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Faculté de Mathématiques Année 2021 - 2022

2ème année Lic.RO section B


Algèbre 4

Chapitre 2
Formes bilinéaires et formes quadratiques

1 Formes bilinéaires
Etant donnés deux K-espaces vectoriels E et F , l’objet de ce chapitre est l’étude des formes bilinéaires f
définies, de manière générale, de E × F à valeurs dans K et linéaire par rapport à chacune de ses deux
composantes. Cependant, pour être en conformité avec le programme, nous nous restreindrons au cas
particulier où F = E.

Définition 1. Soit E un K-espace vectoriel. Une forme bilinéaire sur E est une application
f : E × E −→ K vérifiant, pour tous x1 , x2 , y1 , y2 ∈ E et tout α ∈ K,

(1) f (x1 + x2 , y1 ) = f (x1 , y1 ) + f (x2 , y1 ),

(2) f (x1 , y1 + y2 ) = f (x1 , y1 ) + f (x1 , y2 ),

(3) f (αx1 , y1 ) = αf (x1 , y1 ),

(4) f (x1 , αy1 ) = αf (x1 , y1 ).

Les conditions (1) et (3) signifient que f est linéaire par rapport à la première composante et les
conditions (2) et (4) que f est linéaire par rapport à la seconde composante.

Remarque 1. Soit f : E × E −→ K une application. Pour x, y ∈ E posons

fx : E −→ K fy : E −→ K
et
y 7−→ fx (y) = f (x, y) x 7−→ fy (x) = f (x, y)

L’application f est une forme bilinéaire sur E si et seulement si, pour tous x, y ∈ E, fx et fy sont des
formes linéaires sur E.

1.1 Espace des formes bilinéaires


L’ensemble des formes bilinéaires sur E est noté B(E). On vérifie facilement que si f, g ∈ B(E) et α ∈ K
alors f + g et αf sont aussi dans B(E). On a alors

Théorème 1. L’ensemble B(E) des formes bilinéaires sur E est un espace vectoriel sur K.

1
Exemples 1. 1. L’application
f : K × K −→ K
(x, y) 7−→ f (x, y) = xy
est une forme bilinéaire sur K.

2. L’application
f : R2 × R2 −→ R
(u, v) 7−→ f (u, v) = x1 y2 − x2 y1
où u = (x1 , x2 ), v = (y1 , y2 ) est une forme bilinéaire sur R2 .

3. Pour tous u = (x1 , x2 , x3 ), v = (y1 , y2 , y3 ) ∈ R3 , l’application

f : R3 × R3 −→ R
(u, v) 7−→ f (u, v) = x1 y1 + x2 y2 + x3 y3

est une forme bilinéaire sur R3 .

4. Soit E un K-espace vectoriel et soient φ, ψ deux formes linéaires sur E. L’application

f : E × E −→ K
(x, y) 7−→ f (x, y) = φ(x)ψ(y)

est une forme bilinéaire sur E appelée produit tensoriel de φ et ψ. Elle est notée f = φ ⊗ ψ.

Exercice 1. Soit E un K-espace vectoriel. Montrer qu’une application f : E × E −→ K est une forme
bilinéaire sur E si et seulement si, pour tous x1 , x2 , y1 , y2 ∈ E et tous α, β ∈ K,

(1) f (αx1 + x2 , y1 ) = αf (x1 , y1 ) + f (x2 , y1 ),

(2) f (x1 , βy1 + y2 ) = βf (x1 , y1 ) + f (x1 , y2 ).


Montrer que les conditions (1) et (2) sont équivalentes à la condition (3) suivante:

(3) f (αx1 + x2 , βy1 + y2 ) = αβf (x1 , y1 ) + αf (x1 , y2 ) + βf (x2 , y1 ) + f (x2 , y2 ).

1.2 Formes bilinéaires et matrices


Nous avons vu qu’en dimension finie, à toute application linéaire est associée une matrice et réciproque-
ment, à toute matrice correspond une application linéaire. Il en est de même pour les formes bilinéaires.

Soit E un K-espace vectoriel de dimension n et soit B = {u1 , u2 , ..., un } une base de E. Pour tous
x, y ∈ E, on a
Xn Xn
x= xi ui et y = yj uj .
i=1 j=1

Soit f une forme bilinéaire sur E, on a:


n n
! n X
n
X X X
f (x, y) = f xi ui , yj uj = xi yj f (ui , uj ) (1)
i=1 j=1 i=1 j=1

Posons f (ui , uj ) = aij pour i, j ∈ {1, ..., n}. On obtient la matrice carrée A = (aij )1≤i,j≤n ∈ Mn (K) appelée
matrice de la forme bilinéaire f relativement à la base B.

2
Réciproquement, à toute matrice A = (aij )1≤i,j≤n ∈ Mn (K) correspond une forme bilinéaire f sur E
définie par:
Xn Xn
f (x, y) = xi yj aij
i=1 j=1

où les xi (resp. yj ) sont les coordonnées de x (resp. y) dans la base B de E considérée plus haut.
On définit ainsi une bijection
ϕ : B(E) −→ Mn (K)
f 7−→ A
qui est, en fait, un isomorphisme d’espaces vectoriels. D’où le théorème

Théorème 2. Si E est un K-espace vectoriel de dimension n alors B(E) est un K-espace vectoriel de
dimension n2 isomorphe à Mn (K).

