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Université de Bordeaux

UMR 5199 - PACEA

Mémoire de Master 2 Sciences et Technologies

Mention Anthropologie biologique – Préhistoire

Spécialité : Archéothanatologie

Pour un renouveau des méthodes d’étude des liaisons ostéologiques de second ordre :
nouvelles approches appliquées à l’analyse de la nécropole néolithique de la rue J. Bernier
(Valenciennes, Nord)

MARTIN Ezéchiel

Sous la direction de S. Kacki et A. Thomas

Année 2016 – 2017


Université de Bordeaux
UMR 5199 - PACEA

Mémoire de Master 2 Sciences et Technologies

Mention Anthropologie biologique – Préhistoire

Spécialité : Archéothanatologie

Pour un renouveau des méthodes d’étude des liaisons ostéologiques de second ordre :
nouvelles approches appliquées à l’analyse de la nécropole néolithique de la rue J. Bernier
(Valenciennes, Nord)

MARTIN Ezéchiel

Sous la direction de S. Kacki et A. Thomas

Année 2016 – 2017

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Remerciements

Je tenais tout d’abord à remercier mes tuteurs, Monsieur S. Kacki et Madame A. Thomas pour
l’aide qu’ils m’ont apporté dans le cadre de mon mémoire mais aussi pour leurs conseils, leur
patience et les corrections qu’ils ont pu apporter à ce travail. Pour la simple raison qu’ils furent
de très bons tuteurs auprès desquels j’ai énormément appris tout au long de la rédaction de ce
mémoire.

Mes remerciements s’adressent aussi à Madame C. Couture, Madame A. Delagnes et au


laboratoire PACEA qui ont accepté de financer mon projet de mémoire en attendant la réponse
de financement du SRA du Nord-pas-de-Calais. Je remercie à cette occasion Monsieur G. Leroy
pour m’avoir proposé d’étudier le site archéologique de Valenciennes et pour son enthousiasme
lors de la présentation de ce projet d’étude.

Pendant ce mémoire, j’ai pu rencontrer de nombreux enseignants chercheurs, post-doctorants


et doctorants auprès desquels j’ai obtenu de précieux conseils pour mener mon étude, pour
trouver des sources pertinentes ou pour mener à bien certains protocoles. Il me paraît donc très
important d’adresser ma reconnaissance à Monsieur C. Knussel pour sa disponibilité et les
discussions particulièrement instructives pour mes recherches mais aussi à Pierre Guyomarch
pour l’aide qu’il a pu m’apporter dans la recherche de protocole d’étude des liaisons
ostéologiques.

Durant les premières semaines d’étude, la création des restitutions 3D par photogrammétrie
ayant presque eu raison de ma combativité, je tiens à remercier les personnes m’ayant permis
de comprendre comment utiliser cette méthode et comment créer sereinement mes modèles 3D.
Je suis donc reconnaissant à Géraldine Sachau-Carcel, Marie Matu et Maxime Pelletier pour
les réponses qu’ils m’ont apporté et le temps qu’ils m’ont accordé. Mes remerciements
s’adressent aussi à Monsieur P. Courtaud pour ses conseils et son accueil chaleureux au sein de
l’ostéothèque de Pessac où j’ai pu procéder à l’étude de la collection de référence de la caserne
Taupin. Je remercie de même Monsieur B. Dutailly et Madame H. Coqueugniot pour la grande
aide qu’ils m’ont apporté dans l’utilisation du logiciel TIVMI et des restitutions 3D. Enfin, je
remercie Monsieur F. Santos pour son aide et sa disponibilité pour l’exploitation des données
statistiques.

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Ce mémoire m’ayant amené à étudier les ossements humains dans le Service Archéologique de
Valenciennes pendant près de deux mois, je tenais à remercier Arnaud Tixador et David
Delassus pour m’avoir permis de travailler dans d’aussi bonnes conditions. Je remercie de
même tous les archéologues de ce service ainsi que les stagiaires de l’Université de Cambrai
alors présents pour leur accueil bienveillant mais aussi pour leur bonne humeur au quotidien.

De façon plus personnelle, je souhaite remercier ma famille qui a toujours soutenu mon projet
durant ces 7 longues années d’étude pendant lesquelles ils ont toujours su me pousser à
travailler au maximum de mes capacités et pour la confiance qu’ils ont toujours su me redonner.
J’adresse de même toute ma reconnaissance à Patrick Bevis (car les mojitos peuvent parfois
mener à l’illumination), Michel Maillard (car la pêche et une partie de jeu vidéo peuvent libérer
l’esprit), à Mélanie Léglise (car ses encouragements ont toujours été bienvenus) et à tous mes
camarades d’Espagne.

Enfin, je souhaite tout particulièrement remercier deux amis du Master, Marlon Bas et Jordan
Romeyer Dherbey pour les fous rires partagés, pour les nombreuses discussions autour de nos
sujets de mémoire, pour avoir contribués à finir cette année avec toutes mes capacités mentales
ainsi qu’avec une grande habileté pour la préparation de cafés et cappuccinos.

3
Table des matières
Introduction ..................................................................................................................................... 6
1. L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre : des acquis au développement de
nouvelles méthodes. ........................................................................................................................ 8
1.1 Le développement de l’étude des liaisons ostéologiques................................................ 8
1.2 L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre : pour une meilleure estimation du
nombre minimum d’individus. ................................................................................................... 9
1.3 L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre : pour une nouvelle approche des
facteurs constitutifs des sites funéraires. .................................................................................... 11
1.3.1 Les phénomènes anthropiques......................................................................................... 11
1.3.2 Les phénomènes naturels : le cas des milieux saturés en eau. .......................................13
1.4 Les apports des méthodes 3D à l’étude des liaisons ostéologiques de second ordre. .. 15
1.5 Limites de l’étude des liaisons ostéologiques. ................................................................ 16
1.5.1 Limites des protocoles d’étude par paramètres visuels. ................................................. 16
1.5.2 Limites des protocoles métriques. .................................................................................. 17
2. Matériel et méthode. .................................................................................................................. 18
2.1 Présentation des collections d’étude. ............................................................................. 18
2.1.1 Le site de la rue J. Bernier (Valenciennes, Nord). ........................................................... 18
2.1.2 La base de données du Néolithique moyen d’A. Thomas.............................................. 22
2.1.3 La collection de la caserne Taupin. ................................................................................ 22
2.2 Etude des liaisons ostéologiques par paramètre visuel (symétrie et contiguïté).......... 22
2.3 Approche ostéométrique.................................................................................................24
2.3.1 Méthode de R.M. Thomas et collaborateurs (2013). ......................................................24
2.3.2 Méthode d’analyse canonique des corrélations. ........................................................... 25
2.4 Etude de la congruence articulaire scapulo-humérale par le biais de modèles 3D. ..... 27
2.4.1 Acquisition photographique. ..........................................................................................28
2.4.2 Restitution 3D et pose des landmarks. ..........................................................................28
3. Résultats. ......................................................................................................................................31
3.1 Etude des liaisons ostéologiques par paramètre visuel.................................................. 32
3.1.1 Symétrie............................................................................................................................ 32
3.1.2 Contiguïté. ....................................................................................................................... 35
3.2 Résultats du protocole Thomas et collaborateurs (2013). ..............................................38
3.3 Résultats du protocole d’Analyse Canonique de Corrélation. ....................................... 41
3.4 Résultats du protocole de photogrammétrie. ................................................................ 45

4
4. Discussion. ..................................................................................................................................47
4.1 Apports et limites des protocoles méthodologiques employés. ....................................47
4.1.1 Analyse par paramètres visuels. ......................................................................................47
4.1.2 Analyse métrique des liaisons par symétrie. ................................................................. 48
4.1.3 Analyse canonique de corrélation. .................................................................................50
4.2 Modalités de constitution des assemblages osseux. ...................................................... 52
4.2.1 Influence des flux hydriques sur la disposition des restes osseux. ............................... 52
4.2.2 Analyse spatiale des liaisons de second ordre. .............................................................. 53
Conclusion ......................................................................................................................................58
Bibliographie .................................................................................................................................. 60
Table des figures ............................................................................................................................. 63
Liste des tableaux........................................................................................................................... 64
Table des annexes ...........................................................................................................................65
Annexes .......................................................................................................................................... 66

5
Introduction

Dans chaque domaine lié à l’archéologie, les études menées peuvent être rendues
particulièrement complexes selon l’état de conservation des structures mises au jour, mais aussi
en fonction des éventuels bouleversements qui ont pu concerner l’organisation de leurs
éléments constitutifs. Ainsi, dans le domaine de l’anthropologie, il n’est pas rare de rencontrer,
au sein des sites funéraires et des sépultures qu’ils renferment, des assemblages d’ossements
n’entretenant plus entre eux de cohérences anatomiques. Selon A.J. Osterholtz et collaborateurs
(2014), qu’importe la période ou le lieu dans lequel l’archéologue travail, les défis analytiques
induits par de tels assemblages sont toujours existants. Ces amas d’os mélangés qui témoignent
de déplacements des pièces squelettiques après la décomposition, doivent être inclus dans nos
stratégies de recherches et faire l’objet d’un enregistrement adapté. À travers l’identification et
la quantification des pièces en présence, ces études peuvent permettre d’interpréter les
processus qui ont abouti à la constitution de tels assemblages et nous renseigner de la sorte sur
le fonctionnement des sites dont ils sont issus.
Les assemblages osseux de ce type sont récurrents notamment pour le Néolithique, les
sépultures collectives de cette période pouvant contenir plusieurs dizaines d’individus dont les
restes ont été progressivement déplacés durant l’utilisation de l’espace sépulcral (Tarrête et
Joussaume, 1998 ; Beyneix, 2003 ; Chambon, 2003). Ces « perturbations » affectent notre
compréhension des sites funéraires à différents égards : pratiques funéraires, organisation de la
nécropole, Nombre Minimum d’Individus (NMI)1. Dès lors, afin de comprendre les modalités
de fonctionnement de ces sites et leur évolution, l’anthropologue doit prêter une attention
particulière aux cohérences anatomiques toujours décelables sur le terrain lors de la fouille et
enregistrer scrupuleusement l’ensemble des données observables et impossible à restituer après
prélèvement (espace de décomposition, type d’encaissant naturel, présence de bioturbation,
etc.).

Les liaisons ostéologiques de second ordre sont à cet égard un élément non négligeable pour la
compréhension des assemblages osseux. Contrairement aux associations anatomiques
d’ossements observables sur le terrain (liaisons de premier ordre), les liaisons ostéologiques de
second ordre sont identifiables après la fouille. Elles peuvent être divisées en trois groupes : les
liaisons d’ordre mécanique, d’ordre anatomique et les liaisons selon l’état de maturation ou

1
Le nombre minimal d’individus, d’après la définition de F. Poplin (1976) est le « nombre minimal de sujets
individualisables avec sûreté dans l’échantillon ».

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l’état pathologique (Villena i Mota, 2015). Bien que de nombreuses études les utilisent pour
l’estimation du NMI (Casteel, 1977 ; Poplin, 1981 ; Wild et Nichol, 1983), les liaisons de
second ordre permettent également d’analyser l’usage du site funéraire afin d’évaluer la durée
de son utilisation (à long terme avec de nombreux déplacements d’ossements ou de façon
épisodiques avec un nombre beaucoup plus réduit de déplacement) ou encore d’identifier la
présence de pratiques funéraires spécifiques. Ainsi, ces liaisons ostéologiques permettent de
mieux comprendre les facteurs responsables de déplacements au sein des ensembles funéraires.
Pour citer N. Villena i Mota (2015, p. 6‑7), « la recherche des liaisons ostéologiques jouera un
rôle important lorsqu’elle sera appliquée dans le but de comprendre la répartition spatiale des
vestiges mis au jour dans les sites, leur distribution et leur interrelation. […] Les liaisons
ostéologiques ne sont donc pas un point final d’étude mais un moyen qui permet d’aller plus
loin lors de l’interprétation ».
Actuellement, le développement de nouvelles technologies appliquées à l’archéologie offre de
nouvelles perspectives pour identifier ces liaisons ostéologiques de second ordre par l’usage de
méthodes alliant la modélisation 3D et l’ostéométrie. Dans le cadre de la présente étude, nous
souhaitons étudier les liaisons ostéologiques au sein d’un ensemble funéraire du Néolithique
final situé à Valenciennes (Nord) afin d’évaluer si ces nouvelles approches méthodologiques
peuvent apporter des éléments nouveaux sur la logique de répartition des ossements. À terme,
ces nouvelles informations pourront servir à préciser l’estimation du NMI. Elles devraient
surtout permettre de discuter plus finement la répartition et les déplacements des os au sein du
site et de discuter de la nature des mobilisations osseuses : sommes-nous en présence d’un rituel
secondaire complexe ou face à un phénomène engendré naturellement par les divers facteurs
taphonomiques non anthropique en présence (c’est-à-dire une combinaison de facteurs physico-
chimiques et naturels ayant lieu depuis la mort de l’individu ou son enfouissement) ? Cette
étude pourra par ailleurs poser les bases d’une approche méthodologique nouvelle, portable et
peu couteuse permettant de travailler sur des problématiques d’association d’os.
Dans un premier temps, nous présenterons un panorama des méthodes d’étude des liaisons
ostéologiques de deuxième ordre en soulignant leur développement, leur apport à la
connaissance archéologique mais aussi les limites auxquelles l’anthropologue se heurte lors de
l’interprétation des données obtenues. Dans un second temps, nous décrirons le matériel sur
lequel porte notre étude et les méthodes qui ont été utilisées pour étudier les liaisons
ostéologiques de second ordre. Nous présenterons par la suite les résultats obtenus, puis les
discuterons afin de déterminer s’ils peuvent apporter des éléments de compréhension
concernant la répartition spatiale des vestiges et l’interrelation de ces ossements erratiques.

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1. L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre : des acquis au développement de
nouvelles méthodes.

