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Eléments propres d’endomorphismes et de matrices

Dans tout ce qui suit, E est un K-espace vectoriel de dimension …nie


n 1 (Le corps K étant essentiellement R ou C).

1. Valeurs propres, vecteurs propres.

1.1. Dé…nitions:

i) On dit que 2 K est une valeur propre de la matrice A 2 Mn (K) s’il


existe X 2 Mn;1 (K), non nulle, tel que:

AX = X (S)

Un tel X est appelé vecteur propre associé à la valeur propre .

On notera SpK (A) (ou tout simplement Sp(A)) l’ensemble des valeurs
propres de A, appelé le spectre de A.
0 1 0 1
1 2 1 4
Par exemple, pour A = @ 3 1 0 A 2 M3 (R) et X = @ 3 A,
2 2 2 0 1 2
4
on a AX = 3X donc 3 est une valeur propre de A dont @ 3 A est un
2
vecteur propre associé.

ii) On dit que 2 K est une valeur propre de f 2 L(E) s’il existe x 2 E,
non nul, tel que:
f (x) = x,
ce qui équivaut à ker(f Id) 6= f0g c’est à dire que l’endomorphisme f Id
est non injectif.

Un tel x est appelé vecteur propre associé à la valeur propre .

1
On notera SpK (f ) (ou tout simplement Sp(f )) l’ensemble des valeurs
propres de f , appelé le spectre de f .

Par exemple, pour E = R2 , g(x; y) = (2x + y; y), on a g(1; 0) = 2(1; 0)


donc 2 est une valeur propre de g dont (1; 0) est un vecteur propre associé.

De même, on a: g( 1; 3) = ( 1; 3) donc 1 est une valeur propre de g


et ( 1; 3) en est un vecteur propre associé.

1.2. Proposition: Soit P 2 K[X] de degré 1, alors,

i) P (SpK (f )) SpK (P (f )),

ii) Si K est algébriquement clos, alors P (SpK (f )) = SpK (P (f )).

Preuve: i) SoitP 2 SpK (fk), il existe x 2 E, x 6= 0, tel que f (x) = x.


En posant, P = 0 k r k X , on constate que: P (f )(x) = P ( )x, ainsi
P ( ) 2 SpK (P (f )).

ii) Soit 2 Sp
QK (P (f )); comme K est algébriquement clos, on peut écrire:
P (X) = (X i ), où 2 K et 1 ; :::; r 2 K, non nécessairement
1 i r Q
distincts. On a alors P (f ) Id = (f i Id), qui est non injectif donc
1 i r
il existe i0 2 f1; :::; rg tel que f i0 Id n’est pas injectif. Ainsi i0 2 SpK (f )
et = P ( i0 ) 2 P (SpK (f )).

En particulier, si K = C et k 1, on a:
k
Sp(f k ) = f : 2 Sp(f )g

Version matricielle: Analogue.

1.3. Corollaire: Soit P 2 K[X], P non nul. Alors,

P (f ) = 0 ) SpK (f ) fracines de P g; en particulier, SpK (f ) est …ni.

Par exemple, considérons f 2 LR (E) véri…ant f 2 + f 2Id = 0. On voit


que P (f ) = 0 où P = X 2 + X 2. Les racines de P sont 1 et 2 donc

2
Sp(f ) f1; 2g:

1.4. Théorème: Soit B une base de E, A = matB (f ), 2 K et x 2 E


tel que matB (x) = X. Alors:

i) valeur propre de A () valeur propre de f ,


ii) X vecteur propre de A associé à () x vecteur propre de f associé
à :

Preuve: Découle du fait que matB (f (x)) = AX.

Par exemple: Soit g : R3 ! R3 dé…nie par:

g(x; y; z) = (2x + z; x + y + z; 2x z)

On a (1; 1; 2) est un vecteur propre associé à la valeur


0 propre
1 de 0.
1
Notons B la base canonique de R3 et A = matB (g). Alors @ 1 A est un
2
vecteur propre associé à la valeur propre 0:

1.5. Interprétation de (S): La relation (S) (voir dé…nition 1.1) est équiv-
alente au système linéaire homogène:

(A In )X = 0

Ainsi, valeur propre de A si, et seulement, si le système

(A In )X = 0, ( )

admet une solution, autre que la solution triviale, ce qui est équivalent à:

det(A In ) = 0.

2. Polynôme caractéristique:

2.1. Dé…nition: Le polynôme caractéristique d’une matrice A 2 Mn (K)


est dé…ni et noté comme suit:

A( ) = det(A In ).

3
C’est un polynôme à coe¢ cients dans K, de degré n et de coe¢ cient
dominant ( 1)n . De plus,

valeur propre de A () A( ) = 0.

