aj X j .
j=0
Expliciter en fonction de P et x0 , . . . , xn le vecteur :
 
a0
 a1 
 
V (x0 , . . . , xn )  .  .
 .. 
an

2. Justifier qu’il existe une matrice T dans Mn+1 (k), de déterminant 1, telle
que
 
1 x0 x20 . . . xn−1
0 0
1 x1 x21 . . . xn−1 0 
 1 
1 x2 x2 . . . xn−1 0 
 2 2 
V (x0 , . . . , xn )T =  .. ..
 .. .. .. .

 . . . . . 
 n−1
 
 2 n−1 
1 xn x n . . . xn (xn − xi )
i=0

3. En déduire, par récurrence, une expression du déterminant de V (x0 , . . . , xn )


en fonction de x0 , . . . , xn .

Soit K un corps tel que k ⊂ K.


4. Soit P un polynôme dans K[X] de degré n tel que P (k) ⊂ k. Soit
n

a0 , a1 , . . . , an dans K tels que P = aj X j . On suppose que k contient
j=0
n + 1 éléments distincts x0 , . . . , xn . Démontrer que P ∈ k[X].
 
a0
 a1 
 
Indication : On pourra utiliser V (x0 , . . . , xn )  . .
 .. 
an
5. On note E = {P ∈ K[X]|P (k) ⊂ k}.
(a) On suppose que k est un corps infini. Démontrer que

E = k[X].

(b) On suppose que k est un corps fini. On note q son cardinal. On note
I l’idéal de K[X] engendré par le polynôme X q − X. Démontrer que

E = {P + Q ; P ∈ I et Q ∈ k[X]}.
136 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

Corrigé
1. Il est immédiat que
     
a0 a0 + a1 x0 + a2 x20 + · · · + an xn0 P (x0 )
 a1   a0 + a1 x1 + a2 x2 + · · · + an xn   P (x1 ) 
   1 1  
V (x0 , . . . , xn )  .  =  ..  =  ..  .
 ..   .   . 
an a0 + a1 xn + a2 x2n + · · · + an xnn P (xn )

2. La question ne semble pas inciter à exprimer une telle matrice T explici-


tement (« justifier qu’il existe » ne signifie pas « déterminer ») mais pour-
tant c’est bien ce que nous allons faire. Il faut remarquer que la question
précédente permet de construire un vecteur colonne dont tous les termes
s’expriment comme les images de x0 , . . . , xn par un même polynôme P .
Or, les colonnes d’une matrice de Vandermonde sont précisément bâ-
ties sur ce modèle (avec les monômes 1, X, X 2 , . . . , X n constituant la base
canonique de kn [X]) et c’est aussi le cas de la matrice que l’on souhaite
obtenir ici. Comme les n premières colonnes de cette matrice sont celles
de la matrice V (x0 , . . . , xn ), il suffit de poser
 
1 0 . . . . . . 0 a0

0 1 . . . .. 
 . a1  
 .. . . .. .. .. .. 
. . . . . . 
T =  .. .. .. .. 

. . . 0 . 
 
 .. .. 
. . 1 a  n−1
0 ... ... ... 0 an
et de choisir les coefficients a0 , . . . , an de manière à ce que
n
 n−1

ai X i = (X − xi ) = P (X).
i=0 i=0

Ce polynôme est unitaire (donc an = 1) et de degré n, en tant que produit


de n polynômes unitaires de degré 1. On a de plus
P (x0 ) = · · · = P (xn−1 ) = 0
et
n−1

P (xn ) = (xn − xi ),
i=0
AGRÉGATION EXTERNE 137

ce qui correspond bien à la dernière colonne de la matrice attendue dans


l’énoncé, c’est-à-dire
   0

P (x0 )
 ..   .. 
 .   . 
    0

.
P (xn−1 ) =  
  n−1 
   
(xn − xi )
P (xn )
i=0

La matrice T a donc plus précisément la forme


 
1 0 . . . . . . 0 a0

0 1 . . . .. 

 . a1 
 .. . . . . .. .. 
.
 . . . . 

T = . 
 .. 0 
 
 .. .. 
. . 1 a n−1 
0 ... ... 0 1

d’une matrice triangulaire supérieure dont la diagonale n’est compo-


sée que de 1 : son déterminant, égal au produit de ses éléments dia-
gonaux, vaut donc 1 et cette matrice répond ainsi à toutes les exigences
de l’énoncé.
Il n’est absolument pas nécessaire de déterminer explicitement les coef-
ficients a0 , . . . , an−1 en fonction de x0 , . . . , xn mais on peut remarquer
que le polynôme P étant le produit des (X − xi )0in−1 , les a0 , . . . , an
correspondent de ce fait aux polynômes symétriques élémentaires en
x0 , . . . , xn−1 , au signe près.
On a par exemple
n−1

n
a0 = (−1) xi
i=0
et
n−1

an−1 = − xi .
i=0

Il est cependant inutile d’aller aussi loin.

3. L’énoncé nous invite explicitement à rédiger une récurrence : ne gâchons


pas cette occasion (bien qu’une simple itération finie rédigée rapidement
138 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

aurait suffi, il convient de suivre à la lettre les consignes de l’énoncé).


Sans être indispensable, il est préférable d’avoir une idée de ce qu’est
le déterminant d’une matrice de Vandermonde. Si on ne s’en souvient
pas, le résultat de la question précédente doit nous remettre sur le droit
chemin une fois observé le produit situé en bas à droite de la matrice
donnée dans l’énoncé.
 
Initialisation : pour n = 0 et x0 ∈ k, on a V (x0 ) = 1 , une matrice de
déterminant 1.
Précisons, bien que cela soit stricto sensu inutile, que pour n = 1 on a

 
1 x0
V (x0 , x1 ) = ,
1 x1

une matrice de déterminant x1 − x0 .


Pour n = 2, on a

 
1 x0 x20
V (x0 , x1 , x2 ) = 1 x1 x21 
1 x2 x22

et
det(V (x0 , x1 , x2 )) = (x2 − x1 )(x2 − x0 )(x1 − x0 ),

résultat que l’on peut calculer à la main à partir de la matrice V (x0 , x1 , x2 )


en combinant les lignes de cette matrice de manière à la rendre trian-
gulaire, plutôt que d’appliquer bêtement la méthode de Sarrus qui ne
donne qu’une forme développée et peu exploitable du déterminant. Cette
triple initialisation, rédigée au brouillon, devrait permettre de reconnaître
le résultat que l’on veut démontrer.
Hypothèse de récurrence : soit n ∈ N∗ et x0 , . . . , xn−1 ∈ k.
Supposons que V (x0 , . . . , xn−1 ) soit de déterminant


(xj − xi ).
0i<jn−1

Hérédité : le résultat de la question précédente permet d’écrire (on se


souviendra que det(T ) = 1), en développant par rapport à la dernière
AGRÉGATION EXTERNE 139

colonne :

det(V (x0 , . . . , xn )) = det(V (x0 , . . . , xn ))det(T )


(1)

= det(V (x0 , . . . , xn )T )
(2)

n−1

= det(V (x0 , . . . , xn−1 )) (xn − xi )
(3)
i=0
  
 n−1

=  (xj − xi ) (xn − xi )
(4)
0i<jn−1 i=0


= (xj − xi ),
0i<jn

(1) car det(T ) = 1,


(2) car det(AB) = det(A)det(B) pour deux matrices carrées A et B de
même dimension,
(3) d’après le résultat de la question 2.,
(4) par hypothèse de récurrence.
Conclusion : pour tout n ∈ N et tous x0 , . . . , xn ∈ k,

det(V (x0 , . . . , xn )) = (xj − xi ).
0i<jn

4. Suivons l’indication de l’énoncé.


Les hypothèses de l’énoncé, c’est-à-dire P ∈ K[X], x0 , . . . , xn ∈ k et
P (k) ⊂ k permettent d’écrire
 
a0  
 a1  P (x 0 )
V (x0 , . . . , xn )  .  =  ...  ∈ Mn,1 (k).
   
 .. 
P (xn )
an

De plus, les x0 , . . . , xn étant distincts, P est un polynôme d’interpolation


de degré n pour les n + 1 points

(x0 , P (x0 )), . . . , (xn , P (xn )) ∈ k 2 .


140 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

L’expression de P est alors donnée par la formule de Lagrange concer-


nant les polynômes d’interpolation :
 
n
 n
 X − xj 
P (X) = P (xi ) 

.
xi − xj 
i=0 j=0
j=i

Cette formule n’utilise que les coordonnées de ces n + 1 points. Les co-
efficients du polynôme d’interpolation de Lagrange sont ainsi calculés
à partir de ces coordonnées grâce aux seules opérations élémentaires que
sont l’addition, la soustraction, la multiplication et la division. k étant
stable par ces opérations (puisque k est un corps), il vient immédiatement
que les coefficients de P sont dans k, c’est-à-dire P ∈ k[X].
5. (a) Il est clair que k[X] ⊂ E . On peut en effet remarquer que

k ⊂ K ⇒ k[X] ⊂ K[X]

et que, k étant un corps,

(x ∈ k, P ∈ k[X]) ⇒ P (x) ∈ k,

ce qui prouve que


∀P ∈ k[X], P (k) ⊂ k.
Soit P ∈ E , c’est-à-dire P ∈ K[X] tel que P (k) ⊂ k.
Si P est le polynôme nul, on a bien P ∈ k[X] ⊂ E .
Si P n’est pas le polynôme nul, quel que soit le degré n ∈ N de P ,
on peut, puisque k est un corps infini, trouver n + 1 éléments de
k, tous distincts. Le résultat de la question précédente nous indique
que P est alors nécessairement dans k[X]. On a donc E ⊂ k[X] et
finalement, par double-inclusion, E = k[X].

(b) Contrairement aux questions précédentes, celle-ci ne relève pas d’un


niveau de connaissance de licence de mathématiques : il faut pour
y répondre connaître certaines propriétés des corps finis, ce qui res-
sort en général du programme de première année d’un master de
mathématiques.
La décomposition des éléments de E sous la forme P +Q avec P ∈ I
et Q ∈ k[X] correspond peu ou prou (mais pas exactement) à une
division euclidienne (à peine dissimulée) car I est l’idéal de K[X]
engendré par X q −X. Notons au passage que X q −X est un polynôme
AGRÉGATION EXTERNE 141

important dans le cadre de l’étude d’un corps fini k de cardinal q.


On a en effet
∀x ∈ k, xq = x
ou encore
∀x ∈ k ∗ , xq−1 = 1k .
Le groupe multiplicatif des éléments non nuls d’un corps est même
plus précisément cyclique d’ordre q − 1.
Les q éléments de k sont racines du polynôme unitaire X q − X.
X q − X étant de degré q, il a donc exactement pour racines dans k
et dans K les q éléments de k, ce qui en fait un polynôme scindé à
racines simples dans k[X] comme dans K[X]. Il s’écrit sous la forme

Xq − X = (X − x).
x∈k

Soit un polynôme P1 ∈ E .
La division euclidienne de P1 par X q − X dans K[X] se traduit par

∃Q1 , R1 ∈ K[X], deg(R1 )  q − 1, P1 = (X q − X)Q1 + R1 .

Le polynôme (X q − X)Q1 est évidemment un élément de I .


Reste à démontrer que R1 est dans k[X].
Puisque P1 est dans E , on a P1 (k) ⊂ k.
Or, puisque tout x ∈ k est racine de X q − X, on a

∀x ∈ k, P1 (x) = R1 (x).

On a donc
∀x ∈ k, R1 (x) ∈ k
et le résultat de la question 4., du fait que R1 est de degré au plus
q − 1 et que k contient q éléments distincts, amène R1 ∈ k[X].
On a donc
E ⊂ {P + Q; P ∈ I et Q ∈ k[X]}.

Remarque : les polynômes P et Q de la ligne précédente corres-


pondent respectivement à (X q − X)Q1 et R1 évoqués plus tôt.

L’inclusion réciproque est immédiate : si P ∈ I , alors

∃Q1 ∈ K[X], P = (X q − X)Q1


142 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

et
∀x ∈ k, P (x) = (xq − x)Q1 (x) = 0K Q1 (x) = 0K .
Si Q ∈ k[X], il est clair que

∀x ∈ k, Q(x) ∈ k.

On a alors
∀P ∈ I , ∀Q ∈ k[X], ∀x ∈ k, (P + Q)(x) = P (x) + Q(x)

= Q(x) ∈ k

et donc
∀P ∈ I , ∀Q ∈ k[X], P + Q ∈ E ,
ce qui prouve que

{P + Q; P ∈ I et Q ∈ k[X]} ⊂ E

et donc par double-inclusion l’égalité

E = {P + Q; P ∈ I et Q ∈ k[X]}.
AGRÉGATION EXTERNE 143

Exercice 3

Thème
algèbre linéaire (polynôme caractéristique,
évaluation d’une matrice par un polynôme)

Résultat majeur
théorème de Cayley-Hamilton

Remarque du jury
1. Distinguer x0 = x1 de x0 = x1 .

Énoncé
Si A est un anneau commutatif, unitaire (c’est-à-dire possédant un élément
neutre pour la multiplication), on dénote par Mn (A) l’anneau des matrices
(n, n) à coefficients dans A et Tn (A) l’ensemble des matrices (n, n) triangulaires
inférieures à coefficients dans A. On définit

Ent(T2 (Z)) = {P ∈ Q[X]|P (T2 (Z)) ⊂ M2 (Z)}.

Pour deux entiers x0 , x1 ∈ Z, on pose



 P (x1 ) − P (x0 ) , si x1 = x0 ;
φ(P )(x0 , x1 ) = x1 − x0
 
P (x0 ), sinon.

1. Soit x0 , x1 ∈ Z. Soit P ∈ Q[X].


Exprimer le reste de la division euclidienne de P par (X − x0 )(X − x1 )
en fonction de x0 , φ(P )(x0 , x1 ) et P (x0 ).
144 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

2. En déduire que

Ent(T2 (Z)) = {P ∈ Q[X]|P (Z) ⊂ Z et φ(P )(Z2 ) ⊂ Z}.

Indication : Étant donné P ∈ Q[X], on pourra exprimer en fonction de


y, φ(P )(x0 , x1 ), P (x0 ) et P (x1 ) la matrice P (T ) pour toute matrice
 
x0 0
T = , x0 , x1 , y dans Z.
y x1

Corrigé
1. La division euclidienne de P ∈ Q[X] par (X − x0 )(X − x1 ) (polynôme
de degré 2) consiste en l’égalité :

P = (X − x0 )(X − x1 )Q + R

pour un certain quotient Q ∈ Q[X] et un reste R ∈ Q[X] de degré au


plus 1, soit du type R = aX + b pour deux nombres a, b ∈ Q.
Premier cas : si x0 = x1 , on obtient aisément deux équations linéaires en
a et b en évaluant cette égalité en x0 et en x1 (de manière générale, il est
toujours utile d’évaluer des égalités là où certains éléments s’annulent).
On obtient ainsi :

 P (x0 ) = R(x0 ) = ax0 + b

P (x1 ) = R(x1 ) = ax1 + b


 P (x1 ) − P (x0 )
 a = = φ(P )(x0 , x1 )
x1 − x0



 b = P (x
0 ) − ax0 = P (x0 ) − φ(P )(x0 , x1 )x0

Deuxième cas : si par contre x0 = x1 , l’évaluation en x0 n’offre qu’une


seule équation. Il faut alors avoir le réflexe d’évaluer la dérivée de l’égalité
initiale (rappelons que si x0 est une racine double d’un polynôme, elle
est également racine de la dérivée de ce polynôme). De l’égalité

P = (X − x0 )2 Q + R

on obtient ainsi

P  = 2(X − x0 )Q + (X − x0 )2 Q + R
AGRÉGATION EXTERNE 145

et en évaluant en x0 :

 P (x0 ) = R(x0 ) = ax0 + b

P  (x0 ) = R (x0 ) = a


 a = P  (x0 ) = φ(P )(x0 , x0 ) = φ(P )(x0 , x1 )



⇔ b = P (x0 ) − ax0 = P (x0 ) − φ(P )(x0 , x0 )x0





= P (x0 ) − φ(P )(x0 , x1 )x0

On pouvait aussi (mais seulement dans ce cas où x0 = x1 ) appliquer la


formule de Taylor-Lagrange à l’ordre 2 au polynôme P , en x0 , ce qui
fait à peu près apparaître la même égalité que la division euclidienne.
Par comparaison des deux et par unicité de la division euclidienne dans
Q[X], on obtenait le même résultat. Dans les deux cas (que x0 et x1
soient distincts ou pas), on obtient donc la même expression :

R = φ(P )(x0 , x1 )X + P (x0 ) − φ(P )(x0 , x1 )x0 .

2. Suivons l’indication de l’énoncé. On peut préciser que l’application qui,


pour une matrice fixée T ∈ M2 (Z), associe à un polynôme P de Q[X]
l’évaluation P (T ) de ce polynôme en T est un morphisme d’algèbres
défini sur Q[X] et à valeurs dans M2 (Q) (on prendra bien en compte
qu’ici P désigne la variable de ce morphisme et non pas T qui elle est
une matrice fixée une bonne fois pour toute). De ce fait, l’égalité

P = (X − x0 )(X − x1 )Q + R

évoquée dans la question précédente (et pour laquelle nous avons identifié
l’expression de R) nous donne, pour la matrice triangulaire T de l’énoncé,

P (T ) = (T − x0 I2 )(T − x0 I2 )Q(T ) + R(T ).

Or, (X − x0 )(X − x1 ) est le polynôme caractéristique χT de la matrice T .


Le théorème de Cayley-Hamilton nous dit que χT (T ) = 0, c’est-à-dire

(T − x0 I2 )(T − x0 I2 ) = 0.

On a donc
 
ax0 + b 0
P (T ) = R(T ) = aT + bI2 = .
ay ax1 + b
146 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

Il convient de ne pas oublier de faire apparaître la matrice identité I2


quand on évalue un polynôme sur une matrice, au risque, sinon, d’addi-
tionner des matrices et des scalaires, ce qui n’a pas de sens.
Procédons par double-inclusion et considérons P ∈ Q[X].
Première inclusion : si φ(P )(Z2 ) ⊂ Z alors, du fait que x0 , x1 ∈ Z,

a = φ(P )(x0 , x1 ) ∈ Z

et donc
∀y ∈ Z, ay ∈ Z.
Si de plus P (Z) ⊂ Z alors P (x0 ) = ax0 + b ∈ Z et donc b ∈ Z car

a, x0 , P (x0 ) ∈ Z ⇒ b = P (x0 ) − ax0 ∈ Z.


 
ax0 + b 0
Il est alors clair que la matrice P (T ) = est bien à
ay ax1 + b
coefficients dans Z, c’est-à-dire P (T ) ∈ M2 (Z), ce qui prouve la première
inclusion :

{P ∈ Q[X]|P (Z) ⊂ Z et φ(P )(Z2 ) ⊂ Z} ⊂ Ent(T2 (Z)).

Deuxième inclusion : réciproquement,


  si P (T ) est à coefficients dans Z
x0 0
pour toute matrice T = avec x0 , x1 , y ∈ Z alors, toujours
y x1
avec les notations de la question précédente (c’est-à-dire avec les a et b
exprimés relativement à x0 , x1 et P ),
 
ax0 + b 0
∈ M2 (Z)
ay ax1 + b
d’où
∀x0 ∈ Z, P (x0 ) = ax0 + b ∈ Z,
ce qui prouve que P (Z) ⊂ Z. On a également ∀y ∈ Z, ay ∈ Z et en
particulier, pour y = 1 :

∀(x0 , x1 ) ∈ Z2 , φ(P )(x0 , x1 ) = a ∈ Z,

ce qui prouve que φ(P (Z2 )) ⊂ Z. On a donc bien l’inclusion réciproque :

Ent(T2 (Z)) = {P ∈ Q[X]|P (T2 (Z)) ⊂ M2 (Z)}

⊂ {P ∈ Q[X]|P (Z) ⊂ Z et φ(P )(Z2 ) ⊂ Z}


et finalement l’égalité des deux ensembles.
AGRÉGATION EXTERNE 147

Exercice 4

Thèmes
polynômes (interpolation polynomiale)
anneaux, corps finis
dénombrement

Résultat majeur
polynômes d’interpolation de Lagrange

Remarques du jury
1. Préciser que l’ensemble de définition est un
corps permet d’utiliser les polynômes interpolateurs de Lagrange.
2. Problème classique de dénombrement : compter le nombre de fonc-
tions (et non pas de fonctions polynomiales) entre deux ensembles finis.
3. Trouver une condition nécessaire pour qu’une fonction soit polyno-
miale. Écrire les images d’une fonction ne vérifiant pas cette condition.

Énoncé
Soit p un nombre premier.
1. Démontrer que toute fonction de Z/pZ dans lui-même est polynomiale.
2. Déterminer le nombre de fonctions polynomiales de Z/pZ dans lui-même.
3. Donner un exemple de fonction de Z/4Z dans lui-même qui n’est pas
polynomiale.

Corrigé
Il est conseillé de préciser que pour ne pas alourdir les notations, on écrira
0, 1, . . . , p − 1 les éléments de Z/pZ, c’est-à-dire qu’on confondra une classe
148 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

d’équivalence modulo p avec son représentant dans N, compris entre 0 et p − 1.

1. Il suffit de penser, par exemple, à une interpolation à la Lagrange.


Soit f une fonction de Z/pZ dans lui-même et P le polynôme d’inter-
polation de Lagrange de f coïncidant avec f sur Z/pZ, c’est-à-dire le
polynôme P (X) ∈ Z/pZ[X] défini par les p conditions :
∀x ∈ Z/pZ, P (x) = f (x).
Un tel polynôme existe dans Z/pZ[X] car, du fait que p est un nombre
premier, Z/pZ est un corps commutatif.
On peut même se permettre d’écrire précisément :
 
p−1
 p−1
 X − j
P (X) = f (i) 


i−j 
i=0 j=0
j=i

ou pourquoi pas, ce qui permet d’éviter la confusion évoquée en préam-


bule, écrire plutôt
 
   X − j
P (X) = f (i) 

.
i−j 
i∈Z/pZ j∈Z/pZ
j=i

Dans les deux cas, les divisions par i − j ∈ Z/pZ avec j = i, sont bien
définies puisque Z/pZ est un corps commutatif (dans un anneau quel-
conque, les expressions ci-dessus n’auraient pas nécessairement de sens)
et on a bien P (X) ∈ Z/pZ[X].
Il convient en particulier de bien comprendre que l’on a l’égalité suivante
p−1

 x−j 1 si x = i
= δxi =
j=0
i−j 0 sinon.
j=i

Il est alors clair que P et f coïncident sur Z/pZ : f est donc la fonction
polynomiale associée à P sur Z/pZ.
On peut préférer (bien que cela nous semble tout de même compli-
quer beaucoup les choses, nous vous laissons en juger par vous-mêmes)
construire une suite finie de p polynômes définis pour tout x ∈ Z/pZ par
P0 (x) = f (0) et pour tout 0  k  p − 2,
 k 
 x−i
Pk+1 (x) = Pk (x) + (f (k + 1) − Pk (k + 1)) .
k+1−i
i=0
AGRÉGATION EXTERNE 149

On voit facilement par itération finie que pour tout 0  k  p − 1, le


polynôme Pk coïncide avec f pour 0  x  k. Le p-ième polynôme ainsi
obtenu, Pp−1 coïncide avec la fonction f sur Z/pZ tout entier.
Les deux polynômes P et Pp−1 ainsi exprimés sont tous deux de degré
p − 1 : leur différence est donc un polynôme de degré au plus p − 1 et
ayant p racines distinctes (à savoir les p éléments de Z/pZ) : c’est donc le
polynôme nul (dans un corps commutatif quelconque, aucun polynôme
non nul ne peut avoir plus de racines que son degré), ce qui prouve que les
deux expressions obtenues, fort différentes en apparence (n’est-ce pas ? P
est décomposé dans une base de (Z/pZ)p−1 [X] de p polynômes de degré
p−1 alors que Pp−1 est décomposé dans la base de Newton associée aux
abscisses 0, 1, . . . , p − 1, base de (Z/pZ)p−1 [X] composée de polynômes
échelonnés en degré) sont en fait égales.

2. D’après le résultat de la question précédente, le nombre de fonctions


polynomiales de Z/pZ dans lui-même est égal au nombre de fonctions de
Z/pZ dans lui-même, soit pp .
De manière générale, le nombre de fonctions d’un ensemble fini E de car-
dinal n ∈ N∗ dans un ensemble fini F de cardinal p ∈ N∗ est pn (chacun
des n éléments de E ayant une image choisie parmi les p éléments de F ).

3. On notera 0, 1, 2 et 3 les éléments de Z/4Z.


La question peut sembler déroutante à première vue mais devient simple
quand on pense en termes de division euclidienne et de parité (si besoin,
on peut se placer dans Z, considérer une fonction définie sur Z puis
étudier la fonction qu’elle induit sur Z/4Z).
Soit une fonction f définie sur Z/4Z. Quand f est polynomiale, en pro-
cédant à la division euclidienne de f par x → x (ce qui est possible car
cette deuxième fonction polynomiale est unitaire), on peut écrire

f (x) = xq(x) + f (0)

où q est une fonction polynomiale définie sur Z/4Z.


Ce qui implique alors

f (2) = 2q(2) + f (0).

On voit en particulier que f (0) et f (2) sont dans ce cas de même parité.
Il suffit de choisir f telle que f (0) et f (2) soient de parités différentes, en
posant par exemple f (0) = 0 et f (2) = 1, pour obtenir une contradiction.
150 CHAPITRE 11 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2021

Dans Z/4Z, aucune fonction f telle que f (0) ∈ {0, 2} et f (2) ∈ {1, 3}
(ou vice versa f (0) ∈ {1, 3} et f (2) ∈ {0, 2}) n’est polynomiale.

On peut formuler tout cela ainsi : il est clair que pour tout polynôme
n
P = ak X k à coefficients dans Z, P (0) et P (2) ont même parité (et
k=0
plus généralement, l’image d’un entier pair par P a la même parité que
P (0)). Une fonction f définie sur Z ne vérifiant pas cette égalité de pa-
rité n’est donc pas une fonction polynomiale sur Z et la fonction qu’elle
induit sur Z/4Z n’est pas polynomiale non plus.

Exemple : la fonction f définie sur Z/4Z = {0, 1, 2, 3} par



f (0) = f (1) = f (3) = 0
f (2) = 1

n’est pas polynomiale.


Pour construire une telle fonction, on a quatre choix possibles pour cha-
cune des trois images f (0), f (1), f (3) et deux choix pour f (2) (les deux
classes d’équivalence dont les représentants n’ont pas la même parité que
ceux de f (0)), ce qui fait déjà 43 × 2 = 128 choix sur 44 = 256 fonctions
en tout. Les 128 autres fonctions sont-elles toutes polynomiales ? Il est
inutile ici de répondre à cette question.
Mathématiques Générales, 2020

Chapitre 12

Mathématiques Générales, 2020

Exercice 1

Thème
algèbre linéaire (matrice, noyau, image, déterminant,
rang, valeur propre, vecteur propre, diagonalisabilité)

Résultat majeur
théorème du rang

Énoncé
On considère la matrice
 
1/2 1/2 0 0
1/4 1/4 1/2 0 
A= 1/8
 ∈ M4 (R).
1/8 1/4 1/2
1/8 1/8 1/4 1/2

1. Déterminer la dimension du noyau de la matrice A.


2. Quel est le déterminant de A ? Préciser le rang de A.
152 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

3. Déterminer les valeurs propres de la matrice A.


   
1 2
1 0
Indication : on pourra calculer A    
1 et A −1.
1 −1
La matrice A est-elle diagonalisable ?

Corrigé
Voilà un exercice bien basique (et peu ambitieux) de réduction de matrice
d’un niveau L2 : aucune notion abordée ultérieurement n’est nécessaire pour le
résoudre. Le but de cet exercice est clairement de permettre au jury d’éliminer
les candidats qui ne sauraient le traiter presque parfaitement.
1. Vu la forme de la matrice A, on pourrait facilement déterminer son rang
(les deux dernières lignes de A sont identiques et ses 3 premières lignes sont
échelonnées : A est de rang 3) et en déduire la dimension de son noyau par
le très usuel théorème du rang. Cependant, comme on nous demande de
donner le rang dans la question suivante, il semble convenir de procéder
différemment, à savoir déterminer explicitement le noyau de la matrice A
sous la forme d’un sous-espace vectoriel engendré par une famille libre de
vecteurs : cette famille constituera alors une base du noyau et son cardinal
(le nombre de vecteurs qu’elle contient) donnera la dimension du noyau.
On résout le système suivant :

 1 1

 x+ y = 0
    
 2 2
x 0 



y  0 1 1 1
   
A  =   ⇔ x+ y+ z = 0
z 0 
 4 4 2


t 0 


 1x +
 1 1 1
y+ z+ t = 0
8 8 4 2


 y = −x



⇔ z = 0





t = 0.
AGRÉGATION EXTERNE 153

On obtient ainsi
         

 x x 0 
 
 x 

  y  0 −x 
y
  ∈ R ; A  =   =   ; x ∈ R
4
Ker(A) = z   z  0  0

  
  
 

t t 0 0
     

 1 
 1
    −1
−1
= x   ; x ∈ R = Vect   
 0 .
  0
 

 
0 0

Ker(A) est engendré par un unique vecteur non nul de R4 : une base de
Ker(A) est donnée par cet unique vecteur et donc dim(Ker(A)) = 1.

2. Il faut absolument éviter de chercher le déterminant par un fastidieux calcul


(développer par rapport à une ligne ou par rapport à une colonne pour se
ramener à des déterminants de matrices de M3 (R) puis appliquer la mé-
thode de Sarrus ou recommencer pour se ramener à des déterminants
de matrices de M2 (R)). C’est un bon exercice d’entraînement pour tester
votre aptitude à mener de pénibles et répétitifs calculs mais ce n’est abso-
lument pas ce que le jury cherche à évaluer pendant la durée restreinte de
l’épreuve.
Il suffit de penser qu’on a l’équivalence suivante :

dim(Ker(A)) = 0 ⇔⇔ det(A) = 0

pour affirmer directement que le déterminant de la matrice A est nul :


det(A) = 0.
Le théorème du rang donne

dim(Ker(A)) + rg(A) = dim(R4 )

d’où
rg(A) = 4 − 1 = 3.
3. Ici également, un long calcul permettrait de déterminer les valeurs propres
de la matrice A : calculer le polynôme caractéristique de A,

χA (X) = det(XI4 − A),

(déterminant pour le calcul duquel on n’aura cette fois-ci aucun raccourci),


de degré 4 puisque A ∈ M4 (R), puis chercher ses racines, ce qui n’a rien
d’a priori évident.
154 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

Il faut en fait simplement penser qu’on a l’équivalence :


det(A) = 0 ⇔ 0 ∈ Sp(A) ⇔ 0 est une valeur propre de A
où Sp(A) désigne le spectre de la matrice A, c’est-à-dire l’ensemble de ses
valeurs propres. 0 est donc une valeur propre de la matrice A.
Il faut ensuite profiter de l’indication donnée dans l’énoncé, dont le but
est précisément de nous offrir deux vecteurs propres de A (sinon, pourquoi
nous demander de faire ces calculs ? Il est vrai qu’il arrive parfois qu’un tel
vecteur proposé par l’énoncé n’est pas propre : le but de la question serait
alors plutôt d’obtenir une base dans laquelle la matrice, à défaut d’être
diagonale, est triangulaire.). On a :
   
1 1
1 1
A   
1 = 1 ,
1 1
 
1
1
ce qui prouve que  
1 est un vecteur propre de la matrice A associé à la
1
valeur propre 1.

Remarque : aviez-vous remarqué que la somme des termes de chaque ligne


de la matrice A valait 1 ? Il en est de même de ses colonnes et chacune de
ces deux propriétés prises indépendamment l’une de l’autre fait de A une
matrice de transition associée à un processus stochastique et à une chaîne
de Markov. Ce problème ne nous préoccupe pas ici mais cela pourrait être
le cas dans un autre exercice.
Pour ce qui est des lignes, on peut tout de même noter que quand la somme
de leurs coefficients est constante égale à une valeur λ, celle-ci
 est alors
1
1
automatiquement une valeur propre associée au vecteur  
1. Il est souvent
1
utile de s’intéresser à l’image de ce vecteur, même quand l’énoncé ne le
suggère pas. On a également :
     
2 1 2
 0   0  1 0 
A   
−1 = −1/2 = 2 −1 ,
 

−1 −1/2 −1
AGRÉGATION EXTERNE 155
 
2
0
ce qui prouve que  
−1 est un vecteur propre de la matrice A associé à
−1
1
la valeur propre . Nous avons donc déterminé trois valeurs propres de la
2
matrice A associées chacune à un vecteur propre. C’est un peu court pour
juger de la diagonalisabilité de A : il nous manque une valeur propre ou un
vecteur propre non colinéaire aux précédents pour conclure positivement,
ou bien l’absence de ces nouveaux éléments pour conclure négativement
(rien ne nous garantit, pour l’instant, que les trois valeurs propres que
nous avons déterminées sont les seules). Il convient d’avoir à l’esprit que la
trace d’une matrice (c’est-à-dire la somme des éléments de sa diagonale) est
égale à la somme de ses valeurs propres, comptées avec leurs multiplicités
algébriques (c’est-à-dire qu’une valeur propre qui est une racine double du
polynôme caractéristique sera comptée deux fois. Si c’est une racine triple
elle sera comptée trois fois, etc. De même, le déterminant d’une matrice
est égal au produit de ses valeurs propres, également comptées avec leurs
multiplicités.). Ici on a
1 1 1 1 3
tr(A) = + + + =
2 4 4 2 2
1 3
et la somme des valeurs propres déjà obtenues est 0 + 1 + = . On ne
2 2
peut donc qu’ajouter 0 à ce total pour qu’il reste égal à la trace de A : on en
1
déduit que 0 est de multiplicité algébrique 2 alors que 1 et sont chacune
2
de multiplicité algébrique 1. Or 0 est une valeur propre de A de multiplicité
géométrique 1 (car dim(Ker(A)) = 1) : les multiplicités algébrique et géo-
métrique de cette valeur propre ne coïncidant pas, la matrice A n’est pas
diagonalisable.

1
Remarque : on peut également en déduire que 1 et sont chacune de
2
multiplicité géométrique 1 car une valeur propre de multiplicité algébrique 1
est automatiquement de multiplicité géométrique 1. Par contre, une valeur
propre de multiplicité algébrique supérieure à 1 peut-être de multiplicité
géométrique inférieure à sa multiplicité algébrique et dans ce cas la matrice
n’est pas diagonalisable. Une matrice est diagonalisable ssi les multiplicités
algébrique et géométrique coïncident pour chacune de ses valeurs propres.
Précisons que la multiplicité algébrique est relative à un objet algébrique, le
polynôme caractéristique, alors que la multiplicité géométrique est relative
à un objet géométrique, le sous-espace propre associé.
156 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

Exercice 2

Thèmes
algèbre linéaire (noyau, valeur propre, vecteur
propre, matrice compagnon, polynôme caractéristique)
polynômes (racines, coefficients)
topologie (norme)

Résultat majeur
expression des coefficients d’un polynôme
comme polynômes symétriques élémentaires en ses racines

Énoncé
d−1

d
Soit f = t + fi ti ∈ R[t] un polynôme unitaire de degré d  1 à
i=0
coefficients réels. On lui associe la matrice
 
0 0 0 ... 0 0 −f0
1 0 0 . . . 0 0 −f1 
 
0 1 0 . . . 0 0 −f2 
 
 .. .. .. .. .. 
Af = . . . . . 

 .. . .. . . .. .. 
.
 . . . 
0 0 0 . . . 1 0 −fd−2 
0 0 0 ... 0 1 −fd−1
et on rappelle que le polynôme caractéristique de Af est f .
 k 
 
 
On définit de plus  gi ti  = max |gi |.
  i∈{0,...,k}
i=0 ∞
1. Soit A = (aij )i,j∈{1,...,d} ∈ Md (C) une matrice. Montrer que si λ ∈ C est

tel que, pour tout i, |aii − λ| > |aij |, alors A − λId est inversible.
j=i
AGRÉGATION EXTERNE 157

2. Soit λ une racine de f . Montrer que la matrice Af − λId n’est pas inver-
sible.
3. Soit µ dans C tel que |µ| > 1 + max |fi | ; montrer que la matrice
i∈{0,...,d−1}
Af − µId est inversible. En déduire que toutes les racines ρ de f vérifient
|ρ|  1 + ||f ||∞ .
k−1

4. Soit g = tk + gj tj ∈ C[t] un polynôme unitaire divisant f , où k  1.
j=0
Montrer que
||g||∞  (2 + 2||f ||∞ )k .

Corrigé
Notons tout d’abord que la matrice Af est la traditionnelle matrice com-
pagnon du polynôme unitaire f et que l’application || · ||∞ définie sur R[t] est
bien, comme cette notation l’indique, une norme. Comme le rappelle l’énoncé,
il est de notoriété publique que f est le polynôme caractéristique de sa matrice
compagnon.
1. Soit λ ∈ C. La démonstration directe semble ardue : on ne voit pas grand-
chose à quoi s’accrocher. Raisonnons par contraposée et supposons que
A−λId n’est pas inversible. Le noyau de A−λId n’est alors pas réduit
 au
x1
seul vecteur nul. On dispose ainsi d’un vecteur non nul X =  ...  ∈ Cd
 

xd
tel que (A − λId )X = 0, c’est-à-dire un vecteur propre de la matrice A
associé à la valeur propre λ. On peut également écrire AX = λX, ce qui
équivaut au système de d équations
 
  d
 aij xj = λxi 

j=1
1id

qu’on peut réécrire comme suit pour s’approcher des conditions de l’énoncé :
 
 
 aij xj = (λ − aii )xi  .

j=i
1id
158 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

On obtient alors, pour tout i dans {1, . . . , d}, en usant comme souvent
de l’inégalité triangulaire (I.T.) pour la valeur absolue :
 
 
   
|(λ − aii )xi | =  aij xj   |aij xj | = (|aij | · |xj |) .
 j=i  (I.T.) j=i j=i

En particulier, pour i choisi de manière à ce que |xi | = max |xj |, ce qui


1jd
donne xi = 0 car X = 0, on peut diviser par |xi | et user du fait que pour
|xj |
tout j dans {1, . . . , d} :  1 (car |xi |  |xj |) :
|xi |
 |xj |
 
|aii − λ| = |λ − aii |  |aij | ·  |aij |.
|xi |
j=i j=i

Nous venons de démontrer que si A − λId n’est pas inversible alors il
existe un i tel que |aii − λ|  |aij |.
j=i
Nous avons donc bien démontré, par contraposée, que si pour tout i dans
{1, . . . , d} on a 
|aii − λ| > |aij |,
j=i

alors A − λId est inversible.

Remarque : on dit dans ce cas que A − λId est une matrice à diagonale
dominante stricte.

2. Si λ est une racine de f alors, puisque f est le polynôme caractéristique


de Af , λ est une valeur propre de Af (les valeurs propres d’une matrice
sont exactement les racines de son polynôme caractéristique) : il existe
donc un vecteur non nul X ∈ Cd tel que (Af − λId )X = 0 (c’est-à-dire
un vecteur propre de Af associé à la valeur propre λ). Le noyau de la
matrice Af − λId n’est alors pas réduit au seul vecteur nul (puisqu’il
contient X) et en conséquence Af − λId n’est pas inversible.

3. Il s’agit d’appliquer le résultat de la question 1. à la matrice Af . En effet,


pour cette matrice Af et pour tout i dans {1, . . . , d − 1}, aii = 0 donc
pour tout µ ∈ C on a |µ − aii | = |µ| et par ailleurs

 |f0 | si i = 1
|aij | =
j=i
1 + |fi−1 | sinon.
AGRÉGATION EXTERNE 159

On a donc pour tout i dans {1, . . . , d − 1} :



|aij |  1 + max |fk |.
k∈{0,...,d−1}
j=i


Par ailleurs, pour i = d, on a |adj | = 1 et d’après l’inégalité triangu-
j=d
laire inversée,
 
 
| − fd−1 − µ| = |µ + fd−1 |  |µ| − |fd−1 |.

Ainsi   
 
|µ| − |fd−1 | > 1 ⇒ | − fd−1 − µ| > |adj |.
j=d

Si µ vérifie la condition |µ| > 1 + max |fi | le résultat de la question


i∈{0,...,d−1}
1. permet bien de conclure que la matrice Af − µId est inversible.
Pour toute racine ρ de f , ρ est une valeur propre de Af et la matrice
Af − ρId n’est pas inversible. On a donc, par contraposée du résultat
qu’on vient d’obtenir

|ρ|  1 + max |fi |  1 + ||f ||∞ .


i∈{0,...,d−1}

k−1

4. Soit g = tk + gj tj ∈ C[t] un polynôme unitaire divisant f , où k  1.
j=0
On peut écrire
k

g= (t − ρi )
i=1

où pour tout i, ρi ∈ C est une racine de f (on rappelle que C est un corps
algébriquement clos : tout polynôme unitaire à coefficients complexes se
décompose de manière unique, à l’ordre près des facteurs, en produit de
polynômes unitaires de degré 1). Le développement de ce produit donne
les coefficients de g sous la forme des polynômes symétriques élémentaires
sur les ρi , au signe près.
Plus précisément, on a pour tout j ∈ {0, . . . , k − 1} :

 k−j

gj = (−1)k−j ρi 
1i1 ···ik−j k =1
160 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020
 
k
où la somme est constituée de termes (c’est le nombre de façons
k−j
de choisir les k − j termes i1 < · · · < ik−j parmi les entiers de 1 à k).
On obtient, en utilisant la majoration |ρi |  1 + ||f ||∞ obtenue dans la
question précédente :
 
k
|gj |  max |ρi |k−j
k−j
 
k
 (1 + ||f ||∞ )k−j
k−j
 
k
 (1 + ||f ||∞ )k
k−j
car 1 + ||f ||∞  1. Remarquons en passant que le coefficient du monôme
de degré k de g est 1 et qu’il est évidemment majoré par
 
k
(1 + ||f ||∞ )k = (1 + ||f ||∞ )k .
k−k
   
k k
car = = 1. Enfin, constatons que pour tout j ∈ {0, . . . , k} :
k−k 0
 
k
 2k
k−j
car par exemple, pour tout j ∈ {0, . . . , k} :
   k    k  
k k k
0  = = 2k
k−j k−i i
i=0 i=0
si on veut bien se souvenir du cas particulier du binôme de Newton
k  
k k i k−i
(a + b) = ab pour a = b = 1.
i
i=0
On obtient finalement
||g||∞ = max (|gi |, 1)
i∈{0,...,k−1}

 2k (1 + ||f ||∞ )

 2k (1 + ||f ||∞ )k

= (2 + 2||f ||∞ )k .
AGRÉGATION EXTERNE 161

Exercice 3

Thèmes
algèbre bilinéaire (produit scalaire, norme
euclidienne, orthogonalité)
matrices (déterminant, transposée)

Résultats majeurs
inégalité de Hadamard
procédé d’orthogonalisation de Gram-Schmidt

Énoncé
n

Pour u et v deux vecteurs de Rn , on note (u|v) = ui vi leur produit
i=1
scalaire usuel. Soit (b1 , . . . , bd ) une famille de d vecteurs linéairement indépen-
dants de Rn .
1. On se propose de démontrer qu’il existe une famille de d vecteurs (b∗1 , . . . , b∗d )
vérifiant les propriétés :
[P1] b∗1 = b1 .

[P2] pour i ∈ {2, . . . , d}, b∗i = bi − µij b∗j , avec pour tout j dans
j<i
{1, . . . , i − 1},
(bi |b∗j )
µij =
(b∗j |b∗j )

[P3] (b∗i |b∗j ) = 0 pour tous i, j dans {1, . . . , d} tels que i = j.

(a) Soit (b1 , . . . , bd ) des vecteurs de Rn tels que b1 = b1 et, pour tout
i dans {2,  . . . , d}, il existe des nombres réels (αij )1ji tels que
bi = bi − αij bj . Démontrer que, pour tout i dans {1, . . . , d},
j<i
Vect(b1 , . . . , bi ) = Vect(b1 , . . . , bi ) et en déduire que bi est non nul.
162 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

(b) Construire par récurrence une famille de d vecteurs (b∗1 , . . . , b∗d ) vé-
rifiant les propriétés [P1] et [P2].
(c) Démontrer que la famille de vecteurs ainsi construite vérifie la pro-
priété [P3].
On note B la matrice de Mn,d (R) dont les colonnes sont les vecteurs
b1 , . . . , bd dans cet ordre.
d

2. Montrer que ||b∗i ||2 = (det(t BB))1/2 .
i=1
d

3. En déduire que, si d = n, | det B|  ||bi ||2 .
i=1

Corrigé
1. (a) Il est clair que Vect(b1 ) = Vect(b1 ) et que b1 = 0 car b1 = b1 = 0
(le fait que (b1 , . . . , bd ) est une famille libre entraîne que chacun de
ses vecteurs est non nul).
Si pour un entier i tel que 1  i < d on a

Vect(b1 , . . . , bi ) = Vect(b1 , . . . , bi )

alors
   
Vect b1 , . . . , bi , bi+1 = Vect b1 , . . . , bi , bi+1
 

= Vect b1 , . . . , bi , bi+1 − αij bj 
j<i+1

= Vect (b1 , . . . , bi , bi+1 )

et si bi+1 = 0 alors

Vect(b1 , . . . , bi ) = Vect(b1 , . . . , bi )

= Vect(b1 , . . . , bi , bi+1 )

= Vect(b1 , . . . , bi , bi+1 ),
AGRÉGATION EXTERNE 163

ce qui prouverait que bi+1 serait engendré par (b1 , . . . , bi ). C’est ab-
surde car (b1 , . . . , bd ) est une famille libre. Ainsi, par itération finie,
on a bien Vect(b1 , . . . , bi ) = Vect(b1 , . . . , bi ) et bi = 0 pour tout i
dans {1, . . . , d}.

(b) On pose b∗1 = b1 . Soit i ∈ {1, . . . , d−1}. Supposons qu’on a construit


b∗1 , . . . , b∗i de manière à commencer de satisfaire [P2 ]. Il suffit alors
de définir


b∗i+1 := bi+1 − µi+1,j b∗j .
j<i+1

On construit bien ainsi la famille de d vecteurs (b∗1 , . . . , b∗d ) vérifiant


les propriétés [P1 ] et [P2 ].

(c) On peut là aussi procéder par récurrence finie. Par (1) bilinéarité et
(2) symétrie du produit scalaire, pour i = 1 et j = 2, on a :

  
 (b2 |b1 )
(b∗1 |b∗2 ) = b1 b2 − b1
(b1 |b1 )

(b2 |b1 )
= (b1 |b2 ) − (b1 |b1 )
(1) (b1 |b1 )

= (b1 |b2 ) − (b2 |b1 )

= 0.
(2)

Soit i ∈ {1, . . . , d − 1}. Supposons que pour tous 1  j < k  i on


a (b∗j |b∗k ) = 0.
Puisque pour tout j ∈ {1, . . . , d}, Vect(b∗1 , . . . , b∗j ) = Vect(b1 , . . . , bj ),
on a donc, pour tous 1  j < k  i : (b∗j |bk ) = 0 et (bj |b∗k ) = 0.
On a alors, par bilinéarité du produit scalaire
164 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

∀j ∈ {1, . . . , i} :
 
 

(b∗i+1 |b∗j ) = bi+1 − µi+1,k b∗k b∗j
k<i+1

  
= (bi+1 |b∗j ) − µi+1,k b∗k |b∗j
k<i+1

= (bi+1 |b∗j ) − µi+1,j (b∗j |b∗j )


(1)

(bi+1 |b∗j ) ∗ ∗
= (bi+1 |b∗j ) − (b |b )
(b∗j |b∗j ) j j

= 0

avec (1) car tous les autres termes de la somme sont nuls par hypo-
thèse de récurrence.
Ce qui prouve, par le principe de récurrence, la propriété demandée.

2. Notons A = (aij )1i,jd la matrice triangulaire inférieure définie par




1 si 1  i = j  d,
aij = 0 si 1  i < j  d,


µij si 1  j < i  d.

À l’instar de la matrice B définie dans l’énoncé, posons B ∗ la matrice de


Mn,d (R) dont les d colonnes sont, dans cet ordre, les vecteurs b∗1 , . . . , b∗d .
On a alors
B = B ∗t A
et
t
B = t (B ∗t A) = t (t A)t B ∗ = At B ∗
et donc
t
BB = At B ∗ B ∗t A
et enfin, puisque det(A) = 1 (et donc det(t A) = 1) et puisque le déter-
minant vérifie det(M N ) = det(M )det(N ) pour deux matrices carrées M
et N de même taille, on a, en remarquant que t B ∗ B ∗ ∈ Mn (R) :

det(t BB) = det(At B ∗ B ∗t A) = det(A)det(t B ∗ B ∗ )det(t A) = det(t B ∗ B ∗ )


AGRÉGATION EXTERNE 165

Comme t B ∗ B ∗ est diagonale (les b∗i sont orthogonaux deux à deux) et


ses éléments diagonaux sont les ||b∗i ||22 , le calcul du déterminant donne
d

det(t BB) = det(t B ∗ B ∗ ) = ||b∗i ||22 .
i=1

Finalement, en appliquant la fonction racine carrée sur l’égalité


d

t
det( BB) = ||b∗i ||22 ,
i=1

on obtient, par positivité des normes


d

 1/2
det(t BB) = ||b∗i ||2 .
i=1

3. Ce dernier résultat est connu sous le nom d’inégalité de Hadamard.


Si d = n, la matrice B est carrée et

det(t BB) = det(t B)det(B) = det(B)2 .

La famille (b1 , . . . , bn ), supposée libre, constitue alors une base de Rn


et en conséquence la famille (b∗1 , . . . , b∗n ) aussi, qui plus est orthogonale
d’après la propriété [P3].
De la décomposition de chaque bi sous la forme

bi = b∗i + µij b∗j
j<i

on déduit alors immédiatement



||bi ||22 = ||b∗i ||22 + µ2ij ||b∗j ||22  ||b∗i ||22
j<i

et donc
||bi ||2  ||b∗i ||2 .
Et finalement, par produit (tous les termes sont positifs, l’inégalité est
conservée) :
n
 n

t 1/2
|det(B)| = BB = ||b∗i ||2  ||bi ||2 .
i=1 i=1
166 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

Exercice 4

Thèmes
anneaux et corps (idéal maximal, corps fini)
polynômes
arithmétique (nombre premier, division euclidienne, PGCD)

Résultats majeurs
tout corps fini est cyclique.
le quotient d’un anneau A par un idéal I est un corps ssi I est
maximal.

Énoncé
Soit p un nombre premier.
Si n est un entier naturel, on définit Pn ∈ Z[t] par
n
Pn = tp − t.

1. Soit r et n deux entiers naturels, avec r > 0 ; on note

n = qr + k, 0  k < r,

la division euclidienne de n par r. Montrer qu’il existe un polynôme


Q ∈ Z[t] tel que
Pn = QPr + Pk .

2. En déduire que
PGCD(Pn , Pr ) = PPGCD(n,r) .

3. Soit f ∈ Z/pZ[t] un polynôme irréductible de degré r.


On note (f ) l’idéal f Z/pZ[t]. Montrer que l’anneau

F = Z/pZ[t]/(f )
AGRÉGATION EXTERNE 167

est un corps fini de cardinal pr . En déduire que f divise πp (P r).

Soit In l’ensemble des polynômes irréductibles unitaires de degré divi-


sant n dans Z/pZ[t]. On considère le polynôme :

Q= ϕ.
ϕ∈In

4. Démontrer que Q divise πp (Pn ).

Corrigé
1. n qr+k qr pk
tp − t = tp − t = tp −t

 qr p k k k
= tp − tp + t p − t

 qr p k k
= tp − t p + Pk .
 qr pk k
On cherche donc à factoriser tp − tp par Pr .
L’identité remarquable suivante, valable pour tout m ∈ N∗ :
m−1

am − bm = (a − b) ai bm−1−i
i=0
 qr pk k qr
permet de factoriser, dans Z[t], tp − tp par tp − t. On peut re-
marquer qu’on a
qr (q−1)r+r
tp − t = tp −t
 (q−1)r
p r r r
= tp − tp + tp − t

 (q−1)r
p r r
= tp − t p + Pr .