1.1 Le développement de l’étude des liaisons ostéologiques.

Les premiers travaux anthropologiques consacrés à l’étude des liaisons ostéologiques sont
communément attribués à C.E. Snow, au premier rang desquels sa publication fondatrice The
identification of the unknown war dead (Snow, 1948). C’est en effet à partir de la seconde
moitié du XXe siècle que se développe un intérêt pour l’étude des liaisons ostéologiques de
second ordre. Comme le souligne l’article de C.E. Snow, cet intérêt est notamment présent en
anthropologie forensique lorsque l’armée américaine a mis en place son programme de
rapatriement des corps après la Seconde Guerre mondiale. Cet article effectue une première
tentative de synthèse méthodologique dont l’objectif principal est de retrouver l’identité du
cadavre en se focalisant sur l’identification des os pairs du corps humain par l’étude de la
morphologie, des insertions musculaires, des pathologies dégénératives ou encore par l’étude
des contiguïtés articulaires.
Ce domaine de recherche se distingue par sa capacité à s’appliquer à de nombreux cas de figure,
notamment en archéologie et ceci quelques soit le champ disciplinaire dans lequel l’archéologue
exerce (anthropologie forensique, paléoanthropologie, zooarchéologie, etc.). Ainsi, cette prise
de conscience est incarnée par R.E. Chaplin (1971) qui souligne l’importance de collecter
chaque fragment d’os pour pouvoir être en capacité de fournir des interprétations valables sur
les sites archéologiques.
Les progrès dans l’étude des liaisons ostéologiques de second ordre pour le domaine de
l’archéothanatologie sont ainsi très importants. Grâce aux contributions de H. Duday et de P.
Sellier (Duday et Sellier, 1990 ; Duday, 2005, 1986), il y a une systématisation de l’étude de
l’organisation des dépôts afin de permettre de documenter les observations archéologiques,
facteurs clés de l’interprétation de nombreux sites funéraires (rituel, organisation de la
nécropole, compréhension des schémas de déplacement des corps). Par le biais de ces
publications, une nouvelle méthodologie a permis d’enregistrer dès la fouille des sépultures les
informations relatives aux liaisons de fragments jointifs, par contiguïté articulaire, par stade de
maturation, par appartenance pathologique ou encore par symétrie car elles étaient dès lors
considérées comme « essentielles au dénombrement » et parfois « l’unique clé interprétative du
fonctionnement funéraire qui a présidé à la constitution du gisement » (Duday, 2005 : p. 204).

8
1.2 L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre : pour une meilleure estimation du
nombre minimum d’individus.

Selon F. Poplin (1981 ; p. 1), « Rares sont les cas où les squelettes sont complets, en ordre
anatomique, sans mélange. Le plus souvent, le brassage, la dispersion, les disparitions sont de
règle ». De manière générale, lorsque nous faisons face à un mélange d’ossements issus de
plusieurs individus, une des tâches incombant à l’archéologue est d’estimer le NMI au sein de
celui-ci. Pour cela, des méthodes ont été développées afin de pouvoir estimer le plus
précisément possible ce nombre.
Il est important de noter que ces études se caractérisent par une certaine transdisciplinarité
puisque des domaines comme l’anthropologie et l’archéozoologie sont à l’origine de
nombreuses méthodes d’estimation du NMI par le biais de l’étude des liaisons ostéologiques
de second ordre. Ainsi, dès les années 1980, F. Poplin (1981) s’intéresse au calcul des effectifs
initiaux par le biais de l’étude des ré-appariements osseux sur les collections du Muséum
National d’Histoire Naturelle de Paris. F. Poplin considère qu’à partir de la constitution de
paires au sein d’un assemblage, il est possible d’arriver à une estimation plus précise du NMI
et du nombre initial d’individu. En cherchant à améliorer cette estimation, il souligne
l’importance de procéder à des remontages, des associations par le biais de recollage, de
contiguïté articulaire mais aussi en effectuant des associations basées sur l’observation de la
taille, du degré de développement ontogénique ou encore sur la base de pathologies. Il indique
par ailleurs que pour les sites archéologiques dans lesquels nous sommes confrontés à des
squelettes en connexion et des restes dispersés, il convient d’ajouter aux paires intactes le
résultat du calcul du NMI estimé sur les pièces en désordre. De façon similaire, R.W. Casteel
(1977) applique l’étude des éléments pairs sur des assemblages de faune. Ses travaux font par
ailleurs écho à ceux de R.E. Chaplin (1971) qui proposa une formule d’estimation du NMI pour
les éléments paires en prenant en compte des éléments d’identification tel que l’âge, le sexe ou
encore la taille. Des méthodes plus récentes sont aujourd’hui employées pour l’anthropologie
de terrain qui a dû s’adapter à la récurrence des contextes dans lesquels les restes osseux
humains n’étaient plus en connexion anatomique. Afin de pouvoir estimer le NMI, les
anthropologues ont eu recours à la méthode par « zonation anatomique ». Cette méthode
proposée par C.J. Knüsel et A.K. Outram (2004) et inspirée de l’archéozoologie, consiste à

9
diviser l’os en plusieurs zones anatomiques (fig. 1). Ce sont ces
zones qui sont inventoriées lors de la fouille des sites
archéologiques dans lesquels les ossements sont mélangés,
fragmentés et sans cohérences anatomiques. La définition de ces
zones permet donc une estimation très précise du NMI car ce
décompte empêche de comptabiliser plusieurs fois un même
individu lorsqu’aucun remontage n’est identifié (Knüsel et
Outram, 2004 ; Osterholtz et al., 2014). Ces zonations aident de
même l’anthropologue à identifier les fragments jointifs dans le
cadre de l’étude des liaisons ostéologiques de second ordre.
Actuellement, la synthèse la plus complète sur la fiabilité des
liaisons ostéologiques de second ordre a été rédigée par N.
Figure 1 : illustration de la
Villena i Mota (2015). L’auteur analysa la hiérarchie et la méthode de zonation sur
l’humérus (Knüsel et Outram,
fiabilité des identifications de liaisons ostéologiques de second 2004).
ordre par le biais de paramètres visuels afin d’évaluer quels os
sont les plus susceptibles de faire l’objet d’un ré-appariement ou d’une contiguïté fiable. Dans
ce but, N. Villena i Mota a mis en place une série d’expérimentation sur les sépultures de six
sites funéraires (Cugnaux, Rions, Cartelègue, Tauriac, Saint Vincent de Pertignas et Sainte
Colombe) afin d’identifier la hiérarchie de ces liaisons ainsi que leur validité. Des tests inter-
et intra-observateurs ont été réalisés pour associer des os se rapportant à un même individu dans
des échantillons dont la composition n’était pas communiquée aux différentes personnes
réalisant cette expérimentation. Les volontaires étaient classés en 3 niveaux d’expertise (0, 1 et
2), le dernier niveau correspondant aux personnes dont l’expertise est la plus importante (à
partir d’un Master 2 en anthropologie et plus initié).
Les analyses horizontales (comparaison des deux types de liaisons pour un même niveau) et
verticales (comparaison entre les niveaux pour une même liaison donnée) montrent qu’il existe
une hiérarchie de ces liaisons selon l’articulation étudiée mais également selon le niveau de
l’expérimentateur. En effet, pour un expérimentateur de niveau 2 (nous ne détaillons que ce
dernier niveau car il correspond au notre pour l’étude des liaisons ostéologiques), il apparaît
que les identifications de symétries (fig. 2) sont plus performantes que les contiguïtés
articulaires (81,9 % de réponses justes contre 58,7 % pour les contiguïtés) (fig. 3). De même,
une hiérarchie semble se détacher de ces expérimentations puisque la probabilité d’identifier
une symétrie pour les os du pied ou une contiguïté pour les articulations coxal/sacrum et
talus/calcanéus est plus élevée que pour le reste du corps humain.

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Cette étude a donc permis de souligner l’intérêt de l’étude de ces liaisons ostéologiques tout en
mettant en garde l’anthropologue sur des liaisons trop hasardeuses qu’il convient de ne pas
utiliser pour préciser l’estimation du NMI. Enfin, elle a permis de montrer la validité des
observations visuelles pour certains os et articulations (tab. 1).
Il existe par ailleurs des protocoles se fondant sur l’étude des proportions corporelles des
populations et ayant recours à des mesures pour étudier les liaisons ostéologiques de second
ordre. Peuvent notamment être cités le protocole proposé par J.E. Byrd et B.J. Adams (2003)
qui proposent d’utiliser des formules de régression pour retrouver des couples d’os au sein d’un
échantillon mélangé ou encore celui de R.M. Thomas et collaborateurs (2013) proposant
d’utiliser les études d’asymétrie et l’ostéométrie pour proposer des ré-appariements
statistiquement vérifiables.

1.3 L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre : pour une nouvelle approche des
facteurs constitutifs des sites funéraires.

« Les fragments sont comme des mots et des syllabes détachées dont les remontages portent
l’espoir de restituer la syntaxe, en y ajoutant même le récit de la mise en pièce » (Poplin, 1981 ;
p. 6). En effet, l’estimation du NMI n’est pas la seule question présente à l’esprit de
l’archéologue lors de l’étude des liaisons ostéologiques. Ce dernier doit tenter de comprendre
les phénomènes à l’origine de la formation de l’assemblage qu’il étudie.

1.3.1Les phénomènes anthropiques.

Les facteurs de dispersion d’un assemblage osseux peuvent parfois être d’origine anthropique
mais non volontaires (p. ex. destruction accidentelle de tombes et dispersion d’ossements lors
de recoupements fortuits de sépultures). Pour A.J. Osterholtz et collaborateurs (2014), ce type
d’assemblage peut correspondre à un usage à long terme de la nécropole dont les
inhumations successives entrainent recoupements, mélanges et fragmentations des tombes plus
anciennes.

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Figure 3 : pourcentages des réponses Figure 2 : pourcentages des réponses
justes des liaisons par symétrie justes des liaisons par contiguïté pour le
articulaire pour le niveau 2 (Source : N. niveau 2 (Source : N. Villena i Mota,
Villena i Mota 2015, figure 27) 2015, figure 24)

Tableau 1 : pourcentages et intervalles de confiance (à 95 %) correspondants pour les liaisons


par symétrie et par contiguïté articulaire en fonction des niveaux d’expertise (Source :
N.Villena i Mota 2015, Tableau XXV).

12
C’est par exemple le cas du site Néolithique de Çatal Höyük dont l’interprétation initiale des
dépôts, avant l’étude des dispersions des os et des liaisons ostéologiques, envisageait un rituel
de démembrement post-mortem (Bos et Hager, 2014). Ce cas montre que les phénomènes
taphonomiques (engendrés ou non par l’homme) doivent être analysés dans le cadre de l’étude
des liaisons ostéologiques car ils permettent d’interpréter des cas de pertes de connexions non
conventionnelles pour l’anthropologue.

1.3.2 Les phénomènes naturels : le cas des milieux saturés en eau.

Les facteurs responsables de dispersion des restes peuvent aussi être naturels et nous devons
dans ce cas les caractériser. C’est ce que montre H. Duday (2005) à travers l’exemple d’un
squelette de femme trouvé sur le site de Lattes dans un niveau du VI e siècle, qui a subi une
décomposition dans un milieu saturé en eau. L’eau est donc un facteur taphonomique qui peut
entraîner une décomposition du cadavre dont la compréhension à posteriori est particulièrement
difficile pour l’anthropologue. Dans le cas du squelette de femme découvert à Lattes, de
nombreuses disjonctions paradoxales ont été relevées par H. Duday. Ce dernier indique un
décalage du bloc cranio-facial par rapport au rachis, ainsi qu’un remaniement de l’hémi-thorax
gauche, l’épaule gauche remontant au niveau de la quatrième vertèbre cervicale tandis que la
clavicule, la scapula et la tête de l’humérus étaient toujours en connexion. De plus, un hiatus de
7 cm a été relevé entre les os du carpe et les parties distales de l’avant-bras. D’après H. Duday,
ces disjonctions paradoxales caractérisées par des mouvements des os atypiques par rapport aux
espaces vides ou colmatés indiquent qu’il y avait encore de la cohésion entre certains os mais
que les ligaments étaient en train de céder. Le positionnement inhabituel des os du squelette est
expliqué par la présence de l’eau dont le ressac a entraîné ces déplacements inaccoutumés. Nous
nous intéressons particulièrement à ce facteur car le contexte de milieu saturé en eau est attesté
pour le site archéologique que nous étudions dans le cadre de ce mémoire (Delassus et Deckers,
2009 ; chap. 1). Il nous semble donc pertinent d’en décrire les effets sur le cadavre et les pertes
de cohérence anatomique que l’eau peut engendrer.
Les premières expérimentations pour déterminer l’influence des courants d’eau sur les restes
osseux furent réalisées par N.T. Boaz et A.K. Behrensmeyer (1976). Leur article avait pour
objectif de montrer si les os dans un assemblage de faune avaient été déposés par l’homme ou
avaient été transportés naturellement. Dans ce but, ils procédèrent à la reconstitution d’un lit de
rivière avec un débit artificiel d’eau afin de documenter les déplacements des os. D’après cette
expérience, il semble que les mouvements oscillent entre 0 et 32,9 cm et que l’importance de
13
ces déplacements est corrélée avec la morphologie, la taille, la forme et la fragmentation des
os.
Plus récemment, c’est l’anthropologie forensique qui a
analysé la décomposition des corps dans ce type de
contexte (fig. 4). En étudiant le comportement des corps
flottant, leur position et leurs mouvements, W.D. Haglund
et M.H. Sorg (2002) sont notamment parvenus à
déterminer la séquence chronologique de la décomposition
des tissus mous et de la perte de parties du corps. Le
squelette complet (fig. 4a) perd progressivement ses
cohérences anatomiques au niveau des pieds, des mains et
de la mandibule (fig. 4b). Ces éléments disparaissent
ensuite complètement et ne sont pas retrouvés par
l’anthropologue (fig. 4c). Les pertes de cohérences
anatomiques et des os sont progressives et concernent par la Figure 4 : représentation
suite le crâne, les avant-bras, les tibias et les fibulas (fig. 4d) schématique de la désarticulation et
de l’exposition des os des cadavres
puis le crâne, la mandibule et les bras viennent à disparaître en environnement aqueux (Haglund
et Sorg, 2002)
(fig. 4e). L’étude permet de mieux comprendre la
représentation des squelettes dans de tels contextes.
Dans le but de caractériser les pertes de connexions anatomiques des corps par l’action de ce
même phénomène taphonomique, J.T. Pokines et S.A. Symes (2014) se sont intéressés à la
flottaison de l’os en fonction de sa saturation en eau. Les recherches menées par ces auteurs
montrent que les os les plus larges ont tendance à bouger moins vite que les os plus petits.
Aussi, les os disposant des extrémités les plus volumineuses ont un potentiel de mouvement
plus important. Cependant, il apparait que de nombreux facteurs peuvent altérer le transport des
os : le taxon, la taille de l’os, sa masse, sa densité, sa forme, sa surface projetée ainsi que son
orientation. L’eau est donc un facteur taphonomique pouvant entraîner des pertes de connexions
ostéologiques paradoxales. Par conséquent, il convient de prendre particulièrement en compte
ce facteur taphonomique lors de l’interprétation réalisée dans le cadre de l’étude des liaisons
ostéologiques de second ordre pour le site de Valenciennes.