1.3 Représentation matricielle d’une forme bilinéaire


Revenons à l’équation (1) ci-dessus, on a
n X
X n
f (x, y) = xi yj f (ui , uj )
i=1 j=1
Xn
= xi (y1 f (ui , u1 ) + y2 f (ui , u2 ) + · · · + yn f (ui , un ))
i=1
 
y1 f (u1 , u1 ) + y2 f (u1 , u2 ) + · · · + yn f (u1 , un )
 y1 f (u2 , u1 ) + y2 f (u2 , u2 ) + · · · + yn f (u2 , un ) 
= (x1 , · · · , xn ) 
 
.. 
 . 
y1 f (un , u1 ) + y2 f (un , u2 ) + · · · + yn f (un , un )
 
f (u1 , u1 ) f (u1 , u2 ) · · · f (u1 , un )  
 f (u2 , u1 ) f (u2 , u2 ) · · · f (u2 , un )  y1
  .. 
= (x1 , · · · , xn ) 

.. .. ..  . 
 . . . 
yn
f (un , u1 ) f (un , u2 ) · · · f (un , un )
   
x1 y1
 ..   .. 
Posons x = [x]B =  .  le vecteur colonne de x dans la base B, y = [y]B =  .  le vecteur colonne
xn yn
de y dans la base B et A = (aij )1≤i,j≤n où aij = f (ui , uj ). On obtient
f (x, y) = t xAy
t
x étant le vecteur transposé du vecteur colonne x. D’où la proposition

Proposition 1. Soient E un K-espace vectoriel de dimension n, B = {u1 , u2 , ..., un } une base de E, f une
forme bilinéaire sur E et A = (aij )1≤i,j≤n la matrice de Mn (K) dont les coefficients sont aij = f (ui , uj ).
Alors pour tous x = [x]B , y = [y]B ∈ E (écrits en colonne), on a

f (x, y) = t xAy.

3
Remarque 2. Puisque f (x, y) ∈ K alors f (x, y) = t (f (x, y)). D’où

f (x, y) = t xAy = t (t xAy) = t y t Ax.

1.4 Changement de bases.


Nous allons voir comment une matrice représentant une forme bilinéaire relativement à une certaine base
est transformée lorsqu’on opère un changement de base.

Soit E un K-espace vectoriel de dimension n et soient B et B 0 deux bases de E.


Posons P = pass(B, B 0 ) = M at(IdE , B 0 , B) la matrice de passage de la base B à la base B 0 .
Pour tout x ∈ E, [x]B = X et [x]B0 = X 0 sont les vecteurs colonnes des coordonnées de x dans les bases
B et B 0 respectivement. On rappelle que X = P X 0 .
Soit f ∈ B(E) une forme bilinéaire sur E et soient A la matrice de f dans la base B et A0 la matrice
de f dans la base B 0 . Alors pour tous x et y dans E on a, d’une part

f (x, y) = t XAY = t (P X 0 )A(P Y 0 ) = t X 0 (t P AP )Y 0

et d’autre part
f (x, y) = t X 0 A0 Y 0 .
On déduit que
A0 = t P AP.
On dit alors que les matrices A et A0 sont congruentes.

Proposition 2. Soient E un K-espace vectoriel, B, B 0 deux bases de E, P la matrice de passage de


B à B 0 et A (respectivement A0 ) la matrice d’une forme bilinéaire f sur E relativement à la base B
(respectivement à la base B 0 ). Alors
A0 = t P AP.

Définition 2. Deux matrices carrées A et B sont dites congruentes s’il existe une matrice inversible P
telle que B = t P AP .

1.5 Rang d’une forme bilinéaire


Comme deux matrices congruentes sont équivalentes alors elles ont même rang. On a alors

Définition 3. Le rang d’une forme bilinéaire f sur E, noté rg f , est le rang de toute matrice représentant
f.
f est dite dégénérée si rg f < dim E = n. Elle est dite non dégénérée si rg f = dim E = n.

Donc si A est la matrice de f par rapport à une base de E, on a

4
f non dégénérée ⇐⇒ A inversible ⇐⇒ det A 6= 0

Exemple 1. Pour tous x = t (x1 , x2 , x3 ), y = t (y1 , y2 , y3 ) ∈ R3 on considère l’application

f : R3 × R3 −→ R
(x, y) 7−→ f (x, y) = x1 y1 + x1 y2 − x1 y3 + x2 y1 − 3x2 y3 − x3 y1 − 3x3 y2 − 3x3 y3 .

On vérifie que f est une forme bilinéaire sur R3 .


Détermination de la matrice A de f relativement à la base canonique E = {e1 , e2 , e3 } de R3 .
On a A = (aij )1≤i,j≤3 où aij = f (ei , ej ). Donc

a11 = f (e1 , e1 ) = 1 a12 = f (e1 , e2 ) = 1 a13 = f (e1 , e3 ) = −1,


a21 = f (e2 , e1 ) = 1 a22 = f (e2 , e2 ) = 0 a23 = f (e2 , e3 ) = −3,
a31 = f (e3 , e1 ) = −1 a32 = f (e3 , e2 ) = −3 a33 = f (e3 , e3 ) = −3.
Par suite  
1 1 −1
A= 1 0 −3 et f (x, y) = t xAy.
−1 −3 −3
Remarquons que aij est simplement le coefficient de xi yj . C’est toujours le cas lorsqu’il s’agit de la
base canonique.
Soit maintenant B = {u1 = (1, −1, 3), u2 = (0, 1, −1), u3 = (0, 3, −2)} une autre base de R3 et soit
A = (bij )1≤i,j≤3 la matrice de f relativement à la base B. On a bij = f (ui , uj ). Donc
0

b11 = f (u1 , u1 ) = −16 b12 = f (u1 , u2 ) = −1 b13 = f (u1 , u3 ) = −10,


b21 = f (u2 , u1 ) = −1 b22 = f (u2 , u2 ) = 3 b23 = f (u2 , u3 ) = 9,
b31 = f (u3 , u1 ) = −10 b32 = f (u3 , u2 ) = 9 b33 = f (u3 , u3 ) = 24.

Ce qui donne  
−16 −1 −10
A0 =  −1 3 9 .
−10 9 24
Détermination de A0 par la formule de changement de base. Soit P la matrice de passage de la base E
à la base B. On a  
1 0 0
P = pass(E , B) = M at(IdR3 , B, E ) = −1 1 3 .
3 −1 −2
Par suite
     
1 −1 3 1 1 −1 1 0 0 −16 −1 −10
t
P AP = 0 1 −1  1 0 −3 −1 1 3  =  −1 3 9  = A0 .
0 3 −2 −1 −3 −3 3 −1 −2 −10 9 24

On vérifie (par échelonnement) que rg A = 2 = rg A0 . D’où rg f = 2 et donc f est dégénérée.