La même identité remarquable permet alors de factoriser, dans Z[t],


 (q−1)r pr r (q−1)r qr
tp − tp par tp − t. Prouver que tp − t se factorise par
(q−1)r
Pr dans Z[t] revient à prouver que tp − t se factorise par Pr dans
168 CHAPITRE 12 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2020

Z[t]. Avec q − 1 itérations du même principe, on voit que l’on se ramène


à prouver que
(q−(q−1))r r
tp − t = tp − t = Pr
se factorise par Pr , ce qui est trivial.
Il existe donc bien un polynôme Q ∈ Z[t] tel que Pn = QPr + Pk .

Remarque : nous venons d’accomplir une sorte d’algorithme de sous-


tractions successives sur la puissance de p.

2. Comme on le sait, en appliquant l’algorithme d’Euclide dans Z à n et


r, leur PGCD apparaît comme le dernier reste non nul dans les divisions
euclidiennes successives. On a vu dans la question précédente que la
division euclidienne de n par r dans Z :
n = qr + k, 0k<r
donne de manière similaire la division euclidienne de Pn par Pr dans
Z[t] :
Pn = QPr + Pk , 0  deg Pk = pk < pr = deg Pr .
Comme Pi = 0 ⇔ i = 0, le dernier reste non nul dans l’algorithme
d’Euclide appliqué à Pn et Pr est PPGCD(n,r) .
Ce polynôme PPGCD(n,r) ∈ Z[t] ⊂ Q[t] est donc le PGCD de Pn et Pr
dans l’anneau euclidien Q[t] et donc également dans l’anneau factoriel
Z[t]. On a donc bien
PGCD(Pn , Pr ) = PPGCD(n,r) .

Remarque : on peut également dire que Z[t] étant un anneau factoriel,


c’est un anneau à PGCD.

3. p est un nombre premier donc Z/pZ est un corps fini de cardinal p et


Z/pZ[t] est un anneau euclidien.
f étant irréductible, l’idéal (f ) est maximal et l’anneau quotient
F = Z/pZ[t]/(f )
est un corps dont les éléments sont les polynômes de degré strictement
inférieur à deg f = r, modulo (f ).
La projection canonique
Z/pZ[t] → F = Z/pZ[t]/(f )
g → g + (f )
AGRÉGATION EXTERNE 169

associe à un polynôme g à coefficients dans Z/pZ son reste modulo (f )


(c’est-à-dire le reste de la division euclidienne de g par f ). Elle définit un
morphisme d’anneaux de noyau l’idéal (f ) et induit une bijection entre
l’ensemble des polynômes à coefficients dans Z/pZ de degré inférieur
strictement à r qu’on peut noter Z/pZr−1 [t], et F .
Z/pZr−1 [t] étant de cardinal pr (un élément de Z/pZr−1 [t] a r coefficients
qui peuvent chacun prendre p valeurs), il en est de même de F .
Le groupe des éléments inversibles d’un corps fini de cardinal pr est cy-
clique d’ordre pr − 1.
On a donc
r
∀g ∈ F, g p −1 = πp (1) + (f )
r
et donc g p = g. En particulier
 r r
πp X p + (f ) = (πp (X))p + (f )
r
= (πp (X) + (f ))p

= πp (X) + (f )

et donc
r
πp (X p − X) + (f ) = 0 + (f ).
Autrement dit f divise πp (P r).

4. Soit ϕ ∈ In et notons r le degré de ϕ.


r divise n. D’après la question précédente, ϕ divise πp (Pr ) et le résultat
de la question 1. nous permet d’affirmer que Pr divise Pn (car avec les
notations de cette question, on a k = 0 et Pk = P0 = 0 et Pn = QPr ) et
donc, par projection, πp (Pr ) divise πp (Pn ) et enfin, par transitivité de la
divisibilité, ϕ divise πp (Pn ).
Dans un anneau euclidien, si a et b sont deux éléments irréductibles
premiers entre eux divisant c, leur produit ab divise également c.
Z/pZ[t] est un anneau euclidien. De plus, les éléments de In sont uni-
taires et irréductibles donc premiers deux à deux. On peut donc bien
affirmer que 
Q= ϕ divise πp (Pn ).
ϕ∈In
Mathématiques Générales, 2019

Chapitre 13

Mathématiques Générales, 2019

Thèmes
polynômes (division euclidienne, degré, racine,
nombre algébrique, polynôme minimal, polynôme cyclotomique, poly-
nôme unitaire, polynôme irréductible, polynôme caractéristique)
anneaux (anneau euclidien, morphisme d’anneaux)
théorie des corps (extension de corps, degré d’une extension)
matrices (matrice compagnon d’un polynôme)
nombres complexes (racines n-ièmes de l’unité)
espaces vectoriels (base, dimension)

Résultats majeurs
propriétés des polynômes cyclotomiques
propriétés de la matrice compagnon d’un polynôme
théorème de Cayley-Hamilton
172 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

Remarques du jury
1. il est peu pertinent pour l’hérédité d’écrire
A = a0 + XC, la logique de l’algorithme d’Euclide veut qu’on com-
pense le terme de plus haut degré.
2.(a) justifier le caractère minimal de X 2 + X + 1.
2.(b) un passage au quotient ne peut prouver l’égalité demandée.
2.(c) l’étude du signe de a2 + b2 − ab est inutile : le module suffit pour
la positivité.
on peut utiliser la forme canonique d’un trinôme pour résoudre a2 +
b2 − ab = 1.
bien vérifier que les six éléments trouvés sont des inversibles de Z[j].
2.(d) un dessin permet de visualiser le bon candidat pour q dans le
réseau Z[j].
3. ne pas confondre Un et µ∗n ni identifier Φn et X n − 1.
3.(a) la structure du groupe des racines n-ièmes de l’unité est mal maî-
trisée. La multiplicité des racines communes doit être évoquée pour
prouver l’égalité des polynômes.
3.(b) il faut montrer que Φ ∈ Q[X], l’énoncé ne donne que C[X].
3.(c)ii) montrer que P (1) ou Q(1) sont multiples de p est insuffisant.
4.(a) et (b) les arguments de liberté/base sont essentiels et ne
doivent être masqués par une écriture matricielle abusive sans men-
tionner la base.
4.(e) : immédiat avec la question précédente. des raisonnements utili-
sant les polynômes symétriques élémentaires peuvent aboutir à condi-
tion de bien rédiger.

Énoncé
1. Soit B ∈ Z[X] un polynôme unitaire et A ∈ Z[X]. Montrer qu’il existe
Q, R ∈ Z[X] tels que A = BQ + R avec deg(R) < deg(B) ou R = 0.
Indication : On pourra faire une preuve par récurrence sur le degré de A.
2iπ
2. L’anneau Z[j]. On note j = e 3 .
Z[j] est l’anneau des entiers d’Eisenstein.

(a) Démontrer que j est un élément algébrique sur Q et préciser son


polynôme minimal.
AGRÉGATION EXTERNE 173

(b) Démontrer que Z[j] = {a + bj, (a, b) ∈ Z2 }.


Pour tout nombre complexe z, on pose N (z) = zz = |z|2 .
(c) Démontrer que pour tout z ∈ Z[j], on a N (z) ∈ N. En déduire que
si z ∈ Z[j] est inversible, alors N (z) = 1, puis que Z[j]× possède 6
éléments que l’on précisera.
(d) Soit x ∈ Z[j] et y ∈ Z[j]\{0}.
 
x
Déterminer un élément q ∈ Z[j] tel que N −q < 1.
y
En déduire que l’anneau Z[j] est euclidien.

3. Polynômes cyclotomiques 1 .
Soit n un entier naturel non nul. On note Φn le n-ième polynôme cyclo-
tomique. On rappelle que si µ∗n désigne l’ensemble des racines primitives
n-ièmes de l’unité dans C, ce polynôme est défini par

Φn (X) = (X − µ)
µ∈µ∗n


(a) Démontrer que X n − 1 = Φd (X).
d|n

(b) En déduire que Φn (X) ∈ Z[X].


(c) Soit p un nombre premier. On note π : Z → Fp la surjection cano-
nique. Le morphisme d’anneaux π s’étend, coefficient par coefficient,
en un morphisme d’anneaux de Z[X] sur Fp [X], noté π̂ (on ne de-
mande pas de justifier ce point). Si Φp désigne le p-ième polynôme
p−1

cyclotomique, on rappelle que Φp = Xk.
k=0
i. Démontrer que π̂(X p − 1) = (X − 1Fp )p .
ii. Soit P et Q deux polynômes unitaires et non constants dans
Z[X] tels que X p − 1 = P Q. Démontrer que P (1) et Q(1) sont
des entiers multiples de p.
1. L’énoncé officiel indique deux fois Φp pour désigner Φp (X), voir énoncé 3.(c) :
p−1

Φp = X k et question 3.(c)iii. : Φp polynôme irréductible de Q[X]. Nous avons respecté
k=0
cette incohérence mineure. Précisons que si P désigne un polynôme à une indéterminée et
à coefficients dans A, P (X) ∈ A[X] et P (Y ) ∈ A[Y ] ne désignent pas le même objet. Ce
n’est que par abus de notation qu’on peut se permettre d’occulter l’indéterminée X quand
aucune ambiguité n’est possible. On peut se demander pourquoi cela est fait seulement deux
fois dans l’énoncé et pas à chaque fois.
174 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

iii. Retrouver ainsi que Φp est un polynôme irréductible de Q[X].


De manière générale, Φn est irréductible pour tout n ∈ N\{0},
résultat que l’on admet ici et que l’on pourra utiliser librement
dans la suite.
2iπ
iv. Soit ζ = e p . Déterminer le polynôme minimal de ζ sur Q et
en déduire le degré de l’extension de corps Q(ζ)/Q.
4. Matrices compagnons. Soit n un entier naturel non nul. Soit
P = X n + an−1 X n−1 + · · · + a0
un polynôme unitaire de C[X]. On lui associe sa matrice compagnon CP
définie dans Mn (C) par
 
0 0 ... 0 −a0
1 0 ... 0 −a1
 
 .. .. ..
CP = 0 1 . . .

 .. . . .. 
. . . 0 −an−2 
0 ... 0 1 −an−1
On note E = (e1 , . . . , en ) la base canonique de Cn .
(a) Pour k ∈ {1, . . . , n − 1}, exprimer CPk e1 dans la base E .
En déduire que pour tout polynôme Q ∈ C[X] non nul et de degré
inférieur ou égal à n − 1, la matrice Q(CP ) est non nulle.
En déduire le degré du polynôme minimal de CP .
(b) Exprimer CPn e1 dans la base E . En déduire que P est le polynôme
minimal de CP .
(c) En déduire le polynôme χCP .
Soit M ∈ Mn (C) de polynôme caractéristique χM . Soit α1 , . . . , αn
les racines complexes de χM comptées avec leur multiplicité. Soit Q
un polynôme de C[X].
(d) Démontrer que le polynôme caractéristique de la matrice Q(M ) est
n

χQ(M ) = (X − Q(αk )).
k=1
Indication : on pourra commencer par traiter le cas où M est trian-
gulaire.
(e) Soit A un sous-anneau de C. On suppose que le polynôme Q est dans
A[X]. Soit P ∈ A[X] un polynôme unitaire dont on note α1 , . . . , αn
les racines complexes comptées avec leur multiplicité.
n
Démontrer que (X − Q(αk )) est un polynôme de A[X].
k=1
AGRÉGATION EXTERNE 175

Corrigé
1. N’hésitons pas à suivre l’indication de l’énoncé en procédant par récur-
rence sur le degré de A. Il est inutile dans l’initialisation, de distinguer
le cas A = 0 du cas A constant non nul. Rappelons à ce sujet que le
polynôme nul n’est pas considéré comme de degré nul. En général on
convient que son degré est deg(0) = −∞. Les polynômes de degré nul
sont les polynômes constants non nuls.

Initialisation :
— premier cas : si A est constant et si B = 1, il suffit de poser Q = A
et R = 0 car A = 1 × A + 0.
— second cas : si A est constant et si B = 1 alors deg(B)  1 (B est
un polynôme unitaire. Le seul polynôme unitaire constant est 1. Si
B = 1 alors B n’est pas constant et son degré est donc au moins
égal à 1) et il suffit de poser Q = 0 et R = A (on a ainsi R = 0 ou
deg(R) = 0 < deg(B)) car A = B × 0 + A.

Ainsi, si le degré de A est au plus 0 (c’est-à-dire si A = 0 ou si deg(A) =


0), la propriété à démontrer est vérifiée.

Hypothèse de récurrence : supposons que pour un entier naturel n fixé,


pour B ∈ Z[X] un polynôme unitaire quelconque et A ∈ Z[X] un po-
lynôme quelconque de degré au plus n, il existe Q, R ∈ Z[X] tels que
A = BQ + R avec deg(R) < deg(B) ou R = 0.

Hérédité : considérons un polynôme C ∈ Z[X] de degré n+1 et B ∈ Z[X]


un polynôme unitaire de degré b ∈ N.
— si b > n + 1, il suffit de poser Q = 0 et R = C pour avoir C = BQ + R
et deg(R) = n + 1 < b.
— si par contre b  n + 1, écrivons C sous la forme

C = cX n+1 + A

où c ∈ Z (c est le coefficient dominant de C) et A ∈ Z[X] est de degré


au plus n (A est tout simplement égal à C − cX n+1 , c’est-à-dire le
polynôme obtenu à partir de C en lui ôtant son terme dominant).
On peut alors écrire

C = cX n+1−b B + C − cX n+1−b B
176 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

où C − cX n+1−b B est un élément de Z[X] de degré au plus n. On fait


disparaître, par cette manœuvre, le terme dominant cX n+1 . Si cela
n’est pas clair, on peut remarquer que B s’écrit sous la forme X b + D
où deg(D) < b ou D = 0 et qu’alors
 
C − cX n+1−b B = cX n+1 + A − cX n+1−b X b + D

= A − cX n+1−b D

où A et cX n+1−b D sont chacun de degré au plus n car


 
deg cX n+1−b D = n + 1 − b + deg(D)

< n+1−b+b

= n+1

et il en est donc de même de leur différence :


   
deg C − cX n+1−b B = deg A − cX n+1−b D  n.

On peut aussi, si décidément cela n’est pas clair, écrire tous les po-
lynômes sous forme de sommes de monômes et constater ainsi la dis-
parition du terme de degré n + 1.
D’après l’hypothèse de récurrence, il existe des polynômes Q et R
dans Z[X] tels que

C − cX n+1−deg(B) B = BQ + R

avec deg(R) < deg(B) ou R = 0 et finalement

C = cX n+1−deg(B) B + BQ + R

= B(cX n+1−deg(B) + Q) + R

où cX n+1−deg(B) + Q ∈ Z[X] (car Q ∈ Z[X] et c ∈ Z), ce qui permet


d’achever la démonstration du caractère héréditaire de la propriété à
démontrer.
Conclusion : la propriété à démontrer est vraie pour les polynômes A
constants et si elle est vraie pour des polynômes A de degré au plus n,
elle l’est également pour des polynômes A de degré n + 1.
Cette propriété est donc vraie pour des polynômes A de degré quelconque.
AGRÉGATION EXTERNE 177

2. L’anneau Z[j].
(a) On peut remarquer que
    √
2iπ 2iπ 2iπ 1 3
j=e 3 = cos + i sin =− +i
3 3 2 2

et √
2 4iπ
− 2iπ 1 3
j =e 3 =e 3 =j =− −i = −j − 1,
2 2
c’est-à-dire j 2 + j + 1 = 0.
On peut aussi penser que j est une racine cubique complexe de
l’unité, c’est-à-dire j 3 = 1 ou encore 0 = j 3 − 1 = (j − 1)(j 2 + j + 1)
(grâce à l’identité classique a3 − b3 = (a − b)(a2 + ab + b2 ) valable
dans tout anneau commutatif et en particulier dans le corps commu-
tatif C). Comme évidemment j = 1 et donc j − 1 = 0 dans le corps
C, on trouve de cette manière j 2 + j + 1 = 0 (c’est précisément ici
l’intégrité de l’anneau C qui est utile pour obtenir cette conclusion).
j est donc une racine du polynôme X 2 + X + 1 ∈ Z[X] ⊂ Q[X], ce
qui fait de j un élément algébrique sur Q.
j n’étant évidemment pas réel (sa partie imaginaire est non nulle),
il n’est racine d’aucun polynôme réel de degré 1 (si ax + b = 0 avec
b
a, b ∈ R, a = 0 alors x = − ∈ R), ni donc a fortiori d’aucun
a
polynôme de degré 1 à coefficients rationnels.
X 2 + X + 1 est évidemment unitaire et c’est donc le polynôme mi-
nimal de j.

(b) Il est clair que {a + bj, (a, b) ∈ Z2 } ⊂ {P (j), P ∈ Z[X]} = Z[j]


(Z[j] est l’ensemble des évaluations en j des polynômes à coefficients
entiers : il contient en particulier les évaluations en j des polynômes
de degré au plus 1 à coefficients entiers, c’est-à-dire les éléments du
type a + bj pour a, b ∈ Z).
Remarque : on peut aussi noter Z + Zj = {a + bj, (a, b) ∈ Z2 }.
On peut commencer par remarquer qu’on a vu que j 2 = −1 − j et
qu’on sait donc que j 2 ∈ {a + bj, (a, b) ∈ Z2 }. On démontre à l’aide
d’une simple récurrence qu’il en est de même de j k pour tout k ∈ N.

Initialisation : cette propriété est vraie pour k = 0 et k = 1 car


j 0 = 1 ∈ Z ⊂ Z + Zj et j 1 = j ∈ Zj ⊂ Z + Zj) et pour k = 2 d’après
ce qu’on vient de dire. Nous n’avons certes pas besoin de cette triple
178 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

initialisation, le cas k = 0 étant suffisant.

Hypothèse de récurrence et hérédité : si j k ∈ {a + bj, (a, b) ∈ Z2 }


pour un certain entier naturel k  0, alors

∃ak , bk ∈ Z, j k = ak + bk j

et ainsi
j k+1 = j k j = (ak + bk j)j = ak j + bk j 2 = ak j + bk (−j − 1)

= −bk + (ak − bk )j ∈ {a + bj, (a, b) ∈ Z2 }.

car ak − bk ∈ Z et −bk ∈ Z (Z étant un anneau).

Conclusion : la propriété est valable pour k = 0 et elle est hérédi-


taire : elle est donc valable pour tout k ∈ N.

Z[j] étant constitué des combinaisons à coefficients entiers des j k


(k ∈ N), on en déduit Z[j] ⊂ {a + bj, (a, b) ∈ Z2 } et donc, par double
inclusion Z[j] = {a + bj, (a, b) ∈ Z2 }.

(c) Soit z ∈ Z[j].


Le résultat de la question précédente permet d’obtenir l’écriture al-
gébrique de z en fonction de deux entiers :

∃a, b ∈ Z, z = a + bj
√ 

1 3
= a+b − +i
2 2

b 3
= a − + ib .
2 2
En conséquence, en gardant cette notation, on a
 2  √ 2
b 3
N (z) = a− + b
2 2

b2 3b2
= a2 − ab + + = a2 − ab + b2 ∈ Z
4 4
AGRÉGATION EXTERNE 179

(Z est un anneau, il est stable par somme et produit).


De plus par définition, N (z)  0 (le module, qui plus est au carré,
d’un nombre complexe est toujours positif ou nul). Remarquons que
l’expression finale dans laquelle le terme −ab est de signe quelconque,
ne permet pas de conclure sans effort quant au signe de N (z) mais la
première expression sous forme de somme de deux carrés de nombres
réels oui.
On a donc N (z) ∈ N.
Par ailleurs, les propriétés usuelles du module d’un nombre complexe
permettent d’écrire

∀z, z  ∈ C, N (zz  ) = |zz  |2 = (|z| × |z  |)2 = |z|2 × |z  |2 = N (z)N (z  ).

Ainsi, si z est inversible (c’est-à-dire si non seulement z = 0 mais


également z −1 ∈ Z[j]), en considérant z −1 ∈ Z[j] l’inverse de z, on a

1 = |1|2 = N (1) = N (zz −1 ) = N (z)N (z −1 ).

N (z) et N (z −1 ) sont alors deux entiers naturels dont le produit


vaut 1, ils sont donc tous deux égaux à 1.
Les éléments de Z[j]× sont donc du type a + bj avec a, b ∈ Z et
a2 − ab + b2 = 1.
On peut résoudre cette équation en utilisant la forme canonique
 
b 2 3b2
a2 − ab + b2 − 1 = a− + −1
2 4
 2
b 3b2 − 4
= a− +
2 4
qui nous amène ainsi à
 2
b 4 − 3b2
a− =
2 4
ou en considérant, ce qui revient absolument au même, le polynôme
du second degré X 2 −bX +b2 −1 dont le discriminant est ∆ = 4−3b2 .
Dans les deux cas, on se trouve face à la nécessité d’avoir 4 − 3b2  0
pour que le couple (a, b) ∈ Z2 soit solution de l’équation N (z) = 1.
Cela limite b aux seules valeurs 0, −1 et 1 car |b|  2 ⇒ 4 − 3b2 <
−8 < 0.
L’équation a2 − ab + b2 = 1 donne alors
180 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

— pour b = 0 : a2 = 1, soit a = 1 ou a = −1
— pour b = 1 : a2 − a = 0, soit a = 0 ou a = 1
— pour b = −1 : a2 + a = 0, soit a = 0 ou a = −1
ce qui limite la recherche des éléments inversibles de Z[j] aux six
nombres
1, −1, j, 1 + j, −j, −1 − j.

Figure 13.1 – Représentation du réseau Z[j] et de ses six éléments inver-


sibles. Les éléments de ce réseau sont les points situés à l’intersection des
droites qui ont été tracées (à l’exception de l’axe des imaginaires qui n’est
là qu’à titre indicatif).

Réciproquement, il est clair (mais il faut le vérifier) que ces six


nombres sont bien dans Z[j]× : 1 est son propre inverse (dans Z[j]
comme dans R ou dans C), −1 également, j et −1 − j sont inverses
l’un de l’autre puisque j(−1 − j) = −j − j 2 = 1 (se souvenir que
j 2 + j + 1 = 0) et de même −j et 1 + j sont inverses l’un de l’autre
pour la même raison.
AGRÉGATION EXTERNE 181

Z[j]× est donc exactement constitué de ces six éléments : on peut


remarquer qu’ils constituent les affixes d’un hexagone régulier centré
en O.

x
(d) Soit x ∈ Z[j] et y ∈ Z[j]\{0}. Le nombre complexe peut s’écrire
y
sous la forme a + bj pour deux réels a et b. En effet, la famille (1, j)
est une base de C vu comme un R-espace vectoriel (cette famille est
libre puisque j ∈ R, elle est de cardinal 2 et C est de dimension 2
en tant que R-e.v. Une famille libre de n vecteurs dans un e.v. de
dimension n est automatiquement une base de cet e.v.).
Une idée simple qu’on peut avoir est que tout réel t est à une distance
1
au maximum de d’un entier (et cet entier est alors l’entier le plus
2
proche de t), à savoir sa partie entière (notée t) ou sa partie entière
augmentée de 1 (c’est-à-dire t + 1).

1
Figure 13.2 – cas où le réel t est plus proche de t : 0  t − t  .
2

1
Figure 13.3 – cas où le réel t est plus proche de t + 1 : t − t  .
2

Une bonne approximation (c’est-à-dire qui cherche à minimiser la


distance euclidienne) que l’on peut faire d’un complexe écrit sous la
forme a+bj (avec a, b ∈ R) par un élément q = α+βj (avec α, β ∈ Z)
consiste donc à poser

 1

 a si a − a 
 2
α=

 1

a + 1 si a − a >
2
182 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

et de même 
 1

 b si b − b 
 2
β=

 1

b + 1 si b − b > .
2
1 1
On a alors de fait |a − α|  et |b − β|  et on en déduit
2 2
 
x
N −q = N ((a − α) + (b − β)j)
y

= (a − α)2 − (a − α)(b − β) + (b − β)2

3
 < 1.
4

Noter que l’élément q que nous avons choisi n’est pas nécessairement
le seul à satisfaire les conditions imposées par l’énoncé (x/y = 3/4
sera approché de manière satisfaisante par q = 1 selon notre proto-
cole avec N (x/y − q) = 1/16 mais l’approximation par q = 0, de
moins bonne qualité, répond aussi au problème puisqu’on a dans ce
cas N (x/y − q) = 9/16) ni même nécessairement celui qui minimise
la norme euclidienne (c’est-à-dire le module) (x/y = 1/2 + 3/4j sera
approché par q = j selon notre protocole avec N (x/y − q) = 7/16
mais l’approximation par q = 1 + j donne N (x/y − q) = 3/16). Tout
cela n’a aucune importance ici car on ne cherche pas à minimiser le
module mais seulement à le majorer par 1.

Z[j] étant un anneau et x, y, q ∈ Z[j] (avec de plus y = 0 et donc


N (y) = |y|2 = 0), on a alors x − qy ∈ Z[j] et
  2
 x 
N (x − qy) = |x − qy|2 =  − q × y 
y
 2  
x  x
  2
=  − q  × |y| = N − q × N (y) < N (y),
y y

ce qui fait de N un stathme euclidien et, partant, de Z[j] un anneau


euclidien :

∀x ∈ Z[j], ∀y ∈ Z[j]∗ , ∃q, r ∈ Z[j], x = qy + r, N (r) < N (y)


AGRÉGATION EXTERNE 183

en posant q comme précédemment et bien sûr r = x − qy.

Remarque : pour les raisons évoquées plus haut concernant le choix


de q, le couple (q, r) n’est en général pas unique.

3. Polynômes cyclotomiques.
(a) On peut faire relativement court en écrivant :
X n − 1 est un polynôme unitaire de degré n dont les n racines sont
précisément les n racines n-ièmes de l’unité. Chacune d’entre elle
est une racine d-ième primitive de l’unité pour un unique diviseur
d de n et réciproquement toute racine d-ième primitive de l’unité
pour un certain diviseur d de n est une racine n-ième de l’unité.
On peut donc écrire

Un = µ∗d
d|n

où Un = {e2ikπ/n , k ∈ [[0, n − 1]]} désigne l’ensemble des racines


n-ièmes de l’unité dans C et
   
Xn − 1 = (X − µ) = (X − µ) = Φd (X).
µ∈Un d|n µ∈µ∗d d|n

On peut aussi trouver cela un peu court et à la


limite de la para-
phrase de l’énoncé et préférer démontrer Un = µ∗d en détaillant
d|n
par exemple ainsi :
Soit d ∈ N∗ .
d|n ⇔ ∃k ∈ N, n = kd.
Dans ce cas, on a alors
 k
µ ∈ µ∗d ⇒ µd = 1 ⇒ µn = µkd = µd = 1k = 1 ⇒ µ ∈ Un ,

ce qui démontre que



µ∗d ⊂ Un .
d|n

Par ailleurs,

∀z ∈ Un , ∃k ∈ [[0, n − 1]], z = ζ k = e2ikπ/n


184 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

en posant d = k ∧ n et k  , n ∈ N tels que k = dk  et n = dn , on a


alors
 
z = e2ik π/n
avec k  ∧ n = 1 et n |n. z est donc une racine n -ième primitive de
l’unité pour un certain diviseur n de n (nous utilisons en passant et
sans le démontrer le fait que les racines d-ièmes primitives de l’unité
sont précisément les nombres du type e2ikπ/d pour k ∧ d = 1), ce qui
prouve que 
Un ⊂ µ∗d
d|n

et donc par double inclusion l’égalité



Un = µ∗d .
d|n

Il reste à voir que cette réunion est disjointe.


Soit d|n, d |n, k ∈ [[0, d − 1]], k  ∈ [[0, d − 1]] tels que
k ∧ d = 1 = k  ∧ d
et
 
z = e2ikπ/d = e2ik π/d .
On a alors  
  d  
1 = z d = e2ik π/d = e2ik πd/d
d’où
2k  πd
≡ 0[2π]
d
et donc
k d
∈ N,
d
c’est-à-dire d |(k  d) et comme k  et d sont premiers entre eux, le
lemme de Gauss donne d |d.
d et d ayant ici des rôles interchangeables, on obtient de même d|d
et donc d = d (l’injectivité de θ ∈ [0, 2π[→ eiθ donne aussi en
conséquence k = k  mais cela ne sert à rien ici), ce qui prouve que
les ensembles µ∗d , pour d|n, sont disjoints deux à deux.
Finalement, on a donc 
Un = µ∗d .
d|n
AGRÉGATION EXTERNE 185

(b) Initialisation : Φ1 (X) = X − 1 ∈ Z[X].

Hypothèse de récurrence : soit n ∈ N∗ , n > 1. Supposons que

∀d ∈ N∗ , d < n ⇒ Φd (X) ∈ Z[X].

Hérédité : montrons que Φn (X) ∈ Z[X]. On a


 
Xn − 1 = Φd (X) = Φn (X) Φd (X)
d|n d|n,d=n

et Φd (X) ∈ Z[X] est unitaire par produit de polynômes uni-
d|n,d=n
taires de Z[X]. Or d’après 1.,
 

∃Q, R ∈ Z[X], X n − 1 =  Φd (X) Q(X) + R(X)
d|n,d=n
 
 
avec deg(R) < deg 
 Φ d (X)  ou R = 0.

d|n
d=n

Ainsi, par différence, on obtient


 
 
R(X) = Φn (X) Φd (X) −  Φd (X) Q(X)
d|n,d=n d|n,d=n


= (Φn (X) − Q(X)) Φd (X)
d|n,d=n

ce qui n’est possible, pour des considérations de degré :

∀A, B ∈ C[X]\{0}, deg(AB) = deg(A) + deg(B)

que si Φn (X) − Q(X) = 0 et donc R(X) = 0.


Ainsi Φn (X) = Q(X) ∈ Z[X] et par le principe de récurrence :
∀n ∈ N∗ , Φn ∈ Z[X].

(c) i. On peut utiliser directement le morphisme de Fröbenius :

x ∈ Fp → xp .
186 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

Le point subtil à bien saisir est que cette application est effec-
tivement un (endo)morphisme de groupe additif :
∀x, y ∈ Fp , (x + y)p = xp + y p .
C’est plus précisément un automorphisme de (Fp , +).
Voici tout de même la preuve de l’égalité demandée par un
calcul commençant par la formule du binôme de Newton dans
l’anneau commutatif Fp [X] :

p
  
p p
(X − 1Fp ) = π X k (−1Fp )p−k
k
k=0

p−1  

p p p
= X + (−1Fp ) + π X k (−1Fp )p−k
k
k=1

= X p − 1Fp

= π̂(X p − 1)

car d’une part (−1Fp )p = −1Fp pour tout p ∈ P, que p soit


impair ou égal à 2 (si p = 2, (−1F2 )2 = 1F2 = −1F2 ), et d’autre
part car
 
p p!
∀p ∈ N, ∀k ∈ [[0, p]], = ∈ N∗
k k!(p − k)!
et donc 
k!(p − k)!  p! = p × (p − 1)!
De plus, comme p est premier, en utilisant (1) le lemme de
Gauss :

1  k  p − 1 ⇒ p ∧ (k!(p − k)!) = 1

⇒ k!(p − k)!  (p − 1)!
(1)

 
 p
⇒ p
k
 
p
⇒ π = 0Fp .
k
AGRÉGATION EXTERNE 187

ii.
X p − 1 = P Q ⇒ P (1)Q(1) = 1p − 1 = 0
et comme π̂ est un morphisme d’anneaux de Z[X] sur Fp [X] :

π̂(X p − 1) = π̂(P )π̂(Q).

Le résultat de la question précédente donne alors

π̂(P )π̂(Q) = (X − 1Fp )p

et comme cette égalité a lieu dans l’anneau factoriel Fp [X] (car


Fp est un corps) où bien sûr X − 1Fp est irréductible (car de
degré 1), on en déduit

∃k ∈ [[0, p]], π̂(P ) = (X − 1Fp )k et π̂(Q) = (X − 1Fp )p−k .

D’une part

k = 0 ⇒ π̂(P ) = 1Fp

⇒ ∃P1 ∈ Z[X], P = pP1 + 1

⇒ P1 = 0 et P = 1 car P est unitaire.

k = 0 est donc incompatible avec l’hypothèse que P est non


constant, donc k = 0.
On a alors

π(P (1)) = π̂(P )(1Fp ) = (1Fp − 1Fp )k = 0kFp = 0Fp

et donc P (1) est un multiple de p (noter si besoin que le carac-


tère entier de P (1) est garanti par le double fait que P ∈ Z[X]
et 1 ∈ Z).
D’autre part, k = p amène, de manière symétrique (sur Q cette
fois-ci), une contradiction de même nature et on obtient pour
les mêmes raisons que Q(1) est également multiple de p.

iii. Raisonnons par l’absurde et supposons que Φp (X) = P Q où P


et Q sont unitaires et non constants dans Z[X].
188 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

p ayant pour seul diviseur 1 et lui-même, on sait d’après (a) que


X p − 1 = Φ1 (X)Φp (X) = (X − 1)Φp (X)
et on peut donc doublement écrire, par associativité et commu-
tativité de la multiplication dans Z[X] :
X p − 1 = ((X − 1)P ) Q = ((X − 1)Q) P
avec (X − 1)P et (X − 1)Q unitaires et non constants dans
Z[X].
Le résultat de ii. appliqué à ((X − 1)P ) Q (resp. ((X − 1)Q) P )
nous dit alors que Q(1) (resp. P (1)) est multiple de p.
p−1

Comme par ailleurs Φp (X) = X k , on a
k=0

p = Φp (1) = P (1)Q(1)
et p serait ainsi un multiple de p2 , ce qui est absurde.
Φp ne se décompose donc pas comme produit de deux poly-
nômes unitaires et non constants de Z[X], il est donc irréduc-
tible dans Z[X] et donc également dans Q[X] d’après la version
du lemme de Gauss rappelée dans le sujet.

iv.
0 = ζ p − 1 = (ζ − 1)Φp (ζ)
donc Φp (ζ) = 0 (car ζ = 1).
Φp étant irréductible dans Q[X] (iii.) et unitaire par définition,
il est le polynôme minimal de ζ dans Q.
deg (Φp ) = p − 1 donc Q(ζ)/Q est une extension de corps de
degré p − 1.

4. Matrices compagnons.
(a) Les n − 1 premières colonnes de la matrice CP donnent immédiate-
ment le résultat suivant :
∀i ∈ [[1, n − 1]], CP ei = ei+1
et on obtient ainsi par itérations (inutile de faire une lourde récur-
rence finie, tout le monde a compris avec ce qui précède que vous
savez mener à bien une récurrence) :
∀i ∈ [[1, n − 1]], CPi e1 = ei+1 .
AGRÉGATION EXTERNE 189

Soit Q ∈ C[X] non nul et de degré inférieur ou égal à n − 1.


n−1

On peut écrire Q = qi X i avec (qi )1in−1 ∈ Cn−1 \{(0, . . . , 0)}.
i=0

Ainsi
n−1 

Q(CP )e1 = qi CPi e1
i=0

n−1
  
= qi CPi e1
i=0

n−1

= qi ei+1
i=0

n

= qi−1 ei = 0
i=1

car la famille (ei )1in est libre en tant que base canonique de Cn .
De plus,

Q(CP )e1 = 0 ⇒ Q(CP ) = 0.

On sait donc que CP n’annule aucun polynôme non nul de degré au


plus n − 1 : le degré du polynôme minimal de CP est donc au moins
n.
Par ailleurs, le théorème de Cayley-Hamilton nous assure que
le polynôme caractéristique de CP (qui est de degré n) est un poly-
nôme annulateur de CP (le polynôme minimal divise ainsi toujours
le polynôme caractéristique) : le degré du polynôme minimal de CP
est donc au plus n. Il est donc égal à n.

(b) On utilise un résultat de la question précédente pour se ramener à


CP en dont les coordonnées sont indiquées par la dernière colonne de
190 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

CP :
CPn e1 = CP CPn−1 e1

= C P en

n−1

= − ai ei+1
i=0

n−1

= − ai CPi e1
i=0
donc  
n−1

CPn + ai CPi e1 = 0
i=0
c’est-à-dire
P (CP )e1 = 0.
Par ailleurs, comme CP et P (CP ) commutent (la matrice CP ∈
Mn (C) commute avec chaque élément de la sous-algèbre de matrices
C[CP ] qu’elle engendre) :

∀i ∈ [[1, n]], P (CP )ei = P (CP )CPi−1 e1

= CPi−1 P (CP )e1

= CPi−1 0 = 0,

ce qui prouve que P (CP ) s’annule sur la base E de Cn . P (CP ) est


donc la matrice nulle. P est donc un polynôme annulateur unitaire
et de degré n de CP et on a vu dans la question précédente que le
polynôme minimal de CP est de degré n. P est donc le polynôme
minimal de CP .
 
(c) deg χCP = n = deg(P ).
Par définition, χCP est unitaire. De plus, χCP annule CP comme déjà
évoqué plus haut (théorème de Cayley-Hamilton) donc χCP = P ,
par unicité du polynôme minimal.

(d) Si M est triangulaire supérieure alors Q(M ) aussi (l’ensemble des


matrices complexes triangulaires supérieures (resp. inférieures) est
AGRÉGATION EXTERNE 191

stable par somme et par produit et donc par évaluation par tout po-
lynôme à coefficients complexes : c’est une sous-algèbre de Mn (C)).
De plus, M étant triangulaire, les éléments diagonaux de M sont ses
valeurs propres α1 , . . . , αn . Les éléments diagonaux de Q(M ) sont
donc Q(α1 ), . . . , Q(αn ) (on ne peut en revanche rien dire des éléments
extra-diagonaux situés au-dessus de la diagonale de Q(M )) et ce sont
donc les valeurs propres de Q(M ). Il vient alors
n

χQ(M ) = (X − Q(αi )) .
i=1

De manière générale, toute matrice M ∈ Mn (C) est trigonalisable


(le polynôme caractéristique d’une telle matrice étant toujours scindé
car C est algébriquement clos : tout polynôme complexe se décom-
pose comme produit de polynômes complexes de degré 1) et on peut
donc écrire

∃P ∈ GLn (C), ∃T ∈ Mn (C), T triangulaire supérieure, M = P T P −1 .

On a alors
n

χ M = χT = (X − αi )
i=1
(les deux matrices équivalentes M et T ont en particulier même po-
lynôme caractéristique et celui de M est connu à partir de ses valeurs
propres α1 , . . . , αn ) et

Q(M ) = P Q(T )P −1

car
∀n ∈ N, (P T P −1 )n = P T n P −1
et

∀A, B ∈ Mn (C), ∀α ∈ C, P (αA + B)P −1 = αP AP −1 + P BP −1 .

Ainsi, le polynôme caractéristique étant invariant sur les classes de


conjugaison des matrices de Mn (C) (propriété qu’on vient d’utiliser
pour M et T sans la décrire en ces termes) :

χQ(M ) = χQ(T )

et
n

χQ(T ) = (X − Q(αi ))
i=1
192 CHAPITRE 13 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2019

car T est triangulaire supérieure.


On a donc bien
n
χQ(M ) = (X − Q(αk )) .
k=1
n

(e) P = (X − αk ) est le polynôme caractéristique et le polynôme
k=1
minimal de sa matrice compagnon CP (noter que P est bien unitaire).
Ainsi,
n

χCP = (X − αk )
k=1
et
n

χQ(CP ) = (X − Q(αk ))
k=1

d’après (d).
Or la définition de CP donne immédiatement

P ∈ A[X] ⇒ CP ∈ Mn (A)

et
Q ∈ A[X], CP ∈ Mn (A) ⇒ Q(CP ) ∈ Mn (A)

⇒ χQ(CP ) ∈ A[X]
(car χQ(CP ) est le déterminant de XIn − Q(CP )), ce qui prouve que

n

(X − Q(αk )) ∈ A[X].
k=1
Mathématiques Générales, 2018

Chapitre 14

Mathématiques Générales, 2018

Thèmes
algèbre matricielle (valeur propre, diagonalisabilité,
exponentielle de matrice, matrices semblables, matrice inversible)
polynômes (racine, polynôme d’interpolation)
théorie des représentations (représentations équivalentes)
théorie des groupes (groupe abélien, morphisme de groupes)

Résultat majeur
décomposition de Dunford
194 CHAPITRE 14 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2018

Remarques du jury
Les trois premiers exercices sont des questions de
cours, les deux suivants des applications immédiates : ils sont l’occasion
de se mettre en train et de montrer aux correcteurs ses compétences et
qualités.
1. L’erreur consiste à croire que dans la décomposition de Dunford
d’une matrice triangulaire, D est nécessairement la partie diagonale et
qu’une matrice nilpotente N est nécessairement triangulaire stricte.
2. Un calcul formel purement algébrique ne peut suffire : une somme
infinie et donc un passage à la limite sont en jeu. Plus qu’une démons-
tration par récurrence de (P AP −1 )k = P Ak P −1 , il faut justifier le
passage à la limite par un argument de continuité.
3. Le noyau doit être décrit dans le cas général. Parler de dimension
finie ne suffit pas à justifier la bijectivité. La formulation « en déduire
» est impérative et on ne peut pas contourner le recours à l’algèbre
linéaire en invoquant l’interpolation de Lagrange.
4. On ne peut justifier la formule ρ(k) = ρ(1)k par une écriture
ρ(1 + · · · + 1) = . . . , quand k < 0.
dans M  = P M P −1 , M  et M ne sont pas seulement équivalentes mais
plus précisément semblables ou conjuguées.
5. Les arguments doivent être présentés de manière structurée. Il faut
vérifier que la loi est interne, la liste complète des axiomes (associa-
tivité, neutre, inverse, commutativité) et justifier l’appartenance du
neutre et de l’inverse à G. 

Notations
On notera [A, B] := AB − BA le commutateur de A, B ∈ Mn (C) (l’ap-
plication (A, B) → [A, B] est donc bilinéaire sur Mn (C)).

Le spectre de A ∈ Mn (C) sera noté SpA et son polynôme caractéris-


tique
χA (X) := det(XIn − A).
On rappelle le théorème suivant (décomposition de Dunford d’une
matrice) : ∀A ∈ Mn (C), ∃!(S, N ) ∈ Mn (C)2 ,
— A = S + N,
— [S, N ] = 0,
— S est diagonalisable et N est nilpotente.
On a alors :
AGRÉGATION EXTERNE 195

— χ A = χS ,
— SpA = SpS,
— S, N ∈ C[A], autrement dit, on peut écrire S = P (A) et N = Q(A)
avec P, Q ∈ C[X].
On rappelle que l’exponentielle de matrices est l’application

exp : Mn (C) → GLn (C)

définie par la formule


 1
exp A := Ak ,
k!
k0

et que c’est une application de l’espace vectoriel normé Mn (C) dans lui-
C∞
même, telle que, si [A, B] = 0, on a

exp(A + B) = (exp A)(exp B).

Énoncé
1. Donner une décomposition de Dunford de la matrice
 
1 1
A := ∈ M2 (C).
0 a

Indication : on discutera en fonction de a ∈ C.


2. Justifier la relation

exp(P AP −1 ) = P (exp A)P −1 ,

où A ∈ Mn (C) et P ∈ GLn (C).


3. Soit n un entier, n  1 et a1 , . . . , an ∈ C des complexes.
Déterminer le noyau de l’application linéaire

P → (P (a1 ), . . . , P (an ))

de Cn−1 [X] dans Cn et en déduire que, si les ai sont deux à deux dis-
tincts :

∀(b1 , . . . , bn ) ∈ Cn , ∃!P ∈ Cn−1 [X], P (a1 ) = b1 , . . . , P (an ) = bn .

On ne cherchera pas à donner une forme explicite au polynôme d’inter-


polation P .
196 CHAPITRE 14 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2018

4. Montrer que toute représentation

ρ : Z → GLn (C)

est de la forme
k → M k
pour une certaine matrice M ∈ GLn (C).
À quelles conditions deux telles représentations sont-elles équivalentes ?
5. Soit G un groupe abélien noté additivement.
On note Ĝ l’ensemble des morphismes de G dans le groupe multiplicatif
C∗ , c’est-à-dire des applications f : G → C∗ telles que

∀x, y ∈ G, f (x + y) = f (x)f (y).

Pour tout (f1 , f2 ) ∈ Ĝ2 , on note

f1 f2 : G → C∗

l’application
x → f1 (x)f2 (x).
Montrer qu’on munit ainsi Ĝ d’une structure de groupe abélien.

Corrigé
1. Si a = 1 alors la matrice A possède deux valeurs propres distinctes 1 et a.
Elle est donc diagonalisable et on obtient la décomposition de Dunford
en posant S = A et N = 0 (la matrice nulle). On a alors

A = S + N,

[S, N ] = A × 0 − 0 × A = 0,
S est diagonalisable (puisque A l’est) et N est nilpotente (car N 1 = 0).
Si par contre a = 1 alors A n’est pas diagonalisable car elle n’a qu’une
valeur propre égale à 1 mais A = I2 . De manière générale, la seule matrice
diagonalisable de taille n ∈ N∗ n’ayant qu’une seule valeur propre λ est la
matrice scalaireλIn . La
 décomposition de Dunford de A est donnée par
0 1
S = I2 et N = . On a alors[S, N ] = I2 ×N −N ×I2 = N −N = 0,
0 0
S est diagonalisable (puisqu’elle est diagonale), N est nilpotente (car
N 2 = 0) et bien sûr A = S + N .
AGRÉGATION EXTERNE 197

2. A désigne désormais un élément quelconque de Mn (C) et P un élément de


GLn (C). L’application φ : M → P M P −1 est bien sûr un endomorphisme
du groupe additif Mn (C) (dis plus simplement, elle est linéaire) mais elle
est bien mieux que ça : elle définit un morphisme d’algèbre sur Mn (C) :
∀M, N ∈ Mn (C), ∀λ ∈ R,

φ(M + N ) = φ(M ) + φ(N ),

φ(λM ) = λφ(M ),

φ(M N ) = φ(M )φ(N ).

Une récurrence aisée (qu’on peut ne pas rédiger) donne en particulier

∀k ∈ N, φ(M k ) = φ(M )k ,

c’est-à-dire précisément, pour M = A :


 k
∀k ∈ N, P Ak P −1 = P AP −1 .

On a ainsi
 N
 N
 1 k  1  k
−1
∀N ∈ N, P A P = P AP −1 .
k! k!
k=0 k=0

L’application M → P M P −1 étant de plus continue (toute application


linéaire sur un e.v. de dimension finie est continue. Ici Mn (C) est un
C-e.v. de dimension n2 ), on peut passer à la limite dans l’égalité qu’on
vient d’obtenir et écrire
 N 
 1
P (exp A)P −1 = P lim Ak P −1
N →+∞ k!
k=0

 N

 1 k
= lim P A P −1
N →+∞ k!
k=0

N
 1  k
= lim P AP −1 = exp(P AP −1 ).
N →+∞ k!
k=0

3. Notons
Cn−1 [X] → Cn
ψ: P → (P (a1 ), . . . , P (an )) .
198 CHAPITRE 14 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2018

Un polynôme P ∈ Cn−1 [X] est dans le noyau de l’application linéaire ψ


ssi les a1 , . . . , an sont des racines de P , ce qui revient à dire que P est
divisible par chacun des polynômes X − a1 , . . . , X − an , ou encore par
leur PPCM, c’est-à-dire le produit des X − ai en ne prenant chaque ai
une seule fois (par exemple, si a1 = a2 , ce PPCM ne comprendra que le
facteur X − a1 et non pas le facteur (X − a1 )(X − a2 ) = (X − a1 )2 ).
Il existe un entier p ∈ N∗ , p  n et p nombres complexes distincts
a1 , . . . , ap tels que {a1 , . . . , ap } = {a1 , . . . , an }. On peut alors écrire, si
pn−1 :
 p 

P ∈ Kerψ ⇔ P ∈ (X − ai ) Cn−1−p [X].
i=1

Si p = n (les a1 , . . . , an sont alors deux à deux distincts), un polynôme


non nul de degré au plus n − 1 ne pouvant avoir au moins n racines, il est
clair que l’application linéaire ψ est injective (le seul élément de Cn−1 [X]
ayant au moins n racines est le polynôme nul).
Dans ce dernier cas, ψ est alors une application linéaire injective entre
deux C-espaces vectoriels de même dimension finie n, ce qui fait de ψ
une application bijective de Cn−1 [X] dans Cn et donne donc le résultat
attendu :

∀(b1 , . . . , bn ) ∈ Cn , ∃!P ∈ Cn−1 [X], P (a1 ) = b1 , . . . , P (an ) = bn .

Remarque : Cn−1 [X] est de dimension n et non pas n − 1 : il a pour


base canonique la famille (1, X, . . . , X n−1 ) de cardinal n.

4. Une représentation ρ est en particulier un morphisme de groupes (nous


sommes ici en présence d’une représentation du groupe additif Z. Le
groupe linéaire est lui multiplicatif). On a

∀k ∈ Z, ρ(k) = ρ(1)k

(penser par exemple que ρ(1 + 1) = ρ(1) × ρ(1) = ρ(1)2 ) et la matrice


recherchée est donc
M = ρ(1).
Si ρ et σ sont deux représentations équivalentes associées respectivement
à des matrices M et L, alors

∃P ∈ GLn (C), ∀k ∈ Z, σ(k) = P ρ(k)P −1 ,


AGRÉGATION EXTERNE 199

ce qui revient à écrire


 k
∃P ∈ GLn (C), ∀k ∈ Z, Lk = P M k P −1 = P M P −1 ,

ou encore
∃P ∈ GLn (C), L = P M P −1 .
(si c’est valable pour tout k ∈ Z, c’est évidemment valable en particulier
pour k = 1 et réciproquement, si L = P M P −1 , il est clair que pour
tout k ∈ Z, Lk = (P M P −1 )k , ce résultat pouvant se démontrer par une
simple récurrence).
ρ et σ sont donc des représentations équivalentes ssi leurs matrices res-
pectives L et M sont semblables.

Remarque : on prendra garde à ne pas confondre les notions de matrices


équivalentes et de matrices semblables. Soit L, M ∈ Mn (C).

L et M sont équivalentes ssi ∃P, Q ∈ GLn (C), L = P M Q

alors que

L et M sont semblables ssi ∃P ∈ GLn (C), L = P M P −1 .

Des matrices semblables sont toujours équivalentes (il suffit de nommer


Q la matrice P −1 ) mais des matrices semblables ne sont pas forcément
équivalentes.

5. Si (f1 , f2 ) ∈ Ĝ2 alors, par définition de f1 f2 , puis du fait que f1 et f2 sont


des morphismes et évidemment par associativité et commutativité du
produit dans C∗ (nous vous épargnons les subtils parenthésages mettant
en évidence pas à pas ces notions) puis à nouveau enfin par définition de
f1 f2 , on peut écrire :

∀x, y ∈ G, (f1 f2 ) (x + y) = f1 (x + y)f2 (x + y)

= f1 (x)f1 (y)f2 (x)f2 (y)

= f1 (x)f2 (x)f1 (y)f2 (y)

= (f1 f2 ) (x) (f1 f2 ) (y),

ce qui prouve que f1 f2 ∈ Ĝ et que la loi définie sur Ĝ est bien une loi de
composition interne sur Ĝ.
200 CHAPITRE 14 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2018

Il est clair, par (1) associativité et (2) commutativité de la multiplication


dans C∗ , que cette loi est associative et commutative :

∀f1 , f2 , f3 ∈ Ĝ, (f1 f2 )f3 = f1 (f2 f3 ) et f1 f 2 = f 2 f 1

car ∀x ∈ G, ∀f1 , f2 , f3 ∈ Ĝ, :

((f1 f2 )f3 ) (x) = (f1 f2 )(x)f3 (x)

= (f1 (x)f2 (x))f3 (x)

= f1 (x)(f2 (x)f3 (x))


(1)

= f1 (x) (f2 f3 ) (x)

= (f1 (f2 f3 )) (x)

et
(f1 f2 ) (x) = f1 (x)f2 (x) = f2 (x)f1 (x) = (f2 f1 ) (x).
(2)

L’élément neutre de Ĝ est l’application eĜ qui à tout x associe 1 :

G → C∗
eĜ : x → 1.

Pour un quelconque f ∈ Ĝ, posons

G → C∗
1
g : x → .
f (x)

On a alors g ∈ Ĝ car
1 1
∀x, y ∈ G, g(x + y) = =
f (x + y) f (x)f (y)

1 1
= × = g(x)g(y)
f (x) f (y)

et f g = eĜ , donc f est inversible d’inverse g.


