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Faculté des Sciences Année : 2021-2022

et Techniques - Marrakech
LST - MIPC

Chapitre V : Formes linéaires et bilinéaires

Dans tout le chapitre, IK désigne l’ensemble IR ou l’ensemble C, E un IK espace vectoriel


de dimension finie égale à n et B = (e1 , ..., en ) une base de E.

1 Formes linéaires
Définition 1 Une forme linéaire sur E est une application linéaire de E dans IK.

Exemple : Pour tout, 1 ≤ i ≤ n, l’application :

e∗i : E −→ IK
n
X
x= xj ej 7−→ e∗i (x) = xi
j=1

est une forme linéaire sur E. En effet, pour tous x, y ∈ E et pour tous α, β ∈ IK :
n
!
X
e∗i (α.x + β.y) = e∗i (αxj + βyj )ej = αxi + βyi = αe∗i (x) + βe∗i (y).
j=1

Remarques :
1. Pour tous, 1 ≤ i, j ≤ n, on a :

1 si i = j
e∗i (ej ) = δi,j =
0 si i 6= j

δi,j est appelé symbole de Kronecker. L’application e∗i est appelée forme duale
associée à l’élément ei , 1 ≤ i ≤ n, de la base B .

2. Toute forme linéaire f sur E s’écrit sous la forme suivante :


n
X
f (x) = α j xj
j=1

En effet, on a : !
n
X n
X
f (x) = f xj ej = f (ej )xj
j=1 j=1

Il suffit de prendre αj = f (ej ), ∀1 ≤ j ≤ n.

1
3. La matrice de f dans la base B de E est la matrice ligne L :

L = (α1 ... αn ) = (f (e1 ) ... f (en )).

Théorème 1 L’ensemble des formes linéaires sur E, noté E ∗ , est un espace vectoriel
sur IK de dimension n, de base B ∗ = (e∗1 , ..., e∗n ) appelée base duale de la base B.
L’espace E ∗ = L(E, IK) est appelé espace vectoriel dual de l’espace E.

Preuve :
1. E ∗ est un espace vectoriel sur IK. En effet, on sait que si F et G sont deux IK espaces
vectoriels, alors (L(F, G), +, .) est un IK espace vectoriel.
2. Montrons que B ∗ = (e∗1 , ..., e∗n ) est une base de E ∗ .
Xn

Soit f ∈ E , soit x = xj ej ∈ E, on a :
j=1

n n n
!
X X X
f (x) = xj f (ej ) = e∗j (x)f (ej ) = f (ej )e∗j (x).
j=1 j=1 j=1

n
!
X
Puisque f (x) = f (ej )e∗j (x), ∀x ∈ E, on a :
j=1

n
X
f= f (ej )e∗j
j=1

et par conséquent la suite (e∗1 , ..., e∗n ) est génératrice de E ∗ .


Montrons qu’elle est libre ?
X n
Soient αj ∈ IK, 1 ≤ j ≤ n, tels que αj e∗j = 0. Donc
j=1

n
X
αj e∗j (x) = 0, ∀x ∈ E.
j=1

En prenant x = ei , 1 ≤ i ≤ n, on a
n
X
αj e∗j (ei ) = αi = 0, ∀1 ≤ i ≤ n.
j=1

Donc, la suite (e∗1 , ..., e∗n ) est libre. C’est une base de E ∗ , notée B ∗ . Comme les bases
B de E et B ∗ de E ∗ ont le même nombre d’éléments, on a :

dim(E) = dim(E ∗ ) = n.

2
Définition 2 On appelle hyperplan de E, le noyau d’une forme linéaire non nulle sur
E.

Théorème 2 Un hyperplan est un sous espace vectoriel de E de dimension n − 1.

Preuve :
Soit H un hyperplan de E. Il existe f une forme linaire non nulle sur E telle que :

H = Ker (f ) = {x ∈ E : f (x) = 0}.