14
1.4 Les apports des méthodes 3D à l’étude des liaisons ostéologiques de second ordre.

Grâce à la généralisation de l’exploitation de modèles 3D des ossements, les recherches de


liaisons par contiguïtés articulaires peuvent aujourd’hui être facilitées. À titre d’exemple,
l’étude menée par Hammond et collaborateurs (2013) a montré que ces restitutions
tridimensionnelles peuvent être utilisées pour objectiver des liaisons ostéologiques de façon
statistique. Dans cette étude, un ensemble de landmarks a été positionné sur une restitution 3D
de la surface semi-lunaire de l’acétabulum (fig. 5). Cette surface articulaire est alors divisée en
sept régions de taille similaire afin d’estimer de manière fiable le diamètre de la tête fémorale
correspondante.

Figure 5 : sphere-fitting dans un acétabulum complet et division de la surface semi-lunaire de


l’acetabulum en 7 régions de taille similaire par le biais de landmarks afin d’évaluer la
précision du sphere-fitting pour un acétabulum complet.

Cette technique, dite de la « fitting sphere » est d’autant plus intéressante qu’elle est
fonctionnelle et demeure statistiquement fiable avec une conservation de la surface semi-lunaire
qui n’est que de l’ordre de 50 %. En effet, il apparait que la corrélation obtenue entre le modèle
de sphère créé et la tête fémorale est très proche de 1:1. La technique de la « fitting sphere »
semble donc un moyen particulièrement viable pour l’étude de la contiguïté articulaire entre le
fémur et l’os coxal.
De même, l’exploitation de modèles 3D des ossements semble pouvoir s’appliquer à l’étude de
la relation des surfaces articulaires entre deux os comme l’humérus et l’ulna. A.M. Kubicka et
collaborateurs (2015) ont évalué l’influence de la morphologie de la surface articulaire de l’ulna
sur la présence de la perforation olécranienne dans la fosse coronoïde de l’humérus. Pour

15
prouver cette hypothèse, un ensemble de landmarks a été posé sur des modèles 3D sur
l’extrémité distale de l’humérus et sur l’extrémité proximale de l’ulna. Les tests statistiques
exploitant les coordonnées (x ; y) des landmarks ont montré qu’il existe bien une relation entre
la forme de l’extrémité proximale de l’ulna et la forme de la fosse coronoïde de l’humérus. Par
conséquent, il serait réciproquement possible d’identifier statistiquement des contiguïtés
articulaires entre un humérus et une ulna dont la connexion anatomique aurait été perdue.

1.5 Limites de l’étude des liaisons ostéologiques.

Les protocoles utilisés pour étudier les liaisons ostéologiques de second ordre souffrent d’un
certain nombre de limites qui ont été régulièrement discutées par la communauté scientifique
(Vickers et al., 2015). Nous en dressons ici un panorama sommaire.

1.5.1 Limites des protocoles d’étude par paramètres visuels.

Pour décrire les limites de ces protocoles, nous nous fonderons principalement sur les acquis
des expérimentations menées par N. Villena i Mota (2015). L’auteur souligne que toutes les
articulations du squelette n’aboutissent pas au même taux d’association. D’après ses résultats,
ce sont les amphiarthroses2 qui sont les mieux reconnues puis les trochoïdes3 et enfin les
arthrodies4.
La possibilité d’association est également impactée par la conservation des os. Dans le cas de
l’humérus par exemple, les ré-appariements sont plus fiables à partir de l’étude d’une surface
articulaire considérée isolément que lorsque l’on s’intéresse aux diaphyses. La conservation des
os n’est donc pas toujours suffisante au sein des ensembles funéraires pour permettre d’étudier
de façon optimale les liaisons ostéologiques.
De plus, les protocoles ne prennent pas en compte l’asymétrie du corps humain. Les travaux A.
Schaeffer (1944, cité dans Stirland 1993) sur l’asymétrie du squelette ont établi la dominance
en longueur pour l’humérus droit, les os de l’avant-bras droit et le fémur gauche. Par ailleurs,
A.H. Schultz a établi une comparaison de l’asymétrie entre humains et primates démontrant

2
Articulation semi-mobile dans laquelle les surfaces articulaires, planes ou concaves, sont réunies par des
ligaments fibreux ou fibro-cartilagineux. (p. ex. la symphyse pubienne, les syndesmoses, et les synostoses).
3
Articulation dans laquelle un os tourne sur un autre (p. ex. atlanto-odontoïde).
4
Articulation permettant une flexion dans tous les sens et dont les faces sont plus ou moins convexes (p. ex.
articulation scapulo-humérale).

16
que celle-ci est beaucoup plus développée chez l’homme dès le stade fœtal (Schultz 1937, cité
dans Stirland 1993).
En outre, l’étude réalisée par J. Steele et S. Mays (1995) sur un échantillon de squelettes
découverts à Wharram Percy (Angleterre) montre la forte importance de cette asymétrie au
niveau des membres supérieurs. Elle semble être attribuable à l’usage d’un bras dominant
pendant l’enfance, entraînant donc à terme une différence de taille chez l’être humain. Ces
recherches montrent donc bien que les paramètres que nous sommes susceptibles d’utiliser (au
moins dans le cas du membre supérieur) comme la taille ou la robustesse, ne sont pas toujours
les plus pertinents pour la recherche de ces liaisons. Enfin, notons que les pathologies non
bilatérales peuvent aussi entraîner des erreurs dans les associations proposées.

1.5.2 Limites des protocoles métriques.

Bien que des protocoles d’étude des proportions corporelles au sein des populations aient été
développés pour pallier ces biais, ceux-ci souffrent également d’un certain nombre de limites.
L’usage de statistiques et de modèles de régression (Byrd et Adams, 2003) ou d’intervalles
discriminants (Thomas et al., 2013) nous impose de ne prendre en compte que les rejets
catégoriques laissant bien souvent plusieurs choix d’association possibles entre pièces osseuses
issues d’un même assemblage. Ces protocoles sont en outre très dépendants de la conservation
des os puisque la puissance des statistiques (c’est-à-dire la probabilité de rejeter l’hypothèse
nulle d’une association entre deux os) ou des modèles de régression employés dépendent des
mesures qui ont pu être prises sur les os. En effet, bien que J.E. Byrd et B.J. Adams (2003)
aient montré que l’usage de logarithmes d’une somme de mesures était une méthode plus
efficace pour étudier les liaisons ostéologiques, leurs résultats plus performants sont tout aussi
dépendants de la conservation des ossements puisque nous devons avoir l’ensemble des
mesures considérées pour obtenir des régressions optimales. Nous devons par conséquent
modifier ces protocoles en proposant d’utiliser des mesures adaptées à des os fragmentés ce qui
peut entraîner une diminution de la puissance des statistiques. Actuellement, les statisticiens
recherchent des formules mathématiques permettant d’améliorer la puissance des régressions
par le biais d’analyses canoniques de corrélation dont l’objectif est d’améliorer les
combinaisons linéaires des variables étudiées. Ces recherches permettront éventuellement de
proposer de nouveaux systèmes d’analyse des liaisons ostéologiques.

17
2. Matériel et méthode.

2.1 Présentation des collections d’étude.

2.1.1 Le site de la rue J. Bernier (Valenciennes, Nord).

C’est avec l’objectif de contribuer à l’interprétation d’un site archéologique mis au jour rue
Jean Bernier à Valenciennes (Nord) que l’application de divers protocoles d’étude des liaisons
ostéologiques de second ordre a été entreprise dans le cadre de ce mémoire. Cet ensemble
funéraire, daté du Néolithique final, a été découvert en 2006 par les archéologues du service
municipal de la ville de Valenciennes lors d’une opération de diagnostic archéologique.
L’espace funéraire se situe dans une zone de dépression humide où affleure la nappe phréatique.
Y sont attestés des aménagements anthropiques, prenant la forme d’ilots ou de buttes de limon
(fig. 8). Sur ces buttes reposaient des individus en connexion anatomique partielle (fig. 6),
tandis que le reste de la zone sépulcrale recelait des ossements épars et mêlés à un mobilier
détritique (fig. 7) (Delassus et Deckers, 2009 ; p. 74).

Figure 6 : exemple d’individu en connexion Figure 7 : exemple d’ossements erratiques


anatomique partielle (SP 2004) ©Service ©Service archéologique de Valenciennes
archéologique de Valenciennes

Selon l’étude anthropologique réalisée par W. Devriendt, l’ensemble funéraire aurait accueilli
de manière quasi-exclusive des sujets masculins (diagnose sexuelle selon les méthodes de
Feremback 1980 et Bruzek 2002), pour la plupart âgés de 30 à 40 ans, (estimation de l’âge
d’après les méthodes de Todd 1923 et Brooks et Suchey 1990). Le NMI a été estimé dans cette
étude à 18 individus.
Dans le cadre du rapport de fouille (Deckers et al., 2009), ce recrutement spécifique, ainsi que
la disposition des ossements et des squelettes conduisit l’anthropologue à avancer l’hypothèse

18
Figure 8 : Plan général du niveau néolithique, Site Rue J. Bernier, secteur 70. © Service
archéologique de Valenciennes

d’un rituel post-inhumation. La réassociation de deux fémurs pathologiques restés associés à


leurs tibias (SP 2013) laisse supposer des prélèvements anthropiques mais il y a peu
d’observations qui peuvent corroborer cette hypothèse. Ainsi, la question la plus fréquemment
posée concernant le site de la rue Jean Bernier est celle de la présence d’un rituel de prélèvement
d’ossements post-inhumation au sein de la nécropole. En effet, la faible représentation de
certains os (notamment les éléments des mains et des pieds), la perte de connexions
anatomiques et les facteurs entraînant les déplacements d’os longs alors même que des os de
plus petites dimensions furent retrouvés encore en connexion (alors qu’ils devraient être
logiquement plus susceptibles d’être déplacés par des facteurs naturels) amènent l’hypothèse
de prélèvements postérieurs à la décomposition des cadavres. De telles pratiques funéraires
seraient en partie occultées par les crues successives générant des courants et donc d’autres
déplacements d’ossements (Deckers et al., 2009). La nouvelle étude de ce site devra donc

19
prendre en compte l’influence potentielle de l’eau sur la répartition spatiale et la conservation
des vestiges humains.
L’étude menée par W. Devriendt montre la complexité du fonctionnement du site et de son
évolution, et souligne la difficulté de caractériser les gestes funéraires pratiqués dans ce cadre
environnemental si singulier. Par ailleurs, aucune comparaison directe n’a pu être réalisée. La
présence des restes humains en milieu palustre fait de ce site une découverte unique au niveau
national.
Les concentrations d’os déconnectés et les contiguïtés articulaires des squelettes en connexion
partielle, qui apparaissent nettement sur le plan de répartition des vestiges (fig. 9), nous invitent
à approfondir l’étude du lien entre les individus en connexion et les os erratiques. D’après le
rapport final d’opération, l’étude des liaisons de second ordre par les seuls paramètres visuels
est rendue complexe en raison de la destruction partielle des extrémités distales et proximales
d’une partie des os constituant l’échantillon. Il fut donc difficile lors de la précédente étude de
discuter l’hypothèse d’un prélèvement d’os sur le corps pendant la décomposition puis un rejet
à postériori. Dès lors, par une nouvelle approche de l’étude des liaisons ostéologiques, nous
souhaitons fournir de nouvelles informations sur les modalités de répartition spatiale des os
humains et leur interrelation au sein du site.

20
Figure 9 : Plan général de l’occupation Néolithique, site rue J. Bernier, secteur 70. © Service archéologique de Valenciennes (Source : Deckers et al.,
2009)

21
2.1.2 La base de données du Néolithique moyen d’A. Thomas.

Dans un premier temps, afin de pouvoir appliquer nos protocoles métriques pour l’étude des
liaisons ostéologiques de second ordre au site archéologique de Valenciennes, il convenait de
disposer d’un référentiel afin d’estimer la variabilité des proportions corporelles au sein des
populations néolithiques. Nous avons utilisé à cette fin les données acquises par A. Thomas
dans le cadre de sa thèse (Thomas, 2011) et lors de ses études ultérieures. Ce référentiel
regroupe 187 individus issus de huit sites archéologiques du Néolithique moyen du Bassin
parisien, de Normandie et d’Alsace. Seules les données métriques des individus dont le sexe
avait été déterminé ont été utilisées pour nos études métriques (N = 153). Le sexe des individus
de ce référentiel a été déterminé par le biais des méthodes Bruzek (2002) et Murail et
collaborateurs (2005). Afin de pouvoir documenter la variabilité ostéométrique des populations,
19 mesures (tab. 2) ont été utilisées dans les différents protocoles métriques.

2.1.3 La collection de la caserne Taupin.

Dans un second temps, nous souhaitions proposer d’étudier des associations de contiguïté
articulaire de l’articulation scapulo-humérale sur la base de modèles photogrammétriques. Par
conséquent, nous avons au préalable testé ce protocole sur une série d’os issus de sépultures
individuelles non remaniées pour lesquelles les associations d’ossements étaient donc avérés.
Ces squelettes ont été exhumés en 1992 par le service archéologique de la ville de Beauvais sur
le site de la Caserne Taupin (responsable J.-M. Fémolant) (Chevalier, 1993). Il s’agit d’un
cimetière conventuel utilisé du XVe au XVIIe siècle et dans lequel 400 squelettes ont été
découvert. Ces squelettes sont actuellement entreposés à l’ostéothèque de Pessac où furent
réalisés les clichés photographiques nécessaires à la création des modèles 3D.
Afin de construire nos modèles, nous avons ainsi sélectionné 16 articulations scapulo-
humérales d’individus féminins (9 droites et 7 gauches) ainsi que 12 articulations scapulo-
humérales d’individus masculins (5 droites et 7 gauches). Le nombre d’articulations féminines
est plus important en raison du sex-ratio initial du cimetière conventuel.