On a donc bien muni Ĝ d’une structure de groupe abélien.
Mathématiques Générales, 2017

Chapitre 15

Mathématiques Générales, 2017

Thème
algèbre linéaire (matrice, rang, vecteur, application
linéaire, isomorphisme, espace vectoriel, dual d’un e.v.)

Résultat majeur
deux matrices sont équivalentes ssi elles
ont même rang

Matrices de rang 1

Remarques du jury
Souvent l’idée générale est présente mais la
rédaction trop imprécise. On attend d’un futur enseignant qu’il donne
de manière synthétique, claire et précise tous les arguments utilisés. Ne
pas tenter de justifier par une preuve générale la non-unicité : il suffit
de fournir un contre-exemple.
202 CHAPITRE 15 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2017

Dual de Mn,m (K)

Remarque du jury
Après avoir montré l’injectivité de f , il faut
rappeler qu’elle est linéaire pour pouvoir utiliser l’argument de dimen-
sions finies et égales des espaces de départ et d’arrivée.

Matrices associées à une application linéaire donnée

Remarques du jury
La formulation ouverte peut dérouter.
Une confusion entre matrice et application linéaire a mené des candi-
dats à écrire « en écrivant la matrice A dans une base bien choisie. . . ».
Il est absurde de parler de bases canoniques de E et F .

Notations
E et F désignent des espaces vectoriels de dimension finie sur un corps
commutatif K de caractéristique nulle. On considérera donc que K contient le
corps Q des nombres rationnels.
Pour un espace E on note E ∗ son dual qui est donc l’espace L(E, K) des
formes linéaires sur E.
On identifie les éléments de Kn à des vecteurs colonne, ou encore à des
éléments de Mn,1 (K). De même on identifie les éléments du dual de Kn , qui est
donc noté (Kn )∗ , à des vecteurs ligne, ou encore à des éléments de M1,n (K).
Pour A ∈ Mn (K) on note Tr(A) sa trace.

Énoncé
Matrices de rang 1
Vérifier qu’une matrice A ∈ Mn,m (K) est de rang 1 si et seulement s’il
existe deux vecteurs non nuls X ∈ Kn et Y ∈ (Km )∗ tels que A = XY .
Cette écriture est-elle unique ?
AGRÉGATION EXTERNE 203

Dual de Mn,m (K)


Pour un élément A de Mm,n (K) on note fA l’application de Mn,m (K) dans
K qui à une matrice M associe fA (M ) = Tr(AM ). Montrer que l’application
qui à A associe fA définit un isomorphisme entre Mm,n (K) et (Mn,m (K))∗ .

Matrices associées à une application linéaire donnée.


Soit u une application linéaire d’un espace E de dimension m dans un
espace F de dimension n, et A un élément de Mn,m (K). À quelle condition
existe-t-il une base B de E et une base C de F telles que MatB,C (u) = A ?

Corrigé
Matrices de rang 1
Une matrice A ∈ Mn,m (K) est de rang 1 ssi elle possède une ligne (resp.
une colonne) non nulle et si toutes ses autres lignes (resp. ses autres co-
lonnes) lui sont colinéaires. Soit A ∈ Mn,m (K) une matrice de rang 1. Notons
L1 , . . . , Ln les n lignes de A, Y une ligne non nulle de A et α1 , . . . , αn ∈ K tels
que pour tout 1  i  n, Li = αi Y . Posons alors X le vecteur colonne de Kn
dont les coefficients sont, dans cet ordre, α1 , . . . , αn . X n’est pas nul car l’un
des αi est égal à 1 (celui correspondant à la ligne de A égale à Y ). Il est clair
qu’on a A = XY .
Réciproquement, si il existe deux vecteurs non nuls X ∈ Kn et Y ∈ (Km )∗
tels que A = XY , toutes les lignes de la matrice A sont colinéaires à la ligne Y
et au moins l’une d’entre elle est non nulle car Y est non nulle et X possède au
moins un coefficient non nul. Cette écriture n’est pas unique puisqu’on peut à
loisir multiplier X par tout élément λ ∈ K non nul et diviser Y par λ. Puisque
le corps K contient Q, on peut par exemple choisir λ = 2. On a par exemple
      
1   1 1 2 1 1
1 1 = = .
1 1 1 2 2 2

Cette précision sur le fait que K contient Q peut sembler superflue. Elle ne
l’est pas. Que se passerait-il en effet si K = F2 = Z/2Z (K serait en particulier
de caractéristique 2) ? Dans ce cas, la décomposition serait unique. En fait, on
obtient la non unicité de la décomposition dès que le corps K n’est pas le corps
F2 : il contient alors un élément non nul distinct de 1 et on peut choisir pour
λ cet élément.
204 CHAPITRE 15 : MATHÉMATIQUES GÉNÉRALES 2017

Dual de Mn,m (K)


Soit un élément A de Mm,n (K). La linéarité de fA sur Mn,m (K) est évi-
dente et résulte de la linéarité de la multiplication à gauche par une matrice A
donnée et de la linéarité de la trace. On peut si on préfère écrire le détail des
calculs dont on vient d’exprimer la paraphrase ci-dessus :

∀M, N ∈ Mn,m (K), ∀λ ∈ K,

fA (M + λN ) = Tr(A(M + λN ))

= Tr(AM + λAN )

= Tr(AM ) + λTr(AN )

= fA (M ) + λfA (N ).

fA est de plus de manière évidente à valeurs dans K, ce qui fait donc bien de
fA un élément de (Mn,m (K))∗ .
L’application f qui à A associe fA est linéaire pour les mêmes raisons que
fA est linéaire. En voici le détail :
∀A, B ∈ Mm,n (K), ∀λ ∈ K, ∀M ∈ Mn,m (K),

f (A + λB)(M ) = fA+λB (M )

= Tr((A + λB)M )

= Tr(AM + λBM )

= Tr(AM ) + λTr(BM )

= fA (M ) + λfB (M )

= (f (A) + λf (B)) (M ),

ce qui prouve que

∀A, B ∈ Mm,n (K), ∀λ ∈ K, f (A + λB) = f (A) + λf (B)

et donc la linéarité de f . Remarquons maintenant que Mm,n (K) et (Mn,m (K))∗


sont tous deux de dimension finie mn. Il ne reste alors qu’à montrer que f
est injective pour en déduire sa bijectivité (toute application linéaire injective
entre deux espaces vectoriels de même dimension finie est bijective. Ce n’est
bien sûr pas valable en dimension infinie). Soit A une matrice non nulle de
Mm,n (K). Montrons que fA n’est pas l’application nulle. Puisque A n’est pas
nulle, elle contient un coefficient aij = 0 situé sur une ligne i et une colonne j. Il
suffit alors de choisir pour M ∈ Mn,m (K) la matrice dont tous les coefficients
sont nuls sauf celui situé sur la ligne j et la colonne i. La matrice produit
AM ∈ Mm (K) ainsi obtenue n’a qu’un seul terme diagonal non nul égal à aij .
On a donc Tr(AM ) = aij = 0.
Nous avons ainsi prouvé que A non nulle entraîne fA non nulle. Le noyau
de l’application linéaire f est donc restreint à la matrice nulle, ce qui fait bien
de f une application injective. L’application f qui à A associe fA définit donc
un isomorphisme d’espaces vectoriels entre Mm,n (K) et (Mn,m (K))∗ .

Matrices associées à une application linéaire donnée.


Il s’agit ici d’une véritable question de cours. Si on note U la matrice de u
dans des bases données respectives B et C de E et F , changer de base sur E
(passer de la base B à une nouvelle base B  revient à multiplier U à droite par
une matrice inversible Q ∈ Mm (K) et changer de base sur F (passer de la base
C à une base C  ) revient à multiplier U à gauche par une matrice inversible
P ∈ Mm (K). On a alors l’égalité

U  = P U Q = MatB ,C  (u)

et U  est nécessairement de même rang que U (multiplier par des matrices


inversibles n’affecte pas le rang). Il est donc nécessaire que la matrice A soit
de même rang que la matrice U , c’est-à-dire de même rang que le morphisme
u. Cette condition est suffisante car deux matrices de même rang sont toujours
équivalentes : si A et U ont même rang, il existe des matrices inversibles P
et Q telles que A = P U Q et A représente alors la matrice de u dans des
bases bien choisies (les matrices P et Q pouvant toutes les deux êtres vues
comme des matrices de changement de base. Il faut prendre garde, bien qu’ici
ce ne soit d’aucun danger, que l’une est une matrice de changement de base de
l’ancienne base vers la nouvelle base alors que l’autre est l’inverse de la matrice
de changement de base de la nouvelle base vers l’ancienne base. Si on veut
que les deux matrices soient dans le même sens, c’est-à-dire des matrices de
changement de base des anciennes bases vers les nouvelles bases, il conviendrait
de faire apparaître une puissance −1 sur l’une d’entre elles. On pourra donc
être plus précis que nous n’avons décidé de l’être, cela ne nous ayant pas semblé
indispensable).
206 INTERMÈDE

Figure 15.1 – Un carré dans un carré a .

a. Source d’une démonstration parmi les plus simples du théorème de Pythagore,


reposant sur l’identité remarquable (a + b)2 = a2 + 2ab + b2 et sur le principe que le tout est
égal à la somme de ses parties. Cette figure donne la désagréable impression de ne pas être
droite, de pencher vers la gauche ; ce n’est qu’une illusion d’optique.
Agrégation externe : analyse et probabilités

Quatrième partie

Agrégation externe :
analyse et probabilités
Analyse et Probabilités, 2021

Chapitre 16

Analyse et Probabilités, 2021

Question 1

Thèmes
analyse (suite de fonctions, convergence simple,
convergence uniforme, continuité)
topologie (norme)

Résultat majeur
convergence uniforme d’une suite de
fonctions

Énoncé
1
Soit n ∈ N\{0} et hn : x ∈ R → x + . Montrer que la suite (hn )n∈N\{0}
n
converge uniformément sur R vers une fonction h que l’on précisera.

Montrer que la suite (h2n )n∈N\{0} converge simplement sur R vers h2 , mais
que la convergence n’est pas uniforme sur R.
210 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

Soit (fn )n∈N et (gn )n∈N deux suites d’éléments de Cb (R; C) qui convergent
uniformément sur R, vers f et g respectivement. Montrer que la suite (fn gn )n∈N
converge uniformément vers f g sur R.

Corrigé
1
On peut écrire ∀x ∈ R, |hn (x) − x| = −→ 0, c’est-à-dire
n n→+∞
∀ε > 0, ∃Nε ∈ N∗ , n  Nε ⇒ ∀x ∈ R, |hn (x) − x| < ε

et les puristes
 pourront,
 mais c’est inutile, préciser que le plus petit tel Nε
1
est Nε = + 1 . La suite (hn )n∈N\{0} converge donc uniformément vers la
ε
fonction identité x → x sur R. La fonction carrée étant continue, il suit im-
médiatement de la convergence simple de (hn )n∈N\{0} que la suite (h2n )n∈N\{0}
converge simplement sur R vers la fonction carré x → x2 sur R. On peut écrire
cela en détail sous la forme :
    
 1 2   2x 1 
 2
2 2
∀x ∈ R, |hn (x) − x | =  x + − x  =  + 2  −→ 0
 n  n n n→+∞

ou encore (mais on se gardera bien ici de chercher le plus petit tel Nε,x , bien
que ce soit possible en étudiant un polynôme du second degré en n)
   
 2x 1
∀ε > 0, ∀x ∈ R, ∃Nε,x ∈ N∗ , n  Nε,x ⇒ |h2n (x) − x2 | =  + 2  < ε .
n n
La convergence n’est pas uniforme sur R car
1
∀n ∈ N∗ , h2n (n) − n2 = 2 + > 2.
n2
On peut écrire plus en détail :
 
 2x 1 
∃ ε > 0, ∀N ∈ N , ∃ x ∈ R, ∃ n 

N, |h2n (x) 2 
−x |= + 2 > ε
n n
en posant, par exemple, ε = 1, n = N et x = N .
Remarque : nous venons de démontrer la négation de la proposition
traduisant la convergence uniforme, c’est-à-dire la négation de
 
 2x 1 
2 2 
∀ ε > 0, ∃N ∈ N , ∀ x ∈ R, ∀ n  N, |hn (x) − x | = 

+ 2  < ε.
n n
AGRÉGATION EXTERNE 211

Pour la deuxième question, commençons par traduire les hypothèses :


f est bornée sur R : ∃Mf > 0, ∀x ∈ R, |f (x)|  Mf ,
g est bornée sur R : ∃Mg > 0, ∀x ∈ R, |g(x)|  Mg ,
(fn )n∈N converge uniformément vers f :

∀ε > 0, ∃Nf,ε ∈ N, ∀n  Nf,ε , ∀x ∈ R, |fn (x) − f (x)|  ε.

(gn )n∈N converge uniformément vers g :

∀ε > 0, ∃Ng,ε ∈ N, ∀n  Ng,ε , ∀x ∈ R, |gn (x) − g(x)|  ε.

Posons Nε = max(Nf,ε , Ng,ε ) pour que les deux propriétés précédentes soient
simultanément satisfaites. Il faut maintenant faire un tour de passe-passe de
calcul assez habituel en faisant apparaître des termes du type fn − f et gn − g
et en utilisant (I.T.) l’inégalité triangulaire pour le module (et bien sûr la
multiplicativité du module). En voici le détail. Soit x ∈ R, ε > 0 et n  Nε :

|(fn gn )(x) − (f g)(x)| = |fn (x)gn (x) − f (x)g(x)|

= |(fn (x) − f (x))gn (x) + f (x)(gn (x) − g(x))|



= (fn (x) − f (x))(gn (x) − g(x))

+(fn (x) − f (x))g(x) + f (x)(gn (x) − g(x))

 |fn (x) − f (x)| × |gn (x) − g(x)|


(I.T.)
+|fn (x) − f (x)| × |g(x)|
+|f (x)| × |gn (x) − g(x)|

 ε2 + ε × Mg + Mf × ε = ε(ε + Mf + Mg ).

Il suffit alors de remarquer que la quantité par laquelle nous venons de majorer
est arbitrairement proche de 0, c’est-à-dire plus précisément :

∀ε > 0, ∃ε > 0, ε(ε + Mf + Mg )  ε .

Les jusqu’au-boutistes seront heureux de voir qu’on peut poser


 
ε
ε = min ,1 .
1 + M f + Mg

En conclusion, (fn gn )n∈N converge bien uniformément vers f g sur R.


212 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

Question 2

Thèmes
analyse (caractérisation séquentielle de la continuité,
intégration, transformée de Laplace)
algèbre linéaire (continuité et norme d’un endomorphisme)
topologie (norme infinie)

Résultat majeur
théorème de continuité d’une intégrale à
paramètre

Remarques du jury
Justifier l’existence des limites présentes  +∞ 
implicitement dans les notations symboliques 0 f (t)dt et +∞ n=0 an .
Le jury attend de futurs enseignants une rédaction soignée qui convainc
de la compréhension approfondie et de la bonne maîtrise de ces ques-
tions de base ne présentant aucune difficulté technique particulière.

Énoncé
Soit α ∈ C tel que Re(α) > 0.
(a) Pour toute fonction f ∈ Cb (R, C) et pour tout réel t ∈ R, montrer que
l’expression notée
 +∞
(Kα f ) (t) = e−αs f (t + s)ds
0

est bien définie.


(b) On fixe f ∈ Cb (R, C) et t ∈ R.
Soit une suite réelle (tn )n∈N telle que lim tn = t.
n→+∞
AGRÉGATION EXTERNE 213

Montrer que
lim (Kα f )(tn ) = (Kα f )(t).
n→+∞

(c) Montrer que l’application Kα qui à f ∈ Cb (R, C) associe la fonction Kα f


est un endomorphisme continu de (Cb (R, C), || · ||∞ ).
(d) Calculer
inf{c ∈]0, +∞[ , ∀f ∈ Cb (R, C), ||Kα f ||∞  c||f ||∞ }.

Corrigé
Remarquons avant de commencer que la fonction Kα f ressemble étrange-
ment à la transformée de Laplace de f qui aurait elle cette forme-ci :
 +∞
L (f )(p) = e−ps f (s)ds.
0

En fait, il s’agit dans cet exercice d’étudier la transformée de Laplace


de la fonction f avancée de t (si t > 0. Sinon on dirait plutôt retardée de |t|),
mais sous l’angle de la variable t plutôt que de l’habituelle variable p (qui est
ici notée α).
(a) f est bornée sur R :
∃M > 0, ∀x ∈ R, |f (x)|  M
et on pourrait même se permettre de poser M = ||f ||∞ .
On a donc
 
∀s ∈ R+ , ∀t ∈ R, e−αs f (t + s) = e−Re(α)s |f (t + s)|

 M e−Re(α)s .
On doit pour cela avoir absolument à l’esprit que
   
 
∀s ∈ R, ∀α ∈ C, e−αs  = e−Re(α)s−iIm(α)s 
 
 
= e−Re(α)s × e−iIm(α)s 
   
   
= e−Re(α)s  × e−iIm(α)s 

= e−Re(α)s .
214 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021
 +∞
La positivité de Re(α) entraînant la convergence de e−Re(α)s ds (il
0
s’agit d’une intégrale usuelle qu’on retrouve notamment dans l’étude, en
probabilité, dela bien nommée loi exponentielle), on peut se permettre
+∞
d’affirmer que e−αs f (t + s)ds converge.
0

(b) Cette question consiste à montrer la continuité de Kα f sur R. Vu l’expres-


sion de Kα f , le théorème de continuité des intégrales à paramètre
est incontournable.
Les nombreuses hypothèses nécessaires pour l’utiliser sont satisfaites :
— f est continue sur R et donc
— ∀s ∈ R+ , t → f (t + s) est continue sur R et ∀t ∈ R, s → f (t + s) est
continue sur R+ ,
— la fonction exponentielle est continue sur C et donc, par produit :
— ∀s ∈ R+ , t → e−αs f (t + s) est continue sur R et
— ∀t ∈ R, s → e−αs f (t + s) est continue sur R+ ,
— on a de plus, comme précédemment

∀t ∈ R, ∀s ∈ R+ , |e−αs f (t + s)|  M e−Re(α)s

et
— s → M e−Re(α)s intégrable sur R+ .

Le théorème de continuité des intégrales à paramètre permet de conclure


quant à la continuité de Kα f sur R et on a donc bien

lim tn = t ⇒ lim (Kα f )(tn ) = (Kα f )(t).


n→+∞ n→+∞

(c) Kα : f → Kα f est, d’après la question (a), bien définie sur Cb (R, C) et


d’après la question (b), à valeur dans Cb (R, C). Il est de plus parfaitement
évident que c’est une application linéaire sur Cb (R, C) (on peut tout de
même justifier cela rapidement en évoquant la linéarité de l’intégrale et la
linéarité de l’application f → f g pour une fonction g fixée). Kα est donc
un endomorphisme de Cb (R, C).
Reste à voir la continuité de Kα (attention à ne pas confondre continuité
de f , continuité de Kα f et continuité de Kα ).
On l’obtient à l’aide de la majoration suivante par (1) inégalité triangulaire
AGRÉGATION EXTERNE 215

pour les intégrales et (2) majoration de |f | par ||f ||∞ :


 +∞ 
 
∀t ∈ R, |Kα f (t)| =   e −αs
f (t + s)ds
0
 +∞  
 e−αs f (t + s) ds
(1) 0

 +∞
 ||f ||∞ e−Re(α)s ds
(2) 0

1
= ||f ||∞
Re(α)

avec ||f ||∞ = supx∈R |f (x)| ∈ R+ (par hypothèse f est bornée sur R+ ).
L’endomorphisme Kα est donc bien continu sur (Cb (R, C), || · ||∞ ).
Rappelons à ce propos que la majoration précédente permet en effet de
voir que si une suite (fn )n∈N est de limite nulle, il en est de même de la
suite (Kα fn )n∈N , ce qui prouve la continuité de Kα en 0 et, par linéarité
de Kα , la continuité de Kα sur Cb (R, C). En résumé, pour montrer qu’un
endomorphisme d’un e.v.n. E ou plus généralement une application linéaire
u entre deux e.v.n. E et F est continue sur E, il suffit de montrer qu’elle
est continue en 0E , et cela revient à obtenir une majoration du type

∃c > 0, ∀x ∈ E, ||u(x)||F  c||x||E ,

c’est-à-dire à montrer que u est lipschitzienne.

(d) La borne inférieure que l’on doit calculer est précisément ce qu’on définit
habituellement comme la norme de l’endomorphisme Kα (plus exactement
la norme induite sur L (Cb (R, C)) par la norme || · ||∞ sur Cb (R, C)). Nous
noterons cette borne inférieure ||Kα ||.
Les calculs vus dans la question précédente permettent déjà d’affirmer que
1
||Kα ||  .
Re(α)

En l’absence de meilleure idée (et peut-être par paresse intellectuelle :


pourquoi chercher autre chose ?), essayons de montrer que l’on a l’égalité
1
||Kα || = .
Re(α)
216 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

Pour cela, il suffit de trouver une fonction non nulle f ∈ Cb (R, C) telle que

1
||Kα f ||∞ = ||f ||∞ .
Re(α)

La difficulté consiste à bien comprendre que si dans la majoration obtenue


dans la question précédente, seule la partie réelle de α apparaît, c’est parce
qu’on a utilisé l’inégalité triangulaire pour les intégrales (on a majoré en
faisant passer le module à l’intérieur de l’intégrale, ce qui a fait disparaître
la partie imaginaire de α du calcul). Il faut donc trouver une fonction f
qui joue le rôle d’éliminatrice de Im(α), c’est-à-dire plus précisément qui
fait disparaître, par produit, le facteur e−isIm(α) . Il suffit alors de poser f
telle que
∀t ∈ R, f (t) = eitIm(α) .
f ainsi définie est bien une fonction continue sur R, à valeur dans C et
bornée puisque ∀t ∈ R, |f (t)| = 1, ce qui permet de plus de donner sa
norme ||f ||∞ = 1.
On a alors :
 +∞
∀t ∈ R, Kα f (t) = e−αs f (t + s)ds
0
 +∞
= e−(Re(α)+iIm(α))s ei(t+s)Im(α) ds
0
 +∞
= e−Re(α)s eitIm(α) ds
0
 +∞
= eitIm(α) e−Re(α)s ds
0

1
= eitIm(α)
Re(α)

et finalement, puisque ∀t ∈ R, |eitIm(α) | = 1 et Re(α) > 0, on a

1
∀t ∈ R, |Kα f (t)| = ,
Re(α)

d’où
1 1
||Kα f ||∞ = = ||f ||∞ .
Re(α) Re(α)
AGRÉGATION EXTERNE 217

Cette dernière égalité permet donc d’affirmer que la constante cherchée


1
||Kα || ne peut pas être strictement inférieure à , c’est-à-dire
Re(α)
1
||Kα ||  .
Re(α)

Comme on sait qu’elle vérifie (d’après la question précédente, comme nous


l’avons dit en introduction)
1
||Kα ||  ,
Re(α)

on a bien l’égalité
1
||Kα || = .
Re(α)
Remarque : une telle fonction f n’est pas toujours aisée à trouver et
|Kα fn |
on aurait pu plutôt chercher une suite (fn ) telle que le quotient
||fn ||∞
1
converge vers le coefficient attendu .
Re(α)
218 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

Question 3

Thèmes
analyse (équation différentielle du premier ordre)
topologie (norme)

Résultat majeur
théorème de Cauchy pour les équations
différentielles

Remarques du jury
Les équations différentielles linéaires du
premier ordre à coefficients constants et second membre apparaissent
naturellement en physique, biologie, économie etc., et le calcul rigou-
reux de la forme des solutions est enseigné en L1 de façon directe et
sans longs préliminaires théoriques. Invoquer, avec leurs hypothèses, le
théorème de Cauchy-Lipschitz ou le théorème de Cauchy linéaire
pour justifier de l’existence et de l’unicité des solutions.

Énoncé
Soit β ∈ C et soit f ∈ Cb (R, C). Le but de ce groupe de questions est
d’étudier les fonctions y de R dans C qui sont de classe C 1 et qui sont solutions
de l’équation différentielle

(Eβ,f ) ∀t ∈ R, y  (t) = βy(t) + f (t).

(a) Montrer que pour tout z0 ∈ C il existe une unique solution y de (Eβ,f )
telle que y(0) = z0 et donner une expression explicite de cette solution.
(b) Soit y une solution de (Eβ,f ). On suppose Re(β) > 0. Soit t0 ∈ R. Pour
tout réel t  t0 , exprimer e−βt y(t) − e−βt0 y(t0 ) comme une intégrale. En
AGRÉGATION EXTERNE 219

déduire l’existence de lim e−βt y(t), limite que l’on notera . Exprimer
t→+∞
y(t0 ) en fonction de , eβt0 et de la quantité (Kβ f )(t0 ) introduite au (1).
(c) En déduire que pour tout β ∈ C tel que Re(β) > 0, la fonction t →
−Kβ f (t) est l’unique solution de classe C 1 bornée sur R de l’équation
(Eβ,f ).
(d) Soit β ∈ C tel que Re(β) < 0. Justifier que (Eβ,f ) a une unique solution
dans Cb (R, C) que l’on exprimera à l’aide de l’endomorphisme K−β .
(e) Soit λ ∈ R. Trouver une fonction f ∈ Cb (R, C) telle que les solutions de
(Eiλ,f ) ne soient pas bornées.

Corrigé
(a) Comme β est constant et f continue sur R, le théorème de Cauchy
donne l’existence et l’unicité de la solution du problème de Cauchy

y  (t) = βy(t) + f (t)
y(0) = z0 .

La solution générale y0 de l’équation homogène y  (t) = βy(t) est donnée


par
t ∈ R → y0 (t) = keβt
pour une constante k ∈ C quelconque. Une solution particulière yp peut
être obtenue par la méthode de variation de la constante (à moins de
connaître par cœur le résultat final ? Ce n’est pas mon cas).
On pose, pour tout t ∈ R,

yp (t) = k(t)eβt

où k désigne ici une fonction de classe C 1 sur R et à valeurs dans C.


On a alors
yp (t) = (k  (t) + βk(t))eβt ,
ce qui donne la condition

f (t) = yp (t) − βyp (t) = k  (t)eβt ,

d’où on tire
k  (t) = f (t)e−βt .
220 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

k est donc une primitive quelconque de t → f (t)e−βt , on peut poser par


exemple
 t
k(t) = f (x)e−βx dx.
0

On a donc finalement
 t
yp (t) = e βt
f (x)e−βx dx
0

et la solution générale de (Eβ,f ) est donnée par

y(t) = y0 (t) + yp (t)


 t
= keβt + eβt f (x)e−βx dx
0
  t 
βt −βx
= e k+ f (x)e dx .
0

On peut aussi écrire (mais c’est inutile), pour un certain tk ∈ R :


 t
y(t) = e βt
f (x)e−βx dx.
tk

La condition de Cauchy y(0) = z0 permet alors de déterminer k = z0 et


une expression explicite de la solution de (Eβ,f ) est donnée par

  t 
y(t) = eβt z0 + f (x)e−βx dx .
0

(b) Il suit du résultat qu’on vient d’obtenir :


 t
−βt
e y(t) = k + f (x)e−βx dx
0

et de même
 t0
e−βt0 y(t0 ) = k + f (x)e−βx dx,
0
AGRÉGATION EXTERNE 221

d’où (on utilise à la fin la relation de Chasles pour les intégrales) :

 t  t0
−βt −βt0 −βx
e y(t) − e y(t0 ) = f (x)e dx − f (x)e−βx dx
0 0
 t  0
−βx
= f (x)e dx + f (x)e−βx dx
0 t0

 0  t
−βx
= f (x)e dx + f (x)e−βx dx
t0 0

 t
= f (x)e−βx dx.
t0

f étant par hypothèse bornée sur R, on peut écrire

∃M > 0, ∀t ∈ R, |f (t)|  M.

On a donc

∀t ∈ R, |f (x)e−βx | = |f (x)|e−Re(β)x  M e−Re(β)x .

La fonction x → M e−Re(β)x étant intégrable sur [t0 , +∞[, il en est de


même de x → f (x)e−βx , ce qui permet de justifier l’existence de

 = lim e−βt y(t)


t→+∞

et plus précisément d’écrire

 +∞
 = e−βt0 y(t0 ) + f (x)e−βx dx,
t0

d’où
  +∞ 
βt0 −βx
y(t0 ) = e − f (x)e dx .
t0

Le changement de variable s = x − t0 (et donc réciproquement x = s + t0 )


222 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

définit un C 1 -difféomorphisme de [t0 , +∞[ sur [0, +∞[ et permet d’écrire


  +∞ 
βt0 −β(s+t0 )
y(t0 ) = e − f (s + t0 )e ds
0
  +∞ 
βt0 −βs −βt0
= e − f (s + t0 )e e ds
0
  +∞ 
βt0 −βt0 −βs
= e −e f (s + t0 )e ds
0
 +∞
= e βt0
− f (s + t0 )e−βs ds
0

= eβt0  − Kβ f (t0 ).

(c) Le résultat de la question précédente peut se réécrire sous la forme

∀t ∈ R, y(t) = eβt  − Kβ f (t).

Les résultats de la question 1. nous permettent d’affirmer que la fonction


Kβ f est bornée sur R.
De plus, la définition de , sous la double condition que y est bornée et
que Re(β) > 0, donne immédiatement  = 0.
En effet  
 −βt 
e y(t) = e−Re(β)t |y(t)| −→
t→+∞

en tant que produit d’une fonction de limite nulle (e−Re(β)t −→ 0) et


t→+∞
d’une fonction bornée y.
Ainsi, pour tout β ∈ C tel que Re(β) > 0, la fonction t → −Kβ f (t) est
l’unique solution bornée sur R de l’équation (Eβ,f ). Elle est bien sûr de
classe C 1 , en tant que solution de l’équation (Eβ,f ).

(d) Supposons que y soit une solution bornée de (Eβ,f ).


Reprenons l’expression obtenue à la question (b) :
 t
e−βt y(t) − e−βt0 y(t0 ) = f (x)e−βx dx.
t0

On veut faire apparaître K−β . Il est donc nécessaire de faire disparaître le


signe moins devant β dans e−βx . Pour cela, commençons par changer de
AGRÉGATION EXTERNE 223

variable d’intégration en posant s = −x, ce qui donne


 −t
e−βt y(t) − e−βt0 y(t0 ) = − f (−s)eβs ds.
−t0

f étant comme précédemment bornée, mais β étant cette fois de partie


réelle négative, on peut faire tendre t vers −∞. En effet, pour les mêmes
raisons évoquées précédemment pour une autre intégrale, l’intégrale sui-
vante converge :  +∞
f (−s)eβs ds.
−t0

Comme par ailleurs e−βt y(t) est de limite nulle quand t → −∞ (car
Re(β) < 0 et y est supposée bornée), on obtient :
 +∞
−βt0
−e y(t0 ) = − f (−s)eβs ds
−t0

d’où  +∞
−βt0
e y(t0 ) = f (−s)eβs ds.
−t0
En posant désormais S = s + t0 (on aurait aussi pu, si on en avait eu la
présence d’esprit, poser dès le début s = −x + t0 ), on obtient
 +∞
−βt0
e y(t0 ) = f (−S + t0 )eβ(S−t0 ) dS
0

et, en simplifiant par l’exponentielle commune e−βt0 :


 +∞
y(t0 ) = f (−S + t0 )eβS dS,
0

ce qu’on peut encore réécrire sous la forme


 +∞
y(t) = e−(−β)s f (−s + t)ds
0
 +∞
= e−(−β)s g(s − t)ds
0

= K−β g(−t)
où g est la fonction définie par ∀t ∈ R, g(t) = f (−t).
Nous venons de prouver que si Re(β) < 0, (Eβ,f ) a pour unique solution
dans Cb (R, C) t → K−β g(−t).
224 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

(e) La réponse à la question (a) nous dit que la solution de (Eiλ,f ) avec la
condition de Cauchy y(0) = z0 pour un z0 ∈ C quelconque est donnée
par   
t
y(t) = eiλt z0 + f (x)e−iλx dx
0

Le facteur eiλt est de module 1 pour tout t ∈ R, il est donc borné.


Pour choisir une fonction f adéquate, l’idée la plus simple semble être de
poser
∀x ∈ R, f (x) = eiλx .
Cela fait de f une fonction continue (comme composée de fonctions conti-
nues usuelles) et de module 1 en tout x ∈ R, donc bornée sur R.
f est donc bien un élément de Cb (R, C).
On a ainsi y(t) = (t + z0 )eiλt et il est clair que la fonction y n’est pas
bornée sur R :
|y(t)| = |t + z0 |  |t| − |z0 |
grâce à l’inégalité triangulaire inversée. On a en particulier

lim |y(t)| = +∞.


t→±∞
AGRÉGATION EXTERNE 225

Question 4

Thèmes
analyse (série numérique)
théorie des ensembles (ensemble fini, dénombrable ou indénom-
brable)

Résultat majeur
une réunion dénombrable d’ensembles
dénombrables est dénombrable

Énoncé
Dans la suite, J désigne un ensemble non-vide qui est vu comme un en-
semble d’indices. Soit {aj ∈ [0, +∞[ , j ∈ J}, une famille de nombres réels
positifs indexés par J. On définit la somme des (aj )j∈J comme la quantité
(possiblement infinie) suivante :
 
  
aj = sup aj ; S ⊂ J avec S non-vide et fini .
 
j∈J j∈S

Dans toutes les questions qui suivent, on suppose que la somme des (aj )j∈J
est une quantité finie, ce qu’on écrira aj < ∞.
j∈J
 
(a) Pour tout p ∈ N, on pose Dp = j ∈ J : aj  2−p . Montrer que Dp est
fini et que 
#Dp  2p aj .
j∈J

(b) Montrer que l’ensemble D = {j ∈ J : aj = 0} est dénombrable.


(c) On suppose que D est infini. On se donne une énumération de D, c’est-à-
dire une bijection n ∈ N → j(n) ∈ D.
226 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

n

Pour tout n ∈ N, on pose sn = aj(k) . Montrer que
k=0

lim sn = aj .
n→+∞
j∈J

Corrigé
(a) Si Dp était infini, on pourrait construire une injection i de N dans Dp (un
ensemble infini Dp contient un sous-ensemble dénombrable) :

i : n ∈ N → i(n) ∈ Dp .

La suite (i(n))n∈N d’éléments de Dp ainsi construite vérifierait alors


n

∀n ∈ N, ai(k)  (n + 1)2−p
k=0

et donc  
n

sup ai(k) , n ∈ N = +∞.
k=0
Puisque
   n 
  
sup aj ; S ⊂ J avec S non-vide et fini  sup ai(k) , n ∈ N ,
 
j∈S k=0

l’hypothèse aj < +∞ serait alors mise en défaut. Par contraposée, on
j∈J
en déduit donc que Dp est fini. Enfin, du fait que Dp est fini et Dp ⊂ J, il
est clair que  
aj  aj  #Dp 2−p ,
j∈J j∈Dp

ce qui donne la majoration demandée : #Dp  2p aj .
j∈J

(b) Il suffit d’avoir la présence d’esprit de comparer l’ensemble D et les en-


sembles Dp . La similarité entre D et Dp pousse en effet à se demander si
les uns ne permettent pas d’obtenir l’autre. Du fait que pour tout aj = 0
(on a alors en fait aj > 0 puisque aj  0), il existe p ∈ N tel que aj > 2−p
AGRÉGATION EXTERNE 227

(car 2−p est positif et de limite nulle quand p → +∞ : 2−p sera donc bien,
à partir d’un certain rang, inférieur à un réel strictement positif aj donné),
on a clairement 
D= Dp .
p∈N

En tant que réunion dénombrable d’ensembles finis (ils auraient même pu


être dénombrables), D est dénombrable.

(c) Le résultat de la question précédente permet d’écrire :


 
 
aj = sup aj(n) ; S ⊂ N avec S non-vide et fini .
j∈J n∈S

Cette dernière borne supérieure n’est autre que la somme de la série de


terme général aj(n) . Cette série est donc convergente, sa somme est la limite
 n
de ses sommes partielles sn = aj(k) et on a donc bien
k=0

lim sn = aj .
n→+∞
j∈J
228 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

Question 5

Thème
topologie (espace de Banach, norme, adhérence,
sous-espace dense, suite de Cauchy)

Résultat majeur
toute suite de Cauchy d’un espace de
Banach est convergente

Énoncé
Soit (H, || · ||) un C-espace de Banach. Soit H0 un sous-espace vectoriel
de H tel que H0 = H. Soit  : H0 → C, une application C-linéaire telle que
pour tout f ∈ H0 , |(f )|  ||f ||. Le but de ce groupe de questions est de
montrer qu’il existe une unique application C-linéaire Λ : H → C satisfaisant
la propriété suivante

(P ) pour tout f ∈ H0 , Λ(f ) = (f ) et pour tout f ∈ H, |Λ(f )|  ||f ||.

(a) Montrer que si Λ1 et Λ2 satisfont (P ), alors Λ1 = Λ2 .


(b) Soit (fn )n∈N une suite d’éléments de H0 qui est de Cauchy dans (H, ||·||).
Montrer que la suite ((fn ))n∈N converge.
(c) Soit f ∈ H et deux suites (fn )n∈N et (gn )n∈N d’éléments de H0 telles que

lim ||f − fn || = lim ||f − gn || = 0.


n→+∞ n→+∞
Montrer que ((fn ))n∈N et ((gn ))n∈N convergent vers une même limite,
que l’on notera Λ(f ), car elle ne dépend donc que de f et non des suites
ayant f pour limite.
(d) Montrer que Λ est une application C-linéaire. Montrer qu’elle satisfait (P ).
AGRÉGATION EXTERNE 229

Corrigé
Précisons avant même de commencer deux éléments majeurs de cet énoncé :

— la majoration ∀f ∈ H, |Λ(f )|  ||f || donne immédiatement la conti-


nuité de l’application linéaire Λ sur H. En effet, si (fn )n∈N est une
suite d’éléments de H de limite f ∈ H alors
|Λ(fn ) − Λ(f )| = |Λ(fn − f )|  ||fn − f ||.
Le majorant étant de limite nulle, il en est de même de Λ(fn ) − Λ(f ),
ce qui prouve que la suite (Λ(fn ))n∈N a pour limite Λ(f ). La carac-
térisation séquentielle de la continuité permet de déduire que Λ est
continue sur H.
— H est un espace de Banach, c’est-à-dire un espace vectoriel normé
complet : par définition d’un tel espace, toute suite de Cauchy de
H est convergente. Dans un espace de Banach, les notions de suite
de Cauchy et de suite convergente sont donc équivalentes (une suite
convergente est toujours de Cauchy, que l’espace soit complet ou pas).

Enfin, remarquons que le but de cet exercice est de démontrer un cas par-
ticulier du théorème de Hahn-Banach dont voici un énoncé possible :

Soit H un C-e.v, H0 un sous-e.v. de H, p une fonction convexe sur H (et


en particulier à valeurs réelles) telle que
∀h ∈ H, ∀λ ∈ C, |λ| = 1 ⇒ p(λx) = p(x)
et f0 une forme linéaire sur H0 telle que
∀h0 ∈ H0 , |f0 (h0 )|  p(h0 ).
Il existe une forme linéaire f qui prolonge f0 sur H et telle que
∀h ∈ H, |f (h)|  p(h).
La fonction convexe p est ici la norme sur H. On rappelle à ce sujet qu’une
norme est bien une fonction convexe, ceci grâce (1) à l’inégalité triangulaire
puis (2) à l’homogénéité :
∀h1 , h2 ∈ H, ∀t ∈ [0, 1], ||th1 + (1 − t)h2 ||  ||th1 || + ||(1 − t)h2 ||
(1)

= t||h1 || + (1 − t)||h2 ||.


(2)
230 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

(a) Si Λ1 et Λ2 satisfont (P ), alors elles sont en particulier toutes les deux


continues sur H.
Car en effet, pour une application linéaire Λ, la majoration
∀f ∈ H, |Λ(f )|  ||f ||
permet de dire que Λ est continue. Voir le détail donné en préambule de
ce corrigé.
Soit f ∈ H.
Puisque H0 est dense dans H, f est la limite d’une suite (fn )n∈N d’éléments
de H0 .
Par continuité de Λ1 et de Λ2 , on a
lim Λ1 (fn ) = Λ1 (f ) et lim Λ2 (fn ) = Λ2 (f ).
n→+∞ n→+∞

Comme Λ1 et Λ2 coïncident sur H0 , on a


∀n ∈ N, Λ1 (fn ) = Λ2 (fn )
et donc, par passage à la limite :
Λ1 (f ) = Λ2 (f ).
Λ1 et Λ2 coïncident donc sur H et on a bien Λ1 = Λ2 .

(b) (fn )n∈N est une suite d’éléments de H0 qui est de Cauchy dans (H, || · ||),
c’est-à-dire
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n  N, ∀p ∈ N, ||fn+p − fn ||  ε.
On en déduit alors facilement, à l’aide de la majoration
∀f ∈ H0 , |(f )|  ||f ||,
que la suite ((fn ))n∈N est de Cauchy dans C.
En effet, par linéarité de  :
∀n, p ∈ N, |(fn+p ) − (fn )| = |(fn+p − fn )|  ||fn+p − fn ||,
et donc
∀ε > 0, ∃N ∈ N, ∀n  N, ∀p ∈ N, |(fn+p ) − (fn )|  ||fn+p − fn ||  ε.
C, muni de sa topologie usuelle (celle définie par le module) étant un es-
pace de Banach (c’est-à-dire un espace vectoriel normé complet), toute
suite de Cauchy de C converge : la suite ((fn ))n∈N est donc convergente.
AGRÉGATION EXTERNE 231

(c) (fn )n∈N et (gn )n∈N sont des suites de Cauchy dans (H, || · ||) puisque par
hypothèse elles convergent toutes les deux vers f (toute suite convergente
est une suite de Cauchy).
Le résultat de la question précédente permet donc d’affirmer que ((fn ))n∈N
et ((gn ))n∈N sont des suites convergentes vers, disons, deux limites res-
pectives a, b ∈ C.
On a alors,
(1) par linéarité de ,
(2) par hypothèse sur ,
(3) à l’aide de l’inégalité triangulaire pour une norme et
(4) par homogénéité d’une norme

|(fn ) − (gn )| = |(fn − gn )|


(1)

 ||fn − gn ||
(2)

= ||(fn − f ) + (f − gn )||

 ||fn − f || + ||f − gn ||
(3)

= ||f − fn || + ||f − gn ||
(4)

ce dernier majorant étant de limite nulle (comme somme de deux termes


de limite nulle par hypothèse), on en déduit que ((fn ) − (gn ))n∈N est
également de limite nulle. Or, sa limite est également a − b (par linéarité
de la limite), ce qui prouve que a = b. On notera, alors, comme on nous y
invite, Λ(f ), cette limite commune.

(d) Soit deux éléments f, g ∈ H et un scalaire α ∈ C.


Il s’agit de montrer que l’on a Λ(f + αg) = λ(f ) + αΛ(g).
Posons deux suites (fn )n∈N et (gn )n∈N de H0 convergeant respectivement
vers f et g.
Il est évident que la suite (fn + αgn )n∈N converge vers f + αg (par linéarité
de la limite).
((fn ))n∈N et ((gn ))n∈N convergent respectivement vers Λ(f ) et Λ(g) (par
définition de Λ).
(fn + αgn )n∈N converge elle vers Λ(f + αg) (idem).
232 CHAPITRE 16 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2021

Mais ((fn + αgn ))n∈N = ((fn ))n∈N + α((gn ))n∈N converge donc aussi
vers Λ(f ) + αΛ(g).
Par unicité de la limite, on a bien Λ(f +αg) = Λ(f )+αΛ(g), ce qui montre
que Λ est une application C-linéaire.
Par ailleurs, pour tout f ∈ H0 , f peut être vu comme limite de la suite
constante de H0 définie par ∀n ∈ N, fn = f et alors ∀n ∈ N, (fn ) = (f ).
Λ(f ) est donc, par définition, la limite de la suite constante ((fn )n∈N .
On a donc
∀f ∈ H0 , Λ(f ) = (f ).
Enfin, soit f ∈ H et une suite (fn )n∈N de H0 convergeant vers f . La suite
((fn ))n∈N a pour limite Λ(f ) (par définition de Λ) et puisque

∀n ∈ N, |(fn )|  ||fn ||,

on obtient, par passage à la limite dans cette inégalité (les inégalités,


comme les égalités, sont conservées par passage à la limite, à condition
bien sûr que les différents membres soient tous convergents) :

|Λ(f )|  ||f ||,

ce qui achève de montrer que Λ satisfait (P ).


Analyse et Probabilités, 2020

Chapitre 17

Analyse et Probabilités, 2020

Thèmes
séries et intégrales (séries entières, séries de
Fourier, rayon de convergence)
analyse complexe (séries de Fourier, résidus)

Résultats majeurs
théorème des résidus
théorème de convergence dominée
théorème de Dirichlet pour les séries de Fourier
234 CHAPITRE 17 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2020

Remarques du jury
1. on attend des justifications (scission des
modules, positivité de l’exponentielle réelle, |eix | = 1 si x ∈ R).
2.a) la c.u. sur [0, a] pour tout 0 < a < 1 n’entraîne pas la c.u. sur
[0, 1] : c’est une erreur grave, la c.u. ne passe pas du local au global.
énoncer rigoureusement le critère spécial des séries alternées (trois hy-
pothèses et deux conclusions sur la convergence de la série et la ma-
joration de la valeur absolue du reste). la majoration par une suite
décroissante ne permet pas d’obtenir la décroissance.
2.b) question de cours appelant une justification pour le rayon de
convergence.
2.c) évoquer la continuité ou la c.u. pour le passage à la limite dans la
somme.
3.a) l’IPP nécessite des fonctions de classe C 1 . ne pas oublier le cas
n = 0. la fonction n’est impaire que sur R\Z mais cela suffit à justifier
la nullité des coefficient an .
3.b) connaître les hypothèses du thm de Dirichlet (continuité par
morceaux et périodicité ne suffisent pas à établir la c.s. de la série de
Fourier d’une fonction vers cette fonction). sa conclusion assure la
c.s. de la série de Fourier vers la régularisée de la fonction considérée
et donc ici la convergence vers la fonction elle-même sur R\Z.
4.a) question classique sur l’exemple le plus commun d’une intégrale
impropre convergente d’une fonction non intégrable. distinguer inté-
grabilité et convergence d’intégrale.
4.b) question classique d’analyse complexe. le théorème des résidus doit
être maîtrisé (l’absence de pôle sur le contour ne suffit pas à justifier
que l’intégrale est nulle). justifier les passages à la limite dans les in-
tégrales sur les demi-cercles. la bonne maîtrise du théorème de conver-
gence dominée pour les passages à la limite avec une gestion satisfai-
sante des modules est valorisée.

Notations
— Pour x réel, on définit la partie entière de x, notée x par

x = max{n ∈ Z tel que n  x}

et la partie fractionnaire de x, notée {x} par {x} = x − x.

— Séries de Fourier
Soit f une fonction localement intégrable 1-périodique.
AGRÉGATION EXTERNE 235

Les coefficients de Fourier de f sont


 1
∀n ∈ Z, cn (f ) = f (t)e−i2πnt dt,
0

∀n ∈ N, an (f ) = cn (f ) + c−n (f ),

∀n ∈ N∗ , bn (f ) = i(cn (f ) − c−n (f )).


La série de Fourier associée à f est la série trigonométrique
 1 
cn (f )ei2πnx = a0 (f ) + (an (f ) cos(2πnx) + bn (f ) sin(2πnx)) .
2 ∗
n∈Z n∈N

Énoncé
1. Soit s un nombre complexe et t un réel strictement positif. Montrer que
|ts | = tRe(s) .
 (−1)n
2. (a) Montrer que la série de fonctions xn converge uniformé-
n
n1
ment sur [0, 1] et que sa somme est une fonction continue sur [0, 1].
 (−1)n
(b) Déterminer le rayon de convergence r de la série entière xn
n
n1
et rappeler la valeur de sa somme sur ] − r, r[.
+∞
 (−1)n
(c) En déduire la valeur de .
n
n=1
3. (a) Déterminer les coefficients de Fourier an et bn de la fonction 1-
périodique
1
x → {x} −
2
 sin(2πnx) 1
(b) Montrer que la série converge simplement vers {x}−
−πn 2
n1
sur R\Z.
 +∞
sin x
4. (a) Montrer que l’intégrale généralisée dx converge.
0 x
(b) En appliquant, pour 0 < ε < R, le théorème des résidus à la fonction
F (z) = eiz /z sur le contour γε,R formé des segments [ε, R] et [−R, −ε]
et des demi-cercles de centre O et de rayon ε et R situés dans le demi-
+∞
sin x π
plan supérieur, montrer que dx = .
0 x 2
236 CHAPITRE 17 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2020

Corrigé
1. On écrit la puissance sous forme exponentielle, on décompose s en faisant
apparaître ses parties réelle et imaginaire puis on utilise les propriétés de
la fonction exponentielle et du module d’un nombre complexe. On pense,
in fine, que l’exponentielle d’un réel est positive et donc égale à son
module (qui est sa valeur absolue) et que ∀θ ∈ R, eiθ  = 1 :

|ts | = es ln(t)
 
 
= eRe(s) ln(t)+iIm(s) ln(t) 
 
 Re(s) ln(t) iIm(s) ln(t) 
= e ×e 
   
   
= eRe(s) ln(t)  × eiIm(s) ln(t) 

= eRe(s) ln(t) = tRe(s) .


On peut préférer faire les opérations dans un autre sens, un peu plus
rapide, en décomposant d’abord s en faisant apparaître ses parties réelle
et imaginaire :  
 
|ts | = tRe(s)+iIm(s) 
 
 
= tRe(s) × tiIm(s) 
 
 
= tRe(s) × eiIm(s) ln(s) 

= tRe(s) .
2. (a) On peut éventuellement indiquer qu’on a reconnu, au signe près, le
développement en série entière de la fonction x → ln(1 + x). Ce n’est
toutefois pas indispensable.
Soit x ∈ [0, 1].
 n
x
est une suite numérique positive (car x et n sont positifs)
n n∈N∗
décroissante et de limite nulle. Si x = 0, cette suite est plus précisé-
xn
ment constante égale à 0. Si x = 0, on a alors ∀n ∈ N∗ , = 0 et on
n
AGRÉGATION EXTERNE 237

peut écrire

xn+1 /(n + 1) n
∀n ∈ N∗ , = x  x < 1.
xn /n n+1

Le fait que tous ses termes sont positifs et que ce rapport est toujours
inférieur à 1 suffit à justifier la décroissance de cette suite.
La convergence vers 0 de cette suite est triviale : le numérateur xn
est borné par 0 et 1 (et si x = 1 il est même de limite nulle) et le
dénominateur n est de limite infinie.
(−1)n n
La série de fonctions de terme général x est donc une série
n
alternée et, d’après le critère de Leibniz pour les séries alternées,
elle converge simplement sur [0, 1].
Par ailleurs, du fait de l’alternance des termes, tout reste de cette
série est majoré, en valeur absolue, par son premier terme :
 
 
+∞
(−1)n n 
∗ 
∀x ∈ [0, 1], ∀N ∈ N , |RN (x)| =  x 
 n 
n=N +1

 
 (−1)N +1 N +1 
  x 

N +1

xN +1
=
N +1
1
 .
N +1

1
Le reste de la série est donc uniformément majoré sur [0, 1] par
N +1
dont la limite est nulle (il est primordial que ce majorant soit d’une
part indépendant de x et d’autre part de limite nulle), ce qui prouve
(−1)n n
que la série de fonctions de terme général x est uniformément
n
convergente sur [0, 1].
(−1)n n
Puisque pour chaque n ∈ N∗ , x → x est continue sur [0, 1]
n
(c’est une simple fonction polynomiale), on peut alors conclure, grâce
à sa convergence uniforme, à la continuité de la somme de cette série
de fonction.
238 CHAPITRE 17 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2020

(b) On peut se contenter d’utiliser la règle de d’Alembert car aucun


coefficient de la série n’est nul et car la limite suivante existe :
 
1  (−1)n+1 /(n + 1)  n
= lim   = lim
r n→+∞  (−1)n /n  n→+∞ n + 1 = 1.
Le rayon de convergence est donc r = 1 et sur ] − 1, 1[ on a
+∞
 (−1)n
xn = − ln(1 + x).
n
n=1

(c) On a vu en (a) que la somme de la série est continue sur [0, 1]. Il
en est de même de x → − ln(1 + x). Puisque ces deux fonctions
coïncident sur ] − 1, 1[ et qu’elles sont chacune continues en x = 1,
on peut conclure qu’elles coïncident aussi, par continuité, en x = 1.
On a ainsi
+∞
 +∞
(−1)n n  (−1)n
1 = = − ln(1 + 1) = − ln 2.
n n
n=1 n=1

3. Il convient pour commencer de faire un croquis de la fonction étudiée.


Cela permet souvent d’anticiper certains résultats, notamment concer-
nant sa continuité (ou sa discontinuité), ses variations, sa parité, sa pé-
riodicité, ses bornes, etc.