2 Formes bilinéaires symétriques et formes quadratiques


Nous allons nous intéresser, dans la suite de ce cours, à l’étude du cas particulier des formes bilinéaires
symétriques sur un espace vectoriel E i.e. qui vérifient, pour tous x, y ∈ E, f (x, y) = f (y, x).

5
Définition 4. soit f une forme bilinéaire sur E. f est dite

• symétrique si pour tous x, y ∈ E, f (x, y) = f (y, x).

• antisymétrique si pour tous x, y ∈ E, f (x, y) = −f (y, x).

• alternée si f (x, x) = 0 pour tout x ∈ E.

Remarque 3. 1. Si f est alternée alors pour tous x, y ∈ E,

0 = f (x + y, x + y) = f (x, x) + f (x, y) + f (y, x) + f (y, y) = f (x, y) + f (y, x)

et donc f (x, y) = −f (y, x). On en déduit que

f alternée ⇒ f antisymétrique.

2. Si f est antisymétrique alors f (x, y) = −f (y, x) pour tous x, y ∈ E et pour y = x on obtient


f (x, x) = −f (x, x) i.e. 2f (x, x) = 0. Si la caractéristique de K est différente de 2 alors f (x, x) = 0
(car un corps est un anneau intègre) et donc f est alternée. En d’autres termes, si la caractéristique
de K est différente de 2 alors on a l’équivalence

f alternée ⇔ f antisymétrique.

Rappel: la caractéristique d’un anneau A, notée car(A), est le plus petit entier naturel non nul
n tel que n.1A = 0A . Siun tel entier
 n’existe
 pas, l’anneau A est dit de caractéristique nulle.
Z Z
Par exemple, car = 2, car = n (n ∈ N∗ ), car(R) = car(C) = 0.
2Z nZ

Exercice 2. Montrer qu’une application f : E × E −→ K est une forme bilinéaire symétrique sur E si
et seulement si elle vérifie
f (αx + x0 , y) = αf (x, y) + f (x0 , y) et f (x, y) = f (y, x), ∀x, x0 , y ∈ E, ∀α ∈ K.

Exercice 3. Montrer que l’ensemble BS(E) des formes bilinéaires symétriques sur E et l’ensemble
BA(E) des formes bilinéaires antisymétriques sur E sont des sous-espaces vectoriels de B(E).

Proposition 3. Si la caractéristique de K est différente de 2 alors toute forme bilinéaire sur E s’écrit de
manière unique comme somme d’une forme bilinéaire symétrique et d’une forme bilinéaire antisymétrique.
Autrement dit, B(E) = BS(E) ⊕ BA(E).

Preuve. On veut motrer que si f est une forme bilinéaire sur E alors il existe une forme bilinéaire
symétrique g et une forme bilinéaire antisymétrique h telles que f = g + h. Dans ce cas on a:
f (x, y) = g(x, y) + h(x, y) et f (y, x) = g(y, x) + h(y, x) = g(x, y) − h(x, y), ∀x, y ∈ E.

6
D’où l’on obtient l’unique solution

f (x, y) + f (y, x) f (x, y) − f (y, x)


g(x, y) = et h(x, y) = (car car(K) 6= 2).
2 2
On vérifie que g est bien une forme bilinéaire symétrique et h une forme bilinéaire antisymétrique.

Cas où E est de dimension finie: Supposons dim(E) = n. Soit f une forme bilinéaire sur E et soit
A = (aij )i,j la matrice de f relativement à une base B = {v1 , . . . , vn } de E. On a alors

f symétrique ⇔ A = t A (i.e. A symétrique).

Si car(K) 6= 2, alors
f antisymétrique ⇔ A = −t A (i.e. A antisymétrique).

Corollaire 1. Si car(K) =6 2 alors toute matrice de Mn (K) s’écrit, de manière unique, comme somme
d’une matrice symétrique et d’une matrice antisymétrique.

Exercice 4. Montrer que l’ensemble MS n (K) des matrices symétriques d’ordre n à coefficients dans
n(n + 1)
K est un sous-espace vectoriel de Mn (K) de dimension .
2

2.1 Formes quadratiques


A toute forme bilinéaire symétrique f sur un K-espace vectoriel E correspond une application particulière
q : E → K appelée forme quadratique associée à f. De même, à toute forme quadratique q est associée
une forme bilinéaire f appelée forme polaire de q.
Il est important de noter qu’une forme quadratique n’est pas une application linéaire.

Définition 5. Soit f une forme bilinéaire symétrique sur E. On appelle forme quadratique associée à
f l’application

q : E −→ K
x 7−→ q(x) = f (x, x)

Propriété 1.
∀x ∈ E, ∀α ∈ K, q(αx) = α2 q(x).
En particulier, pour α = 0, q(0) = 0.

7
Attention. Une forme quadratique n’est pas une forme linéaire.

Théorème 3. On suppose que car(K) 6= 2. Soit q : E −→ K une application. Alors q est une forme
quadratique sur E si:

(i) ∀x ∈ E, q(−x) = q(x),

(ii) l’application f : E × E −→ K définie par


1
f (x, y) = [q(x + y) − q(x) − q(y)] , ∀x, y ∈ E
2
est bilinéaire.

Dans ce cas, f s’appelle la forme polaire de q.


Preuve. Il s’agit de montrer que si les conditions (i) et (ii) sont vérifiées alors f est une forme bilinéaire
symétrique et q est la forme quadratique associée à f . Il est immédiat, d’après (ii), que f est symétrique,
(donc f est une forme bilinéaire symétrique). Montrons que q est la forme quadratique associée à f , i.e.
∀x ∈ E, q(x) = f (x, x).
De l’équation (ii), pour tous x, y ∈ E,
2f (x, y) = q(x + y) − q(x) − q(y). (2)
Donc
2f (x, x + y) = q(2x + y) − q(x) − q(x + y).
Or
f (x, x + y) = f (x, x) + f (x, y) (car f est bilinéaire)
donc
2f (x, x) + 2f (x, y) = q(2x + y) − q(x) − q(x + y).
En utilisant l’equation (2), cette dernière égalité devient
2f (x, x) + q(x + y) − q(x) − q(y) = q(2x + y) − q(x) − q(x + y)
c’est à dire
2f (x, x) = q(2x + y) − 2q(x + y) + q(y).
Pour y = −x, on obtient
2f (x, x) = q(x) − 2q(0) + q(−x).
Or q(0) = 0 (prendre y = 0 dans (ii)) et q(−x) = q(x) (voir (i)) il s’ensuit que
2f (x, x) = 2q(x).
Puisque car(K) 6= 2, alors
q(x) = f (x, x).