2.2 Etude des liaisons ostéologiques par paramètre visuel (symétrie et contiguïté).

Dans le cadre de notre étude, deux protocoles ont été employés. Le premier protocole a pour
objectif d’associer les éléments osseux du côté gauche avec leur homologue droit en se basant

22
Tableau 2 : valeurs d’asymétrie M entre l’os gauche et droit sur le référentiel d’A. Thomas pour les groupes « Femme », « Homme » et « Total ».

23
sur des critères généraux de ressemblance morphologique. Considérant les différences d’aspect
de surfaces des ossements attribués avec certitude à un même individu (liaisons ostéologiques
de premier ordre) nous n’avons pas pris en compte les aspects de l’os cortical comme critère
d’association. Le second protocole a pour objectif d’associer des os homolatéraux qui
participent d’un même complexe articulaire en se basant sur des critères de congruence des
surfaces articulaires (Villena i Mota, 2015). Ces deux protocoles ont été appliqués sur la
clavicule, la scapula, l’humérus, le radius, l’ulna, le fémur, le tibia et l’os coxal des individus
découverts sur le site archéologique de Valenciennes.

2.3 Approche ostéométrique.

Au-delà du simple examen visuel, notre étude des liaisons ostéologiques a fait appel à deux
protocoles métriques.

2.3.1 Méthode de R.M. Thomas et collaborateurs (2013).

Le premier est fondé sur l’utilisation de mesures standards permettant d’évaluer statistiquement
la véracité des ré-appariements (Thomas et al., 2013). Il repose sur le calcul d’une valeur
statistique M qui exprime la différence entre les valeurs numériques d’une même variable
mesurée sur des os droit et gauche, rendant ainsi compte du degré d’asymétrie. Cette statistique
se calcule par le biais d’une formule simple: M = |G-D| / ((G+D)/2) où G et D correspondent
respectivement à la mesure de l’os gauche et de l’os droit.
Dans le cadre de notre étude, nous avons utilisé 19 mesures standards (Knußmann et Baitsch,
1992) sélectionnées pour s’adapter à des contextes où les vestiges squelettiques présentent un
certain degré de fragmentation. À partir des données acquises par A. Thomas (2011) sur des
séries du Néolithique moyen (cf. supra), nous avons calculé les valeurs M pour ces différentes
mesures afin de construire un référentiel sur l’asymétrie squelettique dans les populations du
Néolithique du nord de la France. Nous souhaitons souligner que pour cette étude, nous avons
choisi d’utiliser un référentiel sub-contemporain de l’échantillon populationnel que nous
étudions. Par conséquent, les données obtenues sur l’asymétrie des os longs sont à priori plus
transposables au contexte étudié que si nous avions utilisé une population issue d’une base de
données forensique, comme ont pu le faire d’autres anthropologues (Thomas et al., 2013). En
raison des faibles effectifs d’hommes pour lesquels des mesures étaient disponibles, nous avons
choisi de comparer les résultats obtenus pour le site de Valenciennes avec le 95 e centile du
groupe de référence dans son ensemble (cf. supra, tab. 2). Dans le cadre de l’application du
24
protocole à l’étude du site de la rue J. Bernier, l’hypothèse d’association d’un os droit et d’un
os gauche a été rejetée si la valeur M de ce couple excédait le 95e centile du référentiel.

2.3.2 Méthode d’analyse canonique des corrélations.

L’analyse canonique des corrélations (ACC) est une forme d’analyse linéaire qui implique la
projection de deux séries de variables (X1 à Xp et Y1 à Yp). À partir de ces variables, la
méthode construit une variable α et une variable β qui sont une combinaison linéaire
s’exprimant sous la forme α =a1X1+…+apXp et β =b1Y1+…+bpYp où « a » et « b »
représentent le coefficient de projection dans la variable canonique. Les coefficients « a1 » à
« ap » et « b1 » à « bp » sont choisis de telle sorte que la corrélation entre les deux variables α
et β soit maximale. Pour obtenir ces corrélations, nous avons utilisé un fichier d’apprentissage
dont les associations d’ossements sont connues, à savoir la base de données du Néolithique
moyen d’A. Thomas (2011). Les formules de régressions ont été créées à l’aide du logiciel R.
Afin d’augmenter l’échantillon à partir duquel sont créés les modèles de régression, nous avons
envisagé le regroupement des données métriques de la base de données pour les valeurs des os
droits et des os gauches.
Ainsi, si la valeur gauche est manquante, il est possible de la remplacer par la valeur droite.
Cependant, il convient au préalable de vérifier si les modèles ne seront pas faussés en s’assurant
de l’interchangeabilité des données grâce à un test de concordance de Lin. Ce test a été réalisé
à l’aide du logiciel de statistique R (package epiR). Les données obtenues par ces tests sont
résumées dans le tableau 3. Dix mesures ont un coefficient de concordance inférieur à 90 % et
n’ont donc pas fait l’objet de fusion des valeurs pour la construction des modèles de régression.
Seules les mesures des os gauches ont alors été utilisées. Pour les autres variables, le coefficient
étant supérieur à 90 %, nous avons choisi de fusionner les valeurs. Les tests de concordance
effectués, nous pouvons procéder à la construction des modèles de régression par le biais de la
méthode d’analyse canonique des corrélations.

25
Tableau 3 : coefficient de concordance de Lin permettant de vérifier l’interchangeabilité des données
des os droits et des os gauches.

Dans l’exemple suivant, les variables utilisées pour l’humérus sont les mesures M4, M5 et M6
(Knußmann, 1988) tandis que pour le radius, ce sont les mesures M4 et M5 qui ont été choisi.
Le résultat suivant a été obtenu :
- Intercept : -0,76732
- Humerus$logG : 0,86863
- p-value : 1,354e-11
- R-squared : 0,7471 (de façon concrète, les variations métriques du radius sont expliquées à
74,7 % par celles de l’humérus)
 Formule finale : [radius] = 0,86863 x [humérus] – 0,76732

26
Les régressions permettent de valider ou d’infirmer l’hypothèse 0 (H 0) qui correspond à la
possibilité d’association d’un couple d’os. Grâce à la fonction de visualisation graphique de R,
il est possible d’identifier les couples d’os ne validant pas H0. Le logiciel fait ainsi apparaître
les valeurs du fichier d’apprentissage et les bandes d’intervalle de confiance à 95 % (fig. 10).
Si les associations testées par les ACC sont en dehors de ces bandes de confiance, l’association
est rejetée.

Figure 10 : biplot des variables canoniques du fichier d’apprentissage et affichage des


bandes d’intervalle de confiance (à 95 %) pour la régression humérus-radius.

2.4 Etude de la congruence articulaire scapulo-humérale par le biais de modèles 3D.

Diverses études récentes ont proposé de recourir aux méthodes 3D pour l’étude des liaisons
ostéologiques (Hammond et al., 2013) ou pour l’étude de l’influence du développement des
surfaces articulaires sur les os homolatéraux (Kubicka et al., 2015). Cette approche nous est
apparue pertinente pour tenter d’objectiver les congruences entre les surfaces articulaires. Dans
le cadre de ce mémoire, nous avons eu recours à la photogrammétrie, une méthode permettant
de reconstruire un objet en 3D à partir d’un support photographique (Fau et al., 2016). Nous
avons choisi de nous limiter à un seul complexe articulaire. Ce choix s’est porté sur
l’articulation scapulo-humérale en raison de la difficulté d’association visuelle de ces deux os
(Blau et Ubelaker, 2009 ; p.178).

27
2.4.1 Acquisition photographique.

Les clichés photographiques ont été réalisés à l’aide d’un Canon EOS 1100D avec une
résolution de 12 mégapixels. Les réglages suivants ont été employés : Iso à 100 ; diaphragme à
f/ 4.5 ; focale à 18 mm ; absence de flash. Les photos ont été
enregistrées en JPEG de haute qualité.
Concernant l’extrémité proximale de l’humérus, nous avons
effectué entre 35 et 40 clichés selon deux orientations différentes
(fig. 11) (une vingtaine de clichés ont été pris de face, une vingtaine
d’autres selon une inclinaison de 45°). Une ou deux photos
supplémentaires en vue supérieure ont parfois été réalisées,
permettant d’obtenir un nombre relativement important de photos
en comparaison de la surface à restituer (Discamps et al., 2016 ; Figure 11 : illustration de la prise
Evin et al., 2016). de photographies de l’humérus (de
face et avec une inclinaison à 45°)
Ces mêmes procédés ont été suivis pour la surface
articulaire de la scapula et 35 à 40 clichés
photographiques ont été réalisés sur cet os en prenant
soin de réaliser plusieurs clichés lorsque l’acromion et
le processus coracoïde étaient conservés (fig. 12). Une
mire en papier à petits carreaux a été apposée sur les
os lors de l’acquisition photographique afin de pouvoir
réaliser à posteriori la mise à l’échelle des clichés Figure 12 : illustration de la prise de
photographies de la scapula (de face et avec une
photographiques. inclinaisons à 45°)

2.4.2 Restitution 3D et pose des landmarks.

Chacune des photographies numériques a fait l’objet d’une correction d’objectif à l’aide du
logiciel Adobe Photoshop. Cette procédure a été employée pour éviter une déformation de l’os
photographié qui aurait pu fausser les résultats des tests de concordance de surface entre la
scapula et l’humérus.
Dans un second temps, les restitutions 3D ont été réalisées à l’aide du logiciel de
photogrammétrie Agisoft PhotoScan. Afin de créer ces restitutions, nous avons tout d’abord
procédé à l’alignement des photographies (fig. 13.1 et fig. 14.1). Nous avons ensuite effectué
la mise à l’échelle des photos (fig. 13.2 et fig. 14.2). Cette mise à l’échelle a été réalisée sur 6

28
photos du chunk (3 en vue de face et 3 en vue supérieure). Enfin, nous avons pu créer le nuage
de point (dense point cloud) (fig. 13.3 et fig. 14.3) à partir duquel le modèle 3D (Mesh) a été
généré (fig. 13.4 et fig. 14.4).

Figure 14 : illustration des différentes étapes de restitution des modèles 3D de l’humérus : 1. alignement des
photographies ; 2. création du nuage de points épars ; 3. création du nuage dense de points ; 4. et 5.
création du modèle 3D (avec et sans texture).

Figure 13 : illustration des différentes étapes de restitution des modèles 3D de la scapula : 1. alignement des
photographies ; 2. création du nuage de points épars ; 3. création du nuage dense de points ; 4. et 5. création du
modèle 3D (avec et sans texture).

29
Le logiciel TIVMI a permis la pose de landmarks sur la surface articulaire des os étudiés dans
le cadre du protocole de photogrammétrie. La mise en place des landmarks sur nos modèles 3D
a suivi le même procédé pour les humérus et les scapulas. La surface articulaire de chaque os a
été délimitée par un chemin de 26 landmarks (fig. 15.2 et fig. 16.2). C’est ce chemin de
landmarks qui a permis la définition d’un plan moyen servant de base à l’implantation de 4
plans se recoupant au milieu de la surface articulaire (fig. 15.3 et fig. 16.3). C’est sur
l’intersection entre les axes 1 à 4 et la surface articulaire de l’os que les landmarks ont été posés
de façon automatique (fig. 15.4 et fig. 16.4). Le nombre de ces landmarks est variable mais
n’influence pas nos résultats puisque nous cherchons seulement à exploiter le rayon de courbure
de chacun des chemins créés. Comme nous pouvons le voir sur TIVMI, ce rayon de courbure
peut s’illustrer par la simulation d’une sphère en corrélation avec la surface articulaire et dont
l’exploitation statistique permet de travailler sur les liaisons ostéologiques de second ordre pour
l’articulation scapulo-humérale (fig. 15.5 et fig. 16.5).

Figure 15 : illustration des différentes étapes de traitement des modèles 3D des humérus pour la pose
des landmarks sur TIVMI : 1. chargement du modèle 3D ; 2. pose des 26 landmarks pour créer le plan
moyen ; 3. création des plans orthogonaux ; 4. création des 4 chemins de landmarks ; 5. simulation de
la sphère d’après les rayons de courbure.

30
Figure 16 : illustration des différentes étapes de traitement des modèles 3D des scapulas pour la pose
des landmarks sur TIVMI : 1. chargement du modèle 3D ; 2. pose des 26 landmarks pour créer le plan
moyen ; 3. création des plans orthogonaux ; 4. création des 4 chemins de landmarks ; 5 et 6.
simulation de la sphère d’après les rayons de courbure.

Le même protocole par CCA que celui utilisé pour les régressions a été utilisé afin de déterminer
les associations probables et les associations rejetées.

31
3.Résultats.

3.1 Etude des liaisons ostéologiques par paramètre visuel.

3.1.1 Symétrie.

Les résultats de l’étude des liaisons ostéologiques par symétrie sont synthétisés dans le tableau
suivant (tab. 4), qui rapporte les effectifs de chaque os, des liaisons identifiées sur le terrain et
lors de notre étude, ainsi que les os ayant fait l’objet d’une exclusion avérée (annexe 1).
Nombre d'os sans symétrique
Os Effectif Nombre de paires identifiées possible
D G Liaisons de 1er ordre Liaisons de 2e ordre D G
Clavicule 13 11 4 2 6 4
Scapula 9 11 1 2 2 0
Humérus 17 16 4 8 4 3
Radius 11 11 4 2 5 5
Ulna 15 11 4 5 6 2
Coxal 18 13 3 6 7 2
Fémur 15 16 3 7 5 6
Tibia 11 14 2 3 0 0

Tableau 4 : étude des liaisons ostéologiques par symétrie : synthèse des liaisons de 1eret de 2nd
ordre au sein du site archéologique de Valenciennes (Rue Bernier).