Puisque f est non nulle, elle est surjective. En effet, on a Im(f ) est un s.e.v. de IK
vérifiant :
{0IK } Im(f ) ⊂ IK.
Or, les seules s.e.v. de IK sont {0IK } et IK. Donc Im(f ) = IK et par conséquent
dim(Im(f )) = dim(IK) = 1.
D’après le théorème noyau-image, on a :

dim H = dim Ker(f ) = n − dim(Im(f )) = n − dim(IK) = n − 1.

Réciproquement si H un s.e.v. de E de dimension n−1. H possède une base (f1 , ..., fn−1 )
qu’on complète pour avoir une base (f1 , ..., fn ) de E. H est alors le noyau de la forme
linéaire :
fn∗ : E −→ IK
Xn
x= xj fj 7−→ fn∗ (x) = xn
j=1

En effet, l’inclusion H ⊂ Ker(fn∗ ) est facile. Montrons Ker(fn∗ ) ⊂ H ?


X n n−1
X
Soit x = xj fj ∈ Ker(fn∗ ), on a fn∗ (x) = xn = 0. Donc x = xj fj ∈ H.
j=1 j=1

2 Formes bilinéaires
Définition 3 Une forme bilinéaire sur E est une application :

ϕ : E × E −→ IK
(x, y) 7−→ ϕ(x, y)

vérifiant les deux conditions :


E −→ IK
1. pour tout x ∈ E, l’application : est linéaire, c’est à dire :
y 7−→ ϕ(x, y)

∀y1 , y2 ∈ E, ∀α ∈ IK, on a : ϕ(x, αy1 + y2 ) = αϕ(x, y1 ) + ϕ(x, y2 )

3
E −→ IK
2. pour tout y ∈ E, l’application : est linéaire, c’est à dire :
x 7−→ ϕ(x, y)

∀x1 , x2 ∈ E, ∀α ∈ IK, on a : ϕ(αx1 + x2 , y) = αϕ(x1 , y) + ϕ(x2 , y)

Exemples :
1. On prend E = C([a, b], IR) l’espace des fonctions continues de [a, b] dans IR. Alors
l’application :
ϕ : E × E −→ IR
Z b
(f, g) 7−→ ϕ(f, g) = f (t)g(t)dt
a
est une forme bilinéaire sur E. En effet, en utilisant la linéarité de l’intégrale, on a pour
tout α ∈ IR et pour toutes fonctions f1 , f2 , g1 , g2 , f et g ∈ E :
Z b Z b Z b
ϕ(αf1 + f2 , g) = (αf1 + f2 )(t)g(t)dt = α f1 (t)g(t)dt + f2 (t)g(t)dt
a a a

= αϕ(f1 , g) + ϕ(f2 , g).


De même, on a :
Z b Z b Z b
ϕ(f, αg1 + g2 ) = f (t)(αg1 + g2 )(t)dt = α f (t)g1 (t)dt + f (t)g2 (t)dt
a a a

= αϕ(f, g1 ) + ϕ(f, g2 ).
2. Soient f1 , ..., fp des formes linéaires sur E et (ai,j )1≤i,j≤p des scalaires (des éléments
de IK). Alors l’application :

ϕ : E × E −→ IK X
(x, y) 7−→ ϕ(x, y) = ai,j fi (x)fj (y)
1≤i,j≤p

X
est une forme bilinéaire. En effet, en utilisant la linéarité de la somme et des formes
linéaires fk , 1 ≤ k ≤ p, on montre la bilinéarité de ϕ.

L’ensemble des formes bilinéaires sur E est noté Bil(E). C’est un espace vectoriel sur IK.

Définition 4 On dit qu’une forme bilinéaire ϕ sur E est symétrique si ϕ(x, y) =


ϕ(y, x) pour tous x, y ∈ E.

Définition 5 On dit qu’une forme bilinéaire ϕ sur E est anti-symétrique si ϕ(x, y) =


−ϕ(y, x) pour tous x, y ∈ E.

4
Définition 6 La matrice d’une forme bilinéaire ϕ dans la base B = (e1 , ..., en ) de E
est la matrice carrée d’ordre n :
A = (ϕ(ei , ej ))1≤i,j≤n .