2.2 Représentation matricielle d’une forme quadratique.


On suppose dim(E) = n. Si f est représentée par une matrice symétrique A = (aij )1≤i,j≤n dans une base
B de E alors A est aussi la représentation matricielle de la forme quadratique q associée à f .
Le rang de q est le rang de sa forme polaire f , c’est aussi le rang de la matrice A.

8
 
x1
Expression analytique de q : Soit x ∈ E et posons X = [x]B =  ...  l’écriture de x dans la base B.
 
xn
Alors
 
a11 a12 · · · a1n  
 a21 a22 · · · a2n  x1 n n
t   ..  XX
q(x) = f (x, x) = XAX = (x1 , · · · , xn )  .. = aij xi xj .

.. ..   . 
 . . .  i=1 j=1
xn
an1 an2 · · · ann

Comme aij = aji alors


n
aii x2i + 2
P P
q(x) = aij xi xj . (3)
i=1 1≤i<j≤n

L’expression formelle des variables xi , donnée par l’équation (3), est appelée le polynôme quadra-
tique correspondant à la matrice A. Remarquons que si A est une matrice diagonale, alors q admet une
représentation diagonale
q(x) = t XAX = a11 x21 + a22 x22 + · · · + ann x2n
c’est-à-dire que le polynôme quadratique représentant q ne contiendra aucun terme rectangle xi xj , i 6= j.
Toute expression de la forme (3) représente une forme quadratique.

Exemple 2. On considère la forme quadratique q sur E = R2 définie, pour tout u = (x, y) ∈ E, par
q(u) = 3x2 + 5y 2 + 5xy.
Pour trouver la matrice A de la forme quadratique q on doit l’écrire sous la forme donnée par l’équation
(3). On a
5
q(x, y) = 3x2 + 5y 2 + 2 xy
2
 
3 5/2
donc A =
5/2 5
On déduit que la forme polaire f de q est donnée, pour tous u = (x, y), v = (x0 , y 0 ) ∈ E, par
5 5
f (u, v) = 3xx0 + 5yy 0 + xy 0 + x0 y.
2 2
De manière générale, si car(K) 6= 2 alors connaissant l’expression de q(x) donnée par la formule (3)
ci-dessus, la forme polaire f est donnée par
n
P P
f (x, y) = aii xi yi + aij (xi yj + xj yi )
i=1 1≤i<j≤n

qui s’obtient en remplaçant x2i par xi yi et 2xi xj par xi yj + xj yi pour 1 ≤ i < j ≤ n.

2.3 Orthogonalité
Nous avons déjà abordé la notion d’orthogonalité dans le chapitre sur les formes linéaires. L’orthogonalité
dont il est question dans ce paragraphe, et dans toute la suite du cours, concerne les formes bilinéaires.

Soit E un K-espace vectoriel et f une forme bilinéaire symétrique sur E.

9
Définition 6. Deux vecteurs x et y de E sont dits orthogonaux par rapport à f si f (x, y) = 0 (ou par
symétrie, si f (y, x) = 0). On écrit alors x ⊥f y ou x⊥y (s’il n’y aucun risque de confusion).

Définition 7. Un vecteur x de E est dit orthogonal à une partie A de E s’il est orthogonal à tout élément
de A ( i.e. ∀y ∈ A, f (x, y) = 0); On écrit alors x⊥A.
L’ensemble des éléments de E qui sont orthogonaux à A est un sous-espace vectoriel de E appelé
l’orthogonal de A relativement à f . Il est noté A⊥ (ou A⊥f ).

A⊥ = {x ∈ E / x⊥A} = {x ∈ E / x⊥y, ∀y ∈ A} = {x ∈ E / f (x, y) = 0, ∀y ∈ A}

Exercice 5. Soient A et B deux parties d’un K-espace vectoriel E. Vérifier que A⊥ est un sous-espace
vectoriel de E, puis montrer les propriétés suivantes:

1. A ⊂ B =⇒ B ⊥ ⊂ A⊥ .

2. A⊥ = hAi⊥ .

2.4 Noyau d’une forme bilinéaire symétrique et éléments isotropes


Jusqu’ici, la notion de noyau est réservée au seules applications linéaires. Cependant, bien qu’une forme
bilinéaire f ne soit pas une application linéaire, on définit néanmoins son noyau, par abus de language.
Pour faire la distinction avec le noyau d’une application linéaire, il est conseillé de le noter N (f ) au lieu
de kerf.
Soit f une forme bilinéaire symétrique sur un K-espace vectoriel E. On rappelle que le dual E ∗ de E
est l’ensemble des formes linéaires ϕ : E → K. Soit l’application
fˆ : E −→ E ? fx : E −→ K

x 7−→ fˆ(x) = fx y 7−→ fx (y) = f (x, y)

L’application fˆ est linéaire. En effet, pour tous x, y ∈ E et tout α ∈ K, on a


fˆ(αx + y) = fαx+y , où fαx+y (z) = f (αx + y, z), ∀z ∈ E
= αf (x, z) + f (y, z), ∀z ∈ E
= αfx (z) + fy (z), ∀z ∈ E
= (αfx + fy )(z), ∀z ∈ E
d’où fαx+y = αfx + fy . Et par suite fˆ(αx + y) = αfˆ(x) + fˆ(y), ∀x, y ∈ E, ∀α ∈ K.
Le noyau de fˆ est
ker fˆ = {x ∈ E / fx = 0E ? } = {x ∈ E / f (x, y) = 0, ∀y ∈ E} = E ⊥ .