Remarque: Le polynôme caractéristique de A de A est, également,


noté A (X) (attention, X ici n’a rien à voir avec celui de ( ) mais il s’agit
de l’indéterminée X, ainsi A (X) 2 K[X]).

2.2. Exemples:

1 1 1 1
i) A = 2 M2 (R), A( )= = ( 2). Les
1 1 1 1
valeurs propres de A sont 0 et 2:

On écrira également,

1 X 1
A (X) = = X(X 2)
1 1 X

0 1 1
ii) B = 2 M2 (C), B ( ) = = 2 +1. Les valeurs
1 0 1
propres de B sont i et i:
0 1
2 1 1 2 1 1
iii) C = @ 0 1 3 A 2 M3 (R), on a: C ( ) = 0 1 3 =
0 0 1 0 0 1
( 2)( + 1)2 . Les valeurs propres de C sont 2 et 1.

iv) Si T 2 Mn (K) est triangulaire (supérieure ou inférieure) alors


n
Q
T ( ) = ( 1) ( ai ),
1 i n

où les ai sont les termes diagonaux de la matrice A. Les valeurs propres de


la matrice T sont alors ses termes diagonaux.

En particulier, les valeurs propres d’une matrice diagonale sont ses ter-
mes diagonaux.

4
a b
v) Si A = 2 Mn (K) alors
c d

T (X) = X2 (a + d)X + ad bc

2.3. Proposition: Pour toute matrice A 2 Mn (K), on a:

A = tA

Preuve:

A (X) = det(A XIn ) = det(t (A XIn )) = det(t A XIn ) = tA

Deux matrices semblables ont le même polynôme caractéristique comme


l’établit la proposition suivante:

2.4. Proposition: Si A 2 Mn (K) et P 2 Mn (K) est inversible, alors

P AP 1 = A:

Grâce à cette proposition, on peut dé…nir le polynôme caractéristique d’un


endomorphisme f 2 L(E), par:

f = A, où A = matB (f ).

(Ce polynôme ne dépend pas de la base choisie).

Preuve:
1 1
P AP 1 (X) = det(P AP XIn ) = det(P (A XIn )P ) = det(A XIn ) = A( )

2.5. Proposition: Soit F un sous-espace f -stable de E, alors:

f = f =F f

où f=F est la restriction de f à F et f l’endomorphisme de E=F induit par


f . En particulier, f =F divise f .

2.6. Théorème (Cayley-Hamilton): a) Le polynôme caractéristique f


est un polynôme annulateur de f , c’est à dire,

f (f ) =0

5
b) Version matricielle: Si A 2 Mn (K) alors

A (A) =0

Preuve: Nous nous bornerons au cas des corps C.

a) Récurrence sur n. C’est clair si n = 1 ou 2. "Supposons OK pour


< n" et considérons f 2 L(E). Comme C est algébriquement clos, f admet
une valeur propre . Soit e1 un vecteur propre non nul associé à .

Le sous-espace vectoriel vect(e1 ) est f -stable; on note f l’endomorphisme


de E=vect(e1 ) induit par f . L’hypothèse de récurrence appliquée à E=vect(e1 ),
qui est de dimension n 1, donne f (f ) = 0, c’est à dire

f (f )(x) 2 F; 8x 2 E

Par la proposition 2.5, on a

f (X) =( X) f (X),

d’où le résultat.

b) Soit B une base de E et g 2 L(E) tel que matB (g) = A. On a

0 = matB ( g (g)) = g (matB (g)) = g (A) = A (A)

2.7. Corollaire: Le polynôme minimal de f divise son polynôme carac-


téristique, càd,
f divise f

2.8. Proposition: f et f ont les mêmes facteurs irréductibles dans


K[X].

Preuve: (cas K = C ou R): Comme f divise f, tout facteur irréductible


de f est un diviseur de f .

Réciproquement: ) D’abord, soit 2 K tel que f ( ) = 0. Si X


ne divise pas f , alors X et f sont premiers entre eux. Il existe alors
U; V 2 K[X] tel que
(X )U + f V = 1,

6
Il en résulte que
(f Id)U (f ) = Id:
Ainsi f Id est inversible, ce qui est faux.

) Soit M un facteur irréductible unitaire de f, de degré > 1, on a

M = (X )(X ),

où 2 C, 2 = R. Par le cas ), X et X divisent le polynôme minimal


0
f de f (dans C). Or, 0f divise f , donc X et X divisent f . Il en
résulte que M divise f .

2.9. Exemple: Soit g 2 L(R4 ) tel que g = (X + 1)2 (X 2 + X + 1).


Les facteurs irréductibles de g sont X + 1 et X 2 + X + 1. Ainsi, g =
(X + 1)(X 2 + X + 1) ou g = (X + 1)2 (X 2 + X + 1).