Théorème 3 Soit ϕ une forme bilinéaire sur E et A la matrice de ϕ dans la base


B = (e1 , ..., en ) de E. Alors :
∀x, y ∈ E, on a : ϕ(x, y) = X t AY.
   
x1 y1
où X = (x)B =  ...  et Y = (y)B =  ... 
   
xn yn
(x)B (resp. (y)B ) est la matrice colonne formée des coordonnées du vecteur x(resp.
y)dans la base B.

Preuve : En utilisant la bilinéarité de ϕ, on a :


n
! n n n
! n n
X X X X X X
ϕ(x, y) = ϕ xi ei , y = xi ϕ(ei , y) = xi ϕ e i , yj ej = xi yj ϕ(ei , ej )
i=1 i=1 i=1 j=1 i=1 j=1

n
 
X
 yj ϕ(e1 , ej ) 
 j=1 
  n n
.. X X
Or AY =   et X t AY = X t (AY ) = xi yj ϕ(ei , ej ).
 
 n . 
 X  i=1 j=1
 yj ϕ(en , ej ) 
j=1
Donc
ϕ(x, y) = X t (AY ).
Théorème 4 Une application ϕ de E × E dans IK est une forme bilinéaire sur E si,
et seulement si, il existe une matrice A = (ai,j )1≤i,j≤n dans Mn (IK) telle que :
X
∀(x, y) ∈ E × E , ϕ(x, y) = ai,j e∗i (x)e∗j (y).
1≤i,j≤n

Preuve : Si ϕ est bilinéaire, on a dans une base B = (e1 , ..., en ) de E :


X X
ϕ(x, y) = ai,j xi yj = ai,j e∗i (x)e∗j (y).
1≤i,j≤n 1≤i,j≤n

où B ∗ = (e∗1 , ..., e∗n ) est la bas duale de B et ai,j = ϕ(ei , ej ) , 1 ≤ i, j ≤ n.


La réciproque est facile.

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Théorème 5 Une forme bilinéaire ϕ sur E est symétrique (resp. anti-symétrique) si,
et seulement si, sa matrice A dans une base quelconque B de E est symétrique (resp.
anti-symétrique)

Preuve : Si ϕ est symétrique (resp. anti-symétrique), alors ϕ(ei , ej ) = ϕ(ej , ei ) (resp.


ϕ(ei , ej ) = −ϕ(ej , ei )) pour tous 1 ≤ i, j ≤ n.
Donc, la matrice A de ϕ dans B est symétrique (resp. anti-symétrique).

Réciproquement si la matrice A de ϕ dans B est symétrique (resp. anti-symétrique),


alors pour tous x, y dans E, on a :

ϕ(y, x) = Y t (AX) = (Y t (AX))t = X t At Y = X t (AY ) = ϕ(x, y)

(resp. ϕ(y, x) = Y t (AX) = (Y t (AX))t = X t At Y = −X t (AY ) = −ϕ(x, y)).

Théorème 6 Soient B1 et B2 deux bases de E et P la matrice de passage de B1 à B2 .


Si A1 et A2 sont les matrices d’une forme bilinéaire ϕ sur E dans les bases B1 et B2
respectivement, alors on a :

A2 = P t A1 P.

Preuve : Soient x, y dans E, on note respectivement X1 et X2 les matrices colonnes


formées des coordonnées de x dans les bases B1 et B2 et Y1 et Y2 les matrices colonnes
formées des coordonnées de y respectivement dans les bases B1 et B2 .
D’une part, on a :
ϕ(x, y) = X1t A1 Y1 = X2t A2 Y2
D’autre part, on déduit de l’action d’un changement de base sur les coordonnées d’un
vecteur que :
X1 = P X2 et Y1 = P Y2
Donc
ϕ(x, y) = X1t A1 Y1 = (P X2 )t A1 (P Y2 ) = X2t (P t A1 P )Y2 = X2t A2 Y2 .
D’où : A2 = P t A1 P .

Définition 7 Le discriminant dans une base B = (e1 , ..., en ) de E d’une forme


bilinéaire ϕ est le déterminant de la matrice A = (ϕ(ei , ej ))1≤i,j≤n de ϕ dans cette
base. Il est noté ∆B (ϕ).

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