Définition 8. On appelle noyau de la forme bilinéaire symétrique f (ou de la forme quadratique q associée
à f ), le noyau de l’application linéaire fˆ. Il est noté N (f ) (ou N (q)).
Donc N (f ) = N (q) = ker fˆ = E ⊥ .

10
Attention: Le noyau de f n’est pas l’ensemble {(x, y) ∈ E × E/f (x, y) = 0} (cet ensemble n’est,
d’ailleurs, même pas un espace vectoriel en général).

Proposition 4. Soit f une forme bilinéaire symétrique sur un K-espace vectoriel E de dimension n,
B = {v1 , . . . , vn } une base de E, A la matrice de f relativement à la base B et B ? = {v1? , . . . , vn? } la
base duale de B. Alors, la matrice de l’application fˆ relativement aux bases B et B ? est aussi A et on a
N (f ) = ker fˆ = ker A.

Preuve. Montrons que la matrice M = M at(fˆ, B, B ? ) de fˆ relativement aux bases B et B ? est égale à
A.
Pour cela, posons

fˆ(v1 ) . . . fˆ(vn )
 
b11 ... b1n v1?
 .. ... ..  ..
M = . .  .
bn1 ... bnn vn?

Il s’agit de montrer que A = M , i.e. bij = f (vi , vj ), ∀i, j.


On a fˆ(vj ) = b1j v1? + b2j v2? + · · · + bnj vn? = fvj , ∀1 ≤ j ≤ n.
Donc, pour 1 ≤ i ≤ n,

fvj (vi ) = b1j v1? (vi ) + b2j v2? (vi ) + · · · + bnj vn? (vi ) = bij

car vk? (vi ) = δki .


Donc bij = f (vj , vi ) = f (vi , vj ), ∀1 ≤ i, j ≤ n (car f est symétrique).
Par suite M = A et N (f ) = ker fˆ = ker A.
Par conséquent, f est non dégénérée si et seulement si N (f ) = {0E }.

Exercice 6. Soient F, G deux s.e.v d’un K-e.v E de dimension finie et f une forme bilinéaire symétrique
sur E. Montrer les propriétés suivantes:

1. F ⊂ (F ⊥ )⊥ ,

2. (F + G)⊥ = F ⊥ ∩ G⊥ ,

3. F ⊥ + G⊥ ⊂ (F ∩ G)⊥ ,

4. dimF + dimF ⊥ = dimE + dim(F ∩ N (f )).

5. On suppose que f est non dégénérée, montrer que

(a) dimF + dimF ⊥ = dimE i.e. E = F ⊕ F ⊥ ,


(b) F = (F ⊥ )⊥ ,
(c) F ⊥ + G⊥ = (F ∩ G)⊥ .

Eléments isotropes
Etant donnée une forme quadratique q sur un e.v. E, nous allons examiner de plus près les éléments
de E qui annulent q.

11
Définition 9. Soit f une forme bilinéaire symétrique sur E et q la forme quadratique associée à f .

1. Un vecteur x ∈ E est dit isotrope si f (x, x) = q(x) = 0 i.e. x⊥x.

2. L’ensemble des vecteurs isotropes s’appelle le cône isotrope de f ou de q. On le note C(q) ou


C(f ). On a C(q) = {x ∈ E / q(x) = 0}.

3. Un sous-espace vectoriel F de E est dit totalement isotrope si F ⊂ F ⊥ , il est dit isotrope si


F ∩ F ⊥ 6= {0}.

Remarque 4. 1. Le vecteur nul est toujours isotrope (car q(0) = 0).

2. Tout vecteur x ∈ N (f ) est isotrope i.e. N (f ) = E ⊥ ⊂ C(q). En effet, tout x ∈ E ⊥ est orthogonal
à tous les vecteurs de E et en particulier à lui même. Mais l’inclusion dans l’autre sens n’est pas
toujours vraie; il peut exister des vecteurs isotropes en dehors de E ⊥ comme on peut le voir dans
l’exemple suivant:
 
2 x1
Soit la forme bilinéaire symétrique f sur R donnée par f (u, v) = x1 y2 + x2 y1 pour tout u =
  x2
y
et tout v = 1 de R2 .
y2  
0 1
La matrice de f dans la base canonique C = {e1 , e2 } de R est A =
2
, donc f est non
1 0
dégénérée (car A inversible). On déduit que N (f ) = ker A = E ⊥ = {0R2 }.
La forme quadratique associée à f est q(x, y) = 2xy. Donc les vecteurs isotropes sont du type
(x, 0) ou (0, y) avec x, y ∈ R. On a C(q) = he1 i ∪ he2 i et N (f ) = {0R2 } & C(q).

3. C(q) n’est pas, en général, un sous-espace vectoriel de E, mais c’est un "cône" au sens géométrique,
i.e. il vérifie la propriété suivante

∀α ∈ K, ∀x ∈ C(q), αx ∈ C(q), (car q(αx) = α2 q(x) = 0).

4. D’après (3) de la Définition 9, un sous-espace F est totalement isotrope si et seulement si


∀(x, y) ∈ F 2 , f (x, y) = 0, ce qui revient à dire que la restriction f|F ×F de f à F ×F est l’application
nulle.

2.5 Bases orthogonales relativement à une forme bilinéaire symétrique - Ré-


duction des formes quadratiques
Nous verrons dans cette partie que toute forme quadratique q (ou toute forme bilinéaire symétrique f ) sur
un e.v. E de dimension finie, peut-être représentée par une matrice diagonale, relativement à une certaine
base de E. Cette base est dite alors orthogonale (par rapport à q ou à f ). Nous allons voir que de telles
bases existent toujours et nous donnerons deux méthodes qui permettent leurs obtentions.

Soit E un K-espace vectoriel de dimension finie n muni d’une forme bilinéaire symétrique f et q la
forme quadratique associée.

12
Définition 10. Une base B = {v1 , . . . , vn } de E est dite orthogonale relativement à f (ou q) si

∀ 1 ≤ i, j ≤ n, i 6= j, f (vi , vj ) = 0.