Parmi les 24 clavicules, les liaisons de premier ordre et de second ordre permettent de
comptabiliser 6 paires. Six clavicules droites et 4 gauches font l’objet d’une exclusion (les os
appartiennent avec certitude à des individus distincts).
Parmi les 20 scapulas, les liaisons de premier et de second ordre permettent de recenser 3 paires.
L’étude de ces os ne nous a pas permis d’aboutir à plus d’associations mais nous sommes
parvenus à identifier 2 scapulas droites ne pouvant trouver d’équivalents gauches. Malgré la
bonne conservation des cavités glénoïdes et des acromions, nous n’avons pas pu augmenter ce
nombre d’exclusion (les associations étaient trop souvent envisageables).
Pour les 33 humérus, ce sont 12 paires qui sont recensées grâce aux différentes liaisons
ostéologiques. Seuls 3 humérus gauches et 4 droits font l’objet d’une exclusion sur la base de
nos observations lors de l’analyse de la symétrie. Pour les spécimens hum_2089_A20_G et
hum_2182_D, dont la conformation nous semblait déjà suffisamment similaire pour envisager
leur association, cette dernière a été facilitée par la présence sur les deux os d’un même caractère
discret (perforation olécranienne).

32
A partir des 22 radius inventoriés, les liaisons de premier et de second ordre ont permis
d’identifier la présence de 6 paires et nous avons exclu 5 radius gauches et 5 droits d’un éventuel
ré-appariement.
Les ulnas sont particulièrement bien conservées et nous avons presque exclusivement des os
entiers. Au total, les liaisons de premier et de second ordre permettent de comptabiliser 9 paires.
Notre étude a exclu de tout appariement 6 ulnas droites et 2 ulnas gauches.
Pour les os coxaux, les liaisons de premier et de second ordre permettent de comptabiliser la
présence de 9 paires. En raison de problème de conservation, nous n’avons pu exclure que 5
coxaux droits.
Trente et un fémurs ont été découverts incluant 3 paires attestées par les observations effectuées
lors de la fouille. Sept paires ont été déterminées par nos observations et nous sommes parvenus
à l’exclusion de 5 fémurs droits et 6 fémurs gauches. La symétrie pour les fémurs fem_2305_D
et fem_2305_G n’est cependant pas du tout évidente et n’aurait pas été identifiée s’il ne
s’agissait pas d’une liaison de premier ordre. Il sera donc intéressant de voir si les méthodes
d’ostéométrie permettent de les associer (cf. infra)
Sur les 25 tibias inventoriés, 2 paires ont été déterminées grâce aux données de la fouille et
nous avons identifié 3 paires probables. La mauvaise conservation des extrémités proximales
et distales nous empêche d’obtenir de meilleurs résultats. Plus d’association ne peuvent être
effectuée et nous ne sommes pas parvenus à indiquer des exclusions pour ces os.
Afin de permettre une meileure visualisation du NMI pour chaque os étudié, nous avons
synthétisé nos résultats en un graphique permettant d’identifier facilement les associations
possibles de paires et les exclusions définitives (fig. 17). Nous avons encadré en gras sur ce
graphique les liaisons de premier ordre ainsi que les liaisons de second ordre proposées lors de
l’étude par paramètre visuel afin de les différencier des effectifs d’os pour lesquels on ne peut
pas exclure des associations. Le NMI déterminé par l’étude de la symétrie des os par le biais
de paramètres visuels est supérieur aux estimations proposées dans le rapport de fouille. En
effet, nous obtenons un NMI de 21 individus si nous considérons les fémurs (ce nombre semble
être cohérent par rapport au NMI des humérus s’élevant à 20 individus).

33
Figure 17 : estimation du NMI par l’étude des liaisons ostéologiques par paramètres visuels
(symétrie). Les liaisons de premierr et de second ordre sont encadrées.

34
3.1.2 Contiguïté.

Les résultats de l’étude des liaisons ostéologiques par contiguïté articulaire sont synthétisés
dans le tableau suivant (tab. 5), où sont rapportés les effectifs par os étudiables, les liaisons
identifiées sur le terrain et lors de notre étude ainsi que les os ayant fait l’objet d’une exclusion
avérée (annexe 2).

Nombre de contiguïtés Nombre d'os sans contiguïté


Os (X/Y) Effectif identifiées possible
Os Os Liaisons de 1er Liaisons de 2e
X Y ordre ordre Os X Os Y
Humérus /
scapula
D 17 9 5 1 0 0
G 16 11 1 4 0 0
Humérus /
ulna
D 17 15 4 2 11 7
G 16 11 4 2 0 0
Humérus /
radius
D 17 11 4 1 0 0
G 16 11 3 0 0 0
Radius / ulna
D 11 15 7 3 1 5
G 11 11 8 2 1 1
Fémur / tibia
D 15 11 5 0 0 0
G 16 14 4 0 0 0
Fémur / coxal
D 15 18 2 3 0 0
G 16 13 2 7 4 1
Tableau 5 : étude des liaisons ostéologiques par contiguïté : synthèse des liaisons de 1eret de 2nd
ordre au sein du site archéologique de Valenciennes (Rue Bernier).

L’étude de la contiguïté articulaire de l’articulation scapulo-humérale a donné les résultats


suivants : pour le côté droit, les liaisons de premier et de second ordre permettent de
comptabiliser 6 couples ; pour le côté gauche, nous comptons 5 couples. La difficulté
d’association de ces deux os par contiguïté ne nous a pas permis de proposer d’exclusion. Nos
associations pour cette articulation se sont principalement basées sur l’observation de
pathologies dégénératives en cours de formation ainsi sur les tailles relatives des têtes
humérales par rapport à la cavité glénoïde.

35
Pour l’articulation humero-ulnaire, les liaisons de premier et de second ordre indiquent la
présence de 6 couples pour le côté gauche et 6 couples pour le côté droit. Le côté droit a fait
l’objet de 11 exclusions d’humérus et de 9 exclusions d’ulnas qui ne semblaient pouvoir
entretenir de congruences articulaires recevables avec aucun autre des spécimens osseux du
site. Aucune exclusion n’est à proposer pour le côté gauche en raison de la mauvaise
conservation de 5 extrémités distales d’humérus que nous devons dès lors classé dans le groupe
des liaisons possibles. Nous émettons par ailleurs un doute pour l’humérus hum_2240_D dont
la conformation semble compatible avec les ulnas uln_2213_D, uln_1125_D et uln_2181_D.
Pour l’articulation huméro-radiale, les liaisons de premier et de second ordre indiquent la
présence de 5 couples pour le côté droit et 3 pour le côté gauche. La congruence articulaire de
ces deux os étant particulièrement faible, nous ne sommes pas parvenus à proposer des
exclusions.
Pour l’articulation ulna-radius, au total pour le côté droit et gauche, 10 couples sont identifiés
pour chaque côté. Nous avons pu proposer 6 exclusions pour le côté droit et 2 exclusions pour
le côté gauche. A nouveau, la congruence articulaire de ces deux articulations étant assez faible,
nous ne sommes pas parvenus à proposer plus exclusions.
L’étude de la contiguïté articulaire entre les coxaux et le fémur a permis de déterminer la
présence de 5 couples pour le côté droit et 9 pour le côté gauche. Seulement 3 fémurs gauches
ont fait l’objet d’une exclusion.
Parmi les 31 fémurs et 25 tibias présents, les liaisons de premier et de second ordre permettent
de comptabiliser 6 couples pour le côté droit et 9 pour le côté gauche. Nous n’avons pu proposer
que 3 exclusions de fémur pour le côté gauche. De nombreux tibias ne pouvant se prêter à notre
étude en raison de la mauvaise conservation de leur surface articulaire, ils ont été classés dans
les contiguïtés probables.
Afin de permettre une meilleure visualisation du NMI pour chaque ensemble articulaire étudié,
nous avons synthétisé nos résultats en un graphique permettant d’identifier facilement les
associations possibles de couples et les exclusions définitives (fig. 18). L’étude par contiguïté
articulaire permet de revoir le NMI à la hausse puisque nous estimons un minimum de 24
individus à partir de la liaison huméro-ulnaire droite.

36
Figure 18 : estimation du NMI par l’étude des liaisons ostéologiques par paramètres visuels (contiguïté articulaire). Les liaisons de premierr et de second
ordre sont encadrées.

37
3.2 Résultats du protocole Thomas et collaborateurs (2013).

Pour ce protocole, nous avons focalisé nos calculs sur les os isolés et avons donc d’emblée
écarté les paires déjà identifiées lors de la fouille (liaison de premier ordre). Dans ces tableaux
de synthèse, H0 est rejetée dès lors qu’une des mesures rejette l’appariement. Sur les 16
clavicules isolées, 4 ne sont pas étudiables en raison de l’absence de mesures. Aucun ré-
appariements n’est possible pour cla_1007_D, mais nous ne pouvons pas vérifier sa
correspondance éventuelle avec cla_2161_G. Ceci nous impose de la considérer comme une
liaison probable lors de l’estimation du NMI. Ce même problème est présent pour cla_1204_G,
cla_2000_G et cla_2231_G qui n’ont qu’un seul ré-appariement possible. Cependant, les
clavicules gauches qui peuvent leur correspondre ont, elles, plusieurs correspondances
possibles. Il n’y a donc pas d’exclusions certaines (tab. 6).

Tableau 6 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de la clavicule (méthode métrique


Thomas et al. 2013).

Parmi les 18 scapulas isolées (tab. 7), 4 n’ont pas pu faire l’objet de vérification en raison de
l’absence de mesures. Aucun ré-appariement n’est possible pour sca_1029_G. Un seul ré-
appariement est possible pour sca_1009_D et sca_2174_G mais ces os n’ont pas pu être
confrontés à tous les autres os isolés en raison de l’absence de mesures. Enfin, l’association de
sca_2273_G et sca_1080_D ne peut faire l’objet d’une exclusion puisque l’os droit se
caractérise par plusieurs associations possibles avec d’autres os gauches.

Tableau 7 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de la scapula (méthode métrique


Thomas et al. 2013).

38
Un seul humérus n’est pas utilisable pour ce protocole (hum_2030_G). Dans l’échantillon des
25 humérus isolés, hum_2059_G est exclu de toute association avec un humérus droit. Le
couple hum_2141_D et hum_2289_G ne peut faire l’objet d’une exclusion puisque ces derniers
n’ont pas été confronté à tous les os. Pour les autres associations analysées, il y a toujours
plusieurs associations possibles ou des os ne pouvant pas être confrontés entre eux. Dès lors, le
nombre d’exclusion reste au nombre de 1 (tab. 8).

Tableau 8 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de l’humérus (méthode métrique Thomas et
al. 2013).

Pour les 14 radius isolés, 3 os ne sont pas utilisables en raison de l’absence de mesures. Le seul
assemblage pour lequel toutes les autres possibilités sont rejetées concerne l’ensemble
rad_2245_D et rad_2002_G. Cependant l’os droit n’a pas été confronté à tous les os et
rad_2002_G présente d’autres concordances envisageables avec des os droits. Il n’y a donc pas
d’exclusion possible (tab. 9).

Tableau 9 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement du radius (méthode métrique


Thomas et al. 2013).

Sur 18 ulnas, seul uln_2000_D n’a pu faire l’objet de mesures. Deux paires sont identifiables
en raison du rejet des autres probabilités de ré-appariement. Un seul ré-appariement est possible
pour uln_2181_D (avec uln_2089_Z20_G) et pour uln_2234_D (avec uln_2071_G) mais les os
gauches sont possiblement ré-associables avec d’autres os droits. Nous ne pouvons donc pas
faire d’exclusion (tab. 10).

39
Tableau 10 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de l’ulna (méthode métrique
Thomas et al. 2013).

Sur 25 fémurs, 2 gauches n’ont pu faire l’objet de mesures et 3 fémurs droits font l’objet d’une
exclusion (2017, 2036 et 2249). Le fémur fem_1006_G n’a pas de ré-appariement possible mais
il n’a pas pu être confronté à tous les fémurs droits mis au jour sur le site (tab. 11).

Tableau 11 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de l’ulna (méthode métrique


Thomas et al. 2013).

Sur 21 tibias isolés, 3 ne sont pas étudiables en raison de l’absence de mesures requises par
notre protocole. Aucun ré-appariement n’est indiqué pour 6 tibias mais ils n’ont pas pu être
confrontés à tous les os. Le même problème est présent pour deux tibias gauches (dont les droits
associés peuvent former des paires avec d’autres os gauches). Dès lors, aucune exclusion n’est
possible (tab. 12).

Tableau 12 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement du fémur (méthode métrique


Thomas et al. 2013).

Tableau 13 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement du tibia (méthode métrique Thomas
et al. 2013).

40
Pour la clavicule, la scapula, le radius, l’ulna et le tibia, aucune exclusion ne permet
d’augmenter l’estimation du NMI. Ce dernier correspond donc à l’élément droit ou gauche le
plus nombreux. Seuls les humérus et les fémurs ont pu faire l’objet d’une exclusion grâce au
protocole métrique. Le NMI est donc revu à la hausse selon l’estimation réalisée pour le fémur
(NMI = 19). Néanmoins, il convient de remarquer qu’il est assez proche de celui qui avait été
estimé par l’anthropologue W. Devriendt tandis qu’il s’éloigne de celui que nous avons estimé
par notre étude par paramètres visuels.
La qualité des résultats obtenus par cette approche métrique est dépendante de sa fiabilité hors
de l’échantillon de référence. Afin de tester son efficacité, nous avons appliqué le protocole au
sous-échantillon d’os du site de Valenciennes entretenant des liaisons de premier ordre. Nous
avons constaté, pour certains os, la présence de faux négatifs (rejets d’appariements attestés par
des observations de terrain). Il n’y a pas d’erreur pour les liaisons de premier ordre de la scapula,
de l’ulna et du radius (une n’a pu être vérifiée pour ce dernier os). Pour la clavicule, sur 4
liaisons de premier ordre (une n’a pu faire l’objet d’un calcul), la méthode entraîne 1 erreur.
Pour l’humérus (4 liaisons de premier ordre), le fémur (3 liaisons) et le tibia (2 liaisons), la
méthode entraîne 1 faux négatif.

3.3 Résultats du protocole d’Analyse Canonique de Corrélation.

Dans ce protocole, l’identification d’exclusions se fonde sur l’utilisation de formules de


régression. Nous n’avons retenu que celles dont le R² est supérieur à 60 %. Dix formules de
régression répondent à cette exigence et sont donc jugée exploitables pour étudier les
associations / exclusions d’os au sein du site archéologique de Valenciennes (tab. 13). Nous
avons pu constater que les régressions obtenues par le biais des analyses canoniques de
corrélation se caractérisent par un « R² » plus important que celles obtenues par le biais de
certaines méthodes proposées dans la littérature scientifique (Byrd et Adams, 2003). Pour
effectuer nos analyses, nous devons séparer les os droits et les os gauches du site que nous
étudions afin que l’analyse canonique de corrélation ne tente pas de réassocier des os droits
avec des os gauches. Le fichier d’apprentissage (dont nous avons augmenté le nombre
d’individu par la fusion des mesures des os droits et des os gauches lorsque le test de Lin
l’autorisait), permet au logiciel R d’apprendre les variations de mesures pouvant exister entre
deux os associés.

