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Faculté des Sciences Année : 2021-2022

et Techniques - Marrakech
LST - MIPC

Chapitre III : Réduction des matrices carrées : Diagonalisation

Dans tout ce chapitre, IK = IR ou C.

1 VECTEURS PROPRES ET VALEURS PROPRES.


Soit A = (ai,j ) ∈ Mn (IK). On note par In la matrice unité d’ordre n.

1.1 Vecteurs propres et valeurs propres d’une matrice


Définition 1 : Un vecteur x ∈ IKn est vecteur propre (en abrégé ” −

v .p. ”) de la
matrice A, s’il vérifie les deux conditions suivantes :
(a) x ̸= 0 ;
(b) il existe λ ∈ IK tel que Ax = λ.x

Remarque 1 : d’après (a), le scalaire λ (qui dépend de x) est unique ; en effet,


Ax = λx = λ′ x implique (λ − λ′ )x = 0 et donc, puisque x ̸= 0, λ = λ′ .

Définition 2 : Un scalaire λ ∈ IK est une valeur propre (en abrégé ”v.p.”) de A, s’il
existe un vecteur propre x ∈ IKn tel que Ax = λ.x.

Si x est vecteur propre de A, le scalaire λ ∈ IK défini par la condition (b), est la valeur
propre de A associée au vecteur propre x.

Si λ est valeur propre de A, tout vecteur propre x tel que Ax = λx est un vecteur
propre de A associé à la valeur propre λ.

Si λ ∈ IK est valeur propre de A, un vecteur propre associé à λ n’est pas unique. En


effet, si x est vecteur propre associé à λ, et si α ∈ IK, α ̸= 0, αx est aussi vecteur propre
associé à λ

1.2 Recherche des vecteurs propres et des valeurs propres


d’une matrice
Proposition 1 : Si λ ∈ IK est une valeur propre de A alors, Eλ = ker (A − λIn ),
appelé le sous-espace propre (en abrégé ”s.e.p.”) de A associé à la valeur propre λ, est

1
constitué par le vecteur nul et par les vecteurs propres de A associés à la valeur propre
λ.

Preuve : Si λ ∈ IK et x ∈ IKn , l’égalité Ax = λx équivaut à x ∈ ker (A − λIn ).


Etant donné λ ∈ IK, v.p. de la matrice A, l’existence de x ∈ IKn , x ̸= 0, tel que Ax = λx,
équivaut à x ∈ ker (A − λIn ) et donc ker (A − λIn ) ̸= {0IKn }

Corollaire 1 : λ ∈ IK est valeur propre de A si et seulement si dét(A − λIn ) = 0.

Définition 3 : Soit A ∈ Mn (IK). Le polynôme dét (A − XIn ) ∈ IK [X] est appelé le


polynôme caractéristique de A et on note ce polynôme PA (X). Les racines, dans IK, de
PA (X), sont appelées les valeurs propres de A dans IK.

Proposition 2 : Le polynôme caractéristique de la matrice A ∈ Mn (IK) est un polynôme


à coefficients dans IK, de degré n et on a :

PA (X) = an X n + an−1 X n−1 + ... + a0 ,



n
n n−1
avec an = (−1) , an−1 = (−1) T r(A), et a0 = dét A, où T r(A) = ai,i est appelée
i=1
la trace de la matrice A.

Définition 4 : Si λ est une racine, dans IK, du polynôme caractéristique PA (X), de


multiplicité α ≥ 1, l’entier α est appelé la multiplicité de la valeur propre λ.

Il résulte de la proposition 2 et des propriétés des polynômes :

Corollaire 2 : La matrice A ∈ M n (IK) admet au plus n valeurs propres distinctes, et


si elle admet des valeurs propres, la somme de leurs multiplicités est inférieure ou égale
à n.

Remarque 2 :

• Si K = C, la matrice A admet, d’après le théorème de d’Alembert, au moins une


valeur propre.

• D’après le théorème de factorisation dans C [X], on a :

PA (X) = (λ1 − X)α1 ...(λp − X)αp ,

où les λi , 1 ≤ i ≤ p, sont des nombres complexes deux à deux distincts et les αi
des entiers supérieurs ou égaux à 1.

2
• Les valeurs propres de A sont λ1 , ..., λp , de multiplicités respectives α1 , ..., αp ,
et on a : α1 + ... + αp = d◦ PA (X) = n.

• ∀ 1 ≤ i ≤ p, on a : 1 ≤ dim(Eλi ) ≤ αi (on rappelle Eλi = ker(A − λi In )).

Attention : Ceci est faux si IK = IR. En effet, si IK = IR, A n’admet pas nécessairement
de valeur propre.
Exemple : Soit A ∈ M 2 (IR) :
( )
0 −1
A=
1 0

On a :
−X −1
PA (X) = dét (A − XI2 ) = = X2 + 1
1 −X
A n’admet pas de valeur propre dans IR, mais admet les valeurs propres simples i et −i
dans C.