Autrement dit, la matrice de f relativement à une telle base est diagonale de la forme
 
a11 0 ... 0
0 a22 . . . 0 
 
 .. .. . . .. 
 . . . . 
0 0 . . . ann

où aii = f (vi , vi ), 1 ≤ i ≤ n. L’expression de f et celle de q sont alors


   
n n x 1 y1
X X
2  ..   .. 
f (x, y) = aii xi yi et q(x) = f (x, x) = aii xi , où x =  .  et y =  .  .
i=1 i=1 xn B yn B

Théorème 4. (Existence de bases orthogonales)


Pour tout espace vectoriel E de dimension finie n sur un corps K de caractéristique différente de 2 et
pour toute forme bilinéaire symétrique f sur E, il existe une base orthogonale de E par rapport à f .

Preuve. Par récurrence sur n = dimE.


Pour n = 1, il n’y a rien à montrer, le théorème est évident.
Supposons le résultat vrai au rang n − 1, i.e. pour tout K-e.v de dim n − 1, et montrons le au rang n.
Soit donc E un K-e.v de dimension n et f une forme bilinéaire symétrique sur E.
Si f est identiquement nulle (f = 0), alors toute base de E est orthogonale relativement à f .
Sinon, il existe v ∈ E tel que f (v, v) = q(v) 6= 0. Dans ce cas l’application
g = f (v, .) : E → K
définie, pour tout x ∈ E, par g(x) = f (v, x) est une forme linéaire non nulle sur E. Son noyau H est
un hyperplan de E, c’est à dire un sous-espace vectoriel de dimension n − 1 de E. Comme v 6∈ H (car
g(v) = f (v, v) 6= 0) alors E = H ⊕hvi (voir le cours sur les formes linéaires). Or dimH = n−1 donc, d’après
l’hypothèse de récurrence, il existe une base {v1 , . . . , vn−1 } de H orthogonale pour f|H . Par suite, la famille
B = {v1 , . . . , vn−1 , v} est une base orthogonale de E relativement à f car ∀1 ≤ i, j ≤ n − 1, f (vi , v) = 0,
du fait que vi ∈ H et H = {x ∈ E / g(x) = 0} = {x ∈ E / f (v, x) = 0}.

Corollaire 2. Soit A une matrice symétrique sur K (avec car(K) 6= 2). Alors A est congrue à une matrice
diagonale. C’est-à-dire qu’il existe une matrice inversible P telle que t P AP est diagonale.

Algorithme d’obtention de P : Une façon d’obtenir une forme diagonale t P AP est d’effectuer une
suite d’opérations élémentaires sur les lignes du bloc (A, In ) puis d’effectuer les mêmes opérations sur les
colonnes, mais uniquement de la matrice A, jusqu’à obtenir une matrice diagonale à gauche du bloc. La
matrice correspondante obtenue à droite du bloc représente t P . Cette méthode est illustrée dans l’exemple
suivant.

13
 
1 2 −3
Exemple 3. Soit A =  2 5 −4 une matrice symétrique à coefficients réels et soit f la forme
−3 −4 8
bilinéaire symétrique dont la matrice relativement à la base canonique E de R3 est A. Trouvons une
matrice inversible P telle que t P AP soit diagonale.
Formons la matrice bloc (A, I3 ):
 
1 2 −3 | 1 0 0
(A, I3 ) =  2 5 −4 | 0 1 0 .
−3 −4 8 | 0 0 1
Appliquons les opérations élémentaires suivantes sur les lignes du bloc: L2 → L2 − 2L1 , L3 → L3 + 3L1 ,
 
1 2 −3 | 1 0 0
(A, I3 ) → 0 1 2 | −2 1 0 .
0 2 −1 | 3 0 1
Puis appliquons les mêmes opérations sur les colonnes de A uniquement: C2 → C2 − 2C1 , C3 → C3 + 3C1 ,
 
1 0 0 | 1 0 0
(A, I3 ) → 0 1 2 | −2 1 0 .
0 2 −1 | 3 0 1
Appliquons ensuite les opérations: L3 → L3 − 2L2 sur les lignes du bloc et C3 → C3 − 2C2 sur les colonnes
de A:    
1 0 0 | 1 0 0 1 0 0 | 1 0 0
(A, I3 ) → 0 1 2 | −2 1 0 → 0 1 0 | −2 1 0 .
0 0 −5 | 7 −2 1 0 0 −5 | 7 −2 1
   
1 0 0 1 0 0
Posons t P = −2 1 0. On vérifie que t P AP = 0 1 0 .
7 −2  1  0 0 −5
1 −2 7
La matrice P = 0 1 −2 représente la matrice de passage de la base canonique E de R3 à la

0 0 1  
1 0 0
base B = {v1 = (1, 0, 0), v2 = (−2, 1, 0), v3 = (7, −2, 1)} et la matrice A0 = 0 1 0  représente la
0 0 −5
matrice de f relativement à la base B. Cette base B est orthogonale par rapport à f . En effet
t
f (v1 , v2 ) = v1 Av2 = 0,
t
f (v1 , v3 ) = v1 Av3 = 0,
t
f (v2 , v3 ) = v2 Av3 = 0.