41
Tableau 14 : valeurs des modèles de régression statistique pour le protocole d’analyse canonique de
corrélation. Les régressions surlignées sont celles utilisées pour ce protocole (R² > 60 %)

Les résultats de l’analyse canonique de corrélation sont ainsi résumés de deux manières : par
les « biplots » respectifs des os droits et des os gauches (fig. 19 ; fig. 20) de la formule de
régression au sein de l’échantillon d’apprentissage et un tableau synthétique des associations
possibles et rejetées que nous avons créé pour une meilleure visualisation des résultats. Pour ce
protocole, il apparaît que nous ne parvenons pas à obtenir suffisamment d’exclusion pour
parvenir à une ré-évaluation du NMI. De plus, nos résultats révèlent un certain taux d’erreur
qu’il convient de souligner. Par exemple, dans le cas de la régression humérus – ulna, ce
protocole rejette l’association entre hum_2158_G et uln_2158_G alors qu’il s’agit d’une
association enregistrée lors de la fouille pour un squelette encore en connexion anatomique. Le
nombre d’exclusions erronées dans les résultats obtenus a été résumé dans le tableau suivant
(tab. 14).

42
Figure 20 : biplot des variables canoniques du site Figure 19 : biplot des variables canoniques du
archéologique de Valenciennes pour la régression site archéologique de Valenciennes pour la
scapula droite – humérus droit. régression scapula gauche – humérus gauche.

Tableau 15 : Nombre de liaisons de 1er ordre et nombre de faux négatifs enregistrés par la
méthode d’étude par ACC.

Le faible nombre d’exclusion ne permet pas non plus de proposer des liaisons de second ordre
par le biais de cette approche. Comme le montrent les tableaux 15 et 16, les associations
possibles sont trop nombreuses pour pouvoir distinguer une association spécifique
contrairement à ce que nous avions pu obtenir pour quelques os avec le protocole de Thomas
et collaborateurs (2013). La méthode des analyses canoniques de corrélations est donc une
méthode peu discriminante.

43
Tableau 16 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique huméro-ulnaire gauche.

Tableau 17 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique fémur-tibia gauche.

44
3.4 Résultats du protocole de photogrammétrie.

L’étude des modèles 3D obtenus par le biais de la photogrammétrie a été réalisée grâce à la
méthode d’analyse canonique de corrélation dont le principe a été appliqué pour les quatre
rayons de courbure de la tête humérale et de la cavité glénoïde de la scapula. Nous avons créé
notre fichier d’apprentissage à partir des os modélisés du site de la caserne Taupin (Beauvais)
et les rayons de courbure déterminés grâce au logiciel TIVMI ont permis d’étudier les
associations possibles entre les humérus et les scapulas du site archéologique de Valenciennes
(fig. 21 ; fig. 22).

Figure 22 : biplot des variables canoniques Figure 21 : biplot des variables canoniques des
des rayons de courbure des scapulas et des rayons de courbure des scapulas et des
humérus droits (Valenciennes). humérus gauches (Valenciennes).

L’analyse canonique de corrélation a permis d’obtenir la formule de régression suivante :


- P-value : 4,344e-7
- R² = 63,25
- Intercept = -2,5113
- Xcoor = 0,8041
- Nombre d’individus = 27

Le R² est suffisamment élevé pour que nous considérions cette régression comme utilisable
dans notre étude.

45
De nouveau, le protocole d’analyse canonique de corrélation ne permet pas d’obtenir
suffisamment d’exclusion pour permettre de réassocier avec certitude les articulations scapulo-
humérale. De plus, nous pouvons constater que cette méthode peut créer des faux négatifs
puisqu’elle rejette des associations d’ossements retrouvés en connexion anatomique lors de la
fouille (p. ex. hum_2141_D et sca_2141_D). Nous pouvons donc conclure que l’étude
statistique des rayons de courbure ne permet pas d’effectuer des réassociations articulaires
suffisamment fiables dans le cadre de l’étude des liaisons ostéologiques de second ordre, à tout
le moins pour l’articulation scapulo-humérale (tab. 17 ; tab. 18).

Tableau 18 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique scapulo-humérale droite.

Tableau 19 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique scapulo-humérale gauche.

46
4. Discussion.

4.1 Apports et limites des protocoles méthodologiques employés.

4.1.1 Analyse par paramètres visuels.

L’estimation du NMI n’a pu être réévaluée que par le protocole d’étude de liaisons
ostéologiques de second ordre par paramètre visuel. Ce protocole d’étude des symétries et des
contiguïtés articulaires a permis d’estimer un NMI compris entre 21 individus (si nous
considérons l’étude de la symétrie des fémurs) et 24 individus (si nous considérons la liaison
huméro-ulnaire droite).
Ce protocole d’étude des liaisons ostéologiques de second ordre a pour avantage d’être simple
à mettre en place et le traitement des données pour le site de Valenciennes a pu être rapide. Il
s’agit d’un protocole qui ne demande pas de matériel particulier et qui peut donc être utilisé
pour tous les sites pour lesquels nous nous intéressons au NMI.
Cependant, pour ce protocole appliqué aux os longs, nous ne pouvons déterminer clairement la
fiabilité des liaisons de second ordre proposées. En effet, nous savons que les résultats obtenus
sur la base de paramètres visuels ne sont réellement satisfaisants que pour des articulations dont
la mobilité est réduite (cf. supra, fig. 2 ; fig. 3). De plus, N. Villena i Mota (2015) a mis en
évidence des différences non négligeables de résultats en fonction du niveau de
l’expérimentateur (cf. supra, tab. 1). Par conséquent, quelle confiance pouvons-nous accorder
aux résultats que nous présentons dans le cadre de ce protocole ?
Deux autres facteurs empêchent également de proposer une estimation optimale du NMI par
l’usage de ces paramètres visuels : d’une part la conservation des ossements, d’autre part
l’asymétrie du squelette humain. Concernant le premier aspect, nous avons dû faire face pour
chaque os à une conservation différentielle nous menant à tenter d’objectiver des symétries
entre des extrémités proximales et des extrémités distales (chose matériellement impossible).
Nous ne comparons donc pas toujours la même partie de l’os et incluons dès lors ces éléments
dans le champ des liaisons possibles (ce qui peut donc fausser notre estimation du nombre réel
d’individus représentés).
L’asymétrie du squelette humain peut également constituer une source d’erreur. Comme nous
l’avons signalé dans la première partie de ce mémoire, cette asymétrie est susceptible d’être
forte. Par conséquent, en nous basant sur des critères de taille ou de robustesse des os, il est
possible que nous rejetions certaines associations ostéologiques pourtant valides. Ainsi, pour le

47
site de Valenciennes, nous avons
notamment identifié le cas d’un fémur
gauche et d’un fémur droit appartenant à
un même squelette en connexion
anatomique et dont l’étude de la symétrie
ne nous aurait pas incité à les associer s’ils
avaient été découverts avec les ossements
erratiques (différence de longueur
maximale de 3cm, angle colo-diaphysaire Figure 23 : Fémurs droit et gauche de SP 2305 ©
plus fermé pour le fémur droit et longueur MARTIN Ezéchiel
du col plus réduite) (fig. 23).
Sans rejeter les résultats obtenus par le biais de ce protocole, nous tenons à signaler que les
associations de second ordre proposées souffrent d’une certaine part de subjectivité. Par
corollaire, les résultats ne sont donc pas vérifiables mathématiquement. Il serait possible de
diminuer cette part de subjectivité, ou du moins d’en évaluer l’influence sur les résultats, en
procédant à des tests inter-expérimentateurs qui permettraient de pondérer les choix effectués
et d’identifier les propositions d’associations faisant consensus. Nous avions envisagé en ce
sens de croiser nos résultats avec ceux obtenus lors de la première étude du site mais ces
données n’étaient malheureusement pas disponibles dans la documentation d’opération.

4.1.2 Analyse métrique des liaisons par symétrie.

L’estimation du NMI obtenue par le biais de la méthode proposée par R.M. Thomas et
collaborateurs est très proche de l’estimation proposée lors de la première étude du site par W.
Devriendt (19 individus en nous basant sur le décompte des fémurs). Elle est au contraire assez
éloignée de celle obtenue par notre étude fondée sur les paramètres visuels.
La méthode de R.M. Thomas et collaborateurs se caractérise par des avantages similaires à
ceux que nous avons décrits pour le protocole d’étude par paramètres visuels. En effet, elle
requiert du matériel de mesure et un référentiel permettant de calculer les valeurs M d’asymétrie
pour les différents os du squelette humain. Ce référentiel doit être le plus représentatif possible
de l’échantillon étudié. Tout comme pour le protocole visuel, la mise en œuvre de la méthode
est simple et rapide. Enfin, cette méthode présente l’avantage d’être adaptable à un échantillon
fragmenté, ceci en sélectionnant les variables métriques dont la valeur M est étudiée en fonction
de la conservation spécifique à la collection.

48
Malgré ces avantages, cette méthode entraîne des faux négatifs dans nos résultats, c’est-à-dire
des rejets d’associations avérées (liaisons de premier ordre identifiées sur le terrain). De plus,
il apparaît que la méthode n’autorise qu’assez peu d’exclusion ce qui nous empêche d’affiner
l’estimation du NMI.
Les limites mises en évidence peuvent trouver plusieurs explications. Tout d’abord, il est
possible que l’asymétrie des individus du site archéologique de Valenciennes soit forte ce qui
ne permet pas aux liaisons de premier ordre étudiées d’appartenir à l’intervalle de variabilité
validant une association. Il est aussi envisageable que le référentiel que nous avons utilisé ne
soit pas adapté pour l’étude que nous avons réalisée : d’une part, le nombre d’individus peut ne
pas être suffisant pour inclure les nombreuses variations de taille des os gauches et droits du
corps humain ; d’autre part, les populations humaines du Néolithique moyen de la partie Nord
de la France pourraient se caractériser par une asymétrie squelettique moins forte, entraînant
des faux négatifs pour le site archéologique de Valenciennes. Il n’est donc pas possible
d’utiliser les résultats obtenus grâce à cette méthode afin de les croiser avec ceux obtenus par
le protocole par paramètres visuels dans le but de confirmer les exclusions proposées
précédemment. Par conséquent, nous ne pouvons pas valider le NMI proposé par cette
procédure et devons rejeter cette méthode de décompte.
Bien que cette méthode ne donne pas les résultats escomptés, il est envisageable de l’améliorer
pour de prochaines études afin de réduire voire même de supprimer le problème des faux
négatifs. Ainsi, nous pouvons envisager que le problème des faux négatifs résulte de notre
manière de synthétiser nos résultats. Dans les tableaux de synthèse de ce protocole, nous avons
invalidé H0 dès lors qu’une des mesures prises rejetait cet appariement. Nous avons choisi
arbitrairement d’interpréter les résultats de cette manière dans la mesure où l’article de R.M.
Thomas et collaborateurs (2013) ne fournit aucune consigne sur la procédure à suivre pour
l’exploitation des informations obtenues suite aux calculs d’asymétrie. Nous pourrions adapter
notre méthode afin de valider une exclusion d’association si et seulement si une majorité des
mesures donne le même résultat. Ces changements peuvent être illustrés par le cas de la liaison
de premier ordre des fémurs droit et gauche de SP 2305 (cf. supra, fig. 23). Lors de l’étude du
taux de faux négatifs pour ce protocole, ces deux spécimens ont fait l’objet d’un rejet de H0
alors qu’une seule mesure sur les huit considérées entrainait un rejet de l’association. Dès lors,
cette liaison participe à l’augmentation du taux d’erreur de cette méthode, ce qui n’aurait pas
été le cas si nous avions utilisé un ratio du nombre de réponse pour nos rejets ou validations de
H0. Nous pouvons aussi envisager d’augmenter l’effectif d’individus intégré au référentiel
permettant le calcul des valeurs M, ce qui permettrait probablement de mieux cerner la

49
variabilité d’asymétrie entre les os gauches et droits du squelette humain (Stirland, 1993).
Rappelons cependant que dans le cadre de cette proposition d’amélioration du référentiel, il
n’est pas possible d’utiliser un groupe uniquement masculin. En effet, bien que l’étude du site
de Valenciennes par W. Devriendt ait conclu à la présence exclusive d’individus du sexe
masculin, lors de l’étude des os coxaux prélevés sur le site, nous avons procédé à une diagnose
sexuelle en utilisant la méthode de la DSP (diagnose sexuelle probabiliste) (Murail et al., 2005)
qui a montré la présence de deux os coxaux de femme(s) (cox_2292_D et cox_2286_G qui ont
respectivement 90,4 % et 99 % de probabilité d’appartenir à des sujets féminins). Il n’est donc
pas possible d’utiliser un groupe spécifique pour étudier les liaisons ostéologiques de ce site.
Enfin, il faudrait réaliser une étude de l’asymétrie des os humains pour les populations du
Néolithique moyen et du Néolithique final afin d’évaluer s’il existe des différences
significatives qui pourrait dès lors expliquer le manque d’exclusion ou la présence des faux
négatifs. Si une différence significative entre les populations de ces deux périodes existe, alors
notre référentiel, bien que sub-contemporain, se révèlerait non adapté et il faudrait utiliser
uniquement des référentiels contemporain du site que nous étudions dans le cadre des études
des liaisons de second ordre. Malheureusement, nous devons souligner que les variables
métriques des populations néolithiques font peu l’objet de publications ce qui nous empêche de
proposer l’utilisation d’un tel référentiel. Par ailleurs, ce référentiel devrait se caractériser par
une origine géographique plus proche du site que nous étudions car il est possible d’observer
de fortes variabilités métriques entre deux populations géographiquement distantes.

4.1.3 Analyse canonique de corrélation.

L’usage des analyses canoniques de corrélation pour l’ostéométrie et la photogrammétrie a


révélé un même problème relatif à l’interprétation des résultats : il y a trop peu d’exclusion
proposée par cette procédure pour réévaluer le NMI dans les deux cas.
Ces deux méthodes sont complexes à mettre en place en raison de la création des formules de
régression qui demande un temps important de préparation en amont. En effet, en plus de
l’exploitation des données d’un référentiel, il convient de contrôler si les valeurs du R² des
régressions obtenues sont suffisantes pour pouvoir les utiliser. Malgré ce temps préalable de
traitement, la démarche est grandement facilitée par une automatisation du traitement des
données par le logiciel R. Le même constat peut être effectué pour les modèles de
photogrammétrie puisque malgré le temps important d’acquisition, la mise en place des
landmarks peut aussi être automatisée. Enfin, il est important de constater que la méthode

50
d’ACC permet d’obtenir des régressions dont les corrélations sont maximisées ce qui se traduit
par un R² plus important que ceux que nous pourrions obtenir par le biais de régressions sur une
mesure unique ou, comme cela est proposé par ailleurs, sur le logarithme de sommes de mesures
(Byrd et Adams, 2003).
Malgré cela, les résultats montrent que ce protocole d’étude est difficilement adaptable aux
ensembles fragmentés. Nous avons pu constater que l’absence de certaines mesures comme les
longueurs maximales diminue drastiquement les valeurs de R² des ACC. Par ailleurs, comme
pour la méthode de R.M. Thomas et collaborateurs, l’emploi de ces régressions entraine des
faux négatifs dans nos résultats qui, combinés aux trop nombreuses validations d’associations
possibles, ne permettent pas de proposer une nouvelle estimation du NMI.
Nous devons donc rejeter les protocoles d’étude des liaisons ostéologiques de second ordre par
le biais des ACC. Il est cependant important de retenir que, pour la photogrammétrie, le rejet
de ce protocole permet tout de même de fournir des informations importantes quant à l’étude
des liaisons de second ordre. Si l’usage de la 3D, des landmarks et l’exploitation statistique des
rayons de courbure des surfaces articulaires des scapulas et des humérus ne permettent pas de
proposer des associations spécifiques pour cette articulation, il apparaît très improbable que
nous puissions proposer des associations de second ordre sur la simple base de paramètres
visuels évaluant la congruence de ces mêmes surfaces articulaires.
Le protocole photogrammétrique utilisé dans notre étude se caractérise par un certain nombre
de limites. En premier lieu, nous ne sommes pas en mesure d’indiquer la précision de nos
modèles et il aurait été en ce sens intéressant de pouvoir utiliser un modèle 3D issu d’un scanner
pour plusieurs individus de notre échantillon de référence et du site de Valenciennes afin de
pouvoir certifier que nous avions une précision semblable au scanner. Cette procédure est par
ailleurs régulièrement utilisée dans le cadre d’études impliquant des modèles 3D obtenus par le
biais de la photogrammétrie (Evin et al., 2016 ; Porter et al., 2016). Afin de résoudre le
problème des faux négatifs, il serait de même intéressant d’apporter des modifications au
référentiel que nous avons utilisé pour créer notre fichier d’apprentissage (site de la Caserne
Taupin) afin de voir s’il n’est pas à l’origine de ces erreurs. Pour cela, nous pouvons envisager
d’augmenter le nombre d’individus inclus à ce référentiel, afin d’obtenir un fichier
d’apprentissage par ACC plus précis et à même de mieux distinguer les associations sur la base
de l’enregistrement d’un plus grand nombre de variation pour l’articulation scapulo-humérale.
Il faut aussi envisager d’utiliser un autre référentiel plus proche géographiquement et
chronologiquement (comme envisagé pour la méthode de R.M. Thomas et collaborateurs) afin
d’obtenir des résultats potentiellement plus concluants.

51
4.2 Modalités de constitution des assemblages osseux.

4.2.1 Influence des flux hydriques sur la disposition des restes osseux.

Il nous semble important de discuter l’hypothèse d’un rituel de prélèvement post-inhumation


des os entraînant la dispersion des restes. Nous considérons que ces dispersions des os humains
pourraient aussi bien être expliquées par certains facteurs taphonomiques et notamment par
l’influence de l’eau qui paraît avoir été peu prise en compte dans l’analyse de ces déplacements.
Comme nous avons pu le souligner dans la première partie de notre manuscrit, le comportement
des restes humains dans les milieux saturés en eau a été étudié par différents chercheurs afin de
comprendre le schéma de perte des connexions osseuses (Boaz et Behrensmeyer, 1976 ; Pokines
et Symes, 2014 ; Haglund et Sorg, 2002). Dans le rapport de fouille du site archéologique de
Valenciennes, des éléments à propos des pertes osseuses entrent en contradiction avec
l’hypothèse du rituel. En effet, W. Devriendt indique que des os longs ont été déplacés tandis
que les os plus petits des mains et des pieds sont encore en place. Cependant, il ajoute que les
os des mains et des pieds sont faiblement représentés au sein de l’échantillon des os humains
récupérés lors de la fouille. Par conséquent, les os des mains et des pieds ont bien subi des
déplacements mais n’ont pas été retrouvé à la fouille. Ainsi, les pertes de connexions
ostéologiques peuvent s’expliquer par ce facteur taphonomique.
Si nous considérons cette faible représentation des os des mains et des pieds, nous pouvons voir
que les sépultures du site archéologique de Valenciennes suivent la séquence générale des
pertes osseuses décrite par W.D. Haglund (2002) qui montre que les os des mains, des poignets,
des pieds et des chevilles disparaissent en premier dans des contextes palustres. Cette même
observation est par ailleurs soulignée par J.T Pokines et S.A. Symes (2014), lesquels signalent
que les extrémités du cadavre tendent à être perdues en premier.
Pour le site de Valenciennes, l’hypothèse d’un rituel de prélèvement des os post-décomposition
repose principalement sur le fait que des os longs aient été déplacés tandis que des os de plus
petite taille sont toujours en place. A nouveau, les études sur l’eau en tant que facteur
taphonomique responsable de la perte des liaisons ostéologiques montrent que nous pouvons
être confrontés à ce type de cas. Ainsi, J.T Pokines et S.A. Symes (2014) ont montré que les os
longs, tout comme les os courts, pouvaient être déplacés par l’eau sur des distances relativement
importantes. De plus, la présence d’un effet de sablier entraînant une sédimentation rapide des
extrémités aurait pu causer la stabilité des os plus petits alors même que des os longs de grandes
dimensions ont connu de déplacements.

52
Enfin, comme ont pu le souligner les différentes études sur ce facteur taphonomique non
anthropique, les mouvements des os sous l’action de l’eau dépendent de nombreux facteurs :
leur taille, leur masse, leur densité, leur forme, leur surface de projection, leur orientation, le
débit du courant ainsi que la stabilité des os. Il est donc probable que les mouvements des os au
sein du site soient liés à la présence d’un facteur taphonomique non anthropique plutôt que d’un
facteur humain. Cette hypothèse doit toutefois être vérifiée par la projection des liaisons
ostéologiques que nous avons pu déterminer sur un plan du site afin d’étudier leurs différents
déplacements.

4.2.2 Analyse spatiale des liaisons de second ordre.

Afin de comprendre les facteurs responsables des déplacements des os humains étudiés, nous
avons indiqué sur le plan du site les différentes liaisons ostéologiques de second ordre que nous
avions pu proposer dans le cadre de notre étude par paramètres visuels. Comme nous pouvons
le voir pour les symétries (fig. 24) et pour les contiguïtés articulaires (fig. 25), les déplacements
des os semblent suivre majoritairement un axe sud-ouest / nord-est au sein de la nécropole.
Notons cependant qu’il existe quelques liaisons qui suivent un axe nord / sud.
Pour les deux types de liaisons ostéologiques de second ordre, nous pouvons remarquer que la
plupart des déplacements se sont effectués sur une longue distance comme l’attestent les
différents tracés de nos plans. Cette distance peut atteindre 23 mètres pour les liaisons
ostéologiques par contiguïté et 24 mètres pour les liaisons ostéologiques par symétrie. Pour
savoir si l’eau a pu entrainer les déplacements symbolisés sur les plans du site archéologique
de la rue J. Bernier, nous devons évaluer la cohérence de ces déplacements avec ce type de
facteur taphonomique mais aussi avec la topographie du site et les données stratigraphiques
enregistrées par les archéologues.
Parmi les liaisons ostéologiques de second ordre identifiées, trois couples d’humérus, un couple
humérus – ulna, un couple ulna – radius et quatre couples coxal – fémur semblent se caractériser
par des déplacements anormaux (fig. 26). Le déplacement de ces os ne semble pas pouvoir
s’expliquer par la seule action de l’eau. En effet, l’humérus associé à l’individu en connexion
SP. 2004 a été découvert à plus de 20 mètres au nord-est de celui-ci au sein de la structure
2146N ce qui ne parait pas cohérent avec l’action même répétée de l’eau sur le squelette. Nous
émettons de même un doute quant à l’association entre les humérus hum_2059_D et
hum_2245_D pour laquelle la différence d’unité stratigraphique ne semble pas pouvoir
s’expliquer par un simple phénomène taphonomique non anthropique. Enfin, pour le 3e couple,

53
la distance entre les deux os semble beaucoup trop importante pour ce type de déplacement en
comparaison des données proposées par les différentes études ayant pu s’intéresser au
déplacement des os en milieu palustre.
Des incohérences stratigraphiques sont aussi présentes pour les liaisons ostéologiques par
contiguïté (p. ex. uln_2181_D et rad_2089_A20_D). Pour le couple coxo-fémoral cox_2158_D
et fem_2017_D, le déplacement ne semble pas lié à l’eau puisque le coxal a été découvert au
sein d’un amas osseux proche de l’îlot 15 tandis que le fémur associé est présent dans une
structure fossoyée en dehors de la zone impactée par les différentes crues comme le souligne la
topographie du site puisqu’il existe une zone de berge se caractérisant par une remontée de près
d’un mètre de hauteur et au-delà de laquelle peu ou pas d’os ont été retrouvé. Ce même cas est
par ailleurs observables pour le couple cox_2286_G et fem_2285_G. Pour les deux dernières
liaisons ostéologiques par contiguïté, ce sont les localisations stratigraphiques des os qui ne
nous semblent pas être cohérentes avec des dépôts liés à des déplacements par l’eau.
En conclusion, la majorité des déplacements symbolisés sur le plan du site archéologique
semble concorder avec des déplacements liés à l’eau car ils suivent une direction assez
uniforme. La distance importante parcourue (parfois supérieure à 20 mètres) nous impose
cependant de questionner certaines associations proposées car ces distances sont bien
supérieures à celles qui sont indiquées dans la littérature scientifique soulignant que ces
déplacements sont rarement supérieurs à 1 mètre de distance (Boaz et Behrensmeyer, 1976).
Les neuf liaisons ostéologiques de second ordre que nous avons pu discuter nous conduisent en
outre à envisager que d’autres facteurs sont intervenus dans les déplacements de pièces
osseuses. Ainsi, l’hypothèse d’un prélèvement par l’homme est envisageable pour ces
associations car elle permettrait d’expliquer des déplacements d’os en dehors de la zone
inondable, des déplacements vers des structures fossoyées ainsi que la présence de liaisons dans
des unités stratigraphiques distantes.
Cependant, il est important de garder à l’esprit que ces « anomalies » de déplacement
proviennent des résultats proposés par nos tests par paramètres visuels. Ces liaisons
ostéologiques ne sont pas statistiquement vérifiées ni vérifiables ce qui signifie que ces
« anomalies » peuvent aussi être le reflet de rejets d’association. Par conséquent, sans un
protocole démontrant mathématiquement la validité des associations proposées, il sera très
difficile de soutenir l’hypothèse des prélèvements anthropiques au sein du site de la rue J.
Bernier.

54
Figure 24 : Projection spatiale des liaisons ostéologiques de second ordre par symétrie sur le site
Néolithique de la rue J. Bernier.

55
Figure 25 : Projection spatiale des liaisons ostéologiques de second ordre par contiguïté sur le site
Néolithique de la rue J. Bernier.

56
Figure 26 : Projection spatiale des liaisons ostéologiques de second ordre indiquant des
déplacements qui ne semblent pas correspondre à l’influence d’un phénomène taphonomique non-
anthropique.

57
Conclusion

L’étude des liaisons ostéologiques de second ordre est un exercice très complexe de par la
multiplicité des protocoles existant pour les identifier. Parmi les quatre protocoles que nous
avons utilisés pour étudier ces liaisons ostéologiques, nous avons pu constater que seul le
protocole d’étude par paramètres visuels a permis de proposer une réévaluation du NMI pour
le site archéologique de la rue Jean Bernier. En effet, nos observations nous ont permis de
proposer une estimation du NMI supérieure (N = 24) à celle proposée lors de la première étude
du site (NMI de fréquence = 18). Cette nouvelle analyse montre l’intérêt d’étudier ces liaisons
ostéologiques afin de préciser nos estimations du NMI au sein des sites archéologiques comme
celui de la rue J. Bernier. Ces résultats montrent que dans le cadre de ce site, l’estimation du
NMI obtenue diffère d’un NMI de fréquence déterminant le nombre d’individus par le
comptage de l’os le plus fréquemment retrouvé (comme ce fut le cas lors des estimations de
NMI obtenues par le biais de la méthode de R.M. Thomas et collaborateurs). Bien que le
protocole d’étude des rayons de courbure de l’articulation scapulo-humérale par le biais de la
photogrammétrie n’ait pas donné les résultats escomptés, nous avons pu souligner que le
nombre insuffisant d’exclusions qu’il permet signifie par corollaire que la probabilité de
réassociation des os de cette articulation par l’usage de paramètres visuels est
vraisemblablement non fiable. Il nous paraît donc important de procéder à ce type d’étude sur
d’autres articulations du squelette humain afin de déterminer si l’étude visuelle des congruences
articulaires est suffisamment fiable pour servir à la détermination de liaisons ostéologiques de
second ordre. Enfin, l’étude de la répartition des liaisons ostéologiques déterminées par le
protocole par paramètres visuels corrobore l’hypothèse d’une intervention anthropique post-
inhumation pour un certain nombre de liaisons. Cependant, l’usage d’un protocole
essentiellement basé sur des observations visuelles pour appuyer cette hypothèse laisse un doute
raisonnable sur les liaisons identifiées et donc sur les déplacements enregistrés. D’autres études
statistiquement vérifiables doivent être menées pour vérifier ces propositions : par le biais de
tests inter-observateurs pour les symétries et contiguïtés articulaires des os longs ou par l’usage
d’autres méthodes alliant l’ostéométrie et la restitution 3D.