1
Figure 17.1 – Représentation graphique de la fonction x → {x} − .
2

(a) On peut commencer par remarquer que


∀x ∈ [0, 1[, {x} = x.
1
La fonction x → {x} − est 1-périodique et de classe C 1 par mor-
2
ceaux donc localement intégrable et ses coefficients de Fourier com-
plexes sont alors donnés par
 1   1/2
1
c0 = x− dx = tdt = 0
0 2 −1/2
AGRÉGATION EXTERNE 239

(on a posé le changement de variable t = x − 1/2 et remarqué qu’on


était alors en présence de l’intégrale d’une fonction impaire sur un
intervalle symétrique par rapport à 0. On peut évidemment préférer
calculer la primitive de x − 1/2)
et  1 
∗ 1 −2iπnx
∀n ∈ Z , cn = {x} − e dx
0 2
 1 
1
= x− e−2iπnx dx.
0 2
On procède à une intégration par parties dont on rappelle la formule
 b  b

uv dx = [uv]ba − u vdx
a a

en posant 
u = x − 1
2
v  = e−2iπnx

et donc 
u = 1
−1 −2iπnx
v = e
2iπn
pour obtenir (rappelons en passant que ∀n ∈ Z, e2iπn = 1)
  1  1
1 −1 −2iπnx −1 −2iπnx
cn = x− e − e dx
2 2iπn 0 0 2iπn
 1
1 −1 −2iπn −1 −1 0 1
= e − e + e−2iπnx dx
2 2iπn 2 2iπn 2iπn 0

−1 1  −2iπnx 1
= − 2
e 0
2iπn (2iπn)

i i
= −0=
2πn 2πn
et finalement
∀n ∈ N, an = cn + c−n = 0
 
∗ i i −1
∀n ∈ N , bn = i (cn − c−n ) = i − = .
2πn −2πn πn
240 CHAPITRE 17 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2020

Noter que la nullité des coefficients an était attendue puisque la fonc-


tion étudiée ici est impaire.

(b) La fonction étudiée est 1-périodique, de classe C 1 par morceaux (elle


est seulement discontinue en tout n ∈ Z. Partout ailleurs elle est C 1 )
et de plus elle admet des limites à gauche et à droite en chaque point
(c’est-à-dire qu’elle a des limites à gauche et à droite de chacun de
ses points de discontinuité. En un point où elle est continue, ces deux
limites sont bien sûr égales à la valeur de la fonction en ce point). Le
théorème de Dirichlet donne alors la convergence simple de la série
de Fourier de cette fonction vers elle-même et donc la convergence
de la série de terme général an cos(2πnx) et de la série de terme
général bn sin(2πnx) et l’égalité

+∞ +∞
1  
∀x ∈ R\Z, {x} − = an cos(2πnx) + bn sin(2πnx)
2
n=0 n=1

c’est-à-dire
+∞
1  sin(2πnx)
∀x ∈ R\Z, {x} − = .
2 −πn
n=1

4. (a) L’intégrale à étudier est doublement impropre : la borne infinie est


toujours un problème et le fait que la fonction à intégrer n’est pas
définie en 0 en est un autre. Il faut donc lever ces deux difficultés,
ce qui est en général fait séparément, ces problèmes n’ayant que
rarement la même origine.
sin x
La fonction x → est continue sur ]0, +∞[ et elle est prolon-
x
sin x
geable par continuité en x = 0 car lim = 1.
x→0 x
Elle est donc intégrable sur tout intervalle du type [0, A], pour A > 0.
Il suffit en général de poser A = 1, ce que nous ferons ici.
 
 sin x 
Une simple majoration     1 est insuffisante car x → 1 n’est
x  x x
pas intégrable sur [1, +∞[.
Une intégration par partie permet de se ramener à une fonction inté-
grable. Pour cela, il convient de se limiter à intégrer sur un intervalle
du type [1, A] pour A > 1, puis de faire tendre A vers +∞ et non
pas faire l’IPP directement sur [1, +∞[.
Soit A > 1. On définit deux fonctions u et v de classe C 1 sur [1, A]
AGRÉGATION EXTERNE 241

par 
u(x) = 1
x
v  (x) = sin x

et donc 
u (x) = −1
x2
v(x) = − cos x.

On a ainsi
 A  A  A
sin x − cos x cos x
dx = − dx
1 x x 1 1 x2
 A
− cos A cos x
= + cos 1 − dx.
A 1 x2
cos A
On remarque que est de limite nulle quand A tend vers +∞
A
(la fonction cos est bornée et le dénominateur A est de limite infinie).
On se félicite ensuite du fait que cette fois-ci, la majoration
 cos x  1
 
∀x ∈ [1, +∞[,  2   2
x x
 +∞
cos x
permet de conclure à la convergence de dx puisque l’inté-
 +∞ 1 x2
1
grale généralisée dx converge d’après le critère de Riemann.
1 x2
 +∞
sin x
On en déduit que l’intégrale généralisée dx converge.
0 x

(b) Ici également il convient a minima de faire un rapide croquis (voir


ci-dessous).
F est holomorphe sur C∗ et pour tous 0 < ε < R, le compact délimité
par le contour γε,R est inclus dans C∗ . Le théorème des résidus donne
alors 
F (z)dz = 0.
γε,R

On décompose cette intégrale suivant les quatre morceaux (deux seg-


ments et deux demi-cercles) du contour γε,R .
Sur chacun des deux segments [−R, −ε] et [ε, R], la variable z est
réelle et on la confondra avec sa partie réelle x.
242 CHAPITRE 17 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2020

Figure 17.2 – représentation graphique du contour γε,R .

Sur le demi-cercle de centre O et de rayon ε, la variable z peut s’écrire


sous la forme εeiθ avec θ ∈ [0, π].
Sur le demi-cercle de centre O et de rayon R, la variable z peut
s’écrire sous la forme Reiθ avec θ ∈ [0, π].
Enfin, on veillera à respecter l’orientation pendant le parcours du
contour γε,R (on tourne dans le sens trigonométrique, c’est-à-dire le
sens inverse des aiguilles d’une montre. Ce n’est pas fondamental ici
puisque l’intégrale est nulle mais il faut y penser pour bien poser les
bornes des intégrales dans le sens du parcours choisi).
  R  
 π
F (z)dz = F (x)dx + F Reiθ Rieiθ dθ
γε,R ε 0
 −ε  0  
+ F (x)dx + F εeiθ εieiθ dθ.
−R π

On a  
R R
eix
F (x)dx = dx.
ε ε x
En posant t = −x (et donc dx = −dt), on obtient
 −ε  ε  R
F (x)dx = −F (−t)dt = F (−t)dt.
−R R ε
AGRÉGATION EXTERNE 243

Ainsi, en renommant la variable d’intégration (elle est muette) x au


lieu de t :
 R  −ε  R
F (x)dx + F (x)dx = (F (x) + F (−x)) dx
ε −R ε

 R
2i sin x
= dx
ε x
car
eix e−ix
F (x) + F (−x) = +
x −x
cos x + i sin x cos x − i sin x
= +
x −x
2i sin x
= .
x
Le
 Rrésultat de la question précédente nous donne la convergence de
2i sin x
dx quand ε tend vers 0+ et R vers +∞.
ε x
Par ailleurs
 π    π iReiθ
iθ iθ e
F Re Rie dθ = iθ
Rieiθ dθ
0 0 Re
 π

= i eiRe dθ
0

et de même
 0    0 iθ
iθ iθ eiεe
F εe εie dθ = εieiθ dθ
π π εeiθ
 0

= i eiεe dθ.
π

Soit θ ∈]0, π[. Du fait que R > 0, ε > 0 et sin θ > 0, on a les
majorations suivantes :
     
 iReiθ   −R sin θ+iR cos θ   −R sin θ 
e  = e  = e 1

et de même
 iθ     
 iεe   −ε sin θ+iε cos θ   −ε sin θ 
e  = e  = e   1.
244 CHAPITRE 17 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2020

Les deux exponentielles complexes que l’on cherche à intégrer étant


toutes deux de module majoré par 1 et la fonction constante égale à 1
étant évidemment intégrable sur l’intervalle ouvert ]0, π[, le théorème
de convergence dominé nous permet d’inverser limite et intégrale :
 π  π
iReiθ iθ
lim e dθ = lim eiRe dθ
R→+∞ 0 0 R→+∞

 π
= lim e−R sin θ+iR cos θ dθ
0 R→+∞

 π
= 0dθ = 0
0

car
lim e−R sin θ+iR cos θ = lim e−R sin θ eiR cos θ = 0
R→+∞ R→+∞

(le premier facteur est de limite nulle car ∀ 0 < θ < π, sin θ > 0 et le
second facteur est borné puisqu’il il est de module 1).
De manière similaire
 0  0
iεeiθ iθ
lim e dθ = lim eiεe dθ
ε→0 π π ε→0
 0  0
= e0 dθ = 1dθ = −π.
π π

Finalement, par passage à la limite, de l’égalité



F (z)dz = 0
γε,R

on déduit, en récupérant les différentes parties calculées ci-dessus,


l’égalité  +∞
sin x
2i dx − iπ = 0,
0 x
ce qui amène le résultat attendu
 +∞
sin x π
dx = .
0 x 2
Analyse et Probabilités, 2019

Chapitre 18

Analyse et Probabilités, 2019

Thèmes
espaces euclidiens (vecteur, produit scalaire, norme
euclidienne)
probabilités (espérance, variable de Bernoulli)
logarithme néperien (propriétés usuelles, y compris de sa courbe)

Résultats majeurs
inégalité de Cauchy-Schwarz
inégalité de Markov

Remarques du jury
1. l’inégalité de C-S doit être un réflexe.
2. classique question sur l’inégalité de Markov. faire la différence
entre « positive » et « positive presque sûrement ».
3.a) les courbes doivent être soignées et comporter des éléments utiles
(tracé des demi-tangentes en les points de non dérivabilité).
246 CHAPITRE 18 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2019

Énoncé
Des inégalités utiles pour la suite
1. Justifier que pour tout m ∈ N∗ et tout (w1 , . . . , wm ) ∈ Rm , on a
 2
m m

 wj   m wj2 .
j=1 j=1

2. Inégalité de Markov : Soit Z une variable aléatoire réelle définie sur


un espace probabilisé (Ω, A , P).
Montrer que si Z est presque sûrement positive ou nulle, alors pour tout
réel strictement positif a, on a

E(Z)
P(Z  a)  .
a
3. On définit pour tout x > 0,
 
− ln(x) si x  1, 0 si x  1,
ln− (x) = ln+ (x) =
0 si x > 1, ln(x) si x > 1,

a) Tracer l’allure des courbes représentatives de ln− et ln+ sur R∗+ .


b) Justifier que pour tout n ∈ N∗ et tout (x1 , . . . , xn ) ∈ (R∗+ )n , on a
 n  n n  
   1
ln+ xk  ln+ (xk ) + ln n = ln− + ln n.
xk
k=1 k=1 k=1

Indication : on pourra commencer par examiner le cas où la somme


des xk est inférieure ou égale à 1.
AGRÉGATION EXTERNE 247

Corrigé
Des inégalités utiles pour la suite

1. Le genre d’éléments qui apparaissent dans cette majoration (des sommes,


des carrés) doit évoquer dans l’esprit du candidat la norme euclidienne
sur Rm . Passer à côté de cette idée constitue une erreur malheureuse
et entraînera à coup sûr une perte de temps importante à essayer (bien
souvent en vain et au prix de longs calculs) une autre méthode (un dé-
veloppement du carré ? une récurrence ?).
 
1
 .. 
Première démonstration : en posant le bête vecteur u =  .  ∈ Rm
1
(nous disons bête car il est à la fois caricatural dans son expression et
d’un usage si courant qu’il faut toujours l’avoir à l’esprit), pour lequel on

a ||u||2 = m, on obtient déjà quelque chose qui ressemble au membre
de gauche de l’inégalité :
  2  2
 m  m
  
 wj u = m  wj  .

 j=1  j=1
2

L’inégalité triangulaire
 
 
 m  m m
√  m
 w u   ||w u|| = |w | × ||u|| = m |wj |
 j  j 2 j 2
 j=1  j=1 j=1 j=1
2

ne donne pas un résultat satisfaisant.


En remarquant en revanche qu’on peut écrire
m
 m

wj u = uj
j=1 j=1
    
w1 w2 wm
 w2  w3   w1 
     
 ..
  ..   . 
où u1 =   , u2 =  .  , . . . , um =  ..  sont m vecteurs
.
     
wm−1  w m  wm−2 
wm w1 wm−1
dont les coordonnées sont identiques (à une rotation près) et qu’ils ont
248 CHAPITRE 18 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2019

m

ainsi chacun pour norme ||u1 ||2 =  wi2 , l’inégalité triangulaire donne
i=1
cette fois-ci satisfaction :
    
 m   m  m 
      m 2
 w u  =   u    ||u || = m wj .
 j   j  j 2
 j=1   j=1  j=1 j=1
2 2

En élevant ce résultat au carré, on obtient


  2
 m  m
   
 w u  m2 wj2 .
 j 
 j=1  j=1
2

On a donc finalement
 2
m
 m

m wj   m2 wj2
j=1 j=1

et il ne reste plus qu’à diviser par m (m > 0 car m ∈ N∗ ) pour obtenir


la majoration souhaitée :
 2
m m
 wj   m wj2 .
j=1 j=1

Deuxième démonstration : tout ceci est fort plaisant, à condition d’avoir


un peu de temps à perdre. Le candidat pressé trouvera beaucoup plus
efficace d’utiliser l’inégalité de Cauchy-Schwarz dans l’espace euclidien
Rm muni du produit scalaire usuel.
L’inégalité de Cauchy-Schwarz, appliquée aux vecteurs u et u1 évo-
qués ci-dessus, donne en effet immédiatement

|u, u1 |  ||u||2 × ||u1 ||2 ,

c’est-à-dire   
m  
  √ m 2
 
wj   m ×  wj

 j=1  j=1

et il ne reste plus qu’à élever le tout au carré (la fonction carré est
croissante sur R+ , elle laisse donc l’inégalité qui précède inchangée) pour
obtenir le résultat demandé.
AGRÉGATION EXTERNE 249

Nous retiendrons donc cette morale : quand il s’agit de démontrer


une inégalité dans laquelle apparaissent des sommes (ou pourquoi pas
des intégrales !), il est probablement possible de faire apparaître un pro-
duit scalaire (et a fortiori le p.s. usuel) et le produit de deux normes de
vecteurs et se ramener ainsi à l’inégalité de Cauchy-Schwarz.

2. Inégalité de Markov : il s’agit de démontrer la célèbre inégalité de


Markov et le mieux pour cela est d’utiliser la démonstration qui suit, à
la fois classique et relativement élémentaire. Commençons par un rappel
qui sera utile :

Rappel : Pour tout événement A ∈ A ,



1 si A est réalisé
1A =
0 sinon

est une variable aléatoire de Bernoulli de paramètre P(A).


Son espérance est donc donnée par
E(1A ) = 1 × P(A) + 0 × P(A)

= P(A).
Soit a > 0. En distinguant les trois cas Z  a, 0  Z < a et Z < 0 (Z est
supposée presque sûrement positive ou nulle : ce troisième cas est donc
de probabilité nulle), on constate qu’on a presque sûrement :

a1{Za}  Z.

En effet 
aZ si Z  a
a1{Za} =
0Z si 0  Z < a,
 
l’événement a1{Za} > Z est donc un sous-cas de l’événement Z < 0,
il est donc comme celui-ci de probabilité nulle et ce qu’il se passe quand
Z < 0 n’a pas d’incidence dans les calculs qui suivent.
Par croissance de l’espérance, on obtient :
 
E a1{Za}  E(Z).

Or, par linéarité de l’espérance puis à l’aide du rappel donné quelques


lignes plus haut :
   
E a1{Za} = aE 1{Za} = aP(Z  a),
250 CHAPITRE 18 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2019

d’où
aP(Z  a)  E(Z)
et finalement, puisque a > 0

E(Z)
P(Z  a)  .
a

3. a) Les courbes sont confondues avec l’axe des abscisses (sur ]0; 1] pour
celle de ln+ et sur [1; +∞[ pour celle de ln− ). On a veillé à indiquer
leur point d’intersection de coordonnées (1; 0) (c’est aussi le point
où l’une quitte et l’autre rejoint l’axe des abscisses) et les demies-
tangentes en ce point (du moins celles qui ne sont pas horizontales et
donc confondues avec l’axe des abscisses) d’équations y = x − 1 pour
ln+ et y = 1 − x pour ln− . On peut également mettre en évidence
l’axe des ordonnées, asymptote verticale de la courbe de ln− .

Figure 18.1 – Courbes représentatives des fonctions ln− et ln+ .

b) Remarquons pour commencer que l’égalité est triviale et découle im-


médiatement du fait que

1
xk  1 ⇔ 0 < 1
xk

et symétriquement
1
0 < xk < 1 ⇔ >1
xk
AGRÉGATION EXTERNE 251

et qu’en conséquence, par définition des fonctions ln+ et ln− et grâce


aux propriétés usuelles de la fonction ln :
   
1 1
xk  1 ⇒ ln+ (xk ) = ln(xk ) = − ln = ln−
xk xk
et  
1
0 < xk < 1 ⇒ ln+ (xk ) = 0 = ln− .
xk
Utilisons désormais l’indication donnée dans l’énoncé, bien qu’elle ne
serve finalement pas à grand-chose sinon à répondre à la moitié de la
question sans espoir de pouvoir en déduire l’autre moitié.
n
Si xk  1 alors chacun des xk est dans l’intervalle ]0, 1] et vérifie
k=1
en conséquence ln+ (xk ) = 0.
Comme par ailleurs 1  n, et ln(1) = 0, on a par croissance de la
fonction ln sur R∗+ :
 n  n
 
ln+ xk = 0  ln(n) = ln+ (xk ) + ln n
k=1 k=1

et l’inégalité est vérifiée.


n
 n

De manière générale, que xk  1 ou au contraire xk > 1, du
k=1 k=1
fait que la moyenne arithmétique des xk est majorée par leur maxi-
mum, on a par croissance de la fonction ln :
 n   n 

k=1 xk
ln xk − ln(n) = ln
n
k=1

 ln( max xk )
1kn

n

 ln+ (xk )
k=1

du fait, pour la dernière majoration, que d’une part pour chaque k,


ln(xk )  ln+ (xk ) et en particulier pour l’un des termes xk égaux à
max xk ) et d’autre part, pour tous les autres xk , que 0  ln(xk ) par
1kn
définition de ln+ . L’inégalité est ainsi démontrée dans tous les cas.
Analyse et Probabilités, 2018

Chapitre 19

Analyse et Probabilités, 2018

Thèmes
espaces euclidiens (produit scalaire, norme,
compact, convergence)
analyse de Fourier (calcul intégral, exponentielle complexe)
suite de fonctions (convergence uniforme)

Résultats majeurs
théorème de Weierstrass
théorème de continuité d’une intégrale à paramètre
propriétés des compacts

Remarques du jury
1. le théorème de Weierstrass devrait être un
automatisme, plutôt que de s’égarer dans des considérations lointaines
de l’objectif (signe de g, hypothétiques bases hilbertiennes).
2. question de cours. soulever la question de l’existence de l’intégrale et
ne pas se contenter de majorer son module. le théorème de continuité
d’une intégrale à paramètre doit être maîtrisé.
3. prétendre établir le résultat sans l’argument de monotonie devrait
amener à se poser des questions. faire la différence entre convergence
simple et convergence uniforme.
254 CHAPITRE 19 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2018

Notations
Soit f une fonction intégrable sur RN .
On définit sa transformée de Fourier par

ˆ N ˆ
f : ξ ∈ R → f (ξ) = e−ixξ f (x)dx.
RN

Énoncé
On démontre trois résultats généraux et indépendants entre eux. Le der-
nier est plus exigeant techniquement.
 1
1. Soit g ∈ C ([0, 1], R) telle que
0 un g(u)du = 0 pour tout n ∈ N. Mon-
0
trer que g est l’application nulle.

2. Soit f ∈ L1 (RN ). Montrer que fˆ est une fonction bien définie, continue
et bornée sur RN .

3. Soit D un ensemble compact de RN . On considère une suite de fonctions


(un )n∈N définies sur D et à valeurs réelles qui vérifie les trois propriétés
suivantes
i. pour tout n ∈ N, la fonction un est continue sur D,
ii. pour tout n ∈ N et tout x ∈ D, on a 0  un+1 (x)  un (x),
iii. pour tout x ∈ D, on a lim un (x) = u(x), où la fonction u est
n→+∞
continue sur D.
Montrer que (un )n∈N converge vers u uniformément sur D.

Corrigé
1. Il faut absolument penser au théorème de Weierstrass et ce qui doit
en être le stimulus est l’évocation dans l’énoncé, d’une part des éléments
X n (n ∈ N) de la base canonique de R[X] (sous la forme du facteur un
dans l’intégrale) et d’autre part d’une fonction g continue sur un segment
de R. Une telle fonction g est en effet, d’après le théorème de Weiers-
trass, la limite uniforme sur [0, 1] d’une suite (Pn )n∈N de polynômes de
AGRÉGATION EXTERNE 255

R[X].

On a en particulier,

 1
∀n ∈ N, g(u)Pn (u)du = 0
0

car de manière générale, en utilisant (1) la linéarité de l’intégrale (l’in-


tégrale et les sommes finies commutent) et (2) l’hypothèse de l’énoncé
∀K ∈ N, ∀a0 , . . . , aK ∈ RK+1 ,

 1 K
 K
  1
k
g(u) ak u du = ak g(u)uk du
0 (1) 0
k=0 k=0

K

= (ak × 0)
(2)
k=0

= 0.

Remarque : l’ensemble des fonctions réelles continues sur [0, 1] est un


espace euclidien muni du produit scalaire

 1
f, g = f (u)g(u)du,
0

lequel donne la norme euclidienne associée définie par


 1
||g||2 = |g(u)|2 du.
0

En conséquence, si on se souvient qu’une fonction continue sur [0, 1] est


nulle ssi sa norme euclidienne est nulle (c’est une propriété générale des
normes : le seul vecteur de norme nulle est le vecteur nul), pour montrer
256 CHAPITRE 19 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2018

que g est nulle, on peut commencer par écrire :


 1
∀n ∈ N, ||g||22 = g 2 (u)du
0
 1  1
2
= g (u)du − g(u)Pn (u)du
0 0
 1 
= g 2 (u) − g(u)Pn (u) du
0
 1
= g(u) × (g(u) − Pn (u)) du
0

En remarquant que cette dernière intégrale est positive (puisque c’est le


carré d’une norme), on peut
(1) majorer dans un premier temps grâce à l’inégalité triangulaire pour
les intégrales puis
(2) dans un second temps à l’intérieur de l’intégrale (les fonctions g et
g − Pn étant bornées sur le segment [0, 1] car continues, |g| et |g − Pn |
admettent chacune un maximum sur [0, 1]. Dis autrement, l’ensemble des
fonctions réelles continues sur [0, 1] muni de || · ||∞ est un espace vectoriel
normé et on peut majorer |g(u)|, par exemple, par ||g||∞ := max |g(u)|) :
x∈[0,1]

∀n ∈ N,
  
1  1 
g(u) × (g(u) − Pn (u))du =  g(u) × (g(u) − Pn (u))du

0 0

 1
 |g(u) × (g(u) − Pn (u))| du
(1) 0

 1
= |g(u)| × |g(u) − Pn (u)| du
0
 1
 ||g||∞ × ||g − Pn ||∞ du
(2) 0

= ||g||∞ × ||g − Pn ||∞ .


Comme ||g − Pn ||∞ est de limite nulle quand n tend vers +∞ (g étant la
limite uniforme de la suite (Pn )n∈N ), on obtient, par passage à la limite
AGRÉGATION EXTERNE 257

et par majoration :

||g||22 = 0 ou encore ||g||2 = 0.

g est donc bien la fonction nulle.

2.
∀ξ ∈ RN , ∀x ∈ RN , |e−ix·ξ f (x)| = |f (x)|
Comme f ∈ L1 (RN ), pour chaque ξ ∈ RN , x → e−ix·ξ f (x) est aussi dans
L1 (RN ) et fˆ est donc bien définie sur RN .
Pour la continuité de fˆ, il faut lister les trois hypothèses du théorème
de continuité d’une intégrale à paramètre :
i. en tant que composée de fonctions mesurables, la fonction intégrée
est mesurable par rapport à la variable d’intégration :

∀ξ ∈ RN , x → e−ix·ξ f (x) est mesurable sur RN

ii. en tant que composée de fonctions continues, la fonction intégrée est


continue par rapport à la variable de fˆ :

∀x ∈ RN , ξ → e−ix·ξ f (x) est continue sur RN

iii. la fonction intégrée est bien intégrable (on l’a déjà montré ci-dessus
pour justifier que fˆ est bien définie) :

∀ξ ∈ RN , x → e−ix·ξ f (x) ∈ L1 (RN )

fˆ est donc continue sur RN et de plus


  
N ˆ 
∀ξ ∈ R , f (ξ)  |f (x)|dx = ||f ||1 ,
RN

ce qui prouve que fˆ est bornée sur RN .

3. Indiquons tout d’abord que puisque les suites (un (x))n∈N sont décrois-
santes, positives et convergente vers u(x) pour chaque x ∈ D, on a né-
cessairement
∀n ∈ N, ∀x ∈ D, un (x)  u(x)  0
et donc
∀n ∈ N, ∀x ∈ D, un (x) − u(x)  0.
258 CHAPITRE 19 : ANALYSE ET PROBABILITÉS 2018

Montrer que (un )n∈N converge uniformément vers u consiste de manière


générale à montrer la majoration suivante :

∀ε > 0, ∃Nε ∈ N, ∀x ∈ D, n  Nε ⇒ |un (x) − u(x)|  ε,

qu’on peut donc ramener ici à

∀ε > 0, ∃Nε ∈ N, ∀x ∈ D, n  Nε ⇒ un (x) − u(x)  ε.

La convergence simple de (un )n∈N vers u se traduit de manière générale


par :

∀ε > 0, ∀x ∈ D, ∃Nx,ε ∈ N, n  Nx,ε ⇒ |un (x) − u(x)|  ε.

On peut également ici écrire plus simplement

∀ε > 0, ∀x ∈ D, ∃Nx,ε ∈ N, n  Nx,ε ⇒ un (x) − u(x)  ε.

Les fonctions un et u étant continues sur D, il en est de même de un − u


et on obtient
∀ε > 0, ∀x ∈ D, ∃Rx,ε > 0,

||x − t|| < Rx,ε ⇒ |(un (t) − u(t)) − (un (x) − u(x))|  ε

et en combinant ces deux résultats :

∀ε > 0, ∀x ∈ D, ∃Rx,ε > 0, ∃Nx,ε ∈ N, ∀n  Nx,ε ,

||x − t|| < Rx,ε ⇒

|un (t) − u(t)| = |un (t) − u(t) − (un (x) − u(x)) + (un (x) − u(x))|

 |(un (t) − u(t)) − (un (x) − u(x))| + |(un (x) − u(x))|

 ε + ε = 2ε

Pour ε > 0 fixé, les parties de D


  
B(x, Rx,ε ) D
x∈D

constituent un recouvrement du compact D par des ouverts de D (ce sont


des ouverts de D au sens de la topologie induite sur D par la topologie de
RN définie par la norme || · ||). Or, par définition d’un compact, on peut
extraire de ce recouvrement un recouvrement fini. Il existe donc Kε ∈ N∗
et Kε éléments y1 , . . . , yKε ∈ D tels que D soit recouvert par les parties
  
B(yk , Rxk ,ε ) D .
1kKε

On a donc

∀x ∈ D, ∃kx ∈ N∗ , 1  kx  Kε , x ∈ B(ykx , ε).

On pose naturellement Nε = max Nyk ,ε et en utilisant deux fois de


1kKε
suite la décroissance de (un (x))n∈N :

∀x ∈ D, n  Nε ⇒ un (x) − u(x)  uNε (x) − u(x)

 uNyk ,ε (x) − u(x)


x

 ε

L’objectif que nous nous étions fixé est alors atteint : (un )n∈N converge
uniformément vers u sur D.
260 INTERMÈDE

Figure 19.1 – Trois carrés dans une position optimale de superposition et de


symétrie. Cette figure peut-être construite à partir d’un premier carré auquel

on applique une rotation d’angle radians et de sommet l’un de ses sommets.
6
On opère de même avec le deuxième carré pour obtenir le troisième.
L’hexagone central est équilatéral mais non régulier. Il possède trois angles
π
droits et trois angles de . Il est semblable à l’hexagone extérieur formé par
3 √
les côtés des carrés dans un rapport de 2 + 3.
Agrégation externe : concours spécial docteur

Cinquième partie

Agrégation externe :
concours spécial docteur
Épreuve de 2021

Chapitre 20

Épreuve de 2021

Exercice 1

Thèmes
topologie (norme, norme induite, continuité d’une
application linéaire, convergence)
algèbre linéaire (application linéaire)
analyse (suite, fonction, continuité, dérivabilité, limite, taux d’accrois-
sement, intégrale)

Résultat majeur
théorème de Weierstrass

Remarques du jury
3)Les bornes supérieures sont traitées avec
beaucoup de confusion.
264 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

Énoncé
On note C 0 ([0, 1]) l’ensemble des applications continues de [0, 1] dans R
et on le munit de la norme uniforme || · ||∞ définie pour toute f ∈ C 0 ([0, 1]),
par ||f ||∞ = sup{|f (x)|, x ∈ [0, 1]}.
On introduit, pour toute f ∈ C 0 ([0, 1]), la fonction T (f ) : [0, 1] → R
définie par :
  x
1 f (t)dt si x ∈]0, 1];
T (f ) : x → x 0

f (0) si x = 0.
On remarquera, et il n’est pas demandé de le justifier, que l’application T
est linéaire.
On souhaite montrer que pour toute f ∈ C 0 ([0, 1]), (T n(f ))n∈N converge
uniformément.
1. Montrer, pour toute f ∈ C 0 ([0, 1]), que T (f ) ∈ C 0 ([0, 1]).
2. On rappelle que l’on définit |||T |||, lorsque cette quantité existe, par

|||T ||| = sup{||T (f )||∞ , f ∈ C 0 ([0, 1]) et ||f ||∞  1}.

Montrer que T est continue et que

|||T |||  1.

3. On se donne dans cette question f ∈ C 0 ([0, 1]) puis un réel ε > 0.


a. Justifier l’existence de P ∈ R[X] tel que ||f − P ||∞  ε.
b. Montrer que

∀n ∈ N, ||T n (f ) − f (0)||∞  ||T n (P ) − P (0)||∞ + 2ε.

c. Conclure alors que (T n (f ))n∈N converge uniformément vers f (0).


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 265

Corrigé
1. Pour f ∈ C 0 ([0, 1]), la continuité de T (f ) sur ]0, 1] est immédiate : T (f )
1
est le produit de la fonction inverse x → (continue sur ]0, 1]) et de la
 x x
primitive F : x → f (t)dt de f s’annulant en 0 (F est continue et même
0
de classe C 1 sur [0, 1] puisque f y est de classe C 0 . On a en particulier
F  (x) = f (x) pour tout x ∈ [0, 1] et F (0) = 0).
Reste à montrer la continuité de T (f ) en 0.
F (x) F (x) − F (0)
Pour x ∈]0, 1], T (f )(x) = = représente le taux d’ac-
x x−0
croissement de F de 0 à x : sa limite quand x tend vers 0 est donc F  (0) =
f (0) = T (f )(0), ce qui prouve la continuité de T (f ) en 0 et donc sur [0, 1].

f (b) − f (a)
Rappel : le taux d’accroissement d’une fonction f de a à b est .
b−a
On dit que la fonction f est dérivable en a si cette quantité converge quand
b tend vers a et on pose alors, par définition :
f (t) − f (a)
f  (a) := lim .
t→a t−a
Savoir a priori qu’une fonction f est dérivable permet d’utiliser ce résultat
pour obtenir sans effort des limites dans lesquelles apparaît (ou dans les-
quelles on peut faire apparaître) un taux d’accroissement.

2. Montrer la continuité de l’application linéaire T revient précisément à mon-


trer que |||T ||| existe, c’est-à-dire que {||T (f )||∞ , f ∈ C 0 ([0, 1]) et ||f ||∞ 
1} est majorée (toute partie non vide majorée de R possède une borne
supérieure finie et vice versa).
Soit f ∈ C 0 ([0, 1]). Du fait que (1) x est positif, puis par (2) inégalité
triangulaire pour les intégrales, et (3) positivité de l’intégrale, on a :
  x   
1  1  x 
∀x ∈]0, 1] : |T (f )(x)| =   
f (t)dt =  f (t)dt
x 0 (1) x 0
 x  x
1 1
 |f (t)|dt  ||f ||∞ dt = ||f ||∞
(2) x 0 (3) x 0

et bien sûr
|T (f )(0)| = |f (0)|  ||f ||∞ .
266 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

Ainsi, ∀f ∈ C 0 ([0, 1]), ||f ||∞  1 ⇒ ||T (f )||∞  1.


Ce qui prouve que |||T ||| existe et est majorée par 1.

Remarque : on peut alors montrer que |||T ||| = 1 en posant f la fonction


constante égale à 1 sur [0, 1]. Pour cette fonction, ||f ||∞ = 1 et |||T (f )||| = 1.

3. a. Il suffit simplement de citer le théorème de Weierstrass dont cette


question constitue l’exact énoncé : toute fonction continue sur un seg-
ment peut être approximée par un polynôme de cette manière.

b. Il s’agit manifestement
(1) d’introduire des termes adéquats, à savoir ceux qui apparaissent dans
le membre de droite de l’inégalité voulue (à savoir T n (P ) et P (0)),
(2) d’utiliser la traditionnelle inégalité triangulaire des normes puis
(3) la linéarité de T (ou de T n ),
(4) la majoration usuelle ||T (f )||∞  |||T ||| × ||f ||∞ appliquée n fois
(ce qui revient à montrer que |||T n |||  |||T |||n mais on n’est pas obligé
d’évoquer ce résultat),
 0 ce résultat
 est valide car |||·||| est la norme induite
par || · ||∞ sur L C ([0, 1]) ),
(5) le résultat de la question 2. : |||T |||  1, et la majoration obtenue
dans la question 3.a. : ||P − f ||∞ = ||f − P ||∞  ε.

Soit n ∈ N :
||T n (f ) − f (0)||∞

= ||T n (f ) − T n (P ) + T n (P ) − P (0) + P (0) − f (0)||∞


(1)

 ||T n (f ) − T n (P )||∞ + ||T n (P ) − P (0)||∞


(2)
+||P (0) − f (0)||∞

 ||T n (f − P )||∞ + ||T n (P ) − P (0)||∞


(3)
+|P (0) − f (0)|

 |||T |||n × ||f − P ||∞ + ||T n (P ) − P (0)||∞


(4)
+||P − f ||∞

 ||T n (P ) − P (0)||∞ + 2ε.


(5)
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 267

c. Il faut ici montrer que ||T n (P ) − P (0)||∞ converge vers 0 quand n tend
vers +∞.
deg(P )

Notons P = ak X k où a0 , . . . , adeg(P ) ∈ R.
k=0

Calculons T (X k ). Pour cela, distinguons dans un premier temps le cas


k = 0 (X 0 = 1 est un polynôme constant) :


T (X 0 )(0) = T (1)(0) = 1
 x
0 1 1
∀x ∈]0, 1], T (X )(x) = T (1)(x) = dt = x = 1.
x 0 x

Pour k ∈ N∗ ,



T (X k )(0) = 0k = 0
 x  x
1
k k 1 tk+1 xk

∀x ∈]0, 1], T (X )(x) = t dt = = ,
x 0 x k+1 0 k+1

Si on pose comme convention l’égalité 00 = 1 (ceci est certes discutable,


mais il s’agit bien ici seulement d’une convention de notation), on peut
alors exprimer tout cela sous la forme du résultat unique suivant :

  xk
∀k ∈ N, ∀x ∈ [0, 1] : T X k (x) = .
k+1

Conséquemment

     xk 

1
 n 
∀n ∈ N , ∀k ∈ N , ∀x ∈ [0, 1] : T X (x) = 
∗ ∗ k
 .
(k + 1)n  2n

Ainsi, par (1) linéarité de T et (2) inégalité triangulaire pour la valeur


absolue :
268 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

∀n ∈ N∗ , ∀x ∈ [0, 1] :
   
 
 n deg(P
) 
|T n (P )(x) − P (0)| = T  a X k
(x) − a 
 k 0 
 k=0 
 
deg(P )   
  
=  ak T X (x) − a0 
n k
(1) 
 k=0 
 
deg(P )   
  
=  a T n
X k
(x) 
 k 
 k=1 

deg(P )
    
 
 |ak | × T n X k (x)
(2)
k=1

deg(P )
 1
 max (|ai |) ×
1ideg(P ) 2n
k=1

1
= deg(P ) × max (|ai |) × .
1ideg(P ) 2n

On a donc ainsi :
deg(P )
||T n (P ) − P (0)||∞  max (|ai |) .
1ideg(P ) 2n

Le majorant que nous venons d’obtenir ayant pour limite 0 quand n


tend vers +∞, il en est de même de ||T n (P ) − P (0)||∞ . Il suffit alors
d’écrire cela à l’aide des quantificateurs puis d’utiliser le résultat de la
question 3.b. :

∀ε > 0, ∃P ∈ R[X], ∃Nε ∈ N∗ , n  Nε ⇒ ||T n (P ) − P (0)||∞  ε

⇒ ||T n (f ) − f (0)||∞  3ε,


3.b.

ce qui prouve la convergence uniforme de (T n (f ))n∈N∗ vers f (0).


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 269

Exercice 2

Thèmes
calcul matriciel (valeurs et vecteurs propres, spectre,
polynôme caractéristique, polynôme minimal, polynôme de matrice)
anneaux euclidiens (PGCD, éléments premiers entre eux, relation
de Bézout)

Résultats majeurs
théorème de Cayley-Hamilton
théorème de Bézout

Énoncé
On se donne deux matrices A et B dans Mn (C) (avec n entier naturel non
nul) et on se propose de montrer que A et B ont une valeur propre commune
si et seulement s’il existe M ∈ Mn (C) non nulle telle que M A = BM .
1. Condition suffisante
On suppose dans cette question que M A = BM pour une certaine matrice
M ∈ Mn (C) non nulle.
a. Montrer, pour tout P ∈ C[X], que M P (A) = P (B)M .
b. En déduire que A et B ont une valeur propre commune.
On pourra appliquer le résultat précédent avec P égal au polynôme ca-
ractéristique de A.
2. Condition nécessaire
On suppose dans cette question que A et B ont une valeur propre commune
λ.
a. Montrer que Sp(tA) = Sp(A) (c’est-à-dire que tA et A ont mêmes valeurs
propres).
Ainsi, il existe X ∈ Mn,1 (C) et Y ∈ Mn,1 (C) non nulles telles que
tAX = λX et BY = λY .

b. À l’aide de X et de Y , construire M non nulle telle que M A = BM .


270 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

Corrigé
1. Condition suffisante
a. Le résultat est immédiat si P est le polynôme nul. En remarquant qu’on
peut évidemment écrire tout P ∈ C[X] non nul sous la forme P =
deg(P )

ai X i pour des coefficients a0 , . . . , an ∈ C[X], on peut commencer
i=0
par prouver, à l’aide d’une simple récurrence que nous ne détaillerons
pas, que ∀i ∈ N∗ : M Ai = B i M . Ainsi, par bilinéarité du produit de
deux matrices de Mn (C), il vient immédiatement

∀P ∈ C[X], M P (A) = P (B)M.

Remarque : on peut bien sûr écrire le calcul entièrement bien que cela
ne nous semble pas indispensable :
deg(P ) deg(P ) deg(P )
      
M P (A) = M ai Ai = a i M Ai = ai B i M
i=0 i=0 i=0
 
deg(P )

=  ai B i  M = P (B)M.
i=0

b. L’énoncé nous indique généreusement de considérer le polynôme carac-


téristique χA de la matrice A. On pourrait également envisager le poly-
nôme minimal πA de A (ou bien sûr de manière symétrique le polynôme
caractéristique et le polynôme minimal de B). Dès qu’on évoque une
matrice carrée (ou un endomorphisme) et ses valeurs propres, on doit
se préparer à évoquer son polynôme caractéristique ou son polynôme
minimal.

Rappelons que C[X] est un anneau euclidien : on peut y utiliser les no-
tions de division euclidienne, d’algorithme d’Euclide, de PGCD, etc.

Considérons donc χA et χB et supposons qu’ils n’ont pas de racine com-


mune. Ils sont alors premiers entre eux. En effet, nous travaillons dans
l’anneau de polynômes C[X] et C est un corps algébriquement clos : de
ce fait, tout polynôme non nul de C[X] est scindé (c’est-à-dire s’exprime
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 271

comme un produit de polynômes de degré 1) et deux polynômes de C[X]


sont premiers entre eux ssi ils n’ont aucune racine commune.

Le théorème de Bézout donne alors l’existence de deux polynômes


U, V ∈ C[X] tels que
U χA + V χ B = 1
et donc, en appliquant en la matrice B chacun des polynômes qui appa-
raissent dans cette égalité (l’évaluation d’une matrice de Mn (C) donnée
par un polynôme est un morphisme d’algèbre entre C[X] et Mn (C)) et
en prenant bien soin de penser que le polynôme constant égal à 1 évalué
en B donne la matrice identité (on peut penser au fait que X 0 = 1 et
que B 0 = In )
U (B)χA (B) + V (B)χB (B) = In
ou encore, puisque le théorème de Cayley-Hamilton nous donne
χB (B) = 0 :
U (B)χA (B) = In ,
d’où, en multipliant par M à droite

U (B)χA (B)M = M

et donc, d’après le résultat de la question précédente

U (B)M χA (A) = M.

Finalement, en utilisant à nouveau le théorème de Cayley-Hamilton


(c’est-à-dire l’égalité χA (A) = 0), on obtient

0 = M,

ce qui est absurde car par hypothèse M est non nulle.


χA et χB ont donc une racine commune et celle-ci constitue une valeur
propre commune à A et B.

Rappel : les racines du polynôme caractéristique (resp. minimal) d’une


matrice sont exactement les valeurs propres de cette matrice.
272 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

2. Condition nécessaire
a. A et tA ont le même polynôme minimal et donc les mêmes valeurs propres
(à savoir précisément les racines de ce polynôme minimal commun).
En effet, pour tout polynôme P , on a :
t
 
(P (A)) = P tA ,

et en particulier, un polynôme s’annule en A ssi il s’annule en tA.

b. En transposant l’égalité tAX = λX on obtient tXA = λtX.

Rappel : Pour deux matrices A et B dont le produit est défini, on a


t
(AB) =t B tA.

La manière la plus simple de construire une matrice carrée à l’aide de


deux vecteurs colonnes X et Y consiste à calculer Y tX (ou de manière
symétrique X tY mais ici tX s’offre à nous devant la matrice A : il ne
reste plus qu’à multiplier à gauche par Y . De même, Y s’offre derrière la
matrice B : il ne reste plus qu’à multiplier à droite par tX). On a donc

Y tXA = Y λtX = λY tX = BY tX

et la matrice M = Y tX convient.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 273

Exercice 3

Thèmes
analyse (fonction lipschitzienne, fonction contractante,
suite)
topologie (norme, partie compacte, partie convexe)

Résultats majeurs
théorème du point fixe
théorème de Bolzano-Weierstrass

Énoncé
On considère || · || une norme sur Rn (avec n entier naturel non nul) et C
une partie convexe compacte non vide de Rn .
On rappelle que f : C → C est dite K-lipschitzienne (avec K ∈ R+ ) si

∀(x, y) ∈ C 2 , ||f (y) − f (x)||  K||y − x||,

et contractante si elle est K-lipschitzienne pour un certain K ∈ [0, 1[.


On se donne f : C → C 1-lipschitzienne et on veut montrer que f admet un
point fixe. Pour cela, on fixe x0 ∈ C et on pose, pour tout n ∈ N∗ , fn : C → C
définie par :  
1 1
fn : x → x0 + 1 − f (x).
n n
1. Montrer, pour tout n ∈ N∗ , que fn est bien définie et qu’elle admet un
unique point fixe xn .
On montrera que fn est contractante, et on énoncera précisément le théo-
rème utilisé.
2. En déduire que f admet un point fixe.
3. Ce résultat reste-t-il vrai si on ne suppose plus C compacte ? si on ne
suppose plus C convexe ?
274 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

Corrigé
1. fn est bien définie sur C car elle est la composée de f (définie sur C ⊂ Rn
et à valeurs dans C) par la fonction affine
 
n 1 1
x ∈ R → x0 + 1 − x ∈ Rn .
n n

On peut voir que fn envoie les éléments de C dans C car C est convexe et
x0 ∈ C.

Rappel : une partie C d’un e.v. est convexe ssi

∀x, y ∈ C, ∀t ∈ [0, 1], tx + (1 − t)y ∈ C.

On peut traduire cela en disant qu’une partie convexe est, par définition,
une partie qui contient tous les segments reliant deux de ses éléments.
Pour x et y fixés, le segment [x, y] est défini par {tx + (1 − t)y, t ∈ [0, 1]}.

On a précisément
 
n 1 1
∀x ∈ R , x ∈ C ⇒ f (x) ∈ C ⇒ x0 + 1 − f (x) ∈ C
(1) (2) n n

1
par (1) définition de f et (2) car ∀n ∈ N∗ , t = ∈]0, 1], C convexe et
n
x0 , f (x) ∈ C.

À moins de connaître explicitement la fonction f et d’être en mesure de


résoudre l’équation f (x) = x (les solutions de cette équation sont les points
fixes de f ), on ne dispose principalement que d’un résultat permettant de
déterminer l’existence d’un point fixe, qui plus est unique : le bien nommé
théorème du point fixe. Celui-ci assure que toute fonction contractante
sur un espace métrique complet admet un unique point fixe dans cet espace.

Montrons, puisqu’on nous y invite avec insistance, que fn est contractante.


Posons pour cela x ∈ C et y ∈ C. Après avoir réduit et factorisé, nous
1
utilisons (1) l’homogénéité de la norme pour extraire le coefficient 1− > 0
n
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 275

puis (2) l’hypothèse que f est 1-lipschitzienne :


     
 1 1 1 1 
||fn (y) − fn (x)|| =  x0 + 1 − f (y) − x0 − 1 − f (x)
 n n n n
  
 
=  1 − 1 (f (y) − f (x))
 n 
 
1
= 1− ||f (y) − f (x)||
(1) n
 
1
 1− ||y − x||.
(2) n

 
1 1
Puisque ∀n ∈ N , 0  1 − < 1, fn est donc

1− -lipschitzienne et
n n
contractante.

(Rn , || · ||) est un espace-vectoriel normé. Il constitue donc bien un espace


métrique (en définissant canoniquement la distance entre deux vecteurs x
et y par d(x, y) := ||y −x||) et puisque c’est un R-espace vectoriel de dimen-
sion finie, il est bien complet. Comme C est une partie compacte de Rn ,
elle constitue elle aussi un espace métrique complet. Le théorème du point
fixe nous permet alors de conclure que fn admet bien un unique point fixe
xn ∈ C.

2. On doit raisonnablement se demander ce qu’il faut faire de la suite (xn )n∈N∗


construite dans la question précédente.
On sait que ∀n ∈ N∗ , xn ∈ C.
C est un compact de Rn , c’est donc une partie fermée et bornée de Rn et de
plus toute suite incluse dans C possède une sous-suite convergente (cette
propriété, connue sous le nom de théorème de Bolzano-Weierstrass
est une caractérisation des parties compactes d’un espace métrique).
 
Posons xϕ(n) n∈N∗ une telle sous-suite convergente de (xn )n∈N∗ pour une
certaine application strictement croissante ϕ : N∗ → N∗ et notons  ∈ C sa
limite.
On utilisera le fait que f est 1-lipschitzienne (∗) et pour cela on introduira
le terme f (xϕ(n) ), le jeu, dans ce genre de situation, consistant toujours à
faire apparaître des termes du type a − b ou du type f (a) − f (b).
276 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

On utilisera également l’égalité


ϕ(n) 1
f (xϕ(n) ) = x − x0 (∗∗)
ϕ(n) − 1 ϕ(n) ϕ(n) − 1
déduite de
 
1 1
xϕ(n) = fϕ(n) (xϕ(n) ) = x0 + 1 − f (xϕ(n) ).
ϕ(n) ϕ(n)
On a donc comme d’habitude, à l’aide d’un usage massif de l’inégalité tri-
angulaire (I.T.) et un usage ponctuel de l’homogénéité (H.) de la norme :

||f () − || = ||f () − f (xϕ(n) ) + f (xϕ(n) ) − ||

 ||f () − f (xϕ(n) )|| + ||f (xϕ(n) ) − ||


I.T.

 || − xϕ(n) || + ||f (xϕ(n) ) − ||


(∗)

 
 ϕ(n) 1 
 || − xϕ(n) || +  xϕ(n) − x0 − 
(∗∗) ϕ(n) − 1 ϕ(n) − 1
 
 1   
 
|| − xϕ(n) || +  xϕ(n) − x0 + xϕ(n) − 
ϕ(n) − 1
 
 1    
 || − xϕ(n) || +  xϕ(n) − x0  + xϕ(n) − 
I.T. ϕ(n) − 1

1  
 ||xϕ(n) − x0 || + 2 xϕ(n) −  .
H. ϕ(n) − 1
Ce dernier majorant tend vers 0 quand n tend vers +∞ car ϕ(n) tend vers
+∞, ||xϕ(n)  − x0 || est
 borné car xϕ(n) − x0 ∈ C qui est une partie bornée
de Rn et xϕ(n) −  tend vers 0 car xϕ(n) tend vers . Ceci prouve que
||f () − || = 0 (car elle est positive et majorée par des quantités arbitrai-
rement proches de 0) et donc f () = .  est bien un point fixe de f .

3. L’application
  carré définie sur l’intervalle ouvert convexe mais non compact
1
C = 0, est 1-lipschitzienne :
2
 
1  2 
∀x, y ∈ 0, : y − x2  = |y + x| × |y − x|  |y − x|
2
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 277

mais n’admet pas de point fixe dans C puisque dans R :

x2 = x ⇔ x = 0 ou x = 1.

L’application x ∈ C = [−2, −1] ∪ [1, 2] → −x ∈ C (C est un compact


de R mais n’est pas convexe) est également 1-lipschitzienne car c’est plus
précisément une isométrie (mieux qu’une majoration de |f (y) − f (x)| par
|y − x|, on a l’égalité de ces deux termes) :

∀x, y ∈ C : |f (y) − f (x)| = | − y + x| = |y − x|

mais elle n’admet pas de point fixe car dans R :

−x = x ⇔ x = 0.

Sans grande surprise, nous venons de voir avec deux exemples simples que
les hypothèses de compacité et de convexité sont absolument nécessaires au
résultat.
278 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

Exercice 4

Thèmes
arithmétique (divisibilité dans Z, Z[X], Q[X], PGCD)
polynômes

Résultat majeur
théorème de Bézout

Remarques du jury
1) Le théorème de Bézout est tout simplement
absent de la plupart des copies.