2.10. Corollaire: f et f ont les mêmes racines dans K.

2.11. Proposition: Soit A 2 Mn (K) nilpotente, alors A (X) = ( 1)n X n .

Preuve: On a A (X) = X k , où k est l’indice de nilpotence de A, d’où le


résultat.

3. Espace propre:

3.1. Dé…nition: L’espace propre associé à la valeur propre 2 K de la


matrice A 2 Mn (K) est noté et dé…ni comme suit:

E = fX 2 Mn;1 (K) : AX = Xg = ker(A In )

C’est un sous-espace vectoriel de Mn;1 (K).

3.2. Dé…nition: L’espace propre associé à la valeur propre 2 K de


f 2 L(E) est noté et dé…ni comme suit:

E = fx 2 E : f (x) = xg = ker(f Id)

C’est un sous-espace vectoriel de E.

7
3.3. Exemples:

1 1
i) A = 2 M2 (R), les valeurs propres de A sont 0 et 2. On a:
1 1

E0 = f : 2 Kg, E1 = f : 2 Kg

ii) Soit f : R3 ! R3 l’application linéaire dé…nie par:

f (x; y; z) = (x + 2y z; 3x y; 2x + 2y + 2z):

On a: f( )= ( 2)( 3)( + 3).

Les valeurs propres de f sont: 2; 3; et 3. On a:

E2 = vect((1; 1; 1)), E3 = vect((4; 3; 2)), E 3 = vect((2; 3; 2))

3.4. Proposition: Soit et deux valeurs propres distinctes de f (resp.


A). Alors
E \ E = f0g (resp. E \ E = f0g).
Preuve: Soit x 2 E \E , alors f (x) = x et f (x) = x donc ( )x = 0
et x = 0 vu que 6= .

3.5. Proposition: Soient 1 ; :::; m des valeurs propres 2 à 2 distinctes


de A (resp. f ). Pour tout i 2 f1; :::; mg, on considère xi 2 E i , (resp.
Xi 2 E i ) non nul. Alors,

i) la famille (x1 ; :::; xm ) (resp. (X1 ; :::; Xm )) est libre (donc m n),
ii) E 1 + ::: + E m = E 1 ::: E m ,
iii) E 1 + ::: + E m = E 1 ::: E m .

Preuve: i) Récurrence sur m. Le cas m = 2 est la proposition 3.4. Sup-


posons "vraie pour m 1". Soit 1 ; :::; m 2 K tel que:

1 x1 + ::: + m xm = 0 (1)

En appliquant f , on obtient

1 1 x1 + ::: + m m xm = 0 (2)

8
En e¤ectuant, m (1) (2), on obtient:

( m 1 ) 1 x1 + ::: + ( m m 1 ) m 1 xm 1 =0

L’hypothèse de récurrence et m 6= i , 1 i m 1, donnent: 1 = ::: =


m 1 = 0. En revenant à (1), on obtient m = 0.
ii) et iii) découlent de i).

4. Sous-espaces caractéristiques:

4.1. Dé…nition: On suppose que


Q
f = ( 1)n (X i)
mi
1 i r

Pour tout i 2 f1; :::; rg, on pose:


mi
Ci = ker(f i Id) ,

appelé sous-espace caractéristique de f associé à la valeur propre i.

4.2. Proposition:

i) E = 1 i r Ci ,
ii) Pour tout i 2 f1; :::; rg, dim Ci = mi ,
iii) Pour tout i 2 f1; :::; rg, dim E i mi .

9
Exercices
.

Exercice
0 1: 1 2 L(R3 ), canoniquement
Soit f; g 0 1 associés aux matrices
1 1 1 1 4 2
A = @ 1 1 1 A et B = @ 0 6 3 A. Déterminer le polynôme carac-
1 1 1 1 4 0
téristique, le polynôme minimal, les valeurs propres et sous-espaces propres
associés,les sous-caractéristiques de f et g.
0 1
1 1 1 0
B 0 1 0 1 C
Exercice 2: On considère la matrice A = B @ 1 2 1
C:
1 A
0 1 0 1
2
Calculer A et en déduire A et A .

3
0 Exercice 3: 1Soit f 2 L(R ) canoniquement associé à la matrice A =
1 2 1
@ 0 2 0 A. Montre que A est semblable à la matrice diagonale D =
0 1 2 1 1
0 0 0
@ 0 2 0 A.
0 0 2
Exercice 4: Soit f 2 L(E), inversible. Montrer que:
1 1
Sp(f )=f : 2 Sp(f )g

10

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