Ecriture de f et q dans la base B    


α1 β1
Soient x, y ∈ R3 . Posons [x]B = α2  et [y]B = β2 . Alors
α3 β3
  
1 0 0 β1
f (x, y) = t [x]B A0 [y]B = (α1 , α2 , α3 ) 0 1 0  β2  = α1 β1 + α2 β2 − 5α3 β3 ,
0 0 −5 β3
et   
1 0 0 α1
q(x) = (α1 , α2 , α3 ) 0 1 0
   α2  = α12 + α22 − 5α32
0 0 −5 α3

14
Détermination de α1 , α2 , α3 .
Posons x = (x1 , x2 , x3 ) = [x]E et y = (y1 , y2 , y3 ) = [y]E dans la base  E . On a alors
 canonique
1 2 −3
[x]B = pass(B, E )[x]E = P −1 [x]E et [y]B = P −1 [y]E , avec P −1 = 0 1 2 .
0 0 1
On obtient  
 α1 = x1 + 2x2 − 3x3  β1 = y1 + 2y2 − 3y3
α2 = x2 + 2x3 et β2 = y2 + 2y3
α3 = x3 β3 = y 3
 

Posons 
 L1 (x) = x1 + 2x2 − 3x3
L2 (x) = x2 + 2x3
L3 (x) = x3

Il est clair que L1 , L2 , L3 sont des formes linéaires sur R3 . De plus elles sont linéairement indépendantes
(pourquoi?). Donc elles forment une base du dual (R3 )∗ de R3 . Et on a
q(x) = L21 (x) + L22 (x) − 5L23 (x) = (x1 + 2x2 − 3x3 )2 + (x2 + 2x3 )2 + x23 .
C’est une écriture de q comme somme de carrés de formes linéaires linéairement indépendantes.

Une autre manière d’écrire la forme quadratique q sous-forme d’une somme de carrés de formes linéaires
linéairement indépendantes est donnée par la méthode suivante.

Méthode de Gauss (pour diagonaliser une forme quadratique)


Soit E un K-espace vectoriel de dimension n avec car(K) 6= 2. Soit f une forme bilinéaire symétrique
non nulle sur E représentée, relativement à une base B = {e1 , e2 , . . . , en }, par sa forme quadratique
n
X X
q(x) = aii x2i + 2 aij xi xj , où x = (x1 , x2 , . . . , xn ) dans B.
i=1 1≤i<j≤n

Nous allons montrer qu’il existe des formes linéaires L1 , . . . , Lr sur E (r ≤ n) linéairement indépendantes
et des scalaires α1 , α2 , . . . , αr tels que
r
X r
X
q(x) = αi L2i (x) ou f (x, y) = αi Li (x)Li (y).
i=1 i=1

Supposons qu’on ait déterminé {L1 , . . . , Lr }. Complétons alors pour avoir une base C ? = {L1 , . . . , Lr , . . . , Ln }
de E ? . Soit C = {v1 , . . . , vn } la base de E dont la duale est C ? . On montre que C est une base orthogonale
de E (car Li (vj ) = δij ) et la représentation matricielle de f ou de q par rapport à cette base est
 
α1 . . . 0 . . . 0
 .. . . . .. .. 
. . .
0 . . . α . . . 0
 
 r 
. .. . . .. 
 .. . . .
0 ... 0 ... 0

Le procédé de Gauss distingue deux cas:


Premier cas: les aii ne sont pas tous nuls.
1 ∂q(x) Pn
Supposons, sans perte de généralité, que a11 6= 0 et posons L1 (x) = = a11 x1 + a1j xj .
2 ∂x1 j=2
L1 est une forme linéaire sur E et on a
q(x) = a−1 2
11 L1 (x) + q1 (x)

15
où q1 est une forme quadratique indépendante de x1 .
Deuxième cas: les aii sont tous nuls. Comme f est non nulle alors les aij , pour i 6= j, ne sont pas
tous nuls. Supposons, sans perte de généralité, que a12 6= 0. Posons alors
n n
1 ∂q(x) X 1 ∂q(x) X
L1 (x) = = a12 x1 + a2j xj et L2 (x) = = a12 x2 + a1j xj .
2 ∂x2 j=3
2 ∂x1 j=3

On obtient
1 2 2
q(x) = a−1

12 (L1 (x) + L2 (x)) − (L1 (x) − L2 (x)) + q1 (x)
2
où q1 est une forme quadratique indépendante de x1 et x2 .

Exemple: Diagonaliser la forme quadratique sur R3 .

q(x1 , x2 , x3 ) = x21 + 5x22 + 8x23 + 4x1 x2 − 6x1 x3 − 8x2 x3

Par la méthode de Gauss. Soit x = (x1 , x2 , x3 ) dans la base canonique E de R3 .


1 ∂q(x)
Puisque a11 = 1 6= 0, posons L1 (x) = = x1 + 2x2 − 3x3 .
2 ∂x1
On a q(x) = a−1 2
11 L1 (x) + q1 (x) où

q1 (x) = q(x) − L21 (x), (car a11 = 1)


= x22 − x23 + 4x2 x3 ,

q1 est une forme quadratique indépendante de x1 .


Appliquons le procédé de Gauss à q1 .
1 ∂q1 (x)
Puisque a22 = 1 6= 0, posons L2 (x) = = x2 + 2x3 .
2 ∂x2
On a q1 (x) = a−1 2
22 L2 (x) + q2 (x).
D’où q2 (x) = q1 (x) − a−1 2 2
22 L2 (x) = −5x3 .
Par conséquent
q(x) = L21 (x) + L22 (x) − 5L23 (x)
et
f (x, y) = L1 (x)L1 (y) + L2 (x)L2 (y) − 5L3 (x)L3 (y)
avec L1 (x) = x1 + 2x2 − 3x3 , L2 (x) = x2 + 2x3 , L3 (x) = x3 .
Les formes linéaires L1 , L2 , L3 sont linéairement indépendantes donc B ? = {L1 , L2 , L3 } est une base
de (R3 )? .
Soit B = {v1 , v2 , v3 } la base de R3 dont la duale est B ? . La matrice de q relativement à B est
 
1 0 0
A0 = 0 1 0 
0 0 −5

car, comme Li (vj ) = δij , alors f (v1 , v1 ) = q(v1 ) = L21 (v1 ) + L22 (v1 ) − 5L23 (v1 ) = 1, q(v2 ) = 1, q(v3 ) = −5 et
f (vi , vj ) = 0 pour i 6= j. La base B est donc orthogonale. 
1 si i = j
Détermination de B: les vi s’obtiennent par la relation Li (vj ) = δij =
0 si i = 6 j
Après calcul on obtient v1 = (1, 0, 0), v2 = (−2, 1, 0), v3 = (7, −2, 1).