Énoncé
On se donne P et Q dans Z[X] premiers entre eux dans Q[X] et on pose,
pour tout n ∈ N,
un = P (n) ∧ Q(n)

où la notation x ∧ y désigne le plus grand commun diviseur de x et y. Le


but de l’exercice est de montrer que (un )n∈N est périodique.
1. Montrer qu’il existe d ∈ N∗ tel que pour tout n ∈ N, un divise d.
On pourra utiliser le théorème de Bézout.
2. Montrer, pour tous R ∈ Z[X] et n ∈ N, que R(n + d) − R(n) est divisible
par d.
3. Conclure.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 279

Corrigé
1. Dès qu’il est question de PGCD, on doit envisager d’écrire une relation de
Bézout.
Les polynômes P et Q étant premiers entre eux dans l’anneau euclidien
Q[X] (pour tout corps K, l’anneau K[X] est euclidien), le théorème de
Bézout nous donne l’existence de deux polynômes U et V de Q[X] tels
que
P U + QV = 1.
Par ailleurs, ces polynômes étant à coefficients rationnels, il existe un entier
d ∈ N∗ tel que dU ∈ Z[X] et dV ∈ Z[X] (on peut prendre par exemple d
égal au PPCM des dénominateurs de l’ensemble des coefficients, écrits sous
forme de fractions irréductibles de deux entiers, des polynômes U et V ).
On obtient ainsi
P dU + QdV = d
et donc
∀n ∈ N, P (n)dU (n) + Q(n)dV (n) = d
où chacun des cinq termes P (n), dU (n), Q(n), dV (n) et d est un entier re-
latif (car n est un entier et les polynômes P, dU, Q et dV sont à coefficients
entiers). Ainsi, pour tout n ∈ N, l’entier un = P (n) ∧ Q(n) divise l’entier
P (n)dU (n) + Q(n)dV (n) et donc un divise l’entier d.

2. Il suffit, pour chaque k ∈ N∗ , de vérifier cette propriété pour le monôme


X k , ce qui est vite fait en écrivant
k−1

∀k ∈ N∗ , ∀n ∈ N : (n + d)k − nk = d (n + d)i dk−1−i
i=0

par l’identité remarquable qu’on espère bien connue


k−1

ak − bk = (a − b) ai bk−1−i
i=0

valable dans tout anneau commutatif (en particulier dans Z) et qui se vérifie
aisément en développant le membre de droite de l’égalité.
Comme
k−1

∀k ∈ N∗ , ∀n ∈ N, (n + d)i dk−1−i ∈ N,
i=0
280 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

d est bien un diviseur de (n + d)k − nk pour tout k ∈ N∗ .


Puisque pour tout R ∈ Z[X], R(n + d) − R(n) s’exprime comme une com-
binaison linéaire finie à coefficients entiers de termes du type (n + d)k − nk
où k ∈ N∗ (le terme constant de R disparaît dans la différence), d est bien
un diviseur de R(n + d) − R(n) pour tous R ∈ Z[X], n ∈ N.

3. Comment exploiter le résultat de la question précédente ? En prenant pour


R un polynôme adéquat. Deux polynômes s’offrent à nous naturellement :
P et Q.
En compilant les résultats des deux questions précédentes, on en déduit,
par transitivité de la relation de divisibilité dans Z et en choisissant suc-
cessivement P puis Q pour R, que pour tout n ∈ N, un est un diviseur
commun à P (n + d) − P (n) et Q(n + d) − Q(n) (un divise d et d divise
P (n + d) − P (n) donc un divise P (n + d) − P (n). Il en va de même pour
Q).
N’oubliant pas que un est un diviseur commun à P (n) et Q(n) (et même
le plus grand d’entre eux), on en déduit que un est un diviseur commun à
P (n + d) et Q(n + d) et donc un est un diviseur de leur PGCD, un+d .
Le raisonnement que nous venons de faire pour un est tout aussi valide pour
un+d . En effet, un+d divise d d’après le résultat de la première question et d
divise (P (n + d) − P (n)) d’après celui de la deuxième question. un+d divise
donc (P (n + d) − P (n)) et comme par définition, un+d est un diviseur de
P (n + d), on obtient un+d |P (n). On a de manière analogue un+d |Q(n).
On aboutit donc cette fois au fait que un+d est un diviseur de un et donc
que un+d = un (deux entiers naturels qui se divisent l’un l’autre sont néces-
sairement égaux. Le PGCD de deux entiers relatifs étant un entier naturel,
on a par définition ∀n ∈ N, un ∈ N) et cela pour tout n ∈ N, ce qui signifie
que la suite (un )n∈N est périodique de période d.
282 CHAPITRE 20 : ÉPREUVE DE 2021

Corrigé
1. Soit t ∈ R. L’inéquation

pet + (1 − p)e−t < 1

se ramène, en multipliant par et > 0, à celle-ci :

pe2t − et + (1 − p) < 0

puis, en posant x = et , à celle-là :

px2 − x + (1 − p) < 0

dont le discriminant est∆ =(−1)2 −4p(1−p) = 1−4p+4p2 = (1−2p)2 > 0


1
car 1 − 2p = 0 car p ∈ 0, .
2
Les racines du polynôme px2 − x + (1 − p) d’indéterminée x sont
1 ± (1 − 2p)
,
2p
1−p 1 1 1
c’est-à-dire 1 et = − 1 > 1 (car 0 < p < ⇔ > 2).
p p 2 p
La fonctionpolynômiale x → px2 − x + (1 − p) est donc négative dans
1
l’intervalle 1, − 1 (on se souviendra évidemment de la règle qui dit
p
qu’une fonction polynômiale réelle du second degré est du signe de son
coefficient dominant, ici p > 0, sauf entre ses racines).
L’expression
   − e + (1 − p) est en conséquence
pe 2t t
 négative dans l’intervalle
1 1 1
0, ln −1 (on peut préciser que ln − 1 > 0 puisque − 1 > 1).
p p p
Tout t0 pris dans cet intervalle convient.

2. Cette question peut sembler à première vue bien abrupte. Elle a pourtant
toute l’allure d’un résultat majeur de probabilité : l’inégalité de Markov.
Celle-ci consiste à écrire
E(|X|)
P(|X|  a) 
a
mais également
E(|X|)
P(|X| > a) 
a
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 283

puisque P(|X| > a)  P(|X|  a). Plus généralement, on en déduit

E(|X|p )
∀a > 0, ∀p > 0, P(|X|  a)  ,
ap
à condition que E(|X|p ) existe. On utilise en général p = 1 ou p = 2.
Puisqu’on nous y invite, considérons la variable aléatoire positive X = etSn ,
en particulier pour t = t0 solution de la question précédente. On a alors,
(1) par indépendance des variables (Xi )i∈N∗ et donc des variables (et0 Xi )i∈N∗
(car la fonction x → et0 x est continue sur R),
(2) puisque les variables (Xi )i∈N∗ sont identiquement distribuées,
(3) en utilisant le théorème de transfert :
 n 
 t 0 Sn   n   n
  
t0 i=1 Xi t0 X i
E e = E e =E e = E e t0 Xi
(1)
i=1 i=1

n
    n
= pet0 + (1 − p)e−t0 = pet0 + (1 − p)e−t0 .
(2)+(3)
i=1

Ce qui nous permet d’écrire, d’après l’inégalité de Markov :


  pet0 + (1 − p)e−t0 n
P(Sn > k) = P e t 0 Sn
>e t0 k
 = αk β n
e t0 k

α = e−t0
en posant
β = pet0 + (1 − p)e−t0 .
On a ainsi d’une part β < 1 d’après la question 1. et β > 0 du fait que
p, 1 − p, et0 et e−t0 sont quatre réels strictement positifs et d’autre part
α < 1 car t0 > 0 ⇒ −t0 < 0 ⇒ e−t0 < 1 (par croissance de la fonction
exponentielle sur R).

3. Puisque pour tout k ∈ Z fixé, la quantité αk β n est de limite nulle quand


n tend vers +∞ (puisque 0 < β < 1), le résultat précédent permet alors
d’écrire :

∀ε > 0, ∀k ∈ Z, ∃N ∈ N∗ , n  N ⇒ P(Sn > k)  αk β n  ε,

ce qui montre que Sn tend vers −∞ presque sûrement quand n → +∞.


Épreuve de 2020

Chapitre 21

Épreuve de 2020

Exercice 1

Thème
analyse (suite, série, convergence, équivalent)

Résultats majeurs
théorème de Cesàro
théorème de sommation des équivalents

Remarques du jury
Il faut sérieusement consolider la maîtrise des
bases de l’analyse. Le théorème de sommation des équivalents doit être
connu. Manipuler les sommes doubles et majorer ne doit pas poser
problème. Distinguer la convergence de la suite de celle de la série
(niveau L1). La compréhension de la convergence uniforme d’une série
de fonctions est fragile.
286 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

Énoncé
Soit (un )n∈N une suite de nombres réels. On pose, pour tout n ∈ N,

u0 + 2u1 + · · · + 2n un
vn = .
1 + 2 + · · · + 2n

a. Montrer que si la suite (un )n∈N converge vers une limite , alors (vn )n∈N
converge aussi vers .
Indication : le candidat pourra, s’il le juge utile, commencer par traiter le
cas où l = 0.
b. Dans le cas où un ∼ n, déterminer un équivalent simple de vn lorsque n

tend vers +∞.
 
c. Montrer que si la série un est absolument convergente, alors la série vn
l’est aussi.
d. Dans cette question, on considère les suites de fonctions (Un )n∈N et (Vn )n∈N
définies sur ] − 1, 1[ par

U0 (x) + 2U1 (x) + · · · + 2n Un (x)


Un (x) = xn et Vn (x) = .
1 + 2 + · · · + 2n

La série de fonctions Vn converge-t-elle simplement sur ] − 1, 1[ ? uni-
formément sur ] − 1, 1[ ? uniformément sur tout segment [−a, a] tel que
0 < a < 1?

Corrigé
a. Le cas où  = 0 amène quelques simplifications notables dans les expressions
que nous allons manipuler. Nous n’avons pas jugé utile de le traiter : il suffira
au lecteur de remplacer  par 0 pour en obtenir la rédaction.
Pour chaque n ∈ N, vn est la moyenne arithmétique des termes u0 , u1 , . . . , un
respectivement pondérés par les coefficients 1, 2, . . . , 2n . De ce fait, la suite
(vn )n∈N constitue une variante de la moyenne de Cesàro de la suite (un )n∈N
et la démonstration de sa convergence vers  se fera de la même manière.
Posons ε > 0.
Le fait que (un )n∈N converge vers  se traduit par

∃Nε ∈ N, n  Nε ⇒ |un − | < ε.


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 287

On utilise ce résultat (voir le calcul page suivante) en (4) après :


(1) avoir mis au même dénominateur,
(2) remarqué que celui-ci peut s’écrire sans le symbole somme et regroupé
les deux sommes du numérateur puis
(3) utilisé l’inégalité triangulaire pour la valeur absolue.
Enfin, on utilise (5) :
n  Nε  0 ⇒ 2n  2Nε  1

⇒ 0 < 2n+1 − 2Nε  2n+1 − 1

2n+1 − 2Nε
⇒ 0<  1.
2n+1 − 1
Soit n  Nε .
 
 u0 + 2u1 + · · · + 2n un 
|vn − | =  −  
 1 + 2 + · · · + 2n 
 n n 
  
 k
2 uk − k 
2   
  n 
 k=0 k=0  1  
=   =  2 k
(u − ) 
(1)  n
  (2) 2n+1 − 1  k

 k  k=0
 2 
 
k=0
 
Nε −1 n 
1    
=  k
2 (uk − ) + 2 (uk − )
k
2 n+1 
−1
k=0 k=Nε 
N −1 
1 ε  1
n

 
  2k
(u k − )  + 2k |uk − l|
(3) 2n+1 − 1   2n+1 − 1
k=0 k=Nε

N −1  
1  
ε  1
n

 
 n+1  2k (uk − ) + n+1  2k  ε
(4) 2 −1  2 −1
k=0 k=Nε

N −1 
1 ε  2n+1 − 2Nε
 k 
=  2 (u k − )  + n+1 ε
2n+1 − 1   2 −1
k=0
N −1 
1 ε 
 
  2k
(u k − )  + ε.
(5) 2n+1 − 1  
k=0
288 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

On a de plus
N −1 
ε
1 
 
∃Nε ∈ N, n  Nε ⇒ n+1  2k (uk − )  ε
2 −1 
k=0

N −1 
ε 
 
car  2 (uk − ) est indépendant de n et 2n+1 − 1 −→ +∞.
k
  n→+∞
k=0
On a donc
 
n  max Nε , Nε ⇒ |vn − |  2ε

et on peut conclure que (vn )n∈N converge vers .

b. Le numérateur
 de vn est la somme partielle de la série grossièrement diver-
n
gente 2 un (et pour cause, le terme général de cette série ne converge
pas vers 0 : 2n un → 0 puisque 2n un ∼ 2n n → +∞).
n→+∞ +∞ n→+∞
L’idée principale consiste ici à utiliser le théorème de sommation des
 n n
équivalents (si an ∼ bn alors ak ∼ bk ) pour se ramener à une
+∞ +∞
k=0 k=0
somme partielle télescopique donc simplifiable.
On a 2n un ∼ n2n . En considérant l’expression n2n aux rangs k et k + 1,
+∞
on peut remarquer que

(k + 1)2k+1 − k2k = (2k + 2)2k − k2k = (k + 2)2k ∼ k2k ∼ 2k uk .


+∞ +∞

Ainsi,
n
 n 
 
2k u k ∼ (k + 1)2k+1 − k2k
+∞
k=0 k=0

n
 n

k+1
= (k + 1)2 − k2k
k=0 k=0

n+1
 n

= k2k − k2k
k=1 k=0

= (n + 1)2n+1 ∼ n2n+1
+∞
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 289

et on a donc
n

2k uk
k=0 n2n+1 n2n+1
vn = n ∼ ∼ = n.
 +∞ 2n+1 − 1 +∞ 2n+1
2k
k=0

c. On se laisse tout d’abord porter par (1) l’inégalité triangulaire puis (2) on
minore le dénominateur peu pratique 2n+1 −1 par le plus maniable 2n et (3)
on commute enfin les deux sommes en prenant bien garde de modifier leurs
bornes (on a 0  k  n  N , ce qui permet de bien comprendre quelles
sont les bornes à indiquer dans les nouvelles sommes, dans lesquelles n est
désormais limité par k) :
 n   
  n 
 k   k 
 2 u k   2 u k 
N N
  k=0   k=0
N 
|vn | =  =
  n  2n+1 − 1
n=0  
n=0
2k  n=0
 
k=0

n

N
2k |uk | N n
 k=0
 1  k
  2 |uk |
(1) 2n+1 − 1 (2) 2n
n=0 n=0 k=0

N
 N 
  1
= |uk |
(3) 2n−k
k=0 n=k

N 
 
1 − (1/2)N −k+1
= |uk |
1 − 1/2
k=0

N 
  N

1
= 2− |uk |  2 |uk |.
2N −k
k=0 k=0
 
Puisque la série |un | converge, on obtient par majoration que |vn |
n0 n0
converge aussi.
 
d. Pour tout x ∈] − 1, 1[, |Un (x)| = |xn | converge et sa somme est
n0 n0
290 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

1 
. D’après le résultat de la question précédente, |Vn (x)| converge
1 − |x| 
alors aussi. La série de fonctions Vn converge donc simplement sur
] − 1, 1[.

Il suffit de prendre des x tendant vers 1 pour constater que pour n fixé, la
limite du numérateur de Vn (x) est égale à son dénominateur :
∀n ∈ N, lim Vn (x) = 1.
x→1−

Ainsi, pour tout n ∈ N, sup |Vn (x)| = 1. Ce résultat aura donc beaucoup
x∈]−1,1[
de difficulté à tendre vers 0.
On peut préférer, bien que ce ne soit pas vraiment à propos, d’abord sim-
plifier l’expression de Vn (x) comme suit :
n

2k xk 1 − (2x)n+1
k=0 1 − 2x 1 1 − (2x)n+1
Vn (x) = n = n+1 =
 1−2 2x − 1 1 − 2n+1
2k
1−2
k=0
et constater grâce à ce résultat que pour n arbitrairement fixé,
lim Vn (x) = 1.
x→1−
On peut donc écrire :
1
∃ε = > 0, ∀n ∈ N∗ , ∃x ∈] − 1, 1[, |Vn (x)| > ε,
2
c’est-à-dire la négation de la convergence uniforme de (Vn )n∈N vers 0.
Pour tout x ∈] − 1, 1[ fixé, (Vn (x))n∈N converge bien vers 0 mais la conver-
gence de (Vn )n∈N vers
 la fonction nulle n’est pas uniforme sur ] − 1, 1[ et la
série de fonctions Vn ne converge donc pas non plus uniformément sur
] − 1, 1[.

Par contre, si on se limite à un segment [−a, a] avec 0 < a < 1,


sup |Vn (x)| = Vn (a)
x∈[−a,a]

série de terme général Vn (a) converge


et on sait que la   (il s’agit de la conver-
gence simple de Vn en x = a). On en déduit que Vn converge norma-
lement sur [−a, a] et donc uniformément sur [−a, a] (la convergence normale
entraîne la convergence uniforme).
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 291

Exercice 2

Thèmes
topologie (norme)
analyse (calcul intégral)

Résultat majeur
inégalité de Hölder

Remarques du jury
Le thème de cet exercice est très important.
b) (exercice classique de licence) Éviter ces deux grossières erreurs,
dignes d’un élève de terminale : la fonction est continue donc dérivable,
la fonction est croissante et majorée par M donc converge vers M .

Énoncé
Soit f une fonction continue de [0, 1] dans R∗+ . On pose, pour tout réel
x > 0,
 1 1/x
x
g(x) = f (t) dt .
0

a. Montrer que g est croissante.


Indication : on pourra utiliser l’inégalité de Hölder.
b. Montrer que g(x) tend vers M = sup f (t) lorsque x tend vers +∞.
t∈[0,1]
292 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

Corrigé
a. Pour voir comment utiliser l’inégalité de Hölder, il faut remarquer que

∀x > 0, f ∈ Lx ([0, 1]) et g(x) = ||f ||x

où || · ||p , pour p > 0, désigne la norme usuelle sur Lp ([0, 1]).


L’inégalité de Hölder, pour p > 0 et q > 0 conjugués (la somme de leurs
1 1
inverses vaut 1 : + = 1) donne :
p q
∀f1 ∈ Lp ([0, 1]), ∀f2 ∈ Lq ([0, 1]), ||f1 f2 ||1  ||f1 ||p ||f2 ||q .

Montrer que g est croissante sur R∗+ revient à montrer

0 < x < y ⇒ g(x)  g(y).

Il faut donc se débrouiller pour qu’apparaisse || · ||1 dans le membre de


gauche de cette inégalité. Posons 0 < x < y. On a
 1 1/x
x 1/x
g(x) = f (t) dt = ||f x ||1
0

Il suffit dans un premier temps de poser f1 = f x et prendre pour f2 la


 1 1/q
q
fonction constante égale à 1 sur [0, 1]. Du fait que 1 dt = 1, le
0
membre de droite de l’inégalité de Hölder devient
 1 1/p  1 1/p
px px
||f1 ||p ||f2 ||q = f (t) dt ×1= f (t) dt .
0 0

y
Il convient maintenant de choisir p = (noter que y > x donne p > 1,
x
1
condition nécessaire à l’existence de son conjugué q = > 0). Le
1 − p1
membre de droite devient ainsi
 1 x/y
y
f (t) dt .
0

y
En posant enfin q le conjugué de p (soit q = , précision utile qui
y−x
permet de vérifier que q > 0 et même mieux, que q > 1), on a ainsi

||f1 f2 ||1 = g(x)x , ||f1 ||p = g(y)x , ||f2 ||q = 1


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 293

d’où
g(x)x  g(y)x
et finalement, puisque x, g(x) et (g(y) sont trois réels strictement positifs :
g(x)  g(y).
b. f est une fonction continue sur [0, 1] : elle est donc bornée sur [0, 1] et elle
atteint ses bornes, en particulier sa borne supérieure qu’on peut noter M :
∃t0 ∈ [0, 1], ∃M > 0, f (t0 ) = M = sup f (t).
t∈[0,1]

Par ailleurs, toujours par continuité de f , on a


∀ε > 0, ∃δε > 0, ∀t ∈ [0, 1] ∩ [t0 − δε , t0 + δε ], M − ε  f (t)  M.
Posons alors, pour ε ∈]0, M [ (ceci pour garantir que M − ε > 0, ce qui
permettra d’élever cette quantité à la puissance x), deux nombres a et b
tels que [a, b] = [0, 1] ∩ [t0 − δε , t0 + δε ]. On a en particulier 0  a < b  1.
Ainsi :
 b 1/x
(b − a)1/x (M − ε) = ((b − a)(M − ε)x )1/x = (M − ε)x dt
a

 b 1/x  1 1/x
 x
f (t) dt  x
f (t) dt
(1) a (2) 0

 1 1/x
 M x dt = (M x )1/x = M
(3) 0
car
(1) ∀t ∈ [a, b] ⊂ [0, 1], M − ε  f (t)
(2) f  0 sur [0, 1] et [a, b] ⊂ [0, 1]
(3) ∀t ∈ [0, 1], f (t)  M .

Comme
lim (b − a)1/x (M − ε) = M − ε > M − 2ε
x→+∞
on a
∃A > 0, x > A ⇒ (b − a)1/x (M − ε)  M − 2ε
et donc
∀ε > 0, ∃A > 0, x > A ⇒ M − 2ε  g(x)  M
d’où
lim g(x) = M.
x→+∞
294 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

Exercice 3

Thèmes
théorie des groupes (groupe linéaire, groupe spécial
linéaire, centre d’un groupe, isomorphisme de groupes)
algèbre linéaire (espace vectoriel, automorphisme d’espaces vecto-
riels, homothétie, projecteur)

Résultat majeur
propriétés des projecteurs

Remarques du jury
Si G est un groupe et H un sous-groupe de G,
Z(H) n’est pas en général égal à Z(G) ∩ H (penser à un sous-groupe
monogène d’un groupe de centre trivial) : l’égalité a lieu pour GL(E)
et SL(E) mais il faut le démontrer.

Énoncé
Soit E un espace vectoriel sur le corps R, de dimension finie n  1.
a. Soit u un endomorphisme de E commutant avec tous les projecteurs de E.
(i). Montrer que tout vecteur non nul de E est un vecteur propre de u.
(ii). Montrer que u est une homothétie.
b. Le centre d’un groupe (G, ·) est Z(G) = {x ∈ G | ∀y ∈ G, xy = yx}.
Déterminer le centre du groupe linéaire GL(E) et celui du groupe spécial
linéaire SL(E).
Indication : on pourra utiliser des automorphismes qui sont combinaisons
linéaires d’un projecteur et de l’identité IdE .
c. Montrer que les groupes GL(E) et SL(E) × R∗ sont isomorphes si et seule-
ment si n = dim E est impair.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 295

Corrigé
a. (i). Considérons un projecteur de E. Puisque le choix est large, allons
au plus simple : soit x ∈ E un vecteur non nul et p un projecteur
de E sur Vect(x) parallèlement à un supplémentaire quelconque de
Vect(x) dans E. On a en particulier p(x) = x.
u commute avec p donc

u(x) = u(p(x)) = u ◦ p(x) = p ◦ u(x).

u(x) est donc invariant par p : c’est un élément de Im(p) = Vect(x)


(l’image d’un projecteur est exactement constituée des vecteurs qu’il
laisse invariant) et il est donc du type u(x) = λx pour un certain
λ ∈ R.
Nous venons de démontrer que pour tout vecteur non nul x ∈ E,

∃λ ∈ R, u(x) = λx,

ce qui signifie bien que tout vecteur non nul de E est un vecteur
propre de u.

(ii). De manière générale, si deux vecteurs propres de u sont colinéaires,


il est évident qu’ils sont associés à la même valeur propre. Ainsi, si
dim E = 1, la propriété est triviale (les seuls endomorphismes d’un
espace vectoriel de dimension 1 sont les homothéties).
Si dim E  2, posons x, x ∈ E deux vecteurs non colinéaires et
λ, λ ∈ R tels que u(x) = λx et u(x ) = λ x .
Par ailleurs,

∃λ ∈ R, u(x + x ) = λ (x + x ) = λ x + λ x .

Or, par linéarité de u :

u(x + x ) = u(x) + u(x ) = λx + λ x .

On obtient alors
λ x + λ x = λx + λ x
et donc
(λ − λ)x + (λ − λ )x = 0E .
296 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

La famille (x, x ) étant libre (puisque x et x ne sont pas colinéaires),


on obtient
λ − λ = λ − λ = 0
et donc
λ = λ .

Nous venons de démontrer que deux vecteurs quelconques (colinéaires


ou pas) de E sont toujours associés à la même valeur propre λ.
u est donc l’homothétie de rapport λ.

b. Z(GL(E)) est par définition constitué des automorphismes de E qui com-


mutent avec tous les automorphismes de E (le groupe linéaire GL(E) est
par définition le groupe des automorphismes de E).
Un projecteur p d’un R-espace vectoriel de dimension finie est toujours
diagonalisable ; il est de plus associé, dans une base bien choisie (obtenue
en concaténant une base de son image et une base de son noyau, le noyau
et l’image d’un projecteur étant toujours supplémentaires) à une matrice
diagonale dont les éléments diagonaux sont chacun égaux à 1 ou à 0. Dans
cette base, p+idE est donc associé à une matrice diagonale dont les éléments
diagonaux sont égaux à 2 ou à 1. Cette matrice est alors inversible et p+idE
est un automorphisme de E.
Posons u ∈ Z (GL(E)). u commute donc avec p + idE ∈ GL(E) :

u ◦ p + u = u ◦ (p + idE ) = (p + idE ) ◦ u = p ◦ u + u

et donc u ◦ p = p ◦ u. u commute donc avec tout projecteur p et la question


précédente nous permet de conclure que u est une homothétie.
Réciproquement, toute homothétie commute avec tout automorphisme (c’est
une conséquence immédiate de la linéarité d’un automorphisme).
Nous venons de démontrer que Z(GL(E)) est exactement constitué des
homothéties de E.
Le groupe spécial linéaire SL(E) est le sous-groupe de GL(E) constitué des
automorphismes de E de déterminant 1.
On construit facilement un élément de SL(E) à partir de p + idE ∈ GL(E)
(dont le déterminant est 2k pour k = dim(Im(p))) en l’affublant d’un
coefficient positif correctement choisi (2−k/n si vous voulez tout savoir).
De même que précédemment, le fait que u ∈ Z(SL(E)) commute avec
2−k/n (p + idE ) ∈ SL(E) entraîne que u commute avec p et que u est une
homothétie.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 297

On en déduit que les seuls éléments de Z(SL(E)) sont les homothéties de


rapport λ telles que λn = 1 (le déterminant d’une homothétie de rapport λ
dans un espace vectoriel de dimension n est λn ).
λ est donc une racine réelle de l’unité, ce qui ne laisse pas beaucoup de
possibilités : si n est impair, λ vaut 1 et Z(SL(E)) = {IdE } et si n est pair,
λ vaut 1 ou −1 et Z(SL(E)) = {IdE , −IdE }  {1, −1}.

c. Si n = dim E est impair, l’isomorphisme cherché est fourni par

SL(E) × R∗ → GL(E)
(u, λ) → λu

Si n = dim E est pair, la comparaison des centres de ces deux groupes


montre qu’ils ne peuvent pas être isomorphes. Le centre du produit cartésien
de deux (et plus généralement de m ∈ N∗ ) groupes est égal au produit
cartésien des centres de chacun des deux (ou m) groupes.
On a dans ce cas Z(GL(E))  R∗ mais Z(SL(E) × R∗ )  {−1, +1} × R∗
n’est pas isomorphe à R∗ .
En effet, si on disposait d’un isomorphisme ϕ entre les groupes {−1, 1}×R∗
et R∗ dont les éléments neutres sont respectivement (1, 1) et 1, on aurait

1 = ϕ(1, 1) = ϕ((−1, 1)2 ) = (ϕ(−1, 1))2

et de même 1 = (ϕ(1, −1))2 . Des trois nombres réels ϕ(1, 1), ϕ(−1, 1) et
ϕ(1, −1) au moins deux seraient alors égaux à 1, ou au moins deux seraient
égaux à −1. ϕ ne serait alors pas injective : ceci est bien regrettable pour
une application qu’on espérait bijective comme tout bon automorphisme.
On peut aussi remarquer que le groupe multiplicatif R∗ a un seul élément
d’ordre 2 (le nombre −1 est le seul dont le carré vaut 1), alors que le
groupe multiplicatif {−1, +1} × R∗ a trois éléments d’ordre 2 : les couples
(1, −1), (−1, 1) et (−1, −1) (ce sont les seuls dont les carrés valent (1, 1)).
Ces deux groupes ne peuvent donc pas être isomorphes.
298 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

Exercice 4

Thèmes
topologie (densité, adhérence, intérieur)
algèbre matricielle (comatrice, matrice inversible, rang)
algèbre linéaire (groupe linéaire)

Résultats majeurs
GLn (C) est un ouvert de Mn (C).
∀A ∈ Mn (C), A × t Com(A) = det(A)In

Remarques du jury
Les propriétés du rang d’une matrice extraite
sont mal comprises, ainsi que les informations sur le rang données par
A × t Com(A) = det(A)In .

Énoncé
Soit n un entier supérieur ou égal à 3. Pour toute matrice A ∈ Mn (C), on
note Com(A) la comatrice de A, dont les coefficients sont les cofacteurs de A.
a. Déterminer le rang de Com(A) en fonction du rang de A, qu’on note rgA.
On distinguera trois cas : rgA = n, rgA  n − 2, rgA = n − 1.
b. Soit X = {Com(A)|A ∈ Mn (C)}. Montrer que GLn (C) ⊂ X.
c. (i) Montrer que GLn (C) est dense dans Mn (C). Quelle est l’adhérence
de X dans Mn (C) ?
(ii) Déterminer l’intérieur de X dans Mn (C).
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 299

Corrigé
a. Si rgA = n alors A est inversible et il est de notoriété publique que son
1 t
inverse A−1 = Com(A) est inversible et de rang n. Com(A) est donc
det A
également de rang n.
Si rgA  n−2 alors aucune sous-matrice de A de taille n−1 n’est inversible
(sinon A serait au moins de rang n − 1). Leurs déterminants sont donc tous
nuls et Com(A) (dont les coefficients sont, au signe près, les déterminants
des sous-matrices de A de taille n − 1) est la matrice nulle et est de rang
nul (noter que la matrice nulle est la seule matrice de rang nul).
Si rgA = n − 1 alors A n’est pas inversible (les matrices inversibles étant
précisément celles dont le rang vaut n) et son déterminant est nul. On a
alors l’égalité
t
A × ComA = det(A)In = 0n (la matrice nulle)

et donc
Im(ComA) ⊂ Ker(t A).
Il s’en suit

rg(ComA)  dim(Ker(t A)) = dim(Ker(A)) = 1

(noter que A et t A ont même rang, leurs images ont même dimension et
leurs noyaux aussi).
Comme on suppose rgA = n − 1, une sous-matrice de A de taille n − 1 est
inversible et donc ComA n’est pas la matrice nulle : son rang n’est donc
pas nul non plus et ainsi rg(ComA) = 1.

b. Posons M ∈ GLn (C). Remarquons tout d’abord que

ComM = det(M )t M −1 ∈ GLn (C),

Au facteur près det(M ), calculer une comatrice revient à faire la transposée


 −1  
de l’inverse de M . Ces deux opérations commutant ( t M = t M −1 ),
la comatrice de la comatrice de M redonne alors M , à un facteur près.
Cherchons λ ∈ C∗ telle que Com(λComM ) = M .
On a
det(ComM ) = (det(M ))n det(M −1 ) = (det(M ))n−1
300 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

et
Com(λComM ) = det(λComM )t (λComM )−1

= λn det(M )n−1 λ−1 det(M )−1 M

= λn−1 (det(M ))n−2 M.


Il suffit alors de poser λ une des n − 1 solutions complexes de l’équation

λn−1 (det(M ))n−2 = 1.

On a alors
N = λCom(M ) ∈ GLn (C)
et
M = Com(N ) ∈ X.
c. (i). Une matrice A ∈ Mn (C) possède au plus n valeurs propres com-
plexes distinctes, à savoir les λ ∈ C telles que A − λIn ∈
/ GLn (C).
On peut alors voir A comme la limite de la suite de GLn (C)
 
1
A − In .
p p∈N∗ , 1 ∈Sp(A)
/
p

GLn (C) est donc dense dans Mn (C). Puisque

GLn (C) ⊂ X ⊂ Mn (C),

X est également dense dans Mn (C). L’adhérence de X est donc


Mn (C).

(ii). X contient l’ouvert GLn (C), son intérieur le contient donc aussi (l’in-
térieur de X est le plus grand ouvert inclus dans X).
Soit M ∈ X, M ∈ / GLn (C).

∃A ∈ Mn (C), M = ComA

Les résultats de la question a. permettent de dire que A n’est pas


inversible (sinon M le serait, ce qui n’est pas le cas par hypothèse)
et qu’alors rgM vaut 0 ou 1.
Premier cas : si rg(M ) = 0 alors M est la matrice nulle et elle est la
limite de la suite de matrices de rang 2
 
1
(E11 + E22 ) .
p p∈N∗
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 301

Deuxième cas : si rg(M ) = 1 alors

∃P, Q ∈ GLn (C), M = P E11 Q

et M est la limite de la suite de matrices de rang 2


   
1
P E11 + E22 Q .
p p∈N∗

Un élément M non inversible de X peut donc être vu comme la


limite d’une suite de matrices de rang 2 : celles-ci ne sont pas inver-
sibles (car n  3) et évidemment ni de rang 0 ni de rang 1 : elles
sont donc toutes dans le complémentaire de X. Leur limite M est
donc dans l’adhérence du complémentaire de X, c’est-à-dire dans le
complémentaire de l’intérieur de X :
 c

c
M ∈X = X .

Une telle matrice M n’est donc pas dans l’intérieur de X.


On peut donc conclure que l’intérieur de X est égal à GLn (C) :

X = GLn (C).
302 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

Exercice 5

Thèmes
calcul intégral (transformée de Laplace)
probabilités (loi exponentielle, loi Gamma, densité, fonction de ré-
partition, espérance, convergence presque sûre, convergence en loi)

Résultats majeurs
loi des grands nombres
règle de Leibniz de dérivation sous le signe intégrale

Remarques du jury
Il faut citer un théorème pour dériver sous le
signe intégrale et fournir une domination correcte. se tromper en dé-
rivant par rapport à s est rédhibitoire. L’usage des valeurs absolues
est indispensable en analyse, notamment pour l’intégrabilité (majorer
f (x)e−sx est insuffisant : il faut majorer |f (x)e−sx |).

Énoncé
Soit f : ]0, +∞[ → R une fonction continue et bornée. On pose, pour tout
réel s > 0,
 +∞
L(s) = f (x)e−sx dx
0

a. Montrer que L est de classe C ∞ sur ]0, +∞[ et donner l’expression de ses
dérivées successives.
b. Soit (Xn )n∈N\{0} une suite de variables aléatoires définies sur un espace
probabilisé noté (Ω, T , P), indépendantes et suivant toutes une même loi
exponentielle de paramètre λ > 0. Montrer que pour tout n ∈ N\{0}, la
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 303

variable aléatoire Sn = X1 + · · · + Xn admet pour densité la fonction ρn


définie par
λn tn−1 −λt
∀t > 0, ρn (t) = e .
(n − 1)!
Donner la densité de la variable Tn = Sn /n.
c. En considérant l’espérance des variables aléatoires Yn = f (Tn ), montrer que
si L est la fonction nulle, alors f aussi.

Corrigé
Il peut être rassurant de remarquer que la fonction L ainsi définie est la
transformée de Laplace de la fonction f , notion dont l’agrégatif conscien-
cieux connaît bien les nombreuses propriétés.
a. On ne se contentera pas de dire de manière élusive que c’est une propriété
bien connue de la transformée de Laplace : le jury attend précisément
une démonstration de ce fait. On utilise pour cela l’incontournable règle de
dérivation sous le signe intégrale connue sous le nom de règle de Leibniz.

Soit M > 0 un majorant de f sur ]0, +∞[ (ce majorant existe puisque
f est par hypothèse bornée sur ]0, +∞[. On peut en particulier prendre
M = ||f ||∞ la borne supérieure de f sur cet intervalle) et

g : ]0, +∞[×]0, +∞[ → R


(s, x) → f (x)e−sx .

La fonction exponentielle est indéfiniment dérivable sur R.


Pour tout x > 0, s → f (x)e−sx est donc de classe C ∞ sur ]0, +∞[ et

∂ng
∀n ∈ N, ∀(s, x) ∈]0, +∞[×]0, +∞[, (s, x) = (−x)n f (x)e−sx .
∂sn
Posons s0 > 0. On a alors
 
∀x > 0, (s  s0 ) ⇒ (sx  s0 x) ⇒ (−sx  −s0 x) ⇒ e−sx  e−s0 x

et donc
 n 
∂ g 
∀n ∈ N, ∀x > 0, ∀s  s0 ,  
 ∂sn (s, x)  M x e
n −s0 x
.
304 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

∂ng
La fonction x → (s, x) est donc localement dominée sur tout intervalle
∂sn
[s0 , +∞[ par la fonction x → M xn e−s0 x . Cette dernière est intégrable sur
]0, +∞[ (c’est une fonction continue sur ]0, +∞[ et quand x → +∞, xn =
 −s x/2
o e0 s x/2 et donc x e 0 = o e 0
n −s x . x → e−s0 x/2 étant intégrable sur
]0, +∞[, il en est de même de x → xn e−s0 x ).

L est donc de classe C ∞ sur ]0, +∞[ et


 +∞
∂ng
∀n ∈ N, ∀s ∈]0, +∞[, L(n) (s) = (s, x)dx
0 ∂sn
 +∞
= f (x)(−x)n e−sx dx.
0

b. On pourrait un peu hardiment rappeler que la somme de n variables indé-


pendantes de même loi exponentielle suit une loi Gamma dont la densité
est précisément la fonction ρn donnée dans l’énoncé. Cela serait peut-être
un peu court : il semble justement que l’on attende ici la démonstration de
ce fait (il sera cependant bien vu que le candidat étale sa culture en parlant
de la loi Gamma). La densité de la somme de deux variables aléatoires indé-
pendantes est classiquement obtenue à l’aide d’un produit de convolution.
Il ne reste qu’à enrober cela dans une récurrence et le tour sera joué.
La densité de la loi exponentielle de paramètre λ > 0 est la fonction

fλ : t ∈ R → λe−λt 1R∗+ (t)

qu’on peut écrire plus simplement

t ∈ R∗+ → λe−λt = ρ1 (t).

La propriété à démontrer est donc vraie au rang n = 1.


Supposons qu’elle le soit à un rang n ∈ N∗ fixé. Par indépendance des
variables Sn et Xn+1 , leur somme Sn+1 = Sn + Xn+1 a pour densité une
fonction ρn+1 définie par le produit de convolution suivant :

∀t ∈ R, ρn+1 (t) = fλ ∗ ρn (t)



= fλ (t − x)ρn (x)dx
R

λn xn−1 −λx
= λe−λ(t−x) 1R∗+ (t − x) e 1R∗+ (x)dx.
R (n − 1)!
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 305

Les deux conditions t − x > 0 et x > 0 sont équivalentes à 0 < x < t, ce


qui est absurde pour t  0 : ρn+1 (t) est donc nulle si t  0 (car dans ce cas
la fonction intégrée est identiquement nulle).
Pour t > 0 fixé, la fonction intégrée x → f (t − x)ρn (x) est nulle en dehors
de l’intervalle ]0, t[. On obtient alors
 t
λn xn−1 −λx
ρn+1 (t) = λe−λ(t−x) e dx
0 (n − 1)!
 t
λn+1 xn−1
= e−λt dx
0 (n − 1)!
 t
e−λt λn+1
= xn−1 dx
(n − 1)! 0

 
e−λt λn+1 xn t
=
(n − 1)! n 0

λn+1 tn −λt
= e ,
n!
ce qui prouve que la propriété est vraie au rang n + 1 et qu’elle est donc,
par le principe de récurrence, vraie pour tout n ∈ N∗ .

Soit n ∈ N∗ . La méthode infaillible pour obtenir la densité de Tn = Sn /n


consiste à passer par sa fonction de répartition, dont la dérivée est sa densité.
∀t ∈ R, FTn (t) = P[Tn  t] = P[Sn /n  t] = P[Sn  nt] = FSn (nt).
On obtient donc, en dérivant :
∀t ∈ R, fTn (t) = FTn (t) = (FSn (nt))

= (nt) FSn (nt) = nρn (nt)

λn (nt)n−1 −λnt
= n e 1R∗+ (nt)
(n − 1)!

(nλ)n tn−1 −(nλ)t


= e 1R∗+ (t).
(n − 1)!
On pouvait procéder autrement : Tn peut être vue comme la somme de n
variables aléatoires indépendantes X1 /n, . . . , Xn /n de même loi exponen-
tielle de paramètre nλ : en effet, si X suit la loi exponentielle de paramètre
306 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

λ et a > 0, alors aX suit la loi exponentielle de paramètre λ/a. Il suffit


d’écrire la fonction de répartition de aX pour s’en convaincre. De ce fait, la
densité de Tn est identique à celle de Sn , à ce détail près que le paramètre
λ est remplacé par nλ, ce qui correspond bien à l’expression obtenue.

c. f est une fonction continue et bornée, on peut donc appliquer le théorème


de transfert pour obtenir
E(Yn ) = E(f (Tn ))
 +∞
(nλ)n xn−1 −nλx
= f (x) e dx
0 (n − 1)!

(nλ)n (n−1)
= (−1)n−1 L (nλ).
(n − 1)!
Si L est la fonction nulle, alors
∀n ∈ N∗ , E(Yn ) = 0.
Mais comment en déduire que f est nulle ? Il est nécessaire ici d’avoir un
réflexe vital : Tn est la moyenne des variables aléatoires indépendantes et
identiquement distribuées X1 , . . . , Xn . La loi forte des grands nombres
nous donne
p.s. 1
Tn −→ E(X1 ) =
λ
et donc
L 1
Tn −→ E(X1 ) =
λ
car la convergence presque sûre entraîne la convergence en loi (on peut aussi
directement évoquer la loi faible des grands nombres qui donne directement
ce résultat). f étant continue et bornée, on en déduit
 
1
E(Yn ) = E (f (Tn )) −→ f .
n→+∞ λ
Comme
∀n ∈ N∗ , E(Yn ) = 0
on obtient alors  
1
∀λ > 0, f =0
λ
d’où, puisque l’application λ → 1/λ définit une bijection de R∗+ sur lui-
même :
∀t > 0, f (t) = 0.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 307

Exercice 6

Thèmes
espaces euclidiens (produit scalaire, norme, base
orthonormée, hyperplan)
probabilités (espérance, variance, covariance, événement presque sûr)
algèbre linéaire (valeur propre, vecteur propre, matrice symétrique
positive, noyau, transposée)

Résultat majeur
théorème spectral

Remarque du jury
Les candidats ne doivent pas faire l’impasse sur
les probabilités, thème important dans l’enseignement des mathéma-
tiques dès le lycée.

Énoncé
Les variables et vecteurs aléatoires considérés sont définis sur un espace
probabilisé (Ω, T , P).
Soit n un entier  1. L’espace Rn (identifié à Mn,1 (R)) est muni de son
produit scalaire canonique ·, · et de la norme associée || · ||. Soit
 
X1
X =  ... 
 

Xn

un vecteur
 aléatoire à valeurs dans R et de carré intégrable, c’est-à-dire que
n

E ||X|| < +∞.


2
308 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

La covariance de deux variables aléatoires réelles Y et Y  est notée

Cov(Y, Y  ).

La matrice de covariance du vecteur X, notée C(X), est définie par

C(X) = (Cov (Xi , Xj ))1i,jn ∈ Mn (R).

a. (i) Soit v ∈ Rn . Montrer que la variable aléatoire Y = v, X admet une


variance, égale à t vC(X)v.
(ii) Soit A ∈ Mn (R) et Z = AX. Exprimer C(Z) en fonction de A et
C(X).
b. Soit M une matrice de Mn (R). Montrer qu’il existe un vecteur aléatoire X
à valeurs dans Rn , de carré intégrable, tel que C(X) = M si et seulement
si la matrice M est symétrique positive.
c. On suppose dans cette question que le vecteur aléatoire X à valeurs dans
Rn est de carré intégrable et centré : E(X) = 0.
(i) Soit H un hyperplan de Rn et v un vecteur normal à H. Montrer
que l’événement [X ∈ H] est presque sûr si et seulement si v ∈
Ker (C(X)).
(ii) Montrer qu’il existe un plus petit sous-espace vectoriel F de Rn tel
que X ∈ F presque sûrement et le déterminer en fonction de C(X).

Corrigé
 
v1
(i) On notera v =  ...  ∈ Rn .
 
a.
vn
On a
   
E ||X||2 < ∞ ⇔ ∀1  i  n, E Xi2 < ∞

⇔ ∀1  i  n, Xi ∈ L2 (Ω, T , P)

n

⇒ Y = vi Xi ∈ L2 (Ω, T , P)
(1)
i=1

avec (1) car L2 (Ω, T , P) est un R-espace vectoriel.


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 309

 
L’hypothèse E ||X||2 < ∞ permet donc de dire que Y admet une
variance et celle-ci est donnée par

V(Y ) = Cov(Y, Y )
 
n
 n

= Cov  v i Xi , v j Xj 
i=1 j=1

n 
 n
= vi vj Cov(Xi , Xj )
(2)
i=1 j=1

t
= vC(X)v,

avec (2) bilinéarité de la covariance.

(ii)
 n 

     a1j Xj 
Z1 X1  j=1 
 
 ..   ..   .
. 
 .  = Z = AX = (aij )1i,jn  .  =  .
 n . 
Zn Xn  
 anj Xj 
j=1

C’est-à-dire
n

∀1  i  n, Zi = aij Xj .
j=1

Par bilinéarité de la covariance :

∀1  i, j  n,
 n n

 
Cov(Zi , Zj ) = Cov aik Xk , aj X
k=1 =1

n
 n

= aik aj Cov(Xk , X ),
k=1 =1

ce qui correspond au produit de la i-ième ligne de A par C(X) par


la j-ième colonne de tA, c’est-à-dire le terme situé sur la ligne i et
310 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

la colonne j de AC(X)tA (les (aik )1kn sont les termes de la i-ième


ligne de A et les (aj )1n ceux de la j-ième colonne de tA).
Comme Cov(Zi , Zj ) est le terme situé sur la ligne i et la colonne j de
C(Z), on a donc

C(Z) = C(AX) = AC(X)tA.

b. La covariance étant une forme symétrique, il est clair qu’une matrice de


covariance est symétrique.
La variance d’une variable aléatoire réelle étant toujours positive ou nulle,
l’égalité
V(Y ) = t vC(X)v
obtenue en a.(i) indique qu’une matrice de covariance C(X) est positive.
Une matrice de covariance est donc toujours symétrique positive.

Réciproquement, si M est une matrice symétrique positive, le théorème


spectral donne l’existence d’une matrice P ∈ On (R) et d’une matrice
diagonale D ∈ Mn (R+ ) (ses coefficients diagonaux λ1 , . . . , λn sont positifs
ou nuls) telles que
M = P DtP.
Posons des variables X1 , . . . , Xn indépendantes et de variances respectives
λ1 , . . . , λn (on peut prendre par exemple des variables gaussiennes).
On a donc 
V(Xi ) = λi si i = j
Cov(Xi , Xj ) =
0 sinon.
 
X1
 .. 
X =  .  est alors un vecteur de carré intégrable et on obtient
Xn

C(X) = D

et
C(P X) = P DtP = M
d’après le résultat de la question a.(ii).

c. (i) H est un hyperplan de vecteur normal v = 0. On a alors l’équivalence

X ∈ H ⇔ v, X = 0.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 311

Rappelons que la variance d’une v.a. est nulle ssi cette variable est
constante presque sûrement (et celle-ci est alors plus précisément
égale presque sûrement à son espérance). En particulier, si une va-
riable est centrée (c’est-à-dire d’espérance nulle) et de variance nulle,
alors elle est nulle presque sûrement.
On se sert de cette propriété en (5) ci-dessous.
Première démonstration :
On a d’une part, avec
(1) par linéarité à droite,
(3) par linéarité à gauche de la covariance,
(4) car Cov(T, T ) = V(T ) pour tout v.a.r. T ,
(6) par définition du produit scalaire canonique sur Rn .

v ∈ Ker(C(X)) ⇔ C(X)v = 0

n

⇔ ∀1  i  n, Cov(Xi , Xj )vj = 0
j=1

 
n

⇔ ∀1  i  n, Cov Xi , v j Xj  = 0
(1)
j=1

 
n
 n

⇒ Cov Xi , v j Xj  = 0
(2)
i=1 j=1

 
n n

⇔ Cov  v i Xi , v j Xj  = 0
(3)
i=1 j=1

 n


⇔ V v i Xi =0
(4)
i=1

n

⇔ v i Xi = 0 p.s.
(5)
i=1

⇔ v, X = 0 p.s.
(6)

⇔ X∈H p.s.
312 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

Ceci ne prouve qu’une implication car (2) n’est pas une équivalence :
si chaque terme d’une somme est nul alors cette somme est nulle aussi
mais le fait qu’une somme soit nulle n’entraîne pas que chacun de ses
termes sont nuls (à moins de savoir que tous les termes sont de même
signe, ce qui n’a aucune raison d’être vrai ici).
Par ailleurs
v, X = 0 p.s. ⇒ ∀1  i  n, Xi v, X = 0 p.s.
(7)

⇒ ∀1  i  n, E(Xi v, X) = 0


(8)

 
n

⇔ ∀1  i  n, E Xi v j Xj  = 0
j=1

n

⇔ ∀1  i  n, vj E(Xi Xj ) = 0
(9)
j=1

n

⇒ ∀1  i  n, vj Cov(Xi , Xj ) = 0
(10)
j=1

⇒ C(X)v = 0

avec (7) car

P(Xi v, X = 0) = P(Xi = 0 ∪ v, X = 0)  P(v, X = 0)

et donc
P(v, X = 0) = 1 ⇒ P(Xi v, X = 0) = 1
(si l’événement [v, X = 0] est presque sûr, c’est-à-dire de probabilité
égale à 1, alors l’autre aussi), (8) car si une variable est nulle presque
sûrement, alors son espérance est nulle (la réciproque est bien sûr
fausse), (9) par linéarité de l’espérance et (10) car les variables Xi
sont centrées par hypothèse :

∀1  i  n, E(Xi ) = 0.

Le fait d’avoir des variables centrées donne en effet

∀1  i, j  n, Cov(Xi , Xj ) = E(Xi Xj )
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 313

puisque de manière générale

Cov(Xi , Xj ) = E(Xi Xj ) − E(Xi )E(Xj ).

Deuxième démonstration : on peut aller beaucoup plus vite en uti-


lisant un résultat classique des matrices symétriques positives. Une
telle matrice est diagonalisable (comme toute matrice symétrique) et
ses valeurs propres sont toutes positives (comme toute matrice po-
sitive). Il existe une base de Rn , non seulement orthonormée pour
le produit scalaire usuel mais constituée de vecteurs propres pour
cette matrice. En effet, la matrice étant diagonalisable, elle admet
une base de vecteurs propres. Des vecteurs propres vi et vj associés
à des valeurs propres distinctes λi et λj d’une matrice symétrique A
sont toujours orthogonaux :

Avi , vj  = λi vi , vj  = λi vi , vj ,

Avi , vj  = vi , tAvj  = vi , Avj  = vi , λj vj  = λj vi , vj .

On a donc

λi vi , vj  = λj vi , vj 

et ainsi

λi = λj ⇒ vi , vj  = 0.