Notre étude a finalement permis de montrer que, malgré d’importants progrès dans les études
statistiques des liaisons ostéologiques, il faudra à l’avenir croiser différents protocoles pour
identifier des informations récurrentes mais surtout développer de nouvelles approches qui
pourraient s’adapter à des échantillons archéologiques fragmentés et incomplets, tel que celui

58
qui a fait l’objet de notre étude. Ces protocoles devront par ailleurs résoudre le problème de la
faible discrimination des liaisons au sein des assemblages. En effet, notre étude a aussi pu
souligner les faiblesses des approches statistiques dans le cadre de l’étude des liaisons
ostéologiques de second ordre. Il apparaît que les méthodes utilisées se caractérisent par un trop
grand nombre d’erreurs ou de possibilité d’association nous empêchant de déterminer un
nombre suffisant d’exclusion. Que nous utilisions des calculs d’asymétrie ou les analyses
canoniques de corrélation, nous pouvons voir que nous devons avoir recours à des méthodes
apportant encore plus de précision pour la détermination d’exclusions d’association des os
humains. Par conséquent, cette étude nous a aussi permis d’aborder des questions relatives aux
référentiels auxquels nous avons recours pour analyser les liaisons ostéologiques de second
ordre. Ainsi, il apparaît que les protocoles métriques, bien qu’ils autorisent une objectivation
statistique des associations proposées, sont plus tributaires de la conservation des ossements
qui détermine le nombre de mesures qui peuvent être prises et par conséquent la puissance des
statistiques. Dans le cadre de la présente étude, nous avons pu montrer que la validité des
méthodes est aussi tributaire de la variabilité ostéométrique des populations constituant
l’échantillon de référence. La variabilité morphométrique au sein des collections étudiées
apparaît également jouer un rôle déterminant sur les résultats, puisqu’elle détermine en partie
les associations et les exclusions qui seront proposées par les différents protocoles. C’est donc
en proposant un référentiel constitué d’un plus grand nombre d’individus mais aussi en
s’efforçant d’utiliser des populations contemporaines et géographiquement proches des sites
archéologiques que nous étudions, que nous pourrons parvenir à préciser nos analyses et obtenir
des résultats statistiques exploitables pour objectiver un plus grand nombre de liaisons
ostéologiques de second ordre. En prenant en compte ces nouveaux éléments, nous pourrons
être en mesure de préciser l’estimation du NMI mais aussi de comprendre les facteurs
responsables de la répartition des ossements au sein des sites archéologiques. Il est aussi
important de ne pas se limiter qu’aux ossements afin de pouvoir comprendre l’histoire du dépôt.
Ainsi, en élargissant notre étude à des éléments tels que les vestiges lithiques (qui ont aussi fait
l’objet d’un enregistrement spatial particulièrement précis), nous serons peut-être en mesure de
déterminer précisément les facteurs à l’origine de la répartition des vestiges. Cette étude ne
devra cependant pas se focaliser sur l’analyse des patines de l’os car elles présentent de fortes
différences pour un même individu. Cependant, d’autres analyses de surfaces (micro-traces,
étude des phénomènes physico-chimiques) pourront apporter de nouvelles informations.

59
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62
Table des figures

Figure 1 : illustration de la méthode de zonation sur l’humérus (Knüsel et Outram, 2004). ... 10
Figure 2 : pourcentages des réponses justes des liaisons par contiguïté pour le niveau 2 (Source :
N. Villena i Mota, 2015, figure 24) ....................................................................................... 12
Figure 3 : pourcentages des réponses justes des liaisons par symétrie articulaire pour le niveau
2 (Source : N. Villena i Mota 2015, figure 27) ...................................................................... 12
Figure 4 : représentation schématique de la désarticulation et de l’exposition des os des cadavres
en environnement aqueux (Haglund et Sorg, 2002) ............................................................... 14
Figure 5 : sphere-fitting dans un acétabulum complet et division de la surface semi-lunaire de
l’acetabulum en 7 régions de taille similaire par le biais de landmarks afin d’évaluer la précision
du sphere-fitting pour un acétabulum complet....................................................................... 15
Figure 6 : exemple d’individu en connexion anatomique partielle (SP 2004) ©Service
archéologique de Valenciennes ............................................................................................. 18
Figure 7 : exemple d’ossements erratiques ©Service archéologique de Valenciennes ........... 18
Figure 8 : Plan général du niveau néolithique, Site Rue J. Bernier, secteur 70. © Service
archéologique de Valenciennes ............................................................................................. 19
Figure 9 : Plan général de l’occupation Néolithique, site rue J. Bernier, secteur 70. © Service
archéologique de Valenciennes (Source : Deckers et al., 2009) ........................................... 21
Figure 10 : biplot des variables canoniques du fichier d’apprentissage et affichage des bandes
d’intervalle de confiance (à 95 %) pour la régression humérus-radius. .................................. 27
Figure 11 : illustration de la prise de photographies de l’humérus (de face et avec une inclinaison
à 45°).................................................................................................................................... 28
Figure 12 : illustration de la prise de photographies de la scapula (de face et avec une
inclinaisons à 45°) ................................................................................................................ 28
Figure 14 : illustration des différentes étapes de restitution des modèles 3D de la scapula : 1.
alignement des photographies ; 2. création du nuage de points épars ; 3. création du nuage dense
de points ; 4. et 5. création du modèle 3D (avec et sans texture). ........................................... 29
Figure 13 : illustration des différentes étapes de restitution des modèles 3D de l’humérus : 1.
alignement des photographies ; 2. création du nuage de points épars ; 3. création du nuage dense
de points ; 4. et 5. création du modèle 3D (avec et sans texture). ........................................... 29
Figure 15 : illustration des différentes étapes de traitement des modèles 3D des humérus pour
la pose des landmarks sur TIVMI : 1. chargement du modèle 3D ; 2. pose des 26 landmarks
pour créer le plan moyen ; 3. création des plans orthogonaux ; 4. création des 4 chemins de
landmarks ; 5. simulation de la sphère d’après les rayons de courbure................................... 30
Figure 16 : illustration des différentes étapes de traitement des modèles 3D des scapulas pour
la pose des landmarks sur TIVMI : 1. chargement du modèle 3D ; 2. pose des 26 landmarks
pour créer le plan moyen ; 3. création des plans orthogonaux ; 4. création des 4 chemins de
landmarks ; 5 et 6. simulation de la sphère d’après les rayons de courbure. ........................... 31

63
Figure 17 : estimation du NMI par l’étude des liaisons ostéologiques par paramètres visuels
(symétrie). Les liaisons de premierr et de second ordre sont encadrées. ................................. 34
Figure 18 : estimation du NMI par l’étude des liaisons ostéologiques par paramètres visuels
(contiguïté articulaire). Les liaisons de premier r et de second ordre sont encadrées. .............. 37
Figure 20 : biplot des variables canoniques du site archéologique de Valenciennes pour la
régression scapula gauche – humérus gauche. ....................................................................... 43
Figure 19 : biplot des variables canoniques du site archéologique de Valenciennes pour la
régression scapula droite – humérus droit. ............................................................................ 43
Figure 22 : biplot des variables canoniques des rayons de courbure des scapulas et des humérus
gauches (Valenciennes). ....................................................................................................... 45
Figure 21 : biplot des variables canoniques des rayons de courbure des scapulas et des humérus
droits (Valenciennes). ........................................................................................................... 45
Figure 23 : Fémurs droit et gauche de SP 2305 © MARTIN Ezéchiel ................................... 48
Figure 24 : Projection spatiale des liaisons ostéologiques de second ordre par symétrie sur le
site Néolithique de la rue J. Bernier. ..................................................................................... 55
Figure 25 : Projection spatiale des liaisons ostéologiques de second ordre par contiguïté sur le
site Néolithique de la rue J. Bernier. ..................................................................................... 56
Figure 26 : Projection spatiale des liaisons ostéologiques de second ordre indiquant des
déplacements qui ne semblent pas correspondre à l’influence d’un phénomène taphonomique
non-anthropique. .................................................................................................................. 57

Liste des tableaux

Tableau 1 : pourcentages et intervalles de confiance (à 95 %) correspondants pour les liaisons


par symétrie et par contiguïté articulaire en fonction des niveaux d’expertise (Source : N.Villena
i Mota 2015, Tableau XXV). ................................................................................................ 12
Tableau 2 : valeurs d’asymétrie M entre l’os gauche et droit sur le référentiel d’A. Thomas pour
les groupes « Femme », « Homme » et « Total »................................................................... 23
Tableau 3 : coefficient de concordance de Lin permettant de vérifier l’interchangeabilité des
données des os droits et des os gauches................................................................................. 26
Tableau 4 : étude des liaisons ostéologiques par symétrie : synthèse des liaisons de 1eret de 2nd
ordre au sein du site archéologique de Valenciennes (Rue Bernier). ..................................... 32
Tableau 5 : étude des liaisons ostéologiques par contiguïté : synthèse des liaisons de 1eret de 2nd
ordre au sein du site archéologique de Valenciennes (Rue Bernier). ...................................... 35
Tableau 6 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de la clavicule (méthode
métrique Thomas et al. 2013). .............................................................................................. 38
Tableau 7 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de la scapula (méthode
métrique Thomas et al. 2013). .............................................................................................. 38

64
Tableau 8 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de l’humérus (méthode
métrique Thomas et al. 2013). .............................................................................................. 39
Tableau 9 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement du radius (méthode métrique
Thomas et al. 2013). ............................................................................................................. 39
Tableau 10 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de l’ulna (méthode métrique
Thomas et al. 2013). ............................................................................................................. 40
Tableau 11 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement de l’ulna (méthode métrique
Thomas et al. 2013). ............................................................................................................. 40
Tableau 12 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement du fémur (méthode métrique
Thomas et al. 2013). ............................................................................................................. 40
Tableau 13 : synthèse des rejets ou acceptation de ré-appariement du tibia (méthode métrique
Thomas et al. 2013). ............................................................................................................. 40
Tableau 14 : valeurs des modèles de régression statistique pour le protocole d’analyse
canonique de corrélation. Les régressions surlignées sont celles utilisées pour ce protocole (R²
> 60 %) ................................................................................................................................ 42
Tableau 15 : Nombre de liaisons de 1er ordre et nombre de faux négatifs enregistrés par la
méthode d’étude par ACC. ................................................................................................... 43
Tableau 16 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique huméro-ulnaire
gauche. ................................................................................................................................. 44
Tableau 17 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique fémur-tibia gauche.
............................................................................................................................................. 44
Tableau 18 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique scapulo-humérale
droite. ................................................................................................................................... 46
Tableau 19 : synthèse des rejets ou acceptations de la liaison ostéologique scapulo-humérale
gauche. ................................................................................................................................. 46

Table des annexes

Annexe 1 : Tableaux de ré-appariement visuel des os du site archéologique de Valenciennes


indiquant les associations possibles et les exclusions. ........................................................... 66
Annexe 2 : Tableaux d’étude visuelle des liaisons ostéologiques du site archéologique de
Valenciennes indiquant les associations possibles et les exclusions. Les remplissages en bleu
indiquent les os pour lesquels des problèmes de conservation ont empêché l’étude de la liaison.
............................................................................................................................................. 67

65
Annexes

Annexe 1 : Tableaux de ré-appariement visuel des os du site archéologique de Valenciennes indiquant les associations possibles et les
exclusions.

66
67
Annexe 2 : Tableaux d’étude visuelle des liaisons ostéologiques du site archéologique de Valenciennes indiquant les associations possibles et les exclusions.
Les remplissages en bleu indiquent les os pour lesquels des problèmes de conservation ont empêché l’étude de la liaison.

68
Pour un renouveau des méthodes d’étude des liaisons ostéologiques de second ordre :
nouvelles approches appliquées à l’analyse de la nécropole Néolithique de la rue Jean
Bernier (Valenciennes, Nord).
Résumé : La présence d’ossement humains mélangés au sein des sites archéologiques est un
phénomène récurrent pour l’anthropologue. Ces mélanges modifient notre perception de
l’organisation des nécropoles ainsi que notre estimation du NMI. Nous avons souhaité étudier
les liaisons ostéologiques de second ordre au sein d’une nécropole du Néolithique final
découverte à Valenciennes (Nord), pour laquelle la présence d’un rituel de prélèvement des os
post-inhumation était supposée. Quatre protocoles ont été utilisé pour rechercher les liaisons
ostéologiques dans cet ensemble d’os mélangés : par paramètres visuels, par analyse métrique
de l’asymétrie, par analyse canonique de corrélation (ACC) et par étude des rayons de courbure
des surfaces articulaires sur des modèles 3D en photogrammétrie pour l’articulation scapulo-
humérale. Les résultats montrent la présence de quelques recoupements entre les observations
visuelles de symétrie et la méthode métrique d’étude de l’asymétrie. Cependant, les résultats
des ACC et de l’étude des rayons de courbure des surfaces articulaires montrent que ces
méthodes ne peuvent servir à objectiver les liaisons de second ordre.
Mots clés : liaisons ostéologiques, os humains erratiques, Valenciennes, Néolithique final,
symétrie, contiguïté articulaire, photogrammétrie, analyse canonique de corrélation.

For a renewal of methods in the study of second order bone association: new approaches
applied to the analysis of the Neolithic necropolis from the street Jean Bernier
(Valenciennes, North of France).
Abstract: Human commingled remains in archaeological sites are a regular phenomenon for
the anthropologist. These commingled remains modify our perception of the necropolis’
organization and of our estimation of the MNI. We wish to study second order bones
associations within a final Neolithic necropolis discovered in Valenciennes (North of France)
and in which the anthropologist supposed a post-burial ritual of bone removal. Four protocols
were applied in order to find bone associations within the commingled remains using: visual
parameters, asymmetry analysis, canonical correlation analysis (CCA) and the radius curve on
3D – photogrammetric models for the scapulo-humeral articulations. Results shows some cross-
checking between visual observations for symmetry and the metric method studying
asymmetry. Nevertheless, results for CCA and radius curves show that these methods aren’t
useful in order to study second order bone associations.
Keyword: bone association, human commingled remains, Valenciennes, late Neolithic,
symmetry, articular contiguity, photogrammetry, canonical correlation analysis.

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