16
la matrice de qrelativement à B est la matrice A0 ci-dessus et la matrice de q relative-
On précise que 
1 2 −3
ment à E est A =  2 5 −4 .
−3 −4 8  
1 −2 7
On vérifie que A0 = t P AP où P = pass(E , B) = 0 1 −2.
0 0 1

Une autre manière d’obtenir la base orthogonale B: Dans la base B, la forme quadratique q
s’écrit:
q(x) = L21 (x) + L22 (x) − 5L23 (x)
On a x = [x]B = (L1 (x), L2 (x), L3 (x))B . Les Li sont, en fait, les coordonnées de x dans B. En effet si
B = {v1 , v2 , v3 } alors, pour x ∈ R3 , on a x = λ1 v1 + λ2 v2 + λ3 v3 . Donc
L1 (x) = λ1 L1 (v1 ) + λ2 L1 (v2 ) + λ3 L1 (v3 ) = λ1 , car Li (vj ) = δij . De même L2 (x) = λ2 et L3 (x) = λ3 .
Donc x = (L1 (x), L2 (x), L3 (x))B .
Soit P la matrice de passage de la base E à la base B. On a [x]E = pass(E , B)[x]B .
Connaissant L1 , L2 , L3 (par le procédé de Gauss), on peut déduire x1 , x2 , x3 qui sont les coordonnées
de x dans E . Par suite on obtient P d’où l’on déduit B. En effet;

 L1 (x) = x1 + 2x2 − 3x3
L2 (x) = x2 + 2x3
L3 (x) = x3

D’où x2 = L2 (x) − 2x3 = L2 (x) − 2L3 (x). On déduit que x1 = L1 (x) − 2L2 (x) + 7L3 (x) et donc
      
x1 1 −2 7 L1 (x) L1 (x)
 x2  =  0 1 −2 L2 (x) = P L2 (x)
x3 0 0 1 L3 (x) L3 (x)
Comme P = pass(E , B) alors v1 = (1, 0, 0), v2 = (−2, 1, 0), v3 = (7, −2, 1).

Remarque 5. Soit f une forme bilinéaire symétrique sur un K-espace vectoriel E de dimension finie.
Soit A la matrice de f relativement à une base E de E et D la matrice diagonale de f relativement à
une base orthogonale de E (par rapport à f ) alors on a D = t P AP .
En général, les coefficients de la diagonale de D ne sont pas les valeurs propres de A (dans l’exemple
précédent, la somme des éléments de la diagonales est égale à (−3) 6= tr(A) = 14).

3 Loi d’inertie de Sylvester


Dans cette partie, le corps de base K est le corps des réels R. La loi d’inertie de Sylvester s’énonce de la
manière suivante:

Théorème 5. Soit E un R-espace vectoriel de dimension n, f une forme bilinéaire symétrique sur E
et q la forme quadratique associée à f . Soit B une base orthogonale de E relativement à laquelle q
admet une représentation matricielle diagonale, i.e. il existe des formes linéaires L1 , . . . , Lr linéairement
r
indépendantes telles que q(x) = αi L2i (x).
P
i=1
Soit P le nombre de coefficients αi strictement positifs et N le nombre de αi strictement négatifs. Alors
toute autre représentation diagonale de f a le même nombre P d’éléments strictement positifs et le même

17
nombre N d’éléments strictement négatifs. Le couple S = (P, N ) s’appelle la signature de q notée sign(q).
Le rang de q est P + N = r.

Remarque 6. Certains auteurs définissent la signature de q par la différence S = P − N .

Preuve. Soit B = {u1 , . . . , un } une base orthogonale de E relativement à laquelle la matrice de f


est diagonale avec P éléments strictement positifs et N éléments strictement négatifs. Supposons que
B 0 = {v1 , . . . , vn } soit une autre base orthogonale de E dans laquelle f est représentée par une matrice
diagonale avec P 0 éléments positifs et N 0 éléments négatifs. Nous pouvons supposer que les éléments
positifs apparaissent, dans chacune des matrices en premières positions.
Puisque rg(f ) = P + N = P 0 + N 0 il suffit de montrer que P = P 0 . Soit F = hu1 , . . . , uP i et
G = hvP 0 +1 , . . . , vn i. Pour tout v ∈ F on a f (v, v) ≥ 0. En effet v = x1 u1 + · · · + xP uP . D’où
f (v, v) = q(v) = x21 q(u1 ) + · · · + x2P q(uP ) ≥ 0 et si q(v) = 0 alors x1 = x2 = · · · = xP = 0 et donc v = 0.
Donc pour tout v ∈ F \ {0} on a f (v, v) > 0. De même pour tout v ∈ G, f (v, v) ≤ 0. Donc F ∩ G = {0}.
Or dim F = P et dim G = n − P 0 . Donc

dim(F + G) = dim F + dim G − dim(F ∩ G) = P + n − P 0 = P − P 0 + n.

Mais dim(F + G) ≤ n donc P − P 0 + n ≤ n et donc P ≤ P 0 .


On montre de manière analogue que P 0 ≤ P (il suffit de considérer G0 = {v1 , . . . , vP 0 } et F 0 =
{uP +1 , . . . , un }). Donc P = P 0 et par conséquent N = N 0 .

Définition 11. Une forme bilinéaire symétrique f sur E, ou la forme quadratique associée q, est dite

1. positive si q(x) = f (x, x) ≥ 0, ∀x ∈ E,

2. définie positive si q(x) = f (x, x) > 0, ∀x ∈ E, x 6= 0,

3. définie si q(x) = f (x, x) = 0 ⇒ x = 0.

Remarque 7. 1. Si f est définie alors f est non dégénérée.


En effet, si x ∈ N (f ) alors f (x, y) = 0, ∀y ∈ E. En particulier f (x, x) = q(x) = 0 d’où x = 0. Il
s’ensuit que N (f ) = {0} et donc f (ou q) est non dégénérée.
La réciproque est fausse. Par exemple pour q(x) = x21 + x22 − x23 sur R3 , on a rg(q) = 3 donc q est
non dégénérée mais q(1, 0, 1) = 0.

2. f positive ⇔ P = rg(f ).

3. f définie positive ⇔ P = dim E = n, sign(q) = (n, 0).

18

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