Sans oublier que le procédé de Gram-Schmidt permet d’orthonor-


maliser les bases de chaque sous-espace propre.
n

En écrivant v = αi vi dans une telle base (v1 , . . . , vn ) de Rn asso-
i=1
314 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

ciée à la matrice C(X), on obtient


t vC(X)v = v, C(X)v

n
 n

=  αi vi , C(X) αj vj 
i=1 j=1

n 
 n
= αi αj vi , C(X)vj 
i=1 j=1

n 
 n
= αi αj vi , λj vj 
i=1 j=1

n 
 n
= αi αj λj vi , vj 
i=1 j=1

n

= λi αi2
i=1

puisque vi , vj  = δij (la base (v1 , . . . , vn ) est orthonormée : si i = j


alors vi , vj  = 0 et vi , vi  = ||vi ||2 = 1).
Tout ce qui précède n’est pas à redémontrer dans une copie d’agré-
gation et nous ne l’avons détaillé ici qu’en guise de rappel.
Une telle base orthonormée permet ainsi d’obtenir
n

t vC(X)v =0 ⇔ λi αi2 = 0
i=1

⇔ ∀1  i  n, λi αi2 = 0
(1)

⇔ ∀1  i  n, λi = 0 ou αi = 0
(2)

⇔ v ∈ Ker(C(X))

avec d’une part (1) car une somme de termes positifs est nulle ssi
chacun de ses termes est nul (ici, ∀1  i  n, λi  0 et αi2  0 car
αi ∈ R) et d’autre part car (2) signifie que les seules composantes αi
éventuellement non nulles de v dans la base (v1 , . . . , vn ) sont celles
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 315

correspondant aux vecteurs propres associés à une valeur propre λi =


0, autrement dit les vecteurs propres qui constituent une base du
noyau de C(X).
(ii) Premier cas : si le noyau de C(X) ne contient aucun vecteur v = 0
(c’est-à-dire si Ker(C(X)) = {0} et C(X) est alors une matrice symé-
trique définie positive), le résultat de la question précédente implique
que X n’appartient à aucun hyperplan presque sûrement. X n’appar-
tient donc à aucun sous-espace strict de Rn presque sûrement (tout
sous-espace strict de Rn étant inclus dans un hyperplan). Le plus pe-
tit espace cherché est donc Rn tout entier.

Deuxième cas : si par contre le noyau de C(X) contient des vecteurs


non nuls v (c’est-à-dire si Ker(C(X)) = {0}) alors le résultat de
la question précédente implique que X est presque sûrement dans
chacun des hyperplans

Hv := (Vect(v))⊥ .

Il ne faut pas conclure trop vite que X est presque sûrement dans

Hv ,
v∈Ker(C(X))
v=0

l’appartenance presque sûre n’étant pas forcément conservée pour une


intersection portant sur un nombre infini (et a fortiori indénombrable)
de parties (par exemple, si T est une variable gaussienne réelle, T est
presque sûrement dans toute partie du type R\{a}  pour a ∈ R mais
T n’est évidemment pas presque sûrement dans R\{a} = ∅).
a∈R
L’intersection 
Hv
v∈Ker(C(X))
v=0

peut cependant être vue comme une intersection portant sur un nombre
fini de vecteurs. En effet, il suffit de considérer une base (v1 , . . . , vk )
de Ker(C(X)) pour voir facilement que

 k

Hv = Hvi
v∈Ker(C(X)) i=1
v=0
316 CHAPITRE 21 : ÉPREUVE DE 2020

car
k

x∈ Hv i ⇔ ∀1  i  k, vi , x = 0
i=1

⇔ ∀v ∈ Ker(C(X)), v, x = 0
(1)


⇔ x∈ Hv
v∈Ker(C(X))
v=0

où (1) vient de la linéarité à gauche du produit scalaire et du fait que


Ker(C(X)) = Vect(v1 , . . . , vk ).
Nous allons montrer que cette intersection constitue l’espace cherché.
Considérons un sous-espace strict F de Rn et l’ensemble H des hy-
perplans le contenant.

H = {H ⊂ Rn , H s.e.v. de Rn , dim(H) = n − 1, F ⊂ H}.

Notons k ∈ N la dimension de F . On a donc k  n − 1.


H est bien sûr non vide car on peut aisément construire un hyperplan
contenant F en complétant une base (x1 , . . . , xk ) de F par n − k − 1
vecteurs linéairement indépendants xk+1 , . . . , xn−1 ∈ F c pour obtenir
une famille libre (x1 , . . . , xn−1 ) de n − 1 vecteurs, c’est-à-dire la base
d’un hyperplan (on peut utiliser pour cela le théorème de la base
incomplète pour compléter (x1 , . . . , xk ) en une base (x1 , . . . , xn ) de
Rn et ôter le dernier vecteur xn ). On a alors

F ⊂ H = Vect(x1 , . . . , xn−1 ) ∈ H.

Si H ∈ H et si v est un vecteur normal à H (un tel vecteur existe


toujours, il suffit par exemple de prendre n’importe quel vecteur ex-
térieur à H pour compléter une base de H en une base de Rn et
appliquer le procédé de Gram-Schmidt à cette dernière base : le
dernier vecteur de la base orthonormée ainsi obtenue est un vecteur
normal à H), on a alors v = 0 (par définition d’un vecteur normal),
v ∈ Ker(C(X)) (d’après le résultat de la question précédente) et
H = Hv , en conséquence de quoi
 
Hv ⊂ H ⊂ F.
v∈Ker(C(X)) H∈H
v=0
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 317

Notons que cette dernière inclusion est en fait une égalité mais cette
précision n’est pas utile et on évite ainsi d’avoir à la justifier. L’inclu-
sion vient du fait que si v ∈ F , on peut construire un élément de H
de H ne contenant pas v en complétant comme ci-dessus une base de
F mais cette fois-ci avec des vecteurs non colinéaires à v, c’est-à-dire
de manière à avoir 
H Vect(v) = Rn .
On a donc 
v ∈ H,
H∈H

d’où 
v ∈ F ⇒ v ∈ H,
H∈H

c’est-à-dire  c

c
F ⊂ H
H∈H

et donc finalement 
H ⊂ F.
H∈H
k

Hv est donc le plus petit sous-espace vectoriel de Rn au-
v∈Ker(C(X))
v=0
quel X appartient presque sûrement.
On peut remarquer que ce résultat convient également au cas où
Ker(C(X)) = {0}. En effet
 
Hv = Hv = Rn
v∈Ker(C(X)) v∈∅
v=0

(une intersection portant sur un ensemble vide est égale à l’espace


tout entier).
Épreuve de 2019
320 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

Énoncé
Pour une suite de complexes a = (an )n∈N , on pose

A(a) = {r  0 tel que (|an |rn )n∈N est majorée},

B(a) = {r  0 tel que lim an rn = 0},


n→+∞



C(a) = {r  0 tel que an rn est convergente}.
n=0

1. Justifier les inclusions C(a) ⊂ B(a) ⊂ A(a). Montrer que ces inclusions
peuvent être strictes.
2. Montrer que, dans R = R ∪ {−∞, +∞}, on a

sup A(a) = sup B(a) = sup C(a).




On rappelle que le rayon de convergence d’une série entière a n zn
n=0
correspond à la borne supérieure de l’ensemble A(a) dans R.
3. Déterminer le rayon de convergence des séries entières

 ∞
 ∞

1+i n2 2 (−1)n n n
a) z (avec i = −1), b) 2 z , c) cos (2n ) z n .
n
n=1 n=0 n=0



4. On suppose que la série entière an z n a un rayon de convergence R ∈
n=0

 an
]0, +∞[. Montrer que la série entière z n a un rayon de convergence
n!
n=0
infini.

 an
5. Si la série entière z n a un rayon de 2, que peut-on dire du rayon
n!
n=0


de convergence de an z n ? Donner un tel exemple de série entière.
n=0
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 321

Corrigé

1. Si une série un est convergente alors son terme général un est de
n0
limite nulle. Ceci est en particulier valable pour les séries entières, ce qui
suffit à justifier la première inclusion C(a) ⊂ B(a).
La réciproque par contre est bien sûr fausse et le contre-exemple le plus
classique est fourni par la série harmonique
 1 1
=
n+1 n
n0 n1

1
dont le terme général est de limite nulle mais la somme est diver-
n+1
gente :
+∞
 1
= +∞
n+1
n=0

(on peut se souvenir qu’il s’agit là d’un cas particulier du critère de Rie-
1
mann). En posant ∀n ∈ N, an = et r = 1, on a r ∈ B(a) et
n+1
r∈/ C(a). L’inclusion C(a) ⊂ B(a) est stricte dans ce cas.

Toute suite convergente étant bornée (ce résultat n’est pas spécifique à
C : il est valable dans tout espace métrique),

lim an rn = 0 ⇒ (|an |rn )n∈N est majorée,


n→+∞

cela justifie la deuxième inclusion : B(a) ⊂ A(a).


La réciproque est évidemment fausse, une suite bornée étant rarement
de limite nulle. Il suffit ici de prendre pour a la suite constante égale à
1 et de poser r = 1. On a alors r ∈ A(a) mais r ∈ / B(a). L’inclusion
B(a) ⊂ A(a) est stricte dans ce cas.

2. La double inclusion
C(a) ⊂ B(a) ⊂ A(a)
obtenue dans la question précédente donne immédiatement

sup C(a)  sup B(a)  sup A(a).


322 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

On peut le démontrer en détail : sup A(a) est un majorant (éventuelle-


ment infini) de A(a). Puisque B(a) ⊂ A(a), sup A(a) est donc aussi un
majorant de B(a). Or, la borne supérieure de B(a) est le plus petit des
majorants (éventuellement infini) de B(a).
On a donc sup B(a)  sup A(a).
On obtient de même sup C(a)  sup B(a).

Il reste donc à montrer sup A(a)  sup C(a), ce qui s’obtient en appli-
n
quant le lemme d’Abel : si pour  un réel r > 0 la suite (|an |r )n∈N est
bornée et |z| < r alors la série an z n est absolument convergente.
n0
Première démonstration : un élément intérieur à A(a) est donc auto-
matiquement dans C(a). En effet, si r est dans l’intérieur de A(a), il
existe alors un ρ dans A(a) compris strictement entre
 r et supA(a).
|an |ρ est donc bornée et d’après le lemme d’Abel,
n an rn converge,
n0
d’où r ∈ C(a). L’intérieur de A(a) est donc inclus dans C(a) et on a
alors sup A(a)  sup C(a) du fait que A(a) est un intervalle (en effet,
r ∈ A(a) ⇒ [0, r] ⊂ A(a). A(a) est la réunion d’intervalles emboités
A(a) = [0, r], c’est donc encore un intervalle et plus précisément de
r∈A(a)
l’une des deux formes [0, supA(a)[ ou [0, supA(a)]. L’intérieur de A(a)
est alors toujours l’intervalle ]0, supA(a)[⊂ C(a). Cette inclusion prouve
que sup C(a) est supérieur ou égal à sup A(a).

Deuxième démonstration : on peut aussi plus rapidement raisonner par


l’absurde. Supposons que sup C(a) < sup A(a). Il existe alors r ∈ A(a) tel
que r > sup C(a). On pourrait alors appliquer le lemme d’Abel à n’im-
r + sup C(a)
porte quel r vérifiant r > r > sup C(a), par exemple r = .
2
On aurait ainsi, par le lemme d’Abel, r ∈ C(a), ce qui est absurde car


cela entraînerait sup C(a)  r et contredirait r > sup C(a). On a donc


sup C(a)  sup A(a).

On a alors, par double encadrement,

sup B(a) = sup A(a) = sup C(a).


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 323

3. Il s’agit certainement ici d’appliquer le résultat de la question précédente


plutôt que de se lancer dans un téméraire calcul de rayon de conver-
gence du type critère de Cauchy ou critère de d’Alembert, ce dernier
nécessitant par ailleurs des hypothèses dont nous ne disposons pas ici.
  √
 1 + i n2  2 n2
a)  r  = r est de limite nulle ssi 0  r  1.
n n
En effet, dans ce cas
√ √
2 n2 2 √
∀n ∈ N ,∗
r   2
n n
alors que par contre, si r > 1 on a, par croissances comparées,

2 n2
lim r = +∞.
n→+∞ n

 1+i 2
Le rayon de convergence de z n est R = 1.
n
n=1

b) On a    n
 (−1)n n  n (−1)n
2  r = 2 r
et en remarquant
 que la sous suite des termes de rangs pairs (resp.
n n
impairs) de 2(−1) r est de limite nulle ssi
n∈N
r
2r < 1 (resp. < 1),
2
 n n

on peut voir que 2(−1) r est de limite nulle ssi
n∈N
1
0r<
2
(on a gardé la condition la plus contraignante).
∞
n 1
Le rayon de convergence de 2(−1) n z n est donc R = .
2
n=0
n
c) |cos (2 )| a pour valeur d’adhérence 1. On peut en effet trouver une
suite croissante de nombres entiers naturels (nk )k∈N telle que
lim |cos (2nk )| = 1.
k→+∞

|cos (2n )| rn est donc de limite nulle ssi 0  r < 1.


∞
Le rayon de convergence de cos (2n ) z n est donc R = 1.
n=0
324 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019
 
an 
4. Il suffit ici de montrer que B = R+ .
n! n∈N
Puisque
sup B(a) = R ∈]0, +∞[,
on a
R
∈ B(a)
2
et  n
R
lim an = 0.
n→+∞ 2
Soit r  0. Quand an = 0, on a
 n
|an | n R (2r/R)n
r  |an | ⇔  1,
n! 2 n!

cette dernière inégalité étant assurée à partir d’un certain rang N ∈ N


du fait que
xn
∀x ∈ R, lim =0
n→+∞ n!

xn
(rappelons en passant que est le terme général de la série exponen-
n!
tielle, absolument convergente sur C).
 n
R
La convergence de an vers 0 entraîne donc, par majoration, celle
2
r n
de an vers 0 également. On a donc
n!
  
an
r∈B
n! n∈N
et par conséquent  
an 
B = R+ ,
n! n∈N
d’où  
an 
sup B = +∞.
n! n∈N

 an
Le rayon de convergence de la série entière z n est infini.
n!
n=0
Le résultat de cette question peut aisément être élargi au cas où R = +∞.
Dans ce cas en effet et pour tout r  0, le fait que an rn soit de limite nulle
an n
entraîne trivialement que r est également de limite nulle (puisque n!
n!
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 325



est de limite infinie). Si la série an z n a un rayon de convergence
n=0

 an
R = +∞ alors la série entière z n a également un rayon de conver-
n!
n=0
gence infini.

5. Par contraposée du résultat de la question précédente, si la série entière


∞
an n
z a un rayon de 2 (et donc non infini) , le rayon de convergence
n!
n=0
∞
de an z n n’est pas dans ]0, +∞]. Ce ne peut donc être que 0.
n=0
Un tel exemple de série entière est fourni par la suite a définie par
n!
∀n ∈ N, an = .
2n
La série entière

 ∞  

an n z n
z =
n! 2
n=0 n=0

a bien un rayon de convergence égal à 2 (d’après le critère de convergence


des séries géométriques) et

 ∞
 n! n
an z n = z
2n
n=0 n=0

a bien un rayon de convergence nul, ce qu’on peut constater (ce n’est pas
demandé mais ça ne coûte pas cher) en appliquant le critère de d’Alem-
bert. En posant R le rayon de convergence de cette série, on a :

1 (n + 1)!/2n+1
= lim
R n→+∞ n!/2n

n+1
= lim
n→+∞ 2

= +∞,

d’où R = 0.
326 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

Exercice 2

Thèmes
algèbre linéaire (valeur propre, transposée, trace)
espaces euclidiens (produit scalaire, norme, endomorphisme autoad-
joint)

Résultats majeurs
théorème spectral
inégalité de Cauchy-Schwarz

Remarques du jury
Le théorème spectral est incontournable. Les
questions de supremum ne doivent pas être laissées de côté. Les ma-
trices n’étant pas a priori carrées, il faut vérifier la compatibilité des
produits.

Énoncé
Soit (n, p) ∈ N∗ × N∗ . On désigne par Mn,p (R) l’espace vectoriel des ma-
trices à n ligne(s) et p colonne(s) à coefficients réels. On note AT la transposée
de la matrice A. Enfin, pour M ∈ Mn,n (R), Tr(M ) désigne la trace de la
matrice M .
1. Soit (R, S) ∈ Mn,p (R) × Mp,n (R), montrer que Tr(RS) = Tr(SR).
2. Montrer que l’on définit un produit scalaire sur Mn,p (R) en posant

∀(A, B) ∈ Mn,p (R)2 , A|B = Tr(AT B).

On notera
 dans la suite || · || la norme associée à ce produit scalaire :
||A|| = A|A.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 327

3. Soit A ∈ Mn,p (R), montrer que fA : M → AM T A est un endomorphisme


de Mn,p (R), et qu’il est auto-adjoint.
On pose

R(fA ) = {fA (M )|M , M ∈ Mn,p (R), ||M || = 1}.

4. Justifier que a = inf R(fA ) et b = sup R(fA ) sont des éléments de R.


Montrer que a correspond à la plus petite valeur propre de fA et que b
correspond à la plus grande valeur propre de fA .
5. Montrer que R(fA ) = [inf R(fA ), sup R(fA )].

Corrigé
1. Remarquons pour commencer que RS ∈ Mn (R) alors que SR ∈ Mp (R).
Notons R = (rij )1in et S = (sij ) 1ip .
1jp 1jn
Rappelons que i désigne le numéro de la ligne et j celui de la colonne.
 
p
Les éléments diagonaux de RS sont  rij sji  .
j=1
1in
 
n

Ceux de SR sont  sij rji  .
j=1
1ip
On a alors
p
n 

Tr(RS) = rij sji
i=1 j=1

et
p 
 n
Tr(SR) = sij rji .
i=1 j=1

Les variables de sommation i et j ayant des rôles interchangeables et les


sommes étant interchangeables car finies, il est clair que ces deux traces
sont égales.
328 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

On peut écrire en détail :


p 
 n
Tr(SR) = sij rji
i=1 j=1

p 
 n
= sji rij
j=1 i=1

p
n 

= sji rij
i=1 j=1

p
n 

= rij sji
i=1 j=1

= Tr(RS).

2. Soit A, B ∈ Mn,p (R) et notons A = (aij )1in et B = (bij )1in .


1jp 1jp
On a alors AT = (aji ) 1ip (i désigne ici encore le numéro de la ligne et
1jn
j celui de la colonne, bien que l’indice i soit situé après l’indice j dans
aji ).
Il est clair que A|A = Tr(AT A) ∈ R et il n’est pas inutile de le préciser
sans insister : la trace d’une matrice prend en effet ses valeurs dans le
même anneau (ici le corps des réels) que les coefficients de la matrice.
En reprenant les expressions des traces obtenues dans la question précé-
dente pour R = A et S = AT , on a immédiatement

A|A = Tr(AT A)

p 
 n
= aji aji
i=1 j=1

p 
 n
= a2ji ,
i=1 j=1

c’est-à-dire que A|A est exactement la somme des carrés des np coeffi-
cients (réels) de la matrice A. Il est donc à la fois clair que A|A  0 et
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 329

que A|A = 0 ⇔ A = 0 (une somme de nombres positifs, ici des carrés


de réels, étant nulle ssi chacun d’entre eux est nul).
(A, B) → A|B est donc une forme définie positive.
La bilinéarité de (A, B) → A|B est une conséquence immédiate de la
linéarité de la transposée, de la linéarité de la trace et de la bilinéarité
du produit de deux matrices.
La symétrie de (A, B) → A|B vient du fait que la trace n’est pas
sensible à la transposée :

∀M ∈ Mn (R), Tr(M T ) = Tr(M )

et on utilise en passant l’égalité classique

(M N )T = N T M T

pour deux matrices M et N dont le produit est bien défini et enfin


l’évidente égalité
(AT )T = A
(la transposée opère comme une symétrie sur les coefficients de la matrice
A, l’appliquer deux fois de suite revient à ne rien faire) :
 
A|B = Tr AT B
 T 
= Tr AT B
  T 
= Tr B T AT
 
= Tr B T A

= B|A

(A, B) → A|B est donc une forme bilinéaire symétrique définie


positive, c’est-à-dire un produit scalaire sur Mn,p (R).

3. Soit A ∈ Mn,p (R).

M ∈ Mn,p (R) ⇒ M T ∈ Mp,n (R)

⇒ AM T ∈ Mn,n (R)

⇒ AM T A ∈ Mn,p (R)
330 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

fA est donc bien définie sur Mn,p (R) et à valeurs dans Mn,p (R).
La linéarité de fA est une conséquence immédiate de la linéarité de la
transposée et de la linéarité des produits à gauche (M → AM ) et à droite
(M → M A) par une matrice A fixée.
On peut écrire en détail :
∀M, N ∈ Mn,p (R), ∀λ ∈ R,

fA (M + λN ) = A(M + λN )T A

= A(M T + λN T )A

= AM T A + λAN T A

= fA (M ) + λfA (N ).

fA : M → AM T A est donc un endomorphisme de Mn,p (R).


On a de plus

fA (M ), N  = AM T A, N 
 T 
= Tr AM T A N
  T 
= Tr AT M T AT N
 
= Tr AT M AT N

et par ailleurs, (1) par invariance de la trace par rapport à la transposée


et (2) du fait que la trace n’est pas sensible à l’ordre des matrices d’un
produit (on inverse les facteurs AT M et AT N ) :
 
M, fA (N ) = Tr M T fA (N )
 
= Tr M T AN T A
 T 
= Tr M T AN T A
(1)

 
= Tr AT N AT M
 
= Tr AT M AT N
(2)
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 331

On a donc
fA (M ), N  = M, fA (N ),

ce qui prouve que fA est auto-adjoint (l’adjoint un endomorphisme f


d’un e.v. euclidien E est l’endomorphisme g de E tel que pour tous
x, y ∈ E, f (x), y = x, g(y)).

4. Il s’agit de montrer dans un premier temps que R(fA ) est borné.


Puisque nous disposons d’un produit scalaire, nous pouvons utiliser l’iné-
galité de Cauchy-Schwarz pour obtenir dans un premier temps

∀M ∈ Mn,p (R), |{fA (M )|M |  ||fA (M )|| × ||M ||.

Puisque nous sommes dans l’espace vectoriel Mn,p (R) de dimension finie
np, l’endomorphisme fA est automatiquement continu, il possède donc
une norme ||fA || induite par la norme définie sur Mn,p dans cet exercice
et on a
∀M ∈ Mn,p (R), ||fA (M )||  ||fA || × ||M ||.

On a donc

∀M ∈ Mn,p (R), ||M || = 1 ⇒ |{fA (M )|M |  ||fA ||,

ce qui prouve que R(fA ) est borné, c’est-à-dire que ses bornes inférieures
et supérieures sont dans R.
Par ailleurs, puisque fA est auto-adjoint et que Mn,p (R) est de dimension
finie, le théorème spectral nous assure de la diagonalisabilité de fA
dans une certaine base orthonormale de Mn,p (R) et du fait que toutes
ses valeurs propres sont réelles.
Si on note (Mk )1knp une telle base, (λk )1knp les valeurs propres as-
np

sociées et M = αk Mk la décomposition d’une matrice M ∈ Mn,p (R)
k=1
dans cette base, on a alors, (1) par linéarité de fA , (2) et (4) bilinéarité
du produit scalaire, (3) du fait que les Mk sont des vecteurs propres de
fA et enfin (5) par orthonormalité de cette base (Mk , Mj  = δkj = 1 ssi
332 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

k = j, 0 sinon) :
 np  np
 
fA (M ), M  = fA α k Mk , α j Mj 
k=1 j=1

np
 np

=  αk fA (Mk ) , α j Mj 
(1)
k=1 j=1

np 
 np
= αk αj fA (Mk ) , Mj 
(2)
k=1 j=1

np 
 np
= αk αj λk Mk , Mj 
(3)
k=1 j=1

np 
 np
= αk αj λk Mk , Mj 
(4)
k=1 j=1

np

= λk αk2
(5)
k=1

Si on choisit M de norme 1, on a
np

2
||M || = αk2 = 1
k=1

et on obtient alors
np

fA (M ), M   max (λk )αk2
1knp
k=1

np

= max (λk ) αk2
1knp
k=1

= max (λk ),
1knp

l’égalité étant atteinte en posant M égal au vecteur propre Mk corres-


pondant à la valeur propre maximale, ce qui donne
b = max (λk )
1knp
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 333

et de même
np

fA (M ), M   min (λk )αk2
1knp
k=1

np

= min (λk ) αk2
1knp
k=1

= min (λk ),
1knp

l’égalité étant atteinte en posant M égal au vecteur propre Mk corres-


pondant à la valeur propre minimale, ce qui donne

a = min (λk ).
1knp

5. L’inclusion R(fA ) ⊂ [a, b] est évidente.


Pour montrer l’inclusion réciproque, il suffit ici d’utiliser un argument du
type convexité.
En combinant agréablement des vecteurs propres associés à a et b, on
doit pouvoir construire une matrice M telle que fA (M ), M  = c pour
une valeur c ∈ [a, b] donnée quelconque.
Par convexité du segment [a, b] on a :

∀c ∈ [a, b], ∃!t ∈ [0, 1], c = ta + (1 − t)b.

En notant Ma et Mb des éléments de la base vue dans la question précé-


dente et de valeurs propres respectives a et b, on a alors, pour α, β ∈ R :

fA (αaMa + βbMb ), αaMa + βbMb  = aα2 + bβ 2 .

α tel que α√2 = t et β tel que β 2 = 1 − t, c’est-à-


Il suffit alors de choisir √
dire, par exemple, α = t et β = 1 − t.
Ceci prouve que
∀c ∈ [a, b], c ∈ R(fA ),
c’est-à-dire
[a, b] ⊂ R(fA )
et donc, par double inclusion,

[a, b] = R(fA ).
334 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

Exercice 3

Thèmes
probabilités (loi de Poisson, loi géométrique,
espérance, indépendance, formule du crible de Poincaré)
algèbre linéaire (diagonalisabilité, rang, valeur propre, matrice tri-
angulaire)

Résultat majeur
formule des probabilités totales

Remarques du jury
1. Justifier correctement l’égalité.
Ne pas oublier le cas où rg(A) = 0.

Énoncé
Dans tout l’exercice X et Y désignent deux variables aléatoires discrètes
à valeurs dans N et indépendantes.
+∞

1. Montrer que P(X = Y ) = P(X = k) × P(Y = k).
k=0
On suppose à partir de maintenant que X suit une loi de Poisson de
paramètre λ > 0 et qu’il existe p ∈]0, 1[ tel que, pour tout k ∈ N,
P(Y = k) = p × (1 − p)k . On considère la matrice aléatoire
 
X X +Y
A= .
0 Y

2. Calculer la probabilité que A ne soit pas inversible.


3. Préciser la loi de la variable aléatoire rg(A) (qui donne le rang de la
matrice A) ainsi que son espérance.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 335

4. Donner une condition nécessaire et suffisante


 sur a, b et c pour qu’une
a c
matrice de M2 (R), de la forme soit diagonalisable.
0 b
5. Calculer la probabilité que A soit diagonalisable.

Corrigé
1. Il s’agit tout d’abord d’évoquer le système complet d’événements
(X = k)k∈N pour (1) appliquer la formule des probabilités totales.
On utilise ensuite (2) l’égalité entre événements suivante :
     
(X = k) (X = Y ) = (X = k) (Y = k) .

On évoque enfin (3) l’indépendance des variables X et Y pour justifier


de l’égalité suivante, valable pour tout k ∈ N :
  
P X = k Y = k = P(X = k) × P(Y = k).

On obtient ainsi :
+∞ 
  
P(X = Y ) = P X=k X=Y
(1)
k=0

+∞ 
  
= P X=k Y =k
(2)
k=0

+∞

= P(X = k) × P(Y = k).
(3)
k=0

On peut remarquer, bien que ce ne soit pas d’une utilité exceptionnelle,


que Y suit la loi G ∗ (p), c’est-à-dire que Y + 1 suit la loi géométrique
classique G (p).

2. A n’est pas inversible ssi det(A) = 0, c’est-à-dire XY = 0 ou encore


X = 0 ou Y = 0.
336 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

On utilise (1) la formule du crible de Poincaré puis (2) l’indépen-


dance de X et Y et enfin (3) les propriétés de la loi de Poisson :

λk −λ
∀k ∈ N, P(X = k) = e
k!

d’où
λ0 −λ
P(X = 0) = e = e−λ
0!
et par ailleurs
P(Y = 0) = p × (1 − p)0 = p.
  
P(XY = 0) = P X=0 Y =0
  
= P(X = 0) + P(Y = 0) − P X = 0 Y = 0
(1)

= P(X = 0) + P(Y = 0) − P(X = 0) × P(Y = 0)


(2)

= e−λ + p − e−λ p.
(3)

3. Le rang d’une matrice de dimension 2 × 2 ne peut être que 0, 1 ou 2 :

rg(A)(Ω) ⊂ {0, 1, 2}.

Remarque : A étant une matrice aléatoire, rg(A) est une variable aléa-
toire réelle dont rg(A)(Ω) désigne l’univers, c’est-à-dire l’ensemble des
valeurs que rg(A) peut prendre.

De plus, rg(A) = 2 ssi A est inversible, c’est-à-dire det(A) = 0.


On a donc

P(rg(A) = 2) = P(det(A) = 0)

= 1 − P(det(A) = 0)

= 1 − (e−λ + p − e−λ p) = 1 − p − e−λ (1 − p)


 
= (1 − p) 1 − e−λ > 0.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 337

Par ailleurs, rg(A) = 0 ssi X = Y = 0 (la seule matrice de rang nul est
la matrice nulle). On a donc, par indépendance de X et Y :
  
P(rg(A) = 0) = P X = 0 Y = 0

= P(X = 0) × P(Y = 0)

= e−λ p > 0.

Enfin, les événements rg(A) = 1 et [rg(A) = 0] [rg(A) = 2] étant com-
plémentaires l’un de l’autre, on obtient
  
P(rg(A) = 1) = 1 − P rg(A) = 0 rg(A) = 2

= 1 − P(rg(A) = 0) − P(rg(A) = 2)
(1)

= 1 − e−λ p − (1 − p)e−λ

= 1 − e−λ > 0,
avec (1) du fait de l’incompatibilité des événements [rg(A) = 0] et
[rg(A) = 2].
Nous précisons que les trois probabilités calculées ci-dessus sont bien
strictement positives car p ∈]0, 1[ (et donc en particulier 1 − p > 0),
λ > 0 (et donc en particulier 1 − e−λ > 0) et qu’une exponentielle réelle
est toujours strictement positive.
On a donc exactement l’égalité
rg(A)(Ω) = {0, 1, 2}.
On en déduit le calcul de l’espérance

E(rg(A)) = kP(rg(A) = k)
k∈rg(A)(Ω)

= 0 × P(rg(A) = 0) + 1 × P(rg(A) = 1) + 2 × P(rg(A) = 2)


 
= 1 − e−λ + 2(1 − p) 1 − e−λ
 
= (3 − 2p) 1 − e−λ .
338 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

4. On peut aborder cette question par deux extrémités, selon qu’on fait une
disjonction de cas d’abord sur c ou d’abord sur la diagonale de la matrice :

Première version :
Si c = 0, la matrice est diagonale donc trivialement diagonalisable, pour
tous a et b.
Si par contre c = 0 :
— si a = b, la matrice possède deux valeurs propres distinctes a et b, elle
est donc diagonalisable (les valeurs propres d’une matrice triangulaire
sont ses éléments diagonaux et une matrice de dimension n × n ayant
n valeurs propres distinctes est toujours diagonalisable).
— si a = b, la matrice n’a qu’une seule valeur propre a (toujours du fait
qu’elle est triangulaire) et elle n’est donc pas diagonalisable (les seules
matrices diagonalisables n’ayant qu’une seule valeur propre sont les
matrices scalaires λIn , ce que notre matrice n’est pas puisqu’elle n’est
pas diagonale si c = 0).

Deuxième version :
Si a = b, la matrice possède deux valeurs propres distinctes a et b, elle
est donc diagonalisable (même remarque que ci-dessus).
Si par contre a = b :
— si c = 0 alors la matrice est diagonale donc diagonalisable.
— si c = 0, la matrice n’a qu’une seule seule valeur propre a et elle n’est
donc pas diagonalisable (voir explication détaillée de ce cas ci-dessus).
 
a c
On conclut donc qu’une matrice de M2 (R), de la forme est dia-
0 b
gonalisable ssi
[c = 0 ou (c = 0 et a = b)],
ce qu’on peut aussi écrire sous la forme
[a = b ou (a = b et c = 0)].
Dans les deux cas, on peut simplifier sous la forme
[c = 0 ou a = b].
Remarque : en terme de calcul propositionnel, pour deux propositions
p et q, on a toujours la double égalité suivante :
p ∨ (¬p ∧ q) = p ∨ q

= (p ∧ ¬q) ∨ q.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 339

5. Le résultat de la question précédente nous donne l’égalité (1) et le fait


que les variables aléatoires X et Y sont positives (car à valeurs dans N)
nous donne l’égalité (2) :

[A est diagonalisable] = (X = Y ) (X + Y = 0)
(1)


= (X = Y ) (X = Y = 0).
(2)

En reprenant en (2) le résultat de la première question, on obtient :

P(A est diagonalisable)


  
= P (X = Y ) (X = Y = 0)

= P(X = Y ) + P(X = Y = 0)
(1)

  
= 1 − P(X = Y ) + P X = 0 Y = 0
 +∞ 

= 1− P(X = k)P(Y = k) + P(X = 0)P(Y = 0)
(2)+(3)
k=0

+∞

= 1− P(X = k)P(Y = k)
k=1

+∞
 +∞
 (λ(1 − p))k
λk
= 1− e−λ p(1 − p)k = 1 − e−λ p
k! k!
k=1 k=1

= 1 − e−λ p(eλ(1−p) − 1) = 1 − pe−λp + pe−λ ,


(4)

avec (1) car les événements [X = Y ] et [X = Y = 0] sont incompatibles,


(3) car les événements [X = 0] et [Y = 0] sont indépendants et (4) car on
reconnaît la série exponentielle de paramètre λ(1 − p) dont il ne manque
que le premier terme.
340 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

Exercice 4

Thèmes
polynômes (racine)
anneaux (idéal, sous-anneau, isomorphisme, anneau quotient)
relation binaire (relation d’équivalence, classe d’équivalence)

Résultat majeur
théorèmes d’isomorphisme

Remarque du jury
Les propriétés des objets doivent être vérifiées
systématiquement.

Énoncé
 
On définit Z[i] = a + ib; (a, b) ∈ Z2 . On admet que c’est un sous-anneau
de C.
1. Montrer que I = {(1 + 3i) × z; z ∈ Z[i]} est un idéal de Z[i]. On définit
sur Z[i] la relation R par :
∀(z, z  ) ∈ Z[i]2 , zRz  si (z − z  ) ∈ I .

2. Montrer que R est une relation d’équivalence sur Z[i]. Pour z ∈ Z[i] on
va noter C(z) la classe de z pour la relation R, et Z[i]/I l’ensemble
des classes d’équivalence de cette relation.
3. Montrer que l’on définit bien une addition sur Z[i]/I en posant
C(z + z  ) = C(z) + C(z  ),
et une multiplication en posant
C(z × z  ) = C(z) × C(z  ).
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 341

On admet pour la suite que l’on a une structure d’anneau sur Z[i]/I .
4. Montrer que Z/10Z est isomorphe à Z[i]/I .
Indication : on pourra montrer que iR3.
5. Résoudre l’équation X 2 + 5 = 0 d’inconnue X dans Z[i]/I .

Corrigé
Cet exercice est consacré au traditionnel anneau des entiers de Gauss,
constitué des nombres complexes dont les parties réelles et imaginaires sont
des entiers relatifs.
1. On déduit immédiatement de la définition de I que celui-ci est un sous-
groupe additif absorbant de Z[i], c’est-à-dire un idéal de Z[i].
En effet,
(i.) I est non vide (il contient 0 = (1 + 3i)0),
(ii.) I ⊂ Z[i] (du fait que Z[i] est stable par produit car on admet (ce
n’est pas cependant pas difficile à vérifier) que c’est un anneau et que
1 + 3i ∈ Z[i]),
pour a, a ∈ I , et z, z  ∈ Z[i] tels que a = (1 + 3i)z, a = (1 + 3i)z  , on a
(iii.) a + a = (1 + 3i)z + (1 + 3i)z  = (1 + 3i)(z + z  ) ∈ I ,
(1)
(iv.) −a = −(1 + 3i)z = (1 + 3i)(−z) ∈ I ,
(2)
(v.) ∀z  ∈ Z[i], az  = ((1 + 3i)z)z  = (1 + 3i)(zz  ) ∈ I ,
(3)
avec (1), (2) et (3) ci-dessus du fait que

∀z, z  , z  ∈ Z[i], −z, z + z  , zz  ∈ Z[i]

puisque Z[i] est un anneau.

2. Soit z, z  , z  ∈ Z[i].
I étant un sous-groupe de Z[i] (on s’en sert précisément en (1), (2) et
(3) ci-dessous), on a

(z − z) = 0 ∈ I ⇔ zRz
(1)

ce qui prouve que la relation R est réflexive et

zRz  ⇔ (z − z  ) ∈ I ⇔ −(z − z  ) = (z  − z) ∈ I ⇔ z  Rz
(2)
342 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

ce qui prouve que la relation R est symétrique.


Enfin,

zRz  et z  Rz  ⇔ (z − z  ) ∈ I et (z  − z  ) ∈ I

⇒ (z − z  ) = (z − z  ) + (z  − z  ) ∈ I
(3)

⇔ zRz 

ce qui prouve que la relation R est transitive.

3. Ceci découle immédiatement du fait que I est un idéal de l’anneau Z[i].


Pour tout anneau (A, +, ×) et tout idéal I de A, on peut munir, par
projection, A/I d’une structure d’anneau (dit anneau quotient).
En voici la preuve usuelle. Il s’agit de démontrer que les opérations défi-
nies sur les classes d’équivalence ne dépendent pas des représentants de
ces classes.
Soit z, z  , Z, Z  ∈ Z[i] tels que C(z) = C(Z) et C(z  ) = C(Z  ), c’est-
à-dire (z − Z) ∈ I et (z  − Z  ) ∈ I .
On a alors (du fait que I est stable par somme)

((z + z  ) − (Z + Z  )) = (z − Z) + (z  − Z  ) ∈ I

donc C(z + z  ) = C(Z + Z  ), ce qui prouve que l’addition des classes


est bien définie et ne dépend pas des représentants (z ou Z, z  ou Z  )
choisis et de plus l’élément neutre de cette addition est la classe de 0,
C(0).
De manière un peu plus subtile, en faisant apparaître successivement les
expressions z − Z et z  − Z  , on obtient

zz  = (Z + (z − Z))z  = Zz  + (z − Z)z 

= Z(Z  + (z  − Z  )) + (z − Z)z 

= ZZ  + Z(z  − Z  ) + (z − Z)z 

et donc
zz  − ZZ  ∈ I
(car Z(z  − Z  ), (z − Z)z  ∈ I car (z  − Z  ), (z − Z) ∈ I , Z, z  ∈ Z[i]
et car I est un idéal de Z[i]), ce qui prouve que C(zz  ) = C(ZZ  ), et
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 343

donc que la multiplication des classes est bien définie et ne dépend pas
des représentants (z ou Z, z  ou Z  ) choisis et de plus l’élément neutre
de cette multiplication est la classe de 1, C(1).
Il resterait à compléter en montrant que poser −C(z) = C(−z) permet
bien de définir l’opposé de la classe de z.
Ce n’est pas demandé mais en voici la preuve immédiate, grâce à la
définition de la somme des classes :

C(−z) + C(z) = C(−z + z) = C(0).

4. Suivons scolairement l’indication généreuse de l’énoncé. Il est immédiat,


si on remarque que i − 3 = −3 + i et 1 + 3i ont des parties réelles et
imaginaires remarquablement similaires (1 et 3, au signe près) que

i − 3 = i(1 + 3i) ∈ I

ce qui prouve que


iR3.
Montrer que deux anneaux quotients sont isomorphes est en général fai-
sable en utilisant le bien nommé premier théorème d’isomorphisme
pour les anneaux.
Il s’agirait donc ici, par exemple, de trouver un morphisme surjectif de
Z dans Z[i]/I et de noyau 10Z et il serait bien téméraire de chercher
plus loin que la projection canonique de Z sur Z[i]/I (bien définie car
Z ⊂ Z[i]).
On peut cependant aller peut-être un peu plus vite (c’est très discutable)
en évoquant directement le deuxième théorème d’isomorphisme. En
effet, puisque Z[i] est un anneau commutatif, que Z est un sous-anneau
de Z[i] et que I est un idéal de Z[i], on a directement l’isomorphisme
d’anneaux suivant :

Z/(Z ∩ I )  (Z + I )/I .

Reste à constater que Z ∩ I = 10Z et Z + I = Z[i].


En effet 10 = (1 + 3i)(1 − 3i) ∈ Z ∩ I et donc 10Z ⊂ Z ∩ I et par
ailleurs, pour un élément quelconque (1 + 3i)z ∈ I avec z = a + ib ∈ Z[i]
(a, b ∈ Z), on a

(1 + 3i)z = (1 + 3i)(a + ib) = a − 3b + i(3a + b)


344 CHAPITRE 22 : ÉPREUVE DE 2019

et alors :
(1 + 3i)z ∈ Z ⇔ 3a + b = 0 ⇔ b = −3a ⇔ z = a − 3ai = a(1 − 3i)

⇔ (1 + 3i)z = (1 + 3i)a(1 − 3i) = 10a ∈ 10Z,

ce qui prouve que z ∈ Z ∩ I ⇒ z ∈ 10Z et donc l’inclusion Z ∩ I ⊂ 10Z


et finalement, par double inclusion,

Z ∩ I = 10Z.

Enfin, il est clair que Z + I ⊂ Z[i]. Comme on a vu que iR3, on peut


dire qu’il existe un ZI ∈ I tel que i = 3 + ZI . On a bien sûr

ZI = −3 + i = (1 + 3i)i.

Ainsi, tout z = a + ib ∈ Z[i] s’écrit

z = a + (3 + ZI )b = a + 3b + ZI b ∈ Z + I

ce qui prouve l’inclusion réciproque Z[i] ⊂ Z + I et finalement, par


double inclusion
Z + I = Z[i].

5. Il convient évidemment d’utiliser l’isomorphisme obtenu à l’instant et


résoudre plutôt l’équation dans Z/10Z ou directement dans Z[i]/I en
écrivant les 10 éléments de cet anneau.
Comme on a démontré que Z ∩ I = 10Z, il s’en suit que les 10 éléments
de Z[i]/I sont les C(k) pour les entiers k de 0 à 9. En effet, ces dix
entiers ont des classes différentes deux à deux car la différence de deux
d’entre eux distincts n’est jamais un multiple de 10 (et donc n’est jamais
dans I ).
On écrit, certes un peu fastidieusement mais l’effort n’est pas si terrible,
la liste des dix résultats possibles pour k2 + 5 :

k 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9
k 2 + 5 5 6 9 14 21 30 41 54 69 86
et l’on constate que le seul résultat qui est dans 10Z = Z ∩ I est 30,
ce qui prouve que l’équation X 2 + 5 a pour seule solution C(5) dans
Z[i]/I .
Épreuve de 2018

Chapitre 23

Épreuve de 2018

Exercice 1

Thème
algèbre linéaire (endomorphisme diagonalisable,
polynôme minimal, matrice)

Résultat majeur
endomorphismes codiagonalisables

Remarques du jury
2. Concernant le terme constant d’un polynôme
lors de l’évaluation en la matrice A, on rappelle que A0 = Id.
3. La notion de polynôme minimal d’un endomorphisme est à maîtriser.
346 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

Énoncé
On considère une matrice A de E = Mn (R), et les applications de E dans
E définies par φA (M ) = AM et ψA (M ) = M A. On note πA le polynôme
minimal de A.
1. Montrer que les applications φA et ψA sont des endomorphismes de E.
2. Soit P ∈ R[X]. Déterminer P (φA ) et P (ψA ) en fonction de P (A).
3. En déduire les polynômes minimaux de φA et ψA .
4. On suppose les matrices A et B diagonalisables, montrer que les appli-
cations φA , ψB et φA − ψB sont diagonalisables dans une base formée
d’éléments de E de rang 1.

Corrigé
1. Remarquons tout d’abord que s’il n’est pas demandé de vérifier que φA
et ψA sont à valeurs dans E (c’est affirmé dans l’énoncé), cela ne fait pas
de mal de s’en assurer : le produit de deux matrices carrées réelles de
tailles n est en effet une matrice carrée réelle de taille n.
∀M, N ∈ Mn (R), ∀λ ∈ R,

φA (M + λN ) = A(M + λN ) = AM + λAN = φA (M ) + λφA (N )

et de même

ψA (M + λN ) = (M + λN )A = M A + λN A = ψA (M ) + λψA (N ),

ce qui prouve la linéarité de φA et ψA . Plutôt que d’écrire les calculs


ci-dessus, on peut aussi, puisque on ne fait qu’utiliser cette propriété, se
contenter d’écrire un laconique « φA et ψA sont linéaires par linéarité du
produit matriciel, à gauche comme à droite ».

m

2. Soit P ∈ R[X]. Notons P = ak X k pour un entier m ∈ N et certains
k=0
coefficients a0 , . . . , am ∈ R.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 347

On peut écrire en détail, pour M ∈ Mn (R),


m  m 
  
P (φA )(M ) = ak (φA )k (M ) = ak (φA )k (M )
k=0 k=0

m 
 
  m

k k
= ak A M = ak A M = P (A)M
k=0 k=0

ou plus directement
m
 m

k
P (φA ) = ak (φA ) = ak φAk = φP (A) .
k=0 k=0

On obtient évidemment de même


m
 m

k
P (ψA ) = ak (ψA ) = ak ψAk = ψP (A) .
k=0 k=0

3. On a immédiatement

P (φA ) = 0 ⇔ φP (A) = 0 ⇔ P (A) = 0

car si B ∈ Mn (R) :

(∀M ∈ Mn (R), BM = 0) ⇒ B = 0.

Le polynôme minimal de φA (et de même celui de ψA ) est donc égal à


celui de A.

4. A et B sont diagonalisables donc leurs polynômes minimaux respectifs


sont scindés à racines simples dans R, il en est donc de même des poly-
nômes minimaux de φA et ψB qui sont donc également diagonalisables.
Par ailleurs, puisque φA ◦ ψB = ψB ◦ φA (φA et ψB commutent, par
associativité du produit matriciel), ils sont alors simultanément diago-
nalisables, c’est-à-dire qu’il existe une même base dans laquelle ces deux
endomorphismes sont diagonaux. Dans une telle base, φA − ψB est éga-
lement diagonal (toute combinaison linéaire de matrices diagonales est
encore diagonale). La dernière partie de la question est plus délicate.
Remarquons tout d’abord que
    
∀M ∈ Mn (R), ψB (M ) = M B = t tB tM = t φtB tM
348 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

On peut alors construire une base de codiagonalisabilité de φA et ψB for-


mée d’éléments de E de rang 1 à partir des bases de vecteurs propres de A
et de tB en procédant comme suit : on dispose de n vecteurs X1 , . . . , Xn ,
propres pour A et associés aux valeurs propres λ1 , . . . , λn et n vecteurs
Y1 , . . . , Yn propres pour tB associés aux valeurs propres µ1 , . . . , µn . On
assimile ces vecteurs à leur représentation sous forme de colonne dans la
base canonique de Rn . À partir de ces vecteurs, on peut construire n2
matrices de Mn (R) de la forme Xi t Yj (le produit d’une colonne par une
ligne de même taille n est une matrice carrée de taille n). Les vecteurs Xi
et Yj étant tous non nuls, les matrices ainsi obtenues sont toutes de rang
1 (les colonnes de Xi t Yj sont toutes proportionnelles à Xi et de même
les lignes de Xi t Yj sont toutes proportionnelles à t Yj ).
On obtient alors immédiatement que chaque matrice Xi t Yj est propre
pour φA (pour la valeur propre λi associée à Xi ) et pour ψB (pour la
valeur µj propre associée à Yj ). Pour voir cela, il suffit de se souvenir que
faire le produit de deux matrices carrées revient à faire le produit de la
première matrice par chacune des n colonnes de la seconde matrice ou
de manière symétrique à faire le produit de chacune des n lignes de la
première matrice par la seconde matrice. Les colonnes (resp. les lignes)
étant toutes proportionnelles à un vecteur propre de φA (resp. de ψB ), le
résultat suit. Si on ne visualise pas ces matrices, on peut tout de même
constater la limpidité des calculs ci-dessous, dans lesquels on n’utilise que
l’associativité du produit de matrices et la règle usuelle t(M N ) = tN tM :

φA (Xi t Yj ) = A(Xi t Yj ) = (AXi )t Yj = (λi Xi )t Yj = λi (Xi t Yj )

 
ψB (Xi t Yj ) = (Xi t Yj )B = Xi (t Yj B) = Xi t tBYj

= Xi t (µj Yj ) = µj (Xi t Yj ).

Reste à vérifier que cette famille de n2 matrices est libre. On l’obtient


en passant d’une condition sur ces n2 matrices (1) à n conditions sur
la famille libre (t Y1 , . . . , t Yn ) (une pour chaque ligne k de la matrice
résultat), ce qui amène (2) à n2 conditions sur les coefficients Xi,k (ce
terme désignant le k-ième coefficient du vecteur Xi ) pour pouvoir revenir
enfin (3) à n conditions sur la famille libre (X1 , . . . , Xn ).
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 349

Soit (αi,j )1i,jn n2 réels :


n
 n
 
    
αi,j Xi t Yj = 0 ⇒ αi,j Xi t
Yj =0
1i,jn j=1 i=1

n
 n
 
 
⇒ ∀1  k  n, αi,j Xi,k t
Yj =0
(1)
j=1 i=1

n

⇒ ∀1  j, k  n, αi,j Xi,k = 0
(2)
i=1

n

⇒ ∀1  j  n, αi,j Xi = 0
(3)
i=1

⇒ ∀1  i, j  n, αi,j = 0.
350 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

Exercice 2

Thème
analyse (continuité, suite de fonctions,
convergence simple, convergence uniforme)

Résultat majeur
techniques de majoration

Remarque du jury
Des difficultés sur la rédaction et l’articulation
correcte des quantificateurs.

Énoncé
1. Soit I un intervalle de R, et soit (fn )n∈N une suite de fonctions continues
de I dans R. On suppose que la suite (fn )n∈N converge uniformément
vers une fonction f : I → R. Montrer que f est continue sur I.
2. Donner un exemple d’intervalle I et de suite (fn )n∈N de fonctions conti-
nues sur I qui converge simplement vers une fonction f , avec f non-
continue sur I.
3. Soit I un intervalle de R, g : I → R+ une fonction intégrable sur tout
compact de I et (fn )n∈N une suite de fonctions de C 1 (I, R) telle que
|fn (t)|  g(t) pour tout n et tout t ∈ I. On suppose de plus que la
suite (fn )n∈N converge simplement vers une fonction f . Montrer que f
est continue sur I.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 351

Corrigé
1. Ce résultat est bien connu et sa démonstration usuelle consiste à com-
parer f (t) à f (t0 ) en faisant deux pas de côté par les intermédiaires suc-
cessifs fn (t) et fn (t0 ). On peut représenter cette idée par un schéma en
serpent auquel se ramènent nombre de situations (les flèches n’indiquent
pas des limites, ce sont seulement des flèches sur un schéma qui signaler
des liens entre les termes) :

f (t) −→ f (t0 )
↓ ↑
fn (t) −→ fn (t0 )

(fn )n∈N converge uniformément vers f se traduit par

∀ε > 0, ∃Nε ∈ N, n  Nε ⇒ sup |fn (t) − f (t)|  ε


I

et de plus

sup |fn (t) − f (t)|  ε ⇔ ∀t ∈ I, |fn (t) − f (t)|  ε.


I

fn continue en t0 ∈ I se traduit par

∀ε > 0, ∃ηn,ε > 0, |t − t0 | < ηn,ε ⇒ |fn (t) − fn (t0 )|  ε.

Considérant alors ε > 0, n = Nε et t ∈ I tel que |t − t0 | < ηn,ε on obtient


à l’aide de l’inégalité triangulaire (I.T.) :

|f (t) − f (t0 )| = |f (t) − fn (t) + fn (t) − fn (t0 ) + fn (t0 ) − f (t0 )|

 |f (t) − fn (t)| + |fn (t) − fn (t0 )| + |fn (t0 ) − f (t0 )|


I.T.

 3ε,

ce qui prouve que f est continue en t0 ∈ I quelconque et donc sur I.

2. Premier contre-exemple : l’hyper classique suite de fonctions (fn )n∈N dé-


finies sur I = [0, 1] par

∀t ∈ [0, 1], fn (t) = tn


352 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

possède une limite simple non continue f définie sur [0, 1] par

0 si t ∈ [0, 1[,
f (t) =
1 si t = 1.

On peut noter f = δ1,t (symbole de Kronecker) ou encore f = 1{1}|[0,1]


(fonction indicatrice du singleton {1} sur l’intervalle [0, 1]).

Figure 23.1 – 1er contre-exemple Figure 23.2 – 2e contre-exemple


pour n = 3, 8, 20. pour n = 4.