2 DIAGONALISATION
Définition 5 : Soit A ∈ Mn (IK). On dit que A est diagonalisable sur IK, si elle est
semblable, dans Mn (IK), à une matrice diagonale, c’est-à-dire s’il existe une matrice
P ∈ Mn (IK), inversible, telle que la matrice P −1 AP soit diagonale.

2.1 Caractérisation des matrices diagonalisables


Théorème 1 : Soit A ∈ Mn (IK). Pour que A soit diagonalisable sur IK, il faut et il
suffit que les deux conditions suivantes soient satisfaites.

• Le polynôme caractéristique de A est décomposable en produit de facteurs du pre-


mier degré dans IK [X] :

PA (X) = (λ1 − X)α1 ...(λp − X)αp ,

où les λi sont des éléments (deux à deux) distincts de IK.

• La dimension de chaque sous-espace propre Ei = ker (A − λi In ) est égale à la


multiplicité αi de la valeur propre associée λi .

Corollaire 3 : Si A admet n valeurs propres distinctes dans IK, alors A est diagonal-
isable sur IK.

3
2.2 Pratique de la diagonalisation
Soit la matrice A ∈ Mn (IK). Pour étudier la diagonalisation de A on suit les étapes
suivantes :

1. On calcule le polynôme caractéristique de A :

PA (X) = dét (A − XIn )

on essayera, autant que possible, de calculer PA (X) sous forme de facteurs.

• Si PA (X) ne vérifie pas la première condition du théorème 1, c’est-à-dire si


PA (X) n’est pas scindé sur IK, alors A n’est pas diagonalisable sur IK.
• Si PA (X) est scindé sur IK, on passe à la deuxième étape.

2. On détermine la dimension de chaque sous-espace propre Eλi = ker (A − λi In ).

• Si la seconde condition du théorème 1 n’est pas vérifiée, c’est à dire s’il existe
un sous espace propre dont la dimension n’est pas égale à la multiplicité de
la valeur propre associée, alors A n’est pas diagonalisable sur IK.
• Si la deuxième condition du théorème 1 est également réalisée, A est diago-
nalisable sur IK et on passe à la troisième étape.

3. On cherche une matrice inversible P ∈ Mn (IK) telle que P −1 AP soit diagonale.


Pour cela, on détermine une base Bi′ de Eλi = ker (A − λi In ) pour tout 1 ≤ i ≤ p
alors B ′ = ∪pi=1 Bi′ est une base de IKn . La matrice P est alors la matrice de passage
de la base canonique de IKn à la base B ′ .

Exemple : Soit la matrice :


 
3 −1 2
A =  0 2 2  ∈ M3 (IR).
1 −1 4

Montrons que la matrice A est diagonalisable sur IR et diagonalisons A.


On détermine le polynôme caractéristique de A, on a :

3−X −1 2 2−X −1 2 1 −1 2
PA (X) = 0 2−X 2 = 2−X 2−X 2 = (2−X) 0 3 − X 0
1 −1 4−X 0 −1 4−X 0 −1 4−X

Le passage du premier déterminant au deuxième est obtenu en remplaçant la colonne


C1 par C1 + C2 .
Le passage du deuxième déterminant au troisième est obtenu en remplaçant la ligne L2

4
par L2 − L1 .
Ensuite, on développe par rapport à la première colonne, on a :

PA (X) = (2 − X)(3 − X)(4 − X).

Les valeurs propres sont 2, 3 et 4 et elles sont toutes simples. D’après le corollaire 3, la
matrice A est diagonalisable.
Cherchons les sous espaces propres Eλ=2 , Eλ=3 et Eλ=4 .
Eλ=2 ? on résoud le système linéaire AX = 2X avec
 
x
X=  y 
z
{
x − y + 2z = 0
z = 0
Donc Eλ=2 = Vect(v1 = (1, 1, 0)).
Eλ=3 ? on résoud le système linéaire AX = 3X
{
−y + 2z = 0
x−y+z = 0

Donc Eλ=3 = Vect(v2 = (1, 2, 1)).


Eλ=4 ? on résoud le système linéaire AX = 4X

 −x − y + 2z = 0
−y + z = 0

x−y = 0

Donc Eλ=4 = Vect(v3 = (1, 1, 1)).


La matrice de passage de la base canonique de IR3 à la base (v1 , v2 , v3 ) est :
   
1 1 1 1 0 −1
P =  1 2 1  −1
d’inverse P =  −1 1 0 
0 1 1 1 −1 1

La colonne Ci correspond aux cordonnées du vecteur vi , 1 ≤ i ≤ 3, et on a :


 
2 0 0
P −1 AP =  0 3 0 
0 0 4

Remarque : l’ordre dans lequel sont écrites les valeurs propres (2, ensuite 3, ensuite 4)
est le même que celui dans lequel sont écrites les colonnes C1 , C2 et C3 .

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