Deuxième contre-exemple : si on préfère les fonctions affines par mor-


ceaux, on peut poser
  
∗ 0 si t ∈ 0, 1 − n1 ,
∀n ∈ N , fn (t) =  
nt + 1 − n si t ∈ 1 − n1 , 1 ,

et obtenir la même limite f à la suite de fonctions continues sur [0, 1]


(fn )n∈N∗ .

3. g est intégrable et l’on peut comparer fn à g : il semble judicieux d’ex-


primer fn comme une intégrale de fn .
fn est absolument intégrable sur I donc sur tout intervalle [t0 , t] ⊂ I.
Posons alors deux tels t0 et t. L’inégalité triangulaire (I.T.) pour les
intégrales donne alors :
 t   
 
  
|fn (t) − fn (t0 )| =  fn (x)dx  |fn (x)|dx 

g(x)dx −→ 0
t0 I.T. [t0 ,t] [t0 ,t] t→t0
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 353

car g est intégrable sur tout compact de I (c’est-à-dire localement inté-


grable).
Par passage à la limite (fn (t) et fn (t0 ) convergent simplement respecti-
vement vers f (t) et f (t0 ) quand n → +/inf ty), on obtient

|f (t) − f (t0 )| = lim |fn (t) − fn (t0 )|  g(x)dx −→ 0,
n→+∞ [t0 ,t] t→t0

d’où la continuité de f en tout t0 ∈ I et donc la continuité de f sur I.

Remarque : que t soit inférieur ou supérieur à t0 n’importe pas. Écrire


[t0 , t] ne sous-tend pas que t est supérieur à t0 : on a [t0 , t] = [t, t0 ]. Bien
sûr, quand on sait lequel de ces deux nombres est inférieur à l’autre,
il convient d’écrire l’intervalle dans le bon sens. C’est parce que nous
sommes dans l’ignorance
  de l’ordre dans lequel t et t0 sont qu’on écrit
t
et non pasune fois qu’on a utilisé l’inégalité triangulaire. On
[t0 ,t] t0
 t
pourrait bien sûr distinguer les deux cas et écrire quand t  t0 et
 t0 t 0

quand t < t0 .
t
354 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

Exercice 3

Thèmes
probabilités (loi exponentielle, σ-additivité)
analyse (série, lim sup et lim inf)

Résultats majeurs
lemme de Borel-Cantelli
loi du zéro-un de Borel
critère de Riemann

Remarque du jury
Des difficultés dans la manipulation des
ensembles et des inégalités.

Énoncé
Soit (Xn )n∈N une suite de variables aléatoires indépendantes, toutes de loi
exponentielle de paramètre 1.
Pour tout n ∈ N, n  2, pour tout a > 0, on considère l’événement
 
Xn
An,a = a .
ln n

1. Pour n  2, calculer P(An,a ) pour a > 0 quelconque.


2. Pour a > 0, on considère l’événement
 
Aa = lim supAn,a = Ak,a .
n→∞
n2 kn

Montrer que P(Aa ) = 0 si a > 1 et que P(Aa ) = 1 si 0 < a  1.


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 355

3. Justifier que pour tout a > 0,


   
Xn Xn
lim sup > a ⊂ Aa ⊂ lim sup a
n→∞ ln n n→∞ ln n

Xn
4. En déduire que lim sup = 1 presque sûrement.
n→∞ ln n

Corrigé
1. Il convient de connaître la fonction de répartition de la loi exponentielle
de paramètre 1 :

  1 − e−t si t  0
∀t ∈ R, F(t) = 1 − e−t × 1R+ (t) =
0 si t < 0

ou a minima de la retrouver à partir de sa densité, définie elle par



e−t si t  0
∀t ∈ R, f (t) = e × 1R+ (t) =
−t
0 si t < 0

en calculant  t
F(t) = f (x)dx.
−∞
On a donc ici
∀a > 0, P(An,a ) = P(Xn  a ln n)

= 1 − F(a ln n)
−a
= e−a ln n = eln n

1
= n−a = .
na
2. Vous voyez bien une limite supérieure d’événements ? Il n’y a que deux
réponses raisonnables : utiliser le lemme de Borel-Cantelli (voir
page 80) et/ou la loi du zéro-un de Borel.
D’après le critère de Riemann,
  1
P(An,a ) =
na
n2 n2
356 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

converge ssi a > 1 et dans ce cas, le lemme de Borel-Cantelli nous


permet de dire que P(Aa ) = 0. Dans le cascontraire, c’est-à-dire si
Xn
0 < a  1, puisque les événements sont indépendants,
ln n n2
la loi du zéro-un de Borel donne P(Aa ) = 1.

Remarque : on pouvait utiliser la loi du zéro-un de Borel dans les deux


cas puisque l’on dispose de l’indépendance des événements. Le lemme de
Borel-Cantelli ne peut s’appliquer, lui, qu’au premier cas, et ne né-
cessite pas l’indépendance des événements.

3. La difficulté de cette question consiste principalement à bien traduire la


notion de limite supérieure.
Pour montrer les deux inclusions, posons ω ∈ Ω pour pouvoir travailler
sur des implications logiques.
La deuxième inclusion (que nous traitons en premier) est assez immédiate
et résulte principalement du fait que si parmi un ensemble de nombres
réels l’un est supérieur ou égal à a, alors (1) la borne supérieure de cet
ensemble est supérieure ou égale à a. On utilise également en (2) que la
limite supérieure (éventuellement infinie) d’une suite existe toujours :
   Xk 
ω ∈ Aa ⇔ ω ∈ a
ln k
n2 kn

Xk (ω)
⇔ ∀n  2, ∃k  n, a
ln k
Xk (ω)
⇒ ∀n  2, sup a
(1) kn ln k

Xk (ω)
⇔ lim sup a
(2) n→+∞ kn ln k

Xn (ω)
⇔ limsup a
n→+∞ ln n

d’où  
Xn
Aa ⊂ limsup a .
n→+∞ ln n

La première inclusion (que nous démontrons ci-dessous) est plus subtile :


il faut tout d’abord penser que (3) si la limite  d’une suite est strictement
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 357

positive, alors tous les termes de cette suite sont supérieurs ou égaux à
la moitié de  à partir d’un certain rang N puis, d’une manière similaire,
il faut penser que (4) si la borne supérieure d’une suite est supérieure ou
égale à un nombre strictement positif, alors il existe un terme supérieur
ou égal à la moitié de ce nombre, ce qui (5) implique finalement qu’il
existe un terme positif.
Ainsi, en posant
Xn (ω)
(ω) = limsup − a,
n→+∞ ln n
on a
 
Xk
ω ∈ limsup >a
n→+∞ ln k

Xn (ω)
⇔ limsup >a
n→+∞ ln n

Xn (ω)
⇔ limsup −a>0
n→+∞ ln n

Xk (ω)
⇔ (ω) = lim sup −a>0
n→+∞ kn ln k

Xk (ω) (ω)
⇒ ∃N ∈ N, ∀n  N, sup −a >0
(3) kn ln k 2

Xk (ω) (ω)
⇒ ∃N ∈ N, ∀n  N, ∃k  n, −a >0
(4) ln k 4

Xk (ω)
⇒ ∀n  2, ∃k  n, −a0
(5) ln k

   Xk 
⇔ ω∈ − a  0 = Aa
ln k
n2 kn

d’où  
Xk
limsup >a ⊂ Aa .
n→+∞ ln k
4. On a vu que si a > 1 on a P(Aa ) = 0 et ainsi, par la première inclusion
obtenue ci-dessus, on a également
 
Xn
P lim sup >a =0
n→∞ ln n
358 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

et par complémentaire
 
Xn
P lim sup a = 1.
n→∞ ln n

1
En particulier, en posant a = 1 + > 1 pour un entier naturel non nul
N
N quelconque, on obtient :
 
Xn 1

∀N ∈ N , P lim sup 1+ =1
n→∞ ln n N
et le résultat reste vrai pour leur intersection. C’est une conséquence
de la σ-additivité des mesures de probabilité (si on dispose d’une suite
d’événements deux à deux disjoints, la probabilité de leur réunion est
égale à la somme de leurs probabilités. En conséquence, si on dispose
d’une suite d’événements quelconques, la probabilité de leur réunion est
majorée par la somme de leurs probabilités) :
 ∞  ∞
 
(∀N ∈ N, P(AN ) = 0) ⇒ 0  P AN  P(AN ) = 0.
N =0 N =0

Par passage au complémentaire, on obtient la propriété symétrique


 ∞ 

∀N ∈ N, P(BN ) = 1 ⇒ P BN = 1.
N =0

On a donc
   
Xn   Xn 1
P lim sup 1 =P lim sup 1+ =1
n→∞ ln n ∗ n→∞ ln n N
N ∈N

c’est-à-dire
Xn
lim sup  1 presque sûrement.
n→∞ ln n
Par ailleurs, la question 2. nous donne P(A1 ) = 1 et la deuxième inclusion
de la question 3. permet d’en déduire
 
Xn
P lim sup 1 =1
n→∞ ln n

c’est-à-dire
Xn
lim sup  1 presque sûrement
n→∞ ln n
et finalement, par encadrement
Xn
lim sup = 1 presque sûrement.
n→∞ ln n
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 359

Exercice 4

Thème
géométrie affine (vecteurs, barycentre,
coordonnées barycentriques, bissectrice)

Résultat majeur
théorème de Thalès

Remarque du jury
Il faut maîtriser les coordonnées barycentriques.

Énoncé
Soit (ABC) un triangle non aplati dont les longueurs des côtés BC, CA
et AB sont notées respectivement a, b et c.
À tout point M de l’espace affine engendré par A, B et C, correspond un
unique triplet (α, β, γ) de réels vérifiant α + β + γ = 1 et tels que M soit le
barycentre des points A, B et C affectés des coefficients α, β et γ.
Les coefficients α, β et γ sont appelés les coordonnées barycentriques nor-
malisées de M dans le repère affine (A, B, C).
On note IA le point d’intersection de la bissectrice intérieure ∆A de l’angle

BAC et de la droite (BC).

1. Montrer que la parallèle à (AC) passant par B coupe ∆A en un point


A1 .
IA B A1 B
2. Exprimer , et en fonction de a, b et c.
IA C AC
3. En déduire les coordonnées barycentriques normalisées de IA .
360 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

4. En déduire une propriété remarquable du point I dont les coordonnées


barycentriques normalisées dans le repère affine (A, B, C) sont
 
a b c
, , .
a+b+c a+b+c a+b+c

Corrigé

Figure 23.3 – Un croquis tracé à la règle et au compas et bien codé s’impose.


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 361

 Le tri-
1. Par définition, ∆A est la bissectrice intérieure de l’angle BAC.
angle ABC n’est pas aplati donc ∆A n’est pas parallèle à la droite (AC).
∆A n’est donc pas non plus parallèle à la droite parallèle à (AC) passant
par B : elle lui est donc sécante en un point qu’on peut nommer A1 .

Remarque : ∆A n’est pas non plus parallèle à (AB) : elle est sécante
en A à chacune des deux droites (AB) et (AC). Si le triangle était aplati
avec A, B et C alignés dans cet ordre, on aurait ∆A = (AB) = (AC).

2. Il s’agit évidemment d’appliquer le théorème de Thalès dont on doit


reconnaître les traditionnels rapports de longueurs et pour lequel on s’ap-
pliquera à bien préciser les hypothèses. Le dessin ci-dessus laisse appa-
raître les triangles IA AC et IA A1 B dans la configuration qu’on appelle
papillon dans les établissements d’enseignement secondaire.
Les droites (AC) et (BA1 ) sont parallèles. Les droites ∆A = (AA1 ) et
(BC) sont sécantes en IA : le théorème de Thalès donne la double
égalité suivante :
IA A1 IA B A1 B
= = .
IA A IA C AC
On sait de plus que AC = b et, bien que cela ne serve pas ici,

IA B + IA C = BC = a

et donc
IA C = a − IA B.
On a par ailleurs trois angles égaux :

1 = A
— BAA  
1 AC car ∆A est la bissectrice de BAC

— A  
1 AC = AA1 B car la droite ∆A est respectivement sécante en A
et A1 aux droites (AC) et (A1 B) (les deux angles en question sont
alternes-internes).
De ce fait, le triangle AA1 B est donc isocèle en B et on en déduit l’égalité
de longueurs BA = BA1 , d’où BA1 = c (nous avons ajouté le codage
correspondant sur la figure), ce qui permet d’obtenir :
IA B A1 B c
= = .
IA C AC b
3. Les coordonnées barycentriques d’un point se traduisent en une égalité
−−→
vectorielle. Le point IA est sur le segment [BC] : les vecteurs IA B et
362 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

−−→
IA C sont donc colinéaires et de sens opposés. Par ailleurs, on a, grâce à
l’égalité donnée juste avant :
bIA B = cIA C.
On en déduit l’égalité vectorielle
−−→ −−→
bIA B = −cIA C,
d’où
−−→ −−→ −−→ − →
0IA A + bIA B + cIA C = 0 .
Les coordonnées barycentriques du point IA dans le repère affine (A, B, C)
sont donc (0, b, c) et
 ses coordonnées barycentriques normalisées dans ce
b c
même repère sont 0, , .
b+c b+c
4. Par définition de ses coordonnées barycentriques dans le repère affine
(A, B, C), le point I vérifie l’égalité vectorielle :
a −→ b −→ c −→
IA + IB + IC = 0
a+b+c a+b+c a+b+c
−→ −→ −→
qu’on simplifie bien sûr en aIA + bIB + cIC = 0. En introduisant, par la
−→ −→
relation de Chasles, le point IA dans IB et IC (ce qui revient à utiliser
l’associativité du barycentre), on obtient
−→ −−→ −−→ −−→ −−→ − →
aIA + b IIA + IA B + c IIA + IA C = 0
−−→ −−→ − →
et donc, du fait que bIA B + cIA C = 0 :
−→ −−→ − →
aIA + (b + c)IIA = 0 .
I peut donc être vu comme le barycentre des points A et IA affectés des
coefficients respectifs a et b + c. I est donc sur la droite (AIA ), c’est-à-
dire la droite ∆A . Or, par symétrie (les points A, B et C ont des rôles
interchangeables dans cet exercice), un raisonnement similaire amènerait

au fait que le point I est sur la bissectrice intérieure ∆B de l’angle ABC

et sur la bissectrice intérieure ∆C de l’angle ACB.
La propriété remarquable du point I est donc la suivante : les bissec-
trices du triangle ABC (c’est-à-dire les bissectrices intérieures
∆A , ∆B et ∆C ) sont concourantes en I.

Remarque : rappelons-nous enfin, bien que ce n’a pas été l’objet de cet
exercice, que le point de concours des bissectrices intérieures du triangle
ABC est le centre du cercle inscrit au triangle ABC.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 363

Exercice 5

Thème
théorie des groupes (groupe symétrique, groupe
alterné, groupe simple, signature, sous-groupe distingué, sous-groupe
de Sylow, p-groupe, action de groupe)

Résultats majeurs
premier théorème d’isomorphisme
le noyau d’un morphisme de groupes est toujours distingué

Remarque du jury
Exercice peu traité.

Énoncé
Soit G un groupe fini. On note φ l’application de G dans le groupe des
permutations SG qui associe à g la permutation [φ(g) définie, pour tout h ∈ G
par] 1
φ(g)(h) = gh.

1. Calculer la signature de φ(g).


2. En déduire une condition nécessaire et suffisante pour que φ(G) soit un
sous-groupe du groupe alterné.
3. En déduire qu’un groupe G d’ordre pair strictement supérieur à 2, dont
un 2-sous-groupe de Sylow est cyclique, n’est pas simple.
1. Les termes placés entre crochets ne figuraient pas dans l’énoncé officiel. Nous les
ajoutons, supprimant ainsi une confusion que le jury désespère de continuer de voir dans
trop de copies. Errare humanum est, perseverare diabolicum.
364 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

Corrigé
1. Soit g ∈ G. φ(g) ∈ SG .
Notons tout d’abord, bien que ce ne soit pas tout à fait indispensable (les
résultats du cas g = eG ci-dessous s’appliquant également au cas g = eG ),
que si g = eG est l’élément neutre du groupe G, alors φ(g) = idG est
l’application identité sur G et elle est de signature 1.
De plus, φ est un morphisme de groupes défini sur G et à valeurs dans
SG . On peut en effet facilement vérifier que

∀g, g  ∈ G, φ(gg  ) = φ(g) ◦ φ(g  ).

L’application signature ε, définie sur SG et à valeurs dans {−1, 1} étant


elle même un morphisme de groupes, la composée ε ◦ φ est également un
morphisme de groupes, défini sur G et à valeurs dans {−1, 1}.

Soit g = eG .
g, d’ordre o(g), engendre le sous-groupe de G d’ordre o(g) défini par

< g >= {g, g 2 , . . . , g o(g) = eG }.

L’action de ce sous-groupe < g > par translation à gauche sur G induit


des orbites du type

{gh, g 2 h, . . . , g o(g) h = eG h = h} = {h, gh, g 2 h, . . . , g o(g)−1 h},

toutes de cardinal o(g) et pour des éléments h ∈ G quelconques.


φ(g) est donc un produit de o(g)-cycles (c’est-à-dire des cycles de lon-
gueur o(g), l’ordre de g) du type (h, gh, g 2 h, . . . , g o(g)−1 h). Chacun de
ces cycles peut s’écrire comme le produit de (o(g) − 1) transpositions et
a donc pour signature (−1)o(g)−1 .

Remarque : la signature d’une transposition est égale à −1. La signature


étant un morphisme de groupes de (SG , ◦) dans ({−1, 1}, ×), la signa-
ture de la composée (ou produit) de k ∈ N transpositions est donc (−1)k .

Le nombre de cycles dans l’écriture de g comme produit de cycles de ce


type (c’est-à-dire le nombre d’orbites par l’action de < g > sur G), est
|G|
(noter si besoin que ce nombre est bien un nombre entier : l’ordre
o(g)
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 365

d’un élément g ∈ G, c’est-à-dire l’ordre du sous-groupe < g > qu’il


engendre, est toujours un diviseur de l’ordre du groupe G. Il s’agit d’un
cas particulier du théorème de Lagrange).
La signature de φ(g) est donc
 |G|/o(g)
(−1)o(g)−1 = (−1)|G|−|G|/o(g) .

Rappel : un cycle de longueur k peut toujours se décomposer comme


produit de k − 1 transpositions (c’est-à-dire des 2-cycles) des deux ma-
nières suivantes :

(g1 , . . . , gk ) = (g1 , gk )(g1 , gk−1 ) . . . (g1 , g2 )

= (g1 , g2 )(g2 , g3 ) . . . (gk−1 , gk ).

Par exemple, on a (1234) = (14)(13)(12) = (12)(23)(34).

2. Le groupe alterné est composé des permutations paires, c’est-à-dire celles


qui sont de signature égale à 1.
Pour que φ(G) soit un sous-groupe du groupe alterné, il faut et il suffit
donc que pour tout g ∈ G, le nombre

|G| |G|
(o(g) − 1) = |G| −
o(g) o(g)

soit pair.

3. Si G admet un 2-Sylow cyclique et si g désigne un générateur de ce


|G|
sous-groupe, alors o(g) est pair mais o(g) − 1 et sont tous deux
o(g)
|G|
impairs et donc leur produit (o(g) − 1) est aussi impair.
o(g)
En conséquence, le résultat de la question 1. donne

ε(φ(g)) = −1.

Rappel : si l’ordre de G est pair, en écrivant |G| = 2k n avec k et n


deux entiers naturels non nuls et n impair, un 2-Sylow de G est un
sous-groupe de G d’ordre 2k . Un tel sous-groupe existe toujours (d’après
366 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

l’un des théorèmes de Sylow). Avec les hypothèses de cette question et


les notations utilisées ci-dessus, on a alors plus explicitement

|G|
o(g) − 1 = 2k − 1 et = n.
o(g)

On vient de voir qu’il existe un g ∈ G tel que

ε ◦ φ(g) = −1

et on a
ε ◦ φ(eG ) = ε ((φ(eG )) ε(idG ) = 1.
ε ◦ φ est donc un morphisme surjectif de G dans {−1, 1}.
Le premier théorème d’isomorphisme nous permet alors de voir que

G/Ker(ε ◦ φ)  Im(ε ◦ φ) = {−1, 1},

ce qui nous dit que le noyau de ε ◦ φ est un sous-groupe d’indice 2 de G.


Par ailleurs, comme tout noyau d’un morphisme de groupes, Ker(ε ◦ φ)
est distingué dans G (et on le sait même doublement : on pourrait en effet
également arguer du fait que tout sous-groupe d’indice 2 est distingué,
voir à ce sujet l’exercice page 397).
Enfin, Ker(ε ◦ φ) est non trivial car d’une part

|G|
|Ker(ε ◦ φ)| = >1
2
(car |G| > 2), ce qui prouve que Ker(ε◦φ) n’est pas réduit à eG et d’autre
part
|G|
|Ker(ε ◦ φ)| = < |G|,
2
ce qui prouve que Ker(ε ◦ φ) n’est pas égal à G tout entier.
G admet donc un sous-groupe distingué non trivial en la personne du
noyau de ε ◦ φ : G n’est donc pas simple.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 367

Exercice 6

Thème
analyse (fonction de plusieurs variables, optimisation
sous contrainte)

Résultat majeur
théorème des multiplicateurs de Lagrange

Remarque du jury
La méthode des extrema liés doit être connue.

Énoncé
Soit n  1. Soit des nombres réels strictement positifs α1 , . . . , αn tels que
n

αi = 1.
i=1

On définit
f: (R+ )n → R
(x1 , . . . , xn ) → xα1 1 . . . xαnn .
On note  
n

n
C= x = (x1 , . . . , xn ) ∈ (R+ ) , αi xi = 1 .
i=1

1. Justifier qu’il existe a ∈ C tel que

f (a) = supf (x)


x∈C

et trouver les points a ∈ C vérifiant cette propriété.


368 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

2. Montrer que pour tout x ∈ (R+ )n ,


n

xα1 1 . . . xαnn  α i xi .
i=1

3. Dans quels cas a-t-on égalité ?

Corrigé
1. En tant qu’image réciproque du fermé {1} de R (les singletons sont des
fermés dans la topologie usuelle de R) par la fonction continue
n

g : (x1 , . . . , xn ) ∈ (R+ )n → α i xi ∈ R
i=1

(la continuité de cette fonction g est évidente puisque c’est une fonction
polynomiale et plus précisément une fonction polynomiale homogène de
degré 1 sur les n variables x1 , . . . , xn ), l’ensemble

C = g −1 ({1})

est un fermé de (R+ )n (l’image réciproque d’un fermé par une application
continue est un fermé).
C est de plus borné car il est clair, par positivité des αi et des xi que
n

∀1  j  n, 0  αj xj  α i xi = 1
i=1

et donc, par positivité stricte des αj ,

1
∀1  j  n, 0  xj 
αj

et en particulier
1
∀x ∈ C, ||x||∞  max = R,
1in |αi |

ce qui prouve que C est inclus dans la boule fermée de (R+ )n de centre
(0, . . . , 0) et de rayon R.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 369

La fonction f étant continue sur (R+ )n , elle est donc bornée sur le fermé
borné C (on peut aussi dire que C est un compact de (R+ )n ) et elle y
atteint ses bornes (toute fonction continue sur un ensemble borné est
bornée et atteint ses bornes), en particulier sa borne supérieure.
Il est clair que si l’un des xi est nul, f (x1 , . . . , xn ) = 0.
Par ailleurs, C contient des éléments de (R∗+ )n et en ces éléments f est
non nulle (et plus précisément strictement positive).
Par exemple  
1 1
,..., ∈C
nα1 nαn
et  
1 1
f ,..., > 0.
nα1 nαn
Ainsi, la borne supérieure de f est atteinte sur l’ouvert (R∗+ )n .
On cherche donc à maximiser f sous la contrainte
n

α i xi = 1
i=1

c’est-à-dire
n

αi xi − 1 = 0.
i=1
En posant la fonction affine
n

h : (x1 , . . . , xn ) ∈ Rn → αi xi − 1,
i=1

on définit une application différentiable sur l’ouvert (R∗+ )n dont la diffé-


rentielle dhy en un quelconque y = (y1 , . . . , yn ) ∈ Rn est la partie linéaire
de h :
n
 n

∂h
dhy : (x1 , . . . , xn ) ∈ Rn → (y1 , . . . , yn )xi = αi xi ∈ R.
∂xi
i=1 i=1

Les αi étant non tous nuls (car tous non nuls) cette différentielle est
évidemment surjective, quel que soit y ∈ Rn .
Le théorème des multiplicateurs de Lagrange permet alors d’af-
firmer que si a = (a1 , . . . , an ) ∈ C, alors

f (a) = sup f (x) ⇒ ∃λ ∈ R, ∇f (a) = λ∇h(a).


x∈C
370 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

On a d’une part
   
∂f f (a)
(a) α
 ∂x1   1 a1 
 .   .. 
 ..  = 
∇f (a) =    
. 
 ∂f   f (a) 
(a) αn
∂xn an

et d’autre part

∂h  
(a) α1
 ∂x1 
 .   . 
 ..  = λ  ..  .
λ∇h(a) = λ  
 ∂h 
αn
(a)
∂xn

Sous l’hypothèse f (a) = sup f (x) on peut donc dire que


x∈C

f (a)
∃λ ∈ R, ∀1  i  n, αi = λαi .
ai

Les αi étant tous non nuls, on obtient alors

f (a)
∀1  i  n, = λ.
ai

Puisque f (a) = 0 et qu’en conséquence λ = 0, on peut écrire

f (a)
∀1  i  n, ai =
λ

et en déduire que les ai sont tous égaux entre eux et en particulier

∀1  i  n, ai = a1 .

n

Ainsi, puisque αi = 1 :
i=1

n
 n
 n
αi
f (a) = aαi i = aα1 i = a1 i=1
= a1 ,
i=1 i=1
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 371

d’où λ = 1 et on a alors de plus

n

a∈C ⇒ α i ai = 1
i=1

n

⇒ α i a1 = 1
i=1
 n


⇒ αi a1 = 1
i=1

⇒ a1 = 1.

f atteint donc son maximum sur C en l’unique a = (1, . . . , 1) et ce


maximum est
n

f (1, . . . , 1) = 1αi = 1.
i=1

2. Pour répondre à cette question, on peut tout d’abord remarquer que la


fonction f est homogène, c’est-à-dire

∀k ∈ R+ , ∀x ∈ (R+ )n , f (kx) = kf (x).

En effet :
n
 n

∀k ∈ R+ , ∀x ∈ (R+ )n , f (kx) = (kxi )αi = (k αi xαi i )
i=1 i=1
 n
 n

 
= k αi xαi i
i=1 i=1

n n

= k i=1 αi
xαi i
i=1

= kf (x).

De ce fait, si on pose en particulier, pour un x = (x1 , . . . , xn ) ∈ (R+ )n


372 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

n

fixé, k = αi xi , on a les équivalences suivantes
i=1

n

xα1 1 . . . xαnn  αi xi ⇔ f (x)  k
i=1

1
⇔ f (x)  1
k
 
1
⇔ f x  1,
k

à condition qu’on puisse diviser par k, c’est-à-dire k = 0, ce qui se ra-


mène, puisque pour tout i on a αi > 0, à x = (0, . . . , 0).

Le cas où x est le vecteur nul est lui trivial et on a même égalité entre
les deux membres de l’inégalité demandée :
n

f (0, . . . , 0) = 0 = αi 0.
i=1

On considère donc pour la suite x = 0.


Le résultat de la question précédente nous a amené à établir que le maxi-
mum de f sur C est égal à 1.
1
Reste à remarquer que x ∈ C pour conclure.
k
En effet,
 
 
1 1  x 
x = 
(x1 , . . . , xn ) =  n 1
,..., n xn 
k n
   
α i xi  α i xi α i xi 
i=1 i=1 i=1

et la condition d’appartenance à C est satisfaite car :


n

α j xj
n
 xj j=1
αj n = n = 1.
 
j=1 α i xi α i xi
i=1 i=1
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 373

En résumé, on a donc :

x = (x1 , . . . , xn ) ∈ (R+ )n \{(0, . . . , 0)}

1
⇒ n x∈C

αi xi
i=1
 
 
 1 
 x
⇒ f n   supf (y) = 1
  y∈C
α i xi
i=1

n

1
⇒ n f (x)  1 ⇒ f (x)  αi xi

αi xi i=1

i=1

n
 n

⇒ xαi i  α i xi
i=1 i=1

et par ailleurs, comme nous l’avons vu plus haut, cette inégalité est vé-
rifiée pour x = (0, . . . , 0).
On a donc bien
n
 n

∀x ∈ (R+ )n , xαi i  α i xi .
i=1 i=1

3. On a vu au cours de la réponse apportée à la question précédente que


l’égalité est atteinte quand x = (0, . . . , 0). Par ailleurs, le maximum de
f sur C étant atteint pour le seul y = (1, . . . , 1), les arguments avan-
cés ci-dessus nous permettent d’affirmer que les vecteurs dont toutes les
coordonnées sont égales, c’est-à-dire du type x = (x1 , . . . , x1 ) pour un
x1 ∈ R+ quelconque, constituent les seuls éléments de (R+ )n où l’égalité
est atteinte.
En effet, pour x = (0, . . . , 0), et avec les notations évoquées précédem-
374 CHAPITRE 23 : ÉPREUVE DE 2018

 n
1
ment (nous rappelons que x = (0, . . . , 0) ⇒ x ∈ C pour k = α i xi ) :
k
i=1

n
  
1
f (x) = α i xi = k ⇔ f x =1
k
i=1
 
1
⇔ f x = f (1, . . . , 1)
k

1
⇔ x = (1, . . . , 1)
k
1
⇔ ∀1  i  n, xi = 1
k

⇔ ∀1  i  n, xi = k.
Épreuve de 2017

Chapitre 24

Épreuve de 2017

Exercice 1

Thème
analyse (continuité, dérivabilité, fonctions
lipschitziennes)

Résultat majeur
théorème des accroissements finis

Remarque du jury
a) Les solutions sont le plus souvent très lourdes,
avec un retour aux ε rarement correctement mené.
376 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Énoncé
Soit I un intervalle de R non vide et non réduit à un point.
Soit f une fonction de I dans R.

a) On suppose f dérivable en x0 .
Montrer que f est continue en x0 .
Montrer par un exemple que la réciproque est fausse.

b) On suppose f dérivable sur I.


Montrer que f est lipschitzienne sur I si et seulement si f  est bornée sur
I.
c) On suppose que I est un segment et que f est de classe C 1 sur I.
Montrer que f est lipschitzienne sur I.

Corrigé
a) Première démonstration : on peut écrire
f (x) − f (x0 )
f (x) = f (x0 ) + (x − x0 ) .
x − x0
f (x) − f (x0 )
f étant dérivable en x0 , converge vers f  (x0 ) quand x tend
x − x0
vers x0 et dans le même temps le facteur x − x0 converge vers 0, ce qui
amène immédiatement que f (x) converge vers f (x0 ).

Deuxième démonstration : on peut avoir recours aux développements limi-


tés et écrire que si f est dérivable en x0 alors elle possède un développement
limité en x0 à l’ordre 1 qu’on peut écrire, au choix, sous l’une des deux
formes suivantes :

f (x) = f (x0 ) + f  (x0 )(x − x0 ) + o(x − x0 )

ou

f (x) = f (x0 ) + f  (x0 )(x − x0 ) + ε(x)(x − x0 ) où ε(x) −→ 0,


x→x0
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 377

ce qui permet d’obtenir directement lim f (x) = f (x0 ).


x→x0
x∈I

Troisième démonstration : version lourde avec recours aux ε.


f est dérivable en x0 ssi
f (x) − f (x0 )
lim existe.
x→x0 x − x0
x∈I

On note alors f  (x0 ) cette limite.


Sous cette hypothèse de dérivabilité, on peut écrire :
∀ε > 0, ∃δ > 0,

x ∈]x0 − δ, x0 + δ[ ∩ I, x = x0
 
 f (x) − f (x0 ) 

⇒  − f (x0 ) < ε

x − x0
 
⇒ f (x) − f (x0 ) − f  (x0 )(x − x0 ) < ε|x − x0 |

puis, à l’aide de l’inégalité triangulaire inversée, c’est-à-dire

∀a, b ∈ R, |a| − |b|  |a − b|

on obtient ∀ε > 0, ∃δ > 0,

x ∈]x0 − δ, x0 + δ[ ∩ I, x = x0
 
⇒ |f (x) − f (x0 )| − f  (x0 )(x − x0 ) < ε|x − x0 |

⇒ |f (x) − f (x0 )| < (ε + |f  (x0 )|)|x − x0 |.

Le majorant obtenu étant de limite nulle quand x tend vers x0 , on en déduit


qu’il en est de même pour |f (x) − f (x0 )| et qu’en conséquence

lim f (x) = f (x0 ),


x→x0
x∈I

ce qui prouve la continuité de f en x0 .


La démonstration ainsi rédigée est une version partielle de celle qui mène à
l’obtention du développement limité à l’ordre 1 de f .

Premier contre-exemple : la fonction racine carrée est continue sur R+ et


en particulier en x0 = 0 mais elle n’est pas dérivable en x0 = 0. On doit
378 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

en effet savoir que sa courbe représentative admet en 0 une demi-tangente


verticale et on peut également calculer
√ √ √
x− 0 x 1
lim = lim = lim √ = +∞.
x→0 x − 0 x→0+ x x→0+ x
x>0

Deuxième contre-exemple : la fonction valeur absolue est continue sur R et


en particulier en x0 = 0 mais elle n’est pas dérivable en x0 = 0. On doit en
effet savoir que sa courbe représentative admet en 0 deux demi-tangentes
obliques distinctes et on peut également calculer

|x| − |0| |x| x


lim = lim = lim = lim 1 = 1
x→0+ x−0 x→0+ x x→0+ x x→0+

|x| − |0| |x| −x


lim = lim = lim = lim − 1 = −1.
x→0− x − 0 x→0− x x→0− x x→0−
 π π
Troisième contre-exemple : la fonction arcsin, définie sur − , est conti-
2 2
nue mais non dérivable aux bornes (elle y admet des demi-tangentes verti-
cales). Il en va de même pour la fonction arccos, définie sur [0, π]

Figure 24.1 – Courbe représenta- Figure 24.2 – Courbe représenta-


tive de la fonction racine carrée. tive de la fonction valeur absolue.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 379

Figure 24.3 – Courbe représenta- Figure 24.4 – Courbe représenta-


tive de la fonction arcsin. tive de la fonction arccos.

b) Si f est lipschitzienne sur I alors, par définition :

∃k > 0, ∀x, y ∈ I, |f (x) − f (y)|  k|x − y|.

Ainsi, en n’oubliant pas de se mettre dans les conditions où le dénominateur


est non nul :
 
 f (x) − f (x0 ) 

∀x, x0 ∈ I, x = x0 ⇒  k
x − x0 

et en passant à la limite quand x tend vers x0 (celle-ci existe car f est


supposée dérivable sur I), on obtient
 
 f (x) − f (x0 ) 
lim  k
x→x0  x − x0 
x∈I

c’est-à-dire
|f  (x0 )|  k.
380 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

On a donc obtenu le résultat suivant : si f est k-lipschitzienne sur I alors


|f  | est majorée par k. En particulier, on en déduit que f  est bornée sur I.

Réciproquement, si f  est bornée sur I alors ∃k > 0, ∀x0 ∈ I, |f  (x0 )|  k.


Puisque f est dérivable sur I, le théorème des accroissements finis
(T.A.F.) permet d’écrire

f (x) − f (x0 )
∀x, x0 ∈ I, ∃c ∈ [x, x0 ], = f  (c)
x − x0
et donc
∀x, x0 ∈ I, ∃c ∈ [x, x0 ], |f (x) − f (x0 )| = |f  (c)| × |x − x0 |

 k|x − x0 |.

On peut aussi être un peu plus rapide en utilisant directement le corollaire


classique du T.A.F., à savoir l’inégalité des accroissements finis :
 
∀x, y ∈ I, |f (x) − f (y)|  
sup |f (t)| × |x − y|
t∈I

 k|x − y|.

Nous avons obtenu le résultat suivant : si |f  | est bornée par k sur I alors
f est k-lipschitzienne.
Nous avons donc bien démontré l’équivalence : |f  | est bornée par k sur I
ssi f est k-lipschitzienne.

c) Si f est de classe C 1 sur I alors par définition f est dérivable et f  est


continue sur I.
I est un segment, c’est-à-dire un intervalle fermé et borné :

∃a, b ∈ R, a < b, I = [a, b].

f  est alors bornée sur I (toute fonction continue sur un segment est bornée
et atteint ses bornes comme, de manière plus générale, dans tout espace
métrique, toute fonction continue sur un compact est bornée et atteint ses
bornes) et le résultat de la question précédente nous permet de conclure
que f est lipschitzienne sur I.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 381

Exercice 2

Thèmes
topologie (norme, distance, convexité)
analyse (suite, sous-suite, convergence, continuité)

Résultat majeur
théorème de Bolzano-Weierstrass

Remarques du jury
Les propriétés liées à la convexité sont cruciales.
Se placer dans le cas où la norme est euclidienne simplifie mais ne
répond pas à la question.

Énoncé
Soit (E, || · ||) un espace normé réel.
Soit V un sous-espace de dimension finie de E.
Soit x ∈ E.
On pose
d(x, V ) = inf{||x − v||; v ∈ V }.
Montrer que l’ensemble

ΠV (x) = {v ∈ V ; ||x − v|| = d(x, V )}

est une partie convexe et non vide de V.


382 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Corrigé
Soit x ∈ E. Montrons tout d’abord que ΠV (x) est non vide.

Par définition de d(x, V ), si on ne dispose pas immédiatement d’un élément


v ∈ V tel que d(x, V ) = ||x − v||, on peut tout de même construire une suite
(vn )n∈N ⊂ V telle que

lim ||x − vn || = d(x, V )


n→+∞

et
∀n ∈ N, ||x − vn+1 ||  ||x − vn ||.

On obtient donc en particulier, à l’aide d’une simple récurrence qu’il n’est pas
nécessaire de détailler :

∀n ∈ N, ||x − vn ||  ||x − v0 ||.

La suite (vn )n∈N ainsi définie est bornée. En effet, en utilisant comme toujours
l’inégalité triangulaire (I.T.) et comme souvent l’homogénéité (H.) de la norme,
on obtient :
∀n ∈ N, ||vn || = ||vn − x + x||

 ||vn − x|| + ||x||


I.T.

= ||x − vn || + ||x||
H.

 ||x − v0 || + ||x||,
ce qui prouve que la suite (vn )n∈N est incluse dans la boule ouverte de centre
0E et de rayon le majorant obtenu ci-dessus.

Dans un espace vectoriel normé de dimension finie (en l’occurrence ici V


muni de la restriction de || · || à V ), toute suite bornée admet une sous-suite
convergente (théorème de Bolzano-Weierstrass). Notons v ∈ V la limite
d’une telle sous-suite (vϕ(n) )n∈N (ϕ désignant une fonction strictement crois-
sante de N dans N. On pourrait aussi considérer, par commodité de notation et
quitte à la redéfinir, que la suite (vn )n∈N choisie au début est déjà convergente).
En utilisant la définition de d(x, V ) et à nouveau l’inégalité triangulaire (I.T.),
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 383

on obtient, pour tout n ∈ N :

d(x, V )  ||x − v||


déf

= ||x − vϕ(n) + vϕ(n) − v||

 ||x − vϕ(n) || + ||vϕ(n) − v|| −→ d(x, V ),


I.T. n→+∞

car
lim ||x − vϕ(n) || = ||x − v||
n→+∞

et
lim ||vϕ(n) − v|| = ||v − v|| = 0
n→+∞

par continuité de la norme. On en déduit, par encadrement,

||x − v|| = d(x, V ),

ce qui prouve que v ∈ ΠV (x).


ΠV (x) est donc bien non vide.

ΠV (x) est convexe si, par définition, il contient tous les segments reliant
deux de ses éléments, c’est-à-dire si

∀v, v  ∈ ΠV (x), ∀t ∈ [0, 1], tv + (1 − t)v  ∈ ΠV (x)

(on peut voir les éléments d’un segment comme les barycentres des extrémités
de ce segment affectés des masses t ∈ [0, 1] et 1 − t ∈ [0, 1]).

Soit v, v  ∈ ΠV (x) et t ∈ [0, 1]. On a en particulier

||x − v|| = ||x − v  || = d(x, V ).

On montre aisément que

tv + (1 − t)v  ∈ ΠV (x)

en constatant d’une part que


 
||x − tv + (1 − t)v  ||  d(x, V )
384 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

car tv + (1 − t)v  ∈ V car V est un s.e.v. et d’autre part que


   
||x − tv + (1 − t)v  || = ||(t + 1 − t)x − tv + (1 − t)v  ||

= ||t(x − v) + (1 − t)(x − v  )||

 t||x − v|| + (1 − t)||x − v  ||


I.T.+H.

= td(x, V ) + (1 − t)d(x, V ) = d(x, V ),

grâce, encore une fois, à l’inégalité triangulaire (I.T.) et l’homogénéité (H.) de


la norme (noter que la positivité de t et de 1 − t nous permet de ne pas les
mettre entre valeurs absolues quand on utilise l’homogénéité de la norme).
On obtient donc, par encadrement
 
||x − tv + (1 − t)v  || = d(x, V ).

Comme de plus, rappelons-le, tv + (1 − t)v  ∈ V , on a donc

tv + (1 − t)v  ∈ ΠV (x),

ce qui achève de prouver que ΠV (x) est convexe.


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 385

Exercice 3

Thèmes
topologie (normes, continuité, adhérence)
analyse (calcul intégral, continuité)

Résultat majeur
continuité d’une application linéaire

Remarques du jury
La question de l’adhérence pour la norme de
convergence en moyenne est classique et visuellement évidente.
Il est conseillé de faire des dessins.

Énoncé
Soit E l’espace des fonctions continues de [0; 1] dans R et δ la forme linéaire
définie sur E par
∀f ∈ E, δ(f ) = f (0).
On considère les deux normes suivantes sur E définies par
 1
∀f ∈ E, ||f ||∞ = sup |f (t)| et ||f ||1 = |f (t)|dt.
t∈[0;1] 0

a) Dire si δ est continue lorsqu’on munit E de la norme || · ||∞ , puis lorsqu’on


munit E de la norme || · ||1 .

b) Déterminer l’adhérence du sous-espace F de E constitué des fonctions f


telles que δ(f ) = 0 pour chacune des deux normes précédentes.
386 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Corrigé
Il n’est demandé de démontrer ni que δ est une forme linéaire (c’est-à-dire
une application linéaire définie sur le R-espace vectoriel E et à valeurs dans R)
ni que ||·||∞ et ||·||1 sont bien des normes (c’est-à-dire des applications définies
sur E, à valeurs dans R, définies positives, homogènes et vérifiant l’inégalité
triangulaire). Ces propriétés sont considérées comme bien connues.

a) La formulation de cette première question laisse entendre que δ est continue


pour l’une des deux normes mais pas pour l’autre. Il faut savoir que ||· ||∞ ,
appelée norme de la convergence uniforme, est une norme plus exigeante
que || · ||1 , dans le sens où elle possède en général des qualités que || · ||1 n’a
pas.

Montrer qu’une application linéaire L définie sur un espace vectoriel normé


(E, ||·||E ) et à valeurs dans un espace vectoriel normé (F, ||·||F ) est continue
consiste précisément à obtenir une majoration du type

∃C > 0, ∀x ∈ E, ||L (x)||F  C||x||E .

Ici F = R et la norme associée || · ||F est la valeur absolue.


Avec les notations de l’énoncé, on a

∀f ∈ E, |δ(f )| = |f (0)|  sup |f (t)| = ||f ||∞ .


t∈[0;1]

La forme linéaire δ est donc continue sur E muni de la norme ||f ||∞ .
Premier contre-exemple : le contre-exemple hyper classique donné par les
fonctions continues et positives sur [0, 1] (fn )n∈N définies par

∀t ∈ [0, 1], fn (t) = (1 − t)n

montre que δ n’est pas continue sur E muni de || · ||1 (la première idée est
de penser à tn qui a le défaut de s’annuler en t = 0 mais la grande qualité
de valoir 1 en t = 1. Le tour de passe-passe consistant à remplacer t par
1 − t règle ce petit problème en permutant les rôles de t = 0 et t = 1).
Raisonnons par l’absurde et supposons que δ est continue pour cette norme
(propriété dont on se servira en (1) ci-dessous). On dispose alors d’une
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 387

constante C > 0 telle que

∀n ∈ N, 1 = |fn (0)| = |δ(fn )|

 C||fn ||1
(1)

 1
= C (1 − t)n dt
0

 1
−1
= C (1 − t)n+1
n+1 0

C
= ,
n+1
ce qui en résumé donne
C
∀n ∈ N, 1  .
n+1
On constate aisément que ceci est absurde en faisant tendre n → +∞ ou
en se contentant de prendre n’importe quel entier n  C.
δ n’est donc pas continue pour || · ||1 .

Figure 24.5 – Courbes d’équation Figure 24.6 – Courbes d’équation


y = (1 − t)n pour n = 1, 3, 10. y = max(1 − nt, 0) pour n = 1, 2, 5.
388 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Deuxième contre-exemple: on peut également poser, pour tout n ∈ N∗ ,


1 − nt si 0  t  1
fn (t) = max(1 − nt, 0) = n
0 sinon.
On a alors
1
∀n ∈ N∗ , ||fn ||1 = −→ 0 et δ(fn ) = fn (0) = 1.
2n n→+∞
 1
Plutôt que d’obtenir le premier résultat par le laborieux calcul de fn (t)dt,
0
on l’obtient plus immédiatement en utilisant la formule de l’aire d’un tri-
angle, base fois hauteur divisée par 2.
On remarque alors qu’au sens de la norme || · ||1 , la suite (fn )n∈N∗ converge
vers la fonction nulle mais par contre, la suite (δ(fn ))n∈N∗ est elle constante
égale à 1 = 0 = δ(0), ce qui prouve que δ n’est pas continue au sens de || · ||
(si δ était continue, on aurait δ(fn ) −→ 0).
n→+∞

b) Il n’est pas demandé de démontrer que l’ensemble F ainsi défini est bien
un sous-espace vectoriel de E.
Soit f ∈ E tel qu’il existe une suite (fn )n∈N de F convergeant vers f au
sens de || · ||∞ .
Puisque δ est continue pour || · ||∞ , elle passe à la limite : δ et limite
commutent. On a alors
f (0) = δ(f )
 
= δ lim fn
n→+∞

= lim δ(fn )
n→+∞

= lim 0 = 0.
n→+∞

On a donc f ∈ F , ce qui prouve que l’adhérence de F pour la norme || · ||∞


est F lui-même : F est un fermé de E vis à vis de cette norme.
On peut aussi dire plus rapidement que F = δ −1 ({0}) est un fermé de
(E, || · ||∞ ) en tant qu’image réciproque du fermé {0} de (R, | · |) par l’ap-
plication continue δ.

Relativement à la norme || · ||1 , il en va autrement : δ n’étant pas continue


pour || · ||1 , il n’est ici pas question de commuter δ et limite.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 389

Soit f ∈ E. Nous allons montrer qu’il existe une suite (fn )n∈N de F conver-
geant vers f au sens de || · ||1 , c’est-à-dire vérifiant

∀n ∈ N, δ(fn ) = fn (0) = 0 et lim ||fn − f ||1 = 0.


n→+∞

Premier exemple : en déclinant la même idée que dans la question précé-


dente, il suffit de définir la suite (fn )n∈N par

∀n ∈ N, ∀t ∈ [0, 1], fn (t) = f (t) − f (0)(1 − t)n .

Les fonctions fn ainsi définies sont bien dans F (elles sont continues sur
[0, 1] et ∀n ∈ N, fn (0) = 0) et
 1
||fn − f ||1 = |f (0)(1 − t)n |dt
0

|f (0)|
= −→ 0.
n + 1 n→+∞
L’adhérence de F , pour la norme || · ||1 , est E tout entier. F est donc dense
dans E vis à vis de cette norme.

Deuxième exemple : on peut également poser


  
nf 1 t si 0  t 
1
fn (t) = n n

f (t) sinon,

c’est-à-dire construire
 des  fonctions fn continues coïncidant avec f sauf sur
1
un petit intervalle 0, sur lequel fn est linéaire.
n
390 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Exercice 4

Thème
analyse (série entière, intégration, continuité, limite)

Résultat majeur
techniques de majoration d’une intégrale

Remarque du jury
b) Beaucoup de fautes, notamment d’absurdes
inégalités sur les nombres complexes.

Énoncé

 Soit (an )n0 une suite de nombres complexes telle que la série entière
an z n ait pour rayon de convergence +∞.
+∞

Pour z dans C, soit f (z) = an z n .
n=0
a) Pour n dans N et r dans R , justifier
+∗ l’égalité
 π
1
an = f (reit )e−int dt.
2πrn −π

b) On pose, pour r dans R+∗ :


M (r) = max{|f (z)|; z ∈ C, |z| = r}.
En déduire que
M (r)
∀n ∈ N, |an |  .
rn
c) On suppose qu’il existe A et B dans R+∗ , d dans N tels que
∀z ∈ C, |f (z)|  A|z|d + B.
Montrer que f est un polynôme de degré inférieur ou égal à d.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 391

Corrigé
a)
+∞

 
∀n ∈ N, f reit e−int = ak rk ei(k−n)t
k=0

et par ailleurs
 

 1 ikt π
π   e =0 si k = 0
ikt ik
∀k ∈ Z, e dt =  π
−π


−π  dt = 2π si k = 0
−π

= 2πδk,0 .

Puisque d’une part


 chacune de ces intégrales converge et que d’autre part
la série entière an z n converge absolument en tout point intérieur à son

disque de convergence, an |z|n converge pour tout z ∈ C, c’est-à-dire

an rn converge pour tout r  0. Nous avons ainsi la convergence normale
et donc uniforme de la série de fonctions de terme général t → ak rk ei(k−n)t
(n est une constante, k est la variable de sommation) considérée sur le
segment [−π, π] et en conséquence nous pouvons intégrer terme à terme :
 π +∞ 
 π
 
∀n ∈ N, f reit e−int dt = ak rk ei(k−n)t dt
−π k=0 −π

+∞
  π
k
= ak r ei(k−n)t dt = an rn 2π
k=0 −π

(le terme de rang k = n de la somme est le seul à être non nul) d’où
 π
1
∀n ∈ N, an = f (reit )e−int dt.
2πrn −π

b) Remarquons pour commencer que M (r) existe toujours. f est une fonction
développable en série entière sur C donc continue sur C. Elle est alors bor-
née sur le cercle de centre O et de rayon r (un compact de C) et elle atteint
ses bornes (toute fonction continue sur un compact est bornée et atteint ses
392 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

bornes). On rappelle le classique refrain « le module d’une intégrale est ma-


joré par l’intégrale du module », qu’on peut qualifier d’inégalité triangulaire
(I.T.) par analogie avec la majoration |a + b|  |a| + |b| (le module d’une
somme est majoré par la somme des modules) si on veut bien se souvenir
qu’une intégrale n’est jamais qu’une somme d’un type un peu particulier.
Noter que les anciens disent encore sommer pour intégrer.
On remarque évidemment que |reit | = r et qu’ainsi |f (reit )|  M (r), ma-
joration qu’on utilisera le moment venu (en (2)) dans le calcul qui suit.
 
On a ainsi, en utilisant en (1) l’égalité eit  = 1 valable pour tout t réel :
  π 
 1 
∀n ∈ N, |an | =   f (re it −int 
)e dt
2πrn −π 

1 π  
 f (reit )e−int  dt
I.T. 2πrn −π

1 π    
= f (reit ) × e−int  dt
2πrn −π

1 π  
= f (reit ) dt
(1) 2πrn −π
 π
1 M (r)
 M (r)dt = .
(2) 2πrn −π rn

c) Il s’agit de montrer que n > d ⇒ an = 0, condition sine qua non pour que
f soit un polynôme 1 de degré inférieur ou égal à d.
Quel que soit r > 0, on a, sous l’hypothèse de l’énoncé,

M (r)  Ard + B

et donc, en reprenant le résultat de la question précédente :

Ard + B
∀n ∈ N, |an |  .
rn
Un simple passage à la limite r → +∞ amène

∀n ∈ N, n > d ⇒ |an |  0 ⇒ an = 0.

1. Ou plutôt une fonction polynomiale, pour les puristes qui s’étonneraient de cette
confusion faite dans l’énoncé
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 393

Exercice 5

Thèmes
analyse (équation différentielle du second ordre,
convexité d’une fonction)
algèbre linéaire (espace vectoriel, isomorphisme)

Résultat majeur
formule de Taylor-Young à l’ordre 2

Remarque du jury
a) Les solutions de l’équation de l’oscillateur
harmonique y  + ω 2 y = 0 constituent une connaissance de base.

Énoncé
Soit q une fonction continue de [0; 1] dans R, Eq l’espace des fonctions y
de classe C 2 de [0; 1] dans R telles que y  + qy = 0.
On dit que q possède la propriété P si l’application

y ∈ Eq → (y(0), y(1)) ∈ R2

est un isomorphisme de Eq sur R2 .


a) Soit ω dans R+∗ . On suppose

∀t ∈ [0; 1], q(t) = ω 2 .

Déterminer Eq .
Pour quelles valeurs de ω la fonction q possède-t-elle la propriété P ?
394 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

b) Soit f une fonction de classe C 2 de [0; 1] dans R.


On suppose qu’il existe t0 dans ]0; 1[ tel que

f (t0 ) = max{f (t); t ∈ [0; 1]}.

Que vaut f  (t0 ) ? Que dire du signe de f  (t0 ) ?

c) On suppose que q est à valeurs dans ] − ∞; 0[.


Montrer que q possède la propriété P.

Corrigé
a) Notons pour commencer que l’hypothèse de positivité sur q n’a d’autre
intérêt que de nous éviter une pénible valeur absolue dans les expressions
que nous serons amenés à manipuler.
Il convient de savoir automatiquement le résultat suivant :
y  + ω 2 y = 0 ⇔ y  = −ω 2 y

⇔ ∃A, B ∈ R, ∀t ∈ [0, 1], y = A cos(ωt) + B sin(ωt).


Il est en effet de notoriété publique que

(cos(ωt)) = −ω 2 cos(ωt)

et
(sin(ωt)) = −ω 2 sin(ωt)
et que les fonctions t → cos(ωt) et t → sin(ωt) sont linéairement indépen-
dantes (car ω = 0) et engendrent donc un s.e.v. de dimension 2 dont tous
les éléments sont solutions de y  = −ω 2 y. Les solutions d’une équation
différentielle linéaire à coefficients constant, telle que y  = −ω 2 y, formant
un s.e.v. qui est précisément de dimension 2, toutes les solutions de cette
équation sont engendrées par les deux fonctions données ci-dessus.
L’usage de la lettre ω, traditionnellement employée pour désigner une pulsa-
tion, doit vous mettre dans le droit chemin. Nous rappelons que l’équation
différentielle donnée ici correspond à celle que vérifie un oscillateur har-
monique, c’est-à-dire, par exemple, la position y d’une charge accrochée
à un ressort en fonction du temps t, sous couvert que les forces de frotte-
ment sont négligeables ou du moins compensées par un apport énergétique
équivalent.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 395

Pour information, on a de manière symétrique :

y  − ω 2 y = 0 ⇔ y  = ω 2 y ⇔ ∃A, B ∈ R, ∀t ∈ [0, 1], y = Aeωt + Be−ωt .

On peut aussi retrouver le résultat attendu en évoquant le fait que l’équation


caractéristique de l’équation différentielle linéaire du second ordre

y  + ω 2 y = 0

est
r2 + ω 2 = 0 ⇔ r2 = −ω 2 = (iω)2 ⇔ r = ±iω
et rappeler que dans le cas où r = α ± iβ (α ∈ R, β ∈ R∗ ), on obtient une
solution du type

y(t) = eαt (A cos(βt) + B sin(βt))

pour A et B deux constantes réelles quelconques.


Ici α = 0 et β = ω. On a donc

Eq = {t ∈ [0, 1] → A cos(ωt) + B sin(ωt) | A, B ∈ R}

= Vect(t → cos(ωt), t → sin(ωt))

et pour y ∈ Eq ainsi défini à partir de deux constantes réelles A et B, on a


(y(0), y(1)) = (A, A cos(ω) + B sin(ω)), ce qui définit l’endomorphisme de
R2 :

(A, B) → (A, A cos(ω) + B sin(ω)) ,


associé à la matrice
 
1 0
M (ω) =
cos(ω) sin(ω)

inversible ssi det(M (ω)) = sin(ω) = 0, c’est-à-dire ω = 0[π] (ou encore


ω ∈ πN∗ ), ce qui rend l’application en question ici bijective.
On conclut alors que q possède la propriété P ssi ω ∈ R+∗ \πN∗ .

b) Voici une question qu’on pourrait peut-être poser à des lycéens de terminale.
La fonction f est de classe C 2 sur [0, 1] : il est bien connu que toute fonction
de classe C 1 (donc a fortiori celles de classe C 2 ) voit sa dérivée s’annuler en
tout point intérieur à son ensemble de définition où elle atteint un extremum
local et en particulier un extremum global (attention : cela n’est pas vrai
396 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

si l’extremum est atteint sur un point du bord de l’ensemble de définition).


On a donc évidemment f  (t0 ) = 0. Par ailleurs, aux abords d’un maximum
(resp. minimum) local, une fonction de classe C 2 est nécessairement concave
(resp. convexe) et sa dérivée seconde f  est négative (resp. positive), ce qui
est justifié par le développement limité à l’ordre 2 en t0 :
1
f (t) = f (t0 ) + f  (t0 )(t − t0 ) + f  (t0 )(t − t0 )2 + o(t − t0 )2
2
1
= f (t0 ) + f  (t0 )(t − t0 )2 + o(t − t0 )2 .
2
On a donc f  (t0 )  0.

c) Tout d’abord, il convient de remarquer (sans qu’il soit nécessaire de le dé-


montrer) que Eq est un R-espace-vectoriel de dimension 2 et que l’applica-
tion y ∈ Eq → (y(0), y(1)) ∈ R2 est un morphisme de R-espaces vectoriels,
c’est-à-dire une application linéaire. Reste à montrer qu’elle est bijective.
Comme dim(Eq ) = dim(R2 ) = 2, il suffit de montrer qu’elle est injective,
ce qui revient à montrer que son noyau est réduit à la fonction nulle. Soit
donc f ∈ Eq telle que f (0) = f (1) = 0.
L’hypothèse que q est à valeurs dans ] − ∞, 0[ nous indique que y  et y sont
de même signe et qu’elles s’annulent simultanément (car y  = −qy).
Or, si f n’est pas la fonction nulle il existe t0 ∈]0, 1[ tel que f (t0 ) = 0.
Si f (t0 ) > 0 alors f admet un maximum en un point t1 ∈]0, 1[ (car f est
continue sur le segment [0, 1]) et en ce point f (t1 )  f (t0 ) > 0 et, d’après
la question précédente, f  (t1 )  0, ce qui est donc absurde.
Si f (t0 ) < 0, il suffit de considérer −f ∈ Eq (car Eq est un e.v.), faire le
même raisonnement et aboutir à la même contradiction.
f est donc la fonction nulle et le morphisme en question est bijectif.
q possède donc la propriété P.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 397

Exercice 6

Thèmes
théorie des groupes (cycle, groupe symétrique,
groupe alterné, sous-groupe distingué)
combinatoire

Résultat majeur
tout sous-groupe d’indice 2 est distingué

Remarque du jury
a) Utiliser le morphisme de G dans G/N .

Énoncé
a) Soit (G, ·) un groupe fini de cardinal |G| et N un sous-groupe de G de
cardinal |N |. On suppose que |G| = 2|N |. Montrer que N est un sous-
groupe distingué dans G. En déduire

∀x ∈ G, x2 ∈ N.

b) Soit n  3. On note Sn le groupe des permutations de {1, . . . , n}, An le


sous-groupe des permutations paires. On rappelle que An est le sous-groupe
de Sn engendré par les 3-cycles. En déduire le sous-groupe de An engendré
par les carrés d’éléments de An .

c) Déduire des questions a) et b) que A4 ne contient pas de sous-groupe de


cardinal 6.
398 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Corrigé
a) Si N est un sous-groupe d’indice 2 de G (c’est-à-dire, dans le cas d’un
groupe G fini, si |G| = 2|N |), alors les classes de congruence modulo N à
gauche (resp. à droite) sont au nombre de deux, à savoir N et gN (resp. N
et N g) pour un élément quelconque g ∈ G, g ∈ / N et on a alors les réunions
disjointes
G = N  gN = N  N g

d’où gN = N g, ce qui prouve que N est distingué dans G (rappelons qu’un


sous-groupe est distingué ssi il vérifie cette dernière propriété pour tout
g ∈ G. Celle-ci étant triviale quand g ∈ N , il suffit de la vérifier pour
/ N ).
g ∈ G, g ∈

Pour ceux qui ne seraient pas convaincus, voici un peu plus de détail ci-
dessous.
Soit g ∈ G.
Premier cas : si g ∈ N , l’ensemble gN = {gn | n ∈ N } est trivialement égal
à N . (par composition interne dans le sous-groupe N , on a ∀n ∈ N, gn ∈ N
d’où gN ⊂ N . Par ailleurs, tout n ∈ N s’écrit n = g(g −1 n) ∈ gN car
g −1 n ∈ N car g −1 ∈ N et n ∈ N , d’où N ⊂ gN . Par double inclusion, on
a bien l’égalité gN = N ).
Deuxième cas : si g ∈ / N alors gN ∩ N = ∅ et de plus |gN | = |N | car
l’application n → gn définit une bijection entre N et gN .
Ainsi, puisque G est de cardinal |G| = 2|N |, on constate que G se parti-
tionne en deux parties de même cardinal : G = N  gN et de la même
manière on obtient G = N  N g.
Dans G, les classes d’équivalences modulo N , à gauche comme à droite, ne
sont donc qu’au nombre de deux et elles sont les mêmes : N et gN = N g,
ce qui prouve que N est distingué dans G.
En conséquence, on peut définir un groupe quotient G/N et celui-ci est
|G|
d’ordre = 2. Ses deux éléments sont N , d’ordre 1 (c’est l’élément neutre
|N |
de ce groupe quotient) et gN = N , d’ordre 2 (l’ordre d’un élément divise
l’ordre du groupe et seul l’élément neutre est d’ordre 1) pour un élément
quelconque g ∈ G, g ∈ / N . On a donc

/ N ⇒ g 2 N = (gN )2 = N ⇒ g 2 ∈ N.
∀g ∈ G, g ∈
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 399

Puisque par ailleurs, du fait que N est un sous-groupe de G, on a


n ∈ N ⇒ n2 ∈ N,
on a bien
∀x ∈ G, x2 ∈ N.
Version alternative : on peut aussi, une fois assuré que N est distingué
dans G, considérer explicitement le morphisme de groupes canonique π de
G dans G/N dont le noyau est N (ce morphisme est surjectif et on le qualifie
souvent de projection canonique de G dans G/N ).
G/N étant de cardinal 2, tout ses éléments sont d’ordre 1 ou 2, c’est-à-dire
∀g ∈ G, (gN )2 = N . On a alors
∀g ∈ G, π(g 2 ) = π(g)2 = (gN )2 = N,
c’est-à-dire
∀g ∈ G, g 2 ∈ Ker(π) = N.
b) Une permutation paire est une permutation qui s’écrit comme la composée
d’un nombre pair de transpositions (une transposition est un 2-cycle) : sa
signature est égale à 1 (inversement, une permutation impaire s’écrit à l’aide
d’un nombre impair de transpositions et sa signature est égale à −1).
Un 3-cycle (abc) s’écrit (ac)(ab) ou encore (ab)(bc) : c’est bien une permu-
tation paire.
Le carré du 3-cycle (abc) est encore un 3-cycle : (abc)2 = (abc)(abc) = (acb).
Tout 3-cycle est donc le carré d’un autre 3-cycle et tout élément de An s’écrit
comme un produit de carrés de 3-cycles.
Le sous-groupe de An engendré par les carrés d’éléments de An est donc
An lui-même.

c) Faisons la synthèse des forces en présence : S4 est de cardinal 4! = 24. Il est


de notoriété publique que le groupe alterné An est un sous-groupe d’indice
2 du groupe symétrique Sn (dans Sn , il y a autant de permutations paires
que de permutations impaires). A4 est donc de cardinal
|S4 | 24
|A4 | = = = 12.
2 2
Si A4 possédait un sous-groupe N de cardinal 6, N serait alors, d’après la
question a), distingué dans A4 et tous les carrés d’éléments de A4 seraient
dans N et a fortiori le sous-groupe de A4 engendré par les carrés (c’est-à-
dire A4 lui-même) serait inclus dans N : on aurait alors N = A4 et donc
|N | = 12, ce qui est absurde car |N | = 6 par hypothèse.
A4 n’a donc pas de sous-groupe de cardinal 6.
400 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Exercice 7

Thèmes
réduction d’endomorphisme (polynôme minimal,
valeurs propres)
combinatoire (nombre de parties d’un ensemble fini)

Résultat majeur
propriétés du polynôme minimal d’un
endomorphisme

Remarques du jury
a) Donner un théorème central d’algèbre linéaire.
b) Application immédiate et classique de a).

Énoncé
Soit K un corps, E un K-espace vectoriel de dimension finie n  1, u un
endomorphisme de E.
a) Formuler sans démonstration une condition nécessaire et suffisante portant
sur le polynôme minimal de u pour que u soit diagonalisable.

b) On suppose que u est diagonalisable. Montrer que, si F est un sous-espace


de E stable par u, alors l’endomorphisme de F induit par u est diagonali-
sable.

c) On suppose u diagonalisable et K infini. Donner une condition nécessaire


et suffisante pour que l’ensemble des sous-espaces de E stables par u soit
fini. Si tel est le cas, quel est le nombre de sous-espaces de E stables par u ?
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 401

Corrigé
Cet exercice est constitué de propriétés classiques concernant la réduction
des endomorphismes.
a) On ne vous pardonnera pas de ne pas savoir réciter la ritournelle suivante :

u est diagonalisable
si et seulement si
son polynôme minimal πu
est scindé à racines simples dans K.

On veillera en particulier à ne pas confondre polynôme minimal, polynôme


caractéristique et polynôme annulateur.
b) Supposons u diagonalisable : son polynôme minimal πu est donc scindé à
racines simples.
πu annule u sur E donc sur F : πu (u) est l’endomorphisme nul de E donc
sa restriction à F est l’endomorphisme nul de F .
De plus, le polynôme minimal πu|F de la restriction u|F de u à F divise tout
polynôme annulant u sur F .
πu|F est donc nécessairement un diviseur de πu , πu|F est donc également
scindé à racines simples dans K et on en déduit, en appliquant le résultat
rappelé dans la question précédente, que l’endomorphisme u|F de F induit
par u est diagonalisable.

c) Pour que le nombre de sous-espaces de E stables par u soit fini, il faut


et il suffit que chaque sous-espace propre de u soit de dimension 1, c’est-
à-dire, comme u est supposé diagonalisable, que u possède exactement n
sous-espaces propres, tous de dimension 1.
En effet, si un sous-espace propre Ei de u est au moins de dimension 2,
comme K est infini, Ei contient une infinité de droites vectorielles distinctes,
toutes stables par u. Cette propriété n’est pas valable pour les corps finis :
un espace vectoriel E de dimension fini n sur un corps fini de cardinal q ne
contient qu’un nombre fini q n d’éléments et donc un nombre fini de parties
et en particulier un nombre fini de droites. Ce nombre de droites est très
précisément le quotient du nombre q n − 1 d’éléments non nuls de E (chacun
engendre une droite vectorielle) par le nombre q − 1 d’éléments non nuls sur
402 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

une droite (car ces q − 1 éléments engendrent tous la même droite, chaque
droite contenant exactement q éléments dont 0K ).
Dans le cas où u possède n valeurs propres distinctes (et n sous-espaces
propres, chacun de dimension 1), on peut alors construire 2n sous-espaces
obtenus par somme directe d’un nombre quelconque parmi les n sous-
espaces propres de u (on rappelle qu’un ensemble à n éléments possède
exactement 2n parties). Et il n’y en a pas d’autre ! En effet, si F est un sous
espace stable par u, u|F est également diagonalisable, les valeurs propres
de u|F font partie de celles de u et les sous-espaces propres de u|F sont
les intersections de F avec ceux de u : ceux-ci étant tous de dimension 1,
les sous-espaces propres de F sont donc également de dimension 1 et F se
décompose donc comme la somme directe de certains sous-espaces propres
de u.
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 403

Exercice 8

Thèmes
espaces euclidiens (produit scalaire, norme, sphère
unité, isométrie, orthogonalité)
géométrie (droite, plan, rotation)
théorie des groupes (groupe spécial orthogonal, conjugaison)

Résultat majeur
propriétés du groupe orthogonal O(E) et
du groupe spécial orthogonal SO(E)

Remarques du jury
Exercice de géométrie euclidienne
tridimensionnelle découpé en questions simples.
Identifier le conjugué d’un demi-tour par une rotation.

Énoncé
Soit (E,  , ) un espace euclidien de dimension 3.
On note || · || la norme associée à  ,  et

S = {x ∈ E; ||x|| = 1}.

Si D est une droite vectorielle de E, on note σD la rotation d’angle π autour de


D (appelée aussi demi-tour). Par conséquent, σD appartient au groupe spécial
orthogonal SO(E).
a) Soit D une droite vectorielle, g dans SO(E). Reconnaître l’endomorphisme
g ◦ σD ◦ g −1 .
404 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

b) Soit g un élément de SO(E). Montrer que g est un demi-tour si et seulement


s’il existe x dans S tel que g(x) = −x.
Dans les deux questions suivantes, on se donne un sous-groupe G de SO(E)
agissant transitivement sur S c’est-à-dire :

∀(x, y) ∈ S 2 , ∃g ∈ G, g(x) = y.

c) Montrer que G contient un demi-tour.


d) On rappelle que SO(E) est engendré par les demi-tours.
En déduire G = SO(E).

Corrigé
L’ensemble S est traditionnellement appelé sphère unité, que l’espace eu-
clidien soit de dimension 3 ou pas (on dispose d’une définition similaire pour
tout espace normé, ou même seulement métrique). Les éléments de S sont les
vecteurs unitaires de E, c’est-à-dire les vecteurs de norme 1.
Le groupe orthogonal O(E) est le sous-groupe de GL(E) (le groupe des
automorphismes de E) constitué des automorphismes qui conservent la norme :

O(E) = {u ∈ GL(E) | ∀x ∈ E, ||u(x)|| = ||x||}.

Le groupe spécial orthogonal SO(E) est le sous-groupe de O(E) constitué


des automorphismes de déterminant 1, c’est-à-dire, dans le cas présent où
dim(E) = 3, les rotations par rapport à une droite vectorielle de E.
a) Puisqu’il est question du demi-tour σD par rapport à la droite D, il convient
d’examiner deux sous-espaces vectoriels de E sur lesquels σD agit de manière
particulière : D bien sûr, dont les éléments sont les invariants par σD et D⊥
(dans un espace euclidien, ne pas envisager les orthogonaux est une faute
professionnelle) sur lequel σD agit comme une homothétie de rapport −1,
ce qui se traduit par :
∀x ∈ D, σD (x) = x

∀x ∈ D⊥ , σD (x) = −x.
De ces deux égalités on peut déduire :
∀x ∈ D, g ◦ σD ◦ g −1 (g(x)) = g ◦ σD (x) = g(x)

∀x ∈ D⊥ , g ◦ σD ◦ g −1 (g(x)) = g ◦ σD (x) = g(−x) = −g(x),


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 405

ce qui revient à écrire :


∀y ∈ g(D), g ◦ σD ◦ g −1 (y) = y

∀y ∈ g(D⊥ ), g ◦ σD ◦ g −1 (y) = −y.

Remarquons par ailleurs que g(D⊥ ) = g(D)⊥ puisque d’une part ces deux
sous-espaces sont chacun de dimension 2 (g est un isomorphisme de E
donc dim(g(D⊥ )) = dim(D⊥ ) = 2 et dim(g(D)) = dim(D) = 1 donc
dim(g(D)⊥ = 3 − 1 = 2) et d’autre part g est une isométrie de E, donc :
∀x ∈ D, ∀y ∈ D ⊥ , g(x), g(y) = x, y = 0.
On voit ainsi que g ◦ σD ◦ g −1 laisse invariant les éléments de g(D) et agit
comme une homothétie de rapport −1 sur g(D)⊥ : g ◦ σD ◦ g −1 est donc le
demi-tour d’axe la droite g(D).

b) Considérons g ∈ SO(E). Si g est un demi-tour d’axe une droite D alors


∀x ∈ D ⊥ , g(x) = −x.
Il suffit alors de prendre en particulier un élément x ∈ D⊥ ∩ S. L’exis-
tence d’un tel élément est assuré par le fait que tout sous-espace vectoriel
de dimension au moins 1 contient toujours au moins un vecteur unitaire :
x
n’importe quel vecteur non nul x divisé sa norme. est en effet unitaire
  ||x||
 x 
puisque   = 1 ||x|| = 1, par homogénéité de la norme.
||x||  ||x||
Première démonstration de la réciproque :

Réciproquement, supposons qu’il existe x ∈ S tel que g(x) = −x.


x (qui est non nul puisqu’il est unitaire) est un vecteur propre de g et −1
sa valeur propre associée (un vecteur propre est nécessairement non nul,
l’indication x = 0 est donc indispensable).
Montrer que g est un demi-tour consiste d’une part à trouver une droite
D laissée invariante par g et d’autre part à vérifier que g agit comme une
homothétie de rapport −1 sur D⊥ .
Le produit des trois valeurs propres (éventuellement complexes) de g vaut
son déterminant, soit 1 et de plus leur somme est égale à la trace de g qui
elle est nécessairement réelle. On sait déjà que −1 est une valeur propre de
g. On cherche donc deux nombres complexes, mettons λ et µ tels que
−1 × λ × µ = det(g) = 1,
406 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

c’est-à-dire
λµ = −1
et
−1 + λ + µ = tr(g) ∈ R,
c’est-à-dire
λ + µ ∈ R.
Qui plus est,
|λ| = |µ| = 1
car les valeurs propres d’une isométrie sont toujours de module 1. L’une des
deux valeurs λ et µ vaut alors nécessairement 1 et l’autre −1 (si l’une était
imaginaire, l’autre serait alors nécessairement son conjugué et on aurait
λµ = |λ|2 = 1 = −1).
g possède ainsi un sous-espace propre D de dimension 1 associé à la valeur
propre 1 et un sous-espace propre P de dimension 2 associé à la valeur
propre −1.
Considérons enfin y et z des vecteurs propres de E associés respectivement
aux valeurs propres 1 et −1. On a

y, z = (g(y), g(z)


(1)

= y, −z
(2)

= −y, z
(3)

avec (1) car g est une isométrie, (2) car g(y) = y et g(z) = −z et (3) par
linéarité à droite du produit scalaire.
On en déduit
y, z = 0,
ce qui prouve que D et P sont orthogonaux, c’est-à-dire P ⊂ D⊥ d’où, vu
leurs dimensions (1 pour D, 2 pour P et 2 pour D⊥),

D⊥ = P,

ce qui prouve que g est le demi-tour d’axe D.

Deuxième démonstration de la réciproque :


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 407

On peut aller sensiblement plus vite et droit au but en évoquant le résultat


suivant : Si g ∈ SO(E) alors il existe une base orthonormée M = (e1 , e2 , e3 )
de E telle que la matrice de g dans cette base est
 
1 0 0
MatM (g) = 0 cos θ − sin θ
0 sin θ cos θ
pour une certaine valeur θ ∈ [0, π].
Les valeurs propres de cette matrice (qui sont celles de g également) sont
donc 1, eiθ et e−iθ et si l’une d’entre elles vaut −1, alors θ = π et ainsi
 
1 0 0
MatM (g) = 0 −1 0  ,
0 0 −1
ce qui prouve que g est le demi-tour d’axe e1 .

c) Puisque G agit transitivement sur S, considérons x ∈ S et y = −x ∈ S (on


a x ∈ S ⇒ −x ∈ S car ||x|| = 1 ⇒ || − x|| = ||x|| = 1 par homogénéité de la
norme) et g ∈ G tel que g(x) = −x (l’existence d’un tel g est précisément
garantie par le fait que G agit transitivement sur S).
La question précédente permet alors d’affirmer que g est un demi-tour.

d) G contient un demi-tour σD d’axe D.


Considérons σD  un demi-tour quelconque d’axe D .
Prenons deux vecteurs x ∈ D ∩ S et x ∈ D ∩ S.
On a donc en particulier D = Vect(x) et D = Vect(x )
Puisque G est transitif sur S, on dispose d’un g ∈ G tel que g(x) = x .
La question a) nous a permis de voir que g ◦ σD ◦ g −1 est le demi-tour d’axe
g(D) = g (Vect(x)) = Vect (g(x)) = Vect(x ) = D ,
d’où
g ◦ σD ◦ g −1 = σD  .
Puisque σD et g sont deux éléments du groupe G, on déduit de cette égalité
que σD  ∈ G.
G contient donc tous les demi-tours de E et donc tous les automorphismes
de E engendrés par des demi-tours, c’est-à-dire tous les éléments de SO(E).
SO(E) est donc inclus dans son sous-groupe G. Il lui est donc égal :
G = SO(E).
408 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

Exercice 9

Thèmes
probabilités (espérance, théorème de transfert,
indépendance)
analyse (série entière, exponentielle et logarithme, fonction hyperbo-
lique)

Résultats majeurs
lemme de Borel-Cantelli
inégalité de Markov
théorème de transfert
critère de Riemann

Remarques du jury
a) Le rôle de l’indépendance doit apparaître.
c) Technique classique à maîtriser (majoration de grandes déviations
via l’inégalité de Markov).
d) Le lemme de Borel-Cantelli doit être connu.

Énoncé
Soit (Xk )k1 une suite de variables aléatoires mutuellement indépendantes
telles que
1
∀k ∈ N∗ , P(Xk = 1) = P(Xk = −1) = .
2
Pour n dans N∗ , soit
 n
Sn = Xk .
k=1
a) Pour t dans R, calculer  
E etSn .
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 409

b) Montrer :
 
u2
∀u ∈ R, ch(u)  exp .
2

Indication. On pourra comparer les développements en série entière des deux


membres.

c) En déduire, pour n dans N∗ , λ dans R+

 
λ2
P(|Sn |  λ)  2 exp − .
2n

d) Soit c un élément de ]1, +∞[. Pour tout n ∈ N∗ , on note An l’événement :

  
|Sn |  2c n ln(n) .

Rappeler la définition de l’événement

A = lim inf An ,

et montrer P(A) = 1

Corrigé

a) On utilise successivement (1) la définition de Sn , (2) la linéarité de la


somme, (3) les propriétés usuelles de la fonction exponentielle et enfin et
principalement (4) l’indépendance mutuelle des variables (Xk )1kn , celle-
 
ci entraînant l’indépendance mutuelle des variables etXk 1kn , par conti-
nuité de la fonction exponentielle sur R (l’indépendance de variables aléa-
410 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

toires est conservée quand on leur applique des fonctions continues).


  n 
 tSn  
E e = E exp t Xk
(1)
k=1
  n


= E exp (tXk )
(2)
k=1
 n


= E etXk
(3)
k=1

n
  
= E etXk
(4)
k=1

n

= (ch(t))
(5)
k=1

= (ch(t))n

avec (5) car le théorème de transfert permet de calculer :


    
∀k ∈ N∗ , E etXk = etx × P (Xk = x)
x∈Xk (Ω)

= et×1 × P(Xk = 1) + et×(−1) × P(Xk = −1)

et + e−t
=
2

= ch(t).

b) Suivons l’indication donnée dans l’énoncé. On a les développements en série


entière suivants, valables sur R (et même sur C mais c’est inutile ici) car il
est de notoriété publique que la fonction exponentielle admet un dévelop-
pement en série entière dont le rayon de convergence est infini. Si besoin,
on peut s’en convaincre en utilisant le critère de d’Alembert : an z n
a un rayon de convergence R tel que, quand cette limite existe
 
1  an+1 
= lim  .
R n→∞  an 
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 411

En particulier, quand cette limite est nulle, le rayon de convergence est


infini.
La fonction cosinus hyperbolique est une combinaison linéaire de deux fonc-
tions exponentielles (et même plus précisément leur moyenne arithmétique),
le rayon de convergence de son développement en série entière est donc éga-
lement infini et on doit savoir que celui-ci est composé des termes de rang
pair du développement de eu .

Remarque : toute fonction définie sur R se décompose de manière unique


comme somme d’une fonction paire et d’une fonction impaire : ch(u) et
sh(u) sont respectivement les parties paire et impaire de exp(u).
+∞ n
 u
∀u ∈ R, exp(u) =
n!
n=0

+∞
 u2n
ch(u) =
(2n)!
n=0

  +∞
  n +∞
u2 1 u2 u2n
exp = = .
2 n! 2 2n n!
n=0 n=0

On remarque que
n
 n

n
∀n ∈ N∗ , 2n n! = 2 k= (2k)
k=1 k=1

n
 n

 (2k) × (2k − 1)
k=1 k=1

2n

= k = (2n)!.
k=1

On en déduit, par décroissance de la fonction inverse sur R∗+ :


1 1
∀n ∈ N∗ ,  .
2n n! (2n)!
Cette inégalité est de plus triviale pour n = 0 puisque
1 1
=1= .
20 × 0! (2 × 0)!
412 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

On a donc
1 1
∀n ∈ N,  ,
2n n! (2n)!

d’où, par positivité de u2n (une puissance paire d’un nombre réel est tou-
jours positive) :
u2n u2n
∀u ∈ R, ∀n ∈ N, n  .
2 n! (2n)!

Enfin, par somme (oui, tant que le résultat fait sens, c’est-à-dire tant que
les séries résultantes convergent, on peut sommer une infinité d’inégalités) :

  +∞

u2 u2n
∀u ∈ R, exp =
2 2n n!
n=0

+∞
 u2n
 = ch(u).
(2n)!
n=0

c) Il convient de penser immédiatement à l’inégalité de Markov (voir son


énoncé exact page 78) pour une variable aléatoire réelle X :

E(|X|)
∀α > 0, P (|X|  α)  .
α

Tous ses éléments sont présents ici : on cherche en effet à majorer ou mi-
norer une probabilité portant sur un événement s’exprimant à l’aide d’une
inégalité. Comme on nous a demandé de calculer l’espérance de la variable
aléatoire etSn dans la question a) et que celle-ci s’exprime à l’aide de ch(t),
le résultat de la question b) achève de nous convaincre qu’il semble judicieux
d’appliquer l’inégalité de Markov à etSn pour un réel t adéquat.
On peut dans un premier temps remarquer que si λ = 0 alors l’inégalité à
démontrer est trivialement vérifiée car ses deux membres sont égaux à 1.
On suppose dans la suite que λ > 0.
On se débarrasse dans un premier temps des valeurs absolues sur |Sn | puis
on pose un t > 0 quelconque pour l’instant. On utilise successivement (1)
la croissance de la fonction exponentielle sur R, (2) l’inégalité de Markov,
(3) le résultat de la question a), (4) la parité de la fonction ch, (5) le résultat
λ
de la question b) et on pose finalement (6) t = > 0.
n
Noter que la condition t > 0 est nécessaire pour avoir l’égalité (0).
CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 413

P(|Sn |  λ) = P (Sn  λ ∪ Sn  −λ)

= P(Sn  λ) + P(Sn  −λ)

= P(Sn  λ) + P(−Sn  λ)

= P (tSn  tλ) + P (−tSn  tλ)


(0)

   
= P etSn  etλ + P e−tSn  etλ
(1)

E(etSn ) E(e−tSn )
 +
(2) etλ etλ

(ch(t))n (ch(−t))n (ch(t))n


= + = 2
(3) etλ etλ (4) etλ
  2 n  2
t
exp 2 exp n t2
 2 tλ
=2
(5) e etλ
 
exp λ2    
2n λ2 λ2 −λ2
= 2   = 2 exp − = 2 exp .
(6) exp λ2 2n n 2n
n

On aurait pu également utiliser une variante (M) de l’inégalité de Markov


consistant essentiellement à élever X et α à une puissance p > 0 :

E(|X|p )
∀α > 0, ∀p > 0, P (|X|  α) = P (|X|p  αp )  .
(M ) αp

λ
En appliquant cette variante deux fois à eSn et e−Sn avec p = > 0, on
n
414 CHAPITRE 24 : ÉPREUVE DE 2017

obtient des calculs quasiment identiques aux précédents :


 
P(Sn  λ) = P eSn  eλ
 λ/n 
E e Sn

(M ) (eλ )λ/n
  
E exp nλ Sn
=
eλ2 /n
  λ n
ch n
=
eλ2 /n
 2
exp 2n λ  
λ2
 = exp −
eλ2 /n 2n

et de même
 
P(−Sn  λ) = P e−Sn  eλ
 λ/n 
E e−Sn

(M ) (eλ )λ/n
  
E exp − nλ Sn
=
eλ2 /n
  λ n
ch n
=
eλ2 /n
 2
exp 2n λ  
λ2
 = exp − .
eλ2 /n 2n

d) Si on ne se souvient pas (ce qui serait bien naturel) dans quel ordre il faut
mettre les intersections et réunions dans lim inf, on peut tout de même
penser que l’on a toujours, en toute logique :

lim inf An ⊂ lim sup An .


CONCOURS SPÉCIAL DOCTEUR 415

Et comme
 
ω∈ Ak ⇔ ∃n  1, ∀k  n, ω ∈ Ak
n1 kn
⇒ ∀n  1, ∃k  n, ω ∈ Ak
 
⇔ ω∈ Ak
n1 kn

on a donc
   
Ak ⊂ Ak
n1 kn n1 kn

et on peut retrouver ainsi


 
lim inf An = Ak
n1 kn
et
 
lim sup An = Ak .
n1 kn

Par ailleurs, quand il est question de lim inf ou de lim sup dans un contexte
probabiliste, on doit absolument penser au résultat majeur qu’est le lemme
de Borel-Cantelli (voir page 80). Rien n’étant dans le bon sens (ni
l’inégalité définissant les événements Ak , ni la lim sup du lemme, remplacée
ici par une lim inf), on passe à l’événement complémentaire. On a donc :

P(A) = P (lim inf An )


 
 
= P Ak 
n1 kn

 
 
= 1 − P Ak 
n1 kn

 
 
= 1 − P Ak 
n1 kn

 
= 1 − P lim sup Ak = 1
INTERMÈDE 417

Figure 24.7 – Carré blanc sur fond blanc a .

a. œuvre de l’artiste et théoricien de l’art Kasimir Malevitch peinte en 1918 et conser-


vée au Museum of Modern Art de New-York. Moma - domaine public
Nous conseillons sans aucune ironie au lecteur de chercher une version couleur de ce tableau.
Elle lui permettra d’apprécier les différentes teintes de blanc utilisées (et non pas de gris
comme ci-dessus). Malevitch a peint d’autres tableaux sur le thème du carré.
Remerciements de l’auteur

À mes étudiants Léa Gérard, Morgan Martin et Valentin Massicot,


les premiers à avoir corrigé les épreuves de ce manuel.

À mes collègues Odile Fleury, Alain Ninet, David Lafolie et Michaël


Boualit, qui ont poursuivi cet indispensable travail de relecture.

À l’ensemble de mes professeurs, de mes collègues et de mes anciens cama-


rades d’études, dont je préfère ne pas dresser la longue liste de crainte qu’elle
ne soit exhaustive.

À l’ensemble des étudiants qui ont dû supporter les errances et les virages
abrupts, les longues digressions et les contradictions, les saillies et les gouffres,
l’exubérance et parfois l’hétérodoxie de mes discours didactiques.

À mon vieux camarade Frédéric Blanchard, pour ses encouragements


constants et pour m’avoir invité à fréquenter à nouveau l’Université de Reims
alors que je pensais m’en être définitivement éloigné.

À tous mes amis et en particulier à Jean-Édouard Frognet et Emma-


nuel Mailly, rencontrés lors de lointaines pérégrinations dans les sous-sols des
lieux de culture rémois et qui, fortuitement, enseignent avec sérieux les mathé-
matiques.

À mon père Daniel et à ma mère Claudine, tout à la fois exemples et


contre-exemples.
Bibliographie

Bibliographie

[Aud06] Michèle Audin : Géométrie. EDP Sciences, 2006.


[Ber18] Grégory Berhuy : Algèbre : le grand combat. Calvage & Mounet,
2018.
[BL07] Philippe Barbe et Michel Ledoux : Probabilité. EDP Sciences,
2007.
[BMP05] Vincent Beck, Jérôme Malick et Gabriel Peyré : Objectif agré-
gation. H&K, 2005.
[FGN01] Serge Francinou, Hervé Gianella et Serge Nicolas : Exercices
de mathématiques oraux X-ENS algèbre 1 à 3, analyse 1 à 4, mathé-
matiques 1 à 6. Cassini, 2001.
[Gou20] Xavier Gourdon : Les maths en tête : Analyse. Ellipses, 2020.
[Gou21] Xavier Gourdon : Les maths en tête : Algèbre et probabilités. El-
lipses, 2021.
[Hau07] Bertrand Hauchecorne : Les contre-exemples en mathématiques.
Ellipse, 2007.
[Ort04] Pascal Ortiz : Exercices d’algèbre. Ellipse, 2004.
[Ouv00] Jean-Yves Ouvrard : Probabilités 1 & 2. Cassini, 2000.
[Per96] Daniel Perrin : Cours d’algèbre. Ellipse, 1996.
[Que20] Hervé Queffélec : Topologie. Dunod, 2020.
[QZ20] Hervé Queffélec et Claude Zuily : Analyse pour l’agrégation.
Dunod, 2020.
[RB06] Jean-Jacques Risler et Pascal Boyer : Algèbre pour la licence 3.
Dunod, 2006.
[Rud20] Walter Rudin : Analyse réelle et complexe. Dunod, 2020.
[Rud21] Walter Rudin : Principes d’analyse mathématique. Dunod, 2021.
[Tau20] Patrice Tauvel : Analyse complexe pour la licence : cours et exer-
cices corrigés. Dunod, 2020.
Index

Index

σ antisymétrie, 49
additive, 75 application
additivité, 358 linéaire, 201
algèbre, 75 auto-adjoint
endomorphisme, 37
Abel
lemme d’, 60, 319 Banach
abélien espace de, 49, 228
groupe, 194 théorème de Hahn-Banach, 229
accroissements finis barycentriques
inégalité des, 51 coordonnées, 359
théorème des, 51, 375 base, 85, 171
action duale, 22
de groupe, 363 extraite (théorème de la), 22, 95
additivité incomplète (théorème de la), 22,
σ-, 358 95
adhérence, 228, 298, 385 Bernoulli
adjoint variable de, 245
d’un endomorphisme, 37 Bernstein
algébrique polynôme de, 44
multiplicité, 155 Bertrand
algèbre, 5, 20 critère de, 65
alterné Bézout
groupe, 10, 363 théorème de, 18, 269, 278
alternée Bienaymé-Tchebychev
série, 61 inégalité de, 78
anneau, 5, 166, 340 binôme
euclidien, 17, 20, 171 de Newton, 63, 156
factoriel, 16 inverse, 63
principal, 16, 20 Bolzano-Weierstrass
quotient, 7 théorème de, 53, 273, 381
424 INDEX

Borel fini, 134, 147, 166


loi du zéro-un de, 80, 354 covariance, 75
Borel-Cantelli crible
lemme de, 80, 354, 408 de Poincaré, 334
critère
Cauchy de Bertrand, 65
suite de, 228 de d’Alembert, 238, 325, 410
théorème de, 14, 218 de Leibniz, 237
Cauchy-Schwarz de Riemann, 60, 64, 354, 408
inégalité de, 245, 326 crochet
Cayley de Lie, 20
théorème de, 14 cyclotomique
Cayley-Hamilton polynôme, 171
théorème de, 34, 269
centre d’un groupe, 10, 294 d’Alembert
Cesàro critère de, 238, 325, 410
théorème de, 285 théorème de d’Alembert-Gauss, 39
codiagonalisables décomposition
endomorphismes, 85, 97, 117, 345 de Dunford, 194
coefficients degré
de Fourier, 72, 234 d’une extension de corps, 19
comatrice, 26, 298 densité, 298, 302
compacité, 273 dérivé
compact, 97, 253 groupe, 11
continuité, 209 déterminant, 23, 109, 129, 134, 151,
caractérisation séquentielle, 212 161
d’un endomorphisme, 212 de Vandermonde, 31
d’une application linéaire, 263, 385 développement
d’une intégrale à paramètre, 212, en série entière, 55
253 limité, 55
contractante diagonalisabilité, 85, 129, 151, 194
fonction, 273 diagonalisable
convergence endomorphisme, 34, 37, 345
presque-sûre, 281, 302 matrice, 28
simple, 209, 350 diédral
uniforme, 54, 209, 253, 350 groupe, 9
convexité, 273, 381, 393 Dirichlet
coordonnées théorème de, 73, 234
barycentriques, 359 distance, 47, 381
corps, 5, 134 distingué
extension de, 19, 134, 171 sous-groupe, 10, 363
INDEX 425

division anneau, 20, 171


euclidienne, 166, 171 espace, 48, 97, 245, 253
dual stathme, 17
d’un espace vectoriel, 22, 201 euclidienne
duale division, 166, 171
base, 22 norme, 48, 161
Dunford événement, 75
décomposition de, 194 exponentielle
de matrice, 194
Eisenstein loi, 302, 354
entiers d’, 17, 172 extension
élément de corps, 19, 134, 171
irréductible, 16 degré d’une, 171
endomorphisme extrema liés, 367
adjoint, 37
auto-adjoint, 37 Fermat
diagonalisable, 34, 37, 345 petit théorème de, 13
image d’un, 129 fonction
norme d’un, 212 contractante, 273
noyau d’un, 129 holomorphe, 71
sous e.v. stable par un, 85 lipschitzienne, 97, 273, 375
endomorphismes forme
codiagonalisables, 85, 97, 117, 345 bilinéaire, 48
entiers hermitienne, 49
d’Eisenstein, 17, 172 linéaire, 85
de Gauss, 17, 341 sesquilinéaire, 49
équation formule
différentielle, 218, 393 d’inversion de Fourier, 73
espace de Koenig-Huygens, 76
de Banach, 49, 228 de Taylor-Young, 55, 393
de Hilbert, 50, 68, 70 des probabilités totales, 78, 334
dual, 22 du binôme de Newton, 63, 156
euclidien, 48, 97, 245, 253, 307, du binôme inverse, 63
326, 403 du crible de Poincaré, 334
hermitien, 49 Fourier
métrique, 47 coefficients de, 72, 234
vectoriel, 5, 171, 201 formule d’inversion de, 73
vectoriel normé, 48 série de, 234
espérance, 75, 78, 81, 245, 281, 302, transformée de, 73, 253
334
euclidien géométrique
426 INDEX

multiplicité, 155 hermitienne


gamma forme, 49
loi, 302 matrice, 29
Gauss Hilbert
entiers de, 17, 341 espace de, 50, 68, 70
lemme de, 18 Hölder
géométrique inégalité de, 67, 291
loi, 334 holomorphe
série, 62 fonction, 71
Germain homographie, 117
théorème de Sophie, 14 homothétie, 294
Gram-Schmidt hyperplan, 307
procédé de, 161
groupe, 5 IAF, 52
abélien, 194 idéal, 166, 340
action de, 363 maximal, 7, 166
alterné, 10, 363, 397 premier, 7
centre d’un, 10, 294
principal, 7
cyclique, 11
image
de Klein, 10
d’un endomorphisme, 129
dérivé, 11
d’une matrice, 151
des quaternions, 10
inégalité
diédral, 9
des accroissements finis, 51
linéaire, 8, 294, 298
de Bienaymé-Tchebychev, 78
monogène, 11
de Cauchy-Schwarz, 245, 326
orthogonal, 9, 403
de Hadamard, 161
quotient, 7, 11
de Hölder, 67, 291
spécial linéaire, 8
de Markov, 78, 245, 281
spécial orthogonal, 9
de Parseval, 73
symétrique, 9, 363, 397
groupes triangulaire, 48, 156
morphisme de, 194 intégrale, 234
invariant
Hadamard de similitude, 27
inégalité de, 161 inverse
Hahn-Banach d’une matrice, 25
théorème de, 229 irréductible
Hermite élément, 16
polynôme d’, 45 isométrie, 403
hermitien isomorphisme, 201
espace, 49 théorème d’, 12, 340, 363
INDEX 427

Jordan des grands nombres, 81, 302


matrice de, 30 du zéro-un de Borel, 80, 354
réduction de, 30 exponentielle, 302, 354
gamma, 302
Khintchine géométrique, 334
théorème de, 81
Klein Markov
groupe de, 10 inégalité de, 78, 245, 281, 408
Koenig-Huygens matrice, 22, 129, 161, 201
formule de, 76 circulante, 32
Kronecker compagnon, 31, 156, 171
symbole de, xiii, 86, 352 de Jordan, 30
de Vandermonde, 31, 134
Lagrange diagonalisable, 28
multiplicateurs de, 367 exponentielle de, 194
polynôme d’interpolation de, 42, hermitienne, 29
147 image d’une, 151
théorème de, 13 inversible, 26, 109
Laguerre nilpotente, 29, 85
polynôme de, 45 noyau d’une, 151
Laplace par bloc, 109
transformée de, 212, 302 scalaire, 28
Leibniz stochastique, 30
critère de, 237 symétrique, 28, 117
règle de, 67, 302 triangulaire, 27
lemme trigonalisable, 27
d’Abel, 60, 319 matrices
de Borel-Cantelli, 80, 354, 408 équivalentes, 26
de Gauss, 18 semblables, 27, 194
Lie mesure
crochet de, 20 de probabilité, 75
linéaire méthode
application, 201 de Sarrus, 153
forme, 85 morphisme
groupe, 8, 294, 298 d’algèbres, 109
représentation, 194 d’anneaux, 171
lipschitzienne de groupes, 194
fonction, 97, 273, 375 multiplicateurs de Lagrange, 367
logarithme, 245 multiplicité
loi algébrique, 155
de Poisson, 334 géométrique, 155
428 INDEX

Newton unitaire, 171


binôme de, 63, 156 probabilités totales
polynôme de, 43 formule des, 78, 334
normal procédé
sous-groupe, 10 de Gram-Schmidt, 161
norme, 48, 67, 97, 156, 218, 228, 253, produit
263, 273, 291, 307, 326, 381, scalaire, 48, 49, 97, 117, 161, 245,
385, 403 253, 307, 403
d’un endomorphisme, 212 projecteur, 294
euclidienne, 48, 161
quaternions
noyau, 156
groupe des, 10
d’un endomorphisme, 129
quotient
d’une matrice, 151
anneau, 7
optimisation, 367 groupe, 7, 11
orthogonal réalisation, 75
groupe, 9 racine
n-ième de l’unité, 171
Parseval
rang, 129, 201, 298, 334
inégalité de, 73
d’une matrice, 151
PGCD, 20, 166, 269, 278
théorème du, 32, 129, 151
Poincaré
rayon
formule du crible de, 334
de convergence, 55, 234, 319
point fixe
réduction
théorème du, 53, 273
de Jordan, 30
Poisson
règle
loi de, 334
de d’Alembert, voir critère de
polynôme, 134, 166, 278, 340
de Leibniz, 67, 302
symétrique, 156
représentation
caractéristique, 24, 34, 43, 171
linéaire, 194
cyclotomique, 171
résidus
d’Hermite, 45 théorème des, 71, 234
d’interpolation, 42, 194 Riemann
d’interpolation de Lagrange, 42, 147 critère de, 60, 64, 408
de Bernstein, 44 Rolle
de Laguerre, 45 théorème de, 51
de Newton, 43
de Tchebychev, 45 Sarrus
irréductible, 171 méthode de, 153
minimal, 34, 43, 171, 345, 400 scalaire
symétrique, 39 matrice, 28
INDEX 429

produit, 48 Sylow
série, 285, 354 sous-groupe de, 11, 363
alternée, 61 théorème de, 15
de Fourier, 234 symbole
entière, 234, 390 de Kronecker, xiii, 86, 352
géométrique, 62 symétrique
harmonique, 61 groupe, 9, 363
harmonique alternée, 61 matrice, 28, 117
numérique, 225 polynôme, 39, 156
sesquilinéaire
forme, 49 TAF, 51, 375
Taylor-Young
sesquilinéarité, 49
formule de, 55, 393
signature, 363
Tchebychev
simple
inégalité de Bienaymé-, 78
convergence, 350
polynôme de, 45
sommation des équivalents
Thalès
théorème de, 285
théorème de, 359
sous
théorème
algèbre, 7
des accroissements finis, 51
anneau, 7
d’isomorphisme, 12, 340, 363
corps, 7 de Bézout, 18, 269, 278
espace vectoriel, 7 de Bolzano-Weierstrass, 53, 273,
sous-additivité, 48 381
sous-groupe, 7 de Cauchy, 14, 218
de R, 15 de Cayley, 14
de Sylow, 11, 363 de Cayley-Hamilton, 34, 269
distingué, 7, 10, 363, 397 de Cesàro, 285
normal, 10 de continuité d’une intégrale à pa-
spécial linéaire ramètre, 212, 253
groupe, 8 de convergence dominée, 234
spécial orthogonal de d’Alembert-Gauss, 39
groupe, 9 de dérivabilité d’une intégrale à pa-
spectral ramètre, 67
théorème, 37, 307, 326 de Dirichlet, 73, 234
spectre de Fermat, 13
d’une matrice, 109, 154 de Hahn-Banach, 229
stathme, 17 de Khintchine, 81
suite de la base extraite, 22, 95
de Cauchy, 228 de la base incomplète, 22, 95
de fonctions, 209 de Lagrange, 13
430 INDEX

de Rolle, 51 vectoriel
de sommation des équivalents, 285 espace, 5
de Sophie Germain, 14
de Sylow, 15 Wedderburn
de Thalès, 359 théorème de, 19
de transfert, 77, 281, 408 Weierstrass
de transport, 77 théorème de, 44, 54, 253, 263
de Wedderburn, 19
de Weierstrass, 44, 54, 253, 263
des accroissements finis, 375
des résidus, 71, 234
du point fixe, 53, 273
du rang, 32, 129, 151
spectral, 37, 307, 326
topologie, 263
trace, 24, 85, 117, 326
transfert
théorème de, 77, 281, 408
transformée
de Fourier, 73, 253
de Laplace, 212, 302
transport
théorème de, 77
transposée, 25, 326
triangulaire
inégalité, 48
tribu, 75

uniforme
convergence, 253, 350
univers, 75

valeur propre, 129, 151, 156, 194, 326,


334, 400
Vandermonde
déterminant de, 31
matrice de, 31, 134
variable
de Bernoulli, 245
variance, 75, 78
vecteur propre, 129, 151, 156
Réviser les bases pour
l’agrégation de mathématiques

Ce manuel propose aux candidats à l’agrégation de mathématiques


et aux étudiants de licence et de master qui envisagent de s’y présenter
dans les années à venir, de travailler de nombreux points clés parmi
les plus élémentaires exigés dans chacun des trois concours (interne,
externe standard, externe spécial docteur). Les questions tirées de l’un
des concours externes pourront ainsi être traitées par les candidats au
concours interne et vice versa.

Après des rappels synthétiques ciblés, l’ensemble des questions


préliminaires des annales de 2017 à 2021 sont traitées. Placées en tête
de sujet, elles visent à permettre au jury de vérifier que les candidats
maîtrisent un socle minimal de connaissances et de techniques sur des
thèmes variés (algèbre, analyse, géométrie, probabilités, topologie). Ne
pas satisfaire à cette première exigence est souvent rédhibitoire. Ce livre
vise donc à permettre aux candidats et aux étudiants de bien identifier
cette base de savoirs fondamentaux et de combler leurs lacunes mais
aussi de leur faire prendre conscience de certaines justifications qui
sont attendues dans la résolution de ces questions.

À l’inverse des corrigés complets qui passent rapidement et de manière


trop elliptique sur les premières questions des sujets, les jugeant trop
simples alors qu’elles ne le sont pas pour la majorité des candidats, cet
ouvrage insiste sur leur résolution avec force détails. Les calculs sont
décomposés à l’extrême, commentés et parfois proposés avec des
variantes et des illustrations.

Julien Rouyer est agrégé de mathématiques et prépare un doctorat en


informatique. Il enseigne en licence de mathématiques, master MEEF et B.U.T.
d’informatique à l’université de Reims-Champagne-Ardenne et intervient
à Sciences-Po Reims.

-:HSMDOA=U[^\Z[:

Vous aimerez peut